[Enregistrement électronique]
Le mardi 4 juin 1996
[Traduction]
Le président: Chers collègues, je vous souhaite la bienvenue et déclare la séance ouverte.
Nous reprenons l'examen de l'ordre de renvoi de la Chambre des communes du lundi 18 mars 1996 relatif à la question du communiqué du député de Charlesbourg publié le 26 octobre 1995 concernant les membres des Forces armées canadiennes.
Nous en étions restés, si vous vous souvenez, à la motion de M. Strahl, dont nous sommes donc tous encore saisis.
Est-ce que vous voulez discuter de cette motion?
M. Strahl (Fraser Valley-Est): Je vous remercie, monsieur le président, de ramener cette motion sur le tapis. C'est lors de la dernière séance qu'elle a été déposée, je ne sais au juste pourquoi.
Je voudrais faire deux ou trois remarques: la première, c'est que ce comité a été chargé par la Chambre d'examiner toute cette question, et c'est pourquoi nous devons procéder à une enquête approfondie visant à établir tous les faits.
Bien que nous ayons entendu des témoins intéressants et qu'on nous ait rapporté quelques observations d'ordre technique, je considère qu'à ce jour nous n'avons pas procédé à une enquête approfondie. Nous n'avons qu'effleuré le sujet, et nous n'avons fait qu'entrevoir comment la chose avait été possible, ce que nous pouvons faire et quels sont nos pouvoirs en tant que comité. Mais jusqu'à ce jour il ne s'est agi que de questions d'ordre technique, et je ne pense pas que nous ayons vraiment procédé à une enquête sur les faits, comme la Chambre nous en avait chargés.
Le comité a entendu cinq témoins. Mme Davidson et MM. Hart, Jacob, McWhinney et Maingot. Seul M. Jacob a, en fait, connaissance réelle du communiqué en tant que tel, les autres n'ont donné que des opinions sur sa signification, réelle ou éventuelle, ou sur la façon dont nous pourrions intervenir. Nous n'avons entendu aucun des destinataires du communiqué, c'est-à-dire ceux - en l'occurrence les militaires - sur lesquels l'impact aurait été le plus profond. Nous ne savons pas comment le communiqué a été accueilli, si l'on a jugé qu'il était approprié ou s'il a suscité l'indignation ou la stupeur, ou si l'on a considéré qu'il venait à propos. C'est le silence sur toutes ces questions.
Il nous paraît que nous ne nous serons acquittés de notre mission que si nous essayons de nous replacer à cette époque, de revivre les journées chargées d'émotions où le communiqué a été publié pour voir quel effet il a produit sur les militaires, ce qui, bien entendu, est capital pour toute l'affaire.
Ce qui est essentiel, c'est de savoir si ce communiqué a eu un effet négatif sur un député, ou sur cette Chambre, ou si cela a constitué un outrage à ce dernier. À cette fin nous jugeons nécessaire de faire appel à des spécialistes militaires et de leur poser des questions. Il nous faut des gens d'expérience qui ont pris connaissance du communiqué, qui étaient présents quand il est parvenu aux troupes et qui se sont rendu compte à quel point l'atmosphère était chargée.
La raison pour laquelle j'ai déposé cette motion, c'est qu'il me paraît inadmissible de laisser l'affaire simplement en plan, après n'avoir entendu, pour l'essentiel, que des experts de procédure qui, à l'occasion, se sont contredits entre eux, bien qu'on ne s'en soit tenu qu'à la procédure.
Nous savons à présent, à mon avis, ce que ce comité a pouvoir de faire; nous avons les coudées relativement franches. Nous avons reçu pour mandat de la Chambre des communes de faire enquête. Il nous est loisible de considérer que cet incident représente un outrage au Parlement, de recommander des sanctions, de donner des instructions à d'autres comités, à d'autres gens ou à d'autres ministères. Nous avons plus ou moins le champ libre, mais nous devons d'abord faire enquête.
Ce que je crains, c'est que si nous arrêtons là la liste des témoins, nous nous serons arrêtés à la surface des choses, aux faits matériels, sans avoir creusé jusqu'à la racine.
Monsieur le président, le témoignage de M. Jacob même nous a permis de nous faire une idée de l'accueil réservé à ce communiqué par les militaires et de la mesure dans laquelle il était inacceptable, mais là encore je me livre à des conjectures car nous n'avons entendu aucun témoin du côté militaire, et c'est pourquoi il importe d'en convoquer certains.
Dans son communiqué, M. Jacob envisageait le recrutement, pour une armée québécoise, de membres des Forces canadiennes; on peut discuter pour savoir s'il s'agissait d'une éventualité proche ou lointaine, ou hypothétique, mais quel a été l'accueil qui lui a été réservé par les Forces armées canadiennes? Qu'en ont pensé les militaires qui ont reçu ce communiqué? Quelle a été la réaction de la hiérarchie militaire quand elle a été mise au courant? Jusqu'à quel échelon de cette hiérarchie l'information est-elle parvenue? Quelle a été, le cas échéant, la réaction de M. Collenette? En a-t-il été indigné, y a-t-il vu - comme l'a dit le whip du gouvernement - un appel à la mutinerie?
C'est là ce qui doit faire l'objet de notre enquête, à défaut de quoi nous n'aurons procédé qu'à un examen superficiel et limité.
Le président: D'après ce que je crois comprendre, nous sommes donc saisis de votre motion aux fins que le comité convoque d'autres témoins. Mettons les choses au point, chers collègues: en tant que comité nous étions convenus de convoquer trois ou quatre témoins et avions dit qu'à un certain moment - que nous avons maintenant atteint - nous envisagerions d'en convoquer d'autres.
Pour que tout le monde comprenne bien de quoi il s'agit... Comme vous êtes nouvellement venu au comité, monsieur Strahl, vous comprendrez notre embarras pour essayer de mettre en place un processus. Nous y sommes parvenus, et j'ai demandé à tous les partis et à tous les membres de préparer une liste de témoins.
En tant que votre président je voudrais rappeler à nos collègues que la seule liste que j'ai reçue émanait du Parti réformiste, qu'aucun autre député ne m'a fourni de noms et c'est ce que je vous demande de ne pas oublier.
Voulez-vous faire un commentaire sur la motion, monsieur Harb?
M. Harb (Ottawa-Centre): Monsieur le président, nous avons entendu plusieurs témoins très distingués qui nous ont communiqué leur opinion sur la question. Nous avons eu l'occasion de poser des questions tant à la personne qui porte l'accusation qu'à celle qui s'en défend, c'est-à-direMM. Hart et Jacob, de la part de tous les collèges de la Chambre des communes.
J'espère donc que nous pourrons régler cette question aujourd'hui même et y mettre fin. Nous avons suffisamment de témoignages à examiner et je crains qu'à prolonger l'affaire nous ne fassions que piétiner.
Le président: Monsieur Boudria.
M. Boudria (Glengarry - Prescott - Russell): Je ne peux que renchérir. Le seul groupe qui ait demandé à entendre des témoins est le groupe qui a déclenché l'affaire. Nous avons entendu tous ces témoins, et je ne vois aucune raison de poursuivre l'enquête en entendant d'autres témoins.
Nous avons entendu les témoins, ainsi que nos propres spécialistes en questions parlementaires, comme M. McWhinney. Nous avons entendu les spécialistes que nous avons nous-mêmes engagés, comme M. Maingot; nous avons entendu les deux sons de cloche, et des spécialistes en nombres suffisants.
[Français]
Je désire que nous mettions fin à cette proposition, votions contre la motion visant à inviter d'autres témoins à comparaître, siégeons immédiatement à huis clos et commencions à travailler sur notre rapport dès aujourd'hui.
[Traduction]
Le président: Je vous remercie, monsieur Boudria.
M. Milliken, M. Speaker et M. Pagtakhan.
M. Milliken (Kingston et les Îles): Monsieur le président, j'aimerais que M. Strahl nous dise, s'il pense qu'il y a d'autres témoins que nous devrions entendre, de qui il s'agit et pourquoi? Tout ce que je peux voir pour le moment, c'est qu'on nous demande, sans raison apparente, de faire traîner l'affaire en longueur.
Les témoignages que nous avons entendus à ce jour semblent porter sur deux questions. Le délit de sédition a-t-il été prouvé? Il est clair qu'il ne l'a pas été, et la question me semble classée. Même M. Hart a renoncé à persister sur ce point. Il s'est retranché derrière la question d'outrage au Parlement, et nous avons entendu comment cette question a été traitée, un communiqué de presse a été publié et nous sommes en mesure, je pense, de nous faire une opinion sur le fait de savoir s'il y a eu, ou non, outrage au Parlement, qu'il s'agisse d'un outrage mineur ou majeur.
Des témoignages supplémentaires sur ce point me sembleraient superflus, qu'ils émanent de spécialistes ou d'autres témoins censés élucider les faits. On nous a dit que le communiqué a été publié et nous l'avons sous les yeux.
M. Strahl: Nous n'avons aucune idée de l'effet qu'il a eu.
Le président: À l'ordre, s'il vous plaît.
