[Enregistrement électronique]
Le jeudi 25 avril 1996
[Traduction]
Le vice-président (M. English): La séance est ouverte. M. Graham, le président, est à Montréal cet après-midi. Il ne lui est pas possible de revenir à temps pour la réunion, et il m'a demandé de la présider à sa place.
Nos témoins de cet après-midi vont nous parler du Nigeria, pays auquel s'intéresse de très près notre comité. L'automne dernier nous avons adopté une résolution demandant à des représentants de Shell Canada de venir témoigner. Une réunion avec les représentants de Shell Canada et d'autres compagnies aura lieu en juin, et nous parlerons de la question des sanctions. Comme tous les députés le savent, ainsi que beaucoup d'autres personnes, lors des derniers pourparlers à LondresM. Axworthy a fait plusieurs déclarations sur cette question.
C'est dans ce contexte que nous aimerions être renseignés par des personnes qui connaissent mieux le sujet que nous-mêmes. Nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui quatre représentants de l'Association chrétienne du Nigeria: le révérend Mbang, son président;M. Wiliams, son secrétaire général; le révérend Kukail, secrétaire général de la Conférence des évêques catholiques du Nigeria, et Mme Lawrencia Mallam, conseillère auprès du Conseil laïque provincial du Kaduna.
Monsieur Wiliams.
M. C.O. Wiliams (secrétaire général, Association chrétienne du Nigeria): Nous sommes très heureux d'être parmi vous aujourd'hui. Pour commencer, nous tenons à vous exprimer notre gratitude et notre reconnaissance pour nous avoir invités à venir vous parler du Nigeria en mettant tout particulièrement l'accent sur l'action de l'Association chrétienne du Nigeria, qui depuis près de vingt ans représente une force importante de pression au Nigeria. L'hospitalité dont nous avons joui depuis notre arrivée au Canada est superbe. Soyez certains que nous la garderons en mémoire éternellement.
L'Association chrétienne du Nigeria est née le 27 août 1976, ce qui veut dire que le 27 août de cette année elle aura vingt ans. Les dirigeants de diverses confessions ont été invités à Dodan Barracks ce jour-là, le 27 août 1976, parce que le gouvernement militaire fédéral souhaitait connaître l'opinion des dirigeants religieux sur deux éléments qu'il souhaitait introduire dans nos écoles primaires et secondaires, à savoir le serment national et le salut au drapeau national. Ces deux éléments n'avaient jamais fait partie de l'exercice du matin dans ces écoles jusque-là, et le gouvernement fédéral souhaitait connaître l'opinion des dirigeants religieux au sujet de cette initiative.
Bien entendu, il ne nous a pas fallu beaucoup de temps pour les approuver. Nous avons seulement imposé comme condition que les prières habituelles par lesquelles la journée scolaire commençait jusque-là aient lieu avant la prestation du serment national ou le salut au drapeau.
Immédiatement après cette réunion les divers dirigeants religieux ont été saisis d'une certaine honte. Si le gouvernement pouvait les réunir, pourquoi ne s'étaient-ils jamais réunis de même avant?
Ils ont alors décidé de se rendre à un endroit près de Dodan Barracks pour délibérer de la possibilité de se réunir sur une base régulière. Tous les dirigeants religieux se sont rendus au secrétariat catholique, qui se trouvait près de Dodan Barracks. Ils se sont réunis quatre ou cinq fois par la suite et ont décidé qu'il était important que des confessions religieuses d'une nature aussi diverse continuent à se réunir d'une manière régulière.
Ils ont ensuite réfléchi à plusieurs noms et se sont décidés pour l'Association chrétienne du Nigeria. Les dirigeants religieux sont intimement convaincus que Dieu peut faire quelque chose par l'intermédiaire de cette association pour le Nigeria. C'est ainsi que cette association est née. Personne n'avait pensé à créer un tel organisme.
Au début cet organisme était composé de l'Église catholique romaine, du Conseil chrétien du Nigeria et d'autres instances. Le Conseil chrétien du Nigeria est composé des principales Églises -les anciennes Églises protestantes accréditées, l'Église méthodiste, l'Église anglicane, l'Église baptiste, l'Armée du salut, l'Église presbytérienne, etc. - et de quelques organismes affiliés, tels que le YMCA, le YWCA et la Boys' Brigade. Ces autres instances, après quelque temps, ont réclamé une définition de ce qu'on entendait par «autres», ont réclamé que l'on identifie les divers groupes religieux appartenant à cette catégorie. Il nous a donc fallu réviser notre constitution originale.
Notre association est désormais composée de cinq groupes principaux. Il y a le groupe de l'Église catholique romaine, le Conseil chrétien du Nigeria, la Confrérie pentecôtiste chrétienne du Nigeria et la Confrérie pentecôtiste du Nigeria. La Confrérie pentecôtiste du Nigeria est une branche dissidente de la Confrérie pentecôtiste chrétienne du Nigeria, mais à nos propres fins nous avons décidé de les regrouper.
Ensuite, nous avons l'Organisation des Églises africaines instituées. Ce sont des Églises fondées par des Nigérians; elles ne sont affiliées à aucun groupe à l'étranger. Par exemple, l'Église anglicane est affiliée à l'Église d'Angleterre, l'Église catholique est affiliée à Rome, etc. Mais dans l'Organisation des Églises africaines instituées, il y a des Églises qui ont été fondées par des Nigérians au Nigeria qui n'ont aucun lien avec des organismes extérieurs.
