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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 11 décembre 1996

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[Traduction]

Le président: Je vous souhaite tous la bienvenue à notre séance d'aujourd'hui.

On vient tout juste de me demander l'autorisation de prendre une ou deux photos des participants à cette table ronde. Ces photos doivent accompagner des articles de journaux. On m'a dit que l'appareil utilisé ne capte pas le son. Donc, si vous voyez quelqu'un prendre des photos, sachez qu'il s'agit d'un journaliste.

Avant de passer à l'audition des témoins, je tiens à rappeler aux membres du comité que nous rencontrerons le ministre demain à 15 h 30.

Serait-il possible, Elwin - je sais que Wayne est disponible - de réunir le comité directeur? L'idée m'en vient tout bonnement. Si nous pouvions nous rencontrer, ne serait- ce que quelques minutes, demain matin, notamment pour discuter de la lettre que nous pourrions envoyer pour donner suite à notre séance d'hier... Avez-vous quelque chose de prévu demain matin, Elwin? Seriez-vous libre?

M. Hermanson (Kindersley - Lloydminster): Sauf erreur, j'ai quelque chose à 10 heures demain matin.

Le président: Donc, si nous pouvions trouver un moment quelque part entre 9 et 10 heures demain matin pour que nous puissions nous réunir juste...

M. Hermanson: Je n'ai pas mon agenda avec moi, mais je pense que ça pourrait aller.

Le président: D'accord. Nous allons demander à Marc si cette heure lui convient également. Sinon, nous n'aurons pas d'autre occasion de discuter des suites à donner à la question dont nous avons débattu à notre séance d'hier.

Encore une fois bienvenue à tous. Nous allons entendre cet après-midi un certain nombre de témoins, et, comme à l'accoutumée, nous avons demandé à chacun d'être le plus concis possible dans leur exposé.

Nous allons donc maintenant aborder la question à l'étude aujourd'hui, le développement rural au Canada. Le printemps dernier, le comité a émis un communiqué de presse invitant les groupes ou les particuliers désireux de faire connaître leurs points de vue sur le développement rural à venir témoigner devant lui dans le cadre de ses travaux. Nous recevons aujourd'hui les gens qui ont répondu à cette invitation.

Quatre groupes ont demandé à comparaître devant nous, et ce sont ces groupes que vous représentez ici aujourd'hui. Nous vous souhaitons donc la bienvenue.

Nous allons commencer par M. Jack Wilkinson, le porte-parole de la Fédération canadienne de l'agriculture. Encore une fois, Jack, bienvenue à notre séance d'aujourd'hui.

M. Jack Wilkinson (président, Fédération canadienne de l'agriculture): Merci beaucoup. Je vous présente Mme Loretta Smith, présidente de notre comité pour l'Ontario. Elle se chargera d'une bonne partie de notre exposé. Je commence à avoir le sentiment que nous nous sommes rencontrés si souvent ces derniers temps que mes idées ont peut- être perdu un peu de leur impact, de leur nouveauté et de leur fraîcheur. Je vais donc demander à Loretta de commencer.

N'est-ce pas là une bonne idée?

Des voix: Oh!

Le président: Jack, je vous assure que vous ne perdez jamais votre impact. Pour ce qui est de la nouveauté et de la fraîcheur de vos idées, je n'en sais rien, mais vous gardez toujours votre impact.

Allez-y, Loretta. Bienvenue.

Mme Loretta Smith (représentante du Comité des femmes pour l'Est du Canada, Fédération canadienne de l'agriculture): La principale préoccupation du gouvernement fédéral étant actuellement la création d'emplois, nous allons axer notre exposé sur le lien entre le développement rural et la création d'emplois.

De tous les emplois qui existent actuellement au Canada, 14 p. 100 se situent dans le secteur de l'agriculture. L'informatique et la technologie qui, à l'heure actuelle, sont considérées comme des industries motrices de croissance économique ne sont toutefois pas créatrices d'emplois, contrairement à l'agriculture qui, tout en étant une industrie de croissance économique, est créatrice d'emplois. Seulement en Ontario et au Québec, elle a créé, entre novembre 1995 et novembre 1996, quelque 40 000 emplois, soit 16 000 en Ontario et 24 000 au Québec.

L'agriculture n'est pas la seule industrie de l'économie rurale qui soit créatrice d'emplois. Il y a 151 000 emplois dans le secteur minier, 53 000 dans ceux des minéraux et des hydrocarbures, et14 000 autres dans celui de la transformation du pétrole. En outre, 105 000 travailleurs du secteur de la pêche commerciale produisent pour une valeur de 3,3 milliards de dollars, et 75 000 travailleurs du secteur de la forêt produisent pour une valeur de 1,25 milliard de dollars. Comme vous pouvez le voir, l'économie rurale est vraiment créatrice d'emplois.

Les problèmes que nous avons actuellement dans tout ce qui touche le développement économique rural tiennent fondamentalement à des questions d'infrastructures. Nous n'avons pas accès aux télécommunications ou aux réseaux de distribution du gaz naturel au même titre que le milieu urbain. Nous avons par ailleurs plus ou moins accès au capital et aux services d'éducation permanente, et nous avons du mal à convaincre les entrepreneurs d'investir dans l'économie rurale.

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Le gouvernement doit mettre en place l'environnement approprié pour que les investisseurs aient confiance dans le milieu rural. C'est de cette façon, croyons-nous, que l'économie rurale pourra se développer.

Jack va maintenant vous parler de nos besoins.

M. Wilkinson: D'accord. Merci, Loretta.

Nous jugeons impérieux que le gouvernement fédéral cesse de considérer le développement rural comme une préoccupation exclusivement liée aux secteurs de l'agriculture et de la production des denrées alimentaires.

Bien sûr, depuis quelques mois, le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire s'est efforcé d'élargir son champ d'action. Par exemple, on a mis sur pied un comité chargé de se pencher sur un certain nombre de problèmes liés au monde rural. Mais, à notre avis, si nous entendons vraiment nous attaquer sérieusement à cette question, il est temps qu'on établisse un ministère des affaires rurales.

Nous ne proposons pas la création d'une imposante bureaucratie. Mais il est clair à notre esprit que, dans bien des cas, le fait confier la responsabilité du développement rural à des ministères dont la vocation n'est pas spécifiquement orientée vers cet objectif fera en sorte que cette question sera l'enfant pauvre de leurs préoccupations. Nous ne voulons pas par là critiquer le travail deM. Goodale. En réalité, il lui serait tout simplement presque impossible de jouer le rôle dont nous voulons parler tout en assumant les responsabilités de son ministère. D'ailleurs, nous avons le sentiment qu'un ministère à part pourrait faire bien davantage que ce qui se fait actuellement.

Force nous est d'admettre que la notion de développement rural en rebute plusieurs, et ce, pour une raison fort simple. Le développement rural étant un domaine très vaste, toute référence à cette préoccupation soulève forcément la crainte que les interventions souhaitées n'entraînent des dépenses considérables. Nous sommes pourtant persuadés qu'il y a beaucoup de mesures que le gouvernement fédéral pourrait prendre sans nécessairement s'engager dans d'importantes dépenses. Ce qui importe par-dessus tout, c'est la façon de s'y prendre. Je ne veux toutefois nullement dire que le gouvernement n'aurait alors aucune dépense supplémentaire à effectuer dans ce domaine.

Vous êtes maîtres de la réglementation. Vous pourriez exiger qu'un certain niveau de services soit offert dans les domaines dont Loretta a parlé, notamment dans celui des télécommunications. Selon la structure que nous nous donnerons dans le secteur agricole, nous pourrons prendre des décisions très importantes sur la question de savoir si l'industrie agroalimentaire doit se développer dans les régions urbaines ou s'il faut s'efforcer de la développer davantage dans les régions rurales, de façon que les régions rurales aient elles aussi l'expertise nécessaire et soient en mesure elles aussi de créer des emplois. En ce sens, le programme des infrastructures pourrait être utile à bien des égards.

On a récemment étendu le mandat de la Société du crédit agricole pour lui permettre d'assumer de nouvelles responsabilités en milieu rural et d'y étendre ses activités. Nous croyons qu'il s'agit là d'une orientation positive et que la Société du crédit agricole et la Banque de développement du Canada devraient intensifier leur collaboration et mieux coordonner leurs activités en milieu rural.

Dans son mémoire au Comité des finances, la Banque de développement du Canada mentionne que 10 p. 100 de son portefeuille de prêts est dans le secteur agricole. Toutefois, d'après nos recherches et les renseignements qu'on nous a fournis, ce pourcentage ne nous semble pas refléter la réalité; il nous paraît même gonflé. Nous sommes d'avis qu'on pourrait faire beaucoup mieux dans ce domaine pour stimuler l'activité économique.

À vrai dire, il y aurait en outre quelque chose à faire du côté des crédits d'impôt à l'investissement. Nous prévoyons que le gouvernement fédéral aura bientôt l'occasion - s'il ne l'a pas déjà fait - d'assouplir un peu ses règles en matière de crédits d'impôt, notamment en ce qui a trait au crédit d'impôt à la recherche, pour stimuler l'activité économique.

Tout le domaine des exportations est très important. Je suis sûr que vous seriez déçus si je n'abordais pas la question du recouvrement des coûts à ce moment-ci. L'autre jour, M. Weaver du Conseil des viandes du Canada s'est exprimé bien clairement là- dessus, et nous allons certes nous pencher très sérieusement sur cette question avec les représentants du Conseil des viandes. Si l'on prend les chiffres qu'il a avancés, s'il a raison de penser que 1,3 millions de porcs vifs - et même plus depuis deux ou trois ans - sont exportés aux États-Unis et nous reviennent transformés... J'ignore si ses données sont exactes, mais compte tenu des coûts qui montent sans cesse dans le secteur de la transformation, cette situation aura certainement d'importantes répercussions.

Si nous établissons un système qui rend prohibitifs les coûts de transformation, dans un domaine où tout le monde parle de potentiel d'exportation de produits à valeur ajoutée et d'augmentation de la demande de produits agricoles avec l'explosion des marchés de l'Extrême-Orient... Il serait proprement criminel de s'en tenir à l'exportation de produits bruts plutôt que de mettre en place les infrastructures voulues pour créer des emplois chez nous dans ce secteur, qui est l'un des plus prometteurs sur le plan de la création d'emplois.

