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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 9 mai 1996

.0906

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Whelan): La séance est ouverte.

Jim Peterson arrivera sous peu; nous commencerons néanmoins tout de suite l'audition du premier témoin, de la Fédération canadienne du travail, M. McCambly.

Vous aimeriez peut-être nous présenter la personne qui vous accompagne.

M. James McCambly (président, Fédération canadienne du travail): Je suis accompagné ce matin de Patricia Parlulekar, mon adjointe.

Nous voulons vous parler du projet de loi traitant de l'assurance-chômage et de l'abaissement du maximum de la rémunération assurable de 815 $ à 750 $ par semaine qui résulte en un versement maximal de 413 $.

Cette mesure législative peut sembler n'être qu'une formalité, mais le Comité des finances doit examiner certaines questions qui sont extrêmement importantes et pertinentes. C'est la seule occasion qui se soit offerte à nous de vous les signaler.

Premièrement, n'oubliez pas que la réduction de ces versements résidera en des économies dont la totalité sera versée au Trésor.

Il y a déjà eu d'importantes réductions des prestations d'assurance-chômage par suite desquelles environ la moitié, et peut-être même moins de la moitié, des chômeurs ont pu retirer de l'assurance-chômage. Tout le monde sait que ce changement énorme s'est soldé par une augmentation des réserves qui ont été versées au Trésor et qui servent maintenant à combler le déficit.

Cette modification-ci peut sembler de peu d'importance en comparaison.

C'est aussi bien peu en comparaison au projet de loi C-12, qui en est maintenant à l'étape de l'examen article par article, mais c'est lié à ce projet de loi. Nous avons présenté un long exposé sur le projet de loi C-12 au Comité des ressources humaines. Je n'ai pas l'intention de le répéter ici, mais certains des aspects que nous y abordions sont importants. Je vous en toucherai quelques mots car ils nous apparaissent significatifs pour un comité qui traite des finances générales du gouvernement.

Tout d'abord, reconnaissons que la caisse d'assurance-chômage n'est pas à sec. On envisage maintenant une réserve de 5 à 9 millions de dollars. C'est probablement la seule institution nationale publique qui n'ait ni dette ni déficit.

Cette caisse ne crée pas un fardeau pour les contribuables. Elle est financée à même les cotisations versées par les employeurs et les employés et, aux termes de la loi, elle doit rester solvable. Tout déficit ou excédent est compensé par une augmentation ou une diminution de cotisations. La caisse peut faire des emprunts temporaires au Trésor, mais ces sommes doivent être remboursées avec intérêt.

Sachant cela, examinons maintenant quelques questions touchant le Trésor, le projet de loi C-12 et les changements envisagés par le gouvernement.

À partir du 1er avril 1996, le gouvernement fédéral ne versera plus aux apprentis d'indemnités de subsistance ou de déplacement provenant du Trésor. Pendant les deux semaines précédant le versement de prestations d'assurance-chômage, les apprentis ne recevront rien. Nous estimons qu'on devrait puiser dans la caisse d'assurance-chômage pour verser un supplément de revenu aux apprentis, mais on ne l'a pas fait. Nous sommes d'avis que ce changement, particulièrement le fait de refuser toute forme de supplément de revenu pendant les deux premières semaines, pourrait très bien détruire le programme d'apprentissage pour bien des métiers au Canada.

.0910

Je suis coprésident national du comité sur l'apprentissage de la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre. Une réunion est prévue en juin à laquelle participeront des représentants des employeurs et des employés qui examineront les conséquences possibles de cette loi. Je vous le signale, parce qu'il s'agit en fait d'une réduction du soutien du revenu accordé sous forme de prestations d'assurance-chômage, sommes qui seront versées directement au Trésor. Il semble que le Trésor ne puisse plus ou ne veuille plus financer des programmes aussi importants que les programmes d'apprentissage.

Depuis longtemps, nous sommes d'avis que la caisse d'assurance-chômage devrait être un régime fiduciaire administré par un conseil indépendant composé des représentants des milieux d'affaires et ouvrier. Ce conseil déterminerait à quelles fins autre que le soutien du revenu pourrait servir la caisse. Il ne contrôlerait pas nécessairement le régime, mais il pourrait à tout le moins guider le gouvernement à ce chapitre.

Notre fédération s'oppose fermement au projet de loi C-12, pas seulement parce qu'il pénalise sévèrement les chômeurs qui font fréquemment appel à l'assurance-chômage mais aussi parce qu'il entraînera de nombreuses réductions des prestations et de l'admissibilité aux prestations. Il propose de permettre toute une gamme d'emplois abusifs de la caisse d'assurance-chômage. Il légitimerait l'emploi des cotisations d'assurance-chômage à des fins autres que le soutien du revenu, la formation ou l'aide aux chômeurs, des fins qui n'ont jamais été approuvées par les cotisants. Cela m'apparaît d'autant plus important qu'on compte, avec ce projet de loi, verser davantage d'argent au Trésor.

Si le gouvernement tient à réduire les cotisations ou à constituer une réserve pour le soutien du revenu des chômeurs, il doit d'abord éliminer les dépenses qu'il se propose de faire sous forme de prestations d'emploi. La Fédération canadienne du travail s'oppose à ces nouveaux programmes qui, d'après nous, constituent une manipulation du marché, particulièrement si on se sert des fonds de la caisse d'assurance-chômage pour les financer. De plus en plus, le gouvernement se sert des cotisations versées par les employeurs et les employés pour l'assurance-revenu pour financer des programmes qui ne sont pas toujours souhaités.

Actuellement, les cotisations d'assurance-chômage représentent environ 18 milliards de dollars - approximativement deux milliards de dollars de plus que ce qu'on perçoit en TPS; il s'agit donc d'une source considérable d'argent. L'ancien gouvernement a amorcé une tendance que le gouvernement actuel semble vouloir accentuer: l'emploi de la caisse d'assurance-chômage comme s'il s'agissait de taxes ordinaires versées au Trésor. Nous estimons que les cotisations d'assurance-chômage sont bien différentes de la TPS, de l'impôt sur le revenu des particuliers ou d'autres sources de revenu. Elles doivent être considérées comme des cotisations à une caisse, et, à ce titre, on ne doit en faire usage qu'avec la plus grande prudence.

Pourquoi alors sommes-nous ici et que demandons-nous à votre comité? Le projet de loi abaissera à 750 $ le maximum hebdomadaire de la rémunération assurable, ce qui entraînera un versement maximal de 413 $. C'est un changement relativement négligeable si on le compare aux autres points que j'ai mentionnés, mais vous êtes en mesure d'agir à cet égard. Nous aimerions que votre comité, dans la mesure du possible, limite les versements d'argent au Trésor et insiste pour que les fonds d'assurance-chômage servent au soutien du revenu des travailleurs sans emploi ou en formation. Ces sommes ont été versées à la caisse d'assurance-chômage, mais elles sont conservées dans la réserve du Trésor.

.0915

Essentiellement, ce sont là nos attentes. On nous a dit que cette réserve était constituée en prévision des périodes de difficultés économiques. Honnêtement, nous n'y voyons pas d'objection, et nous sommes conscients des problèmes auxquels le gouvernement fait face en matière de réduction du déficit. Mais nous n'approuverons la constitution d'une réserve que si on nous garantit qu'elle ne servira qu'au soutien du revenu. Il ne faut pas qu'on permette l'accumulation de sommes si considérables d'argent dans les coffres du Trésor pour des fins autres que le soutien du revenu.

La vice-présidente (Mme Whelan): Merci.

Madame Lalonde.

[Français]

Mme Lalonde (Mercier): Bonjour, monsieur McCambly, et bonjour à tous.

Monsieur McCambly, le gouvernement, en vertu de la loi, est le fiduciaire des travailleurs et des employeurs. Or, il se comporte étrangement, et on le voit très clairement dans le projet de loi C-31. Pour ce qui est du projet de loi C-12, c'est perdu dans le reste.

Dans le projet de loi C-31, aux articles 42 à 48, on voit très clairement que ce qui est fondamental pour le gouvernement, c'est de réduire le salaire maximum assurable. Il le fait passer de 42 400 $ à 39 000 $, ce qui fait perdre 900 millions de dollars à la caisse d'assurance-chômage. Ce faisant, il donne 500 millions de dollars à des entreprises qui, dans la très grande majorité des cas, sont de grandes entreprises qui peuvent payer ces salaires-là. Les PME qui peuvent payer de tels salaires sont rares. Il donne aussi 400 millions de dollars aux travailleurs qui gagnent entre 39 000 $ et 42 400 $; ce sont normalement des travailleurs dans les grandes entreprises qui font du temps supplémentaire.

Ces 900 millions de dollars coûtent actuellement 200 millions de dollars; c'est-à-dire que les cotisations donnent 900 millions de dollars et que les prestations coûtent 200 millions de dollars. Comment compense-t-on ce manque à gagner de 900 millions de dollars de la caisse? Par les cotisations des travailleurs, des travailleuses qui font de une à 15 heures et des entreprises qui les embauchent.

Ne trouvez-vous pas étrange que le fiduciaire, au lieu d'étendre la participation aux plus hauts salariés et aux entreprises qui les embauchent afin de permettre à tout le monde d'avoir un vrai régime d'assurance-chômage, décide de réduire le salaire maximum assurable, se privant ainsi, cette année, de un milliard de dollars? Il y aura un milliard de dollars de moins dans la caisse de l'assurance-chômage.

À la fin de 1996, on prévoit qu'on aura 5,5 milliards de dollars, si on ne fait pas de réforme. Avec la réforme, ce sera 4,5 milliards de dollars. Ce sont les chiffres du ministère du Développement des ressources humaines, que tout le monde peut avoir.

Donc, l'intention du gouvernement est de faire des coupures, mais aussi de faire en sorte que la tâche de la stabilisation économique et celle de la réduction artificielle du déficit soit assumée par les travailleurs et les travailleuses gagnant 39 000 $ et moins et les entreprises qui les paient.

.0920

Le gouvernement oblige les PME à payer des cotisations sur la masse salariale de ceux qui travaillent de 0 à 15 heures, ce sur quoi je serais d'accord si les travailleurs étaient assurés d'avoir des bénéfices, mais on sait que ce n'est pas le cas.

Donc, on assiste à une transformation dramatique du régime d'assurance-chômage au Canada qui ne va pas dans le bon sens, parce qu'elle incite les travailleurs et les travailleuses à faire du temps supplémentaire et à avoir deux emplois. Trouvez-vous que le gouvernement fédéral est un bon fiduciaire pour les travailleurs et les employeurs?

[Traduction]

M. McCambly: Une longue observation a précédé votre courte question, mais je comprends ce que vous dites. En matière de financement, on doit accorder une attention toute spéciale à la possibilité d'augmenter les charges sociales.

Je ne vous parlerai pas de toutes les questions que nous avons soulevées relativement au projet de loi C-12, ou même de ce qui s'est passé auparavant, des compressions qui ont été effectuées par le passé. Dans bien des régions du Canada, le taux de chômage est devenu très élevé parmi nos membres - il est parfois de plus de 50 p. 100 - et le nombre de ceux qui ne sont même plus admissibles à l'assurance-chômage ne cesse d'augmenter. Les dernières modifications à la loi ne feront que compliquer les choses surtout pour ceux qui voudraient redevenir admissibles à l'assurance-chômage. Si vous n'êtes pas déjà admissible, il vous faut travailler 910 heures pour le redevenir. Cela représente 26 semaines de travail.

En période de faible emploi, les statistiques nous montrent que dans certains secteurs, le bâtiment, par exemple, on ne travaille plus en moyenne que de 500 à 600 heures. Dans une bonne année, les ouvriers du bâtiment peuvent travailler 1 300, 1 400 ou même jusqu'à 2 000 heures. C'est normal dans bien des secteurs lorsque tout va bien, mais les temps sont durs. En fait, autant les ouvriers qualifiés que les apprentis... Ces changements ont des effets désastreux sur les gens.

Je n'hésite donc pas à dire que les modifications à l'assurance-chômage nuisent beaucoup à bien des gens.

J'aimerais faire une observation personnelle. Si l'abaissement du maximum de la rémunération hebdomadaire assurable signifiait que davantage de gens devenaient admissibles à l'assurance-chômage et que la caisse de l'assurance-chômage pourrait servir à d'autres fins utiles... C'est le plus important fonds d'ajustement au Canada. Rien ne se compare à ce régime. Nous serions prêts à appuyer une réduction d'ensemble si cela signifiait que plus de gens devenaient admissibles à l'assurance-chômage et si on pouvait ainsi obtenir de l'aide pour ceux qui sont en période de transition, si on pouvait les aider à garder un peu de dignité quand les temps sont durs.