Ensuite il y a la Confrérie ECWA/TEKAN. L'ECWA est l'Église évangélique de l'Afrique occidentale. Auparavant c'était la SIM, ou Mission intérieure du Soudan. Quant à la TEKAN, cette confrérie existe principalement dans le Nord, bien qu'elle ait une ou deux églises dans le Sud.
C'est donc en bref la composition de notre Association chrétienne du Nigeria. C'est désormais une structure oecuménique qui regroupe pratiquement toutes les Églises du Nigeria. Nous avons pour règle de ne pas traiter avec les Églises individuelles. Si une Église souhaite adhérer à l'Association chrétienne du Nigeria, il lui suffit de se joindre à un des cinq groupes, et automatiquement elle est membre de notre association.
Un des rôles de notre association est celui de chien de garde de la nation. Ce rôle, nous en remercions Dieu, notre association l'a joué avec honneur. À cause de ses adhérents elle est devenue un organisme véritablement puissant. Nous surveillons de près la situation au Nigeria, et chaque fois que nous constatons un problème, non seulement pour les chrétiens, mais pour l'ensemble de la population nigériane, nous le dénonçons. Soit nous le faisons par voie de communiqué de presse, soit nous convoquons des conférences de presse et présentons des communiqués dans lesquels nous ne mâchons pas nos mots, dont des copies sont généralement envoyées à nos gouvernants.
Nous en sommes arrivés à un point où aujourd'hui non seulement les chrétiens du Nigeria, mais aussi les non-chrétiens attendent de notre association qu'elle joue le rôle de conscience nationale. Prenez par exemple l'annulation le 12 juin des élections. Abiola, le vainqueur des élections, est musulman; en fait il est vice-président du Conseil suprême des affaires islamiques.
Mais pour nous cela n'a aucune importance; sa religion nous importe peu. Pour nous, des élections libres et justes ont eu lieu, quelqu'un les a gagnées, et comme nous défendons les principes et la philosophie démocratiques nous avons insisté pour que la victoire du vainqueur soit reconnue. Cette attitude a impressionné beaucoup de gens parce qu'ils pensaient que les musulmans devraient être les premiers à revendiquer pour la cause de leur champion Abiola.
Notre association n'a cessé de protester auprès du gouvernement contre l'annulation de ces élections, laissant une forte impression dans cette partie de la population. Depuis elle compte sur notre association, qui n'a pas hésité à défendre le champion de sa cause. Tout particulièrement depuis que la majorité des autres organismes, tels que la CLO, l'Association du Barreau nigérian, le Syndicat des enseignants nigérians, etc., ont plus ou moins été interdits par le gouvernement, notre association est la seule voix qui se laisse entendre et surtout écouter.
Pour cette raison, elle a désormais besoin d'une structure qui lui permet de répondre aux attentes de la population et qui permet également que des organismes tels que l'Association du Barreau nigérian, la CLO, etc., puissent remplir leurs fonctions dans notre société.
Permettez-moi de passer le relais au président pour qu'il complète ce que je viens de vous dire.
Le révérend Sunday Mbang (président, Association chrétienne du Nigeria): Monsieur le président, permettez-moi de vous remercier de nous avoir offert cette possibilité de nous adresser à vous. Le secrétaire vous a déjà remerciés, afin que vous puissiez transmettre ces remerciements à la population canadienne. La réception qui nous est faite depuis notre arrivée au Canada samedi est quelque chose que nous n'oublierons jamais. Et nous savons de quoi nous parlons, car nous voyageons beaucoup en notre capacité de chefs religieux. Nous vous remercions donc infiniment du temps que vous nous accordez.
Vous voudrez savoir pourquoi nous sommes venus au Canada. Je pense que c'est l'élément le plus important. Les Canadiens et les Canadiennes savent assurément ce qui se passe actuellement au Nigeria. Ce que nous traversons exige bien plus qu'une discussion.
L'infrastructure s'est écroulée. Il n'y a pas de routes, ou elles sont toutes en mauvais état. Quant aux écoles, ce n'est guère mieux. Les hôpitaux sont dans un état déplorable. La corruption règne. C'est le désespoir, et tout incite au découragement.
Nous avons cherché à nous inspirer de l'expérience d'autres pays. Nous nous rendons compte que si l'Afrique du Sud a pu réaliser ce qu'elle a réalisé, c'est qu'elle n'était pas toute seule. Je suis convaincu que le Canada compte parmi les pays généreux qui ont aidé l'Afrique du Sud à devenir ce qu'elle est aujourd'hui.
Notre organisation a pris de telles proportions dans notre pays que tout le monde se tourne vers nous pour trouver le salut. Malheureusement, nous ne savons que faire pour leur apporter le salut. La situation au Nigeria exige des mesures sur deux fronts: le long terme et le court terme.
Nous sommes des gens d'Église, et nous ne voulons pas d'une démocratie qui disparaîtra du jour au lendemain. Grâce à notre histoire, grâce à notre expérience, nous avons constaté que même si pendant 25 des 30 années d'indépendance les militaires ont formé le gouvernement, la démocratie qu'ils ont instaurée est souvent de courte durée, car les gens n'ont pas fait d'études... c'est-à-dire qu'ils ne participent pas au processus. Ils ne comprennent pas le genre de démocratie qu'il leur faut. La faim et la pauvreté font partie de notre quotidien, et cela est propice à quiconque veut s'emparer d'un bout de pain, s'écarter du droit chemin.