Les statistiques en provenance du Québec et de l'Ontario ne viennent pas de nous. Elles ont été publiées dans les médias, dans des journaux québécois, et nous allons remonter à la source, les étudier plus avant. Mais il est merveilleux de constater que l'industrie agroalimentaire connaît actuellement une telle croissance.

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Par ailleurs, nous croyons qu'un éventuel ministère des affaires rurales pourrait jouer un rôle stratégique dans la coordination d'une foule d'activités tant dans le secteur de la transformation que dans celui de la production à la ferme, car le gouvernement aurait la capacité d'intervenir efficacement dans ces secteurs qui, à notre avis, sont d'importance capitale... Il y a actuellement sur ce plan une lacune très sérieuse. Les besoins dont il a été question - la nécessité de permettre aux régions rurales d'entrer dans le nouvel âge des communications, de décentraliser les activités qui sont actuellement menées en région urbaine, de permettre aux gens des régions rurales et pas seulement aux citadins d'accéder à la nouvelle génération de moyens technologiques et de communication - ne sont pas comblés dans bien des cas. Il y a tellement de choses que nous pourrions réaliser si seulement nous pouvions compter sur un ministère - que nous voudrions particulièrement petit - qui se ferait l'avocat du Canada rural. Nous espérons que de grandes choses s'accompliront à cet égard dans un proche avenir.

Nous nous plaisons à croire qu'on pourrait faire mieux qu'un simple exercice de relations publiques à propos de ce qui s'accomplit déjà.

Merci beaucoup. Nous serons heureux de répondre plus tard à vos questions.

Le président: D'accord. Merci beaucoup, Jack.

Voici la façon dont nous procédons depuis quelque temps dans les séances de notre comité. Nous entendons d'abord tous les exposés et nous passons ensuite à la période de questions. J'estime qu'en laissant les participants poser des questions en cours de route, nous faisons le tour des sujets et nous perdons beaucoup de temps, alors que si on attend plus tard, une même question amène parfois une réponse à plusieurs interrogations d'un seul coup.

Nous allons donc maintenant céder la parole aux représentants du secteur régi par un système de gestion de l'offre. Cynthia, êtes-vous la seule à faire un exposé, ou votre groupe entend-il faire deux ou trois brèves déclarations?

Mme Cynthia Currie (directrice générale, Office canadien de commercialisation des poulets): Comme nous fonctionnons en partenariat, nous serons trois à nous partager l'exposé, monsieur le président.

Le président: D'accord. Est-ce qu'on commence par vous?

Mme Currie: Felix parlera en premier.

Le président: Allez-y, Felix.

[Français]

M. Felix Destrijker (président, Office canadien de commercialisation des oeufs): Monsieur le président, mesdames et messieurs, au nom des cinq organisations nationales représentées ici aujourd'hui, je voudrais vous remercier de l'occasion qui nous est donnée de vous adresser la parole.

Je m'appelle Felix Destrijker et je suis le président de l'Office canadien de commercialisation des oeufs. J'habite Saint-Ludger au Québec, dans la Beauce, un petit village d'environ 1 200 habitants. C'est là qu'est mon entreprise. C'est aussi dans cette communauté que les profits de mon entreprise sont réinjectés pour générer de l'emploi et des revenus qui font généralement qu'une communauté devient plus prospère, plus dynamique. C'est aussi dans cette communauté que j'habite avec mon épouse et mes enfants.

Dans le tableau que je viens de décrire, vous trouverez l'essentiel de notre présentation. C'est de cela que nous voulons vous entretenir aujourd'hui. Pour ce faire, je ne suis pas venu seul. Je suis accompagné de Ken Huttema, président de l'Office canadien de commercialisation des oeufs d'incubation de poulet à chair, et de Cynthia Currie, directrice générale de l'Office canadien de commercialisation du poulet.

Malheureusement, à cause d'autres engagements, nous n'avons pas avec nous de représentants de l'industrie du dindon et de l'industrie laitière.

J'aimerais vous présenter quelques-uns des sujets que nous croyons pertinents dans cette discussion sur le développement rural. Permettez-moi d'abord de partager avec vous quelques données démontrant l'importance de nos productions respectives pour le développement économique des communautés rurales au Canada.

Les divers secteurs canadiens opérant dans un système de mise en marché ordonnée se sont adaptés et continueront à le faire au fil des années afin de mieux répondre aux besoins des Canadiens et des Canadiennes.

La mise en marché novatrice de nos produits a joué un rôle de premier plan dans notre succès. Cela s'est traduit en bénéfices tangibles pour tous les secteurs de nos industries, aussi bien en milieu rural qu'en milieu urbain, où les transformateurs, distributeurs et restaurateurs bénéficient d'un approvisionnement constant de produits frais, souvent locaux et de grande qualité.

La mise en marché ordonnée et les revenus viables qui en sont généralement issus favorisent l'établissement d'un environnement économique stable dans nos communautés rurales. Ce mode de commercialisation permet à ces communautés de se développer à la fois socialement et économiquement.

La stabilité engendrée par la mise en marché ordonnée de nos produits agricoles a contribué de façon sensible à la stabilité économique de la ruralité canadienne et, à plusieurs endroits, en est devenue l'épine dorsale.

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Pris ensemble, leurs secteurs primaires comprennent au-delà de 31 000 fermes individuelles. Les recettes totales de ces fermes se chiffraient à quelque 5,3 milliards de dollars en 1995, ce qui représente environ 20 p. 100 de toutes les recettes monétaires agricoles au Canada.

Dans certaines régions comme l'Ontario, nos productions représentent plus de 60 p. 100 des revenus totaux générés dans le secteur de l'élevage. Au niveau de la vente aux consommateurs, c'est-à-dire les ventes à l'épicerie et dans les restaurants, les ventes totales se chiffrent à environ 12,6 milliards de dollars.

Je crois qu'il est pertinent de mentionner que tout cela s'effectue sans le moindre soutien financier de la part des gouvernements.

Il n'y a pas que les lois domestiques qui puissent influencer l'agriculture. Il est clair que les accords commerciaux internationaux peuvent également avoir un impact important sur nos entreprises.

Nos secteurs ont récemment subi l'attaque des Américains devant un panel d'experts chargés d'examiner le bien-fondé des tarifs canadiens à l'importation sur les oeufs, la volaille et les produits laitiers. Comme vous le savez, le panel a donné raison au Canada. De plus, ce fut une décision unanime des membres du panel. Cela démontre la force des arguments utilisés par le Canada.

Le Canada avait pleinement raison d'utiliser ces tarifs, comme nous le savions, et les Américains aussi le savaient d'ailleurs. Il s'agit d'une excellente nouvelle pour les Canadiens. L'épée de Damoclès qui pendait au-dessus de nos têtes de producteurs a été enlevée. Nous pouvons maintenant passer à d'autres choses.

Nous sommes d'ailleurs tous reconnaissants au gouvernement fédéral et aux députés fédéraux pour leur solide soutien dans la défense de l'intégrité de notre agriculture sous la gestion de l'offre. Il est à noter aussi que les dix gouvernements provinciaux ont joué un rôle important dans cette victoire. Chacun d'entre eux a soutenu le travail du gouvernement fédéral et nous pouvons en dire autant de nos organisations.

Avec votre permission, j'aimerais maintenant inviter Mme Cynthia Currie, directrice générale de l'Office canadien de commercialisation du poulet, à livrer la suite de cette présentation.

[Traduction]

Mme Currie: Merci, Felix.

Bon après-midi, monsieur le président. Madame et messieurs les membres du comité, bonjour.

Je vais vous entretenir aujourd'hui de l'industrie du poulet et me servir de cet exemple pour vous montrer l'utilité du système de gestion de l'offre pour le Canada rural.

Comme vous le savez, l'industrie du poulet s'est considérablement développée ces dernières années. Nous avons de mieux en mieux répondu aux besoins des Canadiens. Par exemple, le nombre de producteurs de poulets au Canada s'est accru de 25 p. 100 depuis 10 ans, alors que le nombre des autres entreprises agricoles a diminué dans l'ensemble de quelque 14 p. 100. Nous sommes passablement fiers de ce que nous avons accompli.

En outre, la production de poulets a augmenté de 45 p. 100 au cours de la dernière décennie. Cela signifie que non seulement il y a plus d'établissements avicoles, mais qu'ils sont en moyenne plus importants et plus productifs. En 1995, le secteur de la production de poulets a employé directement plus de 4 000 Canadiens et Canadiennes et généré approximativement 1,4 milliard de dollars de ventes depuis la ferme.

L'essentiel, c'est que la production de poulets est sans contredit une industrie de croissance. Cette croissance contribue à la sécurité et à la stabilité du Canada rural.

Voyons ce qui s'est produit dans les secteurs de la transformation primaire et de second cycle. Nous avons des usines de transformation primaire et de second cycle dans toutes les régions du Canada. L'an dernier seulement, le secteur de la transformation, qui emploie actuellement quelque 11 000 Canadiens et Canadiennes, a généré quelque 1,6 milliard de ventes au niveau du commerce de gros, ce qui s'est traduit par des ventes au détail d'une valeur d'environ 2,6 milliards.

C'est donc dire que, au total, plus de 15 000 personnes travaillent comme producteurs ou dans des usines de transformation, sans compter les nombreuses personnes employées dans des couvoirs ou des provenderies et dans les divers secteurs qui fournissent les intrants servant à la production des poulets. De la façon dont se répartissent les nombreux emplois ainsi créés, toutes les régions du Canada en profitent.

Je vais vous illustrer ce que tout cela signifie vraiment. Commençons par le Canada atlantique, et voyons un peu ce que la gestion de l'offre y représente. Prenons l'exemple de la localité de Saint-François-de-Madawaska au Nouveau-Brunswick. C'est une petite localité qui est située dans le nord de cette province et qui est le coeur de l'industrie du poulet du Nouveau-Brunswick. À Saint-François, si vous voulez travailler, essentiellement deux possibilités s'offrent à vous: la production de poulets ou la fabrication de meubles.