J'espère que cela répond à votre question.

La coprésidente (Mme Whelan): Monsieur Grubel.

M. Grubel (Capilano - Howe Sound): Merci, madame la présidente.

Monsieur McCambly, pour la première fois probablement, vous trouverez un ami à ce bout-ci de la table. Je suis en grande partie d'accord avec vous.

Je vous signale que j'ai prononcé un discours d'une quarantaine de minutes à l'ouverture du débat sur le projet de loi C-31, discours qui a été entièrement consacré au sujet que vous venez d'aborder. J'y ai aussi avancé deux ou trois autres arguments solides contre la politique du gouvernement actuel. J'y ai premièrement fait valoir que la structure des cotisations à l'assurance-chômage est extrêmement régressive. Les gens dont le revenu est moyen versent un pourcentage beaucoup plus important de leur revenu en cotisations d'assurance-chômage lorsqu'ils travaillent à temps plein que ne le font les riches, ceux dont le revenu est élevé.

.0925

En abaissant à 750 $ le maximum de la rémunération assurable, cela ne fait que rendre la structure encore plus régressive. On prélève sur votre chèque de paye une somme maximale en cotisations à l'assurance-chômage. Si votre revenu est de 50 000 $ par année, cette somme représentera un pourcentage plus élevé que si votre revenu annuel est de 100 000 $, et si votre revenu annuel est de 30 000 $, ce pourcentage sera encore plus élevé. C'est donc très régressif.

Il y a un autre point que vous n'avez pas soulevé. En versant les cotisations d'assurance-chômage au Trésor, on favorise la disparition d'emplois. Une bonne proportion des recettes provient de l'augmentation du coût de la main d'oeuvre qu'impose le gouvernement aux employeurs. Devant de telles augmentations des coûts que leur impose la loi et non pas les contrats, les employeurs remplaceront leurs ouvriers par des machines. C'est ce qui se passe dans une société libre.

Voilà pourquoi ce n'est pas une taxe qui sert l'intérêt général, lorsqu'on l'utilise pour financer la péréquation ou l'aide sociale. C'est une taxe qui est perçue d'un groupe précis de gens à des fins biens particulières.

Si vous me le permettez, j'ai trois questions à vous poser. Elles seront brèves et je vous les pose dans l'ordre.

Premièrement, votre personnel de recherche a-t-il tenter de déterminer quel devrait être le montant optimal de la réserve de la caisse d'assurance-chômage. Je crois que, dans le passé, on a eu tort d'abaisser les cotisations lorsque la réserve augmentait. On se fondait sur les cycles économiques, n'est-ce pas? Lorsqu'il y avait un excédent, on abaissait les cotisations, ce qui entraînait une augmentation du revenu disponible. En périodes difficiles, lorsqu'il y avait déficit, on relevait le taux des cotisations, ce qui ne faisait qu'aggraver la situation.

À mon avis, on devrait prévoir une certaine symétrie. Les sommes qui s'accumulent en périodes de prospérité devraient, en moyenne, suffirent à financer les manques à gagner en périodes difficiles; il ne serait alors pas nécessaire de rajuster le taux de cotisations en fonction des cycles économiques.

Mais il faut déterminer quelle devrait être la taille de cette réserve en période de prospérité relativement aux cotisations annuelles. J'ai calculé que, d'ici la fin de ce cycle budgétaire, les cotisations accumulées atteindront près de la totalité des dépenses annuelles de la caisse. Cela me semble beaucoup trop élevé, mais je ne peux me fonder sur de bons critères économiques. Tout ce que je sais, c'est que, dans le passé, le déficit cumulatif maximal a été d'environ 50 p. 100 des recettes totales.

Avez-vous trouvé des façons d'aider le gouvernement à trouver une formule qui lui permettrait d'établir quand la réserve est suffisante?

M. McCambly: Pourrais-je d'abord aborder ce que vous avez dit avant cela? Vous avez soulevé deux ou trois choses concernant les cotisations d'assurance-chômage et les charges sociales. Vous avez d'abord dit que c'est une taxe qui détruit les emplois. C'est vrai dans une certaine mesure, mais c'est à mon avis de peu d'importance dans la plupart des métiers. Les effets sont plus grands sur les emplois mal rémunérés, mais ne sont pas significatifs dans les autres cas.

Une chose m'apparaît toutefois importante: les cotisations d'assurance-chômage représentent environ un million à deux millions de dollars de plus que la somme perçue au titre de la TPS; or, on se plaint beaucoup plus de la TPS que des cotisations d'assurance-chômage. Manifestement, le public s'intéresse beaucoup moins aux cotisations provenant des charges sociales qu'à la TPS.

.0930

Pour ce qui est du montant optimal de la réserve, j'ignore ce qu'il est. Nous ne sommes pas opposés à l'existence d'une réserve d'environ cinq milliards de dollars. Même à six milliards de dollars, c'est encore... Je crois que le temps nous dira ce qu'est une réserve trop élevée, mais il serait sage de consulter les cotisants, de faire faire des données actuarielles au lieu de lancer un montant au hasard.

De plus, il est clair que ces réserves servent à combler le déficit qui figure dans les livres.

Est-ce qu'on parlerait d'une réserve optimale s'il n'y avait pas de déficit? Si le déficit est énorme et que les temps sont durs, il sera d'autant plus difficile de s'attaquer au déficit.

M. Grubel: C'est exact.

M. McCambly: Je n'ai donc pas de réponse précise à votre question, mais il serait sage de consulter les cotisants, d'établir ce qu'ils...

M. Grubel: Votre fédération pourrait apporter sa contribution. Je débats moi-même de la question depuis un bon moment pour tenter d'établir la position du Parti réformiste à ce sujet. J'apprécierais toute contribution objective que vous pourriez faire.

Deuxièmement, outre les activités relevant purement de l'assurance, quelles sont les autres activités qui vous déplaisent? Croyez-vous que la caisse d'assurance-chômage devrait servir au versement de prestations pour les chômeurs en formation, mais aussi à financer la formation à proprement parler?

Que pensez-vous du recours au fonds d'assurance-chômage pour le financement de programmes sociaux tels que les congés de maternité? Quelle est la position de votre fédération à ce sujet?

M. McCambly: Je commence par la deuxième question. L'Association des manufacturiers canadiens, le Congrès du travail du Canada et la Fédération canadienne du travail, en collaboration avec d'autres, ont examiné la question des prestations de maternité. J'ai été heureux de constater que le milieu des affaires comme le milieu ouvrier se sont entendus pour dire que les prestations de maternité faisait partie intégrante du rajustement du marché du travail et qu'on devrait continuer à les prélever sur la caisse d'assurance-chômage.

M. Grubel: Pour quelle raison? Ça n'a rien à voir avec le chômage.

M. McCambly: C'est une façon d'aider les femmes qui ne peuvent travailler...

M. Grubel: Ce n'est pas une réponse.

M. McCambly: Je n'ai pas l'intention d'en débattre avec vous. Je vous dis simplement que nous nous sommes entendus à ce sujet et que cela m'est apparu comme une décision très sage. Je peux vous remettre un exemplaire du document, si vous le souhaitez.

C'était ma réponse à votre deuxième question. Quelle était la première?

M. Grubel: Au sujet de la formation, doit-on non seulement verser des prestations d'assurance-chômage aux travailleurs en formation, mais aussi financer le programme de formation à même le Trésor, parce que...

M. McCambly: Ce qui me déplaît le plus, c'est qu'on envisage de financer toutes sortes de programmes fédéraux et provinciaux, telles que les subventions salariales et même certains entrepreneurs qui n'ont peut-être pas versé de cotisations. Ce sont des usages des fonds de l'assurance-chômage qui n'avaient pas été prévus à l'origine.

Pour ce qui est du soutien du revenu pendant la formation, nous n'y voyons pas d'objection. En fait, on devrait élargir la portée de ce programme. Plus nous pourrons aider les gens à réintégrer le marché du travail, mieux ce sera. Le plus difficile, c'est d'obtenir un soutien du revenu pendant qu'on suit une formation.

Cette formation peut être dispensée de différentes façons. Parfois, c'est le secteur qui s'en occupe. Parfois, c'est une entreprise de collaboration entre les milieux d'affaires et ouvrier ou entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Mais le soutien du revenu est crucial.

En ce qui a trait au financement de la formation même, nous nous sommes toujours opposés à cela, mais c'est ainsi que cela se passe en réalité. Si on accepte que les charges sociales servent au financement de la formation, si c'est entendu, nous accepterons, comme les cotisants, que ces fonds servent à cette fin puisqu'il n'y a pas d'autres sources de financement.

.0935

M. Grubel: La présidente me permet-elle une courte observation?

Ceux qui s'opposent aux prestations de maternité font valoir que le régime de l'assurance-chômage est un régime d'assurance. Toute assurance sert à vous protéger en cas de malheur, de difficultés auxquels vous ne pouvez rien. Le chômage est l'une de ces difficultés. Je suis donc heureux de verser des cotisations d'assurance-chômage pour me protéger moi-même et protéger mes amis, mes voisins et tous les Canadiens contre les souffrances associées au chômage. Ceux qui sont sans emploi ne peuvent rien y faire. Toutefois, l'idée de subventionner quelqu'un qui fait le choix délibéré de devenir enceinte et de prétendre qu'il s'agit d'une forme de protection contre une difficulté imprévue... On verse de l'argent à des personnes qui se lancent dans une entreprise coûteuse, que j'apprécie néanmoins ayant moi-même eu des enfants. Mais pourquoi devrions-nous subventionner ceux qui font ce choix délibérément? Avez-vous une réponse à ma question?

M. McCambly: Je ne sais trop quelle école vous avez fréquenté, mais je peux vous dire qu'au cours des dernières décennies, les femmes sont devenues des membres importants de la main-d'oeuvre active dont elles font maintenant partie intégrante.

M. Grubel: Ça n'a rien à voir avec la question.

M. McCambly: Au contraire, c'est très pertinent. Je répéterai simplement que je suis heureux de dire que le patronat et les syndicats se sont entendus pour dire que c'était pertinent.

M. Grubel: Merci.

La vice-présidente (Mme Whelan): Monsieur St. Denis.

M. St. Denis (Algoma): Merci, madame la présidente. J'espère que ma question est recevable, mais je m'en remets à vous.

Je voudrais poser à M. McCambly une question concernant les fonds de capital de risque des travailleurs, parce que nous ne le reverrons pas avant l'automne prochain.

Cette question relève du budget. Vous savez sans doute, comme mes collègues, que le ministre a annoncé des changements au taux incitatif, au niveau fédéral, pour les investissements dans les fonds de capital de risque des travailleurs; ce taux a baissé de 20 p. 100 à 15 p. 100 et la durée est passé de trois à cinq ans. Je crois que le ministre a pris sa décision en partie en guise d'avertissement aux fonds de capital de risque de travailleurs du Canada - non pas tant ceux du Québec, dont les investissements augmentent, mais la plupart des fonds du Canada qui n'ont pas donné le rendement escompté, sauf le respect que j'ai pour le travail que vous accomplissez. M. McCambly est président du Conseil d'administration du Fonds de capital de risque de l'Ontario, le deuxième en importance au Canada, et je sais qu'il déploie de grands efforts...

M. McCambly: C'est le Fonds de capital de risque du Canada, pas seulement de l'Ontario.

M. St. Denis: Pardon, vous avez raison; c'est un fonds canadien dont le siège social se trouve à Toronto.

C'est le Fonds de capital de risque du Canada, qui est le deuxième en importance au pays. Je ne m'attaque pas à votre fonds; seulement, je profite de votre présence ici. Je crois que le ministre voulait faire savoir que les fonds n'ont pas été investis dans les petites et moyennes entreprises comme ils auraient dû l'être.

D'après mon expérience personnelle, je peux vous dire - que j'ai vérifié auprès d'un autre fonds pour connaître le nombre de leurs employés qui s'occupent d'investissements par rapport à ceux dont la tâche est de recueillir les fonds. C'est tout à fait disproportionné. Il y a beaucoup plus d'employés qui amassent de l'argent pour le Fonds qu'il n'y en a qui investissent cet argent dans les petites et moyennes entreprises.

