[Enregistrement électronique]
Le mardi 22 octobre 1996
[Traduction]
Le président: Je souhaite à tous la bienvenue. Nous avons une question à régler rapidement avant d'entendre nos premiers témoins ce matin. Il s'agit du dépôt du sixième rapport du sous-comité du programme et de la procédure, ou rapport du comité de direction. Je crois que tous ont le rapport sous les yeux. Il informe simplement les membres des témoins qui ont manifesté le désir de comparaître pour commenter les projets de loi C-38 et C-60. Si quelqu'un veut débattre du rapport, le débat aura lieu dès maintenant. Sinon, je suis disposé à accepter une motion portant adoption du rapport.
M. Easter (Malpèque): Je propose la motion.
La motion est adoptée
Le président: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer à nos témoins qui ont des exposés à faire ce matin sur le projet de loi C-38, Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Le premier représente la Fédération canadienne de l'agriculture. Il s'agit de son président, Jack Wilkinson, qui n'est pas inconnu des membres et du personnel du comité. Je vous souhaite la bienvenue, Jack. S'il y a d'autres personnes qui vous accompagnent ce matin, vous pouvez les présenter au comité, après quoi je vous invite à faire votre exposé.
M. Jack Wilkinson (président, Fédération canadienne de l'agriculture): Merci beaucoup. C'est une journée splendide pour les agriculteurs.
Le président: C'est bien plus agréable ici.
M. Wilkinson: Oui, si on élève des canards.
Merci beaucoup de nous accueillir ici. Yves Ruel, de notre direction de la politique, est celui à qui vous devez poser les questions difficiles. Je vais essayer de répondre moi-même à celles qui sont faciles.
Notre exposé est relativement bref, puisqu'il se résume à trois pages. Nous avons étudié très longtemps cette question en étroite collaboration avec le personnel d'Agriculture Canada, et nous estimons que la plupart des éléments que nous souhaitions se retrouvent dans cette mesure législative. Nous n'allons donc pas, cette fois, critiquer trop sévèrement la proposition du gouvernement.
Les bureaux d'examen de l'endettement agricole de quelques provinces, et quelques députés aussi, ont soulevé quelques points qui les préoccupent. Je voudrais procéder assez rapidement et traiter de ces préoccupations tout en expliquant de quelle manière, selon nous, on s'est attaqué aux problèmes.
L'une des plus grandes inquiétudes tient au fait que toute la partie de l'ancienne loi sur l'examen de l'endettement qui était d'application volontaire - les agriculteurs pouvaient se présenter au bureau d'examen pour procéder volontairement à un réaménagement de leur dette - ne se retrouve pas dans le projet de loi, ce qui est préoccupant pour certains. Nous croyons comprendre - et nous cherchons toujours à le vérifier - que le ministre entend proposer, parallèlement un service de consultation pour les agriculteurs qui pourrait intervenir encore plus tôt lorsque se manifestent les premiers signes de difficultés financières. Ce service assurerait une continuité entre la planification privée de l'entreprise qui existe en ce moment, les services assurés par les provinces et la dernière étape, celle du bureau d'examen de l'endettement agricole.
Nous sommes certainement en faveur de cette initiative. Bien entendu, il faudra que le service de consultation soit doté de ressources suffisantes, à la discrétion de quiconque le dirigera, pour s'occuper des agriculteurs qui sont aux prises avec de graves difficultés.
Nous voulions que les deux éléments soient séparés pour une raison bien simple. Dans l'ancien régime, lorsqu'un agriculteur se présentait de lui-même devant un bureau pour faire examiner la possibilité de réaménager sa dette, ou bien son cas relevait de la loi ou bien il n'en relevait pas. Dans certaines provinces, dès que le cas relevait de la loi, les créanciers étaient prévenus. Ainsi, un agriculteur qui voulait simplement réaménager sa dette se retrouvait soudain plongé dans de très graves difficultés. Les livraisons d'alimentation et de carburant étaient interrompues, les fournisseurs d'engrais demandaient à se faire payer, etc.
Tout le monde était nerveux parce que, dans certaines provinces, tous les créanciers étaient prévenus, même s'il s'agissait d'un réaménagement volontaire. À nos yeux, c'était une lacune grave qu'on ne puisse pas procéder différemment dans ces cas et dans l'examen approfondi avec information des créanciers. C'est l'une des grandes raisons qui nous ont incités à séparer les deux types de démarches dans le projet de loi. Il s'agissait de permettre un réaménagement volontaire sans que tous les créanciers soient informés et qu'il y ait un examen complet de l'endettement. C'est ce qui nous a portés à réclamer que les deux démarches soient dissociées.
De plus, nous avons ici un service de médiation plutôt qu'un comité. La situation varie là encore d'une province à l'autre. Il n'y avait pas de modèle tout fait, mais nous avons eu l'impression que, dans bien des cas, le président faisait le gros du travail et que les autres membres du comité étaient là à cause de leurs connaissances spécialisées, par exemple, sur les productions de l'exploitation agricole en question. De façon générale, c'est ainsi que les choses finissaient par fonctionner. Il nous semble que beaucoup d'agriculteurs ayant une exploitation familiale se présentaient devant ce comité en croyant qu'il était composé d'agriculteurs et que son rôle consistait presque à mener des pseudonégociations avec le créancier, que le comité prenait le parti de l'agriculteur, que celui-ci pouvait se présenter à la réunion sans inquiétude en croyant que le comité allait l'aider.
Ce n'est pas ce qui se passait, selon nous, et il aurait été préférable de donner l'information sur ce service en conséquence: il s'agit d'un service de médiation, et le mieux que vous puissiez espérer, c'est que le médiateur préserve l'équilibre entre les parties, étant donné la position de force du créancier.
Regardons les choses en face. Quiconque se présente devant un bureau d'examen de l'endettement a déjà, dans la plupart des cas, rompu la relation contractuelle avec le créancier, et se retrouve dans une position relativement faible. Ce dont on a besoin, ce n'est pas d'une suspension des procédures - ce que prévoit le projet de loi - mais de l'intervention d'un médiateur et de ressources pour arriver à s'en sortir. Mais il est clair que l'agriculteur est en position de faiblesse face aux créanciers, et il vaut mieux le savoir lorsqu'on se présente à la rencontre. L'agriculteur fait mieux de se présenter à la réunion avec un plan d'entreprise quinquennal, qui explique comment il va redresser la situation, une position de négociation. Le plus qu'il puisse espérer, c'est que le médiateur préserve un certain équilibre entre les parties pour avoir la possibilité de conclure une entente avec son créancier. Il est bien clair que, s'il avait pu régler le problème dans des conditions agréables au bureau de son directeur de banque, par exemple, l'accord aurait déjà été conclu, et il ne se retrouverait pas devant un bureau d'examen de l'endettement. On a donc besoin des talents d'un médiateur.
C'est donc pourquoi nous avons opté pour un service complet de médiation dans toutes les provinces, de manière que tous sachent à quoi s'attendre en se présentant à la réunion, que les rôles soient très nettement définis et que les agriculteurs soient munis de tout ce qu'il leur faut, peut-on espérer, pour négocier avec le prêteur à partir d'une proposition qui montre que la situation financière de l'exploitation pourra se redresser dans un certain délai.
Le projet de loi donne encore la possibilité au médiateur de faire appel à un spécialiste. Il peut en avoir besoin pour se renseigner sur une production donnée. Nous estimons qu'il doit y avoir un certain équilibre au niveau des compétences du médiateur. Les deux personnes doivent connaître l'agriculture à fond - et nous avons l'impression que la plupart des médiateurs viendront des milieux agricoles, et seront présidents de comité ou peu importe comment on les appelle dans le système actuel - et ils devront avoir les compétences voulues en médiation pour pouvoir bien comprendre le rôle du médiateur et travailler à l'élaboration d'une solution. Tout cela existe donc toujours.
L'autre lacune que nous avons relevée dans l'ancienne loi, et le projet de loi apporte une amélioration à cet égard, est au fond qu'on se retrouvait avec tout un personnel sur le terrain lorsqu'on prévenait les créanciers - ou plutôt lorsque les créanciers communiquaient avec l'agriculteur, ce qui était plus fréquent. Ils lui disaient par exemple que le billet à vue commençait à faire problème et qu'ils allaient en réclamer le paiement. L'agriculteur communiquait avec l'administrateur et un représentant venait chez lui et commençait à recueillir les données financières pour établir l'information objective sur sa situation financière en prévision de l'examen de l'endettement.
Cela se retrouve dans le projet de loi. Sur ce point, nous croyons qu'il faut laisser à l'agriculteur la possibilité de choisir. Le propriétaire d'une exploitation familiale devrait pouvoir choisir de recourir aux services, gratuits, il va sans dire, proposés par le bureau d'examen - un représentant peut venir l'aider dans le travail de réaménagement de la dette ou l'élaboration d'un plan d'entreprise - ou de faire plutôt appel à quelqu'un d'autre en pouvant compter tout de même sur une partie des ressources financières proposées par le programme gouvernemental.
Nous ne croyons pas que le deuxième choix serait très fréquent, étant donné que l'agriculteur devra absorber une partie des coûts. Nous croyons tout de même que ce choix pourrait être fait par les agriculteurs qui ne se sentent pas à l'aise pour communiquer leur information financière ou qui, de façon générale, sont beaucoup plus à l'aise lorsqu'ils font appel à leur comptable ou à d'autres personnes avec lesquelles ils ont l'habitude de travailler régulièrement.
Il y aura des coûts additionnels à assumer pour faire ce type d'étude, pour examiner l'exploitation, passer de la simple comptabilité aux plans quinquennaux, déceler les éléments faibles de l'exploitation pour s'en départir et monter un plan d'attaque convaincant pour les créanciers. Si ce choix existe, les dirigeants d'exploitation familiale pourront soit faire appel à leurs propres comptables ou autres experts et compter sur certaines ressources pour le faire, soit, s'ils sont assez à l'aise pour le faire, continuer de recourir au personnel du bureau d'examen sur le terrain.
Selon nous, il est d'une importance critique de donner ce choix aux familles agricoles.
Je crois que le nombre de cas soumis aux bureaux d'examen a nettement diminué, mais il nous semble absolument crucial de maintenir un régime semblable pour l'avenir. Ce n'est pas la peine de se précipiter pour légiférer si des tarifs diminuent, si la frontière américaine nous est fermée ou si tout un groupe d'éleveurs albertains - j'espère que cela ne se produira jamais - n'arrivent plus à exporter leur boeuf. N'importe quoi peut se produire, et c'est pourquoi il faut toujours avoir un système en place. Ce système est relativement peu coûteux si le nombre de cas n'est pas très élevé. Si le nombre augmente, il faudra du personnel pour faire le travail, bien sûr, parce que, du point de vue politique, il sera impérieux de régler ces cas. Nous pensons donc que cette formule permet de faire des économies à cet égard.
Un point clé à ne pas négliger est qu'il faut veiller à ce qu'il y ait assez de médiateurs ayant la formation voulue et assez de comités d'examen disponibles.
Un autre élément prévu dans le projet de loi nous semble précieux: c'est le comité d'appel mis sur pied pour le créancier et l'exploitation agricole familiale relativement à la suspension des procédures. Un élément qui nous préoccupait dans l'ancienne loi est que l'administrateur rendait une décision - je crois que c'était la même chose dans toutes les provinces - et faisait appel habituellement au président du bureau d'examen et à une ou deux autres personnes pour décider s'il était possible de prolonger la suspension des procédures.
La suspension était le seul moyen à la disposition de l'agriculteur pour faire pression sur le créancier. Le fait que tout soit bloqué lui donnait un peu de pouvoir pour poursuivre les négociations. Je crois qu'il y avait assez de cas préoccupants où la suspension était levée parce que le créancier disait à l'administrateur: « Il n'est absolument pas question de s'entendre avec cet agriculteur. Vous feriez aussi bien de lever la suspension. Nous n'allons pas discuter avec lui, un point c'est tout. » Souvent, l'agriculteur n'était pas mis au courant de ce genre d'intervention. Si, pour quelque raison, une suspension n'est pas prolongée, et si les parties négocient de bonne foi, nous croyons qu'il faut faire appel, et les raisons doivent être données, et données par des personnes totalement étrangères aux délibérations du bureau d'examen de l'endettement.