Quant à l'Église, d'abord et avant tout, elle offre un programme à long terme dans le domaine de l'éducation, grâce à la recherche, à des séminaires, à des conférences, afin de préparer une relève dans cette société. C'est un des aspects de la tâche que nous nous sommes donnée: un programme à long terme pour l'enseignement pour amener les gens à adopter un mode de vie différent, pour préparer une nouvelle génération de politiciens, de nouveaux chefs de file pour le pays.
Nous pensons que la seule organisation, le seul groupe capable de réussir sur ce plan, car on a pu le constater ailleurs, c'est l'Église. Il semble que toute la collectivité nigériane se tourne vers nous pour que nous offrions ce leadership. Voilà pourquoi nous sommes venus partager avec vous nos aspirations, nos préoccupations et nos souhaits, et, parce que vous avez fait la même chose dans d'autres pays, nous voulons que vous puissiez partager avec nous et, si possible, que vous nous appuyiez dans nos efforts.
Pour l'instant, nous travaillons exclusivement à partir du secrétariat catholique. Toutefois, le secrétariat catholique ne nous permet pas de faire ce que nous souhaiterions faire.
Par exemple, il faut songer à ce que la société Shell fait au Nigeria. Si nous avions pu compter sur une commission vouée expressément à la question, il y aurait eu de la recherche technique. Si l'on me demandait ce que la société Shell fait au Nigeria, je ne pourrais pas aller au-delà d'une réponse sentimentale, ne disposant pas de données scientifiques. Nous souhaitons que diverses commissions puissent faire ce travail pour nous, qu'il s'agisse de santé, d'éducation, de sociétés multinationales ou d'autres choses.
Forts de ces programmes de recherche, de toute la documentation que l'on pourra réunir, nous pourrons agir sur deux plans. Nous pourrons commencer à refaire oeuvre éducative auprès de notre peuple. D'autre part, nous pourrons mieux renseigner les gens qui veulent s'informer sur le Nigeria. Actuellement, quiconque vient au Nigeria n'entend que le son de cloche du gouvernement. Le gouvernement au pouvoir actuellement ne donne sans doute pas nécessairement les renseignements recherchés. Si l'Église pouvait compter sur ses propres programmes de recherche, les personnes intéressées pourraient comparer un document en provenance de l'Église et un autre en provenance du gouvernement, les mettre en regard et tirer leurs conclusions.
Ainsi, notre objectif est de vous sensibiliser, de vous mettre au courant, pour que vous compreniez la situation dans laquelle nous nous trouvons, nous, la communauté chrétienne du Nigeria. Mais je tiens à vous assurer que notre oeuvre ne se limite pas à la communauté chrétienne. Nous voulons que toute la population soit instruite, car, sans cela, sur le continent africain, une nation aussi formidable que le Nigeria n'a pas d'avenir.
Je suis sûr que le secrétaire général de la conférence catholique complétera si j'ai oublié quelque chose.
Le révérend Matthew Hassan Kukail (secrétaire général, Conférence des évêques catholiques du Nigeria): Permettez-moi de vous redire toute notre gratitude pour votre hospitalité. Je ne pense pas avoir à ajouter quoi que ce soit, mais il faut bien dire que nous tentons de voir comment nous pouvons édifier et consolider notre société civile au Nigeria, car c'est ainsi que nous espérons pouvoir inculquer aux Nigérians les valeurs et les stratégies essentielles à l'atteinte d'une démocratie durable.
Jusqu'à présent, étant donné le degré de pauvreté et d'analphabétisme dans notre société, et étant donné que les militaires sont au pouvoir, il a été extrêmement difficile pour notre peuple de porter son attention sur les dossiers essentiels, les ingrédients de la démocratie, comme la responsabilité et tout ce que représentent les notions de justice et de protection des droits de la personne. Les aléas du gouvernement militaire ont dans une grande mesure étouffé l'imagination d'un grand nombre de Nigérians à tel point que les Nigérians en sont réduits à interpréter la démocratie comme une simple question de suffrage, de partis politiques, de manifestations purement externes.
Comme l'a dit le président, nous nous sommes donné un programme très ambitieux, mais je pense qu'il serait plus utile de passer à la période de questions et réponses pour vous donner plus de précisions. À vrai dire, ce que nous avions à vous dire a déjà été dit par le président et le secrétaire de l'ACN.
Merci beaucoup.
Le vice-président (M. English): Merci, mon père.
Madame Mallam, vous pouvez ajouter quelque chose si vous le souhaitez. Vous travaillez à la promotion des droits de la femme et de la santé des femmes, n'est-ce pas?
Mme Lawrencia Mallam (conseillère auprès du Conseil laïque provincial du Kaduna, Association chrétienne du Nigeria): Les femmes du Nigeria ont également un rôle à jouer dans le développement du pays. Ce rôle prend diverses formes, dans divers groupes et à divers niveaux.