M. Milliken: Je suis content que le député pose cette question, monsieur le président, car j'ai une idée de l'effet qu'il a eu. En me promenant de temps en temps dans les rues, je reçois des tracts de propagande de diverses organisations en faveur de ceci ou de cela, et c'est la même chose qu'a fait le député de Charlesbourg en publiant son communiqué. Les publications émanant d'extrémistes fanatiques, on ne les lit pas, on les met au panier, voilà ce que j'en pense, et ce communiqué, à mon avis, est à ranger au nombre de celles-ci.
M. Strahl y voit peut-être autre chose; si je recevais un communiqué de lui, je serais sur mes gardes, et je le suis encore davantage à l'égard du député de Charlesbourg, et ceci sans tomber dans un sectarisme extrême, monsieur le président, parce que je connais l'auteur.
C'est le genre de publication auquel à donner naissance le référendum. Si je recevais une brochure du Parti québécois, de ceux qui étaient en faveur du oui dans la campagne référendaire, je l'aurais mise au panier. Je l'aurais peut-être lue afin de savoir ce que disent ces gens, mais certainement pas pour y chercher des arguments sérieux ou intelligents dans un débat sur lequel mon opinion est déjà formée, et où je ne vais pas me laisser influencer.
Il suffit d'un peu d'imagination pour savoir quel en a été l'impact - le semeur sème à tous vents, certains grains tombent sur un sol fertile et germent, d'autres meurent. Allons-nous convoquer tous les militaires qui ont pris connaissance de ce communiqué et leur demander ce qu'ils en ont pensé? Je ne le pense pas.
M. Strahl: Et pourquoi pas l'un d'entre eux, Peter?
M. Milliken: D'après la liste que j'ai vue, c'est ce que le député semblait proposer.
Monsieur le président, je voudrais que nous nous penchions sur certaines déclarations faites à ce sujet, car le Parti réformiste semble avoir perdu la boussole et aller dans toutes les directions à la fois. Dans sons premier discours devant la Chambre sur cette question, le 21 novembre 1995, M. Hart déclarait:
- Je trouve étrange que le député de Charlesbourg, il y a quelques semaines à peine, invitait les
membres des Forces armées canadiennes à joindre les rangs de nouvelles armées du Québec...
J'exhorte le député à lire attentivement l'article 62 du Code criminel et à réfléchir à ce qu'il a
fait il y a quelques semaines à peine.
- Que, de l'avis de la Chambre, cette action de l'honorable député de Charlesbourg et du chef de
l'époque de l'opposition officielle devrait être considérée comme séditieuse et offensante pour
la Chambre et constitue un outrage au Parlement;
- Ce sont là les termes mêmes de la motion qu'il proposait.
- La motion a été déchirée en mille morceaux entre les mains du whip libéral, ce qui est une honte
pour la Chambre, et une honte pour les hommes et les femmes des Forces armées canadiennes et
une honte pour tous les Canadiens.
- La motion proprement dite, comme vous le savez, a été modifiée, et c'est une question très
limitée que j'ai demandé à la Chambre d'examiner. Quand la Chambre est revenue - et
j'accepte maintenant ce que la Chambre a fait - , elle a élargi considérablement le débat
là-dessus, et c'est ce débat dont il est maintenant question...
- Je suis choqué par l'amendement qui nous est proposé aujourd'hui. Il semble que les
ministériels essayent de miner l'esprit de la motion que j'ai présentée hier.
- À l'origine j'avais une opinion plutôt bornée sur la sédition, et je voudrais remercier la
Chambre des communes pour sa sagesse... Certains membres du parti libéral, le président
lui-même et les membres du Bloc québécois ont dit qu'il s'agissait d'un problème beaucoup
plus vaste et que nous devrions être chargés d'examiner la question, plus large, d'outrage au
Parlement, de privilèges de la Chambre...
Je peux vous donner d'autres citations de M. Hart sur la question. Dans son témoignage du 23 avril 1996 il déclare:
- J'ai soulevé, le 22 mars 1996, la question de privilège parce qu'il me semblait qu'une enquête
sur ce communiqué était justifiée pour déterminer s'il constituait ou non un outrage au
Parlement.
Monsieur le président, le 14 mars 1996, M. Hart déclarait devant la Chambre:
- Les libéraux tentent d'écarter l'accusation initiale de comportement séditieux et insultant.
Parlons-en pendant quelques instants. On m'accuse à la Chambre d'avoir jugé et condamné
d'avance le député de Charlesbourg. Rien n'est plus loin de la vérité. Dans les observations que
j'ai faites en présentant la motion, j'ai dit que le député allait avoir l'occasion de se défendre
devant un tribunal.
- La première chose à faire, lorsqu'un crime est commis et qu'il y a un suspect, c'est de porter une
accusation. C'est précisément ce que j'ai fait à la Chambre. J'ai porté une accusation.
- Je demandais aux parlementaires de décider si à leur avis ce communiqué était séditieux ou s'il
suscitait leur indignation. Je ne portais nullement une accusation, comme on a plus tard voulu le
faire croire.
Nous avons cette liste, et je pourrais me baser dessus... L'ancien chef d'état-major de la Défense - nous avons déjà une citation de lui dans le fourre-tout de coupures de presse que M. Hart nous a apporté, le major-général Lewis Mackenzie, qui avait pris sa retraite, si je ne me trompe, avant ces événements. Puis le lieutenant-général Armand Roy, sous-chef d'état-major de la Défense, en a-t-il reçu, lui, un exemplaire? Pourquoi convoquons-nous ces gens? Il n'est même pas certain qu'un exemplaire en ait été envoyé à ce monsieur. Puis nous avons le ministre de la Défense nationale, dont je suis certain qu'il n'a pas reçu d'exemplaire, et quand il en a reçu un plus tard il a jugé que c'était une ineptie et ne s'est pas privé de le dire.
M. Strahl: S'il l'a reçu, il l'a probablement déchiré en mille morceaux.
M. Milliken: Monsieur le président, j'estime que nous devrions examiner les faits et les témoignages que nous avons. Il me semble que nous, les députés, sommes maintenant tout à fait en mesure de tirer des conclusions sur les effets qu'a eus ce communiqué.
Nous savons comment et à qui le communiqué a été envoyé. Nous avons l'opinion de M. Hart sur les effets qu'aurait eus ce communiqué. Des experts nous ont expliqué en quoi consiste l'outrage au Parlement et sur quoi nous pouvons nous fonder pour nous prononcer sur la question de la sédition.
Je vois mal ce qu'il nous faudrait encore; j'ignore quels autres preuves ou témoignages pourraient nous être utiles. L'opinion de ceux qui ont reçu le communiqué peut être intéressante - honnêtement, à cette date-ci, cela ne m'intéresse pas particulièrement - mais elle ne nous aidera pas à déterminer si l'envoi de ce communiqué constitue un outrage à la Chambre.
Il s'agit ici d'outrage à la Chambre et aux députés. Il ne s'agit pas de déterminer si on a manqué de respect aux membres des Forces armées canadiennes en leur envoyant ce communiqué truffé de sornettes. À mon avis, c'est de cela qu'il s'agit.
Nous pouvons tirer nos propres conclusions sur l'intelligence des militaires et sur leurs réactions à la réception d'un communiqué comme celui-là par courrier, par télécopieur, ou autrement.
Le président: Très bien, monsieur Milliken, merci de votre intervention.
Monsieur Speaker, je vous prie.
M. Speaker (Lethbridge): Monsieur le président, le député de Kingston et des Îles a soulevé la question de savoir quels autres témoins nous voudrions entendre et pourquoi. Par conséquent, monsieur le président, je propose de modifier la motion pour y ajouter une liste de cinq témoins possibles. Puis, je voudrais aborder brièvement l'amendement, monsieur le président.
Le président: Vous voulez donc modifier la motion de M. Strahl.
M. Speaker: Oui.
Le président: La motion propose maintenant que le comité convoque d'autres témoins. Que dit votre amendement?
M. Speaker: Que notre comité convoque d'autres témoins parmi ceux qui figurent sur la liste présentée par le Parti réformiste du Canada, en commençant par le major-général à la retraite Lewis MacKenzie, suivi du Juge-avocat général de l'époque, Pierre Boutet, du ministre de la Défense nationale, l'hon. David Collenette, du général à la retraite John de Chastelain, ancien chef d'état-major et, enfin, de M. Brent Tyler.
M. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): J'invoque le Règlement, monsieur le président. J'estime que cet amendement...
Le président: Un moment, je vous prie. Est-ce pour l'amendement?
M. Speaker: Oui.
Le président: Vous invoquez le Règlement au sujet de l'amendement, monsieur Pagtakhan?
M. Pagtakhan: J'estime qu'il ne s'agit pas d'un amendement mais d'une nouvelle motion. Ce prétendu amendement, comme la motion originale, propose qu'on convoque d'autres témoins. Autrement dit, c'est une nouvelle motion qui remplace la première. Je me demande si elle est recevable.
