[Enregistrement électronique]
Le vendredi 21 mars 1997
[Traduction]
Le président (M. Lyle Vanclief (Prince Edward - Hastings, Lib.)): Bonjour à tous. Je m'appelle Lyle Vanclief et je préside le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Mes collègues et moi-même sommes très heureux de nous trouver à Grande Prairie pour y poursuivre les audiences relatives au projet de loi C-72, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé.
Nous avons passé toute la semaine dans l'ouest du Canada. Nous étions à Winnipeg lundi, à Regina mardi, à Saskatoon mercredi et à Calgary, hier. Nous entendrons avec intérêt les exposés qui seront faits ce matin à propos de ce projet de loi.
Je dois avouer que c'est la première fois que je viens à Grande Prairie. J'ai déjà dit à Charlie Penson combien j'étais content d'être ici, mais franchement, je préférerais le mois d'août. Avant de devenir député il y a quelques années de cela, j'ai été agriculteur toute ma vie et le mois de mars n'est pas mon mois favori pour visiter le Canada mais je suis prêt à croire ce que Charlie et beaucoup d'autres m'ont dit au sujet du district de Peace. J'ai bien l'intention d'y revenir en été lorsqu'il y aura un peu plus de verdure.
Trois groupes doivent comparaître devant nous ce matin. Nous nous en tiendrons au processus que nous avons suivi toute la semaine. Chaque groupe a été averti qu'il disposait d'un quart d'heure pour faire son exposé. Lorsqu'il ne restera plus que deux minutes, j'indiquerai aux intervenants qu'ils approchent de la fin et je leur demanderai de présenter rapidement les points principaux de leur argumentation, s'ils ne l'ont déjà fait. Nous tenons à procéder de cette manière par souci d'équité à l'égard de tout le monde et à nous montrer aussi justes que possible pendant la semaine entière d'audiences qui doivent se dérouler ici.
Il y aura ensuite une période d'environ 45 minutes où tous les témoins demeureront à la table de manière à ce que les membres du comité puissent leur demander des éclaircissements, poser des questions, et engager une discussion avec eux. C'est un exercice que nous jugeons également très utile.
Si le temps le permet, nous ferons ensuite une courte pause- café. Après cela, nous entendrons un certain nombre de témoins qui comparaissent à titre individuel et nous suivrons le même processus avec eux. Comme ils le savent, ils disposent de moins de temps pour leurs exposés, et nous engagerons aussi un dialogue avec eux.
Commençons. Je donne tout d'abord la parole à David, de l'Alberta Grain Commission. Je sais que vous étiez présent à l'audience d'hier, peut-être avez-vous même réécrit votre rapport, sous l'influence des diverses opinions et idées présentées. Je ne dis pas cela pour plaisanter; je suis heureux que vous soyez des nôtres aujourd'hui à Grande Prairie. Veuillez commencer.
M. David Walker (directeur, Alberta Grain Commission): J'ai beaucoup apprécié l'audience d'hier. Elle a été très instructive.
Comme j'ai correspondu avec le greffier du comité, c'est mon nom qui figure sur la liste mais ce sont Gil Balderston et Glen Goertzen, deux membres de la commission, qui feront l'exposé. Je laisse donc la parole à Gil.
Le président: Messieurs, soyez les bienvenus.
M. Gilbert Balderston (membre du comité, Alberta Grain Commission): Merci. Soyez les bienvenus à Grande Prairie, au pays de la rivière de la Paix, en Alberta et dans l'ouest du Canada. Je m'appelle Gil Balderston. Je représente l'Alberta Grain Commission avec Glen Goertzen. Glen est exploitant agricole à Stettler et j'ai moi-même une ferme à Sexsmith, à environ dix milles au nord d'ici.
La tâche essentielle de notre commission est de conseiller le ministre provincial de l'Agriculture, de l'Alimentation et du Développement rural pour tout ce qui a trait au secteur du grain.
Six des membres de la commission sont des agriculteurs qui s'intéressent à toutes sortes de domaines. Ils sont à la fois membres du comité consultatif, de la Commission canadienne du blé, et du conseil d'administration du Winnipeg Commodity Exchange.
Nous avons été heureux d'apprendre que vous aviez l'intention de tenir des audiences dans l'ouest du Canada. Au cours des cinq derniers jours, nous avons beaucoup appris, en particulier, que le projet de loi C-72 préoccupe pratiquement tout le monde.
Nous sommes heureux que vous teniez deux journées d'audiences en Alberta. À la fin de janvier et au début de février, notre commission a organisé huit réunions d'information sur le projet de loi C-72 à l'intention des agriculteurs. Les textes législatifs sont en général assez indigestes pour les agriculteurs, mais 150 d'entre eux environ ont assisté à ces réunions. Leurs réactions ont clairement montré que le projet de loi C-72 n'était pas ce qu'ils attendaient ni ce qu'ils voulaient.
Je suis ravi que vous ayez décidé de tenir une de vos audiences au pays de la rivière de la Paix. C'est une excellente décision. Cette région a 9,1 millions d'acres de terre arable, c'est-à-dire plus que la province du Manitoba et plus que l'Ontario et le Québec réunis. Je vais maintenant céder la parole à Glen.
M. Glen Goertzen (membre du comité, Alberta Grain Commission): Comme vous le savez la vente du grain est étroitement réglementée dans l'ouest du Canada. Il n'est donc pas facile d'apporter des changements. Nous consacrons trop de temps à étudier nos problèmes et trop peu à les résoudre. Il semble d'ailleurs que même lorsque nous avons fini de les étudier, il s'écoule une éternité avant qu'une personne responsable prenne une décision.
Le Groupe d'étude de la commercialisation des grains de l'Ouest vient de terminer une de ces études après une année complète de discussions ouvertes, de présentations de mémoires, d'audiences, de rapports d'experts-conseils, etc.; bref, tout le monde y a participé. Jerry Pickard, secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et l'un de vos membres ont fait observer au cours des témoignages présentés plus tôt ce mois-ci, que cela avait indiscutablement été une des consultations les plus poussées de l'histoire de la commercialisation des grains - du moins de l'histoire moderne de la commercialisation des grains du Canada.
D'après tout ce que nous avons lu et entendu, les agriculteurs de Prairies étaient en général satisfaits du processus. Ce qui a été particulièrement encourageant c'est que le groupe est parvenu à un consensus sur les recommandations à présenter. C'est un résultat exceptionnel. Certes, il y a eu des compromis et il est probable que personne n'a obtenu tout ce qu'il voulait. C'eût été trop demander. Il y a longtemps que la plupart d'entre nous avons appris à vivre dans un monde qui est loin d'être parfait.
En 1995, nous avons tenu un plébiscite sur la commercialisation des grains en Alberta. Les résultats ont clairement montré que les agriculteurs de l'Alberta veulent pouvoir choisir et préfèrent une formule facultative de mise en commun du blé et de l'orge. Bien que ce soit que nous préférions cette solution, les recommandations du groupe nous paraissent représenter un grand pas en avant.
Nous avons eu l'impression de disposer enfin d'un plan directeur pour l'industrie des grains, établi par un groupe d'experts respectés nommés par le ministre fédéral de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Celui-ci ayant déclaré qu'il se laisserait guider par les conclusions du groupe, nous avons cru que nous obtiendrons des résultats rapides, ce dont notre industrie avait terriblement besoin.
Nous n'avons pas tardé à déchanter. Dans ce qui nous a paru comme une tentative tout à fait délibérée de discréditer le groupe, le ministre fédéral a commandité un sondage des agriculteurs dans lequel on invitait ces derniers à lui écrire au sujet des recommandations du groupe. Le ministre leur a même demandé leurs avis sur des points qui n'étaient pas recommandés par le groupe.
Tout le monde reconnaissait que le groupe avait été obligé de parvenir à un compromis. Il n'est pas nécessaire d'être grand clerc pour comprendre que la meilleure façon de détruire ce compromis était de demander individuellement aux gens ce qu'ils voulaient. Pour aggraver encore les choses, le ministre a organisé un plébiscite sur l'orge et encore une fois il n'a tenu aucun compte des recommandations pressantes faites par le groupe au sujet de la commercialisation de l'orge. Les questions posées et la manière dont le plébiscite a été mené ont, pour le moins, eu l'effet de semer la zizanie.
M. Balderston: En décembre, lorsque nous avons pris connaissance du projet de loi C-72, qui était censé concrétiser les recommandations du groupe, nous étions fort méfiants. Ce que nous y avons trouvé n'a fait que confirmer nos craintes.
Les recommandations du groupe sont traitées de manière inacceptable dans le projet de loi C-72. Ceux qui prétendent le contraire ont tort. Le groupe a présenté 33 recommandations qui ont été ramenées à quatre recommandations importantes pour la commission.
En ce qui concernait l'organisation de la commission, un compromis n'était pas nécessaire car tout le monde était d'accord avec le groupe pour accorder une plus grande souplesse de fonctionnement à la commission et pour lui permettre de fournir de meilleurs services aux agriculteurs - en résumé, il s'agissait de créer une Commission canadienne du blé qui serait tenue, plus qu'auparavant, de rendre des comptes aux agriculteurs canadiens. Or, selon l'organisation proposée dans le projet de loi C-72, la commission sera obligée de rendre moins de comptes aux agriculteurs et d'en rendre plus au gouvernement du Canada.
Au cours des réunions de discussion du projet de loi C-72 que nous avons organisées pour les agriculteurs, nous avons utilisé une série de transparents pour comparer le projet de loi avec la loi actuelle sur la Commission canadienne du blé au Canada. J'en ai choisi quelques-uns pour illustrer la situation.
M. Goertzen: Voici le diagramme que nous avons utilisé à nos réunions. D'un côté, vous avez les propositions en vertu du projet de loi C-72 concernant les pouvoirs du gouvernement fédéral. De l'autre, une liste des pouvoirs actuels de la Commission canadienne du blé. Vous pouvez voir les différences.
Le président: Vous allez naturellement remettre ce document au comité, Glen.
M. Goertzen: Bien sûr.
Le président: Merci.
M. Balderston: La colonne de droite contient une liste des contrôles qu'exerce le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire en vertu de la loi actuelle. Dans la colonne de gauche, vous voyez ce qui se passerait si le projet de loi C-72 est adopté. Les résultats sont éloquents.
La situation est la même en ce qui concerne le ministre des Finances, et nous allons l'expliquer. Il est certes légitime que Finances Canada s'intéresse aux activités financières de la commission, aux responsabilités possibles que cela implique, mais les garanties concernant le paiement initial et l'exportation pourraient être utilisés plus efficacement en modifiant les dispositions de la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles et les pouvoirs de la Société pour l'expansion des exportations.
À notre avis, les avantages du système actuel ont été exagérés, et nous craignons que les arrangements actuels ne soient pas sans danger. Il est presque certain qu'ils seront examinés avec soin à l'étranger et il est probable qu'ils ne survivront pas aux prochaines négociations de l'OMC.
M. Goertzen: L'Alberta Grain Commission considère que les intérêts à long terme des agriculteurs seraient mieux servis par une commission indépendante, organisée comme une entreprise privée conventionnelle: le conseil d'administration devrait être élu par les agriculteurs; le président devrait être choisi par le conseil d'administration; et le président et le premier dirigeant devraient être nommés par le président du conseil et devraient lui rendre compte. La commission serait ainsi responsabilisée et, ce qui est encore plus important, les agriculteurs éprouveraient vraiment un sentiment d'appartenance à la commission.
En fixant les paiements initiaux pour la période de mise en commun plutôt que pour la campagne de récolte et en laissant le gouvernement du Canada libre de les clore à son gré, on enlève toute signification à la garantie relative aux paiements initiaux, ce qui est inacceptable.
Il est totalement inacceptable que les comptes débiteurs des concessions et dus à autre chose que des ventes à crédit commerciales, des ventes faites pour des raisons de politique étrangère, par exemple, continuent à figurer dans les livres de la commission. Ces articles devraient être transférés avant que la commission n'acquière un statut indépendant. En outre, le projet de loi C-72 devrait préciser que ces passifs devront être directement assumés par le gouvernement fédéral à l'avenir.
Il est indispensable que l'on retienne les recommandations du groupe concernant l'adoption par la commission des pratiques actuelles de commercialisation des grains, et que le gouvernement autorise la révision ultérieure de ces pratiques, si l'on veut que la commission puisse continuer à répondre efficacement aux besoins des céréaliculteurs en matière de commercialisation.
Les dispositions du projet de loi C-72 concernant les achats au comptant par la commission, y compris le paiement des grains stockés à la ferme, le stockage collectif, les achats de grain à la ferme, et les périodes de mise en commun plus courtes, la vente des certificats de paiement final, l'utilisation d'instruments de gestion des risques, etc., sont essentielles pour assurer la compétitivité de la commission. Ces mesures permettraient à la commission d'adopter les pratiques de commercialisation des grains que le secteur privé utilise déjà depuis cinq ou dix ans, ou plus.
L'absence de la flexibilité nécessaire pour s'adapter à l'évolution du commerce des grains est un problème. En réduisant l'influence des agriculteurs sur la commission, le projet de loi C- 72 maintient en fait la commission dans la camisole de force qui lui est actuellement imposée. Au premier abord, le projet de loi semble prévoir l'établissement de la base de capitaux que souhaitait le groupe d'étude, mais le plan de réserve envisagé nous semble bien loin de créer les conditions nécessaires au marketing et aux activités commerciales constructifs envisagés par le groupe. L'objet principal de ce fonds semble être de réduire les enjeux financiers du gouvernement fédéral, ce qui est inacceptable.
M. Balderston: Les recommandations du groupe concernant les ventes de blé portent sur deux questions importantes. Les ventes au comptant sans mise en commun faites directement à la commission établiraient la responsabilité de celle-ci sur le plan commercial et permettraient aux agriculteurs d'avoir une meilleure idée de la valeur commerciale de leurs produits. L'inclusion de variétés non conformes pour la production de viande biologique permettrait à l'industrie de créer des marchés à créneau. C'est un petit domaine spécialisé, mais ce n'est pas une raison de penser que la commission serait efficace.
Les dispositions du projet de loi C-72 qui autorisent la commission à contrôler de telles activités ne sont pas acceptables. La question de la caractérisation du grain est importante. Ce qui compte ce n'est pas de savoir si la Commission des grains est capable d'élaborer un système de AI, mais comment elle procédera. Un tel système est indispensable pour que le Canada puisse profiter des possibilités de valeur ajoutée offertes sur le marché intérieur et les marchés d'exportation.
Les suggestions du groupe concernant la vente de l'orge sont très claires; elles pourraient être aisément inscrites dans la loi ou même être concrétisées par des règlements. C'est une des questions auxquelles le groupe juge qu'il est urgent de donner réponse. Sept mois se sont écoulés depuis qu'il a présenté son rapport et nous avons l'impression que nous avons reculé au lieu d'avancer.
Le projet de loi C-72 a même créé la confusion en ce qui concerne l'avenir du marché intérieur des aliments du bétail. Il y a plus de 20 ans que ce marché est réglementé. L'exclusion actuelle de la vente des grains fourragers sur le marché intérieur ainsi que l'exclusion proposée par le groupe pour les exportations, devraient être inscrites dans le projet de loi.
Ceux qui prétendent que les recommandations du groupe concernant les ventes d'orge ne sont pas réalisables, parce que l'orge fourragère pourrait être revendue comme orge de brasserie, créent un faux problème. Cette possibilité existe déjà dans le système de commercialisation actuel.
En conclusion, nous estimons que ce qui a donné de si bons résultats pour l'avoine fonctionnerait tout aussi bien pour l'orge. Nous ne sommes pas convaincus que le plébiscite ait été une méthode efficace de régler ces questions de commercialisation.
En gros, 70 p. 100 environ du grain de l'ouest du Canada est produit par quelque 25 p. 100 des agriculteurs. Il est trop facile pour les 75 p. 100 qui assurent 25 p. 100 de la production de freiner les progrès de l'industrie. Nous avons l'intention de vous présenter une analyse article par article du projet de loi C-72 avant que vous ne vous attaquiez à votre propre examen. Nous ferons le nécessaire pour qu'on vous remette le tableau sommaire de nos recommandations ainsi que ce que nous proposons pour le projet de loi C-72 et la Loi sur la CCB.
