CHAPITRE QUATRE
La COMPÉTITIVITÉ
LE BESOIN
Cette enquête a reconfirmé que la première préoccupation des PME est de trouver le crédit et les fonds de roulement nécessaires pour explorer et exploiter les marchés internationaux. Avec la très forte augmentation du commerce international, une autre préoccupation grandissante est la nécessité de trouver des informations et des conseils utiles et pratiques sur les occasions d'affaires et les pratiques commerciales à l'étranger.
Éliminer la réglementation contraignante
Ces deux préoccupations font partie d'une préoccupation plus générale des PME face au contexte commercial canadien, notamment l'impact de la réglementation, des procédures et des normes nationales sur leur capacité d'affronter la concurrence sur les marchés internationaux. Liée à cela est la question de savoir si les programmes et services gouvernementaux destinés à aider les PME à exploiter les occasions d'affaires internationales y contribuent vraiment. Autrement dit, si l'aide gouvernementale n'a pas d'effet positif sur les profits des entreprises canadiennes, elle risque de leur nuire dans leurs tentatives de se lancer sur les marchés internationaux. Pour être utiles aux entreprises, les normes et règlements canadiens doivent être améliorés et les programmes gouvernementaux axés sur la promotion des entreprises et du commerce international doivent être rationalisés afin de les rendre plus efficaces, ou bien même éliminés.Les témoins qui ont comparu devant le Comité ont mentionné l'effet négatif du fardeau réglementaire sur la capacité concurrentielle des PME canadiennes, tant au pays qu'à l'étranger, et ils en ont donné des exemples pertinents. Mme Barbara Creary, éditrice et responsable des droits étrangers aux Éditions la courte échelle, a signalé que seuls les éditeurs étrangers sont admissibles aux subventions du Conseil des arts pour la traduction d'oeuvres canadiennes destinées à l'exportation. Autrement dit, le Canada subventionne les éditeurs étrangers plutôt que les traducteurs canadiens pour la traduction d'oeuvres littéraires canadiennes dans une langue autre que le français ou l'anglais. Mme Susan Whitney, présidente de la Susan Whitney Gallery, a expliqué comment la TPS impose des coûts aux marchands d'art. L'exigence de payer la TPS d'avance sur les oeuvres importées en consignation d'une valeur de moins de 250 000 $ limite effectivement la capacité de bien des marchands d'art à représenter les artistes étrangers, et, parallèlement, à faire vendre les oeuvres canadiennes à l'étranger.
Des représentants de l'agroalimentaire ont signalé que même en respectant les normes et règlements sévères du Canada, ils risquent de voir leurs produits rejetés à l'entrée des marchés étrangers, et ce malgré l'existence d'accords commerciaux. Parlant de la nécessité d'une réforme de la réglementation, M. Leonard Lee, président de Lee Valley Tools, a déclaré :
La réglementation canadienne du commerce est fondée sur la prémisse désuète que les biens sont fabriqués au Canada ou, s'ils sont importés, qu'ils passeront entre les mains de distributeurs et de détaillants canadiens avant d'atteindre le consommateur. En conséquence, presque toute notre réglementation fait reposer la responsabilité des normes de sécurité, d'étiquetage, de poids et mesures, etc., uniquement sur les fabricants et les fournisseurs canadiens et non sur les consommateurs ou sur les biens importés, quel qu'en soit l'importateur ou la méthode d'importation.