Le président: Sauf le respect que je vous dois, cher collègue, j'estime que cet amendement est recevable.
M. Harb: On vote sur la motion principale en premier ou sur l'amendement.
Le président: Nous sommes saisis d'un amendement à la motion. Monsieur Speaker, sommes-nous prêts à mettre l'amendement aux voix?
M. Speaker: Non, je voudrais d'abord faire quelques remarques.
Le président: D'accord. Allez-y.
M. Strahl: J'avais aussi quelques observations à faire sur la motion, si je le puis.
M. Speaker: En réponse à la question de savoir quels autres témoins nous pourrions entendre et pourquoi, nous vous avons donné les noms de gens qui pourront nous expliquer clairement quels ont été les effets de ce communiqué.
Le communiqué a été envoyé par un député fédéral, le député de Charlesbourg. Il a été envoyé aux forces armées et distribué, en un sens, comme s'il s'agissait d'un document officiel puisqu'il émanait d'une institution officielle, le Parlement du Canada. C'est le télécopieur de cette institution qui a été utilisé. Le communiqué a été envoyé aux forces armées.
La question est donc de savoir comment les gens réagissent de prime abord à un ordre provenant du Parlement du Canada. Çà, nous devons le savoir.
Nous pouvons présumer, généraliser, croire que certaines choses se produiront, comme l'a fait plus tôt le député de Kingston et les Îles. Nous avons tous nos propres perceptions, mais ce qu'il nous faut, ce sont des faits. Il faut que quelqu'un du domaine, qui en a fait l'expérience, nous dise quel a été l'effet de ce communiqué. Les personnes dont j'ai soumis le nom, monsieur le président, rempliraient cette fonction. Elles pourraient nous dire quel a été l'effet du communiqué.
Cela fait, nous pourrons déterminer si le député de Charlesbourg s'est rendu coupable d'outrage au Parlement et, en outre, nous serons mieux en mesure de déterminer s'il y a eu ou non sédition. Les militaires ont-ils quitté les forces armées ou se sont-ils préparés à quitter les forces armées dans l'éventualité d'un oui? Nous pouvons déterminer si cela s'est produit, monsieur le président. Dans l'affirmative, c'est que le communiqué a eu une incidence. Nous pourrons aussi nous prononcer sur la question de la sédition dont le comité est aussi saisi.
Monsieur le président, j'exhorte mes collègues à examiner attentivement les recommandations que nous avons faites, à passer en revue la liste des témoins possibles et à envisager d'entendre ces témoins pour les raisons que je viens de donner.
Le président: Chers collègues, si c'est plus simple du point de vue de la procédure, la greffière me dit que... La motion proposera que le comité convoque d'autres témoins, nommément... et suivront les noms qui ont été soumis. Plutôt que de considérer cela comme un amendement, nous faisons une seule motion de deux motions qui ont été proposées.
Au sujet de la motion, l'intervenant suivant sur la liste est M. Boudria.
M. Strahl: J'invoque le Règlement.
Le président: Écoutez, si cela ne vous convient pas, nous ne le ferons pas.
M. Strahl: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Il y a un amendement à la motion originale.
Le président: La motion proposait simplement que le comité convoque d'autres témoins.
M. Strahl: Je voudrais faire une remarque sur l'amendement.
Le président: D'accord. Je vous le permets.
Sommes-nous d'accord pour mettre aux voix une seule motion?
Des voix: D'accord.
Le président: Monsieur Boudria.
M. Boudria: J'ai un problème. M. Speaker, le député de Lethbridge, vient de nous dire que nous devrons en tendre tous ces autres témoins parce que, entre autres, le communiqué de M. Jacob est un document officiel qui portait l'en-tête de la Chambre des communes. Si tel est le cas, n'est-il pas vrai qu'un communiqué attaquant le Président de la Chambre des communes et demandant de le harceler, le communiqué qui a été envoyé par le député de Lethbridge, il n'y a pas si longtemps, est aussi un document officiel?
M. Speaker: J'invoque le Règlement. Cela n'a rien à voir.
M. Boudria: J'ai le droit de débattre du mérite de la motion et de faire les parallèles qui s'imposent.
Le président: Chers collègues, je vous en prie, tenons-nous en aux points pertinents. Monsieur Boudria, vous avez la parole sur cette motion.
M. Boudria: Mes remarques portent plus précisément sur l'amendement. Pour en revenir aux arguments avancés par le député de Lethbridge, je dois dire, monsieur le président, que si le document de M. Jacob est un document officiel, bien d'autres le sont aussi. Certains de ces documents concernent un incident qui s'est produit dans la région de Niagara Falls et qui met en cause le Président de la Chambre des communes. Une motion a d'ailleurs été déposée à la Chambre sur cette question, mais, cela, nous en rediscuterons à un autre moment. Nous y reviendrons.
Je veux simplement dire que ce qui s'applique à Goose Bay s'applique à Gander, ce qui vaut pour l'un vaut aussi pour l'autre. Le député prétends que le communiqué de M. Jacob constitue un document officiel. Moi, j'ai un de ses documents à lui que j'aimerais bien exhiber pour cette même raison. Je crois avoir déjà bien fait valoir que ce document, dans lequel on attaque le Président de la Chambre des communes, est tout à fait contraire aux règles de la Chambre des communes.
J'aimerais maintenant aborder la question de la sédition qui, d'après le député de Lethbridge, est de nouveau sur le tapis. M. Milliken vient de nous dire avec éloquence combien de fois le sujet de la sédition a été abordé puis abandonné. Ce que M. Milliken a omis de dire, et ce que j'aimerais vous rappeler à tous, ce sont les sages paroles d'un député, un colonel des forces armées, le colonel Frazer, qui est membre de notre comité et qui est ici présent. Le 25 avril 1996 il a dit ceci, et je cite:
- Monsieur Jacob, je ne laisse nullement entendre que vous avez préconisé le recours à la force
pour réaliser la souveraineté, pas du tout. Ce qui m'inquiète, c'est que vous devez reconnaître
que les militaires ne peuvent pas travailler pour deux pays en même temps.
Il a donc dit qu'il ne s'agissait pas de sédition.
M. Frazer (Saanich - Les Îles-du-Golfe): J'invoque le Règlement.
M. Boudria: Et, monsieur le président, vous devez reconnaître que le colonel doit savoir de quoi il parle.
Le président: J'ai un rappel au Règlement.
M. Frazer: Le whip du gouvernement prétend que la sédition implique le recours à la force. Tel n'est pas le cas, et je peux lire des extraits...
M. Boudria: On entre dans un débat.
M. Frazer: Non, c'est un rappel au Règlement. Il fait exprès pour tout déformer.
Le président: Si on me donne la chance de parler, je dirais que vous vous engagez dans un débat, chers collègues.
Je vous demanderais de poursuivre la discussion dans l'ordre. Pourriez-vous résumer, monsieur Boudria?
M. Boudria: Je termine sur ce point, monsieur le président.
Nous avons changé d'idée... Je dis «nous», mais en fait, je devrais dire «ils», les députés du Parti réformiste. Ils ont changé d'idée plus d'une fois en ce qui concerne la sédition, même si cela ne fait pas partie de notre mandat.
M. Frazer: J'invoque le Règlement.
M. Boudria: Soyons précis. Il ne s'agit pas de sédition. On y voit quelque chose de séditieux. Ce n'est pas du tout la même chose.
M. Harb: Qui y voit quelque chose de séditieux? Voilà la question.
M. Frazer: Le Parlement. N'est-ce pas de cela qu'il s'agit?
M. Boudria: Puis-je terminer mes remarques, monsieur le président?
Le président: Monsieur Frazer, pourriez-vous laisser M. Boudria finir?
M. Boudria: Il y a une distinction évidente entre la sédition et y voir quelque chose de séditieux. Je crois savoir que la plupart des députés...
M. Frazer: Les avocats.
M. Boudria: ... la plupart de ceux qui sont ici constateront comme moi qu'il y a une différence énorme entre la sédition et quelque chose qui est perçu comme étant séditieux. Ce sont deux choses très différentes, et qu'on me corrige si j'ai fait cette erreur monumentale.
Dans cette affaire, dont on vient tout juste de dire que l'on y voit quelque chose de séditieux, et dont on a dit quelques moments auparavant que l'on n'y voyait pas quelque chose de séditieux, comme l'a indiqué M. Milliken, et qui bien sûr n'était pas considérée comme étant séditieuse le 25 avril 1994 et dont notre comité n'a pas été saisi, monsieur le président, dois-je vous rappeler que cela outrepasse notre mandat? Nous traitons d'outrage au Parlement.
Je terminerai en disant qu'il m'apparaît tout à fait frivole de prétendre que le communiqué était un document officiel, comme on vient de le faire remarquer. Si cet argument n'est pas frivole, qu'il s'applique alors à d'autres cas semblables. La question de la sédition, elle, semble tourner comme une girouette. Chaque fois que le vent change de direction, on adopte une nouvelle position. Il y a eu sédition, il n'y a pas eu sédition... On change son fusil d'épaule à tout moment et si cela continue, les parlementaires se couvriront de ridicule.