Encore une fois, nous vous remercions d'être venus dans l'Ouest d'avoir écouté nos préoccupations. Nous sommes prêts à répondre à vos questions. Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup, messieurs, pour votre mémoire et pour la concision de votre exposé.
Nous allons maintenant donner la parole à M. Leo Meyer, de la Western Canadian Wheat Growers Association. Soyez le bienvenu à notre comité, Leo.
M. Leo Meyer (directeur, Western Canadian Wheat Growers Association): Merci. Monsieur le président, membres du comité, mesdames et messieurs, j'ai une exploitation agricole à environ trois quarts d'heure au nord-ouest d'ici, juste au sud de la rivière Spirit. Je représente aujourd'hui la Western Canadian Wheat Growers Association, qui est le plus gros organisme agricole bénévole de l'ouest du Canada.
Je me référerai au mémoire que nous avons présenté à Winnipeg. Mon exposé, monsieur le président, complétera donc dans une certaine mesure celui que les producteurs de blé ont fait à Winnipeg. J'insisterai sur un certain nombre de points qui n'ont peut-être pas été suffisamment soulignés et nous essayerons de les utiliser pour engager une discussion.
Nous savons que nous disposons de peu de temps pour discuter de ces questions. Nous serons probablement obligés de laisser de côté beaucoup de points qui nous intéressent. Cela dit, je voudrais mettre l'accent sur les six points suivants:
1) des observations générales au sujet du projet de loi C-72;
2) l'organisation de la nouvelle Commission canadienne du blé et son mandat dans le domaine de la commercialisation;
3) la réglementation de l'industrie et de la commercialisation des grains par la Commission canadienne du blé;
4) la nouvelle Commission canadienne du blé proposée devant l'Organisation mondiale du commerce et l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce;
5) l'assujettissement des provinces à la Loi sur la Commission canadienne du blé et au projet de loi C-72;
6) une nouvelle approche à la gestion logistique et une autre étude sur le transport des grains dans l'ouest du Canada.
En ce qui concerne le premier point relatif aux observations générales au sujet du projet de loi C-72, nous vous renvoyons aux recommandations faites par le Groupe de commercialisation des grains de l'Ouest dont les conclusions nous paraissent constituer un point de départ possible à l'établissement d'un modèle de travail. Ce que le groupe propose n'est pas parfait, mais cela constitue au moins un début.
Nous ne réussissons pas à comprendre pourquoi nous sommes confrontés à ce projet de loi monstrueux censé être inspiré de la proposition du Groupe de commercialisation des grains de l'Ouest. Nous sommes perplexes. Alors que l'unanimité s'était faite sur une responsabilisation accrue de la commission et sur l'augmentation de l'influence des agriculteurs sur ces activités, c'est tout le contraire qui est proposé dans le projet de loi C-72.
Des groupes d'agriculteurs d'un peu partout, de Winnipeg, de Regina, de Saskatoon et de Calgary vous ont dit que ce projet de loi est inacceptable sous sa forme actuelle. Essayer de le faire passer de force à la veille d'une élection, alors qu'il ne répond pas aux besoins fondamentaux des agriculteurs et que tant de questions demeurent sans réponse, serait totalement irresponsable.
Le remaniement complet que prévoit le projet de loi C-72 nous placera, à notre avis, dans une situation bien pire que celle qui existe aujourd'hui. Nous vous demandons instamment de mettre de projet de loi au rebut et de recommencer. Il ne contient pas suffisamment d'éléments positifs pour qu'un simple replâtrage soit suffisant.
En ce qui a trait à l'organisation de la nouvelle Commission canadienne du blé proposée et à son mandat en matière de commercialisation, la Commission perdrait son autonomie si le projet de loi était adopté. Les administrateurs-agriculteurs seraient pratiquement impuissants, et les agriculteurs se verraient encore une fois refuser la possibilité de décider de la manière de commercialiser leur grain. L'influence des agriculteurs dans cette nouvelle société serait relativement limitée. Il faudrait que le premier dirigeant et le président du conseil soient élus par le conseil d'administration au lieu d'être nommés par le ministre fédéral de l'Agriculture ou par le cabinet à Ottawa.
Le plan d'entreprise soumis au ministère des Finances devrait donner suffisamment de latitude au conseil d'administration pour qu'il puisse réagir dans l'intérêt de sa clientèle aux mouvements souvent soudains du marché. Un système défini par la lenteur du processus d'autorisation et par son manque total de flexibilité est inutilisable. Le marché n'attend personne. Il faut que la nouvelle société fonctionne comme une société céréalière de classe mondiale, et qu'elle utilise tous les instruments du marché à sa disposition. La gestion des risques deviendra absolument indispensable. L'établissement de prix à terme et les opérations de couverture deviendront monnaie courante. Des lettres d'entente ne suffisent plus. Il faut maintenant conclure des contrats fermes. Il faut que la vente des grains par la Commission canadienne du blé se fasse dans des conditions d'équité et qu'elle soit menée de façon ouverte et moins secrète.
Troisièmement, il faut changer le rôle de la Commission canadienne du blé comme organisme de réglementation de l'industrie et du système de commercialisation des grains. Il est contraire aux règles commerciales internationales qu'une entreprise commerciale aussi importante établisse en fait ses propres règlements et les impose à ses concurrents indirects sans provoquer de conflit d'intérêts au Canada et sur le plan international.
Nous proposons qu'une partie des fonctions de réglementation de la Commission canadienne du blé soient confiées soit à la Commission canadienne des grains, soit à un autre organisme qui resterait à créer. Les permis d'exportation pourraient être accordés par Douanes Canada ou par les Affaires étrangères. C'est une simple suggestion.
Il faudra engager des discussions plus approfondies à cet égard avec tous les participants de l'industrie dans les jours à venir et il faudra atteindre un consensus. Bien entendu, la situation changerait encore si la Commission canadienne du blé était un organisme dont les règlements étaient facultatifs ou si le marché était libre. J'entends par la libre circulation des grains entre les agriculteurs et le marché.
La quatrième question est celle de la validation de la nouvelle Commission canadienne du blé et du projet de loi C-72 par l'Organisation mondiale du commerce et par le GATT. Nous sommes absolument certains que la nouvelle société dont la création est proposée dans le projet de loi sera une des causes de frictions compte tenu des règlements de l'OMC et que le problème sera soulevé à l'occasion de la première série de négociations qui doivent débuter à Singapour en 1999. Il est possible que tous les organismes commerciaux d'État soient présents, et il serait plus sage de demeurer aussi fidèle que possible aux dispositions du GATT.
Si l'application des règlements de la Commission canadienne du blé était facultative, cela créerait indiscutablement un environnement commercial plus sain sur le plan international. Comme je l'ai déjà dit, la réciprocité des échanges commerciaux est extrêmement importante à la veille de la prochaine série de négociations dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce. Dans ce domaine, les impressions ont parfois beaucoup plus d'importance que la réalité.
La cinquième question a trait à l'assujettissement des provinces à la Loi sur la Commission canadienne du blé en vertu du projet de loi C-72. Force est de s'interroger sur la raison véritable pour laquelle le gouvernement fédéral souhaite renforcer le caractère exécutoire de la Loi sur la Commission canadienne du blé pour toutes les provinces, même dans les régions non désignées actuelles. Il est clair qu'il s'agit d'une réaction directe à la contestation judiciaire du gouvernement de l'Alberta qui veut assurer la vente du grain au nom des agriculteurs de la province, en lançant ce qu'il a appelé le programme de choix commerciaux de l'Alberta. N'oublions pas que la province a tenu un plébiscite et qu'environ 16 500 agriculteurs ont voté en faveur de la possibilité de choix.
Certains diront que la question était tendancieuse, mais 62 p. 100 des répondants étaient en faveur d'un choix pour la vente de blé et 67 p. 100 pour celle de l'orge. J'ai deux questions à poser. Premièrement, pourquoi faut-il que nous ayons la main si lourde lorsqu'il s'agit de la commercialisation des grains? Deuxièmement, pourquoi avons-nous besoin d'une région désignée qui couvre l'Alberta, la région de la rivière de la Paix, la Saskatchewan et le Manitoba?
La sixième question concerne une nouvelle approche à la gestion logistique et les mesures de rechange proposées dans l'étude Blueprint for a Commercial, Least Cost, Logistics Management System on Transportation in Western Canada. La situation actuelle du transport des grains et de la gestion logistique dans l'ouest du Canada est chaotique. Nous savons tout ce qui se passe à Vancouver et ce qui nous surprend le plus est que cela ne provoque pas de réactions plus violentes. C'est étrange car il s'agit d'une situation de crise qui a de nombreuses répercussions sur les agriculteurs. Nous sommes vraiment étonnés de ne pas en entendre plus parler.
Nous avons atteint un point de crise et les pertes pour les céréaliculteurs de l'ouest du Canada prendront des formes multiples. Elles atteindront annuellement 65 millions de dollars environ, et notre réputation de fiabilité comme fournisseur est aujourd'hui mise en doute. Ce n'est pas la première fois que cela se produit. Tout le monde se renvoie la balle et pendant ce temps- là, les céréaliculteurs ont des problèmes de trésorerie et paient pour les erreurs commises par d'autres.
En fait, tout le monde est responsable, mais personne n'est tenu de rendre des comptes. L'an dernier, nous avons formé la Prairie Farm Commodity Coalition, qui réunit tous les grands groupements de producteurs spécialisés de la région des Prairies et nous avons constitué un comité chargé d'étudier la gestion logistique dans l'ouest du Canada. Nous avons créé le document intitulé Blueprint for a Commercial, Least Cost, Logistics Management System on Transportation, qui offre des solutions de rechange au transport des grains et à la gestion logistique. Notre document propose essentiellement des changements fondamentaux en ce qui concerne le sourçage des grains dans les Prairies et le transport jusqu'au port.
Il faut qu'un contrat soit passé entre toutes les parties intéressées. Le rôle futur que nous voyons pour la Commission canadienne du blé est le suivant: Elle recevrait le grain au port et se chargerait de l'exportation au nom des céréaliculteurs, mais elle ne s'occuperait plus du transport proprement dit. Rappelez- vous en effet que la commission ne dispose pas d'installations de manutention et qu'elle doit utiliser pour cela les sociétés céréalières.
La Commission canadienne du blé se procurerait le grain dont elle a besoin par l'intermédiaire des sociétés céréalières pour remplir ses obligations commerciales. Comme elle le fait maintenant, au Canada, et elle ne traiterait plus directement avec les agriculteurs. Les sociétés céréalières concluraient des contrats avec les producteurs pour se procurer le volume requis de grain, dans les délais nécessaires. Il n'y aurait plus de coûts de rendement de 85 p. 100. Ce serait différent de la situation actuelle où il n'y a pas de calendrier précis et où les contrats peuvent couvrir aussi bien une période de deux mois que de neuf mois. Il arrive parfois que ces contrats - une série de huit contrats - se prolongent jusqu'en avril ou mai. C'est totalement inacceptable.
Les compagnies ferroviaires concluraient avec les sociétés céréalières des accords qui préciseraient le volume et le calendrier de transport. Encore une fois, ce serait des arrangements contractuels comportant des mesures incitatives et des pénalités afin d'accélérer le transport, comme cela se fait déjà pour le charbon, la potasse, ou le minerai de fer, pour ne citer que quelques exemples.
Ce genre d'arrangement contractuel accroîtrait considérablement l'efficience du système et obligerait tout le monde à assumer ses responsabilités. On cesserait de montrer les autres du doigt, de dire que c'est leur faute et pas la sienne. Si la compagnie ferroviaire ne respecte pas ses engagements, on pourra lui dire qu'elle est en retard de 14 jours, par exemple, et que cela lui coûtera xx dollars.
En conclusion, il est assez remarquable que le système proposé ait fait l'unanimité dans notre industrie, ce qui est rare, même si c'est pour des raisons idéologiques différentes. Tout le monde est en tout cas d'accord pour reconnaître que le système proposé ne vaut rien. Il n'est pas possible que le ministre ne s'en rende pas compte.
Je vous remercie encore de m'avoir permis de faire cet exposé. Nous autres, céréaliculteurs de l'Ouest, sommes sensibles au fait que vous nous écoutez, et nous souhaiterions qu'à l'avenir, on en adopte une politique de la porte ouverte.
Je vous remercie.
Le président: Merci beaucoup, Leo, de votre exposé.
Nous allons maintenant donner la parole à Kevin Avram, du Prairie Centre.
Kevin, soyez le bienvenu.
M. Kevin Avram (coordonnateur de projets, The Prairie Centre): Merci, et merci de votre invitation. Je m'appelle Kevin Avram; avant de venir à Edmonton, je vivais à Regina. Je travaille pour The Prairie Centre, une organisation sans but lucratif. Je remplis les fonctions de coordonnateur. Notre organisation regroupe 10 000 membres des trois provinces des Prairies.
Notre organisation a avant tout pour objet de promouvoir la liberté individuelle et aussi, de jouer un rôle éducatif dans le domaine de la création de richesses et de la mise en oeuvre d'une politique sociale responsable.
Je dispose de 15 minutes, je crois; je vais donc me chronométrer.
Le président: Moi aussi, Kevin. Mais comme vous venez de vous présenter, je ferai comme pour les autres et je ne vous chronométrai qu'au moment où vous entamerez votre exposé.
M. Avram: Le débat qui se déroule ici est un des plus importants qui soit, non seulement en ce qui concerne l'agriculture, mais aussi en ce qui concerne l'avenir de l'ouest du Canada, de son développement économique, et du secteur à valeur ajoutée.
La Commission canadienne du blé n'est pas une coopérative. Elle ne l'a jamais été et n'a jamais été conçue pour l'être. Le monopole qu'exerce la commission a un caractère coercitif et non coopératif.
La première Commission du blé, qui n'a duré qu'un an, a été établie après la Première Guerre mondiale. Elle avait pour objet de contenir la hausse du prix du blé après la guerre. Lorsqu'elle a été démantelée, certains ont commencé à faire un rapprochement entre le prix élevé des grains après la guerre et la disparition de la commission. Le début des années 20 a donc été marqué par un fort mouvement en faveur du rétablissement de la Commission canadienne du blé. En fait, en 1922, le Parlement a déposé un projet de loi qui aurait permis aux gouvernements provinciaux de créer une commission du blé. Pour que ce projet de loi soit adopté, il aurait fallu l'accord de deux des trois gouvernements provinciaux mais il ne s'est pas fait.
C'est de cette situation que sont nés les syndicats au début des années 20. Celui de l'Alberta a été créé en 1923 et ceux de la Saskatchewan et du Manitoba, en 1924. Ce devaient être des organismes de mise en commun bénévoles, des commissions du blé non monopolistiques.
Ces syndicats ont fort bien fonctionné jusqu'en 1928, année où ils assuraient le fonctionnement d'un comptoir central de ventes. C'était un instrument de commercialisation, une commission du blé dont les règlements étaient facultatifs.
À la fin de la campagne agricole de 1928, les syndicats se sont retrouvés avec plus de50 millions de boisseaux sans couverture, sans prix protégé. À l'époque, le rédacteur de la Winnipeg Free Press avait dit que cela représentait la plus grande partie de stud poker que le monde ait jamais vue. C'était un risque colossal.
Je ne dispose pas de beaucoup de temps et je vous dirai simplement que le comptoir central de ventes s'est effondré financièrement. C'est lui qui était chargé de la vente de la moitié de la récolte.
En 1930, le premier ministre du Canada, M. Bennett, est alors intervenu et a accepté de garantir les dettes du comptoir. En fait, le gouvernement a pris en main la direction et la gestion du comptoir.
Il est en effet sans doute correct de dire «le gouvernement». En réalité, c'est bien le premier ministre qui est intervenu directement dans tout ce qui se passait. Un de ses bons amis, du nom de McFarland, ancien président de l'Alberta Pacific Grain Company, dirigeait en fait le comptoir central de ventes pour le compte du gouvernement fédéral.
À l'époque où le gouvernement avait hérité de ce comptoir, il avait également hérité de70 millions de boisseaux, si je ne me trompe. Je crois qu'à la fin de 1931, le volume avait atteint76 millions de boisseaux. Pendant toute la première moitié des années 30, le gouvernement fédéral a utilisé le comptoir central de vente des syndicats pour essayer de soutenir le prix du blé sur le marché.