À votre avis, allons-nous bientôt voir la lumière au bout du tunnel? Est-ce qu'un jour les fonds de capital de risque des travailleurs du Canada seront investis à 60 p. 100 dans les petites et moyennes entreprises au lieu de 20 p. 100 comme c'est souvent le cas actuellement? La situation va-t-elle enfin s'améliorer comme vous le souhaitez et comme le ministre le souhaite certainement, de telle sorte que les petites et moyennes entreprises puissent enfin avoir leur part du gâteau et créer les emplois dont nous avons tant besoin?

.0940

M. McCambly: Je vais essayer de vous répondre brièvement. Vous ne serez pas étonné d'apprendre que c'est un de mes sujets favoris.

Notre fonds a investi la totalité des avoirs des actionnaires recueillis pendant ses quatre premières années d'existence.

M. St. Denis: Dans les petites...

M. McCambly: Oui, et nous investissons à un rythme beaucoup plus soutenu que n'importe qui d'autre au Canada, ainsi que dans des régions où cela ne s'est jamais vu. Soit dit en passant, nous n'investissons pas qu'en Ontario, pas seulement à Toronto. Nous avons un bureau à Saskatchewan. Nous avons ouvert des bureaux au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Nous ouvrirons sous peu des bureaux à London et à Ottawa. Nous nous employons activement à...

M. St. Denis: Pourquoi pas quelque part dans le Nord de l'Ontario?

M. McCambly: Non, ce sera à London.

Vous avez parlé des gestionnaires en investissements. Nous en employons actuellement 26 ou 28, ce qui est énorme.

M. St. Denis: Vous en aviez combien auparavant, Jim?

M. McCambly: Nous n'en avions aucun. Au départ, il n'y en avait pas.

M. St. Denis: Combien y en avait-il l'an dernier?

M. McCambly: Nous recrutons tous les bons candidats que nous trouvons. C'est un domaine où il est difficile de trouver de bons candidats. Il y a peu de gens au Canada qui a la formation nécessaire et qui connaissent bien le domaine. Nous avons de bons employés et nous tentons maintenant de faire passer nos investissements de 8 millions à 10 millions de dollars par mois, et plus tard à 15 millions de dollars par mois. Je peux vous dire que c'est un objectif élevé compte tenu de la prudence dont nous devons faire preuve.

M. St. Denis: Merci. Je suis heureux d'entendre qu'il y a des progrès.

En conclusion, madame la présidente, je voudrais dire que j'ai eu l'occasion de communiquer avec M. McCambly et son président pour le compte d'autres gens et qu'ils m'ont toujours bien accueilli. Ils m'ont toujours écouté, et j'en remercie M. McCambly.

M. McCambly: Soit dit en passant, j'aimerais ajouter que les modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu, auxquelles les provinces ont généralement donné suite - cinq provinces contribuent à parts égales à nos fonds, et les provinces ont généralement emboîté le pas, sauf l'Ontario qui, dans son dernier budget, a prévu une variante - ne nous semblent pas déraisonnables. Dans les circonstances, j'estime que... J'ai fait des démarches auprès du cabinet fédéral pour que des fonds de ce genre soient créés à l'extérieur du Québec. À mon avis, ils ont connu beaucoup de succès. En fait, c'est une bonne façon de s'engager à promouvoir l'investissement d'argent de Canadiens dans les entreprises canadiennes.

M. St. Denis: Merci beaucoup.

La vice-présidente (Mme Whelan): Merci, monsieur St. Denis.

Madame Brushett, je vais vous poser une petite question.

Mme Brushett (Cumberland - Colchester): Merci, madame la présidente. Bonjour.

J'aimerais revenir à ce que disait mon honorable collègue réformiste un peu plus tôt, c'est-à-dire l'idée ou le raisonnement derrière la Loi sur l'assurance-chômage - ou sur l'assurance-emploi, selon le nouveau vocable - et la politique sociale, à quel point précis la distinction ou le chevauchement entre les deux se produit ainsi que les affinités qui existent entre les deux.

Lorsqu'il est question de l'est du Canada, c'est-à-dire de la région des provinces de l'Atlantique, les gens semblent trop souvent croire que tout ce programme d'assurance-emploi n'est en réalité qu'un programme de politique sociale plutôt qu'un programme pour assurer de l'emploi. C'est cela que l'on trouve ancré dans la pensée sociale et les attitudes des gens. Qu'il s'agisse d'emploi, de revenu ou de l'orientation future autour de laquelle ils construiront leur vie, cela fait partie de la politique sociale et de leur interprétation.

Nous en avons même débattu en étudiant le projet de loi et en y apportant des amendements, et la Chambre en est saisie à l'heure actuelle, mais je ne suis pas sûre que nous en ayons assez fait.

Je ne sais pas pourquoi l'Est canadien est la seule région à se voir accuser de se servir de la loi comme politique sociale plutôt que de police d'assurance. Je me demande si votre organisme va se pencher sur cela plus longuement. Est-ce que les parlementaires que nous sommes ou les intervenants dans l'économie du Canada en général, soit la grosse, la petite et la moyenne entreprise, devraient évaluer l'ensemble de ce plan, où il commence et où il finit et comment il s'intègre dans les attitudes des gens qui l'acceptent comme faisant partie de notre politique sociale?

.0945

M. McCambly: Au départ, nous avions proposé que la Caisse d'assurance-chômage soit indépendante des recettes générales - qu'il y ait une comptabilité distincte, un budget distinct et que les cotisants en soient en partie les fidéicommis. Je crois que jusqu'ici l'on a fait sourde oreille à ces recommandations parce que la Caisse est une composante importante du financement fédéral.

Notre préoccupation la plus sérieuse c'est que la Caisse ne serve pas - et on interprète le système social de diverses façons - à des fins qui iraient au-delà de ce qui peut constituer un système de soutien du revenu. Notez bien que le chapitre n'est pas clos pour moi parce qu'il doit quand même y avoir un certain lien entre cela et les autres mesures sociales. Cela se rapproche de certaines autres mesures importantes pour la population, surtout en ces temps difficiles. Mais je crois qu'à la fois le niveau des cotisations et des prestations ou les usages que l'on fait de la Caisse devraient avoir l'approbation des cotisants.

Cela nous ramène à la question de l'administration. Je ne propose pas que le gouvernement abandonne l'administration de la Caisse, mais je crois qu'il y a là un rôle que le gouvernement semble négliger parce qu'il ne veut pas nécessairement entendre ce qu'ont à dire les cotisants.

Mme Brushett: Proposez-vous en quelque sorte une société de la Couronne ou un organisme indépendant? Comment ce conseil fonctionnerait-il?

M. McCambly: Ce ne serait pas très difficile de créer un conseil consultatif de fidéicommis soit pour remplacer ou conseiller la commission qui existe déjà, mais cet organisme devra être pris au sérieux et consulter un conseil fiduciaire de cotisants.

Mme Brushett: Et pour la formation de la main-d'oeuvre? Les syndicats disent souvent qu'ils feraient mieux dans ce domaine.

M. McCambly: L'important c'est de savoir qui sera le meilleur exécutant parce qu'avec certains de nos syndicats, de concert avec les intervenants, nous avons des installations hors pair. Ils peuvent donner une formation fantastique. Ils font souvent mieux que certains organismes publics.

Là n'est donc pas le problème. La formation peut être offerte par divers organismes. Je crois que les syndicats et le patronat vous diraient d'un commun accord qu'il est approprié de financer ou d'appuyer la formation, dans une certaine mesure.

Mme Brushett: Merci, madame la présidente. J'ai terminé.

La vice-présidente (Mme Whelan): Mme Chamberlain a une petite question.

Mme Chamberlain (Guelph - Wellington): Écoutez, je tiens à vous dire que je partage aussi certaines de vos préoccupations concernant la formation. Je ne suis pas sûre à 100 p. 100 où cela va nous mener.

Je partage aussi l'avis que vous venez d'exprimer, c'est-à-dire que certains des organismes impliqués dans la formation sont excellents. Les syndicats ont mis sur pied d'excellents programmes de formation.

On sait qu'il y a eu mauvaise utilisation et abus des fonds d'assurance-chômage par le passé. Ceci consternera peut-être certains de mes collègues, mais j'aimerais savoir plus précisément ce qu'a fait votre organisme pour décourager le travail au noir. Qu'avez-vous fait?

M. McCambly: C'est une question très difficile.

Mme Chamberlain: Je le sais.

M. McCambly: Ce n'est pas une chose que nous approuvons. À vrai dire, et cela ne se fait pas directement avec notre fédération, mais dans le bâtiment, la FL-CIO prend certaines initiatives dans ce domaine. Cela ne veut pas dire que le travail au noir n'existe que dans le bâtiment. Il y en a partout.

Mme Chamberlain: C'est vrai.

M. McCambly: On n'a qu'à ouvrir les yeux.

.0950

Nous sommes tout à fait prêts à travailler de concert avec le gouvernement ou d'autres organismes pour étudier la question ou trouver des mesures pour régler ce problème. La question est ardue, mais vous pouvez compter sur nous pour vous aider à essayer d'enrayer ce problème.

Ce n'est pas seulement une question de travail; il s'agit du financement des programmes sociaux et de toute l'assiette fiscale du pays. Le chiffre total du travail au noir représente le budget d'un pays en voie de développement. Ce n'est pas une mince affaire.

Mme Chamberlain: D'accord. Je crois que c'est l'affaire de tout le monde, mais surtout celle des syndicats, parce que cela nuit à chacun d'entre nous et à tous nos programmes sociaux.

Merci.

La vice-présidente (Mme Whelan): Je tiens à remercier M. McCambly et tous les autres. Nous avons passé outre à l'horaire prévu.

Nos témoins suivants étaient déjà en route à partir de Gaspé hier soir, mais on ne semble pas pouvoir les retracer pour le moment. Nous allons faire une petite pause de dix minutes et nous reprendrons nos travaux à dix heures.

Je tiens à remercier M. McCambly.

M. McCambly: Je pensais qu'on en avait seulement pour quelques minutes, mais il nous a fallu plus de temps que prévu.

Une voix: C'était un débat intéressant.

.0951

.1007

[Français]

Le président: À l'ordre, s'il vous plaît. Nous reprenons la séance.

Nous recevons, du Ralliement gaspésien et madelinot, M. Martial Henry, qui est organisateur des chômeurs, et d'Action Travail Denis-Riverin, M. Albert Robinson, président. Je sais qu'il vous a été assez difficile de venir nous rencontrer ce matin, et vous êtes les bienvenus. Nous allons d'abord écouter vos commentaires et par la suite nous vous poserons des questions. Ça va?

M. Albert Robinson (président, Action Travail Denis-Riverin): Avant de commencer ma présentation, je vais vous situer un peu dans le contexte et vous donner un court historique de la Gaspésie.

Depuis quelques décennies, on connaît un exode des jeunes qui a contribué largement à la baisse de l'entrepreneurship et donc aux possibilités de développement. Les programmes sociaux actuels contribuent pour leur part à une exploitation des travailleurs de la base au lieu de les rééduquer en fonction de la production de base. La nouvelle mode politique est à la culpabilisation des chômeurs et des assistés sociaux par des gouvernements qui se croient propriétaires des services qu'ils gèrent. Dans de telles situations, pourquoi demander ce qui cause l'inertie, l'attente passive des Gaspésiens?

Plus de 300 ans de volonté d'amélioration des gouvernements ont contribué à la forger. Nous devons dès maintenant canaliser cette colère montante pour oeuvrer à un changement positif et déterminant, un changement économique et de mentalités. C'est aujourd'hui qu'il faut entreprendre cela.

L'entrepreneurship, les apprentissages spécifiques et les expérimentations ne sont que quelques-unes des choses sur lesquelles on doit axer nos efforts. Quant à la concertation du milieu, s'il vous plaît, oublions cela, sauf la concertation de groupes d'individus restreints. Vous le savez, seules les Forces armées canadiennes peuvent y parvenir parce que les soldats n'ont aucun droit de parole. Il n'y a que des intérêts monétaires communs qui peuvent amener les gens à la concertation.

.1010

Les actions concrètes en vue de la consolidation des acquis et l'innovation dans la transformation de nos produits de base sont préférables comme passe-temps à tout le verbiage qu'on entend actuellement. Si sept personnes sur dix occupent un emploi saisonnier en Gaspésie à l'heure actuelle, qui doit agir pour remédier à cette situation?