Le président: Merci, monsieur Boudria. Monsieur Bellehumeur, s'il vous plaît.
[Français]
M. Bellehumeur (Berthier - Montcalm): Il nous faudrait regarder si la comparution de ces cinq autres témoins qui figurent sur la liste que j'ai apporterait quelque chose de plus. Les réformistes désiraient entendre M. Lewis MacKenzie, qui n'était pas en fonction au moment de la diffusion du communiqué. De toute façon, nous connaissons la position de M. MacKenzie sur cette question. Je pense qu'un personnage comme M. MacKenzie, qui fait des comparaisons entre le Canada et l'ancienne Yougoslavie, ne peut pas apporter tellement d'arguments rationnels et ne serait pas en mesure de nous éclairer.
Quant à M. Pierre Boutet, je crois que les réformistes aimeraient connaître l'opinion juridique qu'il a préparée pour le ministère. Nous avons déjà réglé cette question lors de nos débats et conclu que pour des raisons de confidentialité, il était préférable de ne pas poursuivre cette voie.
Quant à David Collenette, est-ce qu'on voudrait l'entendre dire qu'il a reçu personnellement le communiqué? J'en serais surpris.
À ma connaissance, M. John de Chastelain est présentement à l'extérieur du pays. Voudrait-on le faire revenir de l'autre bout du monde pour répéter ce qu'il disait en 1991, à savoir que dans une société libre et démocratique, il n'y avait pas grand-chose dans le communiqué de M. Jacob?
Le dernier témoin, M. Brent Tyler, n'est-il pas celui qui a déposé devant la Cour du Québec une plainte pour sédition en vertu de certains articles du Code criminel? Si je ne me trompe, ce M. Tyler avait été débouté en cour, où l'on disait qu'il n'y avait pas matière à sédition. La même chose s'est produite en Ontario.
Je crois que la comparution de ces cinq témoins n'apporterait absolument rien au comité et nous ferait perdre du temps.
Quant au reste, j'ai entendu avec intérêt les commentaires des députés du gouvernement; à première vue, je suis en total accord sur tout ce que mes amis d'en face ont dit. Je ne déplore qu'une chose, c'est qu'ils aient pris trois mois pour s'en apercevoir. Je ne sais pas si nous avions une boule de cristal ou quoi, mais nos discours de mars 1996 tiraient à peu près les mêmes conclusions, à savoir que c'était une perte de temps, que M. Jacob n'avait fait que sa job de député, qu'il n'y avait pas matière à question de privilège ni à outrage au Parlement et surtout qu'il n'y avait pas matière à sédition.
Sur ce dernier point, dans le but d'éclairer le comité, parce que je pense que le Parti réformiste fait exprès de nous mêler, je relis encore, mot à mot, le Hansard du 12 mars 1996 pour réitérer la question de fond, l'accusation précise que le Président de la Chambre présentait à M. Jim Hart:
- De l'avis de la Chambre, le député de Charlesbourg est-il coupable de sédition?
- Je trouve déplorable qu'on fasse de la sémantique aujourd'hui, parce que le 12 mars, le député
portait ces accusations. C'est en se basant sur ces accusations de sédition que le Président de la
Chambre a reçu la question de privilège.
M. Bellehumeur: Non, ce n'est pas vrai. «Est-il coupable de sédition?» Aujourd'hui, c'est leur problème s'ils ne sont pas capables de vivre avec leurs déclarations. Mais qu'on ne fasse pas perdre du temps au comité et au Parlement. Nous sommes prêts à passer au vote sur la première motion visant à faire comparaître d'autres témoins et il n'y a plus rien à ajouter là-dessus. Je vous avise immédiatement que je déposerai la motion dont j'avais donné avis afin de faire avancer le comité. Merci.
[Traduction]
Le président: Merci.
Madame Catterall suivie de monsieur Strahl.
M. Pagtakhan: Est-ce que ce sera bientôt mon tour, monsieur le président?
Le président: Votre nom est sur la liste.
Mme Catterall (Ottawa-Ouest): Monsieur le président, je tiens d'abord à dire àM. Bellehumeur qu'il a peut-être tiré ses conclusions avant même que les audiences ne commencent, mais que nous n'en avons pas tous fait autant. Nous allons poursuivre les audiences jusqu'à ce que nous soyons en mesure de tirer nos conclusions.
Je ferai maintenant quelques remarques sur l'intérêt d'entendre les témoins proposés.MM. Strahl et Frazer, dans leur amendement à la motion, ont tous les deux déclaré que nous avons besoin de savoir quels ont été les effets du communiqué sur ceux qu'ils l'ont reçu.
Je suis désolée, mais je vois mal comment le chef d'état-major de la Défense qui n'était même pas là lorsque le communiqué a été envoyé, pourra nous décrire les effets qu'il a eus. Il n'était pas là lorsque le communiqué a été reçu et n'avait rien à voir avec ceux qui l'ont reçu.
M. Strahl: C'est le responsable des forces armées.
Mme Catterall: Je ne vois pas quelle information utile il pourrait nous fournir sur les effets de ce message sur ceux qui l'ont reçu, avec qui il n'avait aucun lien, à moins, monsieur le président, que les députés souhaitent que nous convoquions un militaire à la réputation et à la carrière remarquables à titre d'ancien chef d'état-major pour qu'il se perde en conjectures avec nous sur les effets qu'aurait pu avoir ce communiqué. C'est tout ce qu'il pourrait faire et, honnêtement, ni moi ni les autres membres du comité ne s'intéressent aux conjectures.
Il a aussi suggéré de faire témoigner au moins une personne qui a reçu le communiqué. Je ne vois pas le nom de cette personne sur la liste, mais peut-être qu'on pourrait quand même se trouver quelqu'un. Il nous est impossible de savoir si ce communiqué a été lu par une, cinq, 500 ou 5 000 personnes. Même si l'une d'entre elles nous dit comment elle a réagi en recevant ce communiqué, ça ne nous apprendra rien sur la réaction des autres. Elle pourra seulement nous dire comment elle a réagi.
Je suis tout à fait incapable de comprendre pourquoi M. Strahl estime que le ministre de la Défense nationale pourra apporter une contribution utile à la discussion. J'aimerais bien qu'un des députés réformistes nous dise de quoi traite le comité d'après eux. S'agit-il de sédition ou d'outrage au Parlement, d'après eux? Sinon, j'aimerais bien qu'ils cessent de revenir à la question de la sédition dont le comité n'a pas été saisi, à mon avis. Nous ne sommes pas un tribunal. Oublions cette idée de déterminer s'il y a eu sédition ou non. C'est là la seule pertinence de cette liste de témoins, monsieur le président.
Le président: Merci, madame Catterall.
Monsieur Strahl.
M. Strahl: Merci, monsieur le président. Je ne répondrai pas aux déclarations les plus ridicules de mes collègues d'en face.
Comment peuvent-ils croire que le chef d'état-major n'a pas reçu le communiqué? Honnêtement, s'il ne l'a pas reçu, j'aimerais bien savoir comment cela se fait. Pourquoi n'a-t-il pas reçu une copie? Après tout, c'est le chef d'état-major.
Le président: Pour votre gouverne, puisque vous êtes nouveau à ce comité, vous ne connaissez peut-être pas le mandat de notre comité dans cette affaire. Je ne veux pas vous interrompre, je veux simplement vous aider.
Les questions relevant directement du communiqué sont de la compétence du comité. Je ne sais si cela vous aidera, mais nous avons tenté de nous en tenir uniquement aux questions qui sont directement liées au communiqué. Nos collègues ont simplement tenté de vous faire remarquer que nous devons nous en tenir aux questions qui touchent directement le communiqué. Je tente seulement de vous être utile.
M. Strahl: Je vous remercie, monsieur le président. Je ne trouve pas cela particulièrement utile et...
Le président: Dans ce cas, je m'excuse.
M. Strahl: ...permettez-moi de vous dire pourquoi. Si l'on ne demande pas au chef d'état-major quel a été l'impact de ce communiqué sur l'effectif... Et s'il nous disait qu'il n'a eu aucun impact? Et s'il traitait toute cette affaire comme une blague à l'instar du député de Kingston et les Îles? À mon avis, nous devrions savoir quel a été l'impact de ce communiqué sur les membres des Forces armées canadiennes.
Qui plus est, monsieur le président, je crois que les libéraux qui disent maintenant - et j'oublie les mots exacts qu'a utilisés M. Milliken - qu'il s'agissait d'une blague ou une farce...
M. Milliken: Non, je ne pense pas avoir dit cela.
M. Strahl: Qu'avez-vous dit exactement?
M. Milliken: C'était...
M. Strahl: Voici ce qu'il a dit, monsieur le président: «C'est une blague. Comme les tracts que distribuent les gens dans la rue et les extrémistes fanatiques, je le jetterais à la poubelle.»