En pareille situation, je me présenterais devant des pairs, d'autres propriétaires d'exploitation familiale et je demanderais pourquoi la suspension n'a pas été maintenue, et ils pourraient, s'ils le jugeaient bon, annuler la décision de l'administrateur. Bien entendu, si on donne ce droit à l'agriculteur, il faut le donner au créancier également. Il nous semble équitable que, si une suspension est accordée, le créancier puisse être d'avis qu'il ne faut pas la prolonger.
Selon nous, il est important et même crucial que le dispositif d'appel soit indépendant du fonctionnement du bureau d'examen pour qu'il soit considéré comme approprié.
La seule chose qui nous inquiète - je ne suis pas sûr que, au bout du compte, lorsque le règlement sera rédigé, ce sera toujours un motif d'inquiétude - , c'est qu'une période de deux ans doit s'écouler avant qu'on ne puisse se représenter devant le bureau d'examen de l'endettement. Cela est assez acceptable, selon nous, si le propriétaire reste inchangé, car on ne veut pas que tout le monde revienne devant le bureau tous les six mois. En principe, les accords de réaménagement doivent pouvoir survivre un certain temps. Il est vrai que les circonstances changent parfois beaucoup.
Ce que nous redoutons, ce sont les transferts de propriété. Nous croyons comprendre que, s'il y a un transfert très net de propriété, on peut se présenter de nouveau devant le bureau, que le délai de deux ans ne tient plus. Les transferts partiels pourraient aussi être préoccupants. Selon nous, il faut que cela soit précisé assez clairement, de façon à éviter de créer un grave problème. Par exemple, si les taux d'intérêt fluctuent et si le prix des denrées s'effondre après qu'une exploitation a été vendue à un membre de la famille, ou encore s'il y a apport partiel de capitaux parce qu'un membre de la famille commence à participer à l'exploitation, nous ne voudrions pas que ces gens ne puissent pas, pendant une période donnée, recourir au bureau d'examen de l'endettement. Il faudrait examiner les circonstances des transferts partiels, et nous allons continuer à collaborer avec le gouvernement dans l'espoir de régler ce problème. À notre avis, c'est là une précaution qui n'est pas clairement prévue.
Le dernier point concerne lui aussi le service de consultation proposé aux agriculteurs. Le projet de loi dans sa forme actuelle n'est adapté à la situation que dans la mesure où, parallèlement, le service de consultation sera mis en place, car, nous le répétons, il est d'une importance cruciale. Nous tenons à ce que des ressources soient à la disposition des agriculteurs qui proposent d'eux-mêmes de réaménager leur dette et à ce qu'il y ait des signes d'alerte encore plus précoces. Il est absolument essentiel que des ressources suffisantes soient disponibles pour les agriculteurs qui se soumettent volontairement à un réaménagement de leur dette.
Une certaine discrétion s'imposera, car il s'agira d'une alerte précoce, et qu'on ne veut pas que ce service de consultation mette le nez dans la comptabilité et les dossiers d'impôt de toutes les exploitations, et gaspille ainsi l'argent de l'État. Par contre, lorsque des indications donnent à penser qu'un agriculteur a du mal à honorer ses obligations, et lorsque des signes montrent clairement que quelqu'un, à cause des prix fixés par les commissions de produits agricoles ou pour d'autres raisons, est en train de se mettre dans le pétrin, il faut avoir sa disposition toutes les ressources pour faire le travail qui s'impose.
Je ne comprends pas comment les avocats peuvent demander des honoraires aussi élevés, et je ne comprends certainement pas non plus comment les aides-comptables et les experts comptables peuvent exiger des honoraires si élevés, mais il reste que la facture d'un ou deux jours de travail peut être très lourde. Il est tout à fait inacceptable que des gens qui sont aux prises avec des difficultés financières dans leur exploitation ne puissent pas compter sur des ressources limitées pour se tirer d'affaire. On peut faire beaucoup avec des ressources modestes pour les aider à éviter les problèmes par la suite. Cela doit faire partie des services de consultation offerts aux agriculteurs.
Je sais que les audiences du comité ne portent pas là-dessus. C'est simplement une occasion d'exercer des pressions sur Agriculture Canada à ce sujet.
Je crois avoir fait à peu près le tour de ce que nous avons à dire. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions et de traiter des points qui vous préoccupent. Merci.
Le président: Merci, Jack.
Monsieur Landry.
[Français]
M. Landry (Lotbinière): Monsieur Wilkinson, à quelques reprises déjà, nous avons étudié ces rapports relatifs au projet de loi C-38 et personne n'a encore pu répondre à une question très simple que je me pose. Lorsqu'on élabore une loi, il faut prévoir quels en seront les coûts d'application pour chacun des contribuables. En ce qui a trait à ce projet de loi, Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, j'aimerais savoir, pour chaque groupe de personnes engagées dans l'agriculture, sur des périodes de 1 an à 5 ans, de 5 ans à 10 ans, de 10 ans à 15 ans et de 15 ans et plus, le pourcentage exact des personnes qui se sont prévalues de la médiation en matière d'endettement agricole. Est-ce que vous pourriez me fournir ces données?
[Traduction]
M. Wilkinson: Je ne connais aucun moyen d'établir des chiffres exacts là-dessus.
Selon moi, les modifications apportées par le nouveau système vont abaisser les coûts, en ce qui concerne la bureaucratie, par rapport à ceux qu'entraîne la loi actuellement en vigueur. Il y a un regroupement. Comme vous pouvez le constater, il y a essentiellement cinq régions et peut-être six administrateurs. La Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba sont regroupés, il y a un administrateur distinct en Ontario et au Québec, et l'Atlantique forme une seule région, mais il y a là-bas deux administrateurs à cause des longues distances à parcourir.
En soi, le système n'a pas de frais généraux, ou alors très peu. Les fonctionnaires ne sont pas là à toucher leur traitement en attendant que quelqu'un demande l'examen de son endettement. Les médiateurs et le personnel sur le terrain ne sont appelés que lorsqu'il y a des cas à étudier, et ils touchent alors une rémunération à la journée.
Quant aux coûts réels, je crois savoir qu'Agriculture Canada a des chiffres sur les coûts par dossier de l'ancien système d'examen de l'endettement. J'ai l'impression, au jugé, que ce doit être autour de 2 000 $ par dossier.
Les chiffres variaient énormément d'une province à l'autre. Certaines avaient un système très bien rationalisé, et tout pouvait se faire en une seule journée. Dans d'autres provinces, il était plus complexe. Les chiffres fluctuent considérablement d'un dossier à l'autre. Le nouveau système comme l'ancien permet de tenir «autant de réunions qu'il en faut» pour résoudre le problème. Les coûts peuvent être beaucoup plus considérables pour un dossier compliqué que pour un autre, plus simple. Il m'est donc impossible de donner un chiffre.
En ce qui concerne les agriculteurs, nous croyons que, s'ils font appel au personnel sur le terrain pour réaménager leur dette et faire le travail qui s'impose, leurs frais se résument à peu de chose, à moins qu'ils ne veuillent trouver un complément d'information ou faire appel à d'autres experts, en droit ou en comptabilité ou dans les deux domaines, pour examiner la situation de leur exploitation. Compte tenu des modifications qui sont apportées, nous demandons que le gouvernement débloque au moins 2 000 $, et que les frais soient partagés, les exploitations familiales déboursant un certain montant pour les experts engagés et recevant ensuite du gouvernement un remboursement d'au moins 50 p. 100 si elles n'ont pas fait appel aux services du personnel sur le terrain.
Cela ne vous dit pas à combien s'élève le coût global par dossier, je le sais. Tout ce que je peux dire, c'est que, sauf erreur, ces chiffres ont été établis par province pour l'ancien système. En principe, le nouveau sera moins coûteux, mais je ne connais pas les chiffres exacts, puisque les coûts peuvent fluctuer considérablement d'un dossier à l'autre.
[Français]
M. Landry: Monsieur Wilkinson, j'aimerais savoir, si c'est possible, à quel moment, dans une période de 25 ans consacrés à l'agriculture, il y a le plus de demandes. Est-ce que c'est après cinq années, après 20 années ou après 25 années? Je veux savoir à quel moment précis, au cours de 25 années d'agriculture, on demande le plus d'aide pour la médiation en matière d'endettement agricole.
[Traduction]
M. Wilkinson: Je n'ai peut-être pas bien compris votre question.
Il me semble juste de dire que ce sont ceux qui débutent en agriculture qui présentent les risques les plus considérables, tout simplement à cause de l'endettement de départ et du rapport d'endettement. Il est alors crucial que les taux d'intérêt restent stables pendant ces premières années et aussi que le prix des denrées produites reste à peu près stable ou augmente pendant les premières années, parce que la marge de rentabilité est souvent très faible, lorsqu'on débute dans un domaine qui exige un important capital comme l'agriculture.
Ce que nous avons constaté, si nous faisons un retour en arrière, c'est que, lorsque l'examen de l'endettement est devenu indispensable, deux phénomènes se sont produits. Tout d'abord, les taux d'intérêt sont passés d'environ 9 p. 100 qu'ils étaient sur les prêts hypothécaires agricoles à un sommet de 18 p. 100 pour les prêts de la SCA, voire plus pour les prêts de certaines banques. Pendant cette période, le taux préférentiel est monté, jusqu'à 22 p. 100. Peu après, le prix des denrées est tombé, à cause de la guerre commerciale que se livraient les États-Unis et la Communauté européenne, pour s'établir à moins de la moitié de ce qu'il était auparavant, pour certaines denrées.
Ces hausses des taux d'intérêt ont mis tous ceux qui avaient une lourde dette dans une situation très précaire ou les ont forcés à carrément renoncer à leur entreprise. Il n'est pas difficile d'imaginer la situation de quelqu'un qui doit renouveler à 18 p. 100 un prêt hypothécaire de cinq ans qui portait un taux fixe de 9 p. 100. Cela suffit à bousculer l'équilibre financier de n'importe qui. Certains n'ont pas les réserves pour tenir le coup, et si l'endettement est trop lourd, c'est la faillite. Les taux d'intérêt élevés ont fait sombrer des milliers d'agriculteurs. Et il y en a beaucoup d'autres qui ont été achevés par la faiblesse des cours. Dans les secteurs stables, ceux qui avaient une bonne gestion de l'offre, ceux qui avaient un bon régime de stabilisation, il n'y a pas eu autant de carnage. Je crois que, en Saskatchewan, plus de 15 000 agriculteurs ont demandé l'examen de leur endettement en une décennie. La situation variait d'une province à l'autre.
Ma réponse est longue. C'est lorsque le ratio d'endettement est le plus élevé que les risques sont les plus considérables. Lorsque les taux d'intérêt ou le cours des denrées fluctuent brutalement, on se retrouve aux prises avec de graves difficultés. Dans beaucoup de cas dont je me suis occupé, les agriculteurs ont été victimes d'un incendie dans leur exploitation, avec une assurance insuffisante, ou ont eu de la maladie dans leur troupeau, s'il s'agissait d'un élevage porcin, par exemple, ou ont eu des problèmes de production laitière. Il suffisait de problèmes sortant de l'ordinaire pour que l'agriculteur ne puisse pas honorer ses obligations financières. L'agriculture est un secteur à très forte capitalisation. La marge bénéficiaire était très étroite, et ces agriculteurs ont dû renoncer.
[Français]
M. Landry: Merci, monsieur Wilkinson.
[Traduction]
Le président: Merci.
Monsieur Hermanson.
M. Hermanson (Kindersley - Lloydminster): Merci, monsieur le président.
Bonjour, Jack et Yves.
Jack, vous avez parlé de services de consultation pour les agriculteurs. Vous semblez en connaître un peu plus à ce sujet que, nous, les députés, en tout cas les députés de l'opposition. Il n'est pas rare qu'on nous laisse en dehors du circuit autant que possible. Comment, selon vos prévisions, ce service de consultation fonctionnera-t-il? Il n'est pas prévu par le projet de loi C-38. Vous attendez-vous à ce que ce soit un programme à recouvrement de coûts? Est-ce qu'il s'appliquera à l'instigation ou avec la collaboration du personnel mandaté en vertu du projet de loi C-38, autrement dit, les médiateurs chargés d'examiner l'endettement agricole? Est-ce que les médiateurs vont donner ces conseils sur les problèmes d'endettement, ou bien est-ce que c'est un service, un bureau distinct qui va s'en charger? Quelle influence, quelles ressources ce service de consultation aura-t-il?
