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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 23 avril 1996

.1534

[Traduction]

La présidente: Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Conformément aux articles 110 et 111 du Règlement, nous étudions aujourd'hui les nominations par décret.

Mesdames et messieurs, nous avons cinq témoins; je compte donc sur vous pour respecter le temps qui nous est imparti, car nous allons essayer d'en finir aujourd'hui, si possible avant que le timbre n'annonce le vote à la Chambre. Nous travaillerons jusqu'à 18 heures ou 18 h 30 probablement.

J'invite notre premier témoin, Mme Pia Zambelli, de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, à se présenter à la table.

.1535

M. Philip Palmer (avocat général, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada): Madame la présidente, puis-je m'asseoir avec Mme Zambelli?

La présidente: Certainement.

Veuillez vous présenter à nos auditeurs et à mes collègues.

M. Palmer: Merci. Je m'appelle Philip Palmer, et je suis avocat général de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

[Français]

La présidente: Monsieur Nunez, vous pouvez commencer.

M. Nunez (Bourassa): Bienvenue, madame Pia Zambelli. J'ai essayé d'avoir des renseignements sur votre curriculum vitae.

[Traduction]

Parlez-vous français?

Mme Pia Zambelli (membre à temps plein, Section du statut de réfugié, Bureau régional de Montréal, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada): Oui, mais je vais utiliser l'écouteur.

La présidente: Avant que M. Nunez commence, j'aimerais aussi vous rappeler ce que j'ai dit lors de la dernière audience relative aux nominations par décret. Nous ne sommes pas un tribunal de l'Inquisition. J'invite tous les témoins à bien vouloir se détendre. Nous sommes ici pour examiner les antécédents et les CV des candidats aux nouvelles nominations.

J'ai lu la dernière fois, et j'aimerais relire pour le procès-verbal, une décision qui a été prise en 1986 par le Président de la Chambre, l'honorable John Fraser, concernant les pouvoirs d'examen d'un comité en vertu de règles qui sont «étroitement limitées aux qualifications et à la compétence requises pour accomplir les tâches liées au poste» - essayons donc de limiter nos questions à ce domaine précis - «et les questions du comité, ainsi que les rapports connexes doivent porter strictement sur les qualifications, la compétence et l'accomplissement des tâches.»

[Français]

Monsieur Nunez, veuillez commencer.

M. Nunez: Je vais faire un commentaire préliminaire. J'ai adressé, le 28 mars, une lettre à la présidente du comité. J'avais demandé qu'on invite quelqu'un du comité consultatif de la Commission Gordon Fairweather, parce que nous ne connaissons pas les méthodes, les mécanismes et le fonctionnement de cette commission. Pour moi, c'est obscur. Je ne sais pas quel est le rôle de cette commission.

J'avais également proposé qu'on invite, non pas convoque mais invite, à témoigner quelqu'un de la CISR, parce que je ne connais pas la participation de cet organisme au processus de nomination ou de renomination d'un commissaire. Est-ce qu'il fait des recommandations? Est-ce qu'il y a des évaluations des commissaires? Est-ce qu'il existe un mécanisme pour porter plainte? J'aimerais savoir pourquoi vous n'avez pas cru bon d'inviter des personnes de ces deux commissions pour qu'on puisse connaître un peu le processus des nominations. Le ministre pourrait venir également.

La présidente: Si vous voulez consacrer les cinq minutes à votre disposition pour poser une question à laquelle le témoin ne peut pas répondre, vous en avez le droit. Cependant, vous pouvez adresser votre question au comité lui-même, et nous en discuterons entre nous, membres des trois partis concernés.

Aujourd'hui, le témoin est venu pour discuter de ses responsabilités et de sa renomination récente. Donc, s'il vous plaît, limitez vos questions à ces aspects. Je dirai la même chose à tous les membres du comité qui sont ici aujourd'hui: compte tenu du fait que nous avons cinq témoins et qu'on manque de temps, je serai très stricte en ce qui concerne la teneur des questions.

M. Nunez: J'aimerais faire une autre observation. Je n'ai qu'une feuille en anglais, bien que le commissaire vienne de Montréal, où la langue officielle est le français, et il n'y a aucune indication détaillée sur son expérience de vie professionnelle. Je n'ai qu'une page. Il n'y a donc pas beaucoup d'indications sur lesquelles se guider pour poser des questions.

La présidente: Voulez-vous alors lui poser une question sur ses qualifications?

M. Nunez: Pourquoi n'avez-vous pas préparé un curriculum vitae un peu plus détaillé et pourquoi ne l'avez-vous pas fait en français?

.1540

[Traduction]

Mme Zambelli: Pour ce qui est de la raison pour laquelle je n'ai pas apporté de CV en français, je pense qu'une institution comme la Commission de l'immigration et du statut de réfugié fonctionne dans les deux langues officielles, et dans le cadre de nos fonctions, nous avons la possibilité d'utiliser la langue officielle de notre choix. Bien des membres de la Commission sont bilingues, et étant donné que je suis anglophone, j'ai préparé mon CV en anglais.

[Français]

La présidente: Monsieur Nunez, avez-vous reçu une copie du curriculum vitae en français?

M. Nunez: Non.

La présidente: Cela a été fait.

[Traduction]

M. Nunez: Je pourrais comprendre si vous travailliez en Ontario ou en Colombie-Britannique, mais vous travaillez au Québec.

Mme Zambelli: C'est exact. Je travaille au Québec. Mais la Commission de l'immigration et du statut de réfugié fonctionne dans les deux langues officielles.

[Français]

M. Nunez: Avant d'être nommée, avez-vous pratiqué dans le domaine du droit de l'immigration? Quelle expérience avez-vous des relations avec des organismes qui travaillent avec les immigrants ou les réfugiés?

[Traduction]

Mme Zambelli: J'étais avocate de l'immigration. J'ai pratiqué le droit de l'immigration pendant cinq ans. Je n'ai pas travaillé dans une ONG - organisation non gouvernementale - ni dans un organisme communautaire, mais je m'occupais entièrement de dossiers relatifs à l'immigration et au statut de réfugié, ce qui m'a donné l'occasion de rencontrer de nombreux demandeurs d'asile dans ma pratique.

[Français]

La présidente: Monsieur Nunez, nous y reviendrons si nous avons le temps.

[Traduction]

Madame Meredith.

Mme Meredith (Surrey - White Rock - South Langley): Merci, madame la présidente. Je me demandais si M. Nunez allait poser la question, mais il l'a fait - en vous demandant si vous avez pratiqué le droit et en particulier, le droit de l'immigration. Si j'ai bien compris, vous travaillez à100 p. 100 dans ce domaine.

J'aimerais savoir si dans les 100 p. 100 des cas dont vous vous êtes occupée, vous représentiez des demandeurs du statut de réfugié ou des candidats à l'immigration.

Mme Zambelli: Oui.

Mme Meredith: Ainsi donc, en prenant des décisions au sein de la Commission, estimez-vous que vous avez l'esprit ouvert à tous les domaines, non seulement aux demandes des réfugiés mais aussi à la nécessité pour le pays d'établir le juste équilibre? Après avoir passé 100 p. 100 de votre temps à travailler pour les réfugiés et les immigrants, estimez-vous que vous êtes en mesure...?

Mme Zambelli: Oui. Si vous permettez que je m'explique...

Mme Meredith: Je vous en prie.

Mme Zambelli: Quand on pratique le droit de l'immigration, on défend effectivement les droits du demandeur du statut de réfugié, mais en même temps on a l'occasion d'observer le système et son fonctionnement global.

Que l'on soit avocat spécialisé en immigration, membre de la Commission ou simple citoyen, personne ne cautionne l'abus de notre système de détermination du statut de réfugié. Cela n'aide personne. En tant qu'avocate, je crois qu'il faut protéger l'intégrité du système. Par conséquent, même si je défendais les intérêts des demandeurs de statut de réfugié, pour bien faire mon travail, il faut que j'aie une perspective globale du système et que je fasse de mon mieux pour l'améliorer.

En devenant membre de la Commission, il faut évidemment garder le sens des proportions, mais je n'ai eu aucun mal à faire la transition entre mon statut d'avocat de l'immigration et celui de membre de la Commission, car je connaissais déjà les intérêts divergents qui existent dans l'ensemble du système.

Mme Meredith: Très bien. J'ai devant moi les décisions des membres de la SSR, et je vais passer en revue celles qui ont été prises au cours des dernières années.

En 1994, parmi les décisions auxquelles vous avez participé, 43 étaient positives et 7 étaient négatives; en 1995, 85 étaient positives et 8 négatives; et en 1996, jusqu'à la fin mars, 25 étaient positives et 5 négatives. Pourriez-vous me donner une idée du pourcentage des demandes auxquelles vous auriez donné une réponse positive?

Je sais que les décisions sont prises par deux membres de la Commission; si le premier a un avis favorable et le second un avis défavorable, l'avis favorable l'emporte. Alors je vous demande, compte tenu de ces chiffres, si vous pouvez me donner une idée du pourcentage des demandes auxquelles vous auriez donné une réponse positive.

.1545

Mme Zambelli: Parlez-vous des cas de partage?

Mme Meredith: Je parle de toutes les décisions.

Mme Zambelli: Depuis que j'ai été nommée à la Commission en 1994, je n'ai eu qu'un cas de partage, c'est-à-dire que mon avis était favorable et celui de mon collègue défavorable. Dans deux cas, mon avis était défavorable et celui de mon collègue favorable, si j'ai bonne mémoire.

Je ne sais pas comment ces chiffres ont été calculés. Si la décision est positive, à moins qu'il s'agisse d'un cas de partage, les deux membres sont d'accord. Si l'on prend une décision positive, l'ordinateur l'enregistre comme une décision positive. Mais dans les statistiques, on n'établit pas la différence entre les différences et les décisions unanimes. Il n'y a que ces trois cas de partage qui me viennent à l'esprit; par conséquent, il est évident que la plupart des décisions positives ont été prises à l'unanimité.

Mme Meredith: Vous voulez donc me dire que sur toutes ces décisions, deux seulement ont été négatives?

Mme Zambelli: Je suis désolée, mais je ne...

Mme Meredith: Très bien. Dans le même ordre d'idées, vous avez dit qu'il y avait trois cas de partage: dans le premier cas, vous aviez un avis favorable et votre collègue un avis défavorable, et dans les deux autres cas, votre avis était défavorable et celui de votre collègue, favorable. Cela fait trois cas de partage. Pour le reste, vos décisions auraient été positives.

Mme Zambelli: En effet, j'aurais pris une décision positive. C'est exact.

Mme Meredith: Très bien. Merci.

La présidente: Merci. Monsieur Cullen.

M. Cullen (Etobicoke-Nord): Madame Zambelli, je ne suis pas avocat d'immigration, et je me demande si vous pourriez décrire... je constate que vous êtes membre du Barreau de New York. Je présume qu'il s'agit de l'État de New York. Pourquoi êtes-vous membre de ce barreau et quelle incidence cela pourrait-il avoir sur les tâches dont nous discutons aujourd'hui?

Mme Zambelli: De toute évidence, cela n'a aucune incidence sur mes fonctions au sein de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, car on ne peut pas simultanément pratiquer le droit ni donner des avis juridiques tant qu'on a été nommé par le gouverneur en conseil.

Pour ce qui est de la première partie de votre question, je suis membre du Barreau de l'État de New York parce que je suis née dans cet État. J'ai décidé qu'il pourrait être utile, si jamais je voulais retourner aux États-Unis, de devenir membre du Barreau.

M. Cullen: N'êtes-vous pas un membre actif du barreau de l'État de New York?

Mme Zambelli: J'ai réussi l'examen du Barreau. J'ai été reçue au Barreau. Je n'ai jamais pratiqué, mais au cas où je voudrais un jour retourner aux États-Unis, j'ai jugé utile de me présenter à l'examen du Barreau.

M. Cullen: Merci.

La présidente: Monsieur Dhaliwal.

M. Dhaliwal (Vancouver-Sud): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je vais parler des décisions qui sont prises, non pas dans la même veine que ma collègue d'en face, mais en ce qui concerne les cas que l'on vous présente.

Étant donné que nos ressources sont limitées de nos jours, vous est-il déjà arrivé de vous demander pourquoi un dossier est parvenu à la Commission? Il est évident que, lorsqu'un dossier est porté en appel, l'intéressé et le gouvernement y ont déjà consacré des ressources considérables. D'après mon expérience, il y a des cas qui auraient pu être réglés plus tôt.