Le problème est que cette forme de réglementation ne fonctionne bien que dans une économie fermée.L'inquiétude exprimée par M. Lee concerne l'effet de la réglementation sur les prix de base des entreprises canadiennes, mais pas seulement en termes de paperasserie, de double emploi, d'inefficacité ou de ridigité des processus. Réduire les coûts que cela représente est important, mais il ne s'agit que de l'efficience et de l'efficacité de la réglementation et non pas de son fondement et de son incidence sur les affaires. De plus en plus, les entreprises canadiennes se rendent compte que leur production coûte plus cher que celle de leurs concurrents étrangers. Ainsi, non seulement elles éprouvent des difficultés sur les marchés internationaux, mais, à mesure que les obstacles à l'importation tombent, elles perdent en plus leur part des débouchés intérieurs traditionnels. Les sociétés canadiennes qui sont ainsi évincées des marchés intérieurs par la concurrence étrangère, perdent en même temps d'importantes économies d'échelle pour leur production destinée à l'exportation. M. Lee a souligné qu'il n'y a pas eu harmonisation des normes après la conclusion de traités tels que l'ALE et l'ALENA, et qu'il n'existe pas non plus d'entente sur des principes de base comme la notion de «pays d'origine» et les dispositions en matière de propriété intellectuelle. Les États-Unis ont adopté l'approche de la «transformation matérielle» pour déterminer le pays d'origine plutôt que d'opter pour la «valeur ajoutée» comme le fait le Canada. La propriété intellectuelle aux États-Unis est déterminée par la politique du «premier inventeur» plutôt que par celle du «premier déposant» comme c'est le cas au Canada.
Plusieurs témoins ont mentionné que la réglementation sur les douanes, le commerce et l'inspection peut être exaspérante pour les exportateurs canadiens qui se lancent sur les marchés américains. À la veille de l'application complète de l'ALE et de l'ALENA et devant le peu de progrès accompli dans l'harmonisation des normes et règlements, le Comité s'inquiète de la capacité concurrentielle des exportateurs canadiens aux États-Unis.
Pour remédier à la situation, le Comité recommande que le gouvernementdu Canada poursuive activement, par la voie d'ententes internationales, l'harmonisation des normes et règlements qui touchent le commerce international.
Stratégies d'exportation des PME
M. Jean-Marie Toulouse, directeur de l'École des hautes études commerciales, a examiné les stratégies d'exportation des PME canadiennes, particulièrement celles des entreprises ontariennes et québécoises. À son avis, la réussite sur les marchés internationaux ne dépend pas d'une stratégie en particulier.D'après les études de M. Toulouse, il y a au moins cinq raisons qui expliquent pourquoi une PME exporte :
- La survie. Pour beaucoup de sociétés, particulièrement les entreprises de pointe, une réussite durable passe par les marchés étrangers. Le marché intérieur n'est pas assez vaste ou le taux de croissance de l'économie nationale n'est pas assez fort pour permettre à ces entreprises de survivre;
- La concurrence. De plus en plus, les fournisseurs, clients et compétiteurs d'une entreprise viennent autant du quartier voisin que de l'autre côté du globe. Face à un nombre croissant de concurrents, l'entrepreneur doit réduire ses coûts, offrir de nouveaux produits ou services, ou trouver de nouveaux débouchés;
- L'expansion. Certaines sociétés tentent de reproduire sur d'autres marchés les succès obtenus au pays. Pour elles, l'expansion internationale peut ne pas être une question de survie. Cela peut toutefois devenir essentiel, particulièrement si la concurrence s'intensifie sur le marché intérieur ou s'il se produit une baisse persistante des taux de croissance ou un changement dans les goûts des consommateurs face au produit ou au service de l'entreprise;
- L'esprit d'entreprise. Nombre de gens d'affaires sont portés à créer de nouveaux produits et à trouver de nouveaux débouchés quel que soit l'état de l'économie ou du marché où ils se trouvent. Dans leur cas, l'innovation, la croissance et l'exportation font partie intégrante des affaires. D'autres facteurs sont tout aussi importants : l'esprit d'entreprise, l'expérience, l'instruction, la détermination, le style de gestion et le goût du risque du propriétaire de l'entreprise;
- Les excédents. D'autres entreprises, par contre, exporteront «selon les besoins». Pour elles, les débouchés internationaux représentent une occasion d'augmenter leur marge brute d'autofinancement, d'atténuer les fluctuations de la demande ou d'absorber les excédents imprévus.