M. Wilkinson: À dire vrai, tout ce que nous avons vu, ce sont des ébauches. Je ne peux pas concevoir que le gouvernement nous communique à l'avance le texte d'un projet de loi. Je crois comprendre qu'il n'y aura pas de projet de loi; on mettra plutôt en place un programme. Ce que nous avons proposé, c'est que ce programme soit offert parallèlement à l'examen de l'endettement. Laissons les choses en l'état, et nous verrons ce que le gouvernement entend faire.
Le but poursuivi au moyen du programme était de compléter les services et ressources souvent offerts au niveau provincial. Beaucoup de provinces ont des cours de gestion agricole, par exemple. Il nous a semblé qu'il y avait une lacune dans les services offerts à l'ensemble de la collectivité agricole. La gamme des services s'arrêtait là, et l'examen de l'endettement commençait ici. Il existait un grand vide, une espèce de no man's land, dans les efforts pour régler les problèmes financiers graves, sauf pour ceux qui pouvaient compter sur d'excellents services comptables, par exemple. Il faut dire, pour être juste, que tous les services de comptabilité ne sont pas nécessairement bien meilleurs que les services de tenue de livres pour produire des dossiers fiscaux dans certaines circonstances, ce qui suffit souvent lorsque les choses marchent bien.
Retirez le réaménagement volontaire de l'examen de l'endettement. Ajoutez-le à un service qui permet d'intervenir encore plus précocement pour que, lorsque les agriculteurs décèlent les premiers signes de difficultés, ils aient les ressources nécessaires pour essayer de les résoudre. La solution peut être de restructurer les activités agricoles, de vendre une partie des actifs et de recourir davantage à la location. Il se peut que l'agriculteur ait trop dépensé pour acquérir du matériel. Il y a une foule de situations dans lesquelles on peut, à condition de s'y prendre assez tôt, régler les problèmes et permettre à l'exploitation de connaître le succès bien avant qu'on ne doive songer à l'examen de l'endettement.
C'est dans ce sens qu'ont porté nos efforts. Quant aux modalités d'administration, elles varieront d'une province à l'autre, selon moi, car certaines provinces, dans le cadre de leurs activités de vulgarisation, s'occupent beaucoup de la gestion agricole. Nous avons recommandé que les activités fédérales viennent se greffer à celles de ces provinces. Il ne s'agirait pas de remplacer ce que la province fait, mais de proposer des ressources pour aller un peu plus loin lorsque des agriculteurs ont besoin d'un coup de pouce supplémentaire.
Selon nous, les agriculteurs doivent avoir un plan d'entreprise avant d'aller rencontrer le créancier, qu'il s'agisse d'un réaménagement volontaire de la dette ou d'un examen de l'endettement. Si vous pensez pouvoir aller discuter avec un créancier et qu'il va proposer une entente vous permettant de survivre, votre banquier est bien différent du mien. Les banquiers veulent que les paiements soient faits et qu'ils soient faits à temps. Ils veulent un bon rendement. Si vous n'avez pas de bonnes rentrées, ils veulent que vous ayez un emploi assuré en dehors de l'exploitation agricole. D'ailleurs, il y a beaucoup de directeurs de banque et bien d'autres personnes qui ne se soucient pas le moins du monde du reste de votre exploitation agricole, franchement.
Il faut avoir un plan de redressement, si on veut négocier une entente qui permettra de sauver l'exploitation lorsqu'on est aux prises avec des difficultés. Nous pensons que le service de consultation doit offrir de l'aide à cet égard, qu'il doit pouvoir, dans une certaine mesure, accorder de l'argent pour acquitter les factures accumulées par les exploitations familiales.
En dehors de cela, ce sont simplement des négociations et des discussions que nous avons avec le gouvernement.
M. Hermanson: C'est une bonne réponse, Jack, mais vous n'avez pas vraiment abordé les trois points que j'ai énumérés. Vous ne savez pas, mais que recommanderiez-vous en votre qualité de président de la FCA?
Le président: Vous ne saviez pas que Jack était un homme politique?
M. Hermanson: Est-ce qu'il faut essayer de recouvrer les frais de ce programme? Le programme doit-il être prévu par la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole?
M. Wilkinson: Nous sommes d'accord pour dire qu'une partie des coûts pourrait être recouvrée, mais seulement une partie. Il faut avoir un moyen de contrôle pour éviter que tous ne viennent faire vérifier leur comptabilité sous prétexte qu'ils pensent avoir des difficultés financières. Il faut prévoir un moyen d'empêcher que tous les agriculteurs ne se précipitent sur le service. Nous acceptons donc l'idée d'un certain recouvrement des frais, pourvu que cela soit raisonnable.
M. Hermanson: En ce moment, les services de consultation fournis dans le cadre de la Loi sur l'examen de l'endettement agricole...
M. Wilkinson: La loi en vigueur ne prévoit qu'une partie des services de consultation, et c'est là que nous remarquions un problème. Le service prévu est celui du réaménagement volontaire. Bien franchement, l'examen de l'endettement a quelque chose de tellement infamant que les agriculteurs se refusent à aller au bureau d'examen pour obtenir un réaménagement volontaire. Nous pensons donc qu'il faut dissocier le réaménagement volontaire de l'examen de l'endettement.
M. Hermanson: Vous proposez donc que le service de médiation ne s'occupe pas des consultations?
M. Wilkinson: C'est exact.
M. Hermanson: Les deux choses devraient être tout à fait séparées.
M. Wilkinson: C'est notre avis. Il devrait y avoir de bonnes communications, mais il faudrait que le service soit distinct pour que le caractère infamant de l'examen de l'endettement ne déborde pas sur les services de consultation qui entrent en jeu lorsqu'il y a une alerte précoce.
M. Hermanson: Bonne réponse.
M. Wilkinson: Le matin, il faut simplement me poser une seule question à la fois.
Des voix: Oh, oh!
M. Hermanson: La dernière question, Jack, vous l'avez effleurée dans votre exposé.
D'après notre interprétation du projet de loi, lorsqu'il est question de lever une suspension, l'administrateur peut le faire si la majorité des créanciers refusent de participer de bonne foi.
Il me semble que cela encourage le créancier. Il peut s'agir d'un seul créancier. Ce peut être seulement une banque ou une société de crédit agricole. Les créanciers peuvent être incités à se montrer peu coopératifs pour que la suspension soit levée et qu'ils puisent entamer les procédures juridiques.
Estimez-vous que le projet de loi comprend des dispositions suffisantes pour décourager les créanciers de se montrer peu coopératifs?
M. Wilkinson: Je deviens sans doute pragmatique avec l'âge. Lorsque nous avons exercé des pressions pour obtenir la loi sur l'examen de l'endettement agricole, au départ - j'ai participé à ces démarches comme membre des organismes dont je faisais partie - , nous n'avons absolument pas réussi à donner du mordant à la loi fédérale à cause du lobby des banques et du crédit agricole, à y faire ajouter des éléments qui peuvent faire contrepoids, dans une certaine mesure, au contrat que l'agriculteur doit signer en contractant une hypothèque.
Regardons les choses en face. Quand on se trouve dans une position très faible, quand on ne peut pas honorer ses obligations, qui sont garanties par tout ce qu'on a avancé, depuis le compte en banque des enfants jusqu'au premier-né, presque...
Le projet de loi ne va probablement pas tout à fait assez loin, mais je ne pense pas, franchement, qu'un gouvernement canadien quelconque fera jamais une proposition qui irait assez loin.
Nous avons l'impression que ce qui se passe en fait, s'il y a des mécanismes d'appel et si le médiateur a des compétences en médiation, c'est qu'on exerce des pressions sociales, collectives, etc. sur les créanciers pour qu'ils se montrent raisonnables. Lorsque des exploitations méritent de survivre, il faut faire un effort spécial pour les trouver, parce qu'il est bien mieux que l'examen de l'endettement se fasse loin des manifestations devant les banques, avec la mauvaise publicité que cela peut faire aux milieux bancaires.
À mes yeux, le système est plus solide maintenant, parce que le propriétaire d'une exploitation familiale peut interjeter appel si la suspension n'est pas prolongée. Si la réponse du créancier, devant un tribunal d'appel formé d'agriculteurs, est que cela ne l'intéresse pas de négocier avec ce propriétaire d'exploitation agricole, je crois que ce groupe indépendant va avoir la réaction suivante: « Dans ce cas, tant pis. Nous allons prolonger l'appel jusqu'à 150 jours, puisque le créancier a cette attitude-là. Même si, à la fin de ce délai, il faut négocier ou si le créancier peut entamer des procédures, nous allons prolonger le délai le plus possible. »
En ce sens, la nouvelle loi est meilleure que l'ancienne.
Est-elle assez rigoureuse? Je ne porte pas les banques dans mon coeur, mais, je le répète, je ne pense pas que le gouvernement soit prêt à faire adopter une loi assez rigoureuse - aucun gouvernement ne le ferait.
M. Hermanson: Merci.
Le président: Merci.
Monsieur Easter.
M. Easter: Merci, monsieur le président.
M. Wilkinson: Je suppose que l'Association des banquiers est sur la liste des témoins.
M. Easter: Je n'en suis pas certain.
Avant de passer à mes propres questions, je dirai que je reconnais avec vous que le processus d'appel est l'un des meilleurs éléments du projet de loi à l'étude. Vous êtes donc convaincus que le comité d'appel, comme on le présente dans le projet de loi C-38, a le pouvoir nécessaire pour faire ce qu'il a à faire?
M. Wilkinson: Nous le pensons. Il ne me semble pas raisonnable qu'une suspension des procédures se prolonge pendant plus de 150 jours sans que les créanciers...
Une voix: C'est seulement 120 jours.
M. Wilkinson: Seulement 120 jours? C'est peut-être 30 jours trop court.
Des voix: Oh, oh!
M. Wilkinson: Un peu plus, un peu moins, nous sommes d'accord. C'est un compromis entre ce que les créanciers considèrent comme une tactique dilatoire, comme un moyen de les empêcher de prendre des mesures à l'égard de prêts irrécouvrables, et un délai suffisant pour inciter les créanciers à négocier. Je crois que ce sera raisonnable.
M. Easter: Jack, je crois que vous et moi avons travaillé ensemble sur l'ancienne loi du bureau d'examen de l'endettement agricole. Il est vrai que nous n'avons pas réussi à rendre la loi aussi musclée que cela me semblait nécessaire à l'époque, et je me demande si le projet de loi a des dispositions assez sévères pour faire contrepoids au pouvoir des banques. C'est pourquoi je suis préoccupé.
Je comprends ce que vous dites à propos du service de consultation destiné aux agriculteurs, mais j'ai du mal à accepter le projet de loi dans son état actuel parce que j'ai l'impression que, en ce qui concerne ce service de consultation, nous achetons chat en poche. Vous dites que, si cette mesure est prise parallèlement, et si le ministère fait ce qu'il dit, au sujet du service de consultation et de médiation, tout ira bien. Mais je voudrais que le projet de loi soit un peu plus vigoureux.
Je me suis occupé de nombreux problèmes financiers agricoles, et je peux vous dire que, n'était-ce des pouvoirs prévus par la Loi sur l'examen de l'endettement agricole, les banques n'accepteraient probablement pas de discuter. Selon moi, le service de consultation, en tant que tel, ne va pas suffire. Je veux voir pour commencer en quoi il consistera. Je veux voir quelles seront ses ressources, quel sera le personnel et quel pouvoir le service de consultation possédera avant d'appuyer ce projet de loi, car je pense que ceux dont nous pouvons sauver l'exploitation sont ceux qui ne sont pas encore dans le pétrin.
Vous voulez que les deux services soient séparés à cause du caractère infamant de l'examen de l'endettement, et je suis d'accord avec vous. Cela faisait problème dans l'ancienne loi. C'était aussi un problème grave parce que tous les créanciers étaient informés et que, comme vous l'avez dit, les livraisons d'alimentation, par exemple, cessaient immédiatement. N'y a-t-il pas moyen de procéder autrement, par voie législative? Est-ce qu'on ne peut pas régler ces problèmes et conserver l'avantage d'une mesure législative pour s'occuper des agriculteurs qui ne sont pas encore insolvables? Est-ce que la FCA a envisagé cette possibilité?