Depuis deux ans, avez-vous déjà estimé que l'on n'aurait pas dû porter certains cas en appel et qu'on aurait dû les régler à une étape antérieure en raison des dépenses énormes que l'on fait pour parvenir à ce niveau? Évidemment, d'après les chiffres avancés par ma collègue, le pourcentage des décisions positives est assez élevé. Cela reflète peut-être la position de la Commission en général.

De plus, pourriez-vous nous dire, si vous le savez, combien de temps il faut pour qu'un dossier de deux ou trois ans vous parvienne. Existe-t-il, au ministère de l'Immigration, un autre moyen de régler certaines des questions que l'on vous soumet? Je pense à de nombreux cas qui auraient dû être réglés. Mais une fois qu'un agent de l'immigration a pris une décision, à tort ou à raison, le demandeur ne peut plus recourir qu'à la Commission d'appel. C'est un processus très long et compliqué qui requiert une aide juridique.

.1550

Je me demande s'il existe un autre moyen de régler les questions futiles que l'on vous présente. Vous soumet-on de nombreux cas qui vous amènent à vous demander si l'on aurait pu les régler à une étape antérieure?

La présidente: Donnez du temps au témoin. Mme Zambelli ne siège pas à la Commission d'appel, monsieur Dhaliwal. Le savez-vous?

M. Dhaliwal: Eh bien, elle siège à la Commission du statut de réfugié. C'est la même chose.

La présidente: À titre d'éclaircissement.

Mme Zambelli: Parlez-vous de revendications manifestement non fondées, des demandes manifestement bien fondées, ou des deux?

M. Dhaliwal: Je parle des demandes bien fondées. Étant donné que tant de décisions sont favorables, ne devrions-nous pas les prendre à une étape antérieure?

Mme Zambelli: Il existe une procédure accélérée pour les demandes qui sont susceptibles d'être acceptées. Je n'y participe pas. Je ne suis pas affectée à cette procédure accélérée. Voilà.

Personnellement, je n'ai vu aucun cas où j'ai estimé... À mon avis, il n'existe pas de cas faciles, et chaque cas doit être examiné en profondeur et séparément. Je répondrai donc à votre question par la négative, car je n'ai jamais estimé qu'une demande était si simple qu'on aurait dû la trancher, positivement ou négativement, dans le cadre d'une procédure simplifiée.

Vous avez aussi demandé combien de temps il faut pour qu'une demande parvienne à la Commission, et combien de temps un demandeur doit attendre; je pense qu'actuellement, un demandeur doit attendre de huit à neuf mois pour avoir son audience. Mais nous travaillons très fort pour réduire ce délai.

La présidente: Monsieur Nunez.

[Français]

M. Nunez: Comment avez-vous su qu'il y avait des postes vacants à la CISR, et qui a recommandé votre candidature?

[Traduction]

Mme Zambelli: Quelqu'un, donc je ne me souviens plus qui, m'aurait dit qu'on avait annoncé ce poste dans la Gazette du Canada à l'été de 1993. J'ai simplement envoyé mon CV

Je ne sais ni comment ni pourquoi j'ai été nommée. Je ne connaissais pas du tout le processus. Je peux vous dire que je n'ai aucune relation politique au sein du gouvernement. C'est tout ce que je peux dire. Je ne sais pas.

[Français]

M. Nunez: La deuxième fois, vous avez été nommée pour un nouveau mandat à partir du 29 décembre 1995. Comment s'est déroulé le processus de renouvellement du mandat? Êtes-vous allée à la Commission Fairweather? Comment est-ce arrivé?

[Traduction]

Mme Zambelli: Non, je n'ai jamais comparu en personne devant la Commission Fairweather. Je crois que j'ai été évaluée par mon supérieur, qui a procédé à un examen détaillé de mon rendement. Ensuite, j'ai envoyé ce CV mis à jour et l'évaluation. Les deux documents ont été envoyés au comité Fairweather. Je ne sais pas ce qui s'est passé par la suite.

[Français]

M. Nunez: Et que contient votre évaluation?

[Traduction]

Mme Zambelli: Il existe plusieurs catégories ou plusieurs domaines dans lesquels on évalue les membres. Par exemple, la façon dont ils mènent les audiences: on voit s'ils sont capables de régler les questions de procédure au cours des audiences, s'ils rédigent à temps leurs décisions et les raisons sous-jacentes, et s'ils sont capables de rédiger efficacement leurs décisions - autrement dit, leur aptitude à la rédaction. On nous juge d'après notre participation à divers comités et d'après notre connaissance de la jurisprudence. Tels sont les critères d'évaluation qu'on a appliqués à mon cas.

[Français]

M. Nunez: Avez-vous un formulaire d'évaluation? Je ne sais pas si un de mes collègues connaît le système. Pas moi en tout cas, et je pense être le plus ancien de tous les membres du comité ici présents.

.1555

[Traduction]

Mme Zambelli: Je n'ai pas de formulaire ici, et je me fie donc à ma mémoire. Plusieurs critères étaient énumérés. Sous chaque critère, mon supérieur rédigeait un petit paragraphe dans lequel il évaluait mon rendement dans ce domaine.

[Français]

M. Nunez: À quel niveau se situait votre évaluation? Je ne connais pas le processus, mais sur une échelle de un à dix, où vous classiez-vous?

[Traduction]

Mme Zambelli: Je pense que l'évaluation était très bonne. J'ai eu de bonnes notes dans tous les domaines. J'en étais très contente. Mais je n'ai pas comparé mon évaluation à celle des autres, car je n'ai vu l'évaluation de personne d'autre.

[Français]

M. Nunez: N'y avait-il pas des catégories A, B, C, ou 1, 2, 3?

[Traduction]

Mme Zambelli: Vous voulez dire une note.

[Français]

La présidente: Je crois qu'elle a répondu par trois fois à la question, monsieur Nunez.

[Traduction]

Répondez si vous voulez.

[Français]

Avez-vous d'autres questions?

M. Nunez: Oui.

La présidente: Vous disposez d'une minute.

M. Nunez: Si j'ai bien compris, vous êtes née aux États-Unis. Le Canada est à négocier une entente sur les réfugiés avec les États-Unis. Une des questions qui ont été débattues portait sur le droit d'un demandeur d'asile de choisir le pays où il dépose sa demande selon la Convention de Genève.

La présidente: Je juge cette question hors du sujet que nous étudions aujourd'hui.

M. Nunez: Ce ne l'est pas du tout, madame, parce que j'ai vu dans son curriculum vitae, au chapitre de ses activités professionnelles: the Convention refugee definition. Je me suis basé justement sur the Convention refugee definition.

La présidente: Mais vous posez une question sur...

M. Nunez: Sur la définition de réfugié. Y est-il précisé s'ils ont le droit de déposer une demande dans le pays de leur choix?

[Traduction]

Mme Zambelli: La définition ne traite pas spécifiquement de la question du pays choisi.

La présidente: Madame Meredith, avez-vous d'autres questions pour ce témoin?

Mme Meredith: Oui, madame la présidente.

Si vous permettez, j'aimerais revenir au fait que dans votre pratique du droit, vous vous occupiez des demandeurs du statut de réfugié et des immigrants. Comme références, vous avez cité Mme Barbara Jackman et M. Lorne Waldman, qui sont bien connus pour leur position en faveur des réfugiés, de leur acceptation au pays et, si je puis dire, pour leurs activités au sein de cette collectivité.

Dans votre travail à la SSR, les ONG et les groupes de défense des réfugiés vous contactent-ils ou vous invitent-ils à participer à leurs activités?

Mme Zambelli: Non, je me tiens aussi loin que possible des avocats de l'immigration et des ONG. Ce n'est pas une bonne chose pour moi d'avoir des contacts avec eux.

Mme Meredith: Vous voulez donc me dire que, même si des représentants de ces organisations sont cités comme référence sur votre CV, vous n'êtes plus en contact avec ces personnes dont le seul but est de promouvoir la cause des réfugiés?

Mme Zambelli: Leurs noms figurent sur mon CV parce que... Je ne sais pas... Le nom deLorne Waldman n'apparaît pas sur l'exemplaire du CV que j'ai ici. C'était peut-être...

La présidente: [Inaudible - La rédaction]

Mme Zambelli: Vraiment? Bon. Ils sont les mieux placés pour juger mon travail comme avocate. Mon CV que voici est valable pour n'importe quel emploi. C'est pour cela que leurs noms y figurent, mais je n'ai plus de contacts avec eux. Mais je ne vais certainement pas les ignorer si je les vois dans la rue.

Mme Meredith: Ma préoccupation - et je serai honnête avec vous - est d'en arriver à un équilibre. Vous siégez à un organisme semi-judiciaire qui est essentiellement indépendant. J'aimerais penser que les membres de cet organisme sont neutres et qu'ils ne penchent ni d'un côté ni de l'autre. C'est ainsi que je perçois la procédure semi-judiciaire.

.1600

Ainsi donc, en lisant vos références, j'ai été un peu préoccupée de constater qu'il s'agissait de personnes qui sont d'ardents défenseurs des candidats au statut de réfugié et à l'immigration. Je constate que vous avez acquis toute votre expérience dans ce domaine. Ensuite, je regarde le nombre de décisions positives et négatives que vous avez prises. Je me demande si vous avez la neutralité qui est si importante dans un organisme quasi judiciaire.

Mme Zambelli: Je conviens que la neutralité et l'impartialité sont les choses les plus importantes. En tant qu'ancienne avocate de l'immigration, il aurait été difficile pour moi de trouver des références qui ne soient pas du même domaine.

Pour ce qui est du taux d'acceptation, les chiffres en tant que tels ne disent pas grand-chose. Le taux d'acceptation dépend beaucoup des pays avec lesquels on travaille. Par exemple, je travaille avec quatre pays seulement, et ce depuis que je suis membre de la Commission.

Mme Meredith: Vous vous occupez uniquement de certains pays. Ainsi donc, certains commissaires pourraient s'occuper de pays qui sont plus susceptibles de produire des réfugiés.

Mme Zambelli: Oui. Comme par hasard, je m'occupe de quatre...

Mme Meredith: Quels sont ces pays, si vous permettez?

Mme Zambelli: L'Inde, le Pakistan, le Sri Lanka et le Bangladesh.

Quant au taux d'acceptation globale des personnes dont je m'occupe à Montréal, il n'est pas anormal à ce que je sache. D'une manière générale, il est peut-être légèrement inférieur à la normale.

Mme Meredith: Vous travaillez uniquement à Montréal. Si vous comparez votre taux d'acceptation de réfugiés provenant de ces pays, correspond-il à celui des autres bureaux comme Toronto, Vancouver ou Winnipeg?

Mme Zambelli: Vous parlez de mon taux d'acceptation ou celui de mon équipe à Montréal?

Mme Meredith: Oui, puisque je suis en train de regarder vos chiffres.

Mme Zambelli: D'une manière générale, ils correspondent à ceux de l'équipe qui s'occupe de ces pays à Montréal. Je ne sais pas quels sont les taux d'acceptation des autres régions pour chacun des pays dont je m'occupe. Mais j'aimerais vous assurer que je m'efforce d'être impartiale. Je pense que mon passé d'avocate de l'immigration n'a rien à y voir. Dans le système de justice pénale, les juges sont choisis parmi les avocats criminalistes, qu'ils soient de la défense ou de la poursuite.

Pour ce qui est de chercher des personnes expérimentées en droit des réfugiés, ce que la Commission essayait de faire si j'ai bien compris, c'est parmi les agents d'immigration, les avocats d'immigration et les membres des ONG qu'il faut peut-être le faire. C'est dans ce groupe de personnes.

Je n'ai eu aucune difficulté, et j'estime que j'ai une très bonne perspective globale du système.

La présidente: Merci, madame Meredith.

S'il n'y a pas d'autres questions, je tiens à vous remercier, madame Zambelli, d'avoir comparu devant le comité, et je vous souhaite bonne chance dans vos fonctions.

J'invite maintenant M. Abdolhossein Kafai à se présenter à la table des témoins. M. Kafai est membre à temps plein de la Section du statut de réfugié au Bureau régional de Toronto.

M. Abdolhossein Kafai (membre à temps plein, Section du statut de réfugié, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada): Je travaille au Bureau régional de Montréal.

La présidente: Nous nous sommes trompés. Merci pour la correction.

[Français]

Monsieur Nunez, voulez-vous commencer? Vous disposez de cinq minutes.

M. Nunez: Votre mandat a été renouvelé à partir du 22 novembre 1995, mais vous êtes commissaire depuis 1988. Je vois dans votre curriculum vitae que vous parlez plusieurs langues: le perse, l'anglais, le français, l'arabe, l'italien, l'allemand et le russe. Il vous manque l'espagnol.