- L'exportateur indirect. La PME peut être un exportateur par défaut (par exemple en fournissant à une grande compagnie des éléments à incorporer aux produits que celle-ci exporte). Même si elle n'est pas l'exportateur officiel, cette PME fait partie d'un projet d'exportation. Elle participe ainsi, indirectement, à l'activité d'exportation;
- L'exportateur indépendant. Dans ce contexte, l'entreprise est entièrement responsable de la production, de la commercialisation, de la distribution et du service après-vente. Cette façon de pénétrer un marché d'exportation peut être très coûteuse, surtout pour une PME. C'est habituellement le choix des entreprises cantonnées dans des marchés spécialisés, où la commercialisation du produit a très peu à gagner de la présence d'un distributeur ou d'un agent. Pour ces entreprises, la publicité, les catalogues et les foires sont autant de moyens sûrs d'accroître leur clientèle;
- Distributeurs et agents. Recruter des distributeurs ou des agents peut s'avérer difficile pour une PME. Trouver le bon représentant pour commercialiser un produit, le distribuer et en offrir le service après-vente peut exiger beaucoup d'information, de temps et de chance. Cependant, une fois le représentant trouvé, sa connaissance des conditions du marché local et des réseaux de distribution, de même que ses contacts directs et personnels avec des clients éventuels, peuvent se révéler précieux pour établir et maintenir une présence dans le marché cible;
- Alliances stratégiques, coentreprises et réseaux. Ces formes de relations ont pour but de mettre en place une «masse critique» de ressources pour ainsi obtenir les avantages concurrentiels au niveau de la taille, de l'envergure et de la rapidité d'innovation, avantages dont les PME ont besoin pour réussir sur les marchés internationaux. Ces relations peuvent prendre la forme d'arrangements peu structurés, créés selon les besoins grâce à des relations personnelles, ou d'entreprises de collaboration à long terme, comportant un enregistrement et autres dispositions contractuelles administrées par une équipe de gestion.
Tous les ordres de gouvernement reconnaissent l'importance grandissante des PME dans le commerce international et chacun a mis sur pied une gamme de programmes et services pour répondre aux besoins aussi nombreux que divers des PME.
PROGRAMMES FÉDÉRAUX
Au gouvernement fédéral, depuis 1982, la responsabilité de la promotion du commerce international appartient au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI), appelé auparavant ministère des Affaires extérieures. Jusque-là, c'était le ministère de l'Industrie et du Commerce qui avait le mandat de diriger les relations commerciales du Canada et de promouvoir le commerce international21. C'est également en 1982 que la responsabilité du Service des délégués commerciaux est passée au MAECI.Mais si le MAECI est devenu le principal artisan de la coordination de la promotion du commerce, seule une petite portion des programmes et des compétences lui a été transférée, soit de l'actuel ministère de l'Industrie ou d'autres ministères fédéraux. De fait, il existe à l'heure actuelle 18 ministères ou organismes fédéraux distincts qui sont responsables à des titres divers des activités de promotion du commerce international22. En font notamment partie les quatre organismes fédéraux de développement économique régional23.
Le Fonds d'assainissement des Grands Lacs d'Environnement Canada est un bon exemple d'un ministère fédéral qui offre aux PME des occasions d'entrer sur les marchés internationaux. En concertation avec des organismes gouvernementaux et non gouvernementaux, le Fonds fait appel à des technologies innovatrices et économiques pour épurer l'eau des Grands Lacs, en décontaminant les sédiments, en optimisant les usines municipales de traitement des eaux usées, en contrôlant les systèmes d'égout, en restaurant les habitats aquatiques et fauniques. Le Fonds a consacré 43 millions de dollars à 230 projets depuis 1990-1991. En outre, les partenaires (presque 300) ont fourni79 millions de plus. Dans plusieurs cas, à la suite d'un projet pilote, des entreprises ont obtenu des contrats de travaux dans la région des Grands Lacs, tant au niveau national qu'international.
Les subventions et contributions du Secteur de la promotion du commerce international du MAECI représentent une large part de la valeur totale de l'aide accordée aux entreprises par le MAECI. Le budget du Secteur pour 1996-1997 s'élève à plus de60 millions de dollars. Toutefois, une comparaison des programmes de développement commercial de ce Secteur et de ceux d'autres ministères fédéraux montre combien la part directe du MAECI dans le domaine de la promotion des échanges commerciaux est relativement modeste. Ainsi, la Division des services à l'industrie et aux marchés d'Agriculture et Agroalimentaire Canada gère des programmes et services sectoriels très semblables aux programmes plus généraux du Secteur de la promotion du commerce international. La Division offre notamment des programmes de développement commercial et fournit des informations commerciales sur les marchés d'exportation par l'intermédiaire de fonctionnaires à Ottawa et dans les bureaux régionaux, ainsi que par l'entremise de délégués commerciaux à l'agriculture postés dans huit pays. Pour 1995-1996, son budget était de 184 millions de dollars, dont 77 p. 100 destinés aux subventions et contributions. Dans le cadre de son vaste mandat de promotion de la compétitivité intérieure et internationale de l'industrie canadienne, Industrie Canada fournit de l'aide financière et de l'expertise sectorielle par l'entremise de sa Division des programmes de l'industrie et des autochtones. Les subventions et contributions pour 1995-1996 dans le cadre de cette Division s'élevaient à 265 millions de dollars.