Tous les organismes qu'on trouve sur notre territoire devraient orienter leurs activités en vue de créer un véritable mouvement de développement sur le terrain. La dépense de papier ne doit servir qu'à planifier des actions concrètes, si petites soient-elles, plutôt qu'à clamer nos malheurs pendant 300 autres années. L'effort de guerre doit se concentrer sur la non-productivité de notre milieu et sur la restructuration de nos richesses naturelles, ce qui doit être appuyé d'une campagne de promotion d'achats sectoriels de haut calibre.

Étant donné la situation actuelle, il est impératif d'avoir recours aux services de firmes de haut niveau ou d'universités valables. Nous nous devons de créer un véritable raz de marée, sinon on pourra apprendre via les médias, en l'an 2296, que la MRC Denis-Riverin et plusieurs autres en Gaspésie, si elles existent encore, réclament l'aide du gouvernement et la reconnaissance d'un statut particulier.

Comme au début de la colonisation, nous sommes peu nombreux comparativement au reste de la province. Notre population a augmenté dans les premiers siècles, mais les autres aussi. Nous nous sommes admirablement développés grâce aux communications modernes et aux diverses inventions et découvertes, mais les autres encore plus. Nous ne voulons pas paraître défaitistes, mais il faut se rendre à l'évidence: l'aide tant attendue ne viendra jamais.

J'aimerais vous donner un petit aperçu d'un sondage qui a été rendu public en 1991. La population de la MRC de Bonaventure, qui était de 20 616 en 1991, est passée à 19 848; celle des Îles-de-la-Madeleine est passée de 14 532 à 13 991; celle de Denis-Riverin, de 15 241 à 14 000; celle de la Côte de Gaspé, de 22 800 à 20 900; et celle de Pabos, de 23 758 à 21 712. Cela démontre les impacts des problèmes économiques que l'on vit dans nos régions et qui forcent nos jeunes à s'expatrier.

Pour ce qui est des impacts du projet de loi C-12 sur l'assurance- chômage, dans un premier temps, il est facile de comprendre que cette loi va attaquer de plein fouet les Gaspésiens et les Gaspésiennes et les habitants des provinces de l'Est dans ce qu'ils ont de plus fondamental, c'est-à-dire leur dignité.

Le Conseil du patronat dit que la réforme est bonne et qu'on devrait diminuer davantage le taux de cotisation des entreprises. Ici, en région, où on a beaucoup de travail saisonnier et de travail à temps partiel chez les forestiers, les pêcheurs, les infirmiers et les infirmières, les travailleurs du tourisme, etc., il est inacceptable qu'on mette en oeuvre cette réforme sans tenir compte des problèmes d'emploi que vivent nos régions.

La région de la MRC Denis-Riverin a actuellement un taux de chômage de 33 p. 100 . À Pabos, le taux de chômage est de 30 p. 100 et à Gaspé, de 22 p. 100, que pour ne nommer ces trois-là. Le gouvernement fédéral, qui est le chef cuisinier, nous présente un plat sans avoir au préalable obtenu notre assentiment ou sans connaître nos goûts.

On ne nous a pas demandé notre opinion avant de formuler cette réforme. Faut-il en conclure que cette consultation sera prise en considération ou si, tout simplement, cela fait partie de la stratégie du gouvernement pour se donner bonne conscience?

Messieurs, mesdames, ici, en région, notre niveau de vie est à son plus bas et les éléments de la réforme qui vont nous toucher le plus sont, dans un premier temps, l'admissibilité en heures, qui est un stratagème qui va entraîner des fautes sans précédent. Il ne faut pas oublier une chose: l'instinct de survie est là.

Une semaine de 70 heures rapportait auparavant à un forestier entre 700 $ et 750 $. Le forestier devait parfois travailler entre 70 et 80 heures durant une semaine afin d'obtenir un salaire assurable raisonnable. Maintenant, on va ramener cela à 35 heures. Cela fera en sorte qu'il ne retirera qu'un salaire de 375 $ par semaine, cela sans tenir compte des autres réformes qui entreront en ligne de compte.

.1015

Cette règle va contribuer à diminuer le salaire admissible à l'assurance-chômage et pénaliser les travailleurs à temps partiel qui, auparavant, étaient admissibles lorsqu'ils travaillaient 15 heures semaine.

Que dire, messieurs et mesdames, des nouveaux arrivants dans le système, lesquels auront à faire 910 heures pour se qualifier? Veut-on vider nos régions de notre jeunesse? Ce but a été largement atteint.

Je crois que cette réforme nous propose aussi, pour le 30 juin 1996, le barème des 14 semaines consécutives. Je connais aussi des forestiers qui, en plus de devoir subir la règle des 35 heures semaine durant une saison en forêt, seront contraints, à cause des feux de forêts, comme ce fut le cas en 1995, à des mises à pied temporaires. Ils subiront alors une perte de revenu très importante. C'est la même chose pour la pêche, où le facteur température est déterminant, et j'en passe. Il y a aussi les infirmières à temps partiel et, enfin, les petites entreprises cycliques.

Dans cette décevante réforme, on parle aussi de subventions salariales qui inciteront les employeurs à embaucher du personnel. Messieurs et mesdames, cet élément de la réforme est une copie parfaite de la politique d'embauche de la sécurité du revenu qu'on a toujours déplorée et qui a toujours eu pour effet d'occasionner des abus chez certains employeurs et d'entraîner chez les travailleurs et les travailleuses des déceptions et du désabusement.

On rencontre assez souvent des employeurs qui vont chercher des gens qui sont subventionnés pour une certaine période afin de recevoir de la formation. Dès que la période de formation est terminée, on dit au travailleur: «Je n'ai plus beaucoup de moyens et donc je n'ai plus besoin de toi pour le moment». La personne se décourage et essaie de se trouver autre chose. On se rend compte, 15 jours plus tard, que le même emploi est occupé par quelqu'un d'autre.

Le volet le plus cynique de la réforme est le service national de placement. Imaginez la trouvaille! On veut implanter un système automatisé d'information, encore sur le dos des plus démunis. On ferme des services dans les centres d'emploi et on affirme qu'on va donner un meilleur service. À qui? Aux plus instruits.

Plusieurs mesures contenues dans cette réforme ne visent que l'appauvrissement des populations régionales. Les impacts négatifs d'une éventuelle réforme en Gaspésie seront désastreuses dans nos communautés.

L'argent est le nerf de la guerre. En plus de connaître des problèmes de démographie énormes, nous connaîtrons un appauvrissement très marqué. Nous allons connaître une remontée du taux de suicide de nos jeunes, la dislocation des noyaux familiaux, des pertes immobilières et j'en passe. Cette réforme aura pour effet de grossir le groupe des assistés sociaux et de nous faire ressembler aux pays sous-développés.

Cette réforme est en train de détruire l'héritage de nos ancêtres. On veut nous enfermer dans un ghetto où les gens des régions seront forcés d'adopter une idéologie de soumission.

Nous ne sommes pas contre une réforme sensée, réfléchie et structurée. Il faut une réforme, mais une réforme qui permettra d'établir les balises d'une relance de l'emploi pour nous, travailleurs saisonniers. Pour ce faire, il faudra d'abord que nos élus sachent que l'on existe et se rendent compte de notre capacité à nous assumer quand on nous donne les outils et les occasions pour le faire.

Au Québec, en 1995, les travailleurs ont contribué un surplus de 195 millions de dollars à l'assurance-chômage. Dans les années passées, on disait toujours que le Québec était le suceur des autres provinces, mais je pense qu'il y a eu une grosse amélioration. En 1995, on a contribué un surplus de 195 millions de dollars.

Il faut développer, dans nos régions, les deuxième et troisième transformations. Le gouvernement se doit d'y inciter les entreprises en leur accordant - pas indéfiniment - des allégements fiscaux, à la condition expresse qu'elles investissent dans les deuxième et troisième transformations.

La formation en entreprise peut être subventionnée, mais à la condition expresse que l'employeur et l'employé signent un contrat qu'ils devront respecter, cela dans le but d'éviter des abus de la part de certains employeurs, et de certains employés aussi.

De plus, des agents issus du milieu devraient superviser et établir une période probatoire dans le but d'éviter les gaspillages qu'on a connus dans le passé.

.1020

Le gouvernement devrait inciter les banques à consentir des prêts à risque, pas seulement à ceux dont ils aiment la face, mais aussi pour le démarrage de petites entreprises. On devrait débureaucratiser le système et, par le fait même, sauver des sommes énormes.

Le gouvernement devra, au sein même des régions, mettre en place un mécanisme d'évaluation bisannuelle des stratégies d'emploi et des mécanismes de financement. De plus, ces mécanismes devront être assortis d'un pouvoir de recommandation.

En conclusion, ces suggestions ne sont qu'une partie d'un plan que l'on peut développer en région. Pour ce faire, le gouvernement doit reformuler sa réforme pour donner aux politiques d'emploi que l'on propose le temps de faire leurs effets. Si les gens sont en emploi, il en résultera une meilleure santé financière pour le gouvernement et on ne sera pas obligé de se servir des surplus d'assurance-chômage pour réduire le déficit.

Le président: Quel est actuellement le taux de chômage en Gaspésie?

M. Robinson: Dans la MRC Denis-Riverin, il est de 33 p. 100 .

Le président: Vingt-trois pour cent?

M. Robinson: Trente-trois pour cent, sans compter les assistés sociaux, monsieur le président.

Le président: C'est énorme!

M. Robinson: Je répète: sans compter les assistés sociaux.

Le président: C'est énorme!

Nous avons le plaisir d'avoir avec nous aujourd'hui Mme Francine Lalonde, du Bloc québécois, qui pourra commencer les questions.

Mme Lalonde: M. Henry pourrait témoigner d'abord et on pourrait ensuite poser des questions aux deux témoins.

Le président: Vous voulez ajouter quelque chose, monsieur Henry?

M. Martial Henry (Ralliement gaspésien et madelinot): Oui.

Le président: Oh, excusez-moi!

Mme Lalonde: Ce sont deux organismes distincts.

Le président: J'avais l'impression que... Excusez-moi! Monsieur Henry.

M. Henry: J'ai été choisi à la dernière minute ce matin pour remplacer une personne qui est très au courant du document, mais je vais quand même essayer de répondre à vos questions en tant que travailleur saisonnier. Pour le moment, je vais vous donner lecture du document du Ralliement gaspésien et madelinot.

Le Ralliement gaspésien et madelinot tient à apporter une critique des principaux points du Guide des dispositions législatives sur l'assurance-emploi qui, si rien n'est fait, contribueront à l'appauvrissement de la population de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.

C'est dans une optique de construction d'un milieu où la qualité de vie des gens est primordiale que nous forgeons notre opinion.

En premier lieu, nous jetons un regard sur l'objectif même du projet de loi, que nous retrouvons à la première page du guide: aider les Canadiens à retourner au travail. C'est un objectif que le Ralliement gaspésien et madelinot trouve louable, et notre organisme ne peut que souhaiter le retour sur le marché du travail de toute la population en âge de travailler.

Toutefois, le document que nous analysons nous donne l'impression que notre gouvernement réagit une fois de plus sans véritable planification dans le domaine de l'emploi. Le but latent qu'il vise, à court terme, est la réduction du déficit, ce qui l'empêche d'élaborer une véritable politique de l'emploi qui serait sûrement plus rentable à moyen et à long termes.

Avant de mettre en place un régime d'assurance-emploi, il faudrait assurer à tous les Canadiens et à toutes les Canadiennes la possibilité de se trouver un emploi. Actuellement, nous faisons face à un problème de société d'ordre majeur. Nous avons créé un système qui génère l'exclusion: une partie de notre main-d'oeuvre est exclue du marché du travail.

Dans l'ensemble du marché du travail du Québec, seulement la moitié de la population active travaille à temps plein et, en Gaspésie, seulement le tiers de la main-d'oeuvre active possède un emploi à temps plein. La structure même du marché du travail gaspésien fait qu'on a une main-d'oeuvre saisonnière. Je vous remettrai un tableau que vous trouverez en annexe.

Il est donc utopique de penser que nous pourrions, dans le système actuel, procurer des emplois à temps plein à l'ensemble des personnes en âge de travailler dans l'ensemble du Canada, du Québec et plus particulièrement de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.

.1025

On a l'impression que le futur régime d'assurance-emploi vise à détourner la clientèle de l'assurance-chômage pour la diriger vers la sécurité du revenu. La cloison qui existe entre le futur régime d'assurance-emploi et la sécurité du revenu est très étanche. La zone grise de la population des travailleurs saisonniers n'est couverte par aucune mesure.