M. Kafai: Je ne parle pas toutes ces langues parfaitement, mais elles me sont familières. Une langue doit être pratiquée; autrement vous allez l'oublier.

.1605

Par exemple, je parlais le russe couramment quand j'étais à Moscou, l'italien quand j'étais en Italie, mais il m'est maintenant difficile de parler ces langues bien que je comprenne encore les réfugiés quand ils sont devant moi. Avant que j'entende ce que dit l'interprète, je sais déjà plus ou moins ce que la personne a dit.

M. Nunez: Vous êtes d'origine iranienne?

M. Kafai: Oui

M. Nunez: Est-ce que vous entendez les causes des revendicateurs d'asile iraniens?

M. Kafai: De temps en temps. Il y a des collègues qui viennent parfois me poser des questions sur l'Iran.

M. Nunez: Et quand vous entendez ces causes, vous sentez-vous parfois un peu en situation de conflit d'intérêts, ou vous considérez-vous capable d'agir impartialement?

M. Kafai: Je peux agir impartialement. J'ai même siégé pour des causes où ma décision a été négative.

Ce que je cherche dans chaque cas, c'est de voir si la personne qui est devant moi est une réfugiée au sens de la Convention.

M. Nunez: Comment avez-vous été nommé pour la première fois, il y a huit ans?

M. Kafai: C'est une bonne question. Je travaillais autrefois au comité consultatif des réfugiés. Par la suite, M. Weiner m'a nommé à cette commission. When the board became active then they put me on the board.

M. Nunez: Et comment a été renouvelé votre mandat la dernière fois? Quelle procédure avez-vous suivie la dernière fois?

M. Kafai: Quand?

M. Nunez: Le 22 novembre 1995. Qu'avez-vous fait pour que votre mandat soit renouvelé? Avez-vous fait acte de candidature?

M. Kafai: Oui.

M. Nunez: Devant qui?

M. Kafai: J'ai dit que j'étais intéressé à servir encore. Je crois qu'à ce moment-là, le ministre a donné l'ordre que le comité de M. Fairweather, the advisory council to be formed... Ma demande s'est rendue, they looked into my background et ils ont eu une opinion favorable de moi. Ensuite j'ai été nommé et j'en suis très content.

M. Nunez: Quand cette commission a examiné votre demande de renouvellement, lui avez-vous envoyé seulement le curriculum vitae que nous avons ici?

M. Kafai: Oui, le même. Rien n'a changé dans ma vie ni dans ma carrière. J'ai eu la chance, le plaisir et l'honneur de travailler au même endroit pendant les cinq dernières années. C'était toujours le même curriculum vitae.

M. Nunez: Et quel était le rôle de la CISR devant la Commission Fairweather?

M. Kafai: Vraiment, je ne le sais pas. Je ne serais pas en mesure de vous le dire parce que c'est une chose interne. Je ne sais pas comment ça marche, qui siège là, qui dit quoi, mais je sais que c'est M. Fairweather qui est là.

M. Nunez: Vous n'avez pas été convoqué à une entrevue et on ne vous a pas demandé de passer des tests?

M. Kafai: Non, parce que j'ai travaillé à la Commission au moment où M. Fairweather en était le président. Il était donc au courant de ma façon de travailler, ainsi que les autres membres de la Commission, je crois. Il y avait Susan Davis qui, elle aussi, savait que j'avais auparavant travaillé pour les réfugiés. Je crois qu'il y avait aussi M. John Frecker, ou madame... Vraiment, je ne sais pas.

La présidente: Nous y reviendrons. Madame Meredith.

[Traduction]

Mme Meredith: Merci, madame la présidente.

Vous avez ici un CV très impressionnant. Il est assez chargé. Je vais vous parler de votre rôle, car il semble assez différent de celui des autres.

Si j'ai bien compris, vous vous occupez de la procédure accélérée, où l'on s'occupe des cas à risque élevé. Apparemment, en 1993-1994, vous étiez pratiquement surchargé. Y a-t-il une raison pour laquelle vous semblez traiter un plus grand nombre de dossiers que le commissaire moyen?

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M. Kafai: Madame, parfois, les chiffres peuvent être trompeurs. Je pense que s'ils sont plus élevés, c'est peut-être parce que je me suis occupé de certains cas urgents. Normalement, nous traitons deux dossiers par jour dans une audience, un le matin et un dans l'après-midi. Mais dans le cadre de la procédure accélérée, nous traitons parfois cinq, six ou sept dossiers par jour; si cela dure deux ou trois semaines, les chiffres augmentent.

Le taux de réponses positives y est beaucoup plus élevé qu'ailleurs. Je crois qu'on a fait des études dans lesquelles on a conclu que... Disons, par exemple, que sur dix cas, huit sont acceptés et deux rejetés. On a même suivi ces deux derniers cas et on a constaté que, à l'issue du second palier d'audience, ces cas étaient acceptés.

La façon dont cela fonctionne... j'ignore comment ça se fait actuellement, mais c'est peut-être la même chose. À l'époque, l'agent d'audience et moi-même lisions le dossier. Je recensais les questions d'importance et s'il y avait des points à préciser, s'il fallait préciser comment le réfugié était venu au Canada ou ce qu'il avait fait avec son passeport, je demandais à l'agent d'audience de poser ces questions. C'est ce qu'on faisait; les réponses m'étaient ensuite transmises.

Mme Meredith: Mes données - et vous me corrigerez si je me trompe, parce que j'ai l'impression que vous n'êtes pas d'accord - indiquent que les décisions auxquelles vous avez participé... Oh, je vois qu'on y a inclus les examens accélérés.

M. Kafai: En effet.

Mme Meredith: Cela signifie-t-il que la majorité des causes que vous avez entendues ont fait l'objet d'un examen accéléré, ou non? Avez-vous une idée du pourcentage?

M. Kafai: Pas maintenant, je ne m'en souviens pas - c'était il y a trois ans - mais il est vrai que je menais des examens accélérés à l'époque.

Mme Meredith: Je pose la question, parce que vous avez indiqué que la plupart des causes faisant l'objet d'un traitement accéléré se soldaient par une décision positive. Or, en 1993, il y a eu 78 décisions positives et 62 décisions négatives, ce qui, pour être honnête avec vous, m'apparaît assez équilibré par comparaison au rendement d'autres commissaires.

Ce n'est pas ce que j'ai vu pour cette année-là. Selon une statistique, vous avez entendu 140 causes. Cela me semble une charge de travail assez lourde, et je présume donc qu'une bonne partie de ces causes a fait l'objet d'un traitement accéléré. En 1994, mes données indiquent que vous avez entendu 160 causes. En comparaison, les autres commissaires en ont entendu 50, 60 ou 70.

Vous avez traité beaucoup plus de demandes que n'importe qui d'autre, et même si, cette année-là, la plupart de vos décisions ont été positives, je présume... En fait, c'est ma question. Est-ce que, dans la plupart des causes ayant fait l'objet d'un examen accéléré, on avait jugé probable que la décision serait positive et que le traitement était pour ainsi dire une formalité dont on voulait se décharger le plus rapidement possible afin de traiter des causes plus problématiques? Est-ce une bonne évaluation de la situation?

M. Kafai: Oui, madame. Toutefois, je dois vous dire que les données ne me préoccupent pas beaucoup. Voici pourquoi. Pour ma part, j'estime qu'on m'a donné un mandat que je tente d'exécuter au nom de la population canadienne.

Avant d'entrer dans une salle d'audience, je ne me dis pas que je dois rendre une décision positive ou négative. Il est vrai qu'après avoir lu le formulaire de renseignements personnels, on a une idée des chances du demandeur. Mais il y a toujours des surprises. Parfois, il suffit d'une réponse à une question apparemment sans importance pour que toute l'argumentation s'effondre.

Mon seul objectif est donc de déterminer si la personne qui comparaît devant moi est un véritable réfugié. A-t-il ou a-t-elle besoin de la protection du Canada? Si j'en viens à la conclusion que le demandeur a besoin de notre protection... J'estime que je trahirais la confiance des Canadiens si, sachant qu'un demandeur a besoin de notre protection, je refusais de lui accorder le statut de réfugié simplement parce que je veux abaisser le nombre de mes décisions positives, ou vice versa. C'est là mon objectif.

.1615

J'aimerais faire une autre remarque, si vous me le permettez. Si le nombre de décisions positives vous semble élevé... notre système est généreux, madame. Nous partons du principe selon lequel le demandeur jouit du bénéfice du doute. Il y a trois genres de demandes. Premièrement, les demandes fondées sur les arguments très solides, où l'on sait, par exemple, que le demandeur a été torturé, battu ou persécuté, que c'est évident. Il est alors facile de se prononcer.

Deuxièmement, il y a des demandes manifestement sans fondement. C'est ce que nous appelons les demandes frivoles. Je pourrais vous en donner des exemples. Ces cas sont faciles à traiter.

Puis, il y a les cas intermédiaires, les cas limites. Les arguments présentés ne sont pas particulièrement solides ou faibles. Cela varie. Si le gouvernement ou la CISR avait pour politique de ne pas donner le bénéficie du doute au demandeur, mais de n'accorder le statut de réfugié qu'à ceux pour lesquels il n'existe aucun doute, il y aurait moins de décisions positives. Les décisions positives sont aussi nombreuses, à mon avis, parce que nous accordons le bénéficie du doute au demandeur lorsque c'est possible.

La présidente: Merci beaucoup.

Les députés du côté ministériel ont-ils des questions?

[Français]

Monsieur Nunez, avez-vous d'autres questions?

M. Nunez: Oui. Avez-vous pris connaissance de votre évaluation?

M. Kafai: De quelle évaluation parlez-vous?

M. Nunez: L'évaluation faite par la Commission qui a probablement été envoyée au comité Fairweather, comme dans le cas de Mme Pia Zambelli. Est-ce que vous êtes au courant de cette évaluation?

M. Kafai: Oui.

M. Nunez: Alors, quelle sorte d'évaluation avez-vous eue?

M. Kafai: Je crois qu'en fin de compte, elle était positive. Autrement, je n'aurais pas été renommé.

M. Nunez: De quels pays vous occupez-vous?

M. Kafai: De pays divers: pays du Moyen-Orient, pays africains et parfois d'Amérique latine. Dans la plupart des cas, ce sont les pays du Moyen-Orient parce que quand je siège,

[Traduction]

Je contrôle totalement la situation.

[Français]

Avant même qu'un revendicateur afghan commence à parler, ou lorsqu'il dit n'importe quoi, je le contrôle avant que ses paroles soient interprétées. L'interprétation, c'est très important, comme vous le savez.

M. Nunez: À la première page de votre curriculum vitae, vous avez écrit comme tâche: «Assessing refugee claimants' credibility». Quels sont les problèmes auxquels vous avez à faire face?

M. Kafai: La question de la crédibilité est très difficile et très importante, dans le sens qu'il faut jouer beaucoup de cartes.

[Traduction]

Pendant l'audience, je recherche l'honnêteté, la sincérité et la cohérence. J'évalue la capacité du demandeur à répondre sans hésitation aux questions qui lui sont posées, ainsi que la présence d'exagérations ou d'invraisemblances dans son témoignage. Lorsqu'il y en a, nous leur faisons part de nos doutes afin de leur donner l'occasion de...

.1620

Puis, ils nous répondent. Nous déterminons alors si ce qui est dit est conforme à la preuve documentaire. J'établis ensuite si nous avons déjà accueilli des réfugiés de ce pays. Je me penche sur le dossier de ce pays en matière de droits de la personne. Je tente de déterminer si le système judiciaire de ce pays fonctionne de façon satisfaisante.

[Français]

Donc, il y a beaucoup de critères dont je dois tenir compte avant d'en arriver à une décision.

M. Nunez: Est-ce que vous travaillez dans le processus régulier ou accéléré?

M. Kafai: Régulier.

M. Nunez: Et vous travaillez à deux personnes?

M. Kafai: Oui, mais maintenant je siège seul depuis un mois. Je me suis porté volontaire pour siéger même seul. Je crois, humblement, que j'ai assez d'expérience pour en arriver à une décision juste. Évidemment, les avocats doivent dire que oui, ils sont d'accord. C'est ce qu'ils font.

M. Nunez: Étant donné qu'il y a tellement de dossiers à la CISR, à Montréal, combien de cas ou dossiers traitez-vous par semaine ou par mois?