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Côté poulets, Saint-François a la seule usine importante de transformation du poulet dans cette province. On y trouve également une provenderie ainsi qu'un couvoir qui fournit les poussins aux 20 producteurs de poulets de cette région. Or, il se trouve que 20 producteurs de poulets, c'est la moitié du nombre total de producteurs de poulets au Nouveau-Brunswick. Si Saint-François perdait l'industrie du poulet, jusqu'à la moitié des travailleurs de cette localité pourraient se retrouver sans emploi.

[Français]

Au Québec, la circonscription fédérale de Berthier - Montcalm, où l'industrie fait vivre une centaine de producteurs de poulets et leurs familles, illustre bien mon propos. Ces familles produisent au-dessus de 58 millions de kilogrammes de poulets. C'est plus de 20 p. 100 de la production de la province et quelque 72 millions de dollars de recettes à la ferme. Cela se passe dans une circonscription au Québec.

C'est aussi dans cette circonscription que se trouve le plus gros abattoir du Québec. Il est situé à Berthier et emploie 300 travailleurs et travailleuses. La même compagnie possède une autre usine à Joliette, où il y a 300 autres employés. On y compte aussi plusieurs meuneries, d'importants couvoirs et plusieurs poulaillers de poules de reproduction. Ce sont des centaines d'autres emplois qui se rattachent directement au secteur de la production du poulet. Donc, notre industrie est très importante au Québec.

[Traduction]

L'Ontario est la province qui produit le plus de poulets au Canada. On y compte au- delà de1 000 producteurs de poulets, qui produisent quelque 330 millions de kilos de poulet, pour des ventes d'environ 400 millions de dollars annuellement. Cinquante et une des 120 usines de transformation de la volaille au Canada sont situées en Ontario. Elles emploient près de 5 000 personnes.

Comme vous pouvez le constater, le système de gestion de l'offre procure à l'Ontario une industrie du poulet passablement vigoureuse. Ce système profite tant au Canada rural qu'au Canada urbain.

Si nous nous déplaçons plus à l'ouest, nous constatons que, encore là, le poulet est l'une des principales productions de certaines des provinces de l'Ouest. Dans l'Ouest canadien, il y a quelque 840 producteurs de poulets. Bien des gens ne se rendent pas compte que nous avons un si grand nombre de producteurs de poulets dans l'Ouest, mais je puis vous assurer que c'est bel et bien le cas. Ces gens produisent environ 265 millions de kilos de poulet. C'est environ 30 p. 100 de la production totale canadienne. On trouve en outre quatre usines de transformation dans les quatre provinces de l'Ouest. Elles emploient plusieurs centaines de personnes.

L'essentiel dans tout cela, c'est qu'on constate que l'industrie du poulet est florissante et qu'elle est bien répartie dans les diverses régions du Canada. Notre industrie est en pleine expansion. Nous avons commencé à explorer le marché de l'exportation. En 1995, le Canada a exporté 33 millions de kilos de poulet, d'une valeur d'environ 40 millions de dollars. Pour 1996, nos exportations resteront sensiblement au même niveau.

Nous vendons du poulet à des pays aussi éloignés de nous que l'Afrique du Sud et la Chine, ou aussi près de nous que Cuba. Récemment, notre Office de commercialisation des poulets a mis la touche finale à une politique d'exportation qu'elle a élaborée en étroite collaboration avec les milieux de la transformation. Cette politique a pour but de planifier les exportations de façon à ne pas nuire au marché local.

Nous envisageons en outre d'utiliser cette politique d'exportation pour nous tailler de nouveaux créneaux sur les marchés mondiaux de manière à pouvoir exporter des produits du poulet à valeur ajoutée. Nous pourrons ainsi créer des emplois chez nous plutôt que d'en exporter. En incitant nos entreprises de transformation à profiter de la demande croissante de produits du poulet sur les marchés mondiaux, cette politique permettra à l'industrie canadienne du poulet dans son ensemble d'accroître sa compétitivité grâce aux économies d'échelle qu'elle pourra réaliser tant dans le secteur de la production que dans celui de la transformation.

Voilà qui résume ce qui se fait dans l'industrie du poulet et qui illustre ce que la gestion de l'offre signifie pour le Canada rural, dans toutes les régions du pays.

Monsieur le président, si vous me le permettez, je vais maintenant céder la parole à M. Ken Huttema, président de l'Office canadien de commercialisation des oeufs d'incubation de poulet à chair, qui se chargera de la conclusion de notre exposé.

M. Ken Huttema (président, Office canadien de commercialisation des oeufs d'incubation de poulet à chair): Merci. Je vais vous parler brièvement de la situation de notre industrie en ce qui a trait aux accords commerciaux internationaux.

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Comme Felix vous l'a signalé tout à l'heure, les accords commerciaux ont un énorme impact sur la viabilité continue des secteurs régis par le système de gestion de l'offre. Nous savons que, en ce qui a trait aux Américains, la lutte est loin d'être terminée. Cette citation attribuée à Charlene Barshefsky, chargée auprès du gouvernement des États-Unis des relations commerciales avec l'étranger, l'illustre bien: «Notre objectif est de pénétrer le marché canadien avec nos produits laitiers et agricoles. Nous n'entendons pas lâcher prise.»

Aucun d'entre nous n'a idée d'opter pour la politique de l'autruche. Nous nous disons que nous avons tout au plus gagné une bataille, et que les Américains vont continuer de nous pourchasser.

La National Milk Producers Federation, un groupe coopératif de producteurs laitiers américains dont les membres produisent environ 65 p. 100 du lait qui se vend aux États- Unis, a indiqué que la décision mal inspirée de ce groupe spécial ne freinerait pas ses efforts pour l'établissement du libre-échange avec le Canada dans ce domaine.

Nous sommes clairement prévenus par les Américains que ni leur industrie ni leur gouvernement n'ont l'intention d'abandonner la partie. Voilà pourquoi nous avons besoin de l'appui soutenu du gouvernement fédéral pour contrer toute nouvelle tentative américaine d'affaiblissement de notre système de gestion de l'offre. Cet appui est essentiel, car l'agriculture est importante pour le bien-être des Canadiens, tant en milieu rural qu'en milieu urbain. Nous croyons que la commercialisation ordonnée a contribué à la stabilité économique du Canada rural et est même devenue le pivot de la vie économique dans de nombreuses collectivités rurales. Notre système de commercialisation ordonnée permet de créer et de maintenir une multitude d'emplois au Canada.

Pour que ces emplois soient sauvegardés dans l'avenir, nous avons besoin de l'engagement soutenu du gouvernement fédéral. Nous croyons que cela est d'autant plus important aujourd'hui que la première conférence ministérielle de l'OMC se tient cette semaine à Singapour. Nous demeurons confiants que, comme par le passé, le gouvernement continuera de travailler en collaboration avec les organismes de notre secteur pour qu'à l'issue du prochain cycle de négociations de l'OMC on nous reconnaisse le droit de continuer de gérer efficacement nos programmes de commercialisation ordonnée.

Notre système de commercialisation ordonnée génère énormément d'activité économique dans les régions rurales de tout le Canada. Nous croyons que le gouvernement fédéral doit en tenir pleinement compte dans l'établissement de ses politiques. D'ailleurs, les revenus produits à la ferme et dans le secteur de la transformation profitent aussi aux citadins, car ils contribuent à créer des milliers d'emplois dans les agglomérations urbaines.

Il est arrivé dans le passé que le développement rural soit synonyme d'octroi de subventions gouvernementales ou d'autres types d'aide financière. Nous estimons que ce n'est pas cette voie qu'il faudra suivre dans l'avenir. Pour profiter pleinement du potentiel du marché, nous avons besoin d'une participation gouvernementale appropriée, d'un gouvernement qui nous aménage un environnement propice en intervenant de façon minimale mais directe, en établissant une réglementation claire et des lois stables.

Au nom des 31 000 producteurs que nous représentons, nous tenons à remercier les membres du comité de nous avoir entendus cet après-midi. Nous nous ferons un plaisir de répondre à toute question s'il nous reste du temps.

Le président: Merci beaucoup, Ken.

Notre prochain intervenant sera M. Bill Poole de Canards Illimités.

Bienvenue au comité, Bill.

M. Bill Poole (agronome provincial, Canards Illimités du Canada): Merci, monsieur le président.

Avant le début de la séance, je me suis entretenu brièvement avec M. McKinnon, et je lui ai demandé s'il jugeait que ce serait utile ou bien gênant que je mentionne que lui et moi avons été compagnons de chambre à l'université de Brandon pendant un an il y a quelques années. Nous n'en sommes venus à aucune conclusion à cet égard, de sorte que je n'en ferai pas mention.

Des voix: Oh!

Le président: Si vous voulez vous renseigner à son sujet auprès de certains d'entre nous après la séance, peut-être aurions-nous des choses intéressantes à vous apprendre.

M. Poole: À moins d'une catastrophe climatique ou d'une énorme erreur humaine, le territoire rural canadien devrait être cultivable à perpétuité. Les Canadiens et les Canadiennes ont absolument besoin des aliments et des fibres qui se produisent dans nos campagnes pour combler une bonne part de leurs besoins alimentaires quotidiens. La vente de nos surplus de produits agricoles fournit aux habitants de nombreux pays étrangers une alimentation de haute qualité. Ces ventes contribuent en outre largement à la prospérité économique de notre pays.

Naturellement, je devine que ce sont là des vérités qui vont de soi pour les membres du comité. Ce qui n'est toutefois peut-être pas aussi évident, c'est le fait que ce même territoire rural produit beaucoup d'autres biens qui contribuent également à la santé et au bien-être des Canadiens. Les avantages qu'on tire de ces biens, par exemple de la reconstitution des zones humides, du contrôle des crues dans les zones inondables, de la désignation de zones-tampons riveraines, et de la préservation de la faune, de la flore et de la biodiversité, profitent non seulement aux propriétaires des territoires où ces biens sont produits, mais à l'ensemble de la société.

Dans un document intitulé Politiques agricoles et commerciales du Canada: Répercussions sur le renouveau rural et la biodiversité, que Robert Sopuck a préparé pour la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie qui s'est tenue en 1993, on désigne ces autres biens comme des services écologiques. Sopuck les définit comme des biens publics non commercialisés qui sont produits sur des propriétés privées.