Au Nigeria, il existe un regroupement des femmes, le Conseil national des sociétés de femmes. Au sein de ce regroupement, on trouve diverses associations de femmes - religieuses, sociales, ethniques, et toute une gamme de clubs. Ainsi réunies, leur objectif est de travailler ensemble, en équipe, et d'offrir une voix commune pour faire des revendications auprès du gouvernement ou de toute autre organisation au pouvoir.
Nos femmes sont parvenues à accomplir énormément de choses.
Par le passé, les femmes travaillaient isolément et ne pouvaient pas aboutir à quoi que ce soit. Désormais, le gouvernement reconnaît notre contribution. Un ministère de la condition féminine a été créé, et c'est une femme qui le dirige. C'est donc là que nous adressons nos revendications, et, grâce au ministère, nous avons pu accomplir beaucoup de choses.
Au sein du groupe qui est venu au Canada, je représente l'aile féminine de l'ACN. Nous avons notre rôle à jouer en tant que groupe religieux. Il y a bien des femmes qui ne sont pas encore alphabétisées, et nous devons les aider. L'analphabétisme est une maladie en soi, mais avec l'instruction vient l'autonomie. À l'intention de ces femmes qui n'ont pas pu s'instruire, l'ACN offre des programmes pour les aider à se perfectionner, et elles apprennent ainsi à lire et à écrire, ou elles participent à de petits projets qui leur permettent d'améliorer leur sort.
Pour venir en aide à la population, nous avons des écoles d'enseignement général et d'enseignement professionnel. Je dis: «des écoles». Nous avons constaté que, dans les diverses écoles du gouvernement, nos enfants ne reçoivent pas d'enseignement moral. Autrefois, les écoles étaient dirigées par des missionnaires, mais ce n'est plus le cas. Dans les Églises, les femmes tentent d'apporter leur contribution en enseignant le catéchisme, en donnant des cours d'initiation à la Bible, etc. C'est comme cela que nous réussissons à inculquer à nos enfants une certaine discipline et des valeurs morales. Voilà ce que font les femmes.
Nous avons dans notre pays beaucoup de veuves qui ne sont pas instruites, comme je l'ai dit au début de mon intervention. Ces femmes n'ont aucun espoir. Nous essayons de les aider. Nous les rencontrons et nous essayons de voir comment nous pourrions leur redonner l'espoir.
Certaines veuves ont des fermes. Il y a un groupe de veuves qui possèdent une terre. Nous encourageons les femmes à apporter une contribution quelconque, à venir vendre les produits de leur ferme à la fin de la saison. Elles doivent pouvoir réaliser des petits bénéfices pour pouvoir s'aider elles-mêmes.
Nous faisons donc ces choses-là et nous faisons aussi d'autres choses, comme engager le dialogue avec les femmes musulmanes, surtout dans le Nord du pays. Le système qui astreint les femmes musulmanes à mener une vie retirée ne permet pas aux hommes de communiquer avec elles; alors ce sont les femmes qui tentent d'engager le dialogue avec elles.
Au Conseil national des sociétés de femmes, nous avons des rencontres avec les femmes musulmanes. Nous dialoguons avec elles. Il n'est pas facile de s'entendre avec les musulmans. À leurs yeux, tout ce qu'ils font est bien, même quand c'est mauvais. La plupart des crises que nous connaissons au Nigéria sont causées par les musulmans, parce qu'ils ont une façon de penser qui est différente de la nôtre. Nous essayons donc de dialoguer avec les femmes musulmanes.
Voilà sur quoi les femmes concentrent leurs efforts, car quand il y a un problème, quand il y a des émeutes, ce sont les femmes et les enfants qui en souffrent le plus. Nous sommes tellement bouleversés par ce phénomène que nous essayons de faire tout ce que nous pouvons pour que nous puissions vivre les uns avec les autres dans la paix et l'harmonie.
Ainsi, les divers groupes de femmes sont très actifs quand il s'agit de faire accepter leurs droits.
Le vice-président (M. English): Merci beaucoup, madame Mallam.
Nous avons environ une demi-heure pour les questions. Nous devons terminer à 16 h 30, parce que nos invités ont un autre engagement. Les membres ont-ils des questions à poser?
[Français]
Mme Debien (Laval-Est): Bonjour et bienvenue au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Je vais vous poser une question sur des événements très récents.
Vous savez que le ministre des Affaires étrangères, M. Axworthy, arrive tout juste de Washington et de Londres, en particulier, où se tenait la réunion du groupe d'action ministériel du Commonwealth sur la déclaration de Harare, où on devait traiter particulièrement de la question du Nigeria.
À la première rencontre de décembre, la secrétaire d'État pour l'Amérique latine et l'Afrique, Mme Stewart, nous avait dit que le groupe allait recommander différentes mesures, dont l'exclusion de toutes les réunions du Commonwealth des représentants du Nigeria. Ce pays serait également exclu de toute manifestation sportive, toute assistance technique cesserait, tous les contacts gouvernementaux avec les agences nigériennes seraient évités et, enfin, d'après les journaux et revues de presse que nous avons, le groupe a recommandé de bannir la vente d'armes au Nigeria, d'imposer des restrictions à l'obtention de certains visas et d'éviter toutes les relations diplomatiques et culturelles avec le Nigeria.
Par contre, on sait que le Canada et certains autres pays ont recommandé un embargo pétrolier et que cet aspect de la recommandation du groupe n'a pas été accepté par tous les pays participants.