M. Kafai: Normalement, nous avons deux cas par jour. Le mercredi est réservé à l'étude de la jurisprudence ou aux échanges sur nos affaires, sur nos problèmes. Le vendredi est réservé aux délibérés. Si on veut écrire nos décisions, il faut prendre le temps nécessaire. Cela prend du temps.

Le reste du temps, nous siégeons. Les normes sont comme ça. Parfois nous sommes prêts, mais... Hier, mon collègue et moi étions prêts, mais l'avocat était malade. Ou bien c'est le revendicateur qui est absent. Il arrive parfois des choses comme celles-là.

M. Nunez: Combien de dossiers traitez-vous en moyenne par semaine?

M. Kafai: Je dois vous dire qu'au mois de janvier, je n'ai pas siégé parce que j'arrivais à Montréal et que j'y étais nouveau. On m'a transféré d'Ottawa à Montréal. Les nombres que vous voyez ici ne sont pas élevés, mais j'ai commencé à siéger en février.

M. Nunez: Je comprends.

[Traduction]

La présidente: Madame Meredith.

Mme Meredith: J'aimerais donner suite à certaines des questions de M. Nunez. J'ai l'impression, d'après vos réponses, qu'il vous arrive régulièrement de siéger seul au tribunal.

M. Kafai: Pas régulièrement. Comme je l'ai dit, il y a beaucoup de travail. La charge de travail...

Mme Meredith: Seulement à Montréal?

M. Kafai: Oui. J'ignore ce qu'il en est dans les autres régions, mais la charge de travail est lourde. Je crois que, en outre, on manque de commissaires. Par conséquent, j'ai proposé de siéger seul si les avocats sont d'accord. Ainsi, le collègue qui aurait siégé avec moi est disponible pour une autre audience. Je siégeais ainsi...

Mme Meredith: Y a-t-il un arriéré à Montréal?

M. Kafai: Je suis désolé, mais je n'ai pas de données à ce sujet. Peut-être que la direction pourrait répondre à cette question.

Mme Meredith: Par conséquent, nous assistons - nous en sommes tous conscients - à une augmentation du nombre de tribunaux ne comptant qu'un seul commissaire, n'est-ce pas? Est-il de plus en plus fréquent que les commissaires siègent seuls?

M. Kafai: Non, pas pour autant que je sache. Tous les tribunaux sont constitués de deux commissaires. J'ai simplement fait cette offre. C'est aux avocats de l'accepter ou non.

Mme Meredith: Mais dans le cas du traitement accéléré, le tribunal ne compte qu'une personne, n'est-ce pas?

M. Kafai: Oui.

.1625

Mme Meredith: C'est parce qu'il s'agit... Je ne veux pas la qualifier de formalité, mais, essentiellement c'est bien cela.

M. Kafai: Habituellement, les commissaires ne rencontrent pas le demandeur; seulement dans certains cas. S'il y a un problème particulier, le commissaire demande à l'agent qui s'occupe du cas de poser personnellement certaines questions au demandeur.

Mme Meredith: Dans le cadre du processus accéléré, il n'y a donc pas d'entrevue avec le demandeur? Vous ne rencontrez pas le demandeur? Vous ne faites qu'examiner le dossier?

M. Kafai: Il y a une entrevue, mais c'est l'agent traitant qui s'en occupe.

Mme Meredith: Je vois. Votre décision est fondée sur ses recommandations et les informations qui vous sont fournies, un peu comme pour un juge qui revoit une cause.

M. Kafai: Oui, précisément. Si les arguments sont solides, si vous savez que de nombreux réfugiés proviennent de ce pays, que les droits de la personne y sont violés systématiquement, que le système judiciaire ne fonctionne pas - il ne s'agit pas d'un régime démocratique, mais plutôt militaire...

Mme Meredith: Vous devez suivre des paramètres, n'est-ce pas?

M. Kafai: Bien sûr.

Mme Meredith: Est-ce que la Commission ne fixe pas des paramètres, des raisons légitimes fondées sur ce qui se passe dans le monde? Vous tenez compte de ces paramètres, n'est-ce pas?

M. Kafai: Bien sûr. Nous disposons d'un excellent centre de documentation. Je crois que même les Américains nous ont pressentis à ce sujet; nous sommes donc bien équipés.

Mme Meredith: Merci.

M. Kafai: Merci à vous, madame.

La présidente: Monsieur Dhaliwal.

M. Dhaliwal: J'ai seulement deux ou trois questions à poser. Premièrement, je remercie le député de ses questions sur les statistiques. Vous, vous ne vous préoccupez pas trop des statistiques; chaque cas est pour vous un cas d'espèce. Il n'existe pas de système de quota selon lequel vous devez rendre un nombre déterminé de décisions positives ou négatives. Vous travaillez essentiellement au cas par cas.

M. Kafai: Oui.

M. Dhaliwal: Mon autre question porte sur les droits de la personne. Manifestement, il est important que vous soyez au courant de la situation des droits de la personne dans les pays dont vous vous occupez.

M. Kafai: En effet.

M. Dhaliwal: Pourriez-vous d'abord me dire si vous assistez régulièrement à des séances d'information sur la situation dans les pays dont vous vous occupez.

Deuxièmement, vous tenez-vous au courant de ce que font certains groupes tels que Amnistie internationale? Vos fonctions exigent-elles de vous que vous suiviez les travaux de ces organisations? Étant donné que la situation dans certains pays change rapidement, les séances d'information sont-elles fréquentes?

Par ailleurs, pour ma gouverne, pourriez-vous m'expliquer en quoi consiste un dossier faisant l'objet d'un examen accéléré? Dans quelle mesure ces causes sont-elles traitées différemment des cas d'appel? Qu'est-ce qui fait qu'un dossier subit un traitement accéléré? Ce n'est pas clair dans mon esprit. Peut-être pourriez-vous éclairer ma lanterne.

M. Kafai: Puis-je commencer par la dernière question?

En ce qui concerne le traitement accéléré, nous appliquons des critères. Je ne connais pas précisément tous les critères actuels, parce que c'est la direction qui les établit. Normalement, pour autant que je sache comme je l'ai dit tout à l'heure, nous nous demandons si le réfugié provient d'un pays qui produit beaucoup de réfugiés, s'il s'agit d'un régime qui n'est pas démocratique, si les droits de la personne sont violés, s'il existe suffisamment de documents prouvant que le système judiciaire ne fonctionne pas et que les personnes persécutées n'ont aucun recours, s'il y a des preuves de torture, d'emprisonnement, de fuite, de départ illégal du pays... Il y a donc de nombreux critères dont nous tenons compte pour déterminer si la cause devrait faire l'objet d'un traitement accéléré. Honnêtement, je n'ai pas les connaissances nécessaires pour vous en dire plus, mais ce sont là certains des critères que nous appliquons.

Quant aux violations des droits de la personne et Amnistie internationale, nous suivons assidûment les travaux de ces organisations. Mais cela me permet de faire une distinction. Il y a des régimes qui existent depuis longtemps, des pays où la situation change peu. Je pense par exemple à l'Iran, à l'Afghanistan et au Moyen-Orient. Mais tous les dossiers que nous recevons comprennent des documents d'Amnistie internationale ainsi que de rapports américains sur le pays en question. Nous sommes donc bien équipés, monsieur.

.1630

La présidente: Je remercie M. Kafai d'être venu témoigner devant notre comité et je lui souhaite bonne chance.

M. Kafai: Merci beaucoup. C'est un honneur et un plaisir pour moi de vous avoir rencontrés.

La présidente: J'invite maintenant Mme Ethel Teitelbaum à prendre place. Mme Teitelbaum est membre de la Section d'appel de l'immigration au Bureau régional de Toronto.

Merci d'être là.

Mme Ethel Teitelbaum (membre, Section d'appel de l'immigration, Bureau régional de Toronto, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada): Merci de m'avoir invitée.

[Français]

La présidente: Monsieur Nunez, vous pouvez commencer.

M. Nunez: Je vois ici que vous avez été membre de la Commission d'appel de l'immigration, que vous êtes née et avez vécu à Montréal et que vous avez travaillé pour un député ministre,M. Donald Macdonald. Quelle sorte de travail avez-vous fait pour lui?

Mme Teitelbaum: Premièrement, je veux vous exprimer mes regrets de ce que je ne vais pas m'adresser à vous en français; je ne parle pas le français couramment.

[Traduction]

Vous voulez savoir ce que je faisais pour Donald Macdonald? J'étais sa conseillère politique.

[Français]

M. Nunez: En quoi cela consistait-il? Quelle était votre description de tâches?

[Traduction]

Mme Teitelbaum: J'ai dirigé son bureau de comté pendant un an ou deux, puis je suis venue à Ottawa pour travailler directement avec lui à titre de conseillère politique. Je me suis occupée de toutes les questions qui n'étaient pas directement liées à son ministère. À ce titre, je l'accompagnais à de nombreuses réunions. J'agissais en son nom. Je parlais en son nom. Je lui dispensais des conseils sur les questions politiques. J'ai travaillé pour lui quand il a assumé plusieurs postes de ministre, mais je ne me suis pas occupée des affaires de son ministère.

[Français]

M. Nunez: Et en 1989, qui a proposé ou recommandé votre candidature?

[Traduction]

Mme Teitelbaum: J'ignore qui a recommandé ma candidature en 1989. J'ai été nommée par deux gouvernements. Je ne peux qu'émettre des hypothèses sur les raisons qui les ont amenés à me confier ce poste.

M. Nunez: Quel gouvernement?

Mme Teitelbaum: Le gouvernement libéral et le gouvernement conservateur. J'ai été nommée par les deux. Ces deux gouvernements m'ont nommée à ce poste et ont renouvelé ma nomination. Je ne peux qu'en déduire qu'ils m'ont jugée compétente et capable de m'acquitter de mes fonctions.

Voulez-vous que je vous en dise plus long?

M. Nunez: Non, ça va.

[Français]

Vous aurez à répondre à d'autres questions maintenant.

[Traduction]

Mme Teitelbaum: Je suis ici pour cela.

[Français]

M. Nunez: Êtes-vous parfois appelée à siéger à l'extérieur de Toronto?

[Traduction]

Mme Teitelbaum: À l'occasion. Lorsque la Commission était petite, à ma première nomination, il n'y avait que 14 commissaires qui parcouraient tout le pays. Nous devions donc voyager constamment d'un bout à l'autre du pays, ce qui présentait de nombreux avantages sur lesquels je ne m'étendrai pas, parce que ce n'est certainement pas ce qui vous intéresse. En conséquence, j'en suis venue à bien connaître la façon de penser des commissaires dans les différentes régions.

Maintenant, la Commission est beaucoup plus grande, bien que la Section d'appel soit encore relativement petite, et elle subit des contraintes financières. Nous voyageons donc très peu. Nous avons dû vous rendre dans des pénitenciers, je suis allée à Winnipeg et certains de mes collègues à Vancouver. Auparavant, j'allais régulièrement à Montréal, mais plus maintenant.

.1635

[Français]

M. Nunez: Et quelle sorte de causes avez-vous entendues à Vancouver?

[Traduction]

Mme Teitelbaum: Les causes sont les mêmes dans tout le pays. Notre Section est une section d'appel; nous entendons les causes d'appel d'ordonnance et d'expulsion, les causes de ceux à qui on a rejeté la demande de parrainage, ainsi que de ceux qui se considèrent comme des résidents permanents de retour au pays, mais qui sont restés à l'étranger plus de 183 jours, ou six mois, et auxquels on ne permet donc pas de rentrer au pays. Ce sont là les genres de cas que nous traitons. C'est uniforme à l'échelle du pays.

L'application de la loi est toujours la même. Lorsque j'ai dit qu'il était bon de savoir comment on fonctionne dans les différentes régions, c'est parce qu'il y a des petites différences. Aux fins d'uniformité, il est donc utile de voyager.

[Français]

M. Nunez: Y a-t-il eu des plaintes de la part d'avocats ou de clients contre vous au cours de toutes ces années?

[Traduction]

Mme Teitelbaum: Je m'assure simplement auprès de mon conseiller très bien rémunéré d'avoir bien compris vos questions.

Je ne crois pas.

Y a-t-il eu des plaintes à votre connaissance?

S'il y en a eu, elles n'ont pas été portées à mon attention.

[Français]

M. Nunez: Donc, votre évaluation est très bonne.

La présidente: Nous reviendrons sur le sujet, parce que vous avez déjà épuisé vos cinq minutes.

[Traduction]

Voulez-vous répondre?

Mme Teitelbaum: Bien sûr.

La présidente: Allez-y.