McFarland est en fait intervenu sur le marché de Winnipeg et a commencé à accumuler des millions de boisseaux. En 1935, par l'intermédiaire du comptoir central de ventes, et grâce au soutien financier du gouvernement du Canada, McFarland avait accumulé 235 millions de boisseaux de blés. Le comptoir central était propriétaire de presque tout le blé du pays, et s'était servi de la situation pour soutenir les prix.
À la veille des élections de 1935, beaucoup de députés étaient terrifiés par les risques politiques que présentait la situation. C'est la raison pour laquelle le gouvernement élu en 1935 a créé la Commission canadienne du blé et en a fait un organisme non monopolistique.
Si vous regardez les articles 7 et 8 de la première Loi sur la Commission canadienne du blé, celle de 1935, vous constatez qu'ils mentionnent les stocks de grain du comptoir central de ventes, donnent pouvoirs à la nouvelle commission du blé d'assumer la charge de ces stocks, et lui fait «obligation» - c'est le mot utilisé dans la loi - de les écouler. Cette commission a fonctionné jusqu'en 1943.
Cela me rappelle que ceux d'entre vous qui ont encore des contacts avec Mitchell Sharp seront heureux d'apprendre que celui- ci est l'auteur d'une excellente étude historique sur cette époque.
En 1941, lorsque la Commission de contrôle des prix de temps de guerre a été créée, le gouvernement fédéral craignait beaucoup l'inflation. Dès sa création, la commission a donc bloqué les prix de pratiquement tous les produits.
En octobre 1941, le blé coûtait environ 77 3/8c., mais les Prairies ne s'étaient pas encore remises de la dépression des années 30; elles avaient pratiquement une économie de monoculture à l'époque. Afin de relancer l'économie de l'Ouest, le blé a été soustrait au plafonnement des prix de temps de guerre. On a donc laissé son prix flotter sur le marché libre, mais pour éviter que le prix du pain augmente, la Commission de contrôle des prix de temps de guerre a plafonné à 77c. le prix qui serait payé par le minotier. Le trésor fédéral a payé la différence entre le prix du marché libre et les 77c. par boisseau.
En outre, le gouvernement avait conclu un accord qui le contraignait à aider la Grande-Bretagne pour ses achats de produits canadiens pendant la guerre. On en était ainsi arrivé au point où chaque fois que le prix du blé augmentait d'un cent sur le marché libre, cela coûtait2,5 millions de dollars au trésor. M. Ilsley, ministre des Finances de l'époque et Jimmy Gardiner se colletaient constamment à ce sujet. Gardiner, qui était ministre de l'Agriculture, se faisait tirer l'oreille car il savait que plus on attendait, plus la situation était profitable aux agriculteurs de l'Ouest.
Finalement, en septembre 1943, le prix du blé sur le marché libre avait atteint 1,23$ le boisseau. À cause de la pression énorme que cela exerçait sur le trésor fédéral, le cabinet s'était alors réuni et avait créé le monopole de la Commission canadienne du blé. La nationalisation de l'industrie céréalière en 1943 a donc été un acte de guerre.
Je regrette de ne pas avoir notre mémoire devant moi. Vous en recevrez chacun un exemplaire au début de la semaine prochaine. Il offre une documentation complète, des informations de la presse canadienne et d'autres documents de référence.
En 1946, au cours de la période d'après-guerre... Mitchell Sharp décrit la situation dans un des derniers paragraphes de ses mémoires. Il écrit qu'après la guerre, la nationalisation du commerce des céréales a permis à Ottawa de conclure des accords à long terme concernant la vente du blé, et que cela lui avait inspiré de graves réserves.
L'accord auquel il faisait allusion était l'Accord sur le blé entre le Canada et le Royaume-Uni, aux termes duquel le gouvernement du Canada s'engageait à fournir 600 millions de boisseaux de blé sur quatre ans, à très bon marché. À l'époque, le prix du marché atteignait parfois le double du prix auquel le Canada vendait son blé à l'Angleterre.
En 1947, le sénateur Walter Aseltine a estimé qu'au cours des trois premières années et demie de commercialisation imposée par le gouvernement, le monopole de la Commission canadienne du blé a coûté aux céréaliculteurs de l'Ouest 535 millions de dollars en recettes perdues.
Des accords internationaux sur le commerce du blé ont ensuite été conclus dans les années cinquante, et l'histoire devient de plus en plus floue. Aujourd'hui, il y a des gens qui croient que le monopole de la Commission canadienne du blé est une coopérative, alors que ce n'est pas le cas. Voilà le premier point.
Le second point - il me reste cinq minutes - est qu'une des difficultés auxquelles le Canada se heurte tient au processus gouvernemental lui-même et à l'attitude des citoyens à l'égard des élus. On en est arrivé au point où les personnes de bonne volonté se refusent à briguer les suffrages. Cette situation est due à la réputation des représentants élus et à l'impression que les citoyens ont de leur travail et de leur comportement.
C'est assez regrettable, parce que cela nuit à l'intérêt général. Pourtant, une des choses qui m'ont le plus frappé chez un représentant élu au cours de ces dernières années, et qui a contribué plus que toute autre chose à mon cynisme à leur égard, est l'attitude du ministre de l'Agriculture à l'égard du Groupe de commercialisation des grains de l'Ouest. Pendant plus d'un an, le ministre s'est employé à affirmer la crédibilité du processus et à dire que c'était la voie à suivre. En fait, je me souviens d'avoir regardé plusieurs émissions d'actualité au cours desquelles le ministre était interrogé sur cette question qui est une des plus importantes pour l'Ouest. Au lieu de répondre, le ministre se contentait de faire un geste d'ignorance et de dire, «le groupe, le groupe, je ne peux pas faire de commentaires à cause du groupe».
Lorsque le groupe a présenté un rapport adopté à l'unanimité - j'aurais bien voulu me faire tout petit pour pouvoir me cacher dans la salle et suivre le processus - fondé sur leur interprétation de la situation, la force de leurs convictions et la situation économique, et aussi sur tout ce qui se passait à la base... Le groupe a donc présenté son rapport, et il m'a semblé - je n'en suis pas absolument certain - qu'en l'espace de 48 heures, le ministre de l'Agriculture a fait volte-face et est reparti dans la direction opposée. Que diable les citoyens sont-ils censés penser de tout cela?
Une des choses auxquelles nous sommes les plus attachés dans une nation comme le Canada est la possibilité d'effectuer des changements constructifs dans l'ordre et dans le calme. C'est ce que l'on appelle l'application régulière de la loi. Si nous avons des représentants élus qui définissent eux-mêmes cette application, ils changent complètement de cap sans plus s'en soucier lorsque les citoyens et le processus établi par eux-mêmes leur font entendre un message qui leur déplaît, le problème est encore beaucoup plus grave que celui de la commercialisation du blé et de l'orge, et touche à quelque chose de beaucoup plus profond.
Le troisième point - il ne me reste que quelques minutes - concerne le secret et l'obligation de rendre des comptes. Vous vous trouvez ici devant les citoyens de l'Alberta et avant cela, vous étiez en Saskatchewan et plus tôt encore au Manitoba, pour discuter de l'amélioration d'une société d'État qui fonctionne dans le secret le plus absolu depuis 50 ans.
La Commission est dispensée de l'application de la Loi fédérale sur la liberté d'information. Nombreux sont ceux qui ont essayé d'obtenir des renseignements sur les structures administratives de la Commission. Cette structure comporte deux volets: l'administration, d'une part, et les contrats de vente de l'autre. Sur le plan de l'administration - les pensions, les prestations sociales, les salaires, la rémunération d'un moniteur de conditionnement physique, le nombre de ces moniteurs sont autant de renseignements dont l'accès est interdit aux producteurs qui financent en fait tout cela. Comme vous le savez, les contribuables sont dans la même situation. Malgré cela, on refuse de nous communiquer les coûts administratifs internes de la Commission canadienne du blé.
Il est vrai que la Commission soumet un résumé annuel d'une page qui contient des chiffres globaux pour quelques catégories. Ce résumé est totalement insuffisant pour qu'on puisse se faire une idée exacte de ce qui se passe à la Commission.
Je considère donc que même les membres du comité parlementaire de l'agriculture qui sont assis devant nous aujourd'hui - même vous, mesdames et messieurs - ne pouvez pas avoir accès à ces renseignements. Vous ne savez pas ce qui se passe dans l'administration de la Commission du blé; il vous est impossible de le savoir.
Comment diable un groupe parlementaire peut-il venir ici pour demander aux membres du public que nous sommes de vous donner un avis sur une institution dont vous ne connaissez même pas le fonctionnement des rouages?
À quoi rime tout cela? Je n'essaie pas de faire dans le drame ni d'exagérer mais voilà où nous en sommes.
Ma dernière remarque concerne les contrats de vente. Si la Commission canadienne du blé exige qu'on respecte la confidentialité de ses contrats, en va-t-il de même pour les contrats passés dans les années cinquante, soixante, soixante-dix et quatre-vingt? Pourquoi cette information est-elle tenue secrète? Pourquoi n'existe-t-il pas une clause d'extinction pour les contrats de la Commission? Pourquoi n'y a-t-il pas une limite de trois à cinq ans? Pourquoi ces renseignements nous sont-ils refusés?
Y a-t-il une raison légitime pour que cet organisme, qui a fonctionné jusqu'à présent sans pratiquement devoir rendre de comptes, continuerait-il à exister, comme semble le laisser entendre le projet de loi C-72, sans que le public puisse savoir comment il fonctionne et sans que la Commission doive rendre de comptes...? Je voudrais vous persuader et vous encourager - et,M. Vanclief, j'espère que vous m'écoutez - afin d'arrêter le processus jusqu'à ce que la Commission canadienne du blé accepte de fournir des informations et de révéler ses coûts d'administration, et qu'elle fixe une clause d'extinction pour les contrats de vente passés.
Au Canada, même les documents du cabinet tombent dans le domaine public au bout d'un certain temps. Pourquoi ne peut-on pas aussi obtenir de renseignements sur le fonctionnement interne de la Commission?
Le Groupe de commercialisation des grains de l'Ouest a fait deux recommandations clés: la commercialisation mixte pour l'orge et pour les variétés de blé non homologuées. À mon avis, l'agitation que suscite le transport transfrontalier de grain jugé illégal existe en fait chez les personnes qui souscrivent à l'application régulière de la loi, s'y conforment et s'aperçoivent ensuite que le processus ne serait malgré tout pas respecté.
Je m'en tiendrai là. Je souhaite que vos délibérations soient fructueuses. Pour terminer, je dirai qu'au Canada, à la veille du prochain millénaire, un nouveau siècle aussi important que passionnant nous attend. Il ne s'agit pas de la Pologne en 1951 ou en 1952, mais du Canada en 1997, et l'idée même que cette société d'État fonctionne depuis 50 ans sans aucune visibilité ni obligation de rendre des comptes... J'estime qu'en tant que parlementaires, en fait, en tant que citoyens canadiens, vous ne devriez pas tolérer cette situation.
Je vous remercie.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Avram.
Nous avons donc entendu les exposés des trois groupes. Nous allons maintenant consacrer 45 à 50 minutes aux discussions. Je vais commencer par M. Hermanson.
M. Elwin Hermanson (Kindersley - Lloydminster, Réf.): Merci, monsieur le président, et merci à vous tous qui nous avez accueillis à Grande Prairie. Je suis heureux d'être ici et de pouvoir rencontrer des agriculteurs, des producteurs ainsi que les organisations de votre collectivité.
Premièrement, je voudrais apporter un éclaircissement sur une question de transport qui a été je crois, mentionnée par M. Meyer. Je tiens à vous assurer que mon parti a réclamé un débat d'urgence sur la question du transport des grains. Cette requête a été rejetée par le président de la Chambre, probablement pour des raisons de procédure, mais nous étions certainement dans notre droit lorsque nous l'avons demandé.
Par la suite, nous avons effectivement discuté des questions de transport à la Chambre et nous avons très clairement présenté notre position. En fait, il y avait une crise. Des parties innocentes assumaient des coûts qui ne leur incombaient pas et il fallait faire quelque chose pour résoudre le problème.
Certains d'entre vous avez mentionné le plébiscite de l'Alberta. Le processus a été traîné dans la boue dans tout le pays. Les libéraux ont critiqué le plébiscite. Apparemment, ils n'aiment les plébiscites que quand ce sont eux qui rédigent la question.
Quant au plébiscite actuel sur l'orge, le libellé de la question me rappelle un peu la situation d'une personne qui se trouve devant un restaurant et qui se demande si elle va entrer pour commander une soupe et un plat de ragoût ou si elle va rester dehors à mourir de faim? Le problème, c'est que le restaurant offre un buffet et n'a pas ces plats au menu - c'est aussi un peu ce qui manque au menu du plébiscite.
J'aimerais que vous me disiez, vous qui êtes Albertains, si vous pensiez que le plébiscite a été compris et s'il était équitable, et je voudrais savoir ce que vous pensez de la réaction du gouvernement fédéral.
Je voudrais aussi attirer particulièrement l'attention des fermiers albertains et de leurs organisations de cette région du pays sur le fait qu'au cours de ces deux ou trois dernières années, j'ai entendu plusieurs personnes dire que les seuls partisans d'une commission de commercialisation du blé et de l'orge non monopolistique sont les agriculteurs qui vivent à moins de 50 milles de la frontière américaine. En fait, un député libéral m'a dit que, jusqu'à présent, au cours de notre voyage, tous les partisans d'un marché libre vivent à moins de 200 milles de la frontière. Je lui ai fait remarquer que la plupart des agriculteurs des Prairies ne vivent pas à plus de 200 milles de la frontière. Ce n'est cependant pas le cas à Grande Prairie et je voudrais savoir si la raison pour laquelle il n'y a pas de partisans d'un marché libre chez vous, c'est parce que vous pensez qu'il vous est plus difficile d'avoir accès aux marchés que les producteurs qui vivent plus près des grandes lignes de chemin de fer et de la frontière américaine.
Lorsque j'aurai obtenu une réponse à ces deux questions, je voudrais en poser deux ou trois autres à propos d'un certain nombre de points qui ont été soulevés.
Le président: Je ne vais pas m'opposer à ce qu'on réponde à vos questions, mais nous avons déjà eu une longue discussion, hier, sur le plébiscite de l'Alberta, ou sur l'autre plébiscite, ce qui n'a rien à voir avec le projet de loi C-72. Si c'est de cela que vous voulez discuter, très bien, mais je rappelle à tout le monde que nous sommes ici pour entendre vos commentaires sur le projet de loi C-72. Je sais que la question de la commercialisation des grains n'a rien de simple, mais s'il y a ici des personnes qui veulent répondre brièvement à vos questions, qu'elles n'oublient pas que cela prend du temps. Les témoins et membres du comité préféreraient peut-être discuter du projet de loi C-72.
M. Elwin Hermanson: Permettez-moi de répondre très brièvement, monsieur le président.
Le projet de loi C-72 pourrait être rédigé de manière à répondre aux souhaits exprimés dans le plébiscite de l'Alberta; il est donc lié...
Le président: Bien, parfait.
Leo, voulez-vous répondre? Vous n'êtes pas obligé de le faire.
David, voulez-vous commencer?
M. Walker: Oui, je vais répondre à la question sur le plébiscite. Ce plébiscite a été organisé par l'Alberta Grain Commission. Je dois vous avertir que les libéraux n'apprécieront peut-être pas le libellé de la question lorsqu'ils obtiendront la réponse. Ce n'est parfois qu'après avoir obtenu la réponse qu'ils décident que la question ne valait rien. Je crois qu'hier, ou jeudi, nous avons entendu une personne qui avait fait partie du comité et participait à la décision par consensus sur le libellé de la question à propos d'un plébiscite. Ce n'est qu'après avoir vu les résultats qu'ils n'étaient plus d'accord avec la question posée.
On a également posé des questions au sujet du nombre de personnes qui ont voté dans ce plébiscite. Je dirais simplement qu'elles étaient plus d'un tiers plus nombreuses que les personnes qui ont voté pour élire un comité consultatif, en dépit du fait qu'un ou plusieurs bulletins de vote avaient été expédiés, alors que dans le plébiscite de l'Alberta, il fallait se présenter pour remplir un affidavit, ce qui était plus compliqué que de renvoyer simplement une enveloppe. J'en ai déjà parlé.
M. Elwin Hermanson: Est-ce une question de situation géographique? Cette région de notre pays est-elle opposée à la création d'un marché libre parce qu'elle est éloignée des principaux réseaux de transport? Voilà ma seconde question.