Ma question est la suivante: qu'y aurait-il de mal à régler ces problèmes et à englober cet élément, le service de consultation, dans la loi même? Est-ce que cela est envisageable pour vous?
M. Wilkinson: Notre point de vue, c'est que le ministre a donné directement l'assurance que le programme sera en place, et qu'il s'appliquera parallèlement aux services qui nous semblent importants. Il n'y a pas de garanties, mais nous sommes un organisme de lobbying, et, lorsqu'un ministre prend un engagement, nous croyons que ce qu'il promet va se faire. Comme vous l'avez dit, nous avons des préoccupations importantes, mais cette assurance nous a été donnée. Il ne s'agit pas seulement du ministère. C'est le ministre qui a pris cet engagement, et le travail qui se fait au ministère est aussi une indication favorable
Est-ce que les choses se passeront ainsi ou autrement? Nous avons abordé la question de cette manière à cause des problèmes que causait l'autre loi. Selon nous, il était très grave de prévenir tous les créanciers d'un réaménagement volontaire de la dette; cela revenait en fait à obliger l'agriculteur à se soumettre à un examen de son endettement. En fait de réaménagement volontaire de la dette, il ne se faisait pas grand-chose. Dans de très rares circonstances où quelqu'un n'avait pas... La façon dont le service était assuré... ils étaient prévenus qu'il ne s'agissait pas d'un examen complet de l'endettement. Je pense donc que, jusqu'à un certain point, c'était une erreur de parler de réaménagement volontaire de la dette. Dans les faits, la seule différence était que le propriétaire informait le bureau d'examen de l'endettement agricole au lieu que ce soit le créancier qui écrive un mot à l'agriculteur pour le prévenir de l'examen de son endettement.
Il est relativement facile de faire faillite au Canada. Nous pourrions à peu près tous déclarer faillite. Aux termes de la loi, je crois qu'il faut être incapable, à un moment donné, d'honorer ses obligations. Je sais que, un certain mois, je n'ai pas fait un versement à cause de cela... En principe, il est assez facile de devenir insolvable aux termes de la loi si on veut le faire. La plupart d'entre nous préférons ne pas le faire.
J'ignore comment on peut régler le problème dans le cadre de la loi. On pourra toujours recourir à la loi. Si les créanciers n'acceptent pas le réaménagement volontaire de la dette, la loi restera tout de même en place. Notre crainte, c'était de voir disparaître l'examen de l'endettement. C'est ce qui a guidé nos dernières interventions auprès du gouvernement. Le nombre de cas était si faible que tout donnait à penser que la loi allait tomber, qu'il n'y aurait plus de suspension des procédures, qu'il ne resterait plus aucun système en place. C'est dans ce contexte que nous avons fait des démarches pour que la loi soit maintenue, avec la suspension des procédures, avec des dispositions d'appel, et en conservant pour le propriétaire d'exploitation familiale un certain pouvoir dans les négociations avec son créancier.
Nous ne savons pas s'il est possible d'ajouter dans le projet de loi des éléments du service de consultation. À notre avis, si on donne des ressources aux agriculteurs pour réaménager volontairement leur dette, c'est préférable à l'ancien système. Il y aura toujours suspension. Il y aura toujours des mécanismes d'appel et tout le reste pour ceux qui n'ont pas... La loi va s'appliquer de toute manière. Personne ne peut échapper à la loi qui est là pour encourager le créancier à négocier. N'importe qui peut se prévaloir de cette loi, car on ne peut pas liquider une exploitation sans suivre une certaine démarche.
Nous constatons que la loi est toujours là, et nous nous fions à la parole du ministre, qui dit que le programme sera doté de ressources suffisantes.
M. Easter: La loi reste là comme dernier recours. Je suis d'accord avec vous sur ce point. Et moi aussi, j'ai la certitude que le ministre va tenir parole.
Mais, à passer plus de trois ans ici, on apprend quelques petites choses. L'une d'elles, c'est que le Conseil du Trésor et le ministère des Finances semblent exercer un grand contrôle sur les divers ministères. Si nous mettons en place ce service de consultation qui n'est pas prévu dans une loi et est donc du ressort du gouvernement fédéral, nous pourrions, dépendant de ce qui plaira au Conseil du Trésor ou au ministère des Finances, nous faire demander dans deux ans, dans le cadre d'un nouvel examen des programmes ou autre initiative semblable...
Je crains que, à un moment donné, le service ne soit supprimé. Je voudrais vraiment trouver un moyen de garantir ce service de consultation par des dispositions législatives pour que le gouvernement fédéral ait l'obligation absolue de lui donner les ressources et le personnel voulus, pour que le ministère puisse exercer des pressions afin de maintenir le service.
M. Wilkinson: L'observation est juste.
Le président: Monsieur Pickard.
M. Pickard (Essex - Kent): Merci beaucoup, monsieur le président.
Il a été beaucoup question ce matin du service de consultation. Au fond, comme Jack l'a fait observer, il s'agit d'un programme qui vient s'ajouter à la loi sur la médiation, et il est proposé aux agriculteurs en difficulté financière qui ont actuellement droit au type de service prévu par l'article 16 de la Loi sur l'examen de l'endettement agricole.
Le service de consultation n'est pas prévu par la mesure législative que nous proposons maintenant, et il n'en est pas fait mention dans la loi. C'est un programme complémentaire qui sera mis en oeuvre pour assurer des services maintenant prévus par l'article 16.
Les deux principaux éléments du programme sont le service d'aiguillage ou d'orientation et le service d'évaluation et de diagnostic sur place, qui donne aux agriculteurs en difficulté financière un diagnostic sur leur exploitation.
Le service d'aiguillage et d'orientation dirige les agriculteurs vers d'autres services fédéraux, provinciaux et privés. Au nombre des services qui peuvent figurer dans la liste, on remarque la médiation, la planification de l'entreprise agricole, la formation en gestion financière, les services d'information, le crédit, le counselling concernant le stress et les services de vulgarisation. Les agriculteurs n'ont pas à être en difficulté financière pour recourir au service d'orientation. Tout agriculteur peut avoir besoin de ce service à un moment ou l'autre sans éprouver nécessairement de graves difficultés financières.
Quant à l'évaluation et au diagnostic sur place, ce service donne une analyse de toutes les ressources à la disposition des entreprises, notamment la gestion financière, l'utilisation des ressources matérielles et autres, la définition des problèmes qui contribuent à la gêne financière et la définition de plans d'action différents. Un conseiller financier peut aussi fournir à l'agriculteur un plan quinquennal d'exploitation. Ce conseiller peut également, sur demande, accompagner l'agriculteur à des rencontres avec un créancier pour discuter des difficultés financières et des autres solutions envisageables. En réalité, l'agriculteur en difficulté financière peut recevoir autant d'aide que ce que prévoit actuellement l'article 16 sinon plus.
Certaines provinces pourraient considérer que les services de consultation, parce qu'ils sont personnalisés, se rattachent à leur mandat et relèvent des services de vulgarisation en gestion agricole. Nous ne voulons donc pas, par voie législative, conférer au gouvernement fédéral une responsabilité que certaines provinces pourraient interpréter comme une atteinte à leurs droits. C'est l'une des raisons pour lesquelles la loi ne traite pas des services de consultation offerts aux agriculteurs.
Cela répond sans doute à ce que Wayne a présenté comme un point crucial. Nous mettons ce service en place, il sera disponible, mais il y a des provinces qui veillent jalousement et craignent que nous n'empiétions sur leurs droits en offrant des services de consultation.
En réalité, les services sont élargis et englobent des éléments nouveaux, en plus de ce qui est prévu à l'article 16. Tous les éléments prévus à l'article 16 sont conservés.
Jack a tout à fait raison. Je tenais à donner ces renseignements à M. Hermanson, car il ne semblait pas comprendre très bien. Je crois que nous avons essayé de donner cette information lorsque le ministère a comparu, mais je ne crois pas que vous étiez présent à ce moment-là.
En tout cas, Jack, je vous remercie beaucoup de votre appui à ce sujet. Je tenais à ce que la situation soit claire pour tout le monde.
M. Wilkinson: Merci. La chose qui me paraît très importante, c'est qu'on prévoie des ressources suffisantes pour les dossiers compliqués qui exigent une bonne dose de travail.
Deuxièmement, vous avez parlé de plan quinquennal. Selon moi, il y a des lacunes au niveau de certaines compétences nécessaires, surtout là où l'activité agricole n'est pas très intense, pour examiner l'exploitation agricole et le réaménagement qui peut s'imposer dans une période donnée, de manière à garantir autant que possible le succès des négociations, du réaménagement, etc.
En ce moment, les taux d'intérêt sont faibles et on peut imaginer qu'ils ne vont pas monter, mais je ne suis pas né d'hier - je sais que je n'ai pas l'air si vieux - et il peut se produire des changements considérables. Ce qui paraissait impossible s'est produit très rapidement et, du jour au lendemain, des tas de gens ont fait face à de graves difficultés. Nous devons veiller à ce que les ressources soient là, comme vous dites, et à acquérir les compétences nécessaires pour qu'une analyse sérieuse soit possible.
Prenons une entreprise, pas nécessairement agricole, mais une entreprise en général. Il y a des compétences qui lui font défaut.
Il faut revoir tout cela, en prendre un instantané. Ensuite, il faut restructurer l'entreprise pour l'arracher à ses difficultés. Il faut repérer les activités dont il y a lieu de se départir, trouver les changements à apporter. J'espère que ce service encouragera les gens sur ce plan, pour que ces compétences se développent à l'avenir.
Le président: Monsieur Pickard, vous pourriez peut-être nous éclairer. Je sais que le budget du service de consultation des agriculteurs s'élève à environ 2,4 millions de dollars par année. À combien s'élève celui des services de médiation?
M. Pickard: Je pourrais vous obtenir tous les chiffres du budget. Je ne les ai pas ici. Nous pourrions peut-être les obtenir du ministère et vous les communiquer aujourd'hui.
Le président: Auriez-vous l'obligeance de le faire, s'il vous plaît?
M. Pickard: Je vais les communiquer au greffier.
Le président: D'accord.
M. Pickard: Mais considérez le nombre de cas. Il est très clair, comme Jack l'a dit tout à l'heure, que le climat est beaucoup plus sain. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas d'autres difficultés à l'avenir. Les taux d'intérêt actuels, plus particulièrement, sont très favorables à l'instauration d'une plus grande stabilité dans la plupart des petites entreprises, de toutes les exploitations agricoles.
Le problème, c'est que nous ne maîtrisons pas totalement tous ces facteurs. Les fluctuations à la hausse et à la baisse d'une année à l'autre sont inévitables. La tendance générale, ces dernières années, a été plus encourageante que par le passé, comme Jack l'a signalé.
Je suis aussi d'avis que, dans les dossiers extrêmement difficiles, dont Jack a parlé, l'administrateur a la possibilité d'aller un peu plus loin et d'offrir les services plus coûteux dont vous avez fait mention, et les ressources doivent alors être disponibles. Nous en sommes convaincus aussi, car, en dépensant un peu d'argent au départ, et même un montant assez considérable, on peut rendre l'exploitation beaucoup plus rentable.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Hoeppner.
M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): Je vous souhaite la bienvenue, messieurs.
Jack, j'ai été plutôt impressionné par votre prise de position selon laquelle il devrait y avoir une aide financière aux termes de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole pour les agriculteurs dont l'exploitation n'est pas rentable, en somme, et qui vont se présenter pour une consultation juridique.
D'après mon expérience, lorsqu'on en arrive à cette étape de négociation, les banques et la Société du crédit agricole peuvent compter sur les meilleurs avis et services juridiques qui soient, mais pas les agriculteurs. Je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire qu'il faut prévoir un certain financement. C'est que les seuls qui aient réussi à obtenir un règlement équitable, d'après ce que j'ai pu voir, sont ceux qui ont engagé un avocat pour les aider à négocier.
M. Wilkinson: Nous sommes peut-être en train de dire la même chose, mais en nous servant de définitions différentes. Il coûte extrêmement cher de faire intervenir des avocats dans la négociation. Ce que je préfère, et ce qui m'a semblé le plus fructueux, c'est de faire appel à des gens qui ont de solides compétences en planification financière et qui connaissent le système juridique. Ce sont parfois des profanes, mais ce sont ceux qui ont obtenu les meilleurs résultats.