Mme Teitelbaum: Mes évaluations sont toujours excellentes. Cela peut sembler prétentieux, mais c'est le cas. Je les ai vues et c'est pour cela que je peux faire cette affirmation. Nous devons tous lire nos évaluations avant de les signer.

M. Nunez: En avez-vous des copies?

Mme Teitelbaum: Non, vous devrez me croire sur parole.

Mme Meredith: Il y a une réponse que je n'ai pas comprise. Aviez-vous postulé cet emploi ou vous a-t-on recommandée pour ensuite vous nommer à ce poste? Je sais que vous avez dit avoir été nommée par deux gouvernements différents qui ont aussi renouvelé votre nomination, mais avez-vous demandé que votre mandat soit renouvelé?

Mme Teitelbaum: J'ai manifesté de l'intérêt. Voulez-vous dire au tout début?

Mme Meredith: Y a-t-il eu une annonce dans la Gazette? D'autres témoins nous ont dit avoir postulé l'emploi après avoir vu une annonce dans la Gazette du Canada.

Mme Teitelbaum: Non, ça, c'est récent. Ce n'est que depuis quelques années que les postes sont annoncés dans la Gazette. Auparavant, il suffisait de manifester son intérêt à diverses personnes.

Mme Meredith: Lorsque vous dites «diverses personnes», à qui avez-vous manifesté votre intérêt?

Mme Teitelbaum: Pour ma part, au départ, j'ai manifesté mon intérêt à divers ministres qui prenaient ce genre de décisions. Ils connaissaient bien mes capacités et, j'espère, mes sensibilités.

Je viens d'une famille d'immigrants et d'une collectivité d'immigrants, et j'estimais alors que cela me permettait d'apporter une certaine sensibilité à ce genre de travail.

J'ai donc indiqué à diverses personnes que ce poste m'intéressait. À l'époque, il était difficile de devenir commissaire, parce qu'il n'y avait que 14 postes et que le nombre de postulants était très grand. Je ne saurais vous dire comment on en est venu à me choisir. Ensuite, j'ai simplement fait la même chose vers la fin de chacun de mes mandats... À l'époque, on était nommé pour une longue période.

Mme Meredith: Avez-vous commencé à la Section d'appel, ou traitiez-vous alors de toutes les demandes?

Mme Teitelbaum: Non. Lorsque je suis arrivée à la Commission, elle s'appelait la Commission d'appel de l'immigration et le commissaire s'occupait de toutes les causes. Nous traitions d'appels et de demandes du statut de réfugié. On n'a séparé les deux fonctions qu'en 1989.

.1640

Mme Meredith: C'est en 1989, donc, que vous vous êtes jointe à la Section d'appel.

Mme Teitelbaum: Non, je me suis jointe à la Section du statut de réfugié. J'étais alors responsable de la coordination à la division chargée d'établir le minimum de fondement, qui a disparu par la suite.

Mme Meredith: À Toronto, vous entendez la cause de quiconque s'est vu refuser le statut de réfugié et a fait l'objet d'une ordonnance d'expulsion. Traitez-vous uniquement des cas d'ordonnance d'expulsion? Ce sont là les seules causes que vous entendez?

Mme Teitelbaum: Nous nous occupons des gens qui font appel de l'ordonnance d'expulsion ou dont la demande de parrainage a été rejetée, ainsi que de diverses autres causes. À la Section d'appel, nous ne traitons pas de demandes du statut de réfugié. Nous ne tenons compte de cette question que si l'appelant s'est vu accorder le statut de réfugié mais a aussi été reconnu coupable d'un crime. Nous appliquons alors un autre article de la loi dans les cas où le statut d'immigrant reçu n'a pas été accordé.

Mme Meredith: Mais s'il s'agit d'un revendicateur du statut de réfugié qui n'a pas obtenu ce statut, vous n'entendez pas la cause?

Mme Teitelbaum: Si, mais nous appliquons alors un autre article de la loi. Normalement, nous n'entendons que les appels interjetés par les immigrants reçus, mais, en l'occurrence, ce statut n'aurait pas été accordé. On applique alors d'autres critères légèrement différents et une autre disposition de la loi.

Mme Meredith: Mais vous entendez néanmoins ce genre de causes.

Mme Teitelbaum: Oui. Dans le cas des immigrants reçus, nous traitons de toutes les circonstances de l'affaire. Dans les cas des demandeurs auxquels on a accordé le statut de réfugié, nous tenons compte des facteurs humanitaires.

Mme Meredith: À votre avis, y a-t-il davantage de travail à Toronto qu'à Montréal? Y a-t-il une différence entre les grands centres du Canada?

Mme Teitelbaum: Je ne peux répondre à votre question avec précision. Tout ce que je peux déduire du nombre de commissaires qui travaillent à Montréal par rapport à ceux qui travaillent à Toronto, c'est que la charge de travail est plus lourde à Toronto. La Section d'appel de Montréal compte deux commissaires, alors que la nôtre en compte dix.

La présidente: Monsieur Dromisky.

M. Dromisky (Thunder Bay - Atikokan): Merci, madame la présidente.

Depuis combien de temps siégez-vous à la Section d'appel?

Mme Teitelbaum: Depuis environ dix-sept ans.

M. Dromisky: Au cours de vos voyages un peu partout au pays, avez-vous remarqué quelque chose d'inhabituel, quelque caractéristique ou phénomène étrange qui semble exister dans certaines régions du pays, tout simplement en raison de la façon dont on traite certains dossiers? Est-ce que, dans certaines régions du pays, on met l'accent davantage sur certains aspects du système ou de la loi, que les commissaires font montre de certains préjugés? Avez-vous constaté des résistances ou certains phénomènes étranges? Vous avez beaucoup voyagé; vous avez certainement pris connaissance de choses que personne d'autre n'a remarquées.

Mme Teitelbaum: Et aussi en raison de mon âge.

M. Dromisky: Oui, et de votre intelligence, de votre sensibilité, de votre expérience, et ainsi de suite.

Mme Teitelbaum: Merci.

Des voix: Oh, oh!

Mme Teitelbaum: Non, je n'ai pas remarqué de particularités. Tout ce que je pourrais vous dire à ce sujet, c'est que j'ai observé que les nouveaux commissaires ont tendance à être moins catégoriques dans leurs jugements. Ils sont plus... J'hésite à employer le terme «généreux», parce que j'aime croire que je suis encore généreuse.

M. Dromisky: Que diriez-vous de «compatissant»? Serait-ce le terme que vous cherchez?

Mme Teitelbaum: Non.

La présidente: Monsieur Dromisky, vous faites dire au témoin des choses qu'elle n'a pas dites.

Mme Teitelbaum: Ils tendent à rendre davantage de décisions positives avec le temps, après avoir eu une bonne dose de réalité. C'est là que se trouve la différence.

M. Dromisky: C'est ce à quoi je faisais allusion.

.1645

Mme Teitelbaum: C'est là qu'il y a une différence, d'après moi.

Par ailleurs, dans chacune des régions, on traite de cas provenant de différents pays. Ainsi, il y a davantage d'Indiens à Vancouver, davantage d'Haïtiens à Montréal et davantage de Jamaïcains à Toronto. C'est une autre différence. Je suppose que l'approche est donc aussi quelque peu différente, mais je ne le sais pas. La seule particularité que j'ai constatée, c'est la différence d'attitude après avoir entendu un certain nombre de causes, on commence à changer de point de vue.

N'oublions pas non plus que les choses ont changé au fil des ans. Pendant longtemps, moi et une autre personne étions considérées comme les libéraux, avec un petit l, de la commission. Mais il était alors facile d'être généreux. Bon nombre de gens oublient que la nature des crimes a changé. Il y a beaucoup plus d'activités criminelles liées aux drogues de nos jours. Les crimes sont plus violents. En outre, la loi a été modifiée de sorte que les gens avec lesquels nous traitons sont ceux qui commettaient les crimes les plus sérieux: les cambrioleurs, les proxénètes, les agresseurs sexuels, ceux qui récoltaient des peines plus sévères. Cela a changé. Et il y a eu d'autres changements de ce genre au fil des ans.

La présidente: Madame Minna, s'il vous plaît.

Mme Minna (Beaches - Woodbine): Je vous souhaite la bienvenue.

J'aimerais revenir à votre curriculum vitae, à la première page. Vous y dites que vous avez été coordonnatrice de la Section du statut de réfugié, où vous deviez veiller à la bonne application de procédures, etc. Mais vous nous avez dit que la Section de détermination du minimum de fondement n'existe plus. Où se fait maintenant ce travail? Qui veille à la bonne application des procédures et des politiques, et à l'efficience de la Commission? Comment s'appelle maintenant cette Section? Je ne la connais pas.

Mme Teitelbaum: Je vais tenter de vous répondre brièvement. Croyez-le ou non, j'en suis capable.

Lorsque la Commission a été divisée en deux sections, on a créé une division de détermination du minimum de fondement qui devait s'occuper du processus de détermination du statut de réfugié, mais qui au bout du compte, s'est avéré inefficace.

Lorsque quelqu'un demandait le statut de réfugié, il comparaissait devant cette section pour présenter sa demande. Plus précisément devant un tribunal de deux personnes, à savoir un arbitre et un commissaire. Si on considérait qu'il était possible pour un revendicateur de prouver que sa demande avait un minimum de fondement, on renvoyait la cause au palier suivant, à savoir celui de l'audience complète devant la Section du statut de réfugié. Si on jugeait que la demande était sans fondement, l'affaire était tranchée sur-le-champ. C'est le Comité consultatif du statut de réfugié qui se prononçait sans autres formalités.

Or, le taux de renvois était de 92 p. 100 à 97 p. 100; il était donc absurde pour cette section de continuer à exister puisqu'elle ne faisait pas vraiment son travail. Elle n'essayait que de se décharger de ses responsabilités en renvoyant tout le dossier au palier suivant. Si l'un des deux membres du tribunal jugeait que la cause méritait d'être renvoyée devant la Section du statut de réfugié, c'est ce qui se passait. Habituellement, c'est l'arbitre qui prenait cette décision.

C'est donc ce qui se passait.

La présidente: Merci.

[Français]

Monsieur Nunez, avez-vous d'autres questions?

M. Nunez: Oui. Combien de dossiers ou de cas traitez-vous chaque année ou chaque mois?

Mme Teitelbaum: Cela dépend.

.1650

[Traduction]

Nous prévoyons habituellement trois cas par jour. C'est une très lourde charge. Cela parce que le taux de retrait et de report a augmenté. Afin d'essayer d'éviter...

M. Nunez: À cause des avocats?

Mme Teitelbaum: Dans une large mesure, oui. Il m'est très facile de les blâmer, mais il se trouve que c'est vrai.

[Français]

M. Nunez: Pour nous donner une idée générale, combien de causes avez-vous entendues en 1995?

[Traduction]

Mme Teitelbaum: Si l'on en croit les statistiques, l'année dernière - et cela m'a un peu choquée - j'ai rédigé 57 séries de raisons. Cela m'a choquée parce que j'ai pensé que ce n'était pas beaucoup. Je ne suis pas sûre que le chiffre soit exact.

Afin que les choses soient bien claires, toutes les décisions d'appel de parrainage doivent être rendues par écrit.

M. Nunez: Qu'elles soient négatives ou positives.

Mme Teitelbaum: Oui. Que l'appel soit reçu ou rejeté, la décision doit être justifiée. Toutes les causes que nous entendons dans les pénitenciers entraînent des décisions rendues par écrit mais, sinon, rien n'oblige à justifier une décision par écrit, sauf si on nous le demande.

Donc, si j'ai effectivement rédigé 57 justifications, j'ai probablement entendu deux fois plus de causes.

[Français]

M. Nunez: Combien des décisions concernant ces 57 cas ont été portées en appel?

[Traduction]

Mme Teitelbaum: Oh, très peu. C'est la vieille Teitelbaum.

[Français]

M. Nunez: Est-ce que vous avez gagné ou perdu? Est-ce que ces décisions ont été confirmées ou infirmées?

[Traduction]

Mme Teitelbaum: Seulement un mois à la Cour fédérale puis de la Cour fédérale à la Cour suprême. C'est tout. La plupart du temps, lorsque mes décisions ont été soumises à la Cour fédérale, et là encore, je ne veux pas me vanter, habituellement, elles ont été maintenues. Il est arrivé à l'occasion que l'on me contredise.

M. Nunez: D'accord.

La présidente: Madame Meredith, avez-vous d'autres questions à poser au témoin?