Monsieur le président, je vous rappelle le climat qui régnait au moment de la crise du référendum lorsque M. Chrétien a presque mené le pays à sa perte. Je vous rappelle aussi les remarques qu'a alors faites le whip du gouvernement. Voici ce qu'il a dit: «Le communiqué est irresponsable et inexact». Il a ajouté: «Il ne convient pas que le porte-parole d'un parti en matière de défense nationale émette ce genre de communiqué. Quelle que soit l'issue du référendum, les soldats canadiens continueront d'être des soldats canadiens le jour avant celui-ci, le jour même du référendum et le lendemain». On voit bien qu'il était outré.
Le Toronto Sun a aussi attribué les propos suivants au whip du gouvernement: «On peut dire qu'il s'agit presque d'une incitation à la mutinerie.» Il ne s'agit pas d'un tract provenant d'extrémistes fanatiques. Il ne s'agit pas d'une feuille de chou qu'on jette à la poubelle après l'avoir reçue. Le whip du gouvernement dit qu'il s'agit presque d'une incitation à la mutinerie.
Je vous demande de vous remémorer l'état de crise qui régnait au moment du référendum. Un autre que nous aimerions entendre est M. Collenette. M. Collenette a-t-il pensé qu'il s'agissait d'une blague? Connaissait-il l'existence de ce communiqué? A-t-il pensé qu'il était le fait d'extrémistes fanatiques? Voici ce qu'il a dit en novembre: «Je suis outré par ce communiqué et je doute que celui qui l'a émis ait eu le droit de le faire. J'ai d'ailleurs demandé un avis à ce sujet.» Il n'a pas dit: «Peu importe, ce n'est pas vraiment important.» Il a dit qu'il allait demander un avis. Je suppose qu'il songeait à un avis juridique puisqu'il a été outré par le communiqué. Le ministre de la Défense nationale n'a pas dit que c'était le fait d'extrémistes fanatiques et qu'il ne fallait pas y prêter attention. Il a dit que ce communiqué l'avait outré.
Qu'a-t-il dit d'autre? Ceci: «C'est une question qui mérite d'être étudiée sérieusement. On ne peut pas simplement permettre aux députés de dire des choses pareilles.» Que compte-t-il faire? Propose-t-il simplement de mettre le communiqué dans le destructeur de documents? Non, il prend la chose au sérieux. Le ministre de la Défense nationale devrait comparaître devant le comité pour que nous puissions lui demander à quel point il attachait de l'importance à cette affaire.
Devrions-nous vraiment simplement oublier toute cette affaire comme le propose le député de Kingston et les Îles? Je ne le pense pas.
M. Milliken: J'ai dit que nous étions prêts à rédiger notre rapport.
M. Strahl: Selon lui, M. Collenette a également dit qu'il était surpris qu'aucun de ses collègues n'ait soulevé la question à la Chambre des communes puisque c'est là qu'on devrait le faire. Autrement dit, monsieur le président, en décembre dernier, M. Collenette priait les députés de soulever la question en Chambre. Or, aucun député libéral ne l'a fait et je ne comprends d'ailleurs pas qu'il ne les a pas enjoints de le faire. Il a fallu que le Parti réformiste le fasse. Nous l'avons fait parce que le ministre de la Défense nationale a dit que l'affaire était suffisamment sérieuse pour qu'on le fasse. Pour vous, qui marchez encore les yeux fermés vers l'abîme, il s'agit d'une peccadille. Vous voudriez qu'on oublie toute l'affaire. Vous ne voulez pas que l'on fasse des recommandations aux militaires quant à la façon de s'y prendre si jamais cela devait se reproduire. Vous voudriez que nous nous en tenions aux questions techniques et que nous nous rendormions ensuite.
Le président: Tenez-vous en à la motion.
M. Strahl: Monsieur le président, vous-même avez dit que si la question était déférée au comité, celui-ci l'étudierait très sérieusement, ainsi que de façon équitable et ordonnée et qu'on y accorderait aussi la priorité.
Ce que nous essayons de faire, c'est d'aller au fond des choses et de faire la lumière sur les faits. Il ne suffit pas que M. Maingot et M. McWhinney nous disent quelles sont les mesures que le comité pourrait prendre. Il nous faut aller au fond des choses et savoir quel a été l'impact de ce communiqué sur les forces armées.
Dire que le chef d'état-major n'a aucune idée de l'impact que ce communiqué a eu sur son effectif, c'est soit un blâme adressé au chef d'état-major, soit une remise en cause des propos tenus par M. Collenette et M. Boudria.
Je vous rappelle le climat qui régnait à l'époque du référendum. Rappelez-vous dans quel état de surexcitation vous vous trouviez. Le communiqué n'est pas le fait d'extrémistes fanatiques. Il est très préoccupant. Voilà pourquoi nous devrions demander à des militaires dans quelle mesure ce communiqué a été préoccupant pour eux et quel a été son impact sur les militaires canadiens.
Le président: Je vous remercie.
Monsieur Pagtakhan, vous avez la parole.
M. Pagtakhan: Je vous remercie, monsieur le président.
Cette motion vise à savoir si nous avons des raisons de convoquer d'autres témoins. Voilà la question que nous devons trancher. Ce qu'il faut se demander, c'est si nous sommes prêts au Canada à mener nos enquêtes à l'aveuglette comme le propose le Parti réformiste.
Le dernier intervenant a dit qu'il voulait connaître l'impact du communiqué sur les membres des Forces armées canadiennes. Ce serait peut-être un bon projet de recherche que le Parti réformiste aimerait peut-être financer, mais je ne pense pas que les contribuables devraient être mis à contribution puisque cela ne fait pas partie du mandat du comité.
Le mandat du comité est d'établir si le communiqué a eu un impact sur les députés et sur le Parlement lui-même. Ce que les témoins proposés nous apporteraient ne pourrait pas nous apprendre beaucoup à ce sujet. Nous ne pourrions pas confirmer leurs impressions. Nous ne savons même pas s'ils les ont consignées dans des documents ou des agendas. Est-ce ce que vous cherchez à faire?
M. Strahl: J'aimerais tenter ma chance.
M. Pagtakhan: Voilà bien ce que je disais, monsieur le président. Le Parti réformiste veut que nous procédions à l'aveuglette. Je conviens avec le whip du gouvernement que la motion est futile.
À l'origine, la motion portait que nous entendions de nouveaux témoins. On y a ensuite présenté un amendement. J'attire l'attention du président sur le fait qu'il s'agit d'une nouvelle motion étant donné que la motion précédente a été mise de côté.
Je vous signale, monsieur le président, que si nous devions entendre les témoins dont les noms figurent sur la liste proposée par le Parti réformiste, le premier étant...
M. Harb: Nos audiences pourraient durer trois ans de plus.
M. Pagtakhan: Cette liste n'est pas exhaustive. Voilà bien un exemple d'enquête à l'aveuglette et nous devrions nous opposer, monsieur le président.
Voici ce que je conclus. Les témoignages que nous avons entendus jusqu'ici ne semblent pas avoir permis au Parti réformiste de se faire une idée sur la question. Rien ne nous assure donc, monsieur le président, que les membres de ce parti se feraient une idée après avoir entendu 1 000 témoins. Si le parti peut se prononcer maintenant sur la question, nous pourrons porter un jugement sur toute cette affaire. Ce jugement pourra donner lieu à un débat au Parlement, ce qui est dans la nature des choses.
À ce sujet, monsieur le président, la motion initiale portait que nous étudierions toute l'affaire. Le président a attiré notre attention sur le fait que le comité s'était donné un mandat très précis avec l'aval du Parti réformiste et qu'il n'est pas question de changer notre mandat. Voilà un autre exemple du type de tergiversations auxquelles M. Milliken a fait allusion sur un autre sujet.
Comme en fait foi le hansard et comme les témoins auxquels j'ai posé la question l'ont confirmé, le communiqué lui-même est une preuve concluante. Comment peut-on prétendre que ce communiqué n'est plus aussi concluant que lorsque M. Hart s'y est objecté et qu'il ne nous permet plus de tirer de conclusions sur toute cette affaire? Voilà ce que j'avais à vous dire.
Monsieur le président, je crois que le fait de convoquer d'autres témoins ne serait pas juste à l'égard de la Chambre des communes, cela coûterait davantage aux contribuables et cela représenterait un gaspillage de temps et d'effort de notre part. À mon sens, je crois qu'il vaudrait mieux que cet argent, ces efforts et ce temps servent à créer des emplois.
Le président: Je vous remercie, monsieur Pagtakhan. Trois personnes veulent maintenant intervenir et nous passerons ensuite au vote.
M. Laurin, M. Frazer et M. Langlois.
[Français]
M. Laurin (Joliette): Nous pourrions, en principe, être d'accord sur la comparution de nouveaux témoins si nous avions une certaine garantie qu'ils nous apporteraient des faits nouveaux. La question de M. Strahl a pour but de demander aux témoins s'il jugent que le communiqué deM. Jacob a eu un effet sur l'Armée. Ce n'est pas l'objet de notre enquête; nous ne voulons pas savoir si un communiqué a eu un effet sur le moral ou le comportement des troupes.