En l'absence d'une véritable politique de l'emploi et avec un resserrement des règles pour les sans-emploi, un nombre élevé de personnes devront se prévaloir de la sécurité du revenu. Ce programme est lui-même perçu comme l'entrée dans le couloir de la pauvreté: interdiction de posséder certains biens, interdiction de résidence commune pour personnes de sexes différents, pénalisation pour les familles reconstituées ou pour les femmes chefs de famille monoparentale qui vivent avec un conjoint de fait.

Nous vivons dans un régime qui pénalise l'effort, et la population touchée s'empêche de rêver parce qu'elle n'a pas le soutien nécessaire pour s'en sortir. L'État devra bien voir que pour tout individu, l'emploi est la voie centrale qui mène à l'autoréalisation.

On dit que beaucoup parviendront à trouver un nouvel emploi uniquement grâce au service national de placement. Il s'agit d'un élément de la réforme qui fait craindre un appauvrissement démographique important pour la région de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.

Nous avons démontré, et nous le savons tous, que le nombre d'emplois à temps plein est nettement insuffisant en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine pour l'ensemble de la main-d'oeuvre active. Dans une perspective où la situation demeure la même au niveau de l'emploi, il sera impossible au futur service national de placement de trouver du travail en région pour cette main-d'oeuvre et, surtout, pour la jeune main-d'oeuvre. Nous craignons que ce service national n'augmente de façon drastique la fuite de notre main-d'oeuvre vers les grands centres et, par le fait même, désarticule encore davantage la région en favorisant l'appauvrissement des ressources humaines.

On dit que le ministère du Développement des ressources humaines fournira des renseignements à jour sur les possibilités d'emploi d'un bout à l'autre du Canada. Reviendra-t-on à l'ère nomade où les populations auront à suivre les emplois d'un bout à l'autre du Canada, comme les Indiens suivaient le gibier?

Le Ralliement gaspésien et madelinot demande à Développement des ressources humaines Canada de trouver des solutions intermédiaires qui favorisent le développement massif de nouveaux emplois en développant, par exemple, les secteurs secondaire et tertiaire dans notre région. Il faudra, par tous les moyens, favoriser l'accès aux capitaux pour les personnes sans emploi qui désirent lancer une entreprise autonome.

Comment le gouvernement fédéral parviendra-t-il à créer les conditions requises pour attirer des emplois et des investisseurs dans toutes les collectivités? C'est une question qui est encore nébuleuse et dont la réponse est incertaine.

Un fonds transitoire pour la création d'emplois est un concept très intéressant. Cependant, une somme de 300 millions de dollars pour une période trois ans, et cela pour l'ensemble du Canada, est nettement insuffisante. Un calcul assez simple nous démontre qu'il s'agit de 100 millions de dollars par année à partager entre les provinces. Quelle sera la part de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine lorsque le tout aura été divisé?

Le retrait se fera au cours d'une période de trois ans afin de donner aux provinces et aux établissements le temps de prendre les mesures nécessaires.

Le respect des responsabilités provinciales en matière d'éducation et de formation nous semble une mesure intéressante. Non seulement sommes-nous d'accord, mais nous croyons que tous les programmes qui concernent de près ou de loin la sécurité du revenu devraient être gérés par les provinces de façon à en assurer l'harmonie.

On parle de la gestion responsable d'un régime d'assurance dont l'objet est de verser des prestations aux personnes qui ont perdu leurs emplois. Le régime des prestations d'emploi ne prendrait vraiment son sens que s'il fonctionnait en harmonie avec un système de sécurité du revenu. À notre avis, il est important de sécuriser tous les citoyens et citoyennes face à leur avenir, surtout si le système ne génère pas assez d'emplois pour que tous puissent travailler.

Le supplément de rémunération nous laisse supposer que le nouveau régime incitera les gens à accepter un emploi moins bien rémunéré. Ces suppléments viseront à augmenter, de façon temporaire, le revenu des personnes qui auraient autrement de la difficulté à accepter un emploi moins bien rémunéré. Un travail saisonnier n'est-il pas l'équivalent d'un travail annuel moins bien rémunéré? Le salaire saisonnier devra donc aussi être admissible au supplément de rémunération.

.1030

La partie III, qui traite des responsabilités des provinces, laisse présager un effort dans la bonne direction. Cet effort devra être poussé beaucoup plus loin.

Les provinces devraient avoir l'entière responsabilité en matière d'emploi. Nous serions alors assurés que les mesures fédérales ne tentent pas seulement de pousser les personnes hors du régime fédéral d'assurance afin d'en diminuer les dépenses, mais qu'elles font partie d'une véritable politique qui vise la réorganisation du marché du travail.

Les prestations d'emploi, telles les subventions salariales et l'aide aux travailleurs indépendants, inciteront les employeurs à créer de nouveaux emplois, nous dit-on. Il a été maintes fois démontré que le seul fait d'aider les employeurs à payer leur personnel par des subventions salariales ne créait pas de l'emploi, mais occasionnait plutôt un déplacement important de la main-d'oeuvre. C'est un mécanisme qui déshabille Jean pour habiller Paul.

Nous nous questionnons aussi sur les prestations de retour au travail. Nous ne sommes pas sans nous rappeler les programmes Canada au travail qui existaient dans les années 1970. Très souvent, l'emploi ne durait que le temps de la subvention.

Nous approuvons l'aide du travail indépendant, bien que nous trouvions que l'accès au capital de risque pour les sans emploi est très difficile et que les programmes sont nettement insuffisants.

Nous croyons, de plus, qu'un encadrement d'un minimum de deux ans, avec l'appui financier de l'État, devrait être donné afin de mieux assurer la survie des jeunes entreprises.

Le taux des prestations ordinaires de revenu diminuera modérément selon le nombre de semaines de prestations reçues dans une période de cinq ans.

Il va sans dire que le Ralliement gaspésien et madelinot rejette catégoriquement cette mesure. Nous n'aurons pas besoin de faire de longs calculs, quand 55 p. 100 des prestations des travailleurs et des travailleuses saisonniers seront perdues, pour démontrer l'effet de cette mesure sur l'appauvrissement de notre région si la structure du marché du travail demeure telle que nous la connaissons, soit celle du travail saisonnier.

D'autre part, nous approuvons que l'admissibilité soit fondée sur le calcul des heures plutôt que des semaines travaillées. Il nous semble équitable que le calcul de l'admissibilité soit fait en fonction du nombre d'heures travaillées durant la dernière année.

C'est une mesure positive qui devrait encourager les gens à accumuler des heures de travail, surtout si le nombre d'heures travaillées vient augmenter la participation à l'assurance-emploi.

Pour véritablement mettre à jour l'économie souterraine, il faudrait trouver la clé d'un système où chaque heure travaillée serait déclarée et récompensée. Il s'agit d'un système où l'on accumule des points qui procurent une récompense. L'industrie privée a souvent fait de la publicité de ce genre pour inciter les clients à acheter un produit.

Le principe lancé serait le suivant: Plus tu travailles, plus tu es riche et plus l'État en bénéficie. Au lieu de considérer les timbres de chômage comme un accroissement du revenu, un nouveau système devrait renverser la situation et considérer le travail comme un supplément à l'aide de l'État.

La dépense serait largement équilibrée par le surcroît de revenus que l'État retirerait de l'accroissement de l'impôt des particuliers occasionné par le nouveau système. Il s'agit de donner aux gens le droit de déclarer le salaire gagné sans être pénalisés.

Par exemple, toute personne qui travaille au noir à son propre compte aurait intérêt à déclarer son travail puisqu'il lui procurerait des heures supplémentaire en vue de l'assurance.

Le projet de loi sur l'assurance-emploi tel que formulé permettra de gagner 50 $ ou 25 p. 100 de ses prestations. La loi interdit donc de gagner 75 p. 100 de ses prestations. Encore une fois, c'est une mesure qui devrait être limitée à un certain niveau de salaire, qui serait considéré comme le minimum nécessaire pour vivre. Les gens qui sont en deça de ce niveau devraient pouvoir travailler jusqu'à ce qu'ils atteignent le niveau minimal sans être pénalisés.

On dit que le supplément au revenu familial est une protection de base pour les familles à faible revenu. Le Ralliement gaspésien et madelinot appuie cette mesure, qui apporte un soutien important aux familles à faible revenu et pense même qu'elle devrait être renforcée de manière à soutenir le travail des personnes qui restent au foyer pour éduquer les enfants.

La règle de l'intensité ne devrait s'appliquer en aucun cas et, à plus forte raison, ne devrait pas s'appliquer ici.

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Nous approuvons le maintien des cotisations à un bas niveau. L'établissement d'une réserve pour les temps difficiles est aussi une mesure intéressante. Évidemment, il est important que cette réserve ne serve qu'aux fins de l'assurance-emploi.

Vingt-six semaines de 35 heures pour un total de 910 heures est une mesure décourageante pour les jeunes ou les personnes qui entrent pour la première fois sur le marché du travail.

Ici, je voudrais ouvrir une parenthèse. Un étudiant ou une personne qui entre sur le marché du travail à temps partiel, à raison de 15 heures par semaine, ne se qualifiera jamais pour l'assurance-chômage. Si vous divisez 910 heures par 52 semaines - on fait travailler la personne52 semaines - , cela fait 17,5 heures par semaine. À ce moment-là, tout nouvel arrivant sur le marché du travail, qu'il s'agisse d'un travailleur qui occupe un emploi temporaire dans un restaurant ou d'un étudiant qui sort de l'école, ne se qualifiera jamais pour le chômage.

Nous sommes convaincus que ces personnes devraient être encouragées à travailler dès le début de leur carrière. L'État devrait leur offrir la possibilité de faire du service social pendant deux ans, période pendant laquelle un revenu serait garanti, ce qui permettrait aux bénéficiaires de chercher un emploi stable. Ces personnes toucheraient cependant des bénéfices pendant ces deux années d'encadrement nécessaire dans la démarche de recherche d'emploi.

En conclusion, nous déplorons l'interprétation qui est faite des différentes statistiques qui nous sont soumises dans le guide. Nous sommes convaincus que c'est le manque d'emplois qui crée le chômage et non l'habitude des employeurs et des employés à un système.

Le Ralliement gaspésien et madelinot ne possède pas toutes les ressources de l'État qui lui permettraient d'apporter des amendements précis aux nouvelles dispositions de la Loi sur l'assurance-emploi. Tout au plus, nous vous soumettons des pistes de réflexion qui ont été pensées par des travailleurs et travailleuses qui vivent le manque d'emploi dans leur réalité quotidienne.

Pour ces personnes, avoir recours à l'aide sociale est une menace qui signifie un grand pas vers l'appauvrissement, qui est synonyme de la perte de leur capacité de s'accomplir sur le plan social et qui apporte l'angoisse de ne pouvoir se nourrir trois fois par jour. C'est ce à quoi l'État doit remédier.

L'État doit être convaincu que la majorité des gens désirent travailler, car c'est la condition de leur mieux-être. Il n'existe personne en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine qui n'aspire pas à une meilleure qualité de vie. C'est ce que le travail procure.

Si l'assurance-emploi est vraiment une assurance dont l'objet est de verser des prestations aux personnes qui ont perdu leurs emplois, la sécurité du revenu, ou le bien-être social, est une mesure dont l'objet est d'assurer un revenu aux personnes qui sont dans l'incapacité de travailler. Il manque donc une mesure intermédiaire solide et récurrente, dont l'objet serait de venir en aide à la main-d'oeuvre active qui ne parvient pas à se tailler une place dans le marché du travail à cause du manque d'emplois.

C'est à l'État de prendre ses responsabilités, de coordonner les efforts et de procurer toute l'aide nécessaire aux personnes qui sont à la recherche de solutions. Lutter contre l'appauvrissement, c'est lutter pour l'enrichissement collectif. Nous espérons que l'État sortira une lunette d'approche qui lui fera voir et comprendre le plus démuni sur son terrain, car un problème bien compris est à moitié résolu.

Je vous remercie, mesdames et messieurs, de m'avoir écouté.

Le président: Merci beaucoup. Monsieur Lavigne.

M. Lavigne (Verdun - Saint-Paul): Puis-je demander au greffier ou à quelqu'un d'autre d'aller faire des photocopies des mémoires, s'il vous plaît?

Le président: Oui.

M. Lavigne: Merci, monsieur le président.

Le président: C'est une bonne idée. Madame Lalonde.

Mme Lalonde: Merci beaucoup de vos témoignages. Malheureusement, je vais devoir quitter. J'avais une réunion à 10 h 30 et je pensais que nous aurions alors terminé.