Ces premières mesures n'ont rien donné, semble-t-il, puisque le gouvernement nigérien est resté à peu près complètement fermé à toutes ces mesures. On attend de voir ce que les prochaines vont donner.
Un autre groupe a été mis sur pied pour proposer de nouvelles mesures et convaincre les pays les plus réticents. C'est ce que j'ai compris des revues de presse.
Vous qui êtes vraiment diligent là-bas, que pensez-vous de toutes ces mesures et surtout de la plus importante, c'est-à-dire celle d'un embargo pétrolier contre le Nigeria?
[Traduction]
Le révérend Mbang: Monsieur le vice-président, en notre qualité de dirigeants ecclésiastiques, nous ne pouvons faire autrement que d'être préoccupés par tout ce qui peut nuire à la population du Nigeria.
Nous avons examiné le communiqué de presse des pays du Commonwealth. Nous croyons que les mesures qui y sont énumérées, si elles étaient mises en oeuvre à la lettre et de façon sincère, produiraient les résultats escomptés, du moins au début. Nous sommes très reconnaissants envers le Canada, parce que nous avons appris que vous participez avec beaucoup d'ardeur à la lutte pour nous amener le salut.
Nous croyons que si les recommandations étaient prises au sérieux, surtout celles qui causeraient des inconvénients aux couches supérieures de la société, celles-là mêmes qui rendent la vie difficile pour la population du Nigéria, et qui feraient en sorte que les familles des dirigeants n'auraient plus accès aux biens du monde occidental, si on allait même plus loin et qu'on gelait les fonds que les riches ont dans ces endroits et qu'on faisait une multitude d'autres petites choses, nous commencerions sans doute à voir des changements très importants.
J'ai demandé ce matin, quand la question a été soulevée au ministère des Affaires étrangères: comment pouvons-nous avoir l'assurance que les États membres donneront suite à ces recommandations? J'ai constaté qu'après la conférence du Commonwealth en Nouvelle-Zélande, la plupart des États membres n'ont pas donné suite aux recommandations sur les visas. On nous avait dit que les militaires ne recevraient pas de visas des pays du Commonwealth qui avaient participé à cette conférence. Nous sommes toutefois très conscients du fait que certains pays ont néanmoins accordé des visas à des militaires.
Nous sommes d'avis que, si certaines des mesures qui sont énumérées sont mises en oeuvre à la lettre et de façon sincère par tous les pays membres, vous n'auriez peut-être même pas besoin de parler de l'embargo pétrolier. Si toutefois il se révèle en dernière analyse que c'est là le seul moyen d'amener les militaires à changer, nous serions bien malvenus de vous dire de ne pas imposer cet embargo.
Nous croyons cependant que les mesures énumérées doivent être mises en oeuvre de façon sincère. La question que j'ai posée visait à savoir si tous les pays membres qui ont apposé leurs signatures à ces mesures donneront suite à leur engagement de façon efficace, sincère et honnête. Le problème, c'est que, si les pays membres ne donnent pas suite à leur décision, on aura l'impression que ces mesures ne donnent pas de résultats. Je crois, pour ma part, que, si elles sont mises en oeuvre, elles auront l'effet voulu.
Le vice-président (M. English): Monsieur Flis.
M. Flis (Parkdale - High Park): Vous nous avez remerciés de vous avoir écoutés. Nous vous remercions à notre tour d'être venus nous rencontrer pour faire le point sur ce qui se passe dans votre pays. En notre qualité de parlementaires, nous ne pouvons pas être spécialistes de tous les domaines ni savoir ce qui se passe dans tous les pays. Vous nous rendez donc un immense service.
Le plus souvent, l'aide que le Canada accorde à divers pays est utilisée à meilleur escient si elle va aux ONG. Je me demande si vous pourriez nous dire quelles sont les ONG qui travaillent au Nigeria et lesquelles sont les plus efficaces. Je parle des organisations non gouvernementales.
Le révérend Kukail: Cela vous intéresserait peut-être aussi de savoir que notre voyage ici a été rendu possible grâce à l'aide de M. Gerry Ohlsen, du haut-commissariat du Canada. Nous avons des contacts avec certains des groupes qui travaillent avec les diverses ONG oeuvrant au Nigeria. Même chez nous, au Nigeria, nous avons des contacts suivis avec certaines des organisations de défense des droits de la personne.
Même si notre voyage est de nature surtout exploratoire, nous en avons tiré assez d'enseignements pour nous aider à continuer à avancer vers la réalisation de nos objectifs. Nous espérons que les voies de communication qui ont été ouvertes resteront ouvertes. Nous espérons aussi que nous pourrons, malgré nos ressources limitées, vous tenir autant que possible au courant des progrès que nous faisons et de la situation au Nigeria.
Nous considérons qu'une organisation comme la nôtre, si elle a les moyens voulus, peut être une troisième voix, de façon qu'il n'y ait pas seulement le gouvernement et la communauté internationale; nous devrions pouvoir jouer un rôle pour ce qui est de présenter un point de vue différent au sujet de ce qui se passe au Nigeria.
Le vice-président (M. English): Autres déclarations? Monsieur Paré.