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J'aimerais prendre avec vous quelques minutes pour revoir comment le soin apporté à l'un de ces services écologiques, l'habitat de la sauvagine, a permis qu'un important programme de développement rural soit en voie de réalisation depuis maintenant dix ans. Si je tiens à cet examen, c'est pour bien illustrer que la diversification des produits agricoles et leur transformation pour leur donner une valeur ajoutée ne sont pas les seules possibilités qui s'offrent à nous pour assurer le développement rural.

Il y a dix ans, le Canada et les États-Unis signaient le Plan nord-américain de gestion de la sauvagine, parce qu'ils s'inquiétaient l'un et l'autre du déclin des populations de ce gibier d'eau. C'est l'un des accords environnementaux les plus ambitieux jamais conclus. Le Mexique participe officiellement à la réalisation du Plan depuis 1994, ce qui donne à cet effort un caractère vraiment continental. Le document que vous avez devant vous, intitulé En plein essor, donne un aperçu du travail qui a été accompli au cours des dix premières années de réalisation de ce Plan.

Je ferai également mention de plusieurs autres publications qui, sauf erreur, vous seront remises dès qu'elles auront été traduites.

Comme ce sont surtout les activités liées à la réalisation du Plan dans les provinces des Prairies qui me sont familières, c'est sur cette région du pays que la plupart de mes propos porteront.

En guise d'introduction, je tiens à vous rappeler brièvement deux points. D'abord, comme je l'ai mentionné précédemment, dans bien des régions des Prairies le territoire rural produit tant des produits agricoles que du gibier d'eau. Deuxièmement, certaines techniques de gestion des sols peuvent favoriser tant l'agriculture que la faune et la flore. Le rapport mutuel existant entre ces deux réalités explique dans une large mesure le succès qu'a connu le Plan.

Dans quelle mesure le Plan s'est-il révélé un succès comme catalyseur du développement rural? Voici certains des principaux renseignements que contiennent à cet égard les documents qu'on vous remettra.

La Stratégie canadienne de la biodiversité la présente comme un modèle d'approche coopérative intersectorielle pour la conservation de la biodiversité et le maintien des ressources biologiques.

Dans son étude de 1995 intitulée «Agriculture and Sustainable Development: Policy Analysis on the Great Plains», l'Institut international du développement durable a dit estimer que le Plan était compatible avec l'agriculture durable et la favorisait.

M. Richard Gray, un économiste agricole de l'Université de la Saskatchewan, en arrivait à la conclusion, dans une étude de 1992, que, sur le plan de la fiscalité tant fédérale que provinciale, le PCHP est assurément un très bon investissement pour les contribuables. Je m'empresse de vous expliquer que le PCHP est le Projet conjoint des habitats des Prairies, le plus important programme régional faisant partie du Plan nord- américain de gestion de la sauvagine.

M. Ray Josephson de l'Université du Manitoba a interviewé 80 fermiers du sud- ouest manitobain en 1992 pour évaluer les impacts financiers de six pratiques d'utilisation du sol recommandées par le Plan comme étant mutuellement avantageuses pour l'agriculture et pour la faune. Il a constaté que l'application de ces méthodes de conservation augmente de 13,27 $ l'acre le rendement annuel net des fermes, et ce, sans compter les subventions gouvernementales ou autres primes d'encouragement qui peuvent être versées dans le cadre du Plan.

M. Josephson a estimé que si ces méthodes de conservation étaient adoptées dans les 48 municipalités visées par le Plan au Manitoba, le revenu agricole net pourrait augmenter de 50 millions de dollars par an dans cette province.

M. Jim MacMillan de l'Université du Manitoba a évalué l'impact économique des activités du Plan au Manitoba, en Alberta et en Saskatchewan pour la période allant de 1991 à 1994. Il a notamment constaté que le Plan avait permis de créer en moyenne annuellement quelque 2 362 emplois pendant quatre ans, dont 547 à l'extérieur des provinces des Prairies; que l'application du Plan dans les Prairies avait généré plus de 103 millions de dollars de revenus dans les provinces des Prairies et 18 millions de dollars supplémentaires dans le reste du Canada; et que les activités du Plan avaient accru de près de 118 millions de dollars le produit intérieur brut de ces trois provinces.

Le comité sera peut-être également intéressé de savoir que M. MacMillan est arrivé à la conclusion que le Plan avait créé au Manitoba 22 emplois par million de dollars dépensés, comparé à 15 emplois par million de dollars dépensés dans le cadre du programme des infrastructures.

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Bref, le Plan a clairement montré que les ressources autres que les produits agricoles peuvent également contribuer à favoriser le développement rural. Le Plan a également donné de bons résultats en ce qui a trait au gibier d'eau. La migration d'automne des canards est estimée à environ 90 millions d'individus pour 1996, ce qui représente une augmentation de 35 millions d'individus depuis 1985.

Il est donc possible de favoriser la faune en même temps que l'agriculture et les collectivités rurales. Je vous exhorte à garder cela à l'esprit dans vos délibérations sur le développement rural.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Poole.

Notre dernier intervenant est M. Lyle Knutson. Il y a un membre de notre personnel qui écrit son nom de cette façon, mais on l'entend parfois prononcé différemment. Bienvenue au comité, Lyle. Nous sommes impatients de vous entendre.

M. Lyle Knutson (à titre individuel): Merci beaucoup, monsieur le président, madame et messieurs les membres du comité. Je tiens à vous remercier de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui d'un domaine que j'ai bien à coeur, le développement rural.

En guise d'introduction, je vous signale que j'exploite une ferme dans la localité d'Elbow, en Saskatchewan. Bien que ma ferme ne soit pas située dans la circonscription de M. Hermanson, je crois qu'il peut l'apercevoir de sa propre ferme.

J'exploite donc une ferme céréalière avec mon épouse Gaylene et mon fils Kris. Depuis 1991, je suis membre bénévole du comité de développement économique d'Elbow, que je représente ici aujourd'hui. C'est ainsi que j'en suis venu à m'intéresser au développement rural.

L'année 1991 a été fort éprouvante pour nous, à Elbow. Nous y avons vécu en petit quelques-uns des problèmes auxquels toute la province a eu à faire face sur une plus grande échelle. Le conflit céréalier opposant la Communauté économique européenne et les États-Unis était cette année-là à son apogée. Il a fait baisser le prix des céréales à l'un de ses plus bas niveaux dans l'histoire. On n'en était encore à cette époque qu'à l'étape expérimentale en matière de diversification des cultures. Localement, on nous a avisé de la fermeture imminente de notre école, et peut-être de notre silo-élévateur. Notre ligne de chemin de fer semblait également menacée d'abandon. Les entreprises locales, y compris notre coopérative de crédit, luttaient pour leur survie. Certains agriculteurs de la région étaient contraints de céder leur terre.

C'est dans ce contexte qu'un petit groupe d'entre nous se sont réunis et, sous la direction du conseil du village, ont mis sur pied un comité de développement économique. Il n'y en avait encore jamais eu dans notre région. Nous nous sommes dit que nous étions les mieux placés pour renverser la tendance. Nous avons donc établi une série d'objectifs à court, moyen et long terme pour tenter de diversifier notre économie locale.

Nous avons tenu des séances du comité et avons constaté que la population locale appuyait très fortement nos objectifs. En dedans de six mois, nous avons pu attirer une petite entreprise de fabrication, et, grâce à la vente d'obligations locales assujetties à la réglementation provinciale, nous avons recueilli un million de dollars pour aider cette société à démarrer. Dans les six mois suivants, une deuxième émission d'obligations locales nous a permis d'amasser 600 000 $ pour aider au démarrage d'une usine d'assemblage de circuits électroniques.

Le comité de développement économique a également initié deux études. Nous avons participé à l'une des deux qui consistait à évaluer la faisabilité d'un projet d'hôtel qui pourrait aussi bien accueillir des congressistes et des gens désireux de faire une cure de santé. L'autre étude portait sur la possibilité d'implantation d'une entreprise d'aquaculture au lac Diefenbaker, près d'Elbow.

Il y a quelques mois, nous avons réussi à attirer une fabrique de bancs de piano haut de gamme. Cette entreprise exporte ses produits dans le monde entier. La plupart des bancs de piano qu'elle fabrique sont destinés au marché américain, mais elle en a récemment expédié également au Japon - et, soit dit en passant, elle en vend très peu sur le marché canadien. Depuis deux semaines, notre comité est en pourparlers avec le Saskatchewan Wheat Pool à propos de la possibilité d'établir une mégaporcherie dans notre région.

Les progrès que nous avons réalisés dans la poursuite de nos objectifs ont été emballants pour notre petite collectivité. Toutefois, nous avons connu certaines déceptions majeures. Les deux sociétés établies grâce à l'émission d'obligations locales ont toutes deux abouti à un échec. Les leçons que nous avons tirées de l'expérience de ces deux entreprises sont à peu près identiques. Les deux avaient été lancées par des entrepreneurs qui avaient de grandes idées, mais qui étaient à court de fonds de roulement. La gestion de ces deux entreprises laissait gravement à désirer, et, surtout, les membres de leurs conseils d'administration, qui étaient issus de la population locale et qui avaient été désignés par la commission qui avait émis les obligations locales, étaient animés de bonnes intentions mais manquaient d'expérience. Ils étaient réticents à contester la gestion de l'entreprise ou à proposer des solutions; ils étaient donc inefficaces.

En tirant la leçon de cette expérience, nous recommandons fortement que l'on procure aux groupes communautaires ou aux candidats potentiels à un conseil d'administration la possibilité d'être formés par des professionnels avant de s'aventurer dans ces postes. Je suggère également qu'on offre aux membres des comités locaux de développement économique une formation qui leur apprenne comment analyser et élaborer des études qui sont entreprises en leur nom. Ces cours pourraient être dispensés par des universités ou par des collèges communautaires. Pourvu qu'il soit appuyé par un bon effort de publicité, un tel programme aiderait grandement les groupes à protéger l'argent des contribuables et des investisseurs, en plus de créer des circonstances favorables au succès des entreprises concernées.

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Au niveau provincial, nous observons de nombreux signes de prospérité en Saskatchewan. L'industrie agroalimentaire connaît une croissance qui l'amène à la limite de sa capacité. La production et la transformation à valeur ajoutée du grain et du bétail progressent.