Le Comité a également entendu des témoignages sur l'efficacité de deux organismes fédéraux qui sont devenus très utiles pour les PME qui songent à exporter, la Corporation commerciale canadienne (CCC) et le Programme de coopération industrielle (PCI) de l'ACDI.
COOPÉRATION FÉDÉRALE-PROVINCIALE
Outre les programmes et services fédéraux destinés à la promotion du commerce international, les provinces et plusieurs grandes villes ont leurs propres programmes. Cela s'ajoute à la kyrielle de sources d'aide qui sont à la disposition des PME. Cette multiplication des formes d'aide peut rendre la prise de décision plus difficile pour les PME.Dans le but de coordonner les programmes fédéraux et provinciaux - ainsi que les programmes interministériels - la Stratégie canadienne pour le commerce international (SCCI) a été établie en octobre 1995. Le MAECI décrit cette Stratégie comme la pièce maîtresse de l'engagement du gouvernement fédéral d'établir un partenariat au sein d'Équipe Canada avec le secteur privé et les provinces, partenariat qui consiste à élaborer une stratégie gagnante dans 23 secteurs clés de l'industrie. Pour chaque secteur, la Stratégie expose les enjeux stratégiques de la compétition sur les marchés internationaux et ce que chaque partenaire public et privé s'engage à faire pour assurer le succès de nos entreprises sur la scène internationale. Diverses initiatives viennent compléter la Stratégie, comme les Équipes sectorielles nationales, les Réseaux de services aux exportateurs, et le Centre des occasions d'affaires internationales. D'après l'Association des exportateurs canadiens (AEC), le mécanisme de consultation du Centre constitue un cadre utile où les ministères et organismes gouvernementaux, avec les provinces, peuvent coordonner les activités de promotion commerciale. Par contre, l'AEC estime que cette stratégie doit être mieux intégrée à la communauté des gens d'affaires, sur une base sectorielle notamment.
Ce mécanisme est assez souple pour permettre différentes approches régionales ou provinciales dans la coordination des programmes fédéraux et provinciaux pour la promotion du commerce international. Le Comité a appris, qu'en Colombie-Britannique, par exemple, la BC Trade Development Corporation (qu'on vient d'abolir) s'occupait de coordonner tous les programmes provinciaux de promotion du commerce. Elle souhaitait en outre jouer un rôle plus actif dans la coordination de tous les programmes publics (fédéraux et provinciaux) axés sur la promotion du commerce, et laisser au gouvernement fédéral les activités de représentation et de coordination au niveau international :
Grâce à son réseau d'ambassades et de consulats, le gouvernement fédéral est bien placé pour fournir des renseignements commerciaux généraux, aider les entreprises sur place et dépister les occasions d'affaires. Mais l'organisme régional qui a une connaissance directe du potentiel et des besoins locaux est mieux placé pour fournir des services spécialisés et de longue durée aux entreprises qui évoluent vers l'exportation. Manifestement, il y a une division naturelle des responsabilités en matière de promotion du commerce entre les deux ordres de gouvernement.Au Canada atlantique, la coordination des activités fédérales et provinciales est mieux intégrée. Dans le cas du Nouveau-Brunswick, le gouvernement, et plus particulièrement le ministère du Développement économique et du Tourisme, participe depuis plusieurs années avec le MAECI, Industrie Canada et l'Agence de promotion économique du Canada atlantique (APECA) à la rationalisation des services de promotion commerciale. Cette activité a reçu un regain de vie en mars 1995 avec l'annonce qu'on viserait l'élaboration d'une stratégie de développement des exportations pleinement intégrée. À l'époque, il était évident pour tous les intéressés que des changements s'imposaient à des fins d'efficacité. Commentant le processus, le directeur du Commerce et de l'Investissement, M. Michael MacBride, a déclaré que, de l'avis de tous les intervenants, «jamais un aussi grand nombre de personnes n'avaient accompli autant pour si peu de gens».