Dans la plupart des cas, un avocat va coûter environ 50 000 $, tout compte fait. Il vaut mieux être prudent, ici, car certains facturent des honoraires très élevés. En bout de course, ils vous disent que vous avez signé un contrat et qu'ils sont prêts à négocier, qu'ils sont désolés, mais que vous leur devez tant.
Je suis tout à fait d'accord avec vous, ceux qui connaissent le système sont les plus efficaces pour s'y retrouver et parvenir à une solution, mais il leur faut des ressources pour le faire.
M. Hoeppner: Je n'ai pas l'habitude de prendre le parti des avocats, mais, dans les quelques dossiers dont je me suis occupé, il m'a semblé que les avocats avaient demandé des honoraires très raisonnables, parce que les agriculteurs étaient leurs clients.
M. Wilkinson: J'aimerais rencontrer ces avocats un jour, lorsque je me rendrai dans votre région.
M. Hoeppner: Nous avons du bien bon monde au Manitoba.
M. Wilkinson: Je sais.
M. Hoeppner: L'autre chose que je voulais signaler, Jack, c'est que vous me semblez trop conciliant avec le gouvernement. Il ne manque pas d'argent. J'ai remarqué ce matin que le premier ministre donnait 85 millions de dollars à Bombardier.
Une voix: C'est 83 millions.
M. Hoeppner: D'accord, 83 millions, mais qu'est-ce que c'est que 2 millions pour les libéraux? Le premier ministre dit qu'on espère recouvrer une partie de cet argent un jour ou l'autre.
Je viens de faire quelques calculs. Disons que nous avons 123 000 agriculteurs et qu'on nous donne un levier financier semblable. Cela se traduirait par environ 11 milliards de dollars. Ne pensez-vous pas que cela aiderait nos industries à valeur ajoutée, ce qui nous éviterait toute cette histoire de réaménagement de dette?
M. Wilkinson: Je suis persuadé que le comité permanent, et surtout ses membres qui font partie de l'opposition, vont harceler le gouvernement lorsqu'il s'agira de recouvrement des coûts. Vous allez veiller à ce que soit juste. Je présume que vous allez nous soutenir vigoureusement dans le dossier de l'agence de réglementation des produits antiparasitaires dans lequel le gouvernement fait clairement fausse route. Vous n'allez pas rater une occasion de vous montrer intraitables dans ce dossier.
Le président: Nous allons redonner la parole à M. Hermanson et j'espère aussi que nous allons en revenir au projet de loi C-38.
M. Easter: Rappel au Règlement. Je me demande si vous allez recommander que ce montant soit prévu dans votre «Nouveau départ», dans le cadre de la politique officielle des réformistes.
M. Hoeppner: Non, je dis simplement que les libéraux aiment dépenser l'argent et le distribuer. Au fond, je voudrais que les agriculteurs aient leur juste part.
Une voix: Mais ils le distribuent à leurs amis, pas aux agriculteurs.
Le président: Allez-y, Jake.
M. Hoeppner: Je me demande ce que vous avez vu, parce que je sais qu'il y a encore beaucoup de récoltes qui n'ont pas encore été faites. Les prix ont diminué de 40 p. 100 dans bien des cas, tandis que le coût des facteurs de production a augmenté de 30 ou 40 p. 100. Selon moi, nous courons à la catastrophe si rien n'est fait.
M. Wilkinson: Il est évident que les risques, en agriculture, sont beaucoup plus considérables qu'autrefois. Cela ne fait aucun doute. Les dépenses de programme ont beaucoup diminué. Qu'on soit en faveur des dépenses de programme ou non, le fait est que les moyens d'atténuer les fluctuations des prix sont disparus, avec toutes sortes d'autres choses. Les prix du bétail ont beaucoup diminué pour les éleveurs-naisseurs, étant donné les chiffres de production en Amérique du Nord et le prix élevé des céréales. Ceux dont la seule activité est le naissage ont été en déficit l'an dernier, et de nouveau cette année, dans la plupart des cas.
La situation n'est pas partout la même, et on ne peut pas dire que tout va à merveille dans l'agriculture. Il est évident que ce n'est pas le cas. Comme vous l'avez dit, les dépenses sont fortement à la hausse dans une foule de domaines, depuis les transports jusqu'aux facteurs de production essentiels.
C'est un secteur d'activité où la marge bénéficiaire est très étroite, et elle l'a toujours été. Il y a toujours des risques de difficulté financière si quelque chose tourne mal, par exemple si, comme vous le dites, des récoltes restent sur les champs, s'il y a un coup dur dans une région, si une frontière se ferme, si la maladie frappe un troupeau. Je ne veux pas prendre les choses à la légère. Selon nous, il faut qu'il y ait un système en place pour aider les exploitations familiales, pour leur donner des ressources suffisantes afin qu'elles aient une chance équitable de renégocier avec les créanciers. Nous espérons que, au bout du compte, la Société du crédit agricole ou d'autres institutions provinciales de crédit pourront être là pour donner d'autres possibilités aux agriculteurs s'ils éprouvent des difficultés avec leur prêteur.
Je ne vois pas ce que je pourrais ajouter. Il est crucial de conserver à l'avenir un système d'examen de l'endettement pour les cas où des difficultés surgiraient. Il nous paraît essentiel de pouvoir faire suspendre les procédures pour empêcher les créanciers d'agir, pour ménager un délai de négociation. Quant à savoir s'il faut aller plus loin que cela...
Comme je l'ai dit, nous essayons d'être pragmatiques. Nous sommes parfaitement conscients qu'il y a toujours d'un côté un lobby bancaire qui cherche à préserver l'intégrité des contrats et des hypothèques qui ont été signés et à faire en sorte que les débiteurs fassent tous les efforts pour rembourser ce qu'ils doivent, et de l'autre côté, ceux qui veulent qu'on soit équitable envers les gens qui se sont retrouvés en difficulté, souvent sans qu'ils y soient pour quoi que ce soit. Est-ce qu'on est parvenu à un juste équilibre... Selon nous, ce qui est proposé va assez loin, pourvu que le service de consultation soit doté de toutes les ressources nécessaires pour aider des agriculteurs qui n'en sont pas encore au stade de l'examen de l'endettement à résoudre leurs problèmes et leur éviter de devoir recourir à la loi.
M. Calder (Wellington - Grey - Dufferin - Simcoe): Jack, j'ai prêté attention à ce que vous disiez ici... Tout le processus du projet de loi C-38 va reposer en fait sur la médiation, et c'est de cela que va découler l'examen financier prévu à l'article 9. Enfin, le paragraphe 9(4) parle d'un rapport que l'administrateur rédige ou fait rédiger. Que pensez-vous des modalités de l'élaboration du rapport, puisqu'il devient le point de départ du travail du médiateur qui doit voir si l'exploitation est rentable ou non.
M. Wilkinson: Selon moi, il y a un ensemble de circonstances où, dans le cadre de mesures législatives, on ne peut confier à l'extérieur qu'une partie du travail... de façon que mon client se retrouve en face de l'administrateur et du médiateur. Dans cette mesure, nous acceptons l'idée qu'il incombe au personnel sur le terrain de recueillir des renseignements objectifs.
Je pense que cette étape est cruciale, que vous fassiez appel à ces personnes pour recueillir des renseignements objectifs, pour prendre un instantané de la situation, que vous les ameniez à travailler pour vous, pour négocier avec les créanciers, peut-être pour richelonner les engagements à court terme avec des taux d'intérêt plus faibles permettant de récupérer une marge de manoeuvre... ou une foule d'autres scénarios permettant de négocier de façon fructueuse avec votre créancier, ou que vous préfériez faire appel à votre propre représentant. Mais nous signalons qu'il est difficile de faire accepter un rapport de médiation ou le dossier remis au médiateur si c'est mon propre comptable qui le prépare, parce que tous doivent avoir l'assurance que tous les créanciers, toutes les dettes, absolument tout est justifié et étalé au grand jour, pour que tout soit équitable et transparent.
Nous leur donnons cette possibilité. Le changement qui est apporté maintenant, c'est que le propriétaire d'exploitation familiale pourra choisir à qui il fait appel pour effectuer l'analyse et la planification d'entreprise et décider s'il utilisera les services de cette personne dans les négociations avec le créancier. De toute évidence, le médiateur ne va pas diriger les négociations. Il va veiller à ce que les négociations se déroulent de manière appropriée et équitable, mais, en vrai médiateur, il évite de se ranger dans un camp. C'est là que nous pensons qu'il doit y avoir assez de ressources pour que les débiteurs aient de bons représentants du secteur privé, si tel est leur choix.
M. Calder: Très bien.
Le président: Monsieur Hermanson.
M. Hermanson: Je voudrais en revenir au service de consultation. Monsieur Pickard, vous avez lu plusieurs pages, ou au moins une ou deux, d'une documentation sur le service de consultation des agriculteurs. J'ai eu beau vérifier dans toute ma documentation... On a peut-être dit avant l'ajournement d'été qu'il y aurait un service de consultation, mais le gouvernement fédéral a aussi promis un financement stable à la SRC pour une période de cinq ans, et cela est tombé à l'eau. Il a promis d'abolir la TPS, mais il n'a pas tenu parole non plus.
Je me demande si le gouvernement libéral serait disposé à déposer ses propositions de service de consultation avant que nous ne procédions à l'étude article par article du projet de loi C-38, pour que nous sachions exactement quel genre de programme complémentaire sera mis en place pour compenser l'absence, dans le projet de loi C-38, du service autrefois prévu par la Loi sur l'examen de l'endettement agricole.
M. Pickard: Si vous voulez de ma part une réponse directe, je n'ai absolument aucune objection à expliquer clairement ce que sera le service de consultation offert aux agriculteurs. Le ministre a déjà pris l'engagement devant toutes les organisations du pays que ce service serait mis en place parallèlement à la mise en oeuvre de la loi sur la médiation. L'engagement est là, bien clair. Comme je l'ai déjà dit, il s'agit d'un programme complémentaire.
J'ai essayé d'exposer avec grand soin tous les éléments, parce que, dans les consultations avec le ministère, celui-ci les a présentés à l'occasion de ses réunions avec les différentes parties. De plus, lorsque le ministère s'est présenté au comité, il a expliqué très clairement en quoi consiste le service de consultation offert aux agriculteurs. Je n'ai absolument aucune difficulté à vous expliquer clairement en quoi consistera ce service et, en même temps, le calendrier d'implantation parallèlement à la mise en oeuvre de la loi.
M. Hermanson: Ces renseignements peuvent être déposés à la Chambre.
M. Pickard: Aucun problème.
M. Hermanson: Bien.
Le président: Merci beaucoup, Jack. Comme vous avez répondu à toutes les questions, est-ce que cela veut dire qu'elles étaient toutes faciles? Vous avez dit au début que vous ne répondriez qu'aux questions faciles.
Merci beaucoup d'avoir accepté de comparaître ce matin, et merci de votre participation.
M. Wilkinson: Merci beaucoup.
Le président: Nos prochains témoins sont M. Alan Coulter, président du Bureau d'examen de l'endettement agricole de la Saskatchewan, et M. Dean Vey, directeur général. Est-ce que ce sont les deux messieurs qui ont réussi à sortir de la Saskatchewan hier pour venir nous rencontrer?
M. Alan Coulter (président, Bureau d'examen de l'endettement agricole de la Saskatchewan): J'espère que vous dites sortir de la Saskatchewan» avec le plus grand respect.
Le président: Bien sûr. Joignez-vous à nous, représentants de la Saskatchewan. Vous préférez?
M. Coulter: De loin.
Le président: Très bien. Peu importe d'où vous venez, vous êtes maintenant parmi nous. Je vous souhaite la bienvenue. J'ignore lequel d'entre vous prendra la parole, mais je vous invite à vous présenter, messieurs, et à faire votre exposé.
M. Coulter: Merci, messieurs. Je m'appelle Alan Coulter et je suis président du Bureau d'examen de l'endettement agricole de la Saskatchewan. Mon directeur général, M. Dean Vey, m'accompagne.
Je suis jusqu'à un certain point un nouveau venu au Bureau d'examen de l'endettement agricole, car je suis entré en fonction le 1er novembre de l'an dernier. Le bureau compte maintenant cinq membres, alors qu'il en avait autrefois 21. Cette réduction des effectifs a été toute une expérience pour moi.