J'ai mentionné précédemment que le comité de développement économique d'Elbow est en discussion avec le Saskatchewan Wheat Pool à propos de l'implantation éventuelle d'une mégaporcherie. Le Saskatchewan Wheat Pool envisage de se lancer dans des entreprises de coparticipation en partenariat avec un certain nombre de groupes communautaires de la province. Il a pour objectif de doubler, voire de tripler, la production porcine en Saskatchewan. Il fournira la moitié des capitaux requis, le reste devant provenir des investisseurs locaux. L'expertise en matière de gestion sera assurée par le Saskatchewan Wheat Pool.

Des initiatives de ce genre, où les petits investisseurs travaillent en partenariat avec d'importantes sociétés bien capitalisées, auront, je crois, un effet d'entraînement dans le domaine de l'emploi et créeront un contexte stable propre à favoriser l'investissement et à renforcer l'économie des régions rurales.

J'ai également fait mention d'un projet dans le secteur de l'aquaculture, et je crois queM. Hermanson en a peut-être déjà un peu entendu parler. Comme vous le savez, les stocks de poisson de mer diminuent. La demande est forte sur le marché. La Saskatchewan dispose d'importantes ressources en eau douce. Cette industrie naissante peut offrir d'autres possibilités de production à valeur ajoutée et d'entreprise en partenariat.

Comme dernier point, je me dois de vous signaler, même si je suis conscient que votre comité oeuvre au niveau fédéral et qu'il a pour mandat de se pencher sur le développement rural à l'échelle nationale, que le réseau routier de ma province est dans un état lamentable. Compte tenu de toutes les initiatives positives qui sont prises en Saskatchewan en matière de développement rural, il est primordial de s'attaquer dès maintenant à notre problème d'infrastructures routières.

Notre industrie manufacturière est largement tributaire du programme d'exportation vers les États-Unis. L'industrie des céréales s'oriente en fonction de la rationalisation du transport ferroviaire et d'un recours accru au transport par semi-remorques. Nous constatons par ailleurs une augmentation du trafic touristique en provenance des États- Unis.

Bien que le réseau routier soit de compétence provinciale, des fonds fédéraux ont récemment été alloués dans le cadre du programme des infrastructures ainsi que dans le cadre du Programme de transition du grain de l'Ouest. J'exhorte le comité à recommander au gouvernement fédéral de continuer, dans le cadre d'ententes sur le partage des coûts avec le gouvernement provincial de la Saskatchewan, d'accorder du financement pour nous permettre de rattraper notre retard dans ce domaine. Je placerais ce besoin en tête de nos priorités actuellement.

En résumé, je recommande, premièrement, qu'on fournisse une formation efficace aux leaders locaux en matière d'analyse et d'administration.

Deuxièmement, qu'on encourage les partenariats entre les entreprises bien capitalisées et les localités rurales, en insistant particulièrement sur les projets d'entreprises à valeur ajoutée dans l'industrie agricole et dans l'industrie des ressources aquatiques renouvelables.

Troisièmement, qu'on améliore l'infrastructure routière provinciale afin qu'elle puisse soutenir la croissance des secteurs manufacturier, agricole, agroalimentaire et touristique. J'estime que les campagnes de la Saskatchewan et du Canada peuvent faire une contribution considérable à l'économie, et bien des mesures ont été prises dans ce sens.

Malgré les budgets limités, c'est grâce à la collaboration des divers ordres de gouvernement et des divers comités que l'objectif visant à permettre aux campagnes de connaître la stabilité et la croissance deviendra réalité.

Merci encore de m'avoir invité à participer à cette table ronde. Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, Lyle.

Nous allons maintenant passer à la période des questions et des commentaires des membres du comité. Nous allons céder successivement la parole à MM. Calder, Hermanson et Reed.

M. Calder (Wellington - Grey - Dufferin - Simcoe): Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais que chacun de ceux qui nous ont fait un exposé aujourd'hui aient bien à l'esprit le mot «micropolitain» avant que je parle de la possibilité d'un ministre des Affaires rurales. Si je dis «micropolitain», c'est que les composantes du Canada rural sont maintenant les mêmes que celles du Canada urbain, du Canada métropolitain. Nous avons des industries de base. Nous avons une industrie de base principale, l'agriculture, qui se subdivise en plus petites industries, celles du poulet, du bétail, des céréales, etc.

Nous avons en outre des industries secondaires qui s'occupent principalement de fabrication de pièces d'équipement agricole, de matériel de parcage, etc. pour l'industrie de base. Nous avons au Canada rural des services de soutien pour les travaux de mécanique, d'électricité, etc.

Si le secteur micropolitain est bien traité, il pourra, à mon avis, rapporter au gouvernement d'importants revenus fiscaux, ce qui, n'est-ce-pas, répondrait à nos souhaits.

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Je vois des problèmes actuellement. Je constate que la moyenne d'âge des agriculteurs, des travailleurs de l'industrie de base du Canada rural, augmente. Je constate que les possibilités pour les enfants issus de nos familles d'agriculteurs ne sont pas aussi reluisantes qu'elles pourraient l'être dans le Canada rural. Ces enfants choisiront donc d'aller s'installer en ville. D'ailleurs, comme on l'a mentionné précédemment, il ne fait aucun doute qu'il faut qu'on améliore nos infrastructures et qu'on nous donne accès à l'autoroute de l'information.

Les services médicaux posent problème, de même que l'empiétement urbain, car en janvier prochain, le premier baby-boomer aura 50 ans. Étant donné qu'il y a au Canada 9,8 millions de baby-boomers, cela veut dire que, chaque année d'ici 20 ans, 500 000 d'entre eux atteindront la cinquantaine, puis la soixantaine, et ainsi de suite. Or, à ce que je constate, ils veulent tous sortir de la ville pour aller prendre leur retraite en paix, en l'occurrence au Canada rural. Cela pose un problème majeur pour notre industrie de base, la production alimentaire et l'agriculture.

Par ailleurs, d'ici l'an 2025, la population mondiale atteindra 8 milliards d'habitants. Je crois donc que l'industrie de base du Canada rural a un potentiel formidable.

Donc, si l'on créait un ministère des affaires rurales, j'aimerais que vous nous décriviez ce que, selon vous, le titulaire de ce poste devrait faire, quelles devraient être ses responsabilités, en gardant à l'esprit que, comme ministre fédéral, il devra interagir largement avec les provinces. Dans cette hypothèse, croyez-vous que les administrations provinciales devraient également avoir un ministre équivalent dans leur gouvernement? J'aimerais qu'on en discute.

Le président: Vous feriez mieux de dire «il ou elle», sinon, vous allez avoir des problèmes. Vous êtes placé entre deux...

M. Calder: J'ai employé le mot «personne».

Mme Ur (Lambton - Middlesex): Non, vous avez dit «il».

M. Calder: Dans ce cas, je m'excuse, et je dis «elle»ä

Mme Ur: Il porte une jupe, aujourd'hui, monsieur le président.

Le président: Comme vous portez une jupe aujourd'hui, monsieur Calder, j'ignore comment vous allez vous en tirer.

M. Calder: Nous verrons bien.

Le président: Ça va. Qui désire répondre à cette question? Jack.

M. Wilkinson: En ce qui a trait à ses responsabilités, je crois que même si on a fait de sérieux efforts ces derniers mois pour essayer de s'attaquer concrètement aux problèmes du Canada rural, parce qu'il est très clair que cette préoccupation touche bon nombre de ministères, depuis celui des Pêches... Au départ, il y a au moins six ou sept ministères qui ont affaire aux problèmes ruraux, depuis celui de l'Industrie, ou du Commerce international, en passant par celui des Ressources naturelles - il y en a un bon nombre - d'autant plus qu'il n'y a, à vrai dire, pas beaucoup de différence entre les problèmes auxquels font face les collectivités, qu'elles vivent des mines ou de la pêche. On observe les mêmes problèmes partout dans les régions agricoles et dans l'arrière-pays.

À notre avis, un tel ministre devrait avant tout être un défenseur du Canada rural, qui s'emploierait à temps plein à faire le pont avec les ministères intéressés. Nous croyons que l'approche qui consiste à dire que chaque cabinet de ministre s'efforce de bien servir le Canada rural n'a pas donné de résultats. N'empêche que c'est la réponse que le premier ministre nous a constamment servie jusqu'à maintenant. Il s'agit là, à mon avis, d'une façon impraticable d'aborder le problème. Tout le monde ne peut pas être ministre du Commerce, de l'Industrie, de la Santé, même si toutes ces préoccupations se retrouvent dans chacune des circonscriptions.

Nous ne songeons pas à un énorme ministère, car, bien honnêtement, nous estimons que les ressources sont déjà mobilisées par les principaux ministères. Ce qui nous apparaît primordial, c'est que les énergies soient coordonnées et que les questions soient soumises à un ministre exclusivement voué aux affaires rurales.

Quant à savoir s'il serait souhaitable qu'il y ait une contrepartie provinciale d'un éventuel ministre fédéral des affaires rurales, j'ai le sentiment qu'il est plus que probable que les provinces s'empresseraient d'emboîter le pas, car il semble bien que, dans beaucoup de provinces, l'alliance entre les affaires agricoles et les affaires rurales ne fonctionne pas présentement comme les gens le voudraient. Ce qui importe, c'est de savoir comment nous allons régler la question et à qui devrait être confiée cette responsabilité. Il nous vient tout de suite à l'esprit que ce devrait être le ministre de l'Agriculture, mais n'oublions pas qu'il s'agit là d'une question très vaste.

Je crois d'ailleurs que, au fur et à mesure qu'on poursuivra la déréglementation, il deviendra de plus en plus difficile d'aborder efficacement ces problèmes si on n'y met pas beaucoup d'attention et d'énergies. Nous craignons que cette carence ne s'aggrave plutôt que de s'atténuer. Nous faisons face à de multiples compressions budgétaires et à une déréglementation systématique, toutes choses qui se traduisent souvent par une diminution des services aux marchés de faible densité, lesquels, en réalité, sont ni plus ni moins que nos membres. Et je crois qu'il nous faut cerner ce problème, l'attaquer de front, et trouver des moyens de le contourner. Nous croyons qu'il y a de nombreuses façons d'y parvenir, et qu'elles varient selon les secteurs.

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Le président: Loretta.

Mme Smith: J'aimerais ajouter ici quelque chose. Je crois que très succinctement les tâches d'un éventuel ministre des affaires rurales devraient se résumer à celles de chien de garde et de porte-parole du monde rural.