Le processus de rationalisation comportait la définition des besoins de la clientèle au moyen d'une liste des aptitudes à l'exportation, de profils sectoriels et d'une stratégie de promotion du commerce international, ainsi que la coordination des programmes et services gouvernementaux. Les rôles de chacun ont été définis, les ministères provinciaux étant responsables au premier chef d'évaluer les capacités à l'exportation des entreprises tandis que les organismes fédéraux se concentraient sur les occasions d'affaires et les renseignements commerciaux. L'APECA a été chargée de la formation.
Dans le cadre de cette stratégie d'exportation intégrée, un «guichet unique» a été établi pour fournir des services et de l'aide financière. Afin de réduire les chevauchements et les doubles emplois, on a adopté la formule du «centre d'information» : l'entreprise peut obtenir les services et l'information dont elle a besoin de n'importe quel bureau provincial ou fédéral.
Le gouvernement de l'Alberta a adopté une approche qui se situe entre ces deux stratégies de coordination des programmes fédéraux et provinciaux. Avec le MAECI et Industrie Canada, l'Alberta a décidé d'examiner sur une période de cinq ans les façons de mieux définir les responsabilités fédérales et provinciales pour ce qui est d'aider les entreprises albertaines à devenir plus actives sur les marchés internationaux. Cet examen se fera dans le cadre du protocole d'entente Canada-Alberta sur la coopération pour la promotion du commerce international, signé en avril 1995 (La plupart des gouvernements provinciaux ont signé un protocole semblable avec le gouvernement fédéral). Ce protocole établit un mécanisme de coopération en vue de fournir des programmes et services coordonnés et efficaces aux exportateurs et aux entreprises à la recherche d'investissements et de nouvelles technologies.
De l'avis de l'Association des exportateurs canadiens, ces protocoles devraient permettre une coordination encore plus étroite. D'autre part, les contraintes budgétaires ont contribué à réduire les initiatives des provinces en matière de commerce, notamment lorsqu'il y a chevauchement avec l'activité fédérale. Les provinces éprouvent un besoin de complémentarité plutôt que de concurrence.
LES MUNICIPALITÉS ET LA PROMOTION DU COMMERCE INTERNATIONAL
Le Comité a été informé des activités de quatre villes canadiennes - Toronto, Montréal, Calgary et Kitchener - qui s'occupent activement de promotion du commerce international. Les plus grandes coordonnent leurs activités avec la mairie et les entreprises locales par l'entremise de petites commissions de développement économique. Toutes participent à des missions commerciales, dont certaines sont organisées de façon indépendante. D'autres le sont avec d'autres paliers de gouvernement. Le jumelage avec des villes étrangères est une formule courante qui permet aux fonctionnaires d'établir des contacts personnels et de créer des liens institutionnels. Les villes peuvent ainsi cibler des marchés et des secteurs industriels particuliers et accroître leur visibilité dans des régions clés du globe.Dans les quatre villes, ce sont les buts et les intérêts particuliers des entreprises locales qui dictent le choix des activités. Ainsi, Calgary poursuit plusieurs activités commerciales axées sur le secteur pétrolier et gazier, les industries de pointe liées à ce secteur, le génie environnemental, la construction et l'administration hospitalière. Les décisions sont prises et les priorités établies par l'entremise d'une commission qui compte des représentants de la chambre de commerce locale et de la ville. Le maire est consulté par un comité composé de 80 à 100 représentants d'entreprises locales.
Le maire de Montréal, en collaboration avec les 28 villes de la municipalité régionale, a concentré les activités de promotion du commerce international sur deux grandes missions commerciales par année. La Ville met l'accent sur les villes et les pays étrangers où les institutions publiques et les missions gouvernementales officielles occupent une place importante dans la culture. C'est particulièrement le cas dans de nombreux pays asiatiques et, d'après l'expérience de Montréal, surtout au Vietnam, en Chine et au Japon.