Bonjour, monsieur Henry, monsieur Robinson, et merci beaucoup d'être là pour nous exposer vos positions et faire valoir comment ces projets de loi C-31 et C-12 vont vous affecter.

.1040

J'aimerais que vous nous expliquiez qu'en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine, les travailleurs et les travailleuses saisonniers ne sont pas du tout des gens qui gagnent de gros salaires et qui, en plus, reçoivent de l'assurance-chômage.

La mesure principale que propose le gouvernement est d'abaisser le salaire maximum assurable et la prestation maximale. Actuellement, la prestation maximale est de 445 $. Quand la loi aura été adoptée, elle sera réduite à 413 $ pendant cinq ans. Par la suite, le ministre des Finances et celui du Développement des ressources humaines décideront du montant de cette prestation. C'est un gros changement parce qu'auparavant, une série de règles économiques devaient être observées et il y avait une croissance régulière de cette prestation maximale.

Cela fait deux ans et demi que je suis au Comité permanent du développement des ressources humaines. J'ai fait le tour du Canada. Je sais qu'il y a eu un comité sur le travail saisonnier qui n'a pas fait de recommandations en vue de l'obtention d'un traitement spécial pour les travailleurs saisonniers. Par conséquent, on a préparé une réforme qui n'est pas faite, à mon humble avis, pour l'ensemble du monde. Elle est faite pour s'attaquer aux problèmes qui, croit-on, existent dans le travail saisonnier, d'où la réduction du salaire maximum assurable et la période fixe, mesure à laquelle vous avez réussi à obtenir des amendements par vos manifestations.

Un des amendements réduit quelque peu la gravité de cette mesure. Mais il y a toujours la pénalité pour les chômeurs répétitifs. Il y a aussi la diminution du nombre de semaines assurables. Toutes ces mesures semblent avoir été conçues parce qu'il y a des gens qui «abusent» du système. On dit que les gens ne travaillent que 12 semaines, s'arrangent avec les entreprises pour aller chercher le maximum et font la belle vie aux dépens de tout le monde. Tel est souvent le sentiment général.

J'aimerais que vous expliquiez la vie des travailleurs saisonniers et des travailleuses saisonnières. Connaissant le milieu, je sais que leur vie n'est pas telle qu'on la décrit. Vous pouvez compléter chacun de votre côté. Je pense que ce sera utile pour le comité.

M. Robinson: Lorsqu'on parle de travail saisonnier en Gaspésie, il ne s'agit pas de travail saisonnier de six, sept, huit ou dix mois. Beaucoup d'emplois sont saisonniers, surtout dans le secteur forestier. Les bûcherons ont de la difficulté à faire 10 ou 12 semaines, parce que les scieries cessent les opérations forestières en forêt quand la neige devient trop épaisse. Les bûcherons sont alors obligés de cesser de travailler.

Une autre chose est très importante. On dit un peu partout que les Gaspésiens sont paresseux, qu'ils ne veulent pas se prendre en main. Mais qu'on pense au fameux programme ATI avec la SADC, etc. On sait qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs qui veulent lancer une entreprise, mais il n'y a même pas cinq p. 100 d'entre eux qui en ont la possibilité C'est une réalité. C'est une étude qui a été faite par la SADC. C'est un fait réel. Cela veut dire qu'il y a un problème quelque part. Qu'on ne vienne pas dire que les gens ne veulent pas travailler. Ils le veulent.

La MRC Denis-Riverin a publié un répertoire de produits et services pour aider les gens à lancer une entreprise avec des produits de base, des choses qui ne sont pas trop compliquées. C'est Action Travail Denis-Riverin qui a monté le programme. Cela a bien fonctionné et a été très bien fait.

C'est vrai qu'il y a un problème à l'assurance-chômage, et on ne le nie pas, mais pour régler un problème, il faut des solutions. Sans solution, on ne peut régler un problème. C'est officiel. Mon père me disait toujours cela lorsque j'étais jeune.

.1045

Il faut conscientiser le milieu et lui donner les outils nécessaires. Les gens savent ce qu'il leur faut. Je suis persuadé que si le gouvernement essayait, il aurait un bon résultat. J'en suis persuadé.

Je parlais plus tôt des taux de chômage de 33 p. 100 dans la MRC Denis-Riverin et 30 p. 100 à Pabos. Quand le gouvernement fait ses barèmes, il les calcule en fonction de taux de chômage de12 p. 100 et plus. Quand le taux est de 10 à 12 p. 100, il faut travailler 16 semaines et quand il est de plus de 12 p. 100, il faut travailler 14 semaines. C'est donc un écart de deux semaines. De 12 à33 p. 100, il y a est loin.

Mme Lalonde: C'est une remarque pertinente.

M. Robinson: À raison de 45 à 50 heures, on parle de 413 $, mais si la semaine diminue à35 heures, pensez-vous que l'employeur paiera 413 $ pour quelqu'un qui n'aura travaillé que35 heures? C'est une question qu'il faut se poser.

M. Henry: Madame Lalonde, vous parliez plus tôt de ceux qui abusent du système.

Mme Lalonde: J'ai dit: Les gens pensent que...

M. Henry: J'aimerais apporter une petite précision là-dessus. Par la force des choses, j'ai dû travailler un peu partout, même au Canada. Dans certaines régions, par exemple dans la ville de Montréal, certaines personnes pourraient avoir tendance à ne travailler que 12 ou 20 semaines, selon le cas, et à aller par la suite au chômage, parce que cela paraît moins.

En Gaspésie ou aux Îles-de-la-Madeleine, je ne connais personne qui ne travaille que12 semaines et qui essaie de vivre le reste de l'année avec cela. Au départ, il faut dire que les emplois en Gaspésie sont saisonniers.

Je reviens à mon cas. Je suis un travailleur de la construction. Je vis le problème année après année. Je fais de la supervision en électricité sur des chantiers de l'industrie lourde. En Gaspésie, il n'y en a pas. En 1966, j'ai travaillé à la construction du moulin de New Richmond. En 1972, j'ai travaillé sur le chantier de construction du moulin à Murdochville.

Quant à mes autres emplois, j'ai été obligé d'aller les quémander dans d'autres régions. Vous savez qu'un travailleur d'une autre région n'est pas le bienvenu quand il y a des personnes du même métier disponibles dans la région. L'année dernière, j'ai travaillé l'équivalent de 15 semaines. J'ai57 ans. J'ai trois enfants. Ce sont ma femme et mes voisins qui ont élevé mes enfants parce que je n'étais jamais à la maison. J'ai été obligé de m'exiler.

Je puis vous dire que 15 semaines de travail pour vivre, ce n'est pas un cadeau. Si la chose avait été possible, j'aurais aimé faire 60 semaines dans la même année, mais je n'avais pas le choix. J'étais à l'extérieur de ma région et, aussitôt qu'il y a eu des disponibilités, le contrat s'est terminé. On m'a remercié et je suis rentré à la maison.

En Gaspésie, nous vivons le problème régulièrement. Même si on veut des emplois, on n'en a pas. J'ai travaillé au Manitoba et ça a été la même chose. J'ai traîné ma famille avec moi là-bas. J'ai traîné ma famille en Alberta pendant sept ans, et ça a été la même chose. J'ai toujours travaillé en deuxième lieu, bien que je me considère assez qualifié dans mon métier. Je n'ai jamais été mis à pied. J'ai toujours fait mon travail.

.1050

Pour ceux des autres métiers qui restent en Gaspésie, les bûcherons, les travailleurs des poissonneries - celles qui sont encore ouvertes - et les travailleurs de l'hôtellerie, il n'y a que du travail saisonnier. Je puis vous assurer qu'il n'y a personne en Gaspésie qui ne cherche pas à améliorer son sort.

Je voulais compléter la réponse à votre question, madame.

Mme Lalonde: C'est parfait.

Je vais devoir m'excuser.

Le président: Merci beaucoup de vos questions, madame Lalonde.

[Traduction]

Monsieur Solberg.

M. Solberg (Medicine Hat): Merci beaucoup, monsieur le président.

Bienvenue. La question du chômage saisonnier est épineuse. Comme vous le signalez, le problème existe partout, mais je suppose qu'il est plus accentué dans la région de la Gaspésie. Une partie de la difficulté a trait au fait qu'on se demande qui de l'oeuf ou de la poule est venu en premier. D'une part, il y a le travail à caractère saisonnier, et on fournit des prestations de chômage pour aider les gens à passer l'année. Mais, compte tenu de cela, il est possible d'assurer la survie d'un plus grand nombre de personnes dans cette région, même si c'est un salaire minimum. Par conséquent, un plus grand nombre de personnes sont en concurrence par rapport à un petit nombre d'emplois. Et cela vient aggraver le problème. Auriez-vous un commentaire à faire à ce sujet, et, également, que pensez-vous de l'idée de s'éloigner, dans une certaine mesure, de la notion de prestations saisonnières?

Je comprends bien pourquoi ces prestations existent - elles servent à atténuer les difficultés, à rendre le problème moins douloureux - mais, à certains égards, elles font partie du problème. Si les prestations saisonnières telles qu'on les connaît n'existaient pas, il y aurait peut-être une migration naturelle des travailleurs à partir des régions à fort taux de chômage. Par conséquent, il y aurait dans ces régions davantage de travail à temps plein au cours de l'année, même s'il était lié à divers secteurs saisonniers. Auriez-vous un commentaire à faire à ce sujet?

M. Henry: Si j'ai bien compris, vous nous laissez entendre que nous devrions quitter la péninsule gaspésienne.

M. Solberg: Ce que je dis...

M. Henry: La population, prétendument excédentaire, est là pour le travail saisonnier.

M. Solberg: Ce que je dis, c'est qu'il n'y a pas suffisamment d'emplois pour les gens qui sont là, et vous avez dit vous-même qu'il existe certains obstacles à la mobilité, même pour une personne établie en Gaspésie. Ne pourrait-on pas envisager comme solution une migration des populations des régions à fort taux de chômage?

M. Henry: À l'heure actuelle, beaucoup de gens quittent leur région. Nous vous avons donné des chiffres tout à l'heure. La population baisse constamment. Mais l'idée de demander aux gens de quitter le lieu de leur naissance, c'est autre chose, et nous pourrions vraisemblablement en débattre durant des mois.

Je devrais peut-être moi-même poser la question suivante: l'État ne devrait-il pas faire quelque chose pour les gens qui vivent là-bas, ou bien carrément fermer la région?

M. Solberg: Vous avez fait une déclaration - ou était-ce votre collègue? Je ne m'en souviens plus...

M. Henry: Permettez-moi d'ouvrir un peu la question. Devrions-nous fermer le Nord? Devrions-nous fermer la Basse-Côte-Nord parce qu'il n'y a personne...? Que devons-nous faire? Devons-nous déménager tous ces gens à Montréal?

M. Solberg: Non, je ne crois pas qu'il faille fermer une région. Cependant, ailleurs on a constaté un phénomène de migration naturelle à partir de certaines régions. Je suis originaire de l'Alberta. Les régions rurales se sont naturellement dépeuplées au fil des années, et, relativement parlant, nos régions ne connaissent pas un taux de chômage élevé. Les gens se sont déplacés vers les villes. Il y a eu une migration naturelle vers le travail. Il ne me semble pas évident que la même chose se soit produite dans d'autres régions. Voilà ce que je voulais dire. Mais vous avez raison: nous pourrions en débattre.

M. Henry: Je ne puis pour ma part en débattre plus longtemps. Je ne vois pas comment on pourrait convaincre les gens de quitter leur lieu de naissance et je ne vois pas comment on pourrait faire accepter ce genre de projet. Les gens le feront. Je l'ai fait, pour ma part, à un moment donné, mais, à l'heure actuelle, je ne le referais plus. Comme je vous l'ai dit, ce sont les voisins et ma femme qui ont élevé mes enfants.

.1055

M. Solberg: Je comprends cela. Je comprends pourquoi les gens sont attachés à ces régions. C'est tout à fait logique. Mais, à un moment donné, il faut se poser la question. Si des gens ailleurs au pays sont disposés à se déplacer, devraient-ils être tenus de vous assurer des prestations pour que vous puissiez rester où vous êtes?

M. Henry: Je vous donne un exemple immédiatement. Je viens d'en parler tout à l'heure.

J'ai déménagé en Alberta avec ma famille. J'y ai vécu durant sept ans. Par contre, j'y étais toujours un travailleur de deuxième catégorie, n'étant pas né en Alberta. J'étais toujours le deuxième à obtenir l'emploi. Il m'aurait fallu combien d'années avant d'arriver à travailler 12 mois par année?