Avant d'entrer en fonctions, nous avons pris un cours de formation CDR d'une semaine en médiation, et nous nous sommes jetés dans le feu de l'action, comme Daniel a été jeté dans la fosse aux lions. Nous avons dû tenir entre 200 et 300 audiences depuis. Nous en avons eu jusqu'à 17 en une seule semaine, et, à cause de la pénurie de personnel, j'en ai eu cinq en quatre jours. Les audiences ont été extrêmement nombreuses.
Tout d'abord, disons qu'il me paraît absolument impossible de décrire à ceux qui n'ont pas assisté à une demi-douzaine d'audiences la dynamique de ces rencontres. On y est témoin de toutes sortes d'émotions. Il y a de la colère, des larmes. Il y a des personnes divorcées, des créanciers en colère, des agriculteurs en colère, etc. qui se font face à la table. Pourtant, malgré tout cela, le pouvoir de la médiation pour résoudre les différends est absolument renversant.
Quelques raisons expliquent ce phénomène. Lorsqu'un créancier et un agriculteur se présentent, ils le font parce que le gouvernement fédéral a fourni gratuitement un service qu'ils règlent ces problèmes en privé. La seule autre voie qui s'offre à eux, ce sont les procédures, qui coûtent très cher aux deux parties.
Vous avez parlé des banques qui s'en prennent vraiment aux agriculteurs. Il ne faut pas oublier que, dans notre région, ces choses-là se passent dans des localités rurales. Il y a pour les créanciers quelque chose d'infamant à serrer la vis à un agriculteur, et il y a aussi pour l'agriculteur quelque chose d'infamant à étaler tous ses problèmes devant les tribunaux. Nous agissons à l'abri des regards, et tous les intéressés sont autour de la table.
On se fait beaucoup d'idées fausses au sujet des difficultés financières des agriculteurs. Lorsque les intéressés sont devant nous, autour de la table, ils sont tous sur le même plan. L'ensemble des parties arrivent tout à coup à mieux s'entendre sur ce qui se passe. Nous commençons par établir les règles fondamentales: pas de cris, pas d'insultes, tous doivent respecter les règles de la politesse, et une seule personne parle à la fois. Ces règles sont établies dès le départ.
M. Hermanson: Nous aurions un poste pour vous à la Chambre des communes.
M. Coulter: Je suis prêt à aller y mettre un peu d'ordre.
Une voix: Nous avons besoin de vous pour tenir les réformistes en bride.
M. Coulter: Allons, messieurs, je vais vous donner quelques règles fondamentales que vous devez accepter.
Le président: Une seule personne parle à la fois.
M. Coulter: Pourriez-vous vous maîtriser?
Le président: Monsieur Coulter, vous voulez continuer? Et que les autres se tiennent tranquilles.
M. Coulter: Oui, c'est bien cela.
Avant de poursuivre, je tiens à vous présenter mon directeur général et à vous expliquer un peu ses antécédents. Je suis très partial, ne l'oubliez pas. Nous dirigeons le bureau d'examen de l'endettement agricole le plus efficace du Canada. Je peux me vanter un peu? C'est d'accord?
Une voix: Bien sûr.
M. Coulter: Nous nous chargeons de la moitié des audiences des bureaux d'examen au Canada, mais, sur un budget total de 4 millions de dollars, notre part est d'environ 750 000 $. Est-ce que c'est exact? Je crois que nous avons tenu près de 300 audiences, mais je n'en suis pas sûr. Une chose est certaine, cependant, c'est que, entre le 30 septembre 1994 et aujourd'hui, pendant la période où M. Vey a mis en place la formule de la médiation unique, nous avons tenu 860 audiences. Dans 760 cas sur 860, nous sommes parvenus à un règlement. C'est là un taux de réussite de 88 p. 100. À vous de juger. Mais je voudrais tout de même ajouter quelques mots.
Le système marche bien, et le nombre de règlements est étonnant. Je pense que notre système, en Saskatchewan... Je n'ai jamais entendu un agriculteur ni un créancier, pas un seul, se plaindre de ne pas avoir eu une audience impartiale. Dean reçoit peut-être quelques plaintes à son bureau, mais personne n'est jamais venu me dire que la réunion n'avait pas été menée de manière équitable et impartiale. Par contre, un grand nombre de créanciers et d'agriculteurs sont venus me remercier parce qu'ils avaient eu l'impression d'avoir eu une bonne rencontre. À mon avis, le système fonctionne bien. Pourquoi? Parce que, lorsque nous dirigeons une réunion, notre seul objectif est d'amener les parties à communiquer. C'est de cette manière que nous modifions la dynamique des relations entre eux.
Si je vous dis cela, c'est parce qu'il y a un lien avec la nouvelle loi. Essentiellement, un grand nombre d'éléments qu'on retrouve dans la nouvelle loi sont des choses que nous avons déjà mises en oeuvre. On peut dire que, pour un grand nombre de dispositions de la nouvelle loi, nous avons fait oeuvre de pionniers. La médiation est un moyen d'action très puissant.
Pourriez-vous envisager un seul instant ce que cela aurait représenté si la majorité de ces 760 cas que nous avons réglés en deux ans avaient donné lieu à des procédures? Ces procédures peuvent durer jusqu'à deux ans, n'est-ce pas, Dean? Cela représente des coûts énormes pour les contribuables, pour le système de justice, pour les entreprises, et cela se répercute sur ceux qui doivent assumer les coûts. Pouvez-vous imaginer la surcharge pour les tribunaux, si ne fût-ce que la moitié de ces cas n'avaient pas été réglés dans une salle où tout se déroule très confidentiellement et leur avaient été soumis? Je crois que le succès de ce programme se passe de commentaires.
Passons maintenant au nouveau programme, mesdames et messieurs. Je dois vous dire que j'approuve ce programme, pour l'essentiel, parce qu'il ressemble à ce que nous avons fait en Saskatchewan. Nous avons toutefois quelques sujets d'inquiétude, et je vais les passer en revue.
L'article 8 suscite un peu d'inquiétude. Si vous regardez ce texte, il dit que l'agriculteur peut fonder sa demande au départ sur l'article 16, et, aux deux tiers du parcours, la modifier pour la fonder sur l'article 20 et revenir ainsi à la date de la demande initiale. Or, il se peut que des procédures aient été entamées entre temps, et cela est très préoccupant. Nous avons une certaine inquiétude.
L'article 10 dit que les rapports financiers doivent être communiqués à tous les créanciers. Nous aimons bien notre façon de procéder, qui consiste à ne faire parvenir les rapports financiers qu'aux personnes qui ont accepté d'assister à la réunion. Si un créancier à une dette de 50 $, il nous semble peu raisonnable de lui envoyer toute cette information. C'est notre deuxième sujet d'inquiétude.
Mais c'est surtout l'article 16 qui nous préoccupe. Il dit essentiellement que, si une banque ou un établissement de crédit veut nommer un gardien, il a le pouvoir de le faire. L'expression clé, dans cet article est «sauf si».
J'ai écouté l'exposé de M. Wilkinson tout à l'heure. Lorsqu'il y a un cas fondé sur l'article 16, en Saskatchewan, un membre du personnel sur le terrain va sur place; cela se fait de façon confidentielle, et on en reste là. Rien, dans la loi, ne dit qu'il faut communiquer les états financiers. Cette démarche peut se faire confidentiellement. Si une personne souhaite avoir une audience, cela se fait confidentiellement. On réunit les créanciers.
Disons qu'il y a un créancier principal. Notre personnel sur le terrain peut préparer quelques propositions, communiquer avec le créancier, essayer d'arrondir les angles et peaufiner les propositions. À propos des inquiétudes de M. Wilkinson au sujet de l'article 16, j'ignore comment les choses se passent en Ontario, mais nous n'envoyons les rapports financiers sur les cas relevant de l'article 16 que si une réunion à lieu, et seulement aux personnes qui veulent y assister.
Je voudrais aussi dire un mot de la prolongation de la suspension. Si un agriculteur se dit prêt à négocier et que la banque refuse, la suspension est prolongée. Cela est clair. Nous donnons à l'agriculteur le bénéfice du doute. L'agriculteur dit: « J'essaie de parvenir à un règlement, et les banques ne sont pas d'accord. » Mais il est très rare qu'un banquier dise: « Je vais serrer la vis à cet agriculteur et forcer la levée de la suspension. » C'est ce genre de comportement qui est infamant pour la grande banque dans la collectivité rurale, et il fait du tort aux banques.
Le taux de règlement est de 88 p. 100 pour tous ceux qui se présentent à ces réunions. Cela veut dire, selon moi, qu'ils veulent tous éviter de longs litiges devant les tribunaux.
Autre chose à ajouter, Dean?
M. Dean Vey (directeur général, Bureau d'examen de l'endettement agricole de la Saskatchewan): Non, ça va.
M. Coulter: Voilà, dans les grandes lignes, ce que nous faisons en Saskatchewan.
Encore quelques mots au sujet de la loi sur la consultation. Nous avons 60 000 agriculteurs en Saskatchewan. Si le service de consultation incitait tous ces agriculteurs à demander des états financiers gratuits au gouvernement, nous serions submergés. Il faut un moyen quelconque de décourager ces 60 000 agriculteurs de demander ce service gratuit. Cela coûterait trop cher.
Voilà tout ce que j'avais à dire, monsieur.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Coulter.
Monsieur Landry.
[Français]
M. Landry: Ma question s'adresse à M. Coulter.
J'aimerais obtenir certaines explications. Lorsque vous avez été élu, il y a un an, vous aviez 21 membres. Aujourd'hui, vous n'êtes plus que cinq. Est-ce que le service rendu aux agriculteurs est resté le même après cette diminution? C'est là ma première question.
La deuxième porte sur l'alinéa 16(1)a), où il est dit que l'agriculteur lui-même peut être nommé gardien de son actif «sauf...». Ce «sauf» est un mot clé et j'aimerais que vous me l'expliquiez plus en détail.
[Traduction]
Le président: Si je puis me permettre d'interrompre un instant, je crois que nous devons tâcher d'être clairs. Parfois, nous parlons de l'article 16, qui se trouve dans l'ancienne loi, mais il y aussi l'article 16 du projet de loi qui est à l'étude.
C'est une simple question de formulation, mais nous parlons de l'article 16, et de l'article 20 de l'ancienne loi. Je sais que MM. Landry et Coulter parlent ici de l'article 16 du projet de loi C-38.
[Français]
M. Landry: De la nouvelle loi.
[Traduction]
M. Coulter: L'alinéa 16(1)a) dit:
- l'agriculteur qui a la compétence requise pour être gardien de son actif, sauf si une proposition
est faite en vertu de l'alinéa b);
- b) toute autre personne compétente proposée par un ou plusieurs créanciers garantis dont le
nom est joint à la demande;
- c) toute autre personne compétente de son choix, dans le cas où ni l'alinéa a) ni l'alinéa b) ne
s'appliquent.
[Français]
M. Landry: D'accord. Concernant l'article dont on vient tout juste de parler, auriez-vous une suggestion à faire pour l'améliorer? Auriez-vous des modifications à suggérer qui pourraient améliorer la loi?
[Traduction]
M. Coulter: Je crois que l'administrateur devrait nommer un gardien impartial - l'agriculteur tout d'abord, si on peut s'y fier - ou un gardien absolument impartial. Voilà ce que nous proposons.
[Français]
M. Landry: Vous n'avez pas répondu à ma première question. Je vous ai demandé si les services aux agriculteurs étaient demeurés les mêmes ou s'ils avaient été négligés, étant donné que vous étiez 21 membres, lorsque vous avez été élu il y a un an, et que vous n'êtes plus que 5 maintenant.
[Traduction]
M. Coulter: J'aime à penser que nous offrons un meilleur service. Nous travaillons d'arrache-pied, et nous avons tenu une multitude d'audiences. Je crois que notre taux de règlement est un grand succès. Je suis très heureux des observations de ceux qui ont participé à des réunions. Je crois que nous faisons de l'excellent travail, si je puis me permettre de le dire. Nous ne ratons jamais une audience. Elles ont toutes lieu, le taux de règlement est très élevé, et nous faisons le travail.
[Français]
M. Landry: Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Monsieur Easter.
M. Easter: Merci, monsieur le président.
Je vous souhaite la bienvenue, Alan.
M. Coulter: Bonjour, Wayne.
M. Easter: Il y a longtemps qu'on ne s'est vu.
Que considérez-vous comme un règlement? Sur ces 760 règlements, combien d'agriculteurs ont pu conserver leur exploitation? Le savez-vous?