M. Walker: Je crois que vous avez entendu Leo dire cela. Leo vit à trois quarts d'heure de route au nord d'ici. Je ne sais pas quelle distance le sépare de la frontière américaine.
Qu'en pensez-vous, Leo?
M. Meyer: Il en est à 1 000 kilomètres, plus de 600 milles.
M. Goertzen: Je voudrais également répondre à cette question.
Les gens qui disent que les seuls partisans du marché libre vivent à moins de 50 milles de la frontière américaine ne comprennent manifestement pas ce qu'est le transport des grains. Dites-vous que Lethbridge est une région déficitaire pour le maïs et le grain. Il existe là-bas une importante industrie de l'embouche qui consomme énormément de grains. Si un producteur qui vit à moins de 50 milles de la frontière américaine peut vendre son produit à meilleur prix aux États-Unis, il faut que le déficit de l'offre qu'il crée ainsi soit comblé par quelqu'un d'autre. Ce grain vient de la Saskatchewan ou plus au nord de l'Alberta, plus loin au nord. C'est tout aussi progressif. La seule différence est celle des coûts de transport, qui existaient déjà. Si vous vouliez avoir accès au marché de Lethbridge, vous aviez les mêmes coûts de transport à assumer.
Que se passerait-il vraiment si les producteurs du sud de l'Alberta allaient vendre leur grain sur le marché du Montana où les prix sont plus élevés, ce qui entraînerait une augmentation du prix de l'orge à Lethbridge? Dans la zone d'attraction commerciale de Lethbridge, tout le monde bénéficierait de la même augmentation du prix du grain. S'il augmente de 50c. le boisseau, le producteur de Peace River en bénéficiera exactement de la même manière que celui qui se trouve à20 milles du parc d'engraissement.
Le président: Monsieur Meyer, avez-vous une remarque à faire?
M. Meyer: Glen a soulevé une question très importante au sujet des prix et je crois que c'est ce dont vous vouliez parler. À titre d'exemple, Sparks Companies Inc. aux États-Unis, qui est aujourd'hui présente dans 54 pays dont elle évalue les marchés, a effectué une étude sur la vente à terme de l'orge de l'Ouest et a découvert, à sa grande surprise, après avoir parlé à la bourse de Paris, aux acheteurs asiatiques, chinois et américains des grandes régions d'embouche, que la vente à terme de cette orge était un remarquable mécanisme pour connaître les prix dans le monde entier, et qu'en fait, cela permettrait de savoir comment les prix évoluaient, pour les raisons que Glen vient d'expliquer. Pour moi c'est important, car ce qu'a dit Glen à propos des partisans d'un marché libre ou d'une Commission canadienne du blé non monopolistique encouragera 130 000 agriculteurs à se précipiter aux États-Unis pour y vendre leur grain, est totalement faux. Ce n'est pas ce qui va se produire.
Ce qui va se passer c'est que vous aurez un prix garanti à un élévateur à High Level, à Spirit River, voire à Lethbridge, et que le même prix sur le marché mondial reflétera le coût du transport du grain au marché qui en a besoin. Dire qu'un marché libre créerait des frictions sur le plan commercial est tout à fait faux.
Nous avons aussi une observation à faire au sujet de la demande future. Mesdames et messieurs, monsieur le président, il y a un phénomène intéressant en ce moment même. Nous avons une guerre de l'orge, une révolte provoquée par la commercialisation de l'orge car la plus grande partie de l'orge de l'ouest du Canada ne passe en fait pas par la Commission canadienne du blé, du moins d'après nos calculs - je sais que cela dépend aussi de la méthode de calcul, mais il est probable que moins de 25 p. 100 de l'orge est vendue par l'intermédiaire de la commission. Le reste est utilisé comme fourrage ou traité hors-commission.
Le potentiel de l'élevage porcin est fantastique. La demande de porcs va être énorme. En Alberta, nous commençons en fait... À la longue, il pourrait ne pas y avoir suffisamment de grain fourrager, car nous sommes à un endroit idéal pour l'élevage du bétail et des porcs. D'autre part, à cause de notre faible population et de nos vastes espaces, de grandes possibilités s'offrent dans le domaine de l'approvisionnement en grains des parcs d'engraissement de bétail et des éleveurs de porcs, en particulier dans la région de Peace River.
Le président: Kevin, avez-vous une remarque à faire?
M. Avram: Leo a déjà évoqué la plupart des points dont je voulais parler.
Je mentionnerai simplement le fait que le marché américain le plus proche se trouve à600 milles d'ici. Vers l'ouest, le marché se trouve probablement à plusieurs milliers de kilomètres. Rupert n'est pas un marché, ne l'oubliez pas; c'est un port, et il ne faut pas confondre un port et un marché.
Je viens de rentrer de l'État de Washington. J'y ai rencontré la Cattle Feeders Association qui s'intéresse beaucoup à l'achat de grains fourragers de l'ouest du Canada, en particulier d'orge. Actuellement, la Commission canadienne du blé détient environ un sixième d'un pour cent du marché des grains fourragers aux États- Unis. Dire que cela en fait une force sur le marché américain, comme beaucoup l'ont dit, est... Il faut beaucoup d'imagination pour le croire.
Le président: Elwin.
M. Elwin Hermanson: Ma seconde question concerne le projet de loi C-72. Elle est en partie inspirée par les commentaires de M. Avram sur le Groupe de commercialisation des grains de l'Ouest et par le cynisme de l'industrie qui ne semble pas avoir pris ce groupe très au sérieux. Cela ne devrait pas vous surprendre, car il y a des années que les gouvernements conservateurs et libéraux lancent des enquêtes et créent des commissions royales. Les rapports vont toujours finir sur les tablettes et il semble bien que ce soit le cas du rapport du groupe.
Vous avez parlé du secret. Le projet de loi C-72 comporte une clause d'indemnisation, ce qui n'a rien d'inhabituel. L'objet de cette clause est de protéger les administrateurs et les cadres supérieurs de la Commission contre les poursuites lorsqu'il se produit des choses répréhensibles au sein de la Commission et dont ils ignoraient l'existence ou dont ils ne peuvent être tenus responsables. C'est tout à fait courant. Cette disposition existe dans la Loi sur les institutions financières.
Cette clause d'indemnisation vise également les employés, ce qui est très inhabituel, et son effet paraît être rétroactif. Nous essayons d'obtenir une réponse des fonctionnaires du ministère à qui nous avons demandé si même les anciens commissaires seraient protégés en vertu de cette loi. Ce n'est pas clair.
Il y a aussi le manque de visibilité de la Commission et le fait qu'elle n'est pas soumise aux dispositions de l'accès à l'information. En fait, elle n'est pas vérifiée par le vérificateur général.
Monsieur Avram, je crois que vous avez présenté un excellent argument. Les députés d'en face ont dit que la Commission fait l'objet d'une vérification annuelle et qu'elle présente un état financier. Une véritable vérification, qui serait faite par le vérificateur général, serait un contrôle de gestion qui montrerait si l'investissement des producteurs dans la Commission est rentable et si la Commission leur paie effectivement un prix intéressant. Peu importe aux producteurs qu'on leur verse 4,61$ ou 4,65$ lorsqu'ils vendent des millions de tonnes au Japon. Ce qui les intéresse c'est que la Commission ait fait un excellent travail pour eux, au prix le plus bas possible.
Je voudrais faire quelques remarques au sujet de la clause d'indemnisation. D'autres pourraient peut-être aussi nous dire s'ils pensent que le projet de loi C-72 laisse la Commission trop libre de maintenir le secret de ses opérations et ne l'oblige pas assez à rendre des comptes, en particulier sur le plan de l'organisation.
M. Avram: Pour commencer, je dirais que ce que l'on appelle la vérification de la Commission canadienne du blé se réduit à une note d'information à l'intention du public. C'est un document d'une page qui figure dans le rapport annuel de la Commission et qui donne des chiffres globaux sur un certain nombre de catégories.
Notre organisation est presque exclusivement composée d'agriculteurs. Bon nombre d'entre eux ont en fait écrit à la Commission pour obtenir des renseignements précis et à chaque fois on leur a répondu que leur demande devait être présentée conformément aux dispositions de la Loi sur l'accès à l'information mais comme cette loi ne s'applique pas à la commission, les renseignements ne sont pas fournis.
M. Andy McMechan est un céréaliculteur du Manitoba qui a passé 150 ou 155 jours en prison l'an dernier pour avoir vendu de l'orge. Selon la transcription de l'affaire et l'interprétation donnée par le juge, il a été condamné pour avoir mal interprété l'intention du Parlement en 1943 à propos de deux ou trois lois, et c'est pour cela qu'il est allé en prison. Pour les agriculteurs et pour beaucoup de membres de la communauté agricole, certains articles proposés tels que le 3.93 ou le 3.94 qui prévoient l'indemnisation des anciens commissaires, des administrateurs et des employés, en cas de poursuites, sont très difficiles à accepter, c'est le moins qu'on puisse dire.
J'ai oublié l'autre partie de votre question monsieur Hermanson.
M. Elwin Hermanson: Il s'agissait de la vérification.
M. Avram: Le vérificateur général du Canada a fait un excellent travail au cours des dernières décennies. À notre avis, si le vérificateur pouvait examiner au fonctionnement interne de la Commission canadienne du blé, cela ne constituerait une menace pour personne. On devrait considérer au contraire que c'est une occasion pour la Commission de bénéficier de la compétence professionnelle du vérificateur.
M. Balderston: Toujours dans le contexte de votre question, j'ai passé sept jours l'an dernier avec le groupe de commercialisation; j'ai assisté aux audiences et je suis même intervenu. Je ne pense pas avoir jamais comparu devant un groupe aussi consciencieux. Les membres du groupe représentaient des milieux très divers. À mon avis, les recommandations que le groupe a faites au sujet de l'avenir de la Commission canadienne du blé étaient excellentes. Je serai surpris qu'on ne soit pas d'accord avec moi; le groupe a vraiment fait un beau travail. Il est parvenu à un compromis. Ce n'était pas tâche facile que de nous aider à entrer dans le XXIe siècle, mais à mon avis, ces efforts n'ont servi à rien.
M. Meyer: Monsieur le président, je voulais faire écho aux remarques de Gil. Nous nous sommes donnés beaucoup de mal pour préparer les exposés que nous avons faits devant le Groupe de commercialisation des grains de l'Ouest, et je voudrais également que vous compreniez autre chose. Certaines de ces organisations font cela à titre purement bénévole. Participer à ce genre de processus demande beaucoup de temps, c'est le moins qu'on puisse dire.
Notre travail ne devient pas plus facile. Il est très dur, de nos jours, d'en rester éloigné pendant 25 à 40 p. 100 du temps, simplement pour nous assurer que nous pouvons choisir la méthode de marketing et pour donner des avis de manière aussi honnête et juste que possible. Tout cela prend beaucoup de temps et est très accaparant.
Cela dit, je voudrais ajouter une observation au sujet du Groupe de commercialisation des grains de l'Ouest, monsieur le président. Il ne faut pas oublier que ce groupe a été choisi par le ministre de l'Agriculture lui-même. Ce n'est pas nous qui avons recommandé les personnes qui siègent à ce groupe.
Ce que je vais dire fait peut-être un peu écho à l'exposé de Kevin. Comment se peut-il qu'à ce stade le ministre de l'Agriculture n'ait pas le temps de rencontrer le groupe de commercialisation pour discuter de ces questions? À quoi cela rime- t-il? Est-ce ainsi que le ministre de l'Agriculture manifeste son respect pour ces personnes si dévouées? Ne l'oubliez pas, c'est lui qui les a choisies.
Le président: Monsieur Calder.
M. Murray Calder (Wellington - Grey - Dufferin - Simcoe, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour, messieurs.
En fait, Elwin a déjà répondu à une de mes questions. Je suis celui qui pose la question à propos de la frontière.
Je suis éleveur de volailles en Ontario et mes produits sont donc soumis à la gestion de l'offre. Je voudrais parler de l'article 3.1 proposé qui a trait à l'élection du conseil d'administration.
Dites-moi ce que vous pensez du scénario suivant. Actuellement, le paragraphe 3.1(2) proposé dit que «Le conseil compte de 11 à 15 membres ou administrateurs dont le président du conseil et le président». Si vous me le permettez j'utiliserai le chiffre 15, avec 10 administrateurs élus et cinq administrateurs nommés. Le président serait élu et le premier dirigeant serait nommé. Qu'en pensez-vous?
Le président: David.
M. Walker: Ce scénario ne signifie absolument rien pour nous car nous considérons que la Commission du blé devrait être l'agent des agriculteurs de l'Ouest et qu'à ce titre, tous les membres du conseil d'administration devraient être élus et la responsabilité financière des garanties devrait être traitée de manière différente.
Je crois que vous venez de Lambton - Middlesex, qui est une région...
M. Murray Calder: Wellington - Grey - Dufferin - Simcoe.
M. Walker: Excusez-moi. Bien. Mais la Commission de l'Ontario est placée sous l'autorité provinciale. Elle a plus d'autonomie que la Commission canadienne du blé. Ses garanties sont traitées de manière différente. Dans l'Ouest, nous n'aimons pas beaucoup dire que c'est l'Est qui a raison dans ce cas, mais il y a peut-être quelque chose à apprendre de cette commission de l'Ontario.
Voici comment nous voyons les choses. Il faut que la Commission inspire aux agriculteurs un sentiment d'appartenance. Il faut qu'ils puissent jouer un rôle dans son fonctionnement. Lorsque les choses se détériorent, il faut être capable d'intervenir. Le sentiment d'appartenance est probablement aussi important que l'obligation de rendre des comptes qui joue surtout en ce qui concerne le marché.
C'est un compromis, mais un compromis auquel nous n'avons peut-être pas pensé.
M. Murray Calder: Bien.
Le président: Leo voudrait dire quelque chose.
M. Meyer: Je vous remercie de votre question.
Permettez-moi de vous rappeler ce que j'ai dit dans mon exposé. À notre avis, tous les membres du conseil d'administration devraient être élus, après quoi le président et le premier dirigeant devraient être élus parmi les membres de ce conseil. Nous comprenons les raisons de votre inquiétude et nous comprenons aussi que le gouvernement se soucie de la responsabilité à l'égard des contribuables canadiens. Il n'en demeure pas moins qu'à notre avis, la plus grande cause de friction tient aux liens qui existent entre la Commission canadienne du blé et le gouvernement canadien.
Si nous parvenons à accroître l'indépendance de la Commission vis-à-vis du gouvernement canadien, il sera beaucoup plus facile de défendre le maintien de la Commission à l'avenir. Nous ne voyons pas comment vous pourriez soutenir...
Par exemple, je sais que les emprunts sont un gros problème, en particulier pour les partisans du statu quo qui sont naturellement de vigoureux défenseurs de la Commission canadienne du blé. Je vous signale que les Wheat Growers ont calculé qu'il y avait probablement un avantage de 0,5 p. 100 à 0,75 p. 100 à emprunter dans les conditions actuelles au lieu d'emprunter de l'argent sur le marché libre comme le ferait une nouvelle Commission canadienne du blé qui aurait ce genre d'envergure commerciale.
Il est probable que les économies annuelles actuelles sont de l'ordre de 35 à 50 millions de dollars. Howard Migie, dans son exposé, a dit que ces économies s'élèvent à 350 millions de dollars. C'est probablement faux, car cela me paraît impossible. Supposons que la Commission canadienne du blé ait un budget de 4 à 6 milliards de dollars; je crois que les ventes ont atteint 5,6 millions de dollars l'an dernier. Lorsque vous êtes un organisme qui fonctionne bien, vous ne financez pas tout constamment, n'est-ce pas? Disons donc que la Commission emprunte 4 milliards de dollars. L'économie de 0,5 p. 100 réalisée sur le paiement des intérêts serait de 20 milliards de dollars. L'argument n'est donc pas tout à fait juste.
Bien sûr, il serait possible, avec une Commission canadienne du blé organisée différemment, d'avoir d'autres arrangements avec le gouvernement canadien. En fait, il existe une organisation au Canada qui aide les entreprises à obtenir des garanties à l'exportation. Il nous paraît possible que les ventes de grain, en particulier s'il s'agit d'un volume important, soient examinées au cas par cas par cet organisme.