M. Solberg: Eh bien, c'est une bonne question. Dans le secteur de la construction, il y a, je crois, un problème.

J'aimerais faire avancer un peu le débat. Vous ou votre collègue avez proposé, comme solution possible, des allégements fiscaux pour les sociétés qui viendraient s'établir dans la région de la Gaspésie. Voilà qui m'intéresse. Croyez-vous que le gouvernement devrait assurer un environnement où les impôts seraient plus faibles dans l'ensemble, de sorte que les entreprises puissent prospérer et que, bien entendu, les gens aient plus d'argent à dépenser? Voyez-vous là une solution importante, moyennement importante ou peu importante par rapport aux problèmes de la Gaspésie?

M. Henry: À l'heure actuelle, où que l'on soit au Québec, on paie beaucoup d'impôt. Dans notre région, c'est l'essence et le transport de certains produits qui coûtent le plus cher. Pour certains services, nous devons sortir de la péninsule. Il nous en coûte quelque chose.

Nos ressources, qu'il s'agisse du cuivre, du bois, du poisson ou de quoi que ce soit, ont toujours été drainées de la péninsule gaspésienne. La ressource est extraite de la péninsule et transportée ailleurs, et il ne nous reste rien.

Permettez-moi de vous donner un exemple. Je n'ai rien contre le Nouveau-Brunswick - il y a peut-être des gens du Nouveau-Brunswick dans la salle - mais, depuis plus de 100 ans, nous avons approvisionné le Nouveau-Brunswick en bois. Trois villes importantes - Dalhousie, Campbellton et Bathurst - ont été bâties avec notre bois. Nous n'avons une usine de pâtes et papiers à New Richmond que depuis 20 ans. Lorsqu'elle a été construite, environ 1 200 personnes travaillaient dans la forêt. Aujourd'hui, il n'y a plus personne. Les copeaux qui alimentent l'usine proviennent du Nouveau-Brunswick.

Voilà comment on nous traite dans la péninsule gaspésienne depuis plus de 100 ans.

M. Solberg: Je n'ai plus d'autres questions, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Solberg.

[Français]

Monsieur Lavigne.

M. Lavigne: Je suis le député qu'on a cité dans Le Soleil comme ayant dit qu'il y avait des travailleurs qui se faisaient griller la bedaine au bord de la mer. J'aimerais apporter une précision. Vous savez que les journalistes ne rapportent pas toujours les choses comme ils devraient les rapporter dans les journaux. Quand il y a de bonnes choses, ils ne les rapportent pas et, quand il y en a de mauvaises, ils s'empressent de les rapporter. Bien souvent, ils rapportent nos propos à l'envers.

Je n'ai pas dit que les gens de la Gaspésie se faisaient griller la bedaine, pas plus que les gens d'ailleurs au Canada. Ce n'était pas cela du tout.

.1100

J'ai plutôt tenter de préciser qu'au Canada - Mme Lalonde le disait plus tôt - , certaines personnes profitaient du système et pouvaient toucher jusqu'à 50 000 $ ou 100 000 $ pour quatre mois de travail.

Je ne dis pas que c'est votre cas. Je n'ai jamais dit que c'était le cas des travailleurs de la Gaspésie ou de qui que ce soit. J'ai dit que certaines personnes, en quatre ou six mois, gagnaient entre 50 000 $ et 100 000 $. Je dois aussi préciser qu'une très grande partie de ma circonscription de l'ouest de Montréal est très défavorisée et compte beaucoup de Madelinots.

Je suis parfois un peu amer quand je vois que, dans la même maison, on peut collecter jusqu'à cinq chèques de bien-être social. Je suis un peu amer quand certaines personnes touchent jusqu'à60 000 $ ou 70 000 $ en six mois et reçoivent de l'assurance-chômage pendant les six autres mois. En faisant cela, elles en enlèvent à d'autres personnes de ma circonscription qui, à un moment donné, sont renvoyées par leur employeur parce qu'il manque de travail. Avant de pouvoir se trouver un autre emploi, ces gens-là auraient besoin d'argent. C'est ce que j'ai répondu aux trois centrales syndicales qui étaient présentes. Ce n'est pas vrai que j'ai dit que les gens se faisaient griller la bedaine au bord de la mer.

C'était une précision que je voulais apporter afin que certaines personnes ne puissent se servir de cela pour faire de la petite politique de campagne.

Vous dites que vous devriez recevoir plus d'aide dans votre secteur. Comme monsieur le disait plus tôt, beaucoup d'autres provinces ont peut-être trop bénéficié de vos ressources naturelles et, aujourd'hui, vous n'avez plus les mêmes ressources.

Vous dites également que les banques ne prennent pas beaucoup de risques. C'est vrai, et j'en parle constamment au caucus du Québec. Les banques ne prennent pas beaucoup de risques en ce qui a trait aux petites entreprises. Elles leur disent: «On va examiner cela». Mais cela prend beaucoup de temps. Je suis d'accord avec vous que les banques retirent beaucoup de bénéfices et n'investissent pas beaucoup dans la petite entreprise. Tous devraient déplorer cela. Vous avez raison de dire que les banques devraient investir davantage, parce qu'elles ont du capital de risque garanti par le gouvernement du Canada pour les petites et moyennes entreprises.

Je vous félicite pour votre mémoire et je suis d'accord avec vous sur deux ou trois points, particulièrement sur le fait que les banques n'investissent pas assez et qu'elles devraient le faire. Merci.

[Traduction]

Le président: Madame Brushett.

Mme Brushett: Merci, monsieur le président.

Bienvenue. Je suis de la Nouvelle-Écosse, et je comprends donc fort bien bon nombre des questions que vous soulevez aujourd'hui. La situation est tout à fait semblable en Nouvelle-Écosse. Qu'il s'agisse de Matane, de la Gaspésie, de la Matapédia, des îles-de-la-Madeleine ou de ma circonscription, c'est du pareil au même.

.1105

Je tiens à vous dire que la Chambre des communes étudie actuellement le projet de loi sur l'assurance-emploi et que trois amendements ont été proposés. Vous les connaissez peut-être. Ils portent sur le travail saisonnier. Il s'agit d'un problème très réel pour la Gaspésie. Il existe un écart dans l'emploi, dans le nombre de semaines ou d'heures. Il s'agit de la règle de l'intensité et de certains aspects qui ont trait au relevé d'emploi.

Avec l'entrée en vigueur du projet de loi, en juillet 1996, c'est un nouveau départ. Nous avons fait des amendements favorables aux travailleurs saisonniers, et j'ai bonne confiance qu'ils seront adoptés par la Chambre. Le caucus des députés de l'Atlantique a beaucoup mis l'accent sur ces questions. Je crois que vous serez très satisfait de ces amendements lorsque vous en aurez compris la portée et les avantages pour les travailleurs saisonniers de la côte est.

J'aimerais maintenant revenir à une autre question, à savoir les secteurs traditionnels, la pêche, la forêt, et l'insuffisance d'emplois dans les secteurs secondaires, soit ceux de la fabrication ou de la valeur ajoutée. Comme nous le savons tous, c'est un phénomène qui touche l'ensemble de la région. Étant originaire du Nouveau-Brunswick, je connais très bien votre région. Également, au cours des quelques dernières années, un certain nombre de fonds de capital de risque financés par les travailleurs ont été créés.

Il existe un tel fonds au Québec. Il s'agit du Fonds de solidarité du Québec. Ses dirigeants nous ont fait savoir qu'ils avaient intention d'investir davantage dans les régions rurales du Québec pour favoriser l'industrie secondaire et le développement.

Avez-vous entendu parler de ce fonds en Gaspésie, et y a-t-il eu des activités liées à ce fonds auxquelles aurait pu participer la petite entreprise? Nous avons accordé des crédits d'impôt pour favoriser l'investissement, ce qui réduit les recettes fiscales du Canada. Il s'agit de favoriser l'activité économique. Or, les représentants du fonds ont déclaré devant notre comité qu'ils allaient agir dans les régions rurales du Québec pour favoriser la petite entreprise.

[Français]

M. Robinson: Vous parlez des programmes existants. Monsieur l'a très bien dit plus tôt. Actuellement, les banques demandent un capital initial très élevé par rapport aux risques de la mise sur pied d'une nouvelle entreprise. Imaginez-vous que les administrateurs de tous les programmes existants nous demandent: «Es-tu allé voir à ta banque? Que t'ont-ils répondu? Sont-ils prêts à t'aider?».

Non, ma banque ne veut pas investir, car elle ne veut pas prendre de risques. Que ce soit le Fonds de solidarité ou d'autres programmes, les banques ne sont pas intéressées à y participer. Les banques ont tous les pouvoirs. Prenons l'exemple de la Banque nationale du Canada. En ce qui a trait aux PPE, elle devrait demander 10 p. 100 aux entreprise. J'ai eu un PPE il y a trois ans, et on a exigé de moi 25 p. 100 au départ.

Dans sa réforme, le gouvernement n'a pas tenu compte de ce taux. On n'a pas tenu compte du 12 p. 100 . On n'a pas tenu compte des différences entre les régions. On ne pense pas aux régions qui sont le plus pénalisées par un haut taux de chômage.

[Traduction]

M. Henry: J'aimerais ajouter quelque chose. Le Fonds de solidarité est nouveau; c'est quelque chose de tout à fait récent.

Mme Brushett: En effet, mais je parle des régions rurales du Québec.

M. Henry: Non. Le bureau n'est ouvert que depuis deux semaines à Gaspé et celui de Sainte-Anne-des-Monts l'est depuis environ un mois.

M. Brushett: Vous avez raison.

M. Henry: Il s'agit de quelque chose de nouveau. Il faudra mettre un certain temps avant de nous y habituer, mais de toute manière...

Vous nous parlez de nouveaux changements, d'amendements à la réforme, que nous ne connaissons pas... Voilà pourquoi nous parlons de tel ou tel pourcentage, et nous sommes probablement dans l'erreur, puisque vous avez déjà des amendements qui visent ces pourcentages. Nous ne sommes pas au courant de ces changements proposés.

.1110

Si nous étions mis au courant des changements proposés, nous pourrions les analyser, les étudier et être en mesure de faire des commentaires.

Mme Brushett: Ils n'ont pas encore été adoptés par un vote final à la Chambre pour le moment. Cependant, ils visent précisément les gens qui ont travaillé trois semaines ou un certain nombre d'heures, puis ont chômé un certain temps et ensuite travaillé un certain nombre de semaines de plus. Le projet de loi permettra de combiner toutes ces heures ou toutes ces semaines aux fins de l'admissibilité. Ceux qui sont visés sont les gens qui ne peuvent trouver que du travail à court terme, de menus emplois dans les régions rurales.

M. Henry: Nous avons des feuillets qui expliquent les nouvelles réformes, mais nous n'avons rien reçu au sujet des amendements. Nous ne les connaissons pas et nous ne sommes donc pas en mesure de les commenter. Vous dites que les parlementaires vont en faire la lecture, ou quelque chose de ce genre, mais peut-être que nous devrions en prendre connaissance avant qu'ils ne soient approuvés.

Nous avons des renseignements sur la nouvelle réforme, mais nous n'en avons pas sur les amendements.

Mme Brushett: Ils portent précisément sur les questions que vous avez soulevées. Voilà pourquoi ils seront avantageux dans votre région.

M. Henry: Je l'espère bien.

[Français]

M. Robinson: Mais, madame Brushett, vous reculez avec l'amendement dont vous parlez. Vous me le direz si je fais erreur, mais vous allez reculer de 16 semaines.

[Traduction]

Mme Brushett: Je ne suis pas en mesure de donner une réponse détaillée aujourd'hui, puisque je ne les ai pas devant moi et qu'ils n'ont pas été adoptés par la Chambre. Ils ne font pas partie du projet de loi. La réforme antérieure laissait un écart dans le nombre de semaines, semaines qui seront maintenant calculées en heures, et cet écart a été comblé pour les gens qui travaillent dans des secteurs très saisonniers, dans des régions où le taux de chômage est élevé. Les amendements découlent essentiellement de longues heures de discussion avec les travailleurs saisonniers de la région de l'Atlantique. Voilà donc l'amélioration.

Si vous le souhaitez, je ferai en sorte que mon bureau vous transmette, avant votre départ, des copies des amendements proposés, de sorte que vous puissiez les étudier. Patrick Gagnon est votre député?