M. Coulter: Certains quittent l'agriculture, et beaucoup continuent, mais je n'ai pas ces chiffres. Dean peut sans doute nous renseigner.
M. Vey: Monsieur Easter, plus de 80 p. 100 conservent leur exploitation. Nous avons remarqué que, ces deux ou trois dernières années, le nombre de cas était à la baisse. Le type de difficulté a changé avec le temps, depuis la fin des années 80. La difficulté, c'est que les dettes des exploitations sont réparties entre un grand nombre de créanciers des localités agricoles, comme les fournisseurs locaux et des prêteurs de l'échelon provincial. Les petites coopératives de crédit et la SCA, ainsi que les banques, jouent encore un rôle, mais moins important qu'autrefois. Dans ce genre d'environnement et avec l'approche que nous utilisons, la probabilité est plus grande qu'il y ait un certain type de réaménagement et de richelonnement pour la majorité des exploitations agricoles.
M. Easter: La clé du règlement, il me semble, c'est de faire en sorte que les agriculteurs conservent leur exploitation, autant que possible. Il y a un dilemme intéressant, lorsqu'il s'agit de traiter avec les prêteurs. Je sais que les choses se passent un peu différemment en Saskatchewan parce que, là-bas, vous traitez avec les caisses de crédit tandis que, dans bien d'autres domaines, il faut traiter avec des banques.
Lorsque la crise agricole faisait rage, il était beaucoup plus facile, je crois, d'obtenir un réaménagement de dette, un amortissement ou une radiation de dette, de négocier des taux d'intérêt plus faibles, de mettre en veilleuse certains emprunts pendant un certain temps. Les possibilités étaient nombreuses. C'était plus facile à l'époque parce que les prêteurs savaient qu'ils ne pouvaient pas se départir des terres, des biens et de la machinerie, parce que le marché n'existait tout simplement pas. La situation se rétablissant, il est plus difficile d'obtenir un règlement des créanciers parce que ceux-ci ont d'autres possibilités, s'ils veulent liquider les biens du débiteur.
Dans les règlements, à l'heure actuelle, quelles sont les avenues empruntées le plus souvent? Est-ce l'amortissement de la dette? Des taux d'intérêt plus faibles? Quelle est la tendance, en gros?
M. Coulter: Tout ce que vous avez dit se fait. Quand on s'occupe d'autant d'audiences que nous l'avons fait, on voit de tout. Il n'y a rien qu'on puisse qualifier de tendance.
Certaines pratiques sont courantes. Certains amortissent les dettes. Les banques le font. Tout dépend aussi des garanties. On prolonge la période de crédit, on richelonne sur dix ans. Il y a des accords de réduction des taux d'intérêt. Toutes ces possibilités sont envisagées à presque toutes les audiences.
Il arrive très rarement, en tout cas dans les audiences dont je me suis chargé, que la faillite soit la solution retenue. Il ne faut pas oublier qu'un agent d'expérience sur le terrain, la personne qui établit le rapport et moi-même examinons tous les dossiers qui arrivent au bureau avant que... Nous examinons tous ces dossiers, et nous les revoyons après. La plupart du temps, l'agriculteur peut rester en affaires. Il y a des cas graves où c'est impossible.
Soit dit en passant, ces accords concernent uniquement les parties en présence. Nous n'avons rien à y voir. Nous ne pouvons pas nous prononcer. Nous ne portons aucun jugement. Nous essayons de favoriser la conclusion d'accords, mais ils sont conclus tout à fait volontairement, et les deux parties y adhèrent.
Alors, les réductions d'intérêt, l'échelonnement à long terme des dettes, etc., toutes ces solutions sont constamment envisagées, Wayne.
M. Easter: La Société de crédit agricole est active dans notre domaine. Je sais que, dans certaines régions, nous avons eu plus de mal à amener la Société de crédit agricole à accepter un règlement que ce ne fut le cas avec les banques, ce qui est assez étonnant. Comment les choses se passent-elles chez vous?
M. Coulter: Je pense que la Société de crédit agricole a été assez raisonnable, dans notre région.
M. Vey: Depuis quelques années, l'activité de la Société de crédit agricole a beaucoup diminué en Saskatchewan et au Manitoba, mettons depuis la période où elle a éprouvé de graves problèmes, dans les années 80 et au début des années 90. Nous ne voyons plus très souvent ses représentants aux réunions. Il est donc difficile de vous donner une évaluation exacte pour l'instant.
M. Easter: Vous avez parlé de l'article 10, Alan. En ce moment, aux termes de l'article 10 du projet de loi C-38, qui vous pose certaines difficultés, tous les créanciers sont-ils informés? Ce qui vous inquiétait, c'est qu'on puisse envoyer l'information financière à presque tout le monde. Je me demande si, dans le processus actuel, tous les créanciers sont informés.
Deuxièmement, à propos de ce que vous avez dit au sujet de l'article 16 du projet de loi C-38, je dois m'inscrire en faux contre votre interprétation. Je crois que c'est l'administrateur qui prend la décision - bien entendu, on essaie d'obtenir l'accord des créanciers et de l'agriculteur - en ce qui concerne la nomination du gardien. Je ne vois donc pas ce qui vous inquiète dans l'alinéa 16(1)b), car vous accepteriez le candidat proposé par la banque. Je pense qu'il faudrait trouver quelqu'un d'acceptable pour les deux parties.
M. Coulter: À propos de votre première question, nous envoyons les rapports financiers seulement aux personnes qui s'engagent à assister aux réunions sur les cas relevant de l'article 20. Quant aux cas qui relèvent de l'article 16, il n'est pas nécessaire d'envoyer les documents financiers à qui que ce soit. À moins qu'une personne ne veuille se soumettre volontairement à la médiation, nous envoyons les états financiers aux personnes qui prennent part à la réunion.
À propos de l'article 16, Wayne, j'espère que vous avez raison de dire que l'administrateur peut nommer un gardien indépendant ou l'agriculteur lui-même. C'est simplement une question d'interprétation. Il m'a paru bon de signaler que, étant donné notre interprétation, nous avons quelques inquiétudes.
M. Easter: Très bien. Merci.
Le président: Monsieur Hermanson.
M. Hermanson: Merci, monsieur le président, et merci à vous, messieurs, d'être venus de ma province, la Saskatchewan, pour témoigner au comité.
Les choses sont étranges, Alan. Votre fils m'a posé des questions, et c'est maintenant à moi de vous en poser. C'est un curieux retour des choses.
Le fils d'Alan est journaliste dans la circonscription de Kindersley - Lloydminster.
Nous avions autrefois en Saskatchewan ce qui s'appelait, je crois, le Farm Land Security Board. C'était l'organisme provincial qui avait un rôle semblable à celui du Bureau d'examen de l'endettement agricole. C'est maintenant chose du passé, parce que, apparemment, le Bureau d'examen de l'endettement agricole faisait mieux le travail. Il ne semblait pas qu'on ait besoin des deux organismes. Pourriez-vous dire comment vous situez le processus de médiation prévu dans le projet de loi C-38 par rapport au Bureau d'examen de l'endettement agricole et à l'ancien Farm Land Security Board? J'aurai encore une ou deux autres questions brèves à poser après.
M. Coulter: Je n'ai jamais été mêlé aux activités du Farm Land Security Board. J'ai fait de la médiation dans des dossiers fédéraux. Je vais donc m'en remettre à M. Vey, qui a une certaine expérience.
M. Vey: Monsieur Hermanson, le Farm Land Security Board faisait appel à des comités selon une formule très semblable à celle prévue dans la loi actuelle. En 1988, il a opté pour une médiation indépendante, séparée de la fonction de la commission, avec seulement un groupe de pairs qui a un pouvoir de décision.
Nous avons eu des contacts, à l'occasion, dans des dossiers qui concernent nos deux organismes. La part de l'organisme provincial n'est plus maintenant que d'environ 10 p. 100. C'est assez peu, puisqu'il ne s'occupe que des cas de saisie, alors que nous nous chargeons de tous les cas. Ce qui s'est passé depuis 1988 a été constructif. C'est cette année-là qu'il a apporté des modifications en partageant les rôles entre le bureau, d'une part, et, d'autre part, un médiateur professionnel et un expert sur le terrain qui travaillent tous deux avec l'agriculteur. Cela est très semblable aux moyens que nous avons maintenant.
Je discute avec des agriculteurs tous les jours. Ils entendent parler des modifications législatives, et l'idée que nous sommes en train d'appliquer semble leur plaire. Dans les circonstances actuelles, les choses peuvent être un peu difficiles lorsque Alan et son groupe de médiateurs se réunissent pour examiner un dossier dont l'un d'entre eux s'est occupé et pour prendre une décision. Les agriculteurs sont plus à l'aise, d'après ce que j'ai constaté en discutant avec eux...
Cela concerne aussi le Manitoba. Nous avons discuté avec les agriculteurs de cette province. La semaine dernière, un agriculteur manitobain assez solide a été informé qu'un groupe d'agriculteurs allait constituer un comité indépendant, maintenant appelé comité d'appel, et que, si la décision de l'administrateur, à la lumière des discussions et de l'information mise à la disposition du médiateur, ne lui convenait pas, il pourrait faire appel à ce groupe d'agriculteurs de sa région, et que ce groupe pourrait faire une évaluation indépendante du dossier et juger du bien-fondé de l'appel.
M. Hermanson: Passons maintenant au projet de loi C-38, qui prévoit un service de médiation. Comment ce service va-t-il s'harmoniser avec celui qui existe en Saskatchewan?
M. Vey: Des entretiens se déroulent en ce moment entre les fonctionnaires d'Agriculture Canada à Ottawa et des hauts fonctionnaires de la Saskatchewan à ce sujet, mais nous ne savons pas trop comment les choses vont évoluer lorsque cette nouvelle loi sera en vigueur. Il y a des discussions à ce sujet.
M. Hermanson: Cette loi pourrait ne pas s'appliquer en Saskatchewan, et les agriculteurs feraient appel au service provincial... Ou bien on pourrait mettre le service de médiation provincial en veilleuse, le service fédéral s'appliquant dans l'ensemble du pays. Est-ce que c'est là-dessus que portent les discussions? Ils cherchent comment éviter de marcher dans les plates-bandes les uns des autres et comment coexister?
M. Vey: Je pense que vous avez énuméré à peu près toutes les possibilités.
M. Hermanson: Dans quel sens est-ce qu'on s'oriente? C'est ce que je veux savoir.
M. Vey: Pour l'instant, je l'ignore. J'ai été à même de constater qu'on passait en revue ce genre de considération aux niveaux provincial et fédéral. Que je sache, aucune décision n'a été prise.
M. Hermanson: Très bien.
M. Coulter: Si je puis me permettre d'ajouter un mot, je pense que, en Saskatchewan, nous pouvons très bien nous adapter à cette nouvelle loi, que cette harmonisation - peu importe le terme - avec le service provincial entraînerait pour nous une adaptation plus importante. C'est tout ce que je puis dire, car je ne sais pas comment les choses vont se passer.
M. Hermanson: Il pourrait être plus difficile d'appliquer cette loi comme il convient en Saskatchewan que ce ne serait le cas dans d'autres provinces, d'après ce que vous entrevoyez pour l'instant.
M. Coulter: Je n'en ai pas la moindre idée.
M. Hermanson: D'accord.
Je voudrais tirer une ou deux choses au clair. Avez-vous bien dit dans votre exposé que la Saskatchewan s'occupe de la moitié des dossiers du Bureau d'examen de l'endettement agricole et qu'elle utilise 750 000 $ sur un budget de 4 millions de dollars?
M. Coulter: Cet homme est très efficace.
M. Hermanson: Comment vous y prenez-vous? Vous feriez mieux de faire profiter le gouvernement de vos compétences. Il en aurait grand besoin dans d'autres secteurs.
M. Coulter: Nous avons le service de courrier électronique du gouvernement. Nous nous servons de téléphones et de télécopieurs. Je pense que nous avons le meilleur système de communication du pays. Nous faisons la médiation en une seule séance et M. Vey innove sans cesse pour rendre le service plus efficace. C'est à lui d'accepter les félicitations, car ces résultats lui sont presque entièrement attribuables.
Vous sentez-vous mieux, Dean?