Je sais que je me suis un peu écarté de votre question, mais je crois que c'est important, car on a dit que la nomination du premier dirigeant et du président de la Commission était justifiée parce qu'il fallait assurer la responsabilité de l'organisme à l'égard du Canada et du gouvernement ainsi que des contribuables canadiens dont l'argent est après tout investi dans la Commission.
M. Murray Calder: Voilà le problème auquel je suis confronté. Ce que je voudrais savoir, c'est comment garantir la responsabilité à l'égard des contribuables canadiens, non seulement ici, à Grande Prairie, mais aussi à Holstein, en Ontario, d'où je viens, ou à Malpèque, d'où vient Wayne. S'il y avait un conseil d'administration dont tous les membres étaient élus sans aucune intervention du gouvernement et si vous réclamez malgré tout le maintien du troisième pilier, c'est-à-dire la garantie du gouvernement, ce que je voudrais savoir c'est comment faire pour respecter la responsabilité de l'organisme à l'égard du contribuable canadien?
Le vice-président (M. Glen McKinnon (Brandon - Souris, Lib.)): Votre question s'adresse-t-elle à monsieur Meyer?
M. Murray Calder: À tout le monde.
M. Walker: Il y a une réponse à cela. La lecture du témoignage que Howard Migie a présenté devant vous plus tôt ce mois-ci, m'a beaucoup appris. J'avais une idée générale des avantages qu'offrait le statut de société d'État en ce qui concerne les emprunts encore que, comme Leo, je crois que ces avantages étaient très exagérés et surestimés et qu'il y a sans doute une bonne raison pour cela.
Lorsque vous vous donnez la peine de réfléchir à ce que Howard Migie nous a dit, vous vous rendiez compte que les exigences relatives au capital de fonctionnement et la garantie du paiement initial pourraient être couvertes par la Loi actuelle sur la vente coopérative des produits agricoles. Vous pourriez modifier cette loi afin de l'appliquer à la Commission du blé. En vertu de la loi, vous vous entendez avec le gouvernement fédéral avant la campagne agricole, vous négociez les conditions et que vous obtenez votre garantie, après quoi, c'est à vous de jouer.
Il serait ainsi possible de garantir le paiement initial. Le crédit de vente à l'exportation, qui est le gros morceau, représente 6 milliards de dollars, alors que la garantie du paiement initial est de1,5 milliards de dollars. Pour le crédit, on peut de toute façon s'adresser à la Société pour l'expansion des exportations; elle aide les entreprises privées. Vous pourrez ainsi éviter les difficultés auxquelles se heurtera d'ici cinq ou dix ans une société commerciale d'État dans le contexte de l'OMC.
M. Goertzen: Je voudrais ajouter un mot aux remarques de David. L'Australian Wheat Board est déjà en train de modifier son fonctionnement. Ce n'est donc pas la première fois que ça se ferait. Nous avons donc là un modèle dont nous pourrions nous inspirer.
Le vice-président (M. Glen McKinnon): Je vous remercie de ces renseignements sur l'organisation de la Commission. Je vais maintenant donner la parole à monsieur Meyer.
M. Meyer: Merci, monsieur le président, et merci à vous aussi, monsieur Calder, pour votre question. Vous avez compris que j'ai été obligé de réfléchir un instant car devant une instance telle que celle-ci, il est bon de réfléchir avant de parler.
On ne nous a pas demandé de présenter un exposé sur la manière dont nous concevons le fonctionnement d'une Commission canadienne du blé non monopolistique. Je suis ici pour vous parler du projet de loi C-72. Il a fallu pour cela, naturellement, que nous nous consultions afin de parvenir à une conclusion qui soit logique sur le plan commercial et dans d'autres domaines, compte tenu des diverses possibilités envisagées.
Cela dit, nous avons également discuté de la manière de procéder. Nous sommes d'accord avec David. Ce sont certainement là des instruments dont nous pourrions nous servir.
Bien sûr, dans un tel scénario, il faudrait décider comment structurer les paiements initiaux, provisoires et finals.
Je n'ai pas entendu les exposés des céréaliculteurs à Winnipeg mais je voudrais m'y référer. Je crois qu'ils ont parlé des modèles d'outre-mer, des périodes de mise en commun, des prix au comptant, etc. Dans ce genre de scénario, je crois qu'il faudrait que la Commission canadienne du blé offre aux agriculteurs un système différent de mise en commun et d'établissement des prix. Il ne serait alors plus nécessaire d'accorder une garantie pour la plus grande partie du grain, quel que soit le type de mise en commun.
Encore une fois, je vous demanderai de me permettre... Tout cela demande réflexion. Il faut voir si ces modèles fonctionnent vraiment bien avant de s'engager vraiment. De toute façon, la moitié environ du grain sera mise en commun et il est fort probable que pour l'autre moitié, la Commission canadienne du blé offrira un remboursement au comptant.
Le vice-président (M. Glen McKinnon): Monsieur Meyer, merci de votre intervention.
Avez-vous une autre question à poser, monsieur Calder?
M. Murray Calder: Pour bien préciser les choses, il faut que je pose les questions suivantes. Le projet de loi C-72 fait un organisme mixte de la société d'État qu'est la Commission. Vous proposez même d'en faire un organisme totalement privé. Pourtant, nous voulons toujours pouvoir compter sur la garantie du gouvernement.
Ma question suivante porte sur l'ancien article 45 modifié par la clause 22. Il traite de l'exclusion. Une des choses que j'ai entendu dire pendant toute cette discussion, c'est qu'une clause d'inclusion devrait également être incorporée. Qu'en pensez-vous?
M. Walker: Je crois que la question de l'inclusion relève de la partie VI de la loi. Depuis 20 ans, il y a une disposition relative à un plan de marketing qui n'a jamais été utilisée.
M. Murray Calder: Oui.
M. Walker: Il faut que je me montre prudent car j'ai réagi avant d'avoir consulté les six agriculteurs de l'Alberta Grain Commission. Je pense cependant que j'exprime bien leurs vues. Ike Lanier a fort éloquemment déclaré hier que cela n'a pas vraiment d'importance et que vous pouvez faire tout ce que vous voulez de la Commission du blé, à condition qu'elle n'exerce pas de monopole. Un point c'est tout.
Vous avez également entendu des témoins, hier, qui étaient contre l'inclusion du canola. C'est simplement, je crois, parce qu'ils n'ont pas confiance dans la Commission. L'expérience qu'ils ont vécue avec elle n'a pas été très bonne. Ils voient là un premier empiétement de la Commission avant que celle-ci ne monopolise la vente du canola.
Je crois que l'Alberta Grain Commission serait d'accord pour que l'observation de ces règlements soit facultative. C'est le marché lui-même qui impose l'obligation de nous rendre des comptes ce qui, après tout, est la meilleure méthode. Quoi qu'il en soit, nous sommes libres de ne pas traiter avec la Commission. C'est pourquoi l'option de mise en commun facultative est si populaire en Alberta.
M. Murray Calder: Je crois en fait que lorsque nous avons entamé cette discussion, il s'agissait de commercialisation mixte. Il s'agissait de savoir si le canola survivrait dans un tel système.
Le vice-président (M. Glen McKinnon): Je vois une autre main levée, allez-y, monsieur Goertzen.
M. Goertzen: Je voulais simplement parler de l'inclusion. Je crois aussi qu'il est extrêmement important que ce soit facultatif.
Je suis mieux placé pour parler de ma propre exploitation agricole, mais elle n'a rien d'unique. Je produis du grain uniforme. Comme vous le savez, à l'approche du XXIe siècle, tout va de plus en plus vite. Pour pouvoir continuer à contrôler la commercialisation de mon grain et maintenir la rentabilité de mon exploitation, je suis obligé de prendre des décisions rapides. Pour moi comme pour les autres exploitations du même genre que la mienne, cela demande beaucoup trop de temps de passer par la Commission. Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre 18 mois un paiement final.
Mais peu m'importe que certaines personnes estiment avoir besoin de la Commission pour assumer cette partie de leur responsabilité. Elles sont bien libres de le faire. Si elles veulent du canola «Commission», très bien, mais pour que mon exploitation fonctionne, je suis obligé de m'occuper moi-même de la commercialisation.
M. Meyer: Je me fais probablement encore l'écho de préoccupations similaires. Je parlerai peut-être un peu plus tard de la manière dont nos exploitations fonctionnent aujourd'hui. Nous sommes parfois obligés de tenir compte d'une foule de considérations différentes avant de décider de ce que nous allons faire et de la manière dont nous allons vendre notre grain.
Il est très important que la Commission canadienne du blé n'exerce pas un monopole. Qu'en est-il de la question que nous avons posée aux agriculteurs dans notre province au moment du plébiscite? Le choix est très important. En ce qui me concerne, c'est la question clé.
Pour revenir à nos exploitations agricoles et à la manière dont nous décidons quand et comment vendre notre grain, voici ce à quoi nous nous attendons. Si la Commission canadienne du blé n'est pas profondément remaniée, certaines exploitations agricoles se contenteront de modifier leur méthode de production et de commercialisation de leur grain. Autrement dit, elles vont utiliser ce grain comme fourrage pour le bétail, pour les porcs par exemple, et exporter des bêtes sur pied au lieu de grain, ou bien elles vont produire des cultures qui échapperont au monopole de la Commission canadienne du blé.
Mon cas n'a rien de bien particulier. Lorsque je parle à mes collègues de l'ouest du Canada, je constate que nous cultivons de moins en moins de grain «commission». Il y a 12 ou 15 ans, le grain «Commission» représentait de 80 à 85 p. 100 de ma production. Cette année, probablement moins de 10 p. 100, et le pourcentage continue à baisser.
En tant qu'exploitant moderne, je ne peux pas fonctionner dans ce genre de système de marché. En effet, le système n'est pas suffisamment souple pour me permettre de subsister et d'exercer le contrôle nécessaire comme gestionnaire d'une exploitation agricole. Je ne peux rien faire lorsque certains indices me montrent qu'il existe une demande de blé sur le marché. Je ne peux pas expédier de blé parce que je suis lié par un contrat que j'ai signé l'automne précédent. Deuxièmement, il n'y a pas de moyens de transport. Troisièmement, le prix pour ce type de grain est fixé dans le contrat, et ce prix est déjà très inférieur à celui du marché. Ce genre de scénario ne marche pas, un point c'est tout.
Je sais maintenant que lorsque je vends mon produit, je peux perdre de l'argent si les prix évoluent à mon détriment. Cela peut se produire mais il n'y a rien à faire. Le fait est que c'est la façon dont fonctionne le marché. Ce qu'il faut faire dans un cas de ce genre ou lorsqu'on n'est pas trop sûr de l'évolution des prix... De toute façon, on ne vend pas tout d'un seul coup. Chacun établit sa propre période de mise en commun sur sa ferme.
Lorsqu'il y a un marché haussier, comme l'année dernière, c'était exactement ce que l'on finit par faire. On commence par vendre des céréales. Le prix monte et on en vend davantage. Enfin, il y a un moment où le prix atteint un sommet et c'est là que l'on vend tout ce qui reste.
Mais il faut faire des choix. Nous avons besoin de cela pour pouvoir faire les bons choix pour notre ferme.
Le président: Merci, Leo. Nous allons passer à M. Penson.
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Merci, monsieur le président.
J'aimerais souhaiter la bienvenue au comité de l'Agriculture ici à Grande Prairie, qui se trouve dans le grand pays de Peace River.
En tant que député de cette région, je sais que j'ai beaucoup travaillé pour amener le Comité de commercialisation du grain à venir ici aussi. Il est regrettable qu'il ait décidé de ne pas venir, ce qui a obligé les agriculteurs d'ici à aller à Edmonton. Ils se sont regroupés et ils se sont rendus à Edmonton pour se faire entendre.
C'est une excellente chose que le comité ne tienne pas uniquement ses audiences à Ottawa ou à Winnipeg. Il les tient là où se trouvent les producteurs et il les entend dans leur propre collectivité. Il existe des situations très particulières qui doivent lui être expliquées.
J'aborderai quelques points que m'a suggérés l'exposé présenté ici ce matin, messieurs. J'ai beaucoup aimé votre exposé. Le commentaire qu'a fait M. Meyer au sujet de l'OMC et de la possibilité que cela crée des irritants commerciaux avec la Commission canadienne du blé m'a intéressé. Comme vous le savez, la dernière ronde du GATT a débouché en 1992-1993 après neuf ans de discussions environ dans le cadre de la ronde Uruguay. L'agriculture a été assujettie aux règles commerciales du GATT pour la première fois. On a reconnu à l'époque qu'il y avait encore beaucoup à faire mais que c'était un début. On a parlé de guerres commerciales et prévu la réduction progressive des subventions et des barrières tarifaires. On espérait que, la prochaine fois, on pourrait accélérer les choses et aborder d'autres problèmes du domaine de l'agriculture.
Je me trouvais au mois de décembre à Singapour où je suivais les discussions de l'Organisation mondiale du commerce et la rumeur était que le groupe de travail sur l'agriculture allait se réunir en 1999, ce qui donnait deux ans pour se préparer, et que ce comité aborderait un certain nombre de choses la fois suivante, l'une d'entre elles étant les entreprises commerciales publiques. Monsieur Meyer, vous avez signalé que ces entreprises pouvaient constituer des irritants.
Je dirais simplement que, d'après ce que j'ai entendu - bien évidemment, le Canada a la Commission canadienne du blé - ce n'est pas la seule entreprise commerciale publique que l'on trouve dans les 128 pays qui sont membres de l'Organisation mondiale du commerce. Il en existe dans de nombreux pays mais ces entreprises seront à l'ordre du jour de la prochaine ronde de négociations.
J'aimerais avoir vos commentaires là dessus. Il semble que la question va être de savoir si les entreprises commerciales publiques sont transparentes ou se trouvent en situation concurrentielle. Dans ce dernier cas, il n'est pas aussi nécessaire qu'elles soient transparentes que si elles n'ont pas de concurrents. Je me demande ce que vous pensez de l'idée de renforcer la concurrence pour éviter que l'Organisation mondiale du commerce prenne des mesures pour imposer la transparence la prochaine fois.
M. Meyer: Merci, Charlie, de votre question.
Je crois avoir résumé de façon assez brève mes observations sur l'accord du GATT de l'Organisation mondiale du commerce.
J'aimerais mentionner ici à tous ceux qui sont présents que nous sommes en train de préparer en Alberta ce que nous appelons une position sur l'agriculture qui va répondre aux préoccupations que soulèvent pour nous les négociations commerciales de 1999. Nous avons constitué un groupe qui s'intéresse à ces choses, et auxquelles vont participer toutes les personnes qui oeuvrent dans le domaine de l'agriculture, pour que nous soyons bien préparés pour ces négociations.
Nous avons eu la chance, monsieur le président, d'entendre, il y a quatre ou cinq semaines, l'exposé d'un des négociateurs commerciaux les plus expérimentés d'Agriculture Canada, Mike Gifford, et il nous a dit des choses étonnantes au sujet de la dernière ronde de négociations. Monsieur le président, mesdames et messieurs, il a dit des choses fort intéressantes, à savoir que le secteur des céréales n'a pratiquement manifesté aucune opposition. Ici, les gens qui représentaient le secteur laitier, le secteur avicole, le secteur du poulet, et tous les secteurs qui sont chapeautés par un organisme de commercialisation étaient fort bien représentés. Ils avaient préparé des positions solides et ils n'en défendaient qu'une.
Cela m'amène à penser que, dans le secteur des céréales, il va falloir nous retrousser les manches et nous préparer à la prochaine ronde de négociations, parce que, comme l'a fait remarquer Mike Gifford, ces négociations vont avoir pour but de réduire les écarts. Par écarts, il voulait dire qu'il y a encore des pays qui vont être obligés de réduire de façon importante leurs prix agricoles pour qu'ils deviennent des exportateurs équitables.
Pour revenir à votre question, vous savez que j'ai mentionné qu'avec une Commission canadienne du blé facultative, cela nous donnerait un environnement commercial international beaucoup plus sain. Une Commission canadienne du blé qui n'aurait plus son monopole et qui ferait face à la concurrence faciliterait grandement la prochaine ronde de négociations.
Le président: Y a-t-il un autre commentaire? Kevin.
