[Enregistrement électronique]
Le mardi 29 octobre 1996
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Catterall): La séance est ouverte. Nous nous réunissons aujourd'hui conformément à notre ordre de renvoi du mardi 22 octobre relatif au projet de loi C-63, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi référendaire. Comme vous le voyez, notre témoin est l'honorable Herb Gray, leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada.
Monsieur Gray.
L'honorable Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Merci, madame la présidente, membres du comité. J'aimerais commencer par une courte déclaration d'ouverture après quoi, bien sûr, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
[Français]
Tout d'abord, je sais que le comité a rencontré à plusieurs reprises les représentants d'Élections Canada afin de leur donner son opinion et de les conseiller à l'égard de leur projet de registre et je vous remercie de cet effort louable et utile. Tout le travail préliminaire qui a été fait ne peut, à mon sens, que faciliter les délibérations du comité.
Deuxièmement, j'aimerais souligner l'excellent travail d'Élections Canada, qui a fait des recherches poussées et qui a conçu et évalué avec soin le concept du registre permanent des électeurs. Depuis que vous avez rencontré le directeur général des élections au printemps dernier, mes fonctionnaires ont travaillé sans répit à venir à bout d'une des principales sources de préoccupation, la protection de la vie privée, et le projet de loi que vous avez sous les yeux est le fruit de ces efforts grâce auxquels le registre proposé est maintenant plus pratique et respecte davantage le droit qu'ont les Canadiens de protéger leur vie privée.
[Traduction]
Monsieur le président, membres du comité, le projet de loi C-63 modernise et améliore l'efficacité de notre administration électorale. En effet, cette mesure a pour effet d'abréger la période électorale en créant un registre fédéral permanent des électeurs, en procédant à un dernier recensement avant les prochaines élections dans le but de constituer le registre et une liste préliminaire d'électeurs qui servira aux prochaines élections générales.
Cette mesure permettra de réaliser des économies considérables, 30 millions de dollars pour les seuls contribuables fédéraux, et cela, chaque fois qu'il y aura des élections après les prochaines élections. Sur ces 30 millions d'économies, 8 millions viendront du raccourcissement de la période électorale. J'imagine que cette portion-là des économies sera réalisée dès les prochaines élections.
Maintenant, permettez-moi de donner des détails sur certaines caractéristiques de cette mesure en ce qui concerne les élections, les électeurs, les partis et les candidats. J'essaierai également d'éclaircir certains malentendus qui ont surgi au sujet de cette mesure qui a été généralement bien accueillie. Je parlerai également des préavis pour la publicité radiodiffusée payante et des heures de scrutin selon les régions.
En prévoyant un dernier recensement de porte-à-porte avant les prochaines élections - recensement qui aurait probablement lieu au printemps de 1997 - ce projet de loi ouvre la possibilité de fixer la durée minimale d'une période électorale à 36 jours. Il faut que nous réduisions les coûts de l'administration des élections.
À l'époque de la Commission royale Lortie, les économies réalisables grâce à des périodes électorales raccourcies et la nécessité de lutter contre une certaine fatigue et un certain manque d'intérêt chez les électeurs avaient été mentionnées. Ce dernier recensement de porte-à-porte se déroulerait comme par le passé, mais avant les prochaines élections, et permettrait de dresser des listes électorales préliminaires pour les prochaines élections générales.
Une fois ces élections déclenchées, ces listes préliminaires seraient distribuées aux partis politiques dans les cinq jours suivant l'émission des brefs, et non pas plus tard au cours de la campagne comme certains journalistes l'ont laissé entendre. Cela signifie également que les limites des dépenses électorales seront connues 31 jours avant le jour du scrutin, et non plus 22 jours comme c'est le cas aux termes de la législation actuelle. Par conséquent, les candidats sauront plus tôt quelles limites de dépenses ils doivent respecter et ils risqueront moins de les dépasser par inadvertance.
À mon avis, les mesures que nous proposons devraient en réalité permettre de consacrer plus de temps qu'à l'heure actuelle à une campagne réfléchie et approfondie puisqu'il deviendra possible d'utiliser la liste électorale préliminaire pour les contacts directs avec les électeurs, de porte-à-porte, pour les envois sélectifs par la poste, et pour convaincre les gens d'aller voter le jour des élections. Évidemment, tout cela profitera également à tous les candidats et à tous les partis politiques, et, je l'imagine, aux candidats indépendants également.
À l'heure actuelle, ces listes sont disponibles environ trois semaines avant le jour du scrutin. Avec ce projet de loi, elles seront publiées quatre semaines avant le jour du scrutin. En 1992, Élections Canada a automatisé les listes électorales, et elles ont été révisées en 1993; il n'y a pas eu de recensement et on s'est aperçu qu'il était possible de respecter ces délais restreints.