[Français]
M. Paré (Louis-Hébert): Je suis un peu surpris que vous ne nous ayez pas beaucoup parlé de toute la question des droits de la personne. J'aimerais que vous nous traciez un certain bilan de la manière dont les droits fondamentaux des Nigériens sont respectés. Comment cela se passe-t-il?
[Traduction]
M. Wiliams: À vrai dire, les droits humains fondamentaux ne sont pas très respectés par ceux qui sont au pouvoir. Nous avons de nombreux cas d'arrestation arbitraire. Les gens sont détenus sans procès et ne sont jamais amenés devant les tribunaux. Le gouvernement militaire gouverne par voie de décrets, de sorte que, dès qu'il arrive au pouvoir, il abroge la constitution qui régit le pays.
Bien souvent, le pouvoir judiciaire n'a plus de sens. Naturellement, nous contestons souvent cet état de fait; non seulement nous émettons des communiqués de presse et tenons des conférences de presse, mais à deux reprises nous avons amené le gouvernement militaire fédéral devant les tribunaux. Les deux fois, nous avons eu gain de cause, mais les juges ont dit qu'ils avaient les mains liées en raison du décret selon lequel il est interdit de contester le gouvernement militaire devant les tribunaux. Ainsi, les tribunaux, qui sont là pour rendre justice et qui constituent le dernier recours pour l'homme moyen, ne sont pas reconnus.
Comme je vous l'ai dit quand je vous ai présenté notre association, la CLO et les diverses organisations de défense des droits de la personne ont été pratiquement abolies ou rendues impuissantes. Autrefois, le NUT, la CLO, l'Association du Barreau du Nigeria et le syndicat des professeurs d'université pouvaient dénoncer les agissements du gouvernement. Cependant, tous ces groupes ont ni plus ni moins été abolis, et le seul groupe qui reste au Nigeria et à qui tout le monde s'en remet, c'est l'Association chrétienne du Nigeria, l'ACN.
Le gouvernement sait qu'il a en nous un adversaire de taille. Dès que le gouvernement empiète sur les droits des institutions nigérianes, nous avons l'audace de le dénoncer. Il n'en reste pas moins qu'en règle générale les droits de la personne ne sont pas du tout respectés.
Le vice-président (M. English): Pour faire suite à cette question, vous arrive-t-il, à votre organisation ou aux membres individuels, d'être harcelés directement par le gouvernement?
M. Wiliams: Je dois répondre par la négative: pas jusqu'à maintenant. Je crois que le gouvernement souhaiterait nous voir partir, mais il sait que nos fidèles sont nombreux. Ce n'est pas le gouvernement qui fait élire nos dirigeants, et le gouvernement ne peut donc pas exercer d'influence sur l'ACN. Même si un dirigeant est destitué, ce n'est pas le gouvernement qui nomme le remplaçant, c'est l'ACN elle-même.
Le gouvernement nous surveille. Même lorsque le gouvernement prétend ne pas être influencé par nos déclarations, nous savons fort bien que lorsque nous parlons le gouvernement tremble.
Le vice-président (M. English): Et lorsque vous prenez la parole vous avez accès aux médias?
M. Wiliams: Oui, certainement.
Le révérend Mbang: Dès que je serai de retour au Nigeria après une absence de deux semaines, les médias vont vouloir savoir où j'ai été. Voilà l'aspect intéressant...
Le vice-président (M. English): Certaines personnalités politiques canadiennes ont le même problème.
Le révérend Mbang: Voilà pourquoi j'ai dit que nous sommes en quelque sorte tenus de faire quelque chose. Tout le monde a constaté que nous sommes le seul groupe... On nous qualifie parfois de «vaches sacrées», puisque nous sommes le seul groupe à avoir été épargné par le gouvernement.
Au cours des dix dernières années - puisque je dirige l'Église depuis 10 ans maintenant - j'ai contesté le gouvernement dans toutes sortes de déclarations lorsque ses agissements le justifiaient d'après moi, et je l'ai louangé pour ses bonnes actions. Cependant, jusqu'à mon départ pour le Canada tout au moins, personne ne m'a jamais contesté. Je ne sais pas ce qu'il adviendra à mon retour dimanche.
Voilà pourquoi nous sommes obligés de faire quelque chose. Les gens estiment que si nous sommes le seul groupe à avoir été épargné, c'est peut-être de notre côté que doit venir le salut.
Le révérend Kukail: Comme vous le savez, le Nigeria compte également une population musulmane considérable. Sur le plan religieux, les deux organismes de direction sont l'Association chrétienne du Nigeria et le Conseil suprême des affaires islamiques. Cependant, la semaine dernière - comme vous l'avez peut-être entendu dire aux nouvelles - le dirigeant de la communauté musulmane du Nigeria a été renvoyé.
Il faut dire que bon nombre des dirigeants musulmans, et c'est le cas de l'homme qui a été renvoyé, ne se bornent pas à des activités politiques. Cette personne dépendait également du gouvernement militaire, qui l'avait installé. Ainsi, pour la prochaine année, ou même plus longtemps, on peut supposer que la direction de la communauté musulmane sera en période de crise.
Notre position demeure la même... Il ne s'agit pas de tirer parti du vide qui s'installe. Il est cependant encore plus pressant pour nous, comme l'a rappelé le président, d'assumer la responsabilité dont nous avons été investis.