M. Avram: Nous avons récemment eu des réunions et des discussions avec les gens qui font de l'élevage au sud de la frontière - au sud du 49e parallèle - et ils ont signalé, que de leur point de vue, le principal irritant était le monopole de la Commission canadienne du blé et l'effet qu'il avait sur le prix des grains de provendes domestiques, plus précisément l'orge, dans l'ouest du Canada. Ce monopole ayant pour effet de réduire le prix des grains de provendes dans l'ouest du Canada, cela avantage artificiellement les éleveurs de l'Ouest, en particulier de l'Alberta, au détriment du producteur d'orge.
Plusieurs personnes se sont adressées à moi ou à d'autres membres du groupe pour demander ce qu'elles pouvaient faire pour exercer des pressions sur le gouvernement canadien et pour que l'on mette un terme à cet effet pervers. Nous avons mentionné qu'une Commission du blé facultative ou un marché de l'orge mixte permettrait d'harmoniser les règles du jeu, tout en répondant aux désirs des producteurs d'orge de l'ouest du Canada.
Le président: Gil.
M. Balderston: Charlie, pour répondre à votre question, je dirais que dans le secteur céréalier, tout le monde sait qu'il va y avoir des changements. Ces changements vont arriver, que nous le voulions ou non. Cela est sûr. J'ai un fils de 33 ans qui exploite la ferme avec moi. Il n'est pas possible de comparer ce qu'il sait à 33 ans avec ce que je savais au même âge. Il n'y a aucune comparaison. Il a un ordinateur. Il fait beaucoup d'autres choses.
Nous sommes à l'aube du XXIe siècle et nous allons faire certains changements d'ici là. Je ne pense pas que nous soyons tous en train de parler de la suppression de la Commission. Il y aura un autre mécanisme qui travaillera de façon différente et je crois que le Comité de commercialisation a fort bien présenté la question et décrit ce qu'il nous fallait faire. L'Alberta Grain Commission est favorable à l'étude du comité pour ces raisons-là. Je crois que nous voulons participer à tout cela. Nous ne voulons pas être laissés sur la touche.
Le président: Charlie, une dernière ronde.
M. Charlie Penson: J'aurais un dernier commentaire au sujet de l'OMC. Comme la plupart d'entre vous le savent, le Canada a abordé la dernière ronde du GATT en appuyant l'article 11, la gestion de l'offre, et nous nous sommes trouvés isolés. Il y avait quelques pays qui nous appuyaient mais finalement, nous nous sommes trouvés tout seuls et avons perdu sur la question des restrictions frontalières. On a préféré des tarifs qui seraient réduits progressivement. Je crois qu'il faudrait cette fois-ci adopter une stratégie axée sur l'entretien préventif pour éviter de nous laisser surprendre.
J'ai une autre question qui concerne les crédits à l'exportation, à laquelle plusieurs intervenants ont fait allusion. Les crédits à l'exportation semblent soulever certains problèmes. Je sais que mon collègue M. Calder en a parlé. Que devrait faire le gouvernement canadien dans le domaine du crédit à l'exportation? Je me demande quelle position nous devrions adopter lorsqu'on nous demande d'utiliser l'argent du contribuable pour appuyer légalement la société Bombardier et que nous savons qu'il s'agit d'un prêt qui ne sera jamais remboursé. Notre politique étrangère, en matière de crédit à l'exportation, peut prendre différentes formes et je crois qu'il y a eu certains commentaires à ce sujet. Il n'est pas nécessaire de choisir une garantie dont bénéficierait la Commission canadienne du blé. Les États-Unis ont utilisé un programme d'expansion des exportations pour renforcer leurs exportations et le gouvernement canadien pourrait faire la même chose. Je crois que vous avez parlé de la Société pour l'expansion des exportations, comme solution possible. Ma question est la suivante: si le gouvernement fédéral décide, dans le cadre de sa politique étrangère, qu'il veut favoriser le crédit à l'exportation, il existe bien différentes façons de le faire, n'est-ce pas?
M. Balderston: Charlie, j'ai appris avec les années, que quel que soit ce qu'on fait ou ce qui se produit, lorsqu'il y a quelqu'un qui affirme qu'il est impossible de faire quelque chose, j'ai toujours l'impression que cette personne ne veut pas le faire. Rien ne nous empêche de changer ou de modifier tout cela pour que cela se produise. Si le programme des exportations doit... S'il faut découvrir une autre façon de financer la Commission canadienne du blé, on la trouvera. Cela est possible. Quelle que soit la nouvelle forme, je suis sûr qu'elle sera différente de ce qu'elle était il y a 50 ans. Je ne peux pas comparer ma ferme d'il y a 44 ans avec une ferme d'aujourd'hui. Cela n'est pas possible. Que ce soit pour ce qui est de la manutention du blé ou de son transport... Il faudrait faire ce qu'il faut pour répondre à ces besoins et à ces demandes, et je crois que le Comité de commercialisation a abordé ces questions. Je crois que c'est ce qu'il a fait.
Le président: David, et ensuite, Leo.
M. Walker: Je crois qu'il existe un certain nombre de situations sur les marchés internationaux des céréales pour ce qui est des ventes avec concessions.
Le président: Je suis heureux d'entendre vos commentaires, David. Il semble que tout le monde ait son opinion ici. Je note avec intérêt que M. Hermanson est en train de faire ses exercices. Cela fait trois fois qu'il retire et remet sa veste.
Allez-y, David.
M. Walker: Je crois qu'il existe toute une gamme de situations pour ce qui est du marché des exportations de céréales. D'un côté, il y a la vente commerciale directe où le vendeur est payé dans les 30 jours et où il n'y a pas de risque parce que l'acheteur va revenir le lendemain acheter d'autres céréales. De l'autre, il y a la vente de céréales à quelqu'un qui n'a pas les moyens de payer; on peut plaindre cette personne ou avoir des raisons de politique étrangère pour leur fournir ces céréales. Le Canada souhaite exercer une influence dans cette région.
Il est évident qu'une commission indépendante du blé devrait assumer l'entière responsabilité des ventes commerciales. Quand on en arrive à une situation où l'on vend du blé avec des concessions - il est peut-être donné ou on le prête en sachant qu'il ne sera sans doute pas remboursé - alors il me paraît normal que ce soit les Affaires extérieures et non les agriculteurs de l'ouest du Canada qui garantissent ces prêts. Ce n'est pas le genre de risque qu'il faudrait couvrir. Je crois que le projet de loi C-72 règle cette question.
Entre ces deux extrêmes, il y a bien sûr des situations où l'on est obligé de vendre à quelqu'un, sans être tout à fait certain d'être payé et cela pourrait relever de la Société pour l'expansion des exportations, qui s'occupe des céréales produites hors-commission.
Je ne sais pas si j'ai bien répondu à votre question. Il y a toute une gamme de situations, et selon la situation particulière, il y a toujours, je crois, un moyen approprié.
M. Meyer: En outre, il faut savoir que les ventes de céréales ne s'effectuent pas toujours au comptant. Il y a beaucoup de commerce dans le monde qui se fait par l'intermédiaire de sociétés de troc. Je veux dire qu'il arrive qu'on vend quelque part un million de tonnes de blé à quelqu'un mais que cette vente s'effectue à travers deux ou trois intermédiaires qui rendent cette transaction possible parce qu'elle concerne également du pétrole, du charbon, de la potasse, de l'argent ou de l'or, ou une autre marchandise. C'est le rôle de la société de troc de trouver d'abord quelqu'un du côté des acheteurs potentiels pour que nous puissions effectuer cette vente au Canada. Cela dit, cela crée une situation qui appelle l'intervention des banques internationales.
J'aimerais mentionner ici que les aliments vont jouer un rôle beaucoup plus important au cours des mille prochaines années qu'ils ne l'ont fait au cours des 20 ou 30 dernières années. Nous allons arriver à une époque où les stocks vont être sans doute très réduits. Il va y avoir des sociétés développées qui vont manquer de produits alimentaires et cela va avoir des répercussions beaucoup plus fortes que lorsqu'il s'agit d'une société pauvre, parce que ces gens ont de l'argent et ils peuvent payer pour avoir des aliments.
Le président: Nous allons maintenant donner la parole à M. Easter. Je vous demande d'essayer de centrer vos discussions sur le projet de loi C-72. Nous n'y avons pas très bien réussi aujourd'hui. Je ne veux pas dire aux gens qu'ils devraient s'arrêter de parler mais je rappelle à tout le monde qu'il s'agit d'audiences concernant le projet de loi C-72.
M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Très bien, monsieur le président, je sais pourquoi vous avez dit cela. Il est évident que M. Avram et moi-même avons eu des rapports très différents avec la Commission canadienne du blé. Je vais vous dire une chose. Nous sommes ici pour établir des faits et non pas des théories.
J'aimerais toutefois savoir si vous avez jamais mis les pieds dans les bureaux de la Commission canadienne du blé à Winnipeg pour voir comment fonctionnait le système.
M. Avram: Non, monsieur.
M. Wayne Easter: Voilà qui est intéressant.
Il est évident qu'une des difficultés auxquelles nous faisons face en tant que comité est qu'une partie de la discussion porte sur la question du pouvoir que l'on peut exercer sur le marché et sur la meilleure façon d'en acquérir, que ce soit collectivement ou individuellement, et de la répartition des bénéfices. Nous essayons de le faire dans le contexte du projet de loi C-72, qui me paraît, je commence à m'en apercevoir, pratiquement impossible à mettre en oeuvre, parce que nous allons être obligés à un moment donné de nous entendre sur les principes.
Pour revenir au projet de loi C-72, je voudrais parler un peu des compromis possibles. On a parlé plusieurs fois des garanties et il n'y a en fait à l'heure actuelle que trois garanties qui concernent la Commission canadienne du blé.
Il y a la garantie initiale et c'est vrai qu'elle peut être accordée selon d'autres modalités comme le fait la Commission ontarienne de commercialisation du blé. Il y a la garantie du crédit à l'exportation, et il est vrai que la Société pour l'expansion des exportations pourrait s'en charger. La troisième garantie est celle qui porte sur les emprunts.
J'aimerais signaler à M. Avram que les états financiers vérifiés - qui ne comprennent pas une mais 53 pages - indiquent que les intérêts gagnés avec la garantie des emprunts se sont élevés pour la Commission du blé l'année dernière à... Leo a raison, il ne s'agissait pas de 350 millions de dollars mais de 61 millions de dollars et l'année d'avant de 48 millions de dollars, des sommes importantes.
Je me demande si M. Avram pourrait obtenir les chiffres correspondants de Cargill pour ce qui est des intérêts gagnés.
Pour ce qui est des compromis qu'appelle le projet de loi C-72, la Commission albertaine ainsi que Leo d'ailleurs ont parlé du fait que le directeur général devrait être nommé par le conseil si nous voulions avoir un véritable conseil d'administration. Sommes-nous prêts à exiger cela et à renoncer en contrepartie à la garantie des emprunts, qui a entraîné des gains de 61 millions de dollars l'année dernière, et à nous contenter des autres garanties gouvernementales?
Deuxièmement, la Commission du blé australienne a été mentionnée à plusieurs reprises et vous avez raison sur le plan des faits. Il faut toutefois comprendre que l'Australie évolue dans une direction différente et que le gouvernement a constitué un fonds de réserve pour pouvoir se protéger en cas de perte.
C'est ce qui justifie l'existence du fonds de réserve dont parle le projet. Si nous faisons des achats au comptant et que le gouvernement ne garantit pas les ajustements du prix initial, il faut nécessairement mettre sur pied un fonds de réserve. Sommes- nous prêts à faire ces compromis?
Le président: Qui souhaite faire des commentaires?
M. Balderston: Tout d'abord, j'aimerais aborder deux ou trois choses. Vous avez parlé des gens qui n'avaient jamais été à la Commission du blé, qui n'avaient pas assisté même si nous l'avons fait, tout cela. Pensez aux membres du comité, ils représentent toute la gamme des opinions. Vous ne pouvez le nier. À la fin de l'opération, ils ont accepté une position médiane. Ils n'ont pas tous eu ce qu'ils voulaient, ils ne savaient pas tous ce qu'ils voulaient, mais ils se sont mis d'accord - c'est une chose très importante. Il y en a qui ont fait des compromis.
Je peux vous dire que Avery Sahl n'aurait jamais pensé qu'il accepterait certaines choses qui figurent dans ce rapport lorsqu'il s'est assis à la table le premier jour; il n'aurait jamais jamais accepté ces choses. C'est donc un compromis important à cause de l'évolution du commerce des céréales. Il a pris connaissance de suffisamment de données pour qu'il change d'idée au cours du processus. Je ne veux pas réfuter tout ce que vous avez mentionné mais au XXIe siècle, cela sera différent.
Ce Comité de commercialisation a fait un excellent travail. Nous ne tenons aucun compte de ce qu'il a fait; nous le mettons de côté. Je trouve ça un peu difficile après tout ce temps, parce que ce que nous avons fait depuis n'a pas grand-chose à voir avec ce qu'il nous a donné, nous n'avons pas choisi la même direction.
Je crois que cela devrait répondre à certaines de vos questions.
Le président: Voulez-vous faire des commentaires?
M. Goertzen: Je n'ai jamais calculé ce que pouvait représenter cette somme de 50 millions de dollars, celle de 60 millions de dollars dont nous parlons ici en termes de dollars par acre pour les céréales de la Commission du blé. Je peux vous dire que je peux ensemencer 3 000 acres de céréales réglementées par la Commission du blé à cause de la rotation des cultures. Je préférerais ne pas le faire mais je ne peux pas faire pousser du canola tous les ans. Je suis donc obligé de bloquer près de 3 000 acres par an.
À cause de l'inefficacité de la commercialisation le prix plancher est fixé par le prix initial et à cause de l'inefficacité du transport, parce qu'il est contrôlé par la Commission du blé, je perds en revenu net 120 000$ par an avec ces 3 000 acres, par rapport à ce que je pourrais gagner si je pouvais mettre en marché mon produit sans passer par la Commission ou sur un marché libre. Je peux vous fournir les chiffres.
J'aimerais revenir sur une chose, Wayne, à savoir que la Commission - et cela m'éloigne de votre question mais en fait, non - a hésité à introduire le blé de printemps des Prairies canadiennes, à légitimer ce blé.
J'ai commencé à faire pousser du blé de printemps en 1984. J'ai constaté qu'il donnait chez moi un rendement comparable à celui de l'orge. À cause des pluies que nous avions eues, nous n'avons pu faire de l'orge comme ils l'ont fait à l'ouest de chez nous, ce qui m'a permis d'obtenir de bons rendements avec le blé de printemps. Du point de vue du rendement, c'est pratiquement celui de l'orge. En valeur, comme vous le savez, le rendement est plus élevé parce que le blé a toujours valu plus que l'orge. Quand la Commission a décidé quelques années plus tard de réglementer le blé de printemps... elle ne pensait pas pouvoir le faire mais elle a décidé finalement de s'en occuper parce qu'elle voyait qu'il y avait un marché pour cette céréale, alors que moi et beaucoup d'autres nous le savions depuis des années.
Maintenant le prix de ce blé a baissé d'environ 20$ l'acre. J'obtiens 20$ de moins l'acre à cause de l'intervention de la Commission. Mon système de transport me coûte également 20$ l'acre. Je ne fais que jeter l'argent. Nous sommes en train de perdre...
Le président: Monsieur Walker, vouliez-vous faire un commentaire?
M. Walker: C'est exact. Pour revenir à ce que M. Easter disait au sujet des garanties, si l'on examine le bilan de la Commission du blé, on constate un montant d'environ 1 milliard ou 1,5 milliard de dollars de comptes clients pour les céréales. C'est la partie de la garantie du paiement initial. Il y a aussi 6,6 milliards de dollars de ventes à crédit qui n'ont pas encore été payées, et qui vont donc, je dirais, de 31 jours à 30 ans, et c'est la Société pour l'expansion des exportations qui s'occupe de cela.
Le troisième montant que vous avez mentionné est celui des besoins d'emprunts en tant que société d'État, et la Commission prétend qu'elle en retire un bénéfice qui s'est élevé à 61 millions de dollars l'année dernière et à 48 millions de dollars cette année. Je ne sais pas comment l'on calcule ces chiffres, si c'est par comparaison avec le crédit commercial normal et ce qu'elle aurait à payer en intérêt dans ce cas-là. Je crois que c'est calculé de cette façon et je crois que si l'on avait utilisé la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles et la Société pour l'expansion des exportations, ces chiffres seraient beaucoup moins élevés. L'indépendance dont elle aurait bénéficié en supprimant le contrôle exercé par le gouvernement fédéral lui aurait permis de faire des gains pour les producteurs de l'Ouest.