Mme Meredith: Je ne suis pas sûre que mes questions s'appliquent à ce domaine particulier. Tout le processus me semble fascinant et je trouve que votre expérience et tout ce que vous nous dites sur cette administration, sur votre rôle et sur ce que nous essayons de réaliser est très intéressant.

Mme Teitelbaum: Je suis à votre disposition à tout moment.

Mme Meredith: Je crois que vous avez déjà répondu, mais c'est pratiquement vous qui avez fait disparaître votre fonction. Votre transfert aux appels est le résultat...

Mme Teitelbaum: Non.

Mme Meredith: Est-ce vous qui avez décidé de changer, de passer à la Section d'appel?

Mme Teitelbaum: Cela a duré deux ans jusqu'à ce que les autorités réalisent que cela ne pouvait marcher. À ce moment-là, j'ai tout simplement commencé à m'occuper à plein temps des demandes de statut de réfugié.

Mme Meredith: Pourquoi être alors passée à la Section d'appel? Est-ce vous qui l'avez voulu?

Mme Teitelbaum: Oui, c'est moi.

Mme Meredith: Vous avez simplement décidé qu'il était temps de passer à quelque chose de nouveau.

Mme Teitelbaum: Oui. Ça m'intéressait davantage. C'est plus varié. J'aime les défis juridiques.

En ce qui concerne les réfugiés, c'est beaucoup une question de crédibilité. Dans une large mesure, vous êtes là aussi pour juger des cas de réinsertion lorsqu'il y a appel au criminel.

Mme Meredith: Merci.

.1655

La présidente: Merci, madame Meredith. Monsieur Dhaliwal, à vous.

M. Dhaliwal: J'ai posé une question tout à l'heure, mais celle-ci s'adresse peut-être davantage à vous puisque vous êtes à la Commission d'appel. J'avais demandé tout d'abord combien de temps il fallait pour qu'une cause vous soit renvoyée. Deuxièmement, vous arrive-t-il d'être saisie de causes pour lesquelles vous vous demandez pourquoi les cas n'ont pas été réglés avant d'arriver à vous? On consacre d'énormes ressources pour en arriver là, qu'il s'agisse de frais juridiques ou de préparations pour que la partie gouvernementale présente ses arguments.

Je peux vous citer des cas que nous avons présentés parce que nous pensions qu'il était normal de le faire. Mais on nous dit très souvent que cela n'a pas d'importance, qu'une fois que quelqu'un a fait appel, cela doit passer par la Commission d'appel. Je me demande quelquefois pourquoi nous... Par exemple, quelqu'un qui a un enfant mais à qui on dit qu'il ne s'agit pas d'un mariage valable. L'enfant a deux ou trois ans, mais ils doivent... Lorsqu'un fonctionnaire a dit non, le seul recours, c'est de se présenter à la Commission d'appel. Très souvent, cela devient assez facile, mais c'est simplement qu'il faut passer par toutes ces formalités.

Y a-t-il beaucoup de cas qui sont confiés, et qui, à votre avis, auraient pu être réglés avant?

Mme Teitelbaum: Je ne dirais pas qu'il y en a beaucoup, mais il y en a quelques-uns. La Commission a récemment instauré un système qui, me dit-on, pourrait être très commode. Je ne m'en suis pas encore servi moi-même, mais cela inclut des vidéos et téléconférences.

Je sais bien que je ne réponds pas très directement à votre question, mais je ne puis penser qu'à de très rares cas qui auraient pu en fait être réglés en dehors de la Commission. Vous avez tout à fait raison, toutefois. Lorsque les choses sont en route, je ne sais pas s'il y a un moment où on peut les arrêter. Lorsque le processus est en cours, tout le système fait qu'il est difficile d'arrêter les choses avant la Section d'appel.

M. Dhaliwal: Combien de temps cela peut-il prendre? Deux ou trois ans?

Mme Teitelbaum: Pour que nous soyons saisis de l'affaire?

M. Dhaliwal: Oui.

Mme Teitelbaum: Je sais qu'il faut quelquefois deux ou trois ans avant que le problème soit finalement réglé, et quelquefois plus longtemps. Mais n'oubliez pas que la Commission n'est pas celle qui détermine quand les causes seront entendues. C'est le ministre ou ses représentants qui décident. Ils décident quand le dossier sera prêt.

Nous ne pouvons commencer sans dossier. Celui-ci inclut l'examen de la personne et tous les documents touchant le problème particulier. Tout cela doit être préparé par l'Immigration et tous les documents doivent être envoyés au bureau des appels, qui est le cabinet du ministre, avant que le dossier nous soit envoyé. Lorsque nous l'avons, c'est moi qui ai réparti les tâches si bien que j'ai une assez bonne idée de ce qui arrive et de ce que sera le calendrier des audiences. Je peux vous dire que parfois il y en a beaucoup et d'autres fois très peu. Ce n'est toutefois jamais de la faute de la Commission. Lorsque nous en sommes saisis, nous commençons tout de suite. L'audience a donc lieu très vite après que nous avons reçu les documents.

Quelquefois je regarde quand les intéressés ont soumis leur avis d'appel. Je dois vous dire franchement que je trouve quelquefois choquant que cette personne ait fait appel en 1993 et que cela ne nous arrive que maintenant. Mais nous n'y pouvons rien, cela ne relève pas de notre compétence.

M. Dhaliwal: Donc, trois ans, ce n'est pas inhabituel pour un appel - si quelqu'un fait appel - après que sa demande a été rejetée...

Mme Teitelbaum: Oh, si, c'est tout à fait inhabituel. Cela prend moins longtemps que cela. Ce qui se passe après que la décision a été prise en appel, je ne peux le dire. Je sais que certains se sont plaints que cela prenne encore un an ou deux avant... Mais vous devrez avoir une autre réunion pour examiner ce qui se produit ensuite.

M. Dhaliwal: Donc, lorsque vous avez rendu une décision, ça n'expédie pas forcément les choses. Même si vous avez rendu une décision favorable, cela peut prendre encore deux ans avant que tout ne soit réglé.

Mme Teitelbaum: Je n'en sais rien, personnellement. Je sais simplement que cela s'est produit parce que des gens s'en sont plaints à moi personnellement. Ils m'ont dit, voilà ce qui est arrivé à mon beau-frère, à mon ami; il aura encore fallu attendre longtemps.

.1700

D'un autre côté, j'ai accepté un appel d'une femme qui parrainait son mari qui avait été expulsé du Canada. Il était évident qu'il avait été réhabilité et toute la famille était ici; il y avait des tas de bonnes raisons pour accepter l'appel. Environ six mois plus tard, j'ai reçu une carte de remerciements de cette femme me disant que son mari était revenu et que tout le monde était vraiment très heureux. C'était un homme nouveau, etc., etc. Il arrive donc que cela se fasse très vite.

Je suis désolée, j'aimerais pouvoir vous répondre mais je ne sais pas.

La présidente: Je voudrais remercier Mme Teitelbaum d'être venue. Je vous souhaite bonne chance dans vos fonctions. Merci.

Mme Teitelbaum: Merci beaucoup.

La présidente: J'invite maintenant M. Nirmal Singh à s'approcher. M. Singh est membre à temps plein de la Section du statut de réfugié au Bureau régional de Vancouver. Bienvenue, monsieur Singh.

M. Nirmal Singh (membre à plein temps, Section d'appel, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada): Madame la présidente, j'aimerais vous rappeler que je suis en fait membre de la Section d'appel.

La présidente: Je suis désolée, c'est le renseignement qui m'avait été donné, mais je vous remercie beaucoup.

M. Singh: Merci.

La présidente: Quelle section?

Mme Minna: La Section d'appel de Vancouver. Au moins, c'était la bonne ville.

M. Singh: Oui, c'est à Vancouver.

La présidente: Merci.

[Français]

Monsieur Nunez.

M. Nunez: L'information que nous avons eue laisse un peu à désirer. Je trouve également que votre curriculum vitae n'est pas très long, une page seulement, et qu'il n'est pas très détaillé.

La présidente: Cela vous gêne vraiment de vous limiter à poser des questions?

M. Nunez: Non. C'est parce que je ne sais pas si c'est une stratégie. La première fois que nous avons examiné les nominations des commissaires, nous avions des curriculum vitae beaucoup plus longs et beaucoup plus détaillés. Maintenant, nous n'avons qu'une feuille.

Vous êtes originaire de l'Inde.

[Traduction]

M. Singh: Pourquoi mon curriculum vitae est-il si bref? Parce que je n'ai jamais fait que deux choses dans ma vie, madame la présidente. J'ai pendant vingt ans enseigné dans un collège communautaire et depuis dix ans, je suis à la Commission. Je suis au Canada depuis trente ans et il n'y avait donc pas grand-chose à dire. Avant cela, j'avais fait de la recherche en énergie atomique pendant cinq ans.

[Français]

M. Nunez: Vous avez une maîtrise en sciences. Étant donné que vos études ont toujours été dans le domaine technique et que vous avez une maîtrise en sciences, d'où vient votre intérêt à devenir commissaire à la CISR? Aviez-vous eu de l'expérience auparavant avec des réfugiés ou des immigrants? D'où vient cet intérêt?

[Traduction]

M. Singh: Non, je n'avais aucune expérience du droit des réfugiés ni de l'immigration avant d'entrer à la Commission d'appel de l'immigration, comme on l'appelait à l'époque. J'enseignais dans une petite localité de l'intérieur de la Colombie-Britannique, au premier collège communautaire de Colombie-Britannique. J'étais extrêmement dévoué à mon travail et il y avait moins d'une demi-douzaine de membres de minorités ou de nationalité à ce collège.

Mon député a recommandé mon nom parce qu'il y avait une décision importante de la Cour suprême du Canada à Singh, où l'on devait entendre tous ceux qui présentaient une demande de statut de réfugié aux termes de la Convention. À l'époque, on a porté le nombre de membres de la commission de 15 à 50. J'ai demandé un congé sans solde de deux ans au collège communautaire pour entrer à la Commission. Après quoi, peut-être parce que je m'étais bien acquitté de mes fonctions, on m'a demandé de rester.

.1705

C'est la troisième fois que l'on me reconduit dans mes fonctions. J'y étais en 1989 pour cinq ans. La Section d'appel entendait à l'époque moins de causes, mais il y en avait plus concernant le statut de réfugié. Le président d'alors, M. Fairweather, m'a demandé s'il m'intéresserait d'entrer à la Section du statut de réfugié.

J'ai répondu que oui et j'y suis resté un an et demi. En fait j'ai souvent eu la grande chance de siéger à la Commission avec M. Fairweather et j'ai également participé à certaines audiences accélérées en 1991. Puis, à la Section d'appel, il y avait davantage de cas de parrainage et d'expulsion et l'on m'a demandé d'y revenir. C'est là que je suis depuis 1993.

Pour le moment je suis vice-président adjoint. En 1994, il n'y avait qu'un membre de la Section d'appel, les autres mandats étant expirés; j'étais donc le seul membre à plein temps et on m'a demandé d'être vice-président adjoint à titre intérimaire. À l'époque, j'ai institué certaines choses à Vancouver. C'est essentiellement là que je siège bien que nous siégions aussi en Alberta puisque Calgary et Edmonton relèvent de notre compétence.

J'ai pris quelques initiatives qui permettront de hâter les choses pour ceux qui attendent depuis deux ou trois ans. Nous avons mis au point un code qui permettait aux gens de venir et de se faire donner une date. Notre problème ne vient pas des conseillers juridiques mais des conseillers en immigration. Certains ne s'occupent pas des dossiers. D'autres cas ont dû être reportés parce qu'il arrive très souvent qu'il ne s'agit pas d'une vraie maladie ou d'une autre excuse. Très fréquemment, ces cas n'avancent pas. J'ai mis au point un certain nombre d'autres choses qui ont donné des résultats.

Maintenant, à Vancouver, j'ai le plaisir de vous annoncer que nous pouvons entendre ces causes en moins de six mois. Avant, on ne donnait même pas de date d'audience avant un an. Aujourd'hui, nous pouvons prévoir les cas qui seront entendus en septembre ou en octobre.

La présidente: Merci.

Madame Meredith.

Mme Meredith: Merci, madame la présidente. Je tiens à dire que, pour ma part, je ne me préoccupe pas du fait que vous n'ayez pas d'expérience des ONG ou de ces communautés. Je trouve très rafraîchissant d'avoir quelqu'un qui, je l'espère, a l'esprit ouvert.