Lors de sa comparution, la mairesse de Toronto, Mme Barbara Hall, a souligné les avantages d'avoir de grandes communautés multiculturelles dans la région métropolitaine de Toronto. D'après elle, la diversité et le multiculturalisme sont des atouts importants pour établir des liens commerciaux internationaux et attirer des entreprises étrangères. Elle a mentionné que cette diversité a permis «à un nombre extraordinaire de petites entreprises de prospérer» dans la région de Toronto. Elle estime que ces entreprises produisent d'importantes retombées économiques parce qu'elles entretiennent des liens étroits avec leur communauté. Comme ces entreprises appartiennent en grande partie à des intérêts locaux, les bénéfices profitent à la population.
Mme Hall a indiqué que la ville de Toronto était très en faveur des missions commerciales menées sous la direction du gouvernement fédéral, mais elle croit que les municipalités devraient participer davantage à l'organisation de ce genre d'activités.
En 1987, la ville de Kitchener a mis en commun ses ressources avec Cambridge, Waterloo et Guelph pour former le Triangle technologique du Canada (CTT). Cette association économique s'est assigné quatre grands objectifs :
- répondre de façon cohérente et coordonnée aux demandes de renseignements sur les nouveaux investissements;
- servir de catalyseur économique pour le développement et l'adaptation de nouvelles technologies;
- offrir un cadre global pour le développement professionnel et l'obtention de renseignements;
- tirer profit des principaux services culturels, éducatifs et commerciaux de la région.
L'AIDE AU COMMERCE INTERNATIONAL :
UNE RÉVISION S'IMPOSE
On a vu que des efforts ont été faits pour consolider l'information existante sur les
nombreuses sources d'aide et d'information dont disposent les PME à vocation
internationale. Plusieurs témoins ont reconnu que des progrès ont été faits depuis
quelques années dans la coordination et la rationalisation des programmes et services.
Un exemple de ces efforts est la publication par le MAECI en juin 1995 d'une étude24 sur les principaux programmes de promotion du commerce international administrés par le Secteur de la promotion du commerce international, ainsi que par les provinces et par les quatre organismes de développement économique régional. Le fait que les programmes des autres ministères et organismes fédéraux ne sont pas compris dans cette étude est assez significatif. Le nombre de similitudes et de différences entre les objectifs et les caractéristiques de ces programmes n'est pas sans intérêt :
- Sauf pour le programme de collaboration en science et technologie, tous les programmes du MAECI sont destinés aux PME. Les programmes administrés par le Bureau fédéral de développement régional (Québec) se concentrent exclusivement sur les PME, ce qui n'est pas le cas des autres organismes de développement économique régional. Trois programmes provinciaux (Alberta, Terre-Neuve et Saskatchewan) s'adressent aux PME, alors que les autres n'ont pas de critères d'admissibilité liés à la taille de l'entreprise;
- Le MAECI compte 14 catégories d'aide; l'Ontario et le Québec en ont respectivement 13 et 10, et le nombre varie dans les autres provinces. Le MAECI est en train de regrouper ses programmes sous un programme unique qui s'appellera le Programme de l'expansion du commerce international (PECI);
- La publicité, la promotion et les foires commerciales constitutent les catégories d'aide les plus courantes;
- La catégorie des soumissions pour projets d'investissement, qui aide les entreprises à soumissionner sur les marchés internationaux, n'existe qu'en Ontario, au Québec et au MAECI;
- Sauf dans quelques cas, les programmes d'aide provinciaux n'exigent pas de remboursement, alors que les programmes fédéraux prévoient un remboursement à certaines conditions. La formule de partage de coûts la plus courante est moitié-moitié;
- La tendance en Colombie-Britannique, en Alberta et en Nouvelle-Écosse est à la réduction ou à l'élimination de l'aide financière aux entreprises. Le rôle du gouvernement s'oriente davantage vers le soutien indirect comme les conseils, les renseignements commerciaux et la défense des intérêts des entreprises. Le nouveau gouvernement ontarien est en train de revoir les objectifs de ses programmes de promotion commerciale;
- Le sens du terme «exportation» varie selon le programme. Dans la plupart des provinces, il signifie «à l'extérieur du pays», mais pour quelques-unes, c'est à l'«extérieur de la province». Dans l'Atlantique, c'est souvent à l'«extérieur de la région».