Le président: Monsieur Coulter, il pourrait bien vous demander une augmentation quand vous allez rentrer. Vous vous êtes mis en position de vulnérabilité.
M. Coulter: Ça va.
M. Hermanson: Cela fait paraître les autres bureaux d'examen très peu efficaces.
M. Coulter: Je ne peux rien dire là-dessus. Nous avons une charge de travail si lourde que nous devons être efficaces sous peine de nous faire submerger.
M. Vey: Un élément de réponse à votre question est le volume de la demande que nous avons eue au fil des ans, et les exigences auxquelles nous avons dû faire face. Pendant la période la plus intense, nous avions un peu plus de 2 000 dossiers en une seule année, et nous en avons régulièrement entre 1 600 et 1 800. Nous avons cherché à savoir très rapidement, d'après les réactions des agriculteurs et des créanciers - une grande partie des réactions est venue des premiers - et nos propres sondages internes auprès des agriculteurs, quel type de service nous assurions, dans quelle mesure il était efficace et comment nous pouvions l'améliorer. Ces efforts se poursuivent.
À partir de ces réactions, nous avons essayé d'innover ici et là pour nous adapter et améliorer le processus. S'il était décidé que nous pouvions améliorer le processus et accroître l'efficacité, en collaboration avec le bureau - vous pouvez le constater, Alan appuie solidement ces initiatives comme le font les quatre autres membres; je profite de leur soutien - , nous apportions des modifications avec le temps. C'est ainsi que nous nous sommes améliorés. Cela ne fait aucun doute.
M. Hermanson: Une question s'impose à l'esprit: le gouvernement fédéral a-t-il consulté le Bureau d'examen de l'endettement agricole de la Saskatchewan, étant donné ses bons résultats, pour voir comment s'y prendre pour contenir les coûts du nouveau service de médiation.
M. Vey: Au fil des ans, j'ai eu de nombreux échanges avec les fonctionnaires d'Ottawa. Eux non plus n'ont pas ménagé leur soutien. Je n'ai que des bonnes choses à dire au sujet des contacts que j'ai eu à tous les niveaux. Ils nous ont encouragés à mettre à l'essai quelques techniques nouvelles, comme la médiation directe, il y a un ou deux ans. Alan examine toujours tous les dossiers pour faire en sorte que, à titre de président du bureau, ce soit lui qui assume la responsabilité ultime. Il les examine tous dans le cadre d'un processus administratif qui comprend toujours l'étude par un comité, comme la loi le prévoit. Mais nous avons un dialogue constant avec les responsables du programme, et je crois qu'ils ont essayé de reprendre dans le projet de loi des éléments que nous avons appris, par exemple les constatations que nous avons faites au sujet de la médiation directe. Je ne peux pas me vanter de cette innovation, parce que la province nous devançait sur ce plan.
M. Hermanson: Pensez-vous que le service de consultation doive être séparé du service de médiation?
M. Vey: Il y a de bonnes raisons de les séparer. Le caractère infamant de la dette est indéniable. Mais il y aura chevauchement entre les deux services.
En ce qui concerne l'application de l'article 16, en ce moment, entre le tiers et la moitié des agriculteurs qui font une demande ont besoin d'un examen financier mensuel. Ils ressentent une certaine pression financière, une gêne financière. Ils peuvent être en retard dans leurs paiements, mais les créanciers sont disposés à accepter la situation. Il y a habituellement un créancier principal. L'agent qui est sur le terrain et établit les contacts au niveau de l'exploitation agricole procède à l'examen des diverses solutions possibles, et il rencontre le créancier pour rétablir les communications afin que les parties puissent discuter du problème. On n'en est pas à l'étape du différend qui exige une médiation. Pour ces agriculteurs qui représentent entre le tiers le la moitié des demandes, le service de consultation a un rôle à jouer, et il faudra qu'il y ait encore un certain chevauchement entre les deux services.
J'ai du mal à faire des observations à ce sujet. Me voici, directeur général du Bureau d'examen de l'endettement agricole, et il est proposé que nous soyons les administrateurs. C'est comme si je voulais me vanter. En un sens, qu'il y ait un accord fédéral- provincial ou autre chose, il faut assurer un lien entre ceux qui assurent la médiation, ceux qui se chargent du travail sur le terrain et ceux qui offrent le service de consultation. On peut avoir l'une de ces situations difficiles, comme en ce moment, alors que, dans l'autre moitié des dossiers de l'article 16 qui nous sont soumis, l'agriculteur est presque insolvable, et ces dossiers sont confiés aux services de médiation.
Sur le plan pratique, l'examen pourrait être effectué par le service de consultation. Il pourrait s'agir uniquement de counselling et de communications directes avec le créancier. On pourrait envisager une production à valeur ajoutée qui rapporterait davantage, ou bien on pourrait tirer la conclusion suivante: « Vous n'avez pas l'argent qu'il faut, vous avez des difficultés financières qui, après examen, confirment le bien-fondé de vos préoccupations et la nécessité d'une médiation. » On pourrait alors recourir au paragraphe 5 b). Je constate que la plupart des dossiers relevant du paragraphe 5 b) découlent d'une réunion de consultation préalable qui a eu lieu chez l'agriculteur. Mais on ne veut pas une suspension des procédures. Il y a des créanciers garantis qui doivent participer, dans le cadre d'une médiation.
Voilà comment, selon moi, le dossier pourrait évoluer dans le temps. Quand on prend tout en considération, je crois, dans l'optique qui est la mienne, que nous assurons une gamme de services plus étendue dans un cadre consultatif... Les préoccupations au sujet de l'encadrement législatif et du financement, je puis très bien comprendre tout cela, mais, au niveau de la prestation des services, j'estime que nous allons pouvoir faire davantage pour les agriculteurs, et la nouvelle formule correspond à ce que les agriculteurs ont demandé aux bureaux d'examen.
M. Hermanson: Êtes-vous en mesure de prendre les devants et de prévenir les problèmes? Je songe au rôle de la Société du crédit agricole, dans les années 70 et 80. Cet organisme est devenu le prêteur de dernier recours et a consenti - c'est mon avis, que bien des gens partagent, je crois - des prêts très peu judicieux, ce qui a précipité la crise agricole des années 80 et du début des années 90. On dirait que la Société du crédit agricole s'engage de nouveau dans la même voie et va peut-être consentir à des agriculteurs des prêts qu'elle devrait refuser. Le projet de loi à l'étude permettrait-il au service de médiation ou aux agents de première ligne d'anticiper les problèmes et de tirer la sonnette d'alarme, en disant: il vaudrait mieux que quelqu'un fasse quelque chose, parce que c'est mal parti?
M. Vey: La possibilité est là. Ce serait le rôle du service de consultation. Si un créancier et l'agriculteur voient venir les problèmes, il faudra établir une relation sérieuse avec ceux qui se chargent de l'examen de la situation financière au service de consultation. Ce genre de rôle proactif peut-être précieux. Il est probable que ce sont l'agriculteur et le créancier qui en arriveront là d'eux-mêmes. Au fur et à mesure que le temps passe, les discussions, les communications deviennent plus tendues, les difficultés s'aggravent, les retards s'accumulent, si bien qu'il faut...
Ce sont habituellement les deux parties qui sonnent l'alarme. Si nous pouvons les amener - je songe aux créanciers - à prendre part à certaines de ces démarches, si nous pouvons renvoyer les agriculteurs au service de consultation, pour qu'ils obtiennent un examen indépendant de leur situation financière, je crois que tout peut marcher assez bien. Même si les deux types de service se recoupent, il faut qu'il y ait une différence d'optique entre le service proposé dans la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole et les services de consultation offerts aux agriculteurs pour que tous y trouvent leur compte. J'ignore si nous pouvons bien faire marcher les services dans l'intérêt de tous, mais je crois que tout le monde va essayer, en tout cas.
Le président: Monsieur Hoeppner.
M. Hoeppner: Je voudrais revenir sur un problème qui était très fréquent au milieu et à la fin des années 80 - la situation a peut-être changé - , celui des créanciers non garantis. J'ai insisté, à ce propos, sur le fait que les agriculteurs avaient besoin de bons conseils juridiques. À l'époque, ils n'étaient pas disponibles, et j'ai vu le créancier non garanti soutenir l'exploitation agricole pendant les dernières années et se faire avoir au bout du compte. Les programmes I et II de Mesures de soutien et d'adaptation en agriculture, que les banques ne garantissaient pas, étaient à la disposition des créanciers non garantis. C'est pourquoi je tiens à ce que l'agriculteur ait de bons conseils juridiques. Avez-vous maintenant les ressources pour lui donner ces conseils?
M. Coulter: Nous conseillons aux agriculteurs de retenir les services d'un avocat. Nous ne sommes pas des juristes. Nous ne connaissons pas parfaitement tous les aspects des dossiers. Quand on se rend à ces audiences, on constate qu'il y a une liste incroyable de créanciers non garantis. C'est regrettable. Ce sont eux qui vont écoper. Les créanciers garantis dominent la situation, mais les pauvres créanciers non garantis finissent souvent par tout perdre.
Il est donc très important d'avoir des conseils juridiques. Tout agriculteur devrait avoir un avocat. C'est bien moins coûteux que les procédures. Nous le conseillons fortement.
M. Hoeppner: J'ai vu des cas où la famille n'avait plus rien à manger. Les agriculteurs ne savaient pas qu'il y avait certaines limites. La situation était tellement tendue qu'ils ne pouvaient même pas faire face. C'est pourquoi j'ai réclamé avec insistance une aide financière quelconque pour les agriculteurs qui n'ont pas les moyens d'obtenir des conseils juridiques. À mes yeux, il est très important que l'agriculteur ait des bons conseils juridiques sur ce qui est bien et ce qui ne l'est pas.
M. Coulter: Je suis profondément convaincu qu'il faut suivre le processus. Si on le fait, on ne peut pas se tromper tellement.
L'une des premières choses que j'ai dû apprendre, c'est de faire abstraction de mes émotions. Lorsqu'un agriculteur se présente et que je peux constater qu'il fait une mauvaise affaire, je perdrai toute ma crédibilité si je le dis carrément. On peut vérifier les faits en procédant avec grande prudence, mais le pire qui puisse m'arriver, c'est de perdre ma crédibilité comme médiateur impartial. Il est très important de la préserver.
Les avocats, en Saskatchewan... Je ne suis pas un grand fanatique d'avocats, mais ils vivent dans ces localités. S'ils exploitent un agriculteur, cela finit par se savoir. Il est important d'avoir un expert en finances et un juriste qui peuvent proposer un plan de redressement.
M. Hoeppner: Je suis heureux d'entendre ces propos-là, car c'est ce qui m'inquiétait. J'ai entendu des choses qui m'ont fait bondir, au sujet des créanciers non garantis et des frais de subsistance des familles.
M. Coulter: Un bon avocat connaît tous les règlements qui s'appliquent et il peut jouer un rôle déterminant.
Le président: Je crois que nous sommes arrivés à la fin des questions et des observations.
Messieurs Coulter et Vey, nous vous remercions beaucoup de vous être joints à nous ce matin et d'avoir fait une très bonne contribution à l'étude du projet de loi C-38. Nous vous félicitons des succès que vous avez remporté et nous espérons que vous ne serez pas trop occupés à l'avenir, mais la réalité est que vous aurez probablement toujours du pain sur la planche.
Merci encore d'avoir accepté de comparaître ce matin.
M. Coulter: Monsieur le président, ce fut un plaisir de sortir de la Saskatchewan, et nous allons maintenant y retourner.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Nous comprenons. Bon retour.
Je rappelle aux membres du comité qu'ils ont été avisés d'une séance commune qui réunira ce comité-ci et le Comité des affaires étrangères. Le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale présente un exposé au Comité des affaires étrangères à 11 h 15, à la salle 253-D. Ce groupe voulait nous rencontrer. Je ne vois pas pourquoi il ferait l'exposé à l'autre comité pour ensuite nous le répéter. Je vous demande donc d'assister à la réunion.
L'exposé, qui aura lieu à 11 h 15 à la salle 253-D, durera seulement 45 minutes. Tout le monde a été informé hier. Si vous le pouvez, je vous invite à venir. Tous les membres du comité ont été prévenus par courrier électronique. Je sais que tous ne peuvent pas venir, mais j'invite instamment ceux qui peuvent le faire à assister à l'exposé.
La séance est levée.