Je tiens à poursuivre dans le même ordre d'idées, et je ne veux pas être méchante en disant cela, mais de toute évidence votre nomination a un caractère politique. Vous avez reconnu que c'était un député fédéral qui vous avait demandé de poser votre candidature. Avez-vous constaté que la plupart des gens qui travaillent avec vous à la Section d'appel...et j'imagine que vous entendez tous les appels, pas seulement ceux d'un certain secteur. Par exemple, nous avons entendu des gens dire qu'ils entendaient des appels de secteurs précis: du Sri Lanka, de l'Inde...

M. Singh: Non, nous entendons tous les appels.

Mme Meredith: Diriez-vous que la plupart des membres de la Section d'appel ont des antécédents semblables aux vôtres, à savoir qu'ils ont l'esprit ouvert et qu'ils n'ont pas de parti pris?

M. Singh: Je crois que la composition de la Section demeure très diverse. Je pense qu'on y retrouve une représentation équitable de tous les segments de la société. Et j'en suis très heureux. Il n'y a pas d'idéologie dominante. Je pense que la représentation est très équitable. De même, depuis 1993, nous siégeons individuellement, parce qu'à l'origine la loi prévoyait des commissions de trois membres - nous siégions à trois - mais avec les contraintes financières et tout le reste, je suis heureux de vous dire que dans 90 p. 100 à 95 p. 100 des cas, nous siégeons seuls.

Mais, en ma qualité de vice-président adjoint, pour des raisons d'uniformité, il m'arrive parfois de siéger à Toronto pour m'assurer de garder le cap. C'est parce qu'il se faut se conformer à l'intention du législateur dans tous les cas, et c'est ce que nous faisons. Nous ne sommes que 20 personnes en région et nous nous connaissons tous. Si quelqu'un s'écarte du peloton, c'est tout le monde que ça regarde.

Mme Meredith: Donc, ce que vous me dites, si je vous comprends bien, c'est qu'il y a des freins et des contrepoids au sein de votre propre Commission, et ainsi on s'assure de ne pas faire à Vancouver ce qu'on ne fait pas non plus à Toronto ou à Montréal, et l'on assure une certaine uniformité.

.1710

M. Singh: Tout à fait, madame. La semaine dernière, nous avons tenu une conférence nationale qui a duré une semaine. Nous nous sommes rencontrés pendant quatre jours pour faire cela seulement, parce que nous voulons être sur la même longueur d'onde. Si une personne est entendue à Montréal ou à Toronto ou à Vancouver ou à Edmonton ou à Calgary, cette personne a droit au même traitement. Si les faits sont les mêmes, la décision doit être la même, si bien que les gens peuvent s'attendre à un certain résultat selon les circonstances où ils se trouvent. Nous tâchons d'être uniformes autant qu'il est humainement possible de le faire. Nous avons tous nos partis pris, il y a des moments où nous ne pouvons vraiment pas... Mais dans l'ensemble, si une décision s'écarte des autres, ce sont tous les membres qui s'en préoccupent.

Mme Meredith: Vous avez parlé de la pression qu'exerce la charge de travail à Vancouver. Avez-vous constaté si la charge de travail à Vancouver était, disons, plus grande qu'à Toronto ou Montréal? Avez-vous plus d'audiences?

M. Singh: Je crois qu'il y a eu partout une augmentation des parrainages, parce qu'au cours des six derniers mois ou de l'année dernière, nous avons eu plusieurs cas de certains types de certains pays - j'imagine que les agents des visas vidaient leurs bureaux. Ça vient par vague parfois, comme 300 dans un mois à Vancouver. Je crois que tout est plus ou moins réglé. Nous avons ouvert un autre tribunal à Vancouver et c'est la raison pour laquelle nous pouvons entendre les appels plus rapidement. Nous avons six commissaires à Vancouver. Chaque tribunal entend au moins deux causes par jour, et nous avons donc trois tribunaux qui fonctionnent en même temps. Si un tribunal se trouve à Calgary, nous en aurons alors deux à Vancouver, parce que l'Alberta est une province distincte.

Mme Meredith: Corrigez-moi si j'ai tort. Vous êtes à la Section d'appel, vous n'entendez donc que les causes où le parrainage a été refusé pour une raison quelconque. Vous me dites que vous avez été témoin d'une augmentation de ces causes au cours de la dernière année?

M. Singh: Oui.

Mme Meredith: Constatez-vous une baisse maintenant?

M. Singh: Je crois qu'il y a eu une baisse. Depuis septembre, nous sommes revenus à notre niveau habituel. À Vancouver, nous pouvons avoir 90 appels par mois, moins de 100 et plus de 80, et c'est revenu à ce niveau. Mais il y a eu des moments, comme au printemps de 1995 je crois, où l'on a vu des augmentations soudaines dans les appels relatifs au parrainage.

Pour ce qui est des déportations, comme vous le savez, le projet de loi C-44, qui est entré en vigueur l'an dernier, a eu pour effet de nous retirer notre compétence, parce que les ministres ont jugé que si une personne pose un danger au Canada, nous ne sommes pas autorisés à l'entendre. Cela va abaisser le nombre de causes à Vancouver, en fait il y en a très peu.

Mme Meredith: Je ne veux pas m'attarder à cela, mais la charge de travail est-elle la même à Toronto, à Montréal, ou est-on plus occupé à Vancouver, avez-vous une charge de travail plus lourde?

M. Singh: Je crois qu'il y a une petite différence. Il y a plus de causes de déportation à Toronto qu'à Vancouver. Nous avons chez nous davantage de causes relatives au parrainage qu'à la déportation.

Mme Meredith: Donc, c'est beaucoup plus la situation qui varie que le nombre de causes.

M. Singh: C'est exact.

Mme Meredith: Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci. M. Dhaliwal est le prochain.

M. Dhaliwal: Je ne sais pas si je peux faire cela, mais je voulais vous demander, pour ce qui est des droits de la personne et étant donné que vous avez été vice-président de...

M. Singh: Vice-président adjoint, et seulement à titre intérimaire.

M. Dhaliwal: J'ai la certitude que cela va changer. Je veux vous demander, parce que j'ai été porte-parole pour les droits de la personne et particulièrement pour la situation des droits de la personne au Pendjab, où la situation est très grave - j'y ai été - si, à votre avis, les commissaires sont bien informés des violations des droits de la personne qui ont eu lieu en Inde, particulièrement dans les régions où il y a des troubles comme au Pendjab, au Cachemire et au Nagaland?

M. Singh: Monsieur, dans les causes de parrainage, la question des droits de la personne se pose d'une façon très indirecte, parce que quelqu'un peut dire que ses parents ne peuvent sortir de chez eux, ils sont vieux, ils sont malades, s'il vous plaît, laissez-les entrer. C'est dans ce sens. Mais ce n'est pas nous qui déterminons le statut de réfugié, donc cela n'entre pas en compte, sauf pour les personnes qui ont commis des actes criminels après avoir reçu le statut de réfugié au sens de la Convention - et il y a aussi les motifs d'humanité et de compassion. On nous les signale parce qu'une partie ou l'autre nous le mentionne.

.1715

M. Dhaliwal: Permettez-moi de m'attarder à cela. Lorsque j'étais en Inde, on m'a dit que80 p. 100 des adoptions étaient rejetées à New Delhi. Dans mon propre bureau, je reçois des tas de gens qui ont des difficultés en matière d'adoption.

Recevez-vous plusieurs appels en matière d'adoption, et quel pourcentage d'entre eux reçoit une réponse positive au niveau de l'appel?

M. Singh: Je suis désolé, je ne peux pas vous le dire. Nous devons bien avoir des dossiers quelque part, mais nous ne voyons pas les chiffres.

Je suis d'accord avec vous. Tout comme je l'ai dit à votre collègue, il y a beaucoup de dossiers qui sont des cas d'adoption de l'Inde, particulièrement du Pendjab. Nous en recevons.

Il y a eu des changements aux règlements, qui ont pris effet à certaines dates - certains l'an dernier, certains il y a deux ans - parce qu'on abusait du processus. Je ne veux pas parler de la loi. C'est votre travail à vous. Mais il y a eu des changements aux règlements, et nous y donnons suite.

Bien sûr, ces causes sont adressées à la Cour supérieure où l'on rend un jugement final.

Je ne peux absolument pas vous dire si les réponses sont positives ou négatives, parce que dans chaque cause, la décision est prise au vu des faits et de la preuve.

[Français]

La présidente: Monsieur Nunez, avez-vous d'autres questions?

M. Nunez: Oui. Vous n'avez pas indiqué dans votre curriculum vitae quand vous aviez été nommé pour la première fois ni la deuxième fois. Vous n'avez pas indiqué non plus combien de langues vous parlez.

[Traduction]

M. Singh: Le pendjabi est ma langue maternelle. Dans l'État du Pendjab, en Inde, c'était ma langue maternelle. Il y a longtemps que je suis parti de là parce que j'étais chercheur atomiste. Je suis donc parti de chez moi très tôt, mais je parle et comprends très bien le pendjabi ainsi que l'ourdou, qui était la langue d'enseignement chez nous. C'était la langue officielle du Pakistan. Ce sont donc les deux autres langues que je connais bien.

Je pouvais traduire des textes en russe, avec l'aide d'un dictionnaire, parce que nous devions apprendre le russe. Mais je n'en ai pas une connaissance étendue. Dans le temps, je pouvais traduire des textes scientifiques. Il y a longtemps que je n'en fais plus. Je n'ai donc pas une connaissance approfondie du russe.

[Français]

M. Nunez: Si les délais ne sont pas très importants à Vancouver, si la période d'attente y est seulement de six mois, pourquoi d'autres commissaires doivent-ils se rendre à Vancouver?

[Traduction]

M. Singh: Nous ne recevons pas tellement de commissaires de l'extérieur. Un commissaire vient justement d'être confirmé...

M. Nunez: Mme Teitelbaum a dit avoir été à Vancouver.

M. Singh: Elle y est venue il y a quelques années...

M. Nunez: Pourquoi?

M. Singh: ...pas l'an dernier ou cette année. Ma collègue, Mme Teitelbaum, est venue à Vancouver, si je me souviens bien, il y a au moins quatre ans.

Il y a parfois des commissaires qui changent de région afin d'assurer l'uniformité. C'est pourquoi j'ai siégé à Toronto pendant deux semaines l'an dernier: ainsi, je pouvais voir les causes qu'il y avait là. Il y a peut-être des choses que je pourrais apprendre, des choses positives sur la façon de procéder, je vois s'il y a des choses qu'on fait mieux dans une autre région. Mais habituellement, nous ne voyageons pas pour le plaisir.

[Français]

M. Nunez: Est-ce que vous entendez des causes de revendicateurs du statut de réfugié qui viennent de l'Inde, ou du Punjab?

[Traduction]

M. Singh: Non, nous n'entendons pas ces causes à la Section d'appel. On les entend à la Section du statut de réfugié. Nous entendons des appels seulement si l'agent des visas a refusé aux parents de quelqu'un l'entrée au Canada, ou s'il s'agit de déporter quelqu'un qui a commis un crime et qui n'est que résident et non citoyen du Canada. Ce sont essentiellement les causes que nous entendons. On peut aussi ajouter à cela les réfugiés au sens de la Convention qui ne sont pas immigrants reçus, qui ont le statut de réfugié au sens de la Convention mais qui ont commis un acte criminel. Dans ces cas-là, nous pouvons entendre l'appel s'il y a des motifs d'humanité ou de compassion.

La présidente: Madame Meredith?

Mme Meredith: Ça va.

La présidente: Je tiens à remercier M. Singh d'avoir témoigné devant le comité. Je lui souhaite bonne chance.

M. Singh: Merci.

[Français]

La présidente: Nous recevons maintenant M. Stéphane Handfield, qui est membre à temps plein de la Section du statut de réfugié au bureau régional de Montréal.

Bienvenue, monsieur Handfield.

.1720

M. Stéphane Handfield (membre à temps plein, Section du statut de réfugié, Bureau régional de Montréal, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada): Merci.

La présidente: Nous allons commencer par M. Nunez, s'il vous plaît.

M. Nunez: Je lis votre curriculum vitae et j'y vois que d'octobre 1993 à ce jour, vous étiez à votre propre compte, à Montréal. «Ce jour», c'est quand? Il n'y a pas de date dans votre curriculum vitae.

M. Handfield: Je crois que c'est le curriculum vitae que j'avais fait parvenir en vue d'être nommé à la Commission. Il couvre donc la période allant jusqu'en décembre 1993.

M. Nunez: C'est un vieux curriculum vitae.

M. Handfield: C'est le premier que j'avais envoyé à la Commission.

M. Nunez: Vous écrivez: «Associations professionnelles: 1992 à ce jour, membre du Barreau du Québec». Vous en êtes toujours membre?