Si c'était le cas, on jugerait à tous les jours que des communiqués sont séditieux. Est-ce que les articles de la presse ont eu un résultat néfaste sur le comportement de l'Armée en Bosnie-Herzégovine ou en Somalie? Est-ce que l'article d'un journaliste a fait en sorte que les troupes canadiennes se sont senties démoralisées? Ce n'est pas la question.
Un général pourrait-il venir ici demain matin pour nous dire quelle influence le communiqué de M. Jacob a eue sur le vote de chacun de ses militaires? C'était l'objet du communiqué: rassurer les gens qui avaient un souhait à faire un bon matin.
Si un général venait affirmer ici demain matin que 50 p. 100 des militaires ont changé leur vote, il briserait le secret confidentiel du vote. Est-ce qu'un général peut venir témoigner de cela? Je ne pense pas que nous soyons en mesure de le lui demander. Je douterais de la parole du général qui viendrait nous le dire et je lui demanderais comment il peut affirmer que 50, 60 ou 70 p. 100 de ses militaires ont modifié leur vote à la suite du communiqué de M. Jacob.
Même s'il nous le disait, ce ne serait que du ouï-dire. Seuls les militaires pourraient nous dire qu'ils ont changé leur vote à la suite du communiqué de M. Jacob. M. Strahl aurait-il l'intention d'entendre tous les militaires qui avaient le droit de vote et de leur demander s'ils ont changé leur vote lors du dernier référendum à la suite du communiqué? Je ne le pense pas.
La nature même des questions de M. Strahl démontre l'inutilité d'entendre de nouveaux témoins, du moins les personnes qui figurent sur cette liste. Elles pourraient peut-être nous dire qu'elles ont été choquées par ce communiqué, mais ceci ne prouverait pas qu'il y a eu sédition à la Chambre. Ce n'est pas parce qu'un général est fâché que la Chambre est insultée. Ce n'est pas parce qu'un colonel croit qu'il y a eu un communiqué bouleversant pour certains qu'il y a outrage à la Chambre ou sédition.
Il faut placer les choses dans leur juste contexte. Si ce sont les seuls témoins que le Parti réformiste veut entendre, je ne pense pas que leur témoignage servira à faire avancer la cause.
Je les invite à proposer les noms d'autres témoins qui, à leur avis, seraient susceptibles de faire avancer la cause et nous en discuterons. Je ne pense pas que les cinq témoins qu'ils ont proposés fassent progresser la cause.
[Traduction]
Le président: Je vous remercie. La parole est maintenant à M. Frazer et ensuite à M. Langlois.
M. Frazer: Je vous remercie, monsieur le président. J'aimerais vous exposer la raison pour laquelle il convient que nous convoquions d'autres témoins.
Notre mandat est notamment de voir si ce communiqué a suscité chez ceux qui l'ont lu du mépris pour le Parlement. Nous n'avons pas discuté de cette question avec qui que ce soit qui ait reçu le communiqué. Si, comme M. Milliken l'a dit, il est le fait d'extrémistes fanatiques, ne pense-t-il pas que ceux qui ont reçu le communiqué ont pu se demander pourquoi un tel communiqué aurait été émis par un député? N'a-t-il pas suscité du mépris pour le Parlement. Je soupçonne que oui. Ce n'est pas n'importe qui l'a rédigé.
J'aimerais savoir quand on a reçu ce communiqué. Il ne faut pas prendre sérieusement ce qu'a dit le whip adjoint du gouvernement car si le chef d'état-major n'a pas reçu un exemplaire de ce communiqué peu après qu'il a été diffusé dans les bases, c'est que quelque chose cloche avec la structure des Forces armées canadiennes. Moi je pense qu'il l'a bien reçu.
J'aimerais savoir quelle mesure il a jugé bon prendre après avoir lu ce communiqué. S'est-il simplement dit que personne ne prendrait au sérieux ce communiqué ou a-t-il jugé bon de demander aux commandants de bases et aux commandants de formation s'il ne valait pas mieux répliquer à ce communiqué et faire savoir aux membres des Forces armées canadiennes qu'ils se devaient d'être loyaux au Canada et non pas à un autre... Nous ne savons pas ce qui s'est passé parce que nous n'avons pas posé la question à qui que ce soit. Tant que nous ne le ferons pas, nous ne serons pas en mesure de vraiment savoir si ce communiqué a suscité chez ceux qui l'ont lu du mépris pour le Parlement.
Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: Je vous remercie. Monsieur Langlois, vous avez maintenant la parole.
[Français]
M. Langlois (Bellechasse): Nous sommes arrivés à une charnière où nous devons tirer une conclusion. Je n'ai pas l'intention de répéter les propos de mes collègues. Nous avons traité de la question du privilège parlementaire et de l'outrage au Parlement. Nous avons entendu assez de preuves et avons reçu assez d'expertise de la part de M. Marleau et de Me Davidson. M. Hart, l'accusateur, est d'ailleurs reparti avec son accusation.
Le député de Chambly, M. Lebel, disait qu'il était surprenant que la commission subsiste alors que l'accusateur était reparti avec son accusation et qu'il avait été obligé d'avouer à la fin que ce n'était pas dans le communiqué, mais dans l'esprit du communiqué qu'il y avait sédition. Nous sommes rendus pas mal loin quand on juge de l'esprit du communiqué. Puisque nous parlons de militaires, entendrons-nous le colonel Sanders comme témoin?
M. Boudria, le député de Glengarry - Prescott - Russell, avait mentionné, lors d'une réunion de l'ACFO tenue en Ontario à laquelle M. Bouchard avait été invité en sa qualité de chef de l'Opposition officielle à l'époque, que c'était un peu comme si des poulets invitaient le colonel Sanders à leur convention nationale.
J'ai pris cette remarque comme un jeu de mots, un humour typique à M. Boudria. Est-ce qu'on aurait dû le citer à comparaître devant le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre parce qu'il portait atteinte au chef de l'Opposition? Il faut savoir apprécier de telles choses.
Hier, à la télévision, M. Boudria disait n'avoir qu'un seul regret au sujet de référendum, soit de ne pas s'y être impliqué 10 jours à l'avance. Ces propos ne m'offensent pas. S'il veut commencer 10 jours à l'avance la prochaine fois, il pourra bien le faire. Il s'agit fondamentalement d'une question de débat démocratique. M. Boudria, M. Milliken et tous les autres députés d'en face ne partagent pas notre point de vue sur la question de l'avenir constitutionnel canadien. C'est la question du débat et c'est fondamentalement ce dont M. Jacob a voulu parler dans son communiqué.
Les députés réformistes ont une peur terrible que le tissu démocratique canadien ne résiste pas. Ils veulent protéger les Canadiens et les Canadiennes d'éléments de débat soumis par l'un ou l'autre des partis ou des courants politiques canadiens.
Les Canadiens et les Canadiennes ont des décennies et même des siècles d'histoire démocratique derrière eux. Ils n'ont pas besoin de balises, et surtout pas des balises réformistes, pour les guider dans leur choix démocratique.
Comme société, nous avons atteint une maturité grâce à laquelle nous pouvons prendre nos décisions. Que M. Milliken considère le communiqué du M. Jacob comme étant l'oeuvre d'un lunatique - c'est le terme qui a été employé - et que quelqu'un d'autre le considère comme un enrichissement au débat, c'est une question de débat. Personnellement, je trouve que le Livre rouge ne renferme pas grand-chose, et c'est mon opinion. Les députés libéraux trouvent que c'est la trouvaille du siècle, et c'est leur opinion. En bout de ligne, la population canadienne va trancher. C'est pourquoi nous invoquons des arguments et tenons un débat: pour que la population canadienne tranche.
Le travail de notre comité parlementaire tire à sa fin. Nous avons très patiemment entendu toutes les personnes qui pouvaient éclairer le débat; il est temps de passer au vote sur la motion. Lors d'une réunion subséquente, peut-être pourrons-nous prendre en considération la motion dont j'avais donné avis à une réunion précédente.
Le président: Merci beaucoup.
[Traduction]
Voici la motion de M. Strahl. Que le comité convoque d'autres témoins, à savoir le général de Chastelain, le major-général Lewis MacKenzie, Brent Tyler, le brigadier-général Bouter et l'honorable David Collenette...
[Français]
Une voix: Un vote par appel nominal.
[Traduction]
La motion est rejetée par 10 voix contre 3
Le président: Nous avons entendu plusieurs témoins: M. Marleau et Mme Davidson de la Chambre des communes, M. Hart, M. Jacob, M. McWhinney et M. Maingot. Je crois que le comité est maintenant à même d'étudier soigneusement toute la preuve et de décider du contenu de son rapport à la Chambre. La Chambre a confié un mandat au comité qui est d'établir si le communiqué a porté atteinte aux privilèges de la Chambre ou a donné lieu à du mépris à son endroit. Il nous incombe maintenant d'étudier soigneusement les témoignages que nous avons entendus en fonction des avis que nous avons reçus en matière de procédure.