Le président: D'accord. Monsieur Hermanson.

M. Hermanson: Merci, monsieur le président. J'aimerais remercier les témoins pour l'excellence de leurs exposés.

J'ai remarqué que les représentants de l'industrie du poulet ont insisté dans leur déclaration sur le fait que leur industrie était florissante, et que, de ce fait, elle créait des emplois et elle était un atout pour le Canada rural. Je crois qu'il s'agit là d'un principe très important.

J'ai un peu de mal à croire que la création d'un nouveau ministère qui s'appellerait le ministère des affaires rurales et qui serait dirigé par un ministre de second rang, à l'image de certains autres ministres de second rang que compte déjà ce cabinet, permettrait soudainement qu'on s'attaque enfin vraiment aux problèmes ruraux. Le passé étant garant de l'avenir, il ne m'apparaît pas justifié d'être optimiste à cet égard.

J'ai trouvé particulièrement intéressants les propos de M. Knutson et ses illustrations, car j'ai vécu moi-même presque exactement les mêmes expériences que lui. Si, en Saskatchewan, nous avons des infrastructures rurales passablement bonnes, c'est que les politiciens ont assez de facilité à en obtenir l'implantation. J'étais encore bébé quand on a réalisé l'électrification rurale dans ma province; on a amené le gaz et les communications téléphoniques souterraines dans les campagnes; et on en est maintenant à l'enfouissement des lignes électriques. On installe des réseaux d'aqueduc en milieu rural. Internet est en train d'envahir les régions rurales de la Saskatchewan, ce qui est merveilleux. Je ne veux pas critiquer ces réalisations un seul instant.

Le problème est de savoir si nous avons suffisamment de revenus fiscaux pour maintenir ces infrastructures une fois qu'elles sont en place. C'est là que se situe le problème. Nous voyons nos routes se détériorer. Le réseau routier de la Saskatchewan est le champion des nids-de-poule au Canada. Nous voyons des lignes de chemin de fer abandonnées. On ferme des hôpitaux, notamment dans le Canada rural. Nous avons des patinoires modernes, mais elles sont vides pendant la moitié de l'hiver, alors qu'elles ont déjà été le centre d'attraction dans les localités rurales.

Les patinoires ont été promises aux collectivités par le gouvernement néo- démocrate parce que c'était un bon moyen d'obtenir des votes. Les hôpitaux ont été promis par le Parti conservateur parce que c'était une bonne façon d'obtenir des votes. Et, soudainement, nous nous retrouvons avec des taxes démesurément élevées dans le Canada rural et trop peu de contribuables pour maintenir ces infrastructures.

Bien sûr, c'est une économie dynamique. Notre industrie du poulet est prospère, notre industrie porcine tourne rond et est en pleine croissance, et nous avons une industrie céréalière qui s'oriente vers la transformation et qui crée des emplois pour les filles et les fils de nos agriculteurs. Voilà ce qui créera la base économique qui permettra de maintenir ces infrastructures.

Je crains que la création d'un ministère des affaires rurales ne soit avant tout qu'un nouveau moyen de dépenser l'argent des contribuables. Le ministre appliquerait ses petits programmes, à la façon de ce qu'on a vu dans le cas du dernier programme d'infrastructures, qui n'a d'ailleurs représenté qu'une goutte d'eau dans l'océan. Bien sûr, nous en avons besoin, mais ce ne sera pas là la solution qui permettra de générer une croissance économique venant de la base, qui procurerait l'assiette fiscale permettant de maintenir les infrastructures rurales.

J'aimerais sur ce point connaître l'opinion de la Fédération canadienne de l'agriculture, et également celle de M. Knutson, qui est membre d'un comité de développement économique.

J'ai fait partie d'un comité de développement économique pendant un certain temps. Nous étions là, assis autour d'une table, et je revois certains membres du comité qui se demandaient où nous pourrions bien obtenir une subvention pour démarrer une nouvelle entreprise. Ils s'évertuaient à essayer de savoir si nos chances d'obtenir une subvention étaient meilleures auprès du gouvernement fédéral ou auprès du gouvernement provincial. Puis, quelqu'un venait nous rappeler que tel ou tel entrepreneur avait dû fermer son établissement parce que la TPS et toutes les autres taxes lui étaient devenues si lourdes qu'il ne valait plus la peine pour lui de garder son entreprise dans notre localité et qu'il allait tenter sa chance ailleurs.

Il faudrait que nous nous mettions à réfléchir sérieusement. Actuellement, nous cherchons à obtenir des subventions pour démarrer de nouvelles entreprises alors que des entreprises existantes s'apprêtent à fermer leurs portes parce qu'elles n'ont plus les moyens de payer les taxes qui leur sont imposées. Cherchons des façons de garder l'argent dans les collectivités rurales pour pouvoir y stimuler les entreprises existantes et y implanter de nouvelles porcheries. Nous avons une nouvelle ferme porcine à Beechy et une usine de transformation du poisson, comme vous l'avez mentionné.

J'aime votre idée de faire appel à la grande entreprise solide pour collaborer à des projets de nature économique émanant de la collectivité, notamment dans le secteur agricole. Je crois que c'est là que réside la solution.

J'aimerais savoir si, de l'avis de la Fédération canadienne de l'agriculture et de M. Knutson, le gouvernement fédéral devrait s'efforcer surtout de garder l'argent dans ces collectivités plutôt que d'essayer d'imaginer la création de quelque programme ou ministère qui ne servirait qu'à dépenser ces dollars.

Le président: Monsieur Knutson, auriez-vous des commentaires à formuler à cet égard?

M. Knutson: Merci, monsieur le président.

Oui, nous avons vécu sensiblement la même situation que vous, monsieur Hermanson, pour autant que les membres de notre comité de développement économique s'installaient autour d'une table et s'employaient surtout à se demander comment ils pourraient bien obtenir des subventions. Je crois que si l'expérience nous a enseigné au moins une chose, c'est que nous avons fait erreur en agissant de la sorte.

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Les entreprises que nous avons contribué à mettre sur pied mettaient également l'accent sur cette recherche de subventions. J'ai parlé de la piètre supervision qui était exercée sur la façon dont ces entreprises étaient gérées, et je crois que c'est là le pire écueil qu'il nous aurait fallu éviter.

Il y a encore aujourd'hui des sommes considérables qui sont versées aux entreprises dans le cadre de divers programmes dont beaucoup sont de compétence fédérale. Selon moi, notre infrastructure routière est un peu comme la fondation d'un immeuble qu'on voudrait construire ou d'une entreprise qu'on voudrait implanter. L'immeuble ou l'entreprise doivent reposer sur des bases solides. Un bon réseau routier est aussi essentiel qu'une bonne fondation. Je trouve encourageant qu'on ait mis en place le programme des infrastructures et qu'on y ait injecté des fonds. Si je suis optimiste, c'est que je constate que ce programme a contribué à créer des emplois et à construire la fondation sur laquelle reposeront nos industries de la transformation et de la fabrication, ou celle du tourisme.

Le président: D'accord. Jack.

M. Wilkinson: À moins que j'aie mal lu, le mot «subvention» ne figure nulle part dans votre mémoire, et je tiens à le souligner clairement.

Nous avons nettement l'impression que, de façon générale, la mise en oeuvre de programmes de grande envergure visant à stimuler le développement rural risque fort de coûter très cher en regard du nombre relativement faible d'emplois qu'elle est susceptible de créer, et, conséquemment, nous n'y sommes pas favorables. Nous croyons que ce qu'il faut, ce sont des projets qui émanent de la collectivité. Nous avons besoin d'outils de formation. Une des questions que nous nous posons actuellement, c'est de savoir ce que le gouvernement fédéral peut encore faire dans le domaine de la formation. Dans bien des cas, on en a un besoin pressant, et les provinces diminuent leur contribution.

Voilà pourquoi nous avons exercé auprès du gouvernement de fortes pressions en faveur de la mise en oeuvre du programme d'implantation d'entreprises agricoles. Il a enfin vu le jour et, nous l'espérons, il sera une réussite. En réalité, notre seul objectif était de nous attaquer aux problèmes que nous soulevons ici, d'améliorer, par exemple, les chances de succès des nouvelles entreprises du secteur de l'agroalimentaire. Nous avons le sentiment que, du moment qu'on parle de l'industrie agroalimentaire, tous les programmes ou toutes les initiatives relèvent des grands ministères, ce qui, selon nous, pose problème.

Nous avons des ministères de l'Éducation qui introduisent Internet dans les régions rurales. Le ministère de la Santé fait de même, et d'autres services communautaires également, ce qui ne veut toutefois pas dire qu'on ne procède pas efficacement. Mais une stratégie coordonnée permettrait, à notre avis, de diminuer les coûts de cette implantation et de fournir des services plus étendus, plus diversifiés et de meilleure qualité à un plus grand nombre de municipalités. Une telle stratégie s'impose vraiment.

À vrai dire, ce ne sont pas toutes les provinces qui ont investi, à tort ou à raison du point de vue fiscal, autant que la Saskatchewan ne l'a fait. Elle a donné à certaines localités de grandes possibilités, notamment dans le secteur de la fabrication de pièces d'équipement à série restreinte. En réalité, si le gaz et les moyens de télécommunications n'avaient pas été là, je crois qu'on peut affirmer sans risquer de se tromper que les entreprises qui procurent de l'emploi et qui font toute la différence entre la croissance et la mort de certaines localités ne seraient pas là elles non plus.

Nous faisons donc face à un dilemme. À quoi devrions-nous donner priorité? Devrions-nous investir dans l'infrastructure dans l'espoir que les emplois suivront si nous offrons la formation voulue et si nous assumons la moitié des coûts? Nous sommes d'avis qu'il nous faudrait une quelconque stratégie, car nous ne voulons pas la ruine du Canada rural.

Nous croyons que ces services pourraient coûter moins cher dans l'avenir. Nous ne réclamons pas d'importantes subventions pour stimuler l'activité économique. Nous croyons que nous pouvons faire un bon bout de chemin avec les moyens du bord. Le problème, c'est que tant que nous ne compterons que sur les contributions de divers ministères, bien des gens seront laissés pour compte parce qu'ils ne se seront pas qualifiés pour la formation et l'avancement, par exemple. Nous croyons qu'il pourrait en être autrement, qu'on pourrait assurer une bien meilleure coordination si on créait un ministère des affaires rurales.