M. Handfield: Oui.

M. Nunez: Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment vous avez été nommé commissaire? Qui a recommandé votre candidature?

M. Handfield: J'ai fait parvenir mon curriculum vitae. J'avais été mis au courant qu'il y avait une annonce dans la Gazette. Quant à ceux qui m'ont référé, je n'en ai aucune idée. Je crois que j'avais annexé à mon curriculum vitae certaines lettres de mes employeurs précédents. Je ne sais pas si vous les avez, mais je crois avoir annexé ces lettres.

M. Nunez: Quelle part a pris l'ancien ministre, André Ouellet, dans votre nomination?

M. Handfield: Je n'en ai aucune idée. Il faudrait lui poser la question.

M. Nunez: Non, je vous la pose à vous.

M. Handfield: Je n'en ai aucune idée.

[Traduction]

La présidente: La question est irrecevable, monsieur Nunez.

[Français]

M. Nunez: Est-ce qu'il y a participé ou pas? Est-ce qu'il a recommandé votre candidature?

M. Handfield: Madame la présidente, je n'en ai aucune idée. Il faudrait poser la question àM. Ouellet.

M. Nunez: Il y a beaucoup d'allégations à cet effet, vous savez.

M. Handfield: Je ne peux rien vous dire de plus.

La présidente: M. Handfield a répondu. Avez-vous une autre question, monsieur Nunez?

M. Nunez: Oui. Comment s'est produit le renouvellement de votre mandat comme commissaire? Est-ce que c'est la Commission Fairweather qui a examiné votre renouvellement ou est-ce directement le ministre qui vous a nommé?

M. Handfield: J'ai fait parvenir une lettre à Mme Mawani, qui est présidente de la Commission, lui disant que je voulais que mon mandat soit renouvelé. Je crois que mes évaluations, tant informelles que formelles, faites par mes superviseurs ont été envoyées à la présidente. Après m'avoir envoyé une note de service confirmant mon renouvellement, on a mentionné qu'effectivement, ma renomination était parmi les premières qui avaient été évaluées par le comité Fairweather.

M. Nunez: Encore une fois, vous n'avez aucun lien de parenté ou autre avec M. Ouellet?

M. Handfield: Je n'ai aucun lien de parenté avec lui. Madame la présidente, je trouve la question de M. Nunez un peu déplacée.

La présidente: Je suis d'accord avec vous.

M. Nunez: Permettriez-vous que quelqu'un qui serait interrogé devant vous, alors que vous siégez comme commissaire, vous dise que votre question est déplacée? Est-ce que vous accepteriez cela?

La présidente: Monsieur Nunez, ce n'est pas une question. S'il vous plaît, on a déjà posé des balises aux questions que nous allions poser.

M. Nunez: Mais vous n'êtes pas présidente pour défendre quelqu'un. Votre commentaire est totalement inacceptable quand vous dites que vous êtes d'accord avec lui. Ce n'est pas votre rôle de présidente que de faire cela. Vous avez dit que vous étiez d'accord avec lui.

La présidente: Je suis d'accord que la question est hors du mandat de ce comité.

M. Nunez: En tout cas, j'ai ici le résumé des décisions que vous avez rendues. En 1994, vous avez rendu 33 décisions positives et 40 négatives; en 1995, 20 décisions positives et 54 décisions négatives; en 1996, jusqu'à la fin de mars, vous avez rendu seulement 4 décisions positives et 13 négatives. Comment expliquez-vous l'énorme différence entre vos décisions et celles de M. Kafai et Mme Zambelli?

M. Handfield: Je me fie peu aux chiffres. On peut leur faire dire ce que l'on veut. Maintenant, il faudrait voir dans quel pays ces gens ont siégé par rapport à ceux où moi j'ai siégé.

.1725

Je décide d'un dossier en fonction de la preuve au dossier, de la crédibilité du témoignage, de la loi et de la jurisprudence des tribunaux supérieurs. Croyez-moi, monsieur Nunez, cela ne me fait aucunement plaisir lorsque j'ai à dire non à un revendicateur.

M. Nunez: De quelle région vous occupez-vous?

M. Handfield: Depuis que je suis à la Commission, on a commencé à me faire siéger dans les pays du Maghreb, soit la Tunisie, le Maroc et l'Algérie entre autres. On m'a particulièrement affecté à l'Algérie.

M. Nunez: L'Algérie.

M. Handfield: Oui.

M. Nunez: Où il y a énormément de problèmes.

M. Handfield: Oui.

M. Nunez: Vous avez, selon votre curriculum vitae, été détective dans les magasins. C'était quoi, cet emploi?

M. Handfield: J'ai commencé cela lorsque j'étais aux études. C'était un travail de détective. L'expression anglaise est «floor walker». Il s'agit d'enquêter sur les vols internes, les vols commis par les clients des magasins.

M. Nunez: Dans votre curriculum vitae, je ne vois aucune expérience en matière d'immigration ou en matière de réfugiés avant votre nomination au poste de commissaire.

M. Handfield: En ce qui a trait à l'immigration, j'ai pratiqué dans le domaine du droit criminel et la majorité de ma clientèle était composée d'immigrants.

Lorsque j'ai travaillé au contentieux du service juridique de la Sûreté du Québec, j'ai eu à travailler avec la Loi sur l'immigration.

M. Nunez: Ce que je ne comprends pas encore, c'est le taux de vos acceptations. Est-ce le plus bas à Montréal?

M. Handfield: Je n'en ai aucune idée. Je ne le crois pas.

M. Nunez: Avez-vous des évaluations?

M. Handfield: Oui. Une formelle et une informelle. Je peux les qualifier de A1, si vous le permettez.

[Traduction]

La présidente: Madame Meredith.

M. Dhaliwal: Elle est très heureuse.

Mme Meredith: Eh bien, contrairement à mon collègue, je ne suis pas du tout préoccupée par le fait que vous n'avez pas une longue expérience des groupes qui militent en faveur des réfugiés ou comme avocat spécialiste de l'immigration. Je ne crois pas que cela constitue une qualité essentielle. Cela permet peut-être à quelqu'un de bien comprendre ce qui se passe, mais je tiens à dire que votre dossier est probablement l'un des plus équilibrés que j'aie vu. Chose certaine, il est tout à fait différent de plusieurs autres.

J'aimerais cependant revenir à quelque chose que M. Nunez a mentionné et où vous sembliez hésiter à répondre. Je serai franche. Comment avez-vous appris que ce poste existait? Comment avez-vous obtenu ce poste? Considérez-vous que vous avez été nommé à ce poste en raison de vos affiliations politiques?

[Français]

M. Handfield: J'ai vu dans la Gazette qu'il y avait des postes vacants et j'ai fait parvenir mon curriculum vitae.

[Traduction]

Mme Meredith: Donc, vous avez posé votre candidature à ce poste en répondant essentiellement à une petite annonce, qui est parue dans la Gazette, et vous avez été engagé sans avoir eu le moindre contact direct avec un député fédéral ou quelqu'un occupant un poste politique.

[Français]

M. Handfield: Comme je le répète, j'ai fait parvenir mon curriculum vitae et on m'a appelé pour me dire que j'étais nommé.

[Traduction]

Mme Meredith: D'accord. Encore là, je suis franche. Vous m'avez l'air un peu jeune pour occuper ce poste. Quand on occupe ce genre de poste, c'est habituellement parce qu'on a une certaine expérience de la vie. Est-ce que cela vous manque lorsque vous entendez des causes? Ce n'est pas que je veux exercer de la discrimination fondée sur l'âge, mais ne croyez-vous pas que c'est un problème pour vous?

[Français]

M. Handfield: En ce qui concerne mon âge, je n'y peux rien. Il faudrait peut-être blâmer mes parents s'il y a quelqu'un à blâmer.

Non, je ne crois pas que cela me désavantage. Bien au contraire, à la CISR, toutes les couches de la société étaient représentées; entre autres, nous avions des femmes commissaires, des hommes, des représentants des communautés culturelles, mais les jeunes étaient absents. Or, je pense qu'il est important, dans un tribunal des droits de l'homme, où plusieurs revendicateurs qui passent devant nous sont quand même assez jeunes, d'avoir la vision des jeunes.

.1730

Dans les pays dont je m'occupe, les revendicateurs que j'entends sont souvent des jeunes. À mon avis, ils se sentent plus à l'aise de pouvoir raconter leurs histoires à un jeune qui peut les comprendre et qui vit les mêmes choses qu'eux. Je ne veux pas dire que je vis les mêmes problèmes qu'eux, mais du moins, lorsqu'on est jeunes, on a tous les mêmes ambitions.

[Traduction]

Mme Meredith: D'accord.

Vous siégez seulement à Montréal? C'est la seule ville où vous entendez des causes?

[Français]

M. Handfield: Oui.

[Traduction]

Mme Meredith: Et il y a quelque chose que je n'ai pas entendu. Vous dites que vous vous occupez de la Tunisie, du Maroc, de l'Algérie et d'un autre pays, dont je n'ai pas entendu le nom.

[Français]

M. Handfield: Excusez-moi, je n'ai pas compris. Je ne siège pas exclusivement par rapport à ces pays. Cependant, mes superviseurs m'ont qualifié de spécialiste des pays du Maghreb, entre autres pour la Tunisie, le Maroc et l'Algérie.

[Traduction]

Mme Meredith: Merci.

La présidente: Merci, madame Meredith.

Monsieur Cullen.

M. Cullen: Merci, madame la présidente.

Monsieur Handfield, simplement à titre de curiosité, quel est le pourcentage des audiences qui se déroulent à Montréal en anglais et en français? Je veux seulement avoir une idée.

[Français]

M. Handfield: Cent pour cent en français.

M. Cullen: Cent pour cent?

M. Handfield: Oui, en français, mais ce n'est pas moi qui décide.

M. Cullen: Oui, je comprends. Merci.

M. Nunez: Y a-t-il eu des plaintes contre vous?

M. Handfield: Que je sache, il y a eu une plainte qui est actuellement à l'étude. L'enquête n'étant pas terminée, on n'a pas décidé si la plainte était fondée ou non. J'aimerais ne pas en discuter puisque l'enquête est en cours.

M. Nunez: Par qui a-t-elle été déposée?

M. Handfield: La plainte a été déposée par un employé.

M. Nunez: Et qui traite cette plainte?

M. Handfield: Elle passe par le processus régulier.

M. Nunez: Quel est-il?

M. Handfield: Ce sont les personnes responsables de recevoir les plaintes.

M. Nunez: Oui?

M. Handfield: Oui, j'ai été convoqué par une personne qui est directrice régionale en personnel. C'est la seule personne que j'ai rencontrée à ce jour. L'enquête est en cours. On n'a pas encore décidé si elle était fondée ou pas.

M. Nunez: Et vous ne voulez pas mentionner la nature de la plainte?

M. Handfield: Non, étant donné que l'enquête est en cours et qu'il n'a même pas été décidé si elle était fondée ou pas.

La présidente: Non, non.

[Traduction]

Voulez-vous me laisser présider? Merci beaucoup.

J'ai autorisé trois questions, mais pas une de plus. Quelqu'un veut savoir ce que je pense de cela. Cela s'applique au fait qu'on a reconduit la nomination d'un membre de la Commission. Je ne permettrai pas d'autres questions sur les détails de cette affaire parce qu'elle est en cours. Merci.

Monsieur Nunez.

[Français]

M. Nunez: Oui. Plus tôt, vous n'avez pas répondu à la question: est-ce que votre renouvellement a passé par la Commission Fairweather ou si elle est allée directement au ministre?

M. Handfield: Comme je crois vous l'avoir déjà dit, dans une note que j'ai reçue - je crois que c'était du département des communications de la CISR - , on mentionnait que je faisais partie des premiers renouvellements dont les noms avaient été référés par le comité Fairweather. J'ai la lettre ici.

La présidente: D'autres questions, monsieur Nunez?

M. Nunez: Non.

La présidente: Parfait.

[Traduction]

Madame Meredith?

Mme Meredith: Non.

La présidente: Y a-t-il d'autres questions du parti ministériel?

[Français]

Merci, monsieur Handfield. Je vous souhaite plein succès.

[Traduction]

Je tiens également à remercier M. Philip Palmer qui a été des nôtres aujourd'hui.

Chers collègues, je vous remercie. Nous reprendrons jeudi à 15 h 30, salle 209; nous étudierons alors l'ébauche du rapport sur l'accord Canada-États-Unis.

Merci beaucoup. La séance est levée.

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