Le problème a été clairement exposé par M. Lindsay Gordon, vice-président exécutif de la Banque Hongkong du Canada. Son commentaire résume bien les vues de bon nombre de PME : «Trop souvent, le nouvel exportateur est étonné par le nombre de programmes destinés à promouvoir les exportations et dérouté par les chevauchements manifestes entre ceux du gouvernement fédéral et ceux des provinces. Il faut rationaliser encore davantage l'accès à l'information pour les petits exportateurs.»
Pour s'attaquer à ce problème, le gouvernement fédéral a créé récemment les Centres canadiens de services aux entreprises. Il y en a un dans chaque province. En collaboration avec les provinces, les municipalités et le secteur privé, le Centre répond sans délai, par téléphone, télécopieur ou courrier électronique, aux demandes d'information sur les services destinés aux PME. Le Comité a entendu beaucoup de bien de ce nouveau service. (On trouvera les coordonnés de ces centres à l'annexe 5.)
Mais il faut faire encore plus. Il est particulièrement urgent de répertorier les programmes offerts par tous les ministères fédéraux, étant donné que cela ne semble pas avoir été fait. Autrement, devant la pléthore de programmes, dont certains semblent se concurrencer, les PME risquent de se décourager et de renoncer à demander de l'aide.
-
Afin d'aider le gouvernement fédéral à regrouper et à rationaliser davantage
les programmes gouvernementaux de promotion du commerce
international, le Comité recommande ce qui suit :
- a) Le Comité salue la décision du gouvernement d'établir des Centres
canadiens de services aux entreprises. Pour en améliorer le service, le
Comité recommande que l'information existante sur les programmes et
services soit synthétisée dans un répertoire exhaustif, afin d'aider les
PME à trouver rapidement l'information et les services dont elles ont
besoin. Ce répertoire devra comporter les programmes et les services
offerts par le gouvernement fédéral et les gouvernements des
provinces. Le Comité a été impressionné par le guide que les autorités
québécoises ont préparé à l'intention des PME du Québec;
- b) Le Comité recommande que le gouvernement fédéral indique
clairement dans ce document le rôle et les responsabilités de chacun
de ses ministères et organismes en matière de promotion du commerce
international. Le document devrait également préciser le genre de
services auxquels les PME peuvent s'attendre de ces ministères et
organismes, et comment ces services sont liés entre eux.
- c) Ce répertoire devrait indiquer les rôles de chaque gouvernement et
expliquer comment chaque programme et service se rattache au
suivant. Il devrait aussi contenir à l'intention des PME une liste des
firmes du secteur privé offrant des services qui complètent ceux des
gouvernements fédéral, provinciaux ou municipaux;
- d) Il faudrait fournir aux PME une liste de critères leur permettant d'évaluer
leur degré de préparation à l'exportation. Si elles ont besoin de
formation ou d'autres services spécialisés, on les leur fournirait ou on
leur indiquerait à qui s'adresser. De cette façon, les PME participeraient
aux programmes et obtiendraient les services lorsqu'elles sont en
mesure d'en profiter.
21O. Mary Hill, Canada's Salesman to the World: The Department of Trade and Commerce, 1892-1939 (Montréal : McGill-Queen's University Press, 1977).
22Le MAECI, l'ACDI, la SEE, la CCC, Agriculture et Agroalimentaire Canada, Environnement Canada, Pêches et Océans, Industrie Canada, la Défense nationale, le Conseil national de recherches, Ressources nationales Canada et la Banque de développement du Canada.
23L'Agence de promotion économique du Canada atlantique (APECA), le Bureau fédéral de développement régional (Québec) (BFDR (Québec)), l'Initiative fédérale du développement économique du Nord de l'Ontario (FEDNOR) et la Diversification de l'économie de l'Ouest (DOC).
24Campbell Consulting Associates, Review of Financial Assistance for International Business Development, produit pour le MAECI en juin 1995.