Assez paradoxalement, en dépit des positions très fermes du gouvernement, les médias du Nigeria continuent d'être parmi les plus dynamiques de l'Afrique. Nous jouissons d'une liberté de presse considérable, même si certaines entreprises de presse ont été fermées à l'occasion. Je pense par exemple au cas d'un rédacteur en chef de journal qui est incarcéré depuis le 24 décembre. Mais, dans l'ensemble, la liberté de presse dont nous jouissons n'a pas son égale ailleurs en Afrique.
Le vice-président (M. English): Merci beaucoup.
Madame Debien.
[Français]
Mme Debien: Monsieur Kukail, vous venez de parler d'un sujet qui soulève une autre question. Vous avez parlé des Églises chrétiennes et du Conseil des Églises chrétiennes. Vous avez dit aussi qu'il y avait un conseil islamique.
On sait qu'au début juin, il y a eu des affrontements entre les Ibo qui sont, je pense, d'origine chrétienne, et les Hausa qui sont musulmans. Y a-t-il une concertation entre les Églises chrétiennes chez vous et le mouvement islamique en vue de régler ces affrontements entre ces deux groupes ethniques différents et de religions différentes?
[Traduction]
Le révérend Kukail: Pour l'Église catholique, il existe une commission pour le dialogue entre chrétiens et musulmans; elle est dirigée par un évêque. L'Association chrétienne du Nigeria est représentée au gouvernement de l'État et aux gouvernements locaux. À ce dernier palier, selon l'endroit où les flambées de violence ont lieu, les divers dirigeants religieux prennent toutes sortes d'initiatives pour favoriser la conciliation.
Pour ce qui est des émeutes qui ont eu lieu au Nigeria, rappelons que les Ibos sont surtout des chrétiens. Or, bon nombre des difficultés du Nigeria ont l'apparence de conflits entre chrétiens et musulmans, mais, en réalité, n'ont rien à voir avec la religion. Il s'agit surtout d'intérêts d'affaires qui cherchent à se placer les pieds. Les troubles résultent surtout de l'hostilité entre groupes commerciaux rivaux. Les Ibos de Kano, par exemple, sont surtout des commerçants. Or, puisque90 p. 100 d'entre eux sont des chrétiens, lorsqu'un événement de cette nature survient, il finit par avoir une connotation religieuse, même si, au départ, il n'avait rien à voir avec la religion.
Certaines des émeutes qui ont eu lieu dans diverses régions du Nord du Nigeria étaient tout simplement liées à des efforts d'auto-détermination, fort semblables par ailleurs à ceux des Ogonis, sauf que, dans ce dernier cas, il n'aurait pas été possible aux Ogonis d'accuser qui que ce soit de persécution religieuse.
Pour ce qui est du Nord du Nigeria, lorsque des problèmes d'autodétermination se sont posés et ont débouché sur des émeutes et de la violence, la plupart des participants étaient des groupes non musulmans qui se sont généralement opposés à des musulmans, ce qui a abouti à une situation quelque peu déroutante. Bien des gens peuvent avoir tendance à y voir des conflits entre chrétiens et musulmans, mais les vrais problèmes ne se situent pas sur le plan de la religion.
Je répondrai donc à votre question une fois de plus par l'affirmative en vous disant que des efforts sont effectivement faits sur le terrain pour faciliter le dialogue. Voilà pourquoi, dans nos démarches d'alphabétisation, nous nous soucions de faire valoir à la population que les différences religieuses, ethniques et sexuelles ne devraient pas être des causes d'anxiété et de méfiance.
Le vice-président (M. English): Monsieur Dupuy.
M. Dupuy (Laval-Ouest): Permettez-moi tout d'abord de vous dire que vous êtes tout à fait les bienvenus ici au Canada. Vous êtes ici en terre d'amitié. Nous avons entretenu de bonnes relations avec le Nigeria au fil des années; elles ont parfois été meilleures à certains moments qu'à d'autres.
Voilà pourquoi la situation dans laquelle vous vous trouvez actuellement nous attriste tant. Votre pays est un grand pays. Vous êtes l'un des chefs de file de l'Afrique, et vous devriez être l'un des chefs de file à l'échelle mondiale. La situation est d'autant plus inquiétante qu'elle est essentiellement attribuable à votre gouvernement, et non pas au manque de richesse ou de potentiel du Nigeria.
Dans ce genre de situation, il arrive, comme cela s'est passé ailleurs dans le monde à diverses époques, une évolution qui entraîne un changement de gouvernement. Parfois, c'est l'opposition qui se constitue et prend une telle force et une telle importance que le gouvernement doit changer. Parfois, c'est une intervention étrangère qui vient modifier la situation. C'est ce qui est arrivé, par exemple, à Haïti. C'est surtout à cause de pressions étrangères et d'une intervention directe que le changement s'est produit. Parfois, c'est un mélange des deux, comme ce fut le cas pour l'Afrique du Sud.
Selon vous, les forces d'opposition sont-elles suffisamment fortes au Nigeria pour entraîner le genre de changement dont je parle? Compte tenu de la taille du Nigeria, je vois difficilement une intervention étrangère du genre de celle qui s'est produite à Haïti. Si la solution qui s'impose est celle d'une convergence de l'opposition intérieure et des pressions extérieures, j'aimerais vous demander quel est le rôle le plus utile que pourrait jouer un pays ami comme le Canada pour vous venir en aide.