Il faudrait peut-être accepter de payer un quart de point de plus en taux d'intérêt mais c'est un sacrifice qui vaudrait la peine si on obtenait en retour l'indépendance que donne un conseil élu.
Le président: Monsieur Avram.
M. Avram: Tout d'abord, monsieur le président, pour ce qui est des commentaires qu'a faitsM. Easter sur la vérification, l'application administrative de cet élément du rapport de la Commission canadienne du blé... les frais administratifs sont tous repris sur une seule page, en sommes globales.
Deuxièmement, lorsque j'examine l'avantage réel que représente cette entente en matière d'emprunt, la garantie de l'emprunt, il me vient immédiatement à l'esprit certaines conclusions et exposés qui ont été présentés à la Commission conjointe Canada-États-Unis sur les céréales. Je pense plus précisément au coût que représente le tarif réglementé qu'acquitte le producteur en raison de l'existence d'un monopole. En fait, dans ce cas, la Commission a rapporté que les producteurs canadiens payaient plus de 25c. en plus par boisseau pour la manutention dans les élévateurs primaires et terminaux parce que ces arrangements prenaient naissance dans un milieu non concurrentiel.
Même avec un producteur qui expédie, disons, 30 000 boisseaux par an à 25c. le boisseau, ce tarif représente à lui seul 7 500$ pour une seule ferme. Cela est supérieur à ce que paient nos homologues américains pour des services rendus dans un environnement compétitif.
Troisièmement, cette inefficacité vient s'ajouter à toutes celles qui touchent les producteurs et les agriculteurs de l'ouest du Canada mais aussi toute notre économie des Prairies.
Pour ce qui est du fait qu'il y a des gens qui connaissent l'intérieur de l'édifice de la Commission canadienne du blé et que cela leur donne une autorité plus grande ou une meilleure formation... Je ne travaille pas directement avec le volet élaboration des politiques de notre organisme mais il est vrai que les personnes de notre organisme qui travaillent dans ce domaine ont demandé à plusieurs reprises des renseignements à la Commission canadienne du blé sur ses mécanismes et ses opérations internes.
Je vais peut-être m'arrêter ici. Merci.
Le président: Leo.
M. Meyer: Merci, monsieur le président.
Wayne, vous avez soulevé toutes sortes de questions. J'apprécie que vous soyez d'accord avec moi sur le montant de la différence qui existe au sujet de la capacité de la Commission canadienne du blé de faire des économies d'environ 50 ou 60 millions de dollars et non 300 millions de dollars, comme l'avait signalé la personne qui est plus ou moins le bras droit de M. Goodale, à savoir Howard Migie. Il est difficile de comprendre comment un haut fonctionnaire comme lui pourrait se tromper aussi lourdement.
Oui, les emprunts qu'effectue la Commission canadienne du blé représentent des sommes importantes. Mes anciens collègues ont fait remarquer que c'était l'élément central. Nous avons près de 7 milliards de dollars de dettes, que nous reportons. La question doit nécessairement être que doit-on faire. Par exemple, pour ce qui est du fonds de réserve, monsieur le président, comment allons- nous créer un fonds de réserve?
Que va-t-il se passer si, par exemple, les choses vont bien pendant deux, trois ou quatre ans et que des sommes s'accumulent dans ce fonds de réserve? Disons qu'un agriculteur a travaillé à 50, 60 ou 70 p. 100 pendant ces trois ou quatre ans en produisant des céréales réglementées par la Commission du blé et qu'il décide de prendre sa retraite. Cette personne peut-elle reprendre l'argent qui se trouve dans ce fonds de réserve?
Il faut également se demander comment ce fonds va-t-il être administré. Pouvons-nous être certains que ces fonds seront utilisés dans l'avenir et non pas pour le passé?
Pour ce qui est du volume des céréales que nous allons manutentionner en vue de l'exportation, mesdames et messieurs, monsieur le président, je crois qu'il faut changer le système de commercialisation le plus rapidement possible et que l'on verra alors beaucoup de valeur ajoutée dans l'ouest du Canada. Nous n'allons pas nous contenter de traiter 2 p. 100 ou 4 p. 100 du blé canadien; nous allons traiter des quantités beaucoup plus fortes.
Il y a quelqu'un qui a parlé des variétés de blé et cela relève de la Commission canadienne du blé qui décide ce que nous pouvons cultiver. J'aimerais signaler la question du blé Grandin. C'est peut-être un sujet un peu éloigné de votre question, monsieur Easter, mais pour tous les gens qui se trouvent dans cette salle, j'aimerais signaler que nous savons tous qu'il est interdit de faire pousser du blé Grandin dans cette région. C'est un blé excellent. La Commission refuse d'autoriser la culture de ce blé dans l'ouest du Canada, pour être précis. Depuis deux ans, c'est le blé préféré au Québec.
Maple Leaf Mills va construire une des usines de pain industriel les plus grandes et les plus modernes au monde à Calgary. Savez-vous quel genre de blé et de farine cette société va utiliser? Le blé Grandin. J'aime signaler ce genre de choses parce que les membres du comité n'ont posé aucune question au sujet des signaux que donne la Commission canadienne du blé à nous les agriculteurs pour que nous produisions ce dont elle a vraiment besoin. C'est un aspect très important d'un organisme de commercialisation: les signaux que peut donner le vendeur.
Le président: J'aimerais obtenir une précision. Leo, je crois que vous avez cité ce chiffre à un moment où je ne me trouvais pas dans la salle. Pourriez-vous m'indiquer à quel moment M. Migie a déclaré cela et utilisé ce chiffre? Je ne vous demande pas de le faire immédiatement.
Franchement, nous ne savons pas à quel moment M. Migie a fait son exposé initial au comité et il est possible que toutes les copies de cet exposé aient disparu, mais il y en avait. L'exposé original ne se trouve pas ici. Pour être juste pour tout le monde - et je n'essaie pas de protéger M. Migie ou qui que ce soit - nous ne savons vraiment pas où vous avez trouvé ce chiffre de 300 et quelque. Si vous pouviez nous donner cette précision, nous vous en serions reconnaissants.
J'aurais une autre précision à apporter concernant le fonds de réserve - et je ne dis pas que je suis pour ou contre ce fonds de réserve. Nous sommes intéressés à savoir ce que vous avez à dire mais n'oubliez pas ce qui se trouve dans le projet de loi. Ce fonds est facultatif. Les questions que vous avez donc posées à ce sujet... Par exemple, s'il y a un conseil d'administration et si ce conseil est composé majoritairement de producteurs, et s'il décide de créer un fonds de réserve, c'est au conseil d'administration, au conseil d'administration où la majorité des membres sont des producteurs qui ont été élus, à prendre ce genre de décision ou de proposer des décisions comme vous le dites, sur la taille que devrait avoir le fonds en cas de décès, ou si j'arrête d'exploiter mon entreprise, qu'est-ce qui va arriver aux sommes que j'ai versées dans ce fonds - ce genre de choses. Nous savons qu'il faudra se pencher sur ces questions mais je dis simplement que le projet de loi dans sa version actuelle, qu'il s'agisse d'achats au comptant ou de certificats négociables, utilise le mot «peut». Cela donne au conseil d'administration une possibilité. Cela ne dit pas qu'il est obligé de le faire.
J'essayais simplement de clarifier quelque peu cette question, sans vouloir défendre ou quoi que ce soit... Mais si vous pouviez nous obtenir cette autre référence, sur ce qu'a déclaré M. Migie, nous vous en serions très reconnaissants.
Désolé, Wayne.
M. Wayne Easter: Monsieur le président, j'allais moi aussi demander des précisions sur ce point.
Le Comité de commercialisation du grain de l'Ouest a été mentionné à plusieurs reprises, et toutes ces recommandations ne sont pas là. En fait, il y a un certain nombre de ces recommandations sur la direction et pour le reste... On n'arrive pas à s'entendre et sur cet aspect non plus, mais l'idée de préparer un projet de loi attribuant certains pouvoirs à la Commission était de mettre sur pied un mécanisme où le conseil d'administration serait en mesure d'agir dans les secteurs où le Comité de commercialisation du grain de l'Ouest avait formulé des recommandations. Il faudrait signaler ceci.
Il y a toutes sortes de gens qui disent qu'elle ne devrait pas pouvoir travailler dans ces domaines. Il y en a d'autres qui disent le contraire.
Le débat sur la vente à guichet unique ou la commercialisation mixte risque de durer un moment. Il est vrai que M. Hehn nous a signalé que si nous renonçons à la vente à guichet unique - et le ministre a déclaré qu'il voulait conserver ces principes - nous allons alors perdre les avantages que représente la vente à guichet unique pour ce qui est de la connaissance du marché qu'acquiert la Commission canadienne du blé grâce à elle et pour ce qui est également de la situation politique et du temps. La Commission canadienne du blé est un organisme fort compétitif à l'échelon mondial et qui optimise le rendement qu'obtiennent les producteurs. C'est pourquoi il craint de nous voir perdre ces avantages.
Pour ce qui est du marché mixte, il y a une idée qui nous a été proposée hier et qui m'a intrigué, et à laquelle Murray a fait allusion. Pourquoi ne pas mettre sur pied un projet pilote qui consisterait à adopter un système de commercialisation mixte pour le canola. Qu'en pensez-vous?
M. Balderston: Si nous allons demander aux autres marchés de le faire, si quelqu'un demande un marché mixte, je crois qu'il faudrait le faire. Si c'est ce que quelqu'un veut... Ce n'est pas parce que nous voulons certains changements que tout le monde devrait changer dans la même direction.
J'aimerais revenir sur une déclaration que vous avez faite, si vous me le permettez, au sujet de M. Hehn et de la Commission du blé. Après avoir assisté à toutes ces audiences du comité et le reste - c'est une opinion personnelle que j'ai, c'est la mienne, et je veux que ce soit très clair. Je ne pense pas que ce soit la Commission du blé qui fasse problème ici, ce serait plutôt les commissaires de la Commission du blé. C'est une différence; une différence énorme.
Il y a trois personnes en ce moment qui sont nommés à vie. Il est pratiquement impossible de contester ou de remettre en doute leurs décisions. Aucune sanction ne peut être prise à leur égard. J'en connais deux en fait qui sont extrêmement têtus.
Nous avons consacré beaucoup de temps à cette question alors qu'ils auraient pu la régler avec une petite signature. Je crois qu'à l'avenir, il y aura peut-être des gens qui voudront mettre en commun le canola. Si c'est ce qu'ils veulent et que cela va être avantageux pour eux, qu'ils le fassent. Mais est-ce que cela veut dire que je ne peux pas changer?
Le canola n'était rien il y a 20 ans et il vient de dépasser le blé, il y a deux ans. Si c'était aussi mauvais, cela ne se serait jamais produit. Lorsqu'on a commencé avec la décision de la vente à guichet unique... c'est en général un produit qui est destiné à un acheteur qui s'intéresse à un grade de céréales. On aurait dû y renoncer si l'on n'avait pas procédé de cette façon, parce que le marché était concentré au Japon. Cela ne s'est pas produit. Nous n'avons peut-être pas toujours obtenu le meilleur prix. Les gens étaient divisés sur cette question, n'en doutez pas, mais le canola est devenu un produit important pour un grand nombre d'exploitations agricoles et les gens veulent en cultiver. Demandez-leur s'ils souhaitent qu'on le supprime. Demandez-leur ce qu'ils vont cultiver cette année. Demandez-leur... 14 millions d'acres de canola. Ils ne devraient pas le faire si c'était un produit sans intérêt.
Le président: Glen, rapidement, et ensuite, de nouveau à Kevin.
M. Goertzen: Vous avez parlé des renseignements concernant le marché. C'était peut-être vrai il y a plus de 10 ans mais maintenant les agriculteurs savent ce qui se passe sur le marché, ils en savent au moins tout autant que la Commission du blé. Cela a perdu de son importance.
C'était là une partie de votre question. Donnez la parole à quelqu'un d'autre et je vais y réfléchir.
M. Avram: Nous avons mis sur pied dans l'ouest du Canada un système de commercialisation mixte. Ce projet a duré 40 jours en 1993. Comme les membres du comité le savent, il y avait un marché continental de l'orge et au cours de cette période de 40 jours, on a expédié aux États-Unis plus d'orge que la Commission canadienne du blé n'en avait jamais envoyé au cours d'une année entière. En fait, pendant cette période, on a expédié quatre fois plus d'orge que l'année d'avant, si je me souviens bien, et deux fois le dernier record annuel.
Nous avons donc déjà eu un projet pilote de commercialisation mixte. Nous avons essayé cela dans l'ouest du Canada et cela a donné des résultats extraordinaires.
Une voix: Mais à quel prix?
M. Avram: Je crois qu'il faudrait aborder la question des renseignements relatifs au marché - et dans un certain sens, je vais reprendre les commentaires précédents. Il me paraît très difficile d'affirmer que la Commission canadienne du blé, en tant qu'organisme gouvernemental, a accès à des renseignements, des données concernant le marché ou à des connaissances commerciales auxquels n'a pas accès la population générale.
Merci.
M. Wayne Easter: Je vous communiquerai plus tard les chiffres et les prix, parce qu'il n'est pas difficile de vendre un produit à rabais.
Le président: Leo, et ensuite, nous reviendrons à Glen pour un bref commentaire. Nous allons ensuite reprendre la liste.
M. Meyer: Merci d'avoir posé cette question, Wayne.
Les renseignements relatifs au marché. Mesdames et messieurs, nous avons atteint l'année dernière ce qui est peut-être un sommet historique, du moins dans ma collectivité agricole, pour ce qui est du prix du blé et du prix des céréales en général. Au moment de semer nos produits pour 1996, je me souviens qu'il n'y avait pratiquement personne qui n'était pas optimiste par rapport à l'avenir. Je suis très heureux que vous ayez soulevé cette question des renseignements sur le marché. Sur ce point, monsieur le président et les membres du comité, je suis obligé de mettre en doute les capacités de la Commission canadienne du blé. J'aimerais que l'on sache...
Le président: Vous pouvez le mentionner de cette façon mais cela ne figure pas dans le projet de loi, nous allons donc devoir passer à autre chose. Vous avez soulevé la question et vous dites que vous avez des doutes.
M. Meyer: Non, je suis désolé...
Le président: Très bien, allez-y.
M. Meyer: Nous avons vu que la Commission canadienne du blé a été débordée deux ans de suite, ne venez donc pas me dire que la Commission canadienne du blé en sait plus que les autres au sujet du marché. Je ne voudrais pas vexer les gens qui pensent différemment, même si cela est peut-être vexant pour eux. Où doit- on rechercher de nos jours des renseignements sur le marché? Faut- il regarder les PDR, les rapports de l'USDA, ou le rapport sur l'offre et la demande, qui réunit des renseignements sur la situation mondiale et que l'on peut avoir en quelques minutes? J'ai sur mon écran à 7 h 32 les données publiées à 7 h 30, et c'est cela qui fait bouger le marché.
Un organisme comme la Commission canadienne du blé - cet aspect m'irrite beaucoup, je le reconnais - qui a tenu une grande conférence à Winnipeg il y a trois ou quatre semaines appelée Grain World, qui a dû coûter sans doute beaucoup d'argent - je dirais qu'il n'y a pas grand-chose à en espérer. Le prix des grains de provendes, de l'orge et du blé ne font que chuter alors que sur le marché de Chicago, tous ces produits prennent de la valeur. Le marché a augmenté de 15 à 18 p. 100 depuis qu'on a fait cette déclaration. Comment peut-on alors parler de renseignements relatifs au marché? Je me demande en fait s'ils n'ont pas des raisons de dire ce qu'ils disent. C'est ce que je voulais signaler. C'est cela que nous trouvons fâcheux lorsqu'il s'agit de faire un choix, parce que nous sommes forcés de subir les conséquences de ce genre de décisions qui sont fondées sur de mauvais renseignements.
Le président: Je vais maintenant passer à Glen, rapidement, s'il vous plaît.
M. Goertzen: Wayne a posé une question au sujet d'un projet pilote qui consisterait à faire réglementer le canola par la Commission. En fait, c'est ce que fait la partie VI de la loi actuelle. Il existe une disposition qui permet de le faire mais elle n'a jamais été utilisée. De mon point de vue personnel, et je crois que la Commission du blé serait d'accord avec moi, je dirais qu'il n'y a rien de mal à demander à la Commission de réglementer le canola mais comment lui demander de déréglementer l'orge et d'introduire un marché mixte. Pourquoi l'un et pas l'autre? On ne peut pas gagner de tous les côtés.