J'essaie de vous donner des conseils à titre de président sur la façon dont nous devrions nous y prendre pour préparer notre rapport. Je pense donc qu'il conviendrait que nous siégions maintenant à huis clos. Je vous ferai des suggestions, après quoi nous pourrons décider de la façon dont nous comptons procéder. Je propose donc que nous siégions maintenant à huis clos et que nous permettions à l'attaché de recherche d'entendre nos vues de manière à pouvoir nous proposer ensuite un projet de rapport. Il se peut que les députés ministériels ne partagent pas le point de vue des députés du Parti réformiste ou de ceux de l'opposition officielle, mais nous ne le saurons vraiment qu'après avoir vu le projet de rapport.
Voilà donc ce que je vous propose à titre de président. S'il y a consentement général, nous allons maintenant siéger à huis clos. Quelqu'un veut-il proposer une motion en ce sens.
M. Strahl: Monsieur le président, il nous faut d'abord régler le cas de la motion dont nous sommes maintenant saisis.
Le président: Sommes-nous saisis d'une motion?
M. Strahl: Je crois qu'il s'agit d'une motion du Bloc.
Le président: Excusez-moi, vous avez raison. On nous a donné un avis de motion. J'essayais de vous expliquer comment je pense que nous devrions procéder.
Sur cet avis de motion, M. Strahl a demandé...
[Français]
M. Langlois: Je saisis le comité de ma motion. Je propose que le comité mette un terme à l'examen du communiqué publié par le député de Charlesbourg et fasse rapport à la Chambre après avoir tiré les conclusions appropriées.
[Traduction]
Le président: Ce n'est pas contradictoire, n'est-ce pas?
[Français]
M. Bellehumeur: Non. Lisez la motion au complet.
Puisqu'il est 12 h 10 et que nous serons ici jusqu'à 14 h, rien ne s'oppose à ce que nous allions au fond de la question et lisions textuellement notre motion qui comporte 32 paragraphes qui s'expliquent d'eux-mêmes. Je crois que c'est dans cet esprit que M. Langlois avait compris que, compte tenu de l'heure, nous allions reporter la motion à plus tard.
Puisque nous avons donné avis de la motion il y a longtemps, je voudrais que nous nous prononcions avant même de procéder de la façon que vous avez proposée et de donner quelque mandat que ce soit au recherchiste.
M. Langlois a déposé la motion et nous n'avons aucune objection à discuter de cette motion un autre jour. Cependant, avant de continuer, nous voudrions que le comité se prononce sur la motion que nous avons déposée.
Pouvez-vous éclaircir la façon dont vous voulez procéder? Si nous continuons, nous irons au fond des choses; nous sommes prêts depuis déjà trois mois. Si vous préférez attendre à une réunion subséquente, ça ne nous dérange pas.
[Traduction]
Le président: Si j'ai bien compris ce que M. Langlois propose, cela ne va pas à l'encontre de ce que j'ai moi-même proposé. J'ai proposé que nous étudiions maintenant les témoignages que nous avons entendus et que nous fassions rapport au Parlement.
Dans la deuxième partie de la motion, le Bloc propose que nous nous penchions sur certaines questions fondamentales, n'est-ce pas? Je voudrais m'assurer d'avoir bien compris.
[Français]
M. Bellehumeur: À la lumière des propos qu'ont tenus les témoins, nous sommes capables de savoir ce que nous faisons, ce que fait le comité. Nous sommes d'accord à ce niveau.
Nous avons cependant déposé un avis de motion très structuré que nous voudrions présenter au comité qui, selon qu'il vote en faveur ou contre, donnera sûrement des orientations au recherchiste.
Bien malin serait le recherchiste qui partirait à son bureau pour tenter de faire un projet de rapport sans connaître les grandes orientations que nous voudrions y donner. Il pourrait peut-être penser savoir.
Certains éléments de la motion que nous présenterons seront peut-être retenus et d'autres retirés. Lorsque le recherchiste repartira dans son bureau, il saura fort bien ce que le comité veut inclure dans son rapport.
Il y a peut-être de petites discussions en notre absence, mais j'en doute. Je pense que vous êtes très démocratique, monsieur le président. Il faudrait au moins en discuter avant que le recherchiste ne retourne dans son bureau.
Puisqu'il est peut-être trop tard aujourd'hui pour entamer ce travail qui pourrait être laborieux, nous ne nous opposons aucunement à le faire lors d'une réunion subséquente. Mais ne commençons pas si nous devons être interrompus et poursuivre plus tard. Je pense qu'il serait idéal d'y consacrer trois heures de suite, du matin à l'après-midi s'il le faut. Il faut régler le problème une fois pour toutes; il y a assez longtemps que nous en discutons. Les Canadiens sont écoeurés; les Québécois le sont depuis longtemps.
[Traduction]
Le président: Très bien. Je donne maintenant la parole à M. Speaker.
M. Speaker: Monsieur le président, j'aimerais m'assurer d'avoir bien compris ce que nous proposent MM. Langlois et Bellehumeur. M. Langlois nous a lu une motion et M. Bellehumeur nous a ensuite dit qu'il fallait y ajouter 32 points.
Le président: C'est ce que j'essaie de savoir. Vous soulevez un point très important, monsieur Speaker. J'ai l'impression que vous dites que vous voulez que certaines questions soient abordées dans le projet de rapport. Est-ce que je vous comprends bien?
[Français]
M. Bellehumeur: Je viens de parler avec la greffière du comité, Mme Carrière, et je pense qu'il existe peut-être un problème de compréhension.
Nous avions retiré la motion que nous avions déposée à la suite d'un accord en vue d'accélérer le processus.
Lors d'une de nos dernières rencontres, nous avions déposé un avis de motion. Dans ma tête de juriste - peut-être ne devrais-je pas avoir cette compréhension-là - , lorsqu'on dépose un avis de motion, on ne dépose pas le texte de la motion, mais plutôt les conclusions auxquelles on désire arriver.
M. Langlois a dit déposer sa motion, bien qu'il ait lu l'avis de motion. Nous déposerons la motion une fois pour toutes, dans les deux langues officielles, afin que tout le monde l'ait entre les mains. La motion n'est pas différente du texte de l'avis de motion; ce sont tout simplement les conclusions. Je dépose alors la motion, qui était reprise dans l'avis de motion pour la deuxième fois de toute façon; cela rime en plus.
[Traduction]
Le président: Vous venez donc de nous exposer votre position. Nous sommes heureux de la connaître. Nous ne débattrons cependant pas la motion pour l'instant.
[Français]
M. Bellehumeur: Aujourd'hui? Une autre fois, not today.
[Traduction]
Le président: Peut-être à un autre moment. J'accepte cette motion par laquelle vous nous faites part de vos vues.
Si vous regardez le second avis - et j'aimerais savoir ce qu'en pense le whip du gouvernement - , en rejetant la motion de M. Strahl, nous avons adopté celle de M. Langlois selon laquelle nous n'entendrons pas d'autres témoins.
Monsieur le whip du gouvernement.
M. Boudria: Monsieur le président, je pense qu'on s'entend au moins sur l'étape suivante même si on risque de ne pas s'entendre sur l'étape après celle-là qui sera le contenu du rapport. Voici la façon que je propose qu'on modifie cette motion: que le comité mette fin à l'audition de témoins dans l'affaire du communiqué émis par le député de Charlesbourg - autrement dit nous aurions terminé cette étape-là de nos travaux - et prépare un rapport à l'intention de la Chambre après avoir tiré les conclusions qui s'imposent de son étude.
La façon dont la motion est libellée donne à entendre que nous avons terminé d'étudier toute cette affaire. Or, ce n'est pas le cas. Nous le ferons lorsque nous siégerons à huis clos. Nous aurons cependant terminé l'étape de l'audition des témoins.
[Français]
J'en ai traduit assez rapidement le texte qui n'est peut-être pas tellement fidèle à la version anglaise. La motion devrait plutôt se lire:
- Que le comité mette un terme aux comparutions des témoins concernant le sujet du
communiqué publié par le député de Charlesbourg et procède maintenant à la préparation de
son rapport à la Chambre des communes après avoir tiré les conclusions appropriées.
Notre prochaine étape devrait consister à mettre un terme à la comparution des témoins et tenir notre prochaine séance à huis clos dans le but de travailler ensemble à la rédaction de notre rapport.
[Traduction]
Le président: Un instant, collègues.
Avant de donner la parole au Parti réformiste, j'aimerais savoir si M. Bellehumeur accepte qu'on modifie la motion. Êtes-vous d'accord pour qu'on le fasse, monsieur Bellehumeur?
[Français]
M. Bellehumeur: C'est très simpliste. Même avec tout le respect que je porte à M. Boudria, on ne peut pas retrancher bêtement quelque chose de la motion sans en avoir discuté au préalable. Je voudrais que nous en discutions, que nous donnions un mandat, que nous nous entendions sur une résolution, une motion ou quoi que ce soit, afin que le recherchiste puisse faire un rapport. Mais ne le faisons pas à huis clos. Je dépose ma motion pour que nous en discutions lors d'une réunion ultérieure, puisque nous n'aurons pas le temps aujourd'hui.