M. Robinson: Oui.

[Français]

Oui, c'est Patrick Gagnon.

Mme Brushett: C'est Patrick?

M. Robinson: Je comprends de cela que, si une personne a fait 14 semaines, qu'elles soient consécutives ou non, elle va reculer de 16 semaines.

M. Lavigne: On pourra remonter aux deux ou trois dernières années.

M. Henry: Notre emploi saisonnier est déjà assez précaire. Modifier cela serait vraiment préjudiciable. Nous sommes déjà assez punis. Autrement dit, il faudrait le bonifier au lieu de le modifier à la baisse.

Quant aux heures, c'est très bien pour certaines personnes, mais pour les autres, le statu quo serait plus avantageux.

Le président: Merci, madame Brushett.

[Traduction]

Monsieur Dhaliwal.

M. Dhaliwal (Vancouver-Sud): J'aimerais interroger les deux témoins au sujet de leur situation économique et des effets du référendum sur l'investissement dans votre région. L'incertitude politique a-t-elle eu un effet néfaste sur l'économie dans votre région de la Gaspésie?

[Français]

M. Henry: Je vais lui répondre, monsieur le président. Ce sera très court.

Le président: D'accord.

.1115

[Traduction]

M. Henry: Dans notre région, cela n'a rien changé, car il n'y a pas d'investissement, avec ou sans référendum. Cela n'a rien changé dans notre région - peut-être à Montréal, mais pas en Gaspésie.

Comme je l'ai dit, j'ai bâti la papeterie en 1965,et j'ai bâti l'usine de Murdochville en 1972. Il n'y a eu rien d'autre. Il n'y avait pas de référendum en 1972. Cela n'a rien changé pour...

M. Dhaliwal: Est-ce que vous dites que la situation économique est ainsi depuis longtemps?

M. Henry: Elle se détériore maintenant.

M. Dhaliwal: Vous dites qu'elle se détériore.

M. Henry: C'est pire maintenant parce qu'il n'y a plus de morue. En Gaspésie la pêche représentait presque 75 p. 100 de nos revenus.

M. Dhaliwal: Merci.

[Français]

M. Robinson: Personnellement, il y a cinq ans, en 1991, j'ai mis sur pied une coopérative forestière qui donne annuellement une soixantaine d'emplois, mais qui ne procure de l'emploi que pendant 12, 13 ou 14 semaines. Nous n'avons pas beaucoup de contrats et nous faisons notre possible. Une soixantaine d'emplois aident un peu le milieu, mais il ne faut pas oublier que ce ne sont que des emplois saisonniers. En tout cas, on a fait des efforts de ce côté-là. Ce n'est pas facile.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Dhaliwal.

Monsieur Pillitteri.

M. Pillitteri (Niagara Falls): Merci, monsieur le président. Dans la déclaration liminaire, je crois que M. Robinson a dit...

Le président: Ce n'est pas à moi qu'il faut poser la question. J'ai tout gâché.

M. Pillitteri: Il a déclaré au début de son exposé que le Québec est colonisé depuis 300 ans. C'est une des observations qu'il a faites.

Permettez-moi de vous expliquer quelque chose. J'habite en Ontario. Je suis né dans un autre pays, et ce n'était certes pas facile de venir au Canada. À l'âge de 10 ans, je me rappelle que quelqu'un dans le pays où je suis né pensait qu'il serait préférable de se séparer du continent. Je me souviens d'avoir porté un drapeau séparatiste. Il va sans dire que je ne comprenais pas à l'époque la signification d'un drapeau séparatiste. Je savais seulement que c'était un drapeau. Peut-être que j'avais déjà le goût de la vie politique ou le sens de la nation, et que c'est cela qui m'a incité à porter un drapeau.

Cela s'est passé il y a 50 ans. Après 50 ans, la région n'a pas beaucoup changé. La seule chose qu'elle ait faite, ce fut de se concentrer sur l'éducation comme moyen de créer des emplois au lieu de dépendre de ses ressources naturelles, qui, malgré les efforts de la population, ne produisaient pas grand-chose. Les pouvoirs publics dans cette région du pays ont donc décidé de se concentrer sur l'éducation de la population, et on voit maintenant que le nombre de fonctionnaires, de policiers et d'autres gens instruits venant de cette région a augmenté dans tout le pays.

Mais permettez-moi de vous signaler aussi qu'en tant qu'immigrant ou député assis à cette table, je ne me vois pas comme un citoyen de deuxième ordre. Je me vois comme un de ces Canadiens qui ont contribué à la diversité de ce grand pays, qui est enrichi du fait français et du fait anglais. Je m'en sens aussi fort enrichi.

Monsieur, vous avez passé six ou sept ans en Alberta, où vous vous sentiez un citoyen de deuxième ordre. Est-ce que cela signifie que si je décidais d'investir et de créer de nouvelles technologies pour exploiter les ressources dans votre région du Québec, je serais traité comme un citoyen de deuxième ordre?

.1120

M. Henry: Il faut faire attention à la façon dont vous interprétez mon commentaire. J'ai parlé du Québec et aussi du Canada, de tous les endroits où j'ai travaillé à l'extérieur de ma région. Je n'utilise pas le terme citoyen de deuxième ordre au sens absolu, mais plutôt quand il s'agit de trouver un emploi. J'étais en Alberta. Je n'ai pas dit que j'ai été traité comme un citoyen de deuxième ordre; c'était plutôt quand il s'agissait de trouver un emploi.

M. Pillitteri: Cela revient à la même chose.

M. Henry: Non. Je suis allé travailler l'an dernier à Lebel-sur-Quévillon, dans la région de l'Abitibi, au Québec. Quand mon travail a été fini, on m'a renvoyé chez moi car il y a des gens dans la région qui sont au chômage et qui ont besoin de mon emploi.

Une voix: Vous êtes donc citoyen de deuxième ordre dans le Nord du Québec?

M. Henry: Ce serait pareil si je voyais demain matin qu'on est en train de construire un grand édifice à côté de ma maison et qu'on a embauché quelqu'un d'un autre pays alors que je dois rester chez moi au chômage. Je réagirais en disant qu'on m'enlève mon emploi, que je suis chez moi ici. C'est comme ça que le système fonctionne.

M. Pillitteri: C'est comme ça que nous pensons qu'il fonctionne.

M. Henry: De toute façon, c'est la jungle du secteur de la construction. Je ne crois pas qu'on puisse faire grand-chose pour y remédier.

Le président: Merci, monsieur Pillitteri.

Monsieur Lavigne.

[Français]

M. Lavigne: Je voudrais vous poser une question à tous les deux.

Vous êtes de la Gaspésie. Avez-vous un organisme de développement régional dans votre région?

M. Robinson: Oui. Nous en avons un à la MRC Denis-Riverin. Nous avons la SADC qui a été fusionnée avec le CAE. Il y a aussi le CRCD à Gaspé.

M. Lavigne: Vous n'avez pas fondé un organisme à but non lucratif qui vous permettrait d'aller chercher des ressources dans le cadre d'un des programmes de Développement des ressources humaines Canada?

Par exemple, dans ma circonscription, qui est une circonscription défavorisée, nous avons Info-PME, qui dispense de l'information aux PME. Grâce à ce bureau, qui est financé par Développement des ressources humaines Canada, vous pouvez obtenir tous les renseignements sur tel ou tel programme, et c'est gratuit.

On a aussi formé un autre organisme qui s'appelle Cible retours à l'emploi. Si vous perdez votre emploi demain matin, que vous n'avez pas fait de curriculum vitae depuis 30 ans que vous ne savez pas comment vous présenter devant un propriétaire d'entreprise, Cible retours à l'emploi vous aidera à préparer un curriculum vitae et à mieux vous présenter devant un propriétaire d'entreprise.

Nous tentons actuellement de greffer à ces deux organismes-là un organisme qui s'appelle ATI, l'aide aux travailleurs indépendants.

Si vous voulez lancer une entreprise tout seul, ATI vous aidera à préparer votre plan d'affaires et à vous partir en affaires. Vous avez le droit de retirer de l'assurance-chômage pendant un an, pourvu que votre plan soit accepté.

Ce genre d'organisme existe-t-il chez vous, en plus de celui dont vous m'avez parlé?

Cela existe chez nous. J'en ai créé trois autres pour m'aider à créer de nouvelles PME. Cette année, par l'intermédiaire de Info-PME, nous avons créé 83 nouvelles PME.

Nous avons reçu à ce bureau 496 personnes et les 83 nouvelles entreprises emploient maintenant 350 personnes.

Y a-t-il des développements semblables chez vous?

M. Robinson: Auparavant, il y avait les programmes PDE. Tout le monde a connu cela. Plusieurs programmes ont été montés spécifiquement pour la formation des gens, pour les aider à se présenter devant l'entreprise, pour leur montrer comment se lancer en entreprise, comment préparer un curriculum vitae.

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Chez nous, Action Travail Denis-Riverin a monté un répertoire de produits de consommation en région. Je puis vous dire, monsieur, qu'en région les subventions ne sont pas faciles à obtenir. On nous remet cela à raison de 500 $ ou 600 $. Donc, habituellement, on fait cela bénévolement.

Cela fait deux ans qu'Action Travail Denis-Riverin milite bénévolement. En deux ans, on a retiré 1 800 $ des gouvernements provincial et fédéral. Ce n'est pas facile. On fait cela bénévolement depuis deux ans. On fait la promotion de l'emploi, on donne des renseignements aux gens et on les aide à monter leur projet d'entreprise. Tous font cela bénévolement.

Malgré tout, il se fait du travail sur le terrain. Si vous passez chez nous, vous viendrez voir cela.

M. Lavigne: Je vais y aller cet été et j'irai vous voir. Ils vont peut-être me massacrer la bedaine quand j'arriverai.

Le président: Merci, monsieur Lavigne.

[Traduction]

Madame Brushett, est-ce la dernière question?

Mme Brushett: Monsieur le président, ce n'est pas une question.

J'ai téléphoné à mon personnel pour demander des copies des amendements que vous pourriez emporter avec vous. J'aimerais vous assurer que nous nous préoccupons de cette question, que le gouvernement se rend bien compte du taux élevé de chômage et des besoins de la région. Nous présentons ces amendements dans le cadre de la politique du gouvernement libéral, dans le cadre du projet de loi qu'a déposé le gouvernement du Canada. Nous savons que si la Chambre l'adopte, les régions rurales du Québec, la Gaspésie et les îles-de-la-Madeleine en bénéficieront. Nous vous les remettrons dans quelques minutes, avant que vous partiez.

[Français]

Le président: Merci, madame Brushett. D'après moi, la Gaspésie est l'un des plus beaux et plus intéressants endroits du monde. Pourrait-on augmenter le tourisme dans cette région, afin de vous aider à y créer plus d'emplois?

M. Henry: Oui. On a mis beaucoup l'accent sur les rivières de pêche au saumon, sur les attraits touristiques de la pêche. Certains projets ont débuté il y a trois ou quatre ans et d'autres, l'année dernière.

[Traduction]

La situation s'est beaucoup améliorée au cours des cinq dernières années.

[Français]

M. Robinson: Parfois, c'est la gestion des programmes qui est très mauvaise. Certains programmes n'ont pour objet que de couper les branches de chaque côté du chemin. Ce sont des programmes complètement inutiles.

Nous avons fait de belles affiches publicitaires, que nous avons placées autour de tous les villages, indiquant où se trouvaient les lacs. Nous avons préparé un bottin touristique. On y explique de quelles mouches on doit se servir pour la pêche, et toutes sortes de petits trucs de ce genre. Je pense que cela a eu un certain impact. Nous cherchons à amener le touriste chez nous, à le garder le plus longtemps possible et, par le fait même, à créer un certain nombre d'emplois.

[Traduction]

Le président: Merci, madame Brushett.

[Français]

Au nom de tous les députés, j'aimerais vous remercier d'être venus. On me dit que vous avez conduit toute la nuit pour venir ici. Vous avez passé combien d'heures sur la route?

M. Robinson: Quatorze heures.

[Traduction]

C'est 14 heures de route, sans arrêter.

M. Henry: Trois heures de plus pour moi.

Le président: Cela fait 17 heures de route.

[Français]

Vous devez être complètement épuisés. Merci beaucoup d'avoir comparu devant nous...

M. Robinson: À part cela, nous retournons ce soir.

Le président: ...et d'avoir exposé les problèmes de votre région. Au nom de tous les députés, encore une fois, je vous remercie.

M. Robinson: Merci beaucoup.

Le président: La séance est levée.

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