Le vice-président (M. English): Voulez-vous répondre à cette question?
Le révérend Mbang: Cela revient en partie à ce que je disais plus tôt. En effet, si nous sommes en mesure d'instruire la population - et je pense ici aussi bien au long terme qu'au court terme - et que cette dernière comprend de mieux en mieux ses intérêts, nous aurons, au Nigeria, une opposition dynamique. À ce moment-là, les gens ne diront pas n'importe quoi... Nous avons constaté, en effet, que les Nigérians se laissent facilement mener par le bout du nez à l'heure actuelle, étant donné qu'ils ne comprennent pas nécessairement le tort qu'on leur cause. Donc, une fois l'opposition en marche... Grâce à nos efforts d'alphabétisation, diverses autres institutions, l'Union des libertés civiles et toutes les autres qui ne semblent pas avoir été très actives, entreront peut-être dans la danse pour former un mouvement d'envergure à l'intérieur du pays. Mais l'aide de l'extérieur continuera d'être nécessaire, comme elle le fut en Afrique du Sud.
Ce n'est pas par la force militaire qu'on pourra résoudre les problèmes du Nigeria. L'aide que ce pays doit recevoir est semblable à celle qui a été donnée aux Sud-Africains pour qu'ils soient en mesure de s'aider eux-mêmes. Je suis convaincu que c'est là une solution préférable.
[Français]
M. Paré: On se rappelle que dans la solution de l'apartheid en Afrique du Sud, le Canada a joué un rôle important de rassembleur et de chef de file de la communauté internationale.
J'aimerais reprendre la question de M. Dupuy. Vous êtes venus au Canada avec des attentes précises, et j'aimerais que vous soyez plus explicites quant à ce que le Canada peut faire pour vous.
Par quels moyens peut-on vous aider?
[Traduction]
M. Wiliams: Comme nous l'avons dit, notre association se voit imposer une tâche formidable. Nous remercions Dieu tout d'abord qu'elle soit à la hauteur de la tâche.
Comme l'a expliqué le père Kukail cependant, nous n'avons pas la structure voulue. Nous n'avons pas tout ce qu'il nous faut pour répondre aux exigences de la tâche qui nous attend. Nous n'avons pas de centre de recherche, et l'ACN n'a pas d'administration centrale. Elle n'a pas de secrétariat. Il faut venir en aide à l'association pour qu'elle soit dotée des effectifs et du matériel qui permettront à ses divers services et commissions de faire le travail qu'il y a à faire. Je pense au service des droits de la personne, à celui des femmes, à celui des jeunes et aussi au service interconfessionnel, dont la tâche principale consistera à trouver les moyens d'harmoniser les rapports entre chrétiens et musulmans.
Ce qui est nécessaire, selon nous, c'est de venir en aide à l'ACN, de la renforcer, de manière à ce qu'elle remplisse bien sa tâche et que toutes les organisations que le gouvernement a tenté d'abolir ou d'affaiblir, comme la CLO, une organisation des droits de la personne, l'Association du Barreau du Nigeria, etc., puissent également se lever debout à la faveur des pressions exercées l'ACN.
Le révérend Kukail: Permettez-moi d'ajouter que nous nous considérons comme privilégiés d'être parmi vous. Au départ, nous visions à tenir nos échanges de collaboration avec diverses institutions religieuses. Partout où nous sommes passés, nous avons rencontré des dirigeants du Conseil mondial des Églises. Nous avons eu une rencontre à New York.
Notre mission principale a consisté à exprimer nos nombreux besoins... Notre besoin le plus urgent en est un d'aide financière. Grâce à cette aide, nous pourrions terminer la construction d'un édifice qui est en chantier depuis 15 ans: un centre oecuménique national à Abuja. Lorsqu'il aura été construit, nous pensons être en mesure de relever certains défis. Comme l'a dit le secrétaire de l'organisation, l'ACN oeuvre de façon souterraine depuis 20 ans; elle fonctionne à partir du secrétariat de la Conférence des évêques catholiques.
L'an dernier, je me suis rendu en Afrique du Sud. J'ai été en mesure de voir quelle est la structure du Conseil des Églises de l'Afrique du Sud. Si les Églises ont pu jouer le rôle qu'elles devaient jouer dans ce pays, c'est qu'elles disposaient de ressources matérielles et humaines et de compétences. Devant les grands défis que nous avons à relever, nous nous sentons limités du fait que nous ne disposons d'aucune structure physique à partir de laquelle nous pourrions lancer et mener à bien les initiatives que nous jugeons opportunes.
D'une certaine façon, le fait de vous rencontrer est pour nous un très grand honneur, mais, dans nos discussions avec certains groupes religieux, nous avons demandé l'aide qui nous est nécessaire pour terminer la construction du centre oecuménique.
Le vice-président (M. English): Merci beaucoup. La réunion a été extrêmement fructueuse. Nous sommes très heureux d'avoir pu vous entendre.
Comme on l'a dit plus tôt, le Nigeria entretient depuis longtemps des rapports étroits avec le Canada. C'est un pays riche en potentiel. C'est un grand pays, qui est appelé à jouer un grand rôle en Afrique. Nous vous félicitons de votre travail. Nous espérons pouvoir soutenir vos efforts dans l'avenir. Je vous remercie de votre comparution d'aujourd'hui.
La séance est levée.