Le président: Leo, je tiens à revenir sur un sujet auquel vous avez fait allusion, vous m'avez apporté un document que les Western Canadian Wheat Growers ont présenté au comité, dans lequel figurait le chiffre cité par M. Migie. Vous dites dans ce document:
- D'après les déclarations de M. Howard Migie, directeur général, la nouvelle politique en
matière de céréales adressée à votre comité le jeudi 6 mars dernier, est l'aspect le plus
important. M. Migie a fait remarquer que les gains sur les intérêts effectués par la CCB pour
l'année 1995-1996 s'élevaient à 340 millions de dollars.
Ils n'apparaissent pas ici, Leo. Il est possible qu'ils aient entendu ces chiffres ailleurs, mais ces chiffres n'ont pas été mentionnés cette journée-là ou ils ont été malentendus ou mal interprétés par les Wheat Growers.
Je vous remercie d'avoir signalé ce point. Je vous en reparlerai.
Le temps s'écoule très rapidement. Je vais donner la parole à Elwin pour une question très brève, et ensuite, à M. McKinnon pour une autre question brève. Elwin, soyez bref s'il vous plaît, et donnez-nous s'il vous plaît des réponses brèves.
M. Elwin Hermanson: Je serai aussi bref que je le peux.
Monsieur le président, je crois que nous nous sommes un peu éloignés du projet de loi C-72 mais cela s'explique, d'après moi, parce qu'il y a beaucoup de gens qui estiment qu'ils n'ont pas pu faire entendre encore leur voix. J'affirme que si ce projet de loi n'est pas profondément modifié, cela va soulever des problèmes graves, si l'on adopte ce projet de loi sous sa forme actuelle ou si l'on ne fait rien pour modifier la Commission. Cela est important.
Je me suis déjà rendu à la Commission du blé. J'ai visité la Commission du blé. J'ai entendu leurs déclarations. Il y a des gens très compétents qui y travaillent. Mais les renseignements dont ils disposent sont accessibles aux producteurs des Prairies, aux acheteurs privés de céréales, et aux agriculteurs individuels, avec la nouvelle technologie. Je ne parlerai ni en bien ni en mal de la Commission; c'est ainsi que se font les choses de nos jours.
Il y a ici deux députés qui viennent de la région de Peace River. Charlie est ici et il représente les électeurs qui habitent de ce côté de la frontière entre l'Alberta et la C.-B. et Jay Hill siège ici. Il sera amené à voter sur ce projet de loi lui aussi quand le projet sera soumis à la Chambre s'il s'y rend jamais à cause de toutes les critiques que nous avons entendues. Il va nous falloir voter pour ou contre ce projet. J'aimerais savoir ce que vous pensez que devraient faire les députés de la région de Peace River. Si l'on ne modifie pas ce projet de loi, votre député devrait-il voter pour le seul but d'obtenir certains changements ou serait-il préférable de voter contre? Je peux vous dire que des représentants de la NFU nous ont dit de voter contre ce projet de loi parce qu'ils s'y opposaient pour différentes raisons. Ils nous ont demandé de voter contre le projet.
Quels changements devrait-on apporter au projet de loi C-72 pour qu'il soit acceptable pour vos organismes?
M. Balderston: Je crois que de notre point de vue, je dirais qu'il n'est pas possible de l'approuver de la façon dont il est rédigé actuellement. Si vous pouviez reprendre ce qui se trouve dans le rapport du Comité de commercialisation, de prendre ces recommandations et de les inclure dans le projet de loi, alors oui, nous y serions favorables et nous serions heureux d'accorder notre appui. Cela vous fait comprendre l'importance que nous leur attachons. Le comité n'a pas dit dans son rapport qu'il fallait supprimer la Commission du blé et changer la situation, nous sommes également favorables à cela.
Le président: Kevin.
M. Avram: Je suis d'accord avec cela. Je suis en faveur d'un marché mixte pour l'orge et de permettre la culture d'autres variétés de blé en respectant les balises qui figurent dans le rapport du Comité sur la commercialisation du grain de l'Ouest.
M. Meyer: Là encore, je suis d'accord avec mes collègues là- dessus. J'ai déjà mentionné les observations générales que je voulais formuler au sujet du projet de loi C-72. Cela ne représente pas du tout le consensus qui s'est dégagé des audiences du Comité sur la commercialisation du grain de l'Ouest.
Nous invitons tous ceux qui peuvent exercer une certaine influence sur ce projet de loi d'utiliser leurs pouvoirs pour soit le faire disparaître, soit le modifier en profondeur.
Le président: Monsieur McKinnon.
M. Glen McKinnon (Brandon - Souris, lib.): Je vais commencer par vous raconter quelque chose que j'ai vécu en tant que député au Manitoba. Nous avions créé un fonds de transition pour la mise en oeuvre de la LTGO pour le sud-est de la Saskatchewan et le sud- ouest du Manitoba. Le gouvernement provincial a créé un comité qui devait prendre l'avis des organismes agricoles.
En tant que représentants fédéraux, nous nous sommes également rendus dans cette région, et avons tenu des audiences, comme nous le faisons aujourd'hui. Nous avons entendu les irrigateurs, les chercheurs et les autres groupes qui travaillaient dans le domaine de la valeur ajoutée. Pour l'essentiel, la seule chose sur laquelle ces gens ont pu s'entendre, c'est qu'il fallait construire des routes.
Je vous signalerai que, lorsque nous leur parlions sur une base individuelle, ce n'était pas du tout ce qu'ils voulaient mais c'était la seule chose sur laquelle ils avaient pu se mettre d'accord.
Je ne dis pas que ce que vous dites au sujet du comité n'est pas justifié mais c'est ce qui arrive lorsqu'on tente d'obtenir un consensus. Cela vous amène à passer de la position A à la position B.
J'examine ce que vous dites, messieurs, à la lumière de l'expérience que j'ai acquise de l'autre côté, qui m'a appris que l'on ne satisfait personne lorsqu'on en arrive à un consensus mais que c'est une position que personne ne peut refuser, parce que tout le monde l'a accepté.
Je suis arrivé ici avec un esprit ouvert. Je ne suis pas un agriculteur mais j'ai été élevé à la campagne. J'ai enseigné dans une collectivité agricole. Je sais toute l'importance qu'a ce secteur dans le Manitoba rural et je peux dire qu'il en va de même ici.
J'ai élargi mes perspectives au cours de mes déplacements en Alberta, à Winnipeg ainsi qu'en Saskatchewan. Je vous ai déjà dit que j'avais entendu parler d'un projet mais qu'il me faudrait davantage de détails sur la façon dont un système mixte pourrait vraiment fonctionner sans toucher aux piliers de la Commission actuelle. Je dois vous le dire très franchement.
Nous sommes déjà passés par là en 1990 avec les subventions, l'expérience UE, et nous essayons d'équilibre nos subventions avec le côté des crédits, comme le font les Américains. Nous allons perdre si nous nous lançons dans cette bataille. Je dois dire que si c'est le cas, je ne pense pas que c'est la conclusion à laquelle notre comité devrait en arriver.
J'ai entendu parler hier - M. Walker l'a également entendu - du fait que la notion de contrôle était une question qui préoccupait les Albertains. Je l'ai entendu à nouveau aujourd'hui mais on n'avait pas jusqu'ici utilisé ces termes.
Je vous félicite pour l'esprit d'entreprise avec lequel vous abordez la question de la commercialisation. Je crois que c'est M. Meyer qui décrit cette position, ainsi que M. Avram. Vous avez créé des marchés. L'exemple que vous avez choisi, celui du canola, était exact, monsieur Balderston.
Je crois qu'il nous faut dans l'Ouest un système dans lequel les intérêts de ceux pour qui la Commission du blé est un rempart qui les protège des grandes sociétés et sur lequel le petit agriculteur peut s'appuyer pour obtenir le meilleur prix possible pour... Je ne devrais peut-être pas parler de «petit», mais plutôt de l'agriculteur moyen qui estime que c'est de cette façon qu'il souhaite commercialiser son produit. C'est, je crois, le genre de choses que notre comité va devoir examiner lorsque nous allons revenir à la capitale.
Le président: Y a-t-il des commentaires au sujet des commentaires de Glen?
Je voudrais terminer. Notre temps est écoulé. Je veux prendre mon vol de retour. Je ne suis pas retourné chez moi depuis samedi matin.
Excusez-moi, mais nous avons six exposés individuels et je crois que nous souhaiterions avoir un dialogue après cela. Rapidement, Glen et ensuite, Kevin.
M. Goertzen: Je voulais simplement dire à l'autre Glen que le mot facultatif est un mot essentiel. Lorsque vous retournerez là- bas, insistez sur cet aspect.
Nous qui n'attribuons pas une grande valeur à ce que fait la Commission canadienne du blé ne nous opposons pas à ceux qui pensent qu'elle fait un bon travail de commercialisation. Mais ceux d'entre nous qui ont le sens des affaires ont besoin d'avoir la liberté de prendre des initiatives dans le domaine de la production, de la commercialisation et pour développer encore davantage notre secteur. Sans cette liberté, vous nous mettez tous dans la même catégorie, vous supprimez la possibilité, le désir, la capacité que des individus aillent de l'avant, échouent ou obtiennent du succès et entraînent avec eux le reste de l'économie.
Le président: Kevin.
M. Avram: J'apprécie la sincérité que l'on retrouve dans vos commentaires. Il est vrai qu'il y a eu ici en Alberta jusqu'en 1993, un système de commercialisation mixte qui a existé pendant quelque temps. Mais il a existé. Les gens l'ont connu. Les producteurs de l'Alberta ont voté sur cette question de nombreux mois après cette expérience. Les producteurs ont pris clairement position là-dessus, ils connaissaient ce genre de commercialisation et ils savaient sur quoi ils votaient. Voilà le deuxième point.
Troisièmement, il y a le Comité de commercialisation du grain de l'Ouest. Leo a parlé des efforts déployés par les gens très occupés qui y ont participé, et lorsque le comité est revenu avec toute une série de recommandations unanimes au sujet de la commercialisation mixte, il y avait comme un sentiment de victoire.
On retrouve aujourd'hui un niveau de frustration, voire d'hostilité, que je n'ai encore jamais vu. Je travaille bientôt depuis 20 ans dans des organismes de ce genre. Je n'ai rien vu de comparable. On peut presque parler d'amertume dans certains cas, parce que ces personnes estiment que le processus a débouché sur une option très claire, la commercialisation mixte, et que cette option a été bloquée.
La dernière chose que j'aurai mentionné est qu'il y a eu un sondage, si je me souviens bien, qu'avait commandé Agriculture et Agroalimentaire Canada il y a environ huit mois, d'après lequel 55 p. 100 des producteurs des Prairies étaient favorables à la commercialisation mixte dans le cas de l'orge.
Le président: Messieurs, je vais devoir nous arrêter ici. Nous allons gagner environ cinq minutes au total. J'avais espéré à un moment donné que nous gagnerions davantage de temps. Nous avons demandé à ces personnes d'être ici à 11 heures.
Je vais lever la séance pour que nous fassions une pause de cinq minutes pour prendre un café.
Je tiens à remercier les intervenants et les membres du comité pour leur collaboration. Je pense que nous avons eu une discussion franche et ouverte. J'espère que vous êtes d'accord avec cela. Merci d'être venus devant le comité.
Je vais demander à chacun d'entre vous de se présenter et nous passerons ensuite à une discussion libre. Je demanderais à MM. Dyck, Watson, Moskalyk, Breault, Hill et Carter de venir à la table.
M. Darryl Carter (à titre individuel): Monsieur le président, je crois que vous avez commis une erreur lorsque vous avez dit qu'il n'y avait que six mémoires individuels. Je représente en fait huit personnes, il y aura donc huit exposés.
Le président: Allez-vous tous faire un exposé de cinq minutes? Ce n'est pas ce qui a été mentionné au comité, monsieur Carter.
M. Carter: Aucun avis de cette réunion n'a été publié dans les journaux locaux, personne ne m'a parlé d'enregistrement ou de choses de ce genre. J'ai parlé à notre député local, M. Penson, et il vous le confirmera. Je lui ai fait savoir que je représentais un certain nombre d'individus qui voulaient se regrouper pour présenter un exposé. Nous ne représentons pas d'organismes. J'ai envoyé cela à M. Toupin, je crois. Il m'a écrit une lettre et je l'ai ici si vous voulez la voir. Il m'a confirmé qu'il était au courant de tout cela. Il n'y a pas de malentendu. Le comité savait parfaitement qu'il ne s'agissait pas d'un exposé unique que j'allais présenter.
Le président: J'ai eu une conversation avec M. Penson et il serait peut-être bon qu'il se joigne à notre débat ici. J'ai indiqué très clairement à M. Penson que je croyais que vous n'alliez pas uniquement présenter vos opinions mais également celles d'un certain nombre de personnes.
M. Carter: Eh bien, vous vous êtes trompé, monsieur. Je ne vais pas exposer les opinions d'autres personnes.
Le président: Où est M. Penson?
Charlie, je croyais que nous nous étions entendus sur le fait que M. Carter allait présenter un exposé à titre individuel. Je vous ai fait savoir que j'étais prêt à collaborer, Charlie, et que si nous pouvions attribuer plus que cinq minutes à M. Carter, nous le ferions.
Le greffier n'a pas eu d'autres noms que celui de M. Carter avant ce matin. Quelqu'un lui a alors transmis sept autres noms. Ce n'est certainement pas ce que j'avais compris, ni ce qu'avait compris le greffier.
M. Carter: Monsieur le président, permettez-moi d'aller chercher ma lettre? Je vais chercher ma lettre, qui indique clairement qu'il ne s'agissait pas d'une seule intervention.
M. Charlie Penson: Je tiens à donner mon point de vue.
Monsieur le président, j'ai soulevé cette question tant avec le greffier qu'avec vous à Ottawa. J'ai dit que M. Carter représentait un groupe d'agriculteurs de la région de Peace River et qu'il voulait intervenir en tant que groupe. On nous a dit que leur groupe n'ayant pas de nom, comme Rose sauvage, ils ne pouvaient pas le faire et qu'ils devaient intervenir à titre individuel.
J'ai essayé de vous expliquer, tant à vous qu'au greffier du comité, que cela ne devrait pas se passer comme cela dans ce cas et qu'il devrait être inscrit à titre de groupe, parce que c'est en fait ce qu'il représente ici. Vous avez déclaré que cela n'était pas possible. Je vous ai dit à tous les deux que cela devrait l'être. J'ai cru comprendre que vous alliez accorder un temps supplémentaire à M. Carter et à son groupe pour qu'ils présentent leurs exposés.
Le président: J'ai donné mon accord à cela et je n'ai pas changé d'idée. Mais M. Carter me dit maintenant qu'ils veulent présenter sept exposés.
M. Carter: Il s'agit d'un exposé qui sera présenté par sept personnes.
Le président: Combien de temps cela va-t-il prendre?
M. Carter: Nous allons prendre cinq minutes chacun, ce qui va faire sept fois cinq.
Le président: Cela constituera un exposé, et j'ai dit que j'étirerais les règles, l'ordre du jour, et l'entente qui a été prise avec le comité.
M. Carter: Il n'y a pas eu d'entente avec le comité. Vous parlez de règles et il n'y a pas de règles. Aucune règle n'a été publiée. Il n'était pas demandé de communiquer à l'avance ou quoi que ce soit.
Le président: La séance va être levée à 12 h 30.
M. Carter: Laissez-moi...
Le président: S'il vous plaît. La séance sera levée à 12 h 30. Si vous insistez, je permettrais à vos sept personnes de faire chacune une intervention de cinq minutes.
M. Carter: Très bien.
Le président: C'est vous qui en serez responsable envers les autres producteurs qui se trouvent ici. Vous et vos amis vont empêcher que s'établissent un dialogue entre les députés, et même votre groupe, parce que cela veut dire qu'il y aura 12 interventions qui vont commencer dans deux minutes d'ici. Si je ne me trompe pas, 12 fois 5 donne 60, ce qui donne une heure d'exposés.
Je vais prendre une pause et boire un café.