À la lumière des commentaires de M. Boudria, je me rends bien compte que nous ne nous entendrons pas. Reportons cette discussion à une séance ultérieure, votons sur la motion et par la suite nous irons à huis clos.
Il est prématuré d'aller à huis clos dès maintenant et de raturer cette motion. Il faut faire une analyse avant d'en arriver aux conclusions.
Ce ne serait pas un rapport. Si vous pensez que notre rapport sera une analyse succincte et très précise des témoignages et des contradictions du Parti réformiste, vous faites erreur, monsieur Boudria. Notre motion a pour but d'orienter le comité.
[Traduction]
Le président: Je vous remercie. J'accorde maintenant la parole à M. Speaker.
M. Speaker: Monsieur le président, j'aimerais faire quelques remarques au sujet de la motion que MM. Bellehumeur et Langlois ont présentée, motion que j'aimerais que vous jugiez irrecevable pour les raisons suivantes. Permettez-moi de vous expliquer pourquoi cette motion n'est pas recevable. Il ne s'agit pas de débattre un autre point, monsieur le président.
Il est habituel que les projets de loi de nature constitutionnelle comportent des préambules, mais pas les motions. En effet, il est possible qu'on soit d'accord avec la motion, mais pas nécessairement pour les raisons exposées dans le préambule. S'il peut être acceptable qu'une motion comporte un préambule à l'occasion, je trouve qu'on exagère quand même avec cette motion-ci qui comporte 25 «attendu que». Voilà autant de préambules. Ce n'est vraiment pas normal pour une motion.
Je vous renvoie au commentaire 565 de Beauchesne à la page 181 qui énonce ce qui suit: «Le texte d'une motion ne devrait être de style ni polémique, ni rhétorique; il ne devrait renfermer aucune disposition inutile, ni aucune parole répréhensible». Or, le préambule de cette motion est de style très polémique. On y lit à plusieurs reprises les expressions suivantes: «injustement accusé» et «a volontairement induit en erreur». Il ne s'agit pas simplement du style de la motion, mais de la version du Bloc du rapport du comité.
Mme Catterall: J'invoque le Règlement, monsieur le président.
M. Speaker: La motion comporte des mots répréhensibles comme «a induit en erreur». En conclusion, monsieur le président...
Mme Catterall: J'invoque le Règlement.
Le président: Je vous donnerai la parole. Il a presque terminé. Laissons-le terminer.
M. Speaker: En conclusion, monsieur le président, le paragraphe 566(5) du Beauchesne énonce ceci: «Toute irrégularité d'une partie quelconque d'une motion rend irrégulière la motion tout entière». Le préambule fait partie de la motion. Comme je l'ai souligné, c'est très inhabituel. C'est contraire à presque tous les préceptes du Beauchesne. À mon avis, cela rend toute la motion irrecevable, monsieur le président.
Le président: Vous invoquiez le Règlement, madame Catterall.
Mme Catterall: Non, c'est très bien. Je vous remercie.
M. Pagtakhan: J'aimerais une précision. Que débattons-nous maintenant?
Mme Catterall: Oui, nous ne sommes même pas saisis de cette motion.
Le président: J'allais y venir.
Appelez cela un avis de motion ou une motion, voici ce que nous a présenté M. Langlois. Que le comité mette fin à l'étude du communiqué émis par le député de Charlesbourg et fasse rapport à la Chambre après avoir tiré les conclusions qui s'imposent de son étude. Voilà la motion.M. Bellehumeur nous a donné un autre bout de papier qui est une motion ou un avis de motion.
Je dois vous dire que je pense que M. Speaker a raison au sujet des questions se rapportant à la motion ou à l'avis de motion de M. Bellehumeur. Son libellé est clairement incendiaire. L'expression «a volontairement induit en erreur la Chambre», par exemple, est de nature non parlementaire. Si cela vous convient, collègues, j'aimerais mettre la motion aux voix.
M. Boudria a proposé à M. Langlois d'accepter un amendement à sa motion et je ne pense pas que M. Langlois ait accepté. Si nous pouvons nous entendre...
Mme Catterall: J'invoque le Règlement. J'ai un amendement à proposer.
[Français]
M. Laurin: J'avais invoqué le Règlement, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Mme Catterall a invoqué le Règlement.
[Français]
M. Laurin: J'ai invoqué Règlement avant Mme Catterall; puis-je prendre la parole?
Mme Catterall: Je ne le pense pas.
[Traduction]
Le président: Mme Catterall a la parole.
Mme Catterall: Je regrette que M. Langlois ne souhaite pas accepter l'amendement que lui propose M. Boudria. Je vais donc proposer un amendement. J'essaie de procéder de façon ordonnée parce que je sais que le comité a déjà décidé de ne pas entendre d'autres témoins. Nous n'avons pas à revenir là-dessus. Je crois que M. Boudria a donné de bonnes raisons pour lesquelles il n'estime pas que... Une fois que nous aurons tiré nos conclusions et que nous aurons préparé un rapport, nous aurons terminé notre étude.
Je propose que la motion de M. Langlois soit modifiée en supprimant tous les mots après «le comité» et en les remplaçant par ce qui suit: «tire maintenant ses conclusions et prépare un rapport à l'intention de la Chambre».
Le président: On propose donc un amendement à la motion de M. Langlois.
[Français]
M. Laurin: J'aimerais préciser que vous ne devriez pas faire allusion à une motion deM. Langlois, puisqu'il n'a pas déposé de motion, mais plutôt avisé le comité que nous allions déposer une motion en vue de mettre un terme à l'examen du communiqué publié par M. Jacob et de faire rapport à la Chambre.
Dans son avis, M. Langlois disait qu'il avisait le comité que nous déposerions une motion. Ce n'est donc pas une motion; la motion est ce que M. Bellehumeur a déposé. Comment pourrait-on faire un amendement à l'avis que M. Langlois a présenté?
[Traduction]
Le président: Collègues, la greffière me signale qu'il s'agit d'une motion.
[Français]
M. Bellehumeur: Nous voulons être plus blancs que neige. Nous déposons notre motion à l'avance et, par surcroît, c'est la deuxième fois que je la dépose. Aujourd'hui, vous sortez ça d'un sac: la motion est illégale; elle n'est pas correcte. Réveillez-vous! Nous vous disons depuis mars que vous êtes dans les patates. Je vous entends dire aujourd'hui que nous sommes dans le champs, qu'il faut arrêter ça au plus sacrant. C'est ce que vous dites aujourd'hui, monsieur Boudria.
Toute la journée, nous en sommes bien conscients, nous avons travaillé avec vous et nous vous avons laissé vous sortir de la merde dans laquelle vous vous étiez mis. Aujourd'hui, nous déposons une motion que nous avions préalablement déposée et que nous avions retirée pour faire votre affaire. La semaine passée, nous donnions un autre avis de motion et vous voudriez maintenant modifier notre avis de motion. On n'est pas dans le même monde. C'est vrai qu'il y a deux pays dans ce pays-là, parce qu'on ne parle pas du tout de la même chose.
[Traduction]
M. Harb: Monsieur le président, mettez la motion aux voix.
Le président: À l'ordre, collègues. Je vais suspendre la réunion pendant cinq minutes.
Le président: Collègues, je vous remercie d'avoir accepté qu'on suspende la séance pendant quelques instants pour nous permettre de dissiper cette confusion.
Je vois que nous progressons parce qu'on s'entend maintenant sur cette motion. Il y a effectivement motion. Il y a donc une motion et un amendement à cette motion. Ai-je bien compris, madame la greffière? Très bien.
Vous êtes prêts à procéder au vote, n'est-ce pas?
M. Bellehumeur: Non, lisez-la avant.
M. Speaker: L'avis porte-t-il que la motion a été officiellement présentée ainsi que l'amendement à cette motion? Est-ce que tout a été fait dans les règles?
Le président: La motion était un avis. J'ai dit qu'il s'agissait d'une motion et j'ai ensuite accepté un amendement. Voici donc la motion de M. Langlois: «Que le comité mette un terme à l'examen du communiqué publié par le député de Charlesbourg et fasse rapport à la Chambre après avoir tiré les conclusions appropriées».
Mme Catterall propose l'amendement suivant: qu'on supprime les mots après «le comité» et qu'on les remplace par ce qui suit: «tire maintenant ses conclusions et prépare un rapport à l'intention de la Chambre». Je mets maintenant la motion aux voix.
M. Speaker: Pouvons-nous prendre la parole sur cet amendement?
Le président: Si c'est ce que vous souhaitez... Je pense qu'il conviendrait plutôt de lever la séance et d'étudier la question... quelqu'un veut-il proposer que nous levions la séance.
M. Milliken: Je le propose.
Le président: Nous allons suspendre la séance et nous étudierons cette question lors de notre prochaine réunion.
La séance est levée.