Nous ne songeons pas à un énorme ministère disposant d'un imposant personnel de soutien. Ce que nous avons à l'esprit, c'est un ministère relativement petit, mais efficace. Le ministre qu'on désignera ne sera un ministre de second rang que si le gouvernement au pouvoir ne le considère pas important. J'imagine que votre parti ne le traiterait pas de cette façon, ni le prochain gouvernement au pouvoir, si jamais un tel ministre était désigné. Aucun parti ne le traiterait de cette façon, car le problème est sérieux.

Le président: M. Reed, puis M. Chrétien.

M. Reed (Halton - Peel): Merci beaucoup, monsieur le président.

Deux comités de la Chambre, dont celui-ci, ont été chargés d'étudier la question du développement rural, et j'ai le privilège d'être membre des deux. Il est très intéressant de constater que les deux partagent pratiquement les mêmes préoccupations et ont les mêmes défis à relever. L'autre comité dont je fais partie s'est déplacé un peu partout au Canada, et, encore là, nous avons noté à peu près partout les mêmes préoccupations. Le besoin pressant de moyens de télécommunication et d'accès au capital, les possibilités futures en matière fiscale, et le besoin d'outils pour accomplir les tâches qui s'imposent sont autant de sujets qui reviennent dans presque toutes les discussions.

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Je crois qu'il y a quatre autres industries primaires qui entrent également dans la catégorie des entreprises rurales. Il s'agit des forêts, des mines, de l'énergie et des pêches. Elles sont toutes assujetties à un processus réglementaire, conçu par des cerveaux pour la plupart urbains, qui, à mon avis, entrave parfois le développement rural. On a souvent dit, par exemple, que les forêts du Nord ontarien sont gérées par des gens qui vivent au sud de l'autoroute 401. Je crois qu'il y a une part de vérité dans cette affirmation, car la politique est souvent une question de nombres. C'est malheureux, mais c'est comme ça.

Je crois que, d'une certaine manière, nous sommes en train de rater le coche. On ne reconnaît pas encore que sans un Canada rural dynamique il n'y aurait pas de Canada urbain, mais je crois qu'il est impérieux qu'on en vienne à le reconnaître.

Si vous interrogez, sur Bay Street, un jeune homme typique de 24 ans portant bretelles rouges et n'ayant vraisemblablement jamais lu un livre...

M. Wilkinson: Pas plus qu'il n'a probablement déjà occupé un véritable emploi.

M. Reed:... boursicotant, un lundi matin, sur le marché à terme des produits de première nécessité, il devra reconnaître que pour pouvoir spéculer sur la valeur du maïs, encore faut-il qu'il y ait quelqu'un quelque part qui cultive du maïs. Il devra reconnaître aussi que la voiture dont il se sert pour se rendre en ville a été faite d'acier qui vient du Canada rural, que le carburant qu'il utilise et bien d'autres choses encore viennent aussi du Canada rural. Si j'insiste là-dessus, c'est qu'il faudrait, à mon avis, que cette réalité soit reconnue par le Canada urbain.

Par exemple, si nous devons un jour en venir à accepter le principe du recouvrement des coûts, à qui devrons-nous demander de payer la note, comment la répartirons-nous? En ce qui a trait au système de gestion de l'offre, quand je descends à pied l'avenue Augusta vers la rue Queen à Toronto, pourquoi devrais-je payer 5c. de plus la livre pour mon poulet? Comment cela peut-il se justifier?

En matière de réglementation, je vous répète que, selon moi, les décisions qui concernent le Canada rural devraient être prises par des gens qui y vivent et non par des citadins qui ne pensent qu'aux intérêts du Canada urbain. Le plus souvent, ces citadins ont du Canada rural une perception plutôt mythique, maintenant qu'il s'est écoulé trois ou quatre générations depuis que nous sommes sortis de la société agraire.

Quand je vous entends dire à Jack que vous souhaiteriez qu'on crée un ministère exclusivement voué au développement rural, je ne puis m'empêcher d'être très fasciné moi aussi par cette idée. Je suis porté à me dire que l'éventuel ministre, qu'il soit de second ou de premier rang, devrait avant tout se faire le champion du Canada rural auprès du Canada urbain, pour le réveiller et lui faire prendre conscience de ces réalités, afin que le Canada rural puisse enfin profiter des avantages qui lui sont dus et dont il a besoin pour assurer la sauvegarde du Canada urbain.

Je suis désolé de m'être laissé emporter ainsi.

Le président: Jack, aimeriez-vous intervenir là-dessus?

M. Wilkinson: Oui, brièvement.

Je crois qu'il est temps que nous profitions de toutes les tribunes pour parler de ce qui s'est produit dans nos industries de base depuis deux ou trois ans. Il y a peu d'années, on nous avait pratiquement rayés de la carte parce que nous étions censés être devenus plus ou moins utiles au pays. D'aucuns semblaient croire que le secteur des services, celui de la fabrication des puces d'ordinateur et quelques autres allaient résoudre tous les problèmes de notre pays.

Nous avons accompli des progrès phénoménaux, et ce n'est pas fini. Nous sommes indéniablement près de connaître une croissance phénoménale continue dans le secteur de l'agroalimentaire. Cela ne fait aucun doute, pourvu que nous jouions les bonnes cartes.

Le secteur minier a explosé un peu partout au pays ces dernières années. Nous produirions même davantage de pâte et papier, de bois de charpente de dimension courante, de nouveaux panneaux à copeaux orientés, etc., si nous n'avions pas signé pour faire partie de l'équipe américaine, car les Américains sont rendus moins compétitifs que nous.

Un véritable succès s'offre à nous avec l'explosion potentielle de l'aquaculture. Nous constatons que certains stocks de poisson se reconstituent.

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Au lieu du grand trou noir que représentaient les dépenses gouvernementales il y a quelques années, qui donnaient à notre avenir les couleurs les plus sombres, nous nous sommes maintenant tournés vers la création d'emplois et la stabilité. Notre pays, qui a désespérément besoin qu'on commerce avec l'étranger et qu'on crée des emplois, a enfin un point d'appui.

Disons-le franchement, il s'impose de botter le derrière de certaines personnes et, en quelque sorte, de réclamer qu'on appuie concrètement nos efforts pour que nous puissions continuer de progresser dans l'avenir.

Tout ce que nous réclamons, pour l'amour de Dieu, c'est de récupérer une partie des impôts que nous payons. Nous ne demandons à personne d'imprimer de l'argent sur Bay Street pour nous le remettre. Nous voulons simplement recouvrer une partie de l'argent que nous versons au gouvernement et le faire fructifier dans les régions rurales. Je suis donc absolument d'accord avec vous sur cette question.

Le président: Très bien.

[Français]

Monsieur Chrétien.

M. Chrétien (Frontenac): La semaine dernière, j'ai passé plusieurs heures au congrès général de l'UPA, à Québec, et j'ai eu le plaisir de rencontrer plusieurs d'entre vous.

Les agriculteurs du Québec sont très inquiets, et avec raison, quant aux nouvelles normes que le ministère de l'Agriculture et le ministère de l'Environnement du Québec s'apprêtent à imposer aux agriculteurs.

Avec la norme qui est actuellement proposée pour l'épandage des fumiers, l'agriculteur doit laisser un certain nombre de mètres libres le long du chemin public. Quand on considère qu'il y a le chemin public du rang d'en haut et le chemin public d'en bas, à toutes fins utiles, il n'y a que quelques mètres carrés sur lesquels il pourra épandre son fumier. C'est impensable, bien sûr, dans son cas.

La situation doit également se produire dans votre région de Saint-Ludger et dans d'autres régions.

Je vais surtout parler de la ruralité au Québec, parce que j'imagine qu'elle est différente dans l'Ouest, étant donné que ce sont de grandes cultures.

Au Québec, l'industrie porcine s'est développée des façon très intense ces dernières années. Encore hier, j'entendais aux nouvelles qu'on avait organisé un référendum dans une municipalité rurale. Ce n'est pas des farces. C'est un référendum pour savoir si on va autoriser l'octroi d'un permis pour la construction d'un mégaprojet - on sort de grands mots pour apeurer les citadins - de porcherie qui pourrait contenir de 7 000 à 8 000 porcs à la fois. Cet agriculteur pourrait fournir environ 15 000 porcs par année. On en est rendu à devoir tenir des référendums pour savoir si on doit autoriser un producteur agricole à exercer son métier sur sa ferme. C'est très sérieux.

Vous avez l'environnement d'une part et vous avez le producteur agricole qui est surveillé pour ce qui est du son, des odeurs, de la poussière et évidemment de la pollution dans les cours d'eau. À cause de cela, certaines régions rurales sont en train de se vider.

Plus tôt, vous avez parlé du poulet. J'ai été surpris d'apprendre qu'au cours des dix dernières années, il y a eu une augmentation de 25 p. 100 du nombre de fermes et, dans le cas du poulet fini, une augmentation de 45 p. 100. C'est merveilleux.

Je me suis fermé les yeux en vous écoutant plus tôt. Dans ma région, il y avait une grosse ferme d'élevage de poulets et on a vendu le quota à l'extérieur de la région. Il y avait également une ferme où on produisait des oeufs, mais le poulailler a été incendié et on ne l'a pas reconstruit. Dans chacun de ces cas, ces productions ont quitté ma région. Cette histoire est triste, mais je la raconte pour vous montrer où je veux en venir.

Les choses deviendront de plus en plus difficiles parce que les rangs se vident et les décisions ne se prennent plus. Au sein des conseils municipaux, ce ne sont plus les nôtres qui sont là. Ce sont des citadins, des gars qui ont acheté des petits lopins de terre pour jouir à la fois de tous les bienfaits de la campagne et de tous les bienfaits de la petite ville.

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Ils voudraient bien manger du jambon, mais sans sentir le porc et, encore mieux, sans avoir à l'abattre. C'est impossible.

Il y a un autre point sur lequel j'aimerais avoir votre avis. Il s'agit de la construction d'usines de transformation, de la valeur ajoutée. Par exemple, on ne construirait pas un moulin à papier sur l'île de Montréal ou au coeur de Toronto. On ne transporterait pas le bois pour faire le papier sur l'île de Montréal. Les moulins à papier, autant que faire se peut, se trouvent près des cours d'eau et près des forêts.

Je pense par exemple à la Gaspésie, où on va chercher le lait pour le transformer très loin de là et revendre le beurre et le lait embouteillée dans la Gaspésie. Ce sont des gens actifs. On parlait d'un ministre de la ruralité. Ce serait des points précis sur lesquels on pourrait s'entendre.

Au Québec, les agriculteurs sont inquiets puisque le ministre de l'Environnement serrera la vis graduellement. Ce dernier reçoit un bon nombre de plaintes de la part de citoyens qui trouvent que certains agriculteurs, dont le nombre est très limité, se comportent comme des hors-la-loi et sont insouciants. C'est l'ensemble de la classe agricole qui paie les pots cassés.

Le ministre ne peut faire adopter une loi pour celui qui exagère ou qui abuse. Il fait adopter loi pour tout le monde. J'ai envoyé tout cela en vrac, monsieur le président, et j'aimerais qu'il y en ait qui émettent leur opinion là-dessus.

J'aimerais aussi avoir le point de vue de Canards illimités. Je sais que vous faites des efforts grandioses au Québec. En lisant votre revue, je constate que vous faites aussi des efforts pour présenter des documents en français. C'est tout à votre honneur parce qu'il y a quelques années, on avait eu des problèmes dans ma région. Tout nous arrivait en anglais seulement et plusieurs de mes électeurs et électrices avaient refusé de souscrire à votre campagne de financement, croyant que vous ne respectiez pas notre culture et notre langue.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Chrétien.

Avant de passer aux commentaires, j'aimerais faire une mise au point, monsieur Chrétien. Certaines des questions que vous avez soulevées concernant le ministre de l'Environnement sont de compétence strictement provinciale. Nos témoins peuvent les commenter s'ils le désirent, mais elles touchent à des domaines qui relèvent des administrations provinciales.

Ken.

M. Huttema: Je vous prie de m'excuser, mais je dois vous quitter. On vient de me rappeler qu'il y a une grève des transports en commun dans la ville, et j'ai un avion à prendre à 18 heures. Je serais sage de ne pas trop tarder, car ce serait risqué.

Le président: Vous avez raison. Allez-y, et merci encore une fois de votre venue et de votre contribution.

M. Huttema: Merci de nous avoir invités. Je vous en suis reconnaissant.

Le président: Monsieur Poole.

M. Poole: Bien que, comme vous l'avez signalé, monsieur le président, certaines de ces préoccupations, notamment celles qui sont liées aux inquiétudes dont on vient de nous faire part, soient du domaine provincial, j'aurais un bref commentaire à formuler.

Il me semble que nous avons souvent tendance, comme société, à opter pour la voie facile. Nous établissons arbitrairement le long d'un cours d'eau une zone-tampon d'une largeur standard, sans tenir compte de la nature du sol, de la longueur ou de la raideur des talus, ou des statistiques concernant la fréquence et l'intensité des précipitations dans les régions concernées, par exemple.

À mon sens, si c'est la pureté des cours d'eau qui nous préoccupe, c'est sur cet aspect que devraient porter les règlements. Ils devraient s'appuyer sur une mesure quelconque de la pureté des cours d'eau et prévoir des sanctions contre quiconque serait à l'origine de la dégradation de la qualité de l'eau. Je vois mal qu'on puisse atteindre cet objectif en établissant tout bêtement une zone-tampon riveraine d'une largeur généralement uniforme.

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Je n'exprime qu'un point de vue personnel, monsieur le président. Je suis conscient qu'il s'agit là d'une question qui n'est pas du ressort de votre comité.

Le président: D'autres témoins auraient-ils quelque chose à ajouter? Jack.

M. Wilkinson: Je suis conscient que bon nombre de ces questions - et c'est ce qui les rend fort délicates - sont de compétence provinciale, mais il y a quand même un rôle que chacun peut jouer, et c'est celui de défenseur de l'agriculture et de l'industrie agroalimentaire. Il n'est parfois pas facile de cerner ces questions, et je crois qu'il est important que, dans la mesure du possible, le groupe des députés qui représentent des comptés ruraux et le Comité de l'agriculture, entre autres, tentent de déterminer le rapport coût-avantages des solutions proposées.

Si nous entendons assurer la sauvegarde de notre secteur agricole et y créer des emplois - et c'est ce que souhaitent manifestement tous ceux qui sont ici autour de cette table - , pour autant que nous nous soucions de l'environnement, nous devrons attacher de l'importance à certaines questions fondamentales, au zonage, par exemple. Les gouvernements municipaux, provinciaux et fédéral - d'ailleurs, les cours d'eau et d'autres sources d'eau froide, par exemple, sont en partie de compétence fédérale - devront faire appel à des spécialistes pour examiner bien d'autres problèmes dans ce domaine et pour chercher des solutions qui n'entraveront pas indûment la production agricole, car si nous options pour des solutions nuisibles à l'agriculture, nous le paierions cher.

Le président: Je vais accepter une brève question de M. Hoeppner. Il doit nous quitter dans très peu de temps. Puis, nous entendrons MM. Easter et Culbert.

M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): Merci, monsieur le président. C'est vraiment ma journée aujourd'hui. D'abord, le président m'accorde le privilège très spécial de poser une petite question.

Le président: Vous m'avez dit que votre question serait intéressante et positive. Vous m'avez même promis de voter en faveur du Parti libéral aux prochaines élections, donc...

M. Hoeppner: Nous verrons bien.

Le président: Utilisez sagement votre temps.

M. Hoeppner: D'un autre côté, je dois dire que M. Poole, qui représente ici Canards Illimités, a toute une mission à remplir aujourd'hui. Monsieur Poole, il vous faut tenter d'inculquer un brin de sagesse à ce gouvernement libéral, dont la vision est carrément erronée. Savez-vous ce qu'ils veulent me faire faire, monsieur Poole? Ils veulent me forcer à enregistrer mon fusil à air Daisy Red Ryder de Canards Illimités, et à placer cette arme dangereuse dans une armoire spéciale fermée à clé. Vous devez les convaincre d'avoir plus de bon sens que cela. Si vous y parvenez, monsieur Poole, nous pourrons opérer de grands changements dans notre pays.

Le président: Jake, avez-vous terminé? Monsieur Poole, aimeriez-vous formuler un commentaire? Je pense que Jake a terminé. De toute façon, j'aime mieux considérer qu'il a terminé.

M. Poole: Je présume, monsieur Hoeppner, que, compte tenu du mandat du comité, ce règlement ne s'applique que si vous utilisez votre arme pour vous procurer de la nourriture.

M. Hoeppner: Je ne l'utilise que pour pratiquer mon tir, mais vous me donnez là une bonne idée. Vous venez donc déjà de m'être utile. Merci beaucoup.

Le président: Monsieur Hoeppner, vous pouvez vous rendre à votre autre séance. Merci.

Monsieur Easter.

M. Hoeppner: Je me retire pendant une minute, et le voilà en difficulté. Joyeux Noël à tous.

Le président: Merci.

Allez-y, Wayne.

M. Easter (Malpèque): Merci, monsieur le président.

Je crois que Julian a dit, entre autres choses, que la plupart des industries génératrices de richesse se trouvent dans le Canada rural: les mines, les forêts, l'agriculture, les pêches. Il me semble que si nous entendons développer l'industrie rurale - en entier, non seulement l'agriculture - pour en faire le moteur de l'ensemble de notre économie comme il se doit, nous devons travailler sur deux fronts: le front international, qui revêt une importance de plus en plus grande, et le front local.

Sur le front international, il y a les négociations de l'OMC qui auront lieu en 1999. En outre, comme nous en avons discuté hier, nous devons nous assurer que nos secteurs de production - et je songe non seulement à l'agriculture, mais également aux mines et aux pêches - disposent des outils dont ils ont besoin pour être aussi concurrentiels que leurs vis-à-vis américains. À cet égard, admettons-le, le recouvrement des coûts risque de poser de graves problèmes.

Sur le front local, nous devrons adopter une politique propre à nous permettre d'utiliser pleinement les nouveaux outils disponibles, les nouvelles technologies. Là d'où je viens, à l'Île-du-Prince-Édouard, il fut un temps où nous étions défavorisés en raison du problème majeur que présentait pour nous le transport par route, par train et par eau. Mais, aujourd'hui, grâce aux nouvelles technologies, nous pouvons faire les mêmes choses à l'Île-du-Prince-Édouard que n'importe où ailleurs, et nous conservons l'avantage d'un faible taux de criminalité, ou d'un environnement particulièrement sain, sans compter que, chez nous, personne n'a à conduire pendant une heure et demie pour se rendre à son travail. Nous y jouissons maintenant des mêmes libertés que si nous vivions en banlieue de Toronto.

En réalité, j'ai trois questions à poser, monsieur le président, et je vais les poser à la suite l'une de l'autre.

D'abord, sur le front international, maintenant que nous avons eu gain de cause auprès du groupe spécial de l'ALENA, que pouvons-nous et que devrions-nous faire relativement à notre système de gestion de l'offre en vue des prochaines négociations de l'OMC?

Deuxièmement, encore au niveau international, quels mécanismes d'équilibre devraient être mis en place pour que nos producteurs - quelle que soit l'industrie dont il s'agit - ne soient pas désavantagés par rapport à leurs compétiteurs internationaux?

Troisièmement, en ce qui a trait à nos politiques intérieures de développement, quel genre d'agence ou de programme devrions-nous créer? Si je regarde, encore une fois, le cas de l'Île-du-Prince-Édouard, l'APECA a été très avantageuse pour nous dans les secteurs de l'aquaculture, des pêches et des industries agricoles grâce aux ententes de coopération en matière de ressources primaires. L'utilisation de silos nous a permis de réaliser les meilleurs programmes de provendes qui soient. Et nous pourrions illustrer notre propos d'une foule d'autres exemples. Ces mesures m'ont paru très avantageuses. Devrions-nous renforcer les organismes de développement régional, voire en établir de nouveaux, afin de nous assurer que les gens qui vivent en milieu rural auront accès aux grands réseaux par l'intermédiaire d'un guichet unique...

[Difficultés techniques]

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