Également, le directeur des élections enverra des cartes aux électeurs pour leur confirmer qu'ils figurent bien sur le registre. C'est une mesure prise par Élections Canada, une mesure parmi d'autres, pour s'assurer que les Canadiens savent comment ils peuvent se prévaloir de leur droit de vote. Bien sûr, ces mêmes préavis seront envoyés à l'occasion des prochaines élections à tous ceux qui figurent sur les listes électorales préliminaires, comme cela a été fait la dernière fois. La carte est envoyée aux électeurs deux semaines après l'émission du bref. Elle confirme qu'ils sont inscrits et leur donne des informations sur les dates du scrutin par anticipation et du scrutin officiel et l'endroit où ils se dérouleront. Elle comporte également un numéro de téléphone qu'ils peuvent appeler s'ils ont des questions.
Le Bureau du directeur général des élections continuera à avoir une campagne multimédia pour s'assurer que les Canadiens sont bien informés au sujet de cet événement important et qu'ils savent comment exercer leur droit de vote.
J'aimerais mentionner également des changements importants qui se produiront à cause de ce nouveau calendrier électoral minimal de 36 jours. Ce calendrier raccourci aura un impact sur les Canadiens qui votent aux termes des règles spéciales de scrutin. Je pense aux électeurs des forces armées, et en particulier à ceux qui vivent à l'étranger. Cela comprend, bien sûr, les diplomates et tous ceux qui vivent à l'étranger mais qui ont l'intention de revenir. Pour compenser ces délais plus restreints, les bulletins spéciaux seront dorénavant acceptés jusqu'à 18 heures, heure d'Ottawa, le jour du scrutin, pour permettre à plus de Canadiens qui appartiennent à ces catégories de voter.
Le calendrier raccourci modifie également les dispositions en ce qui concerne les avis pour la radiodiffusion. Le projet de loi C-63 conserve le délai actuel de 28 jours pour la publicité des partis politiques à la radio et à la télévision. Toutefois, nous proposons un ajustement pour tenir compte du calendrier réduit. Par le passé, les partis politiques informaient d'avance les radiodiffuseurs de leurs projets, avant même que la période de publicité ne commence. Jusqu'à présent, les partis disposaient de 10 jours pour informer les radiodiffuseurs de leur intention d'acheter du temps d'antenne et le projet de loi C-63 propose de ramener cette période à trois jours.
Ce changement quant au délai prévu pour annoncer les intentions des partis peut être considéré comme une répercussion secondaire du projet de loi, mais je crains tout de même que certains partis aient du mal à préparer un horaire pour la publicité qu'ils font à la radio et à la télévision. Le Bureau du directeur général des élections a demandé l'opinion de l'arbitre de la radiodiffusion, Peter Grant, et celui-ci a fait part de ses préoccupations au directeur général des élections tout en mentionnant certaines options.
Il semble qu'une des solutions suggérées par M. Grant soit de conserver la même période de radiodiffusion, mais de prévoir un bloc maximum de 10 jours après l'émission des brefs pendant lequel les partis devraient informer les radiodiffuseurs de leurs intentions. Ce bloc ne serait pas à date fixe mais pourrait être déplacé. Cette solution me semble très intéressante, mais j'aimerais que le comité étudie cette possibilité pour m'aider à rédiger un amendement approprié.
J'aimerais rectifier certaines erreurs de terminologie qui se sont glissées lors de la discussion au sujet du registre. Que les prochaines élections surviennent au printemps, à l'été ou à l'automne, nous disposerons alors d'une liste électorale préliminaire, et non pas du registre permanent. Toutefois, une fois constitué et établi, ce registre sera disponible pour les élections fédérales suivantes et il sera alors inutile de procéder à des recensements de porte-à-porte coûteux pendant la période électorale proprement dite.
Après les prochaines élections, en supposant qu'elles soient déclenchées avant 1998, nous aurons un registre permanent des électeurs. Évidemment, je retiens l'hypothèse que ce projet de loi prendra force de loi à l'automne prochain. Cinq jours après l'émission des brefs, les listes électorales préliminaires seraient dressées en se servant du registre. On utiliserait les informations sur les électeurs recueillies pendant la période électorale pour réviser le registre et, bien sûr, les listes préliminaires utilisées pendant cette période électorale.
Entre les périodes électorales, Élections Canada mettrait le registre à jour en utilisant les données de Revenu Canada, les listes de nouveaux citoyens canadiens établies par Citoyenneté et Immigration, de même que les registres de l'état civil et les données sur les véhicules à moteur des provinces et des territoires. Pour ces mises à jour, on se base sur ce qu'on appelle les «données de base»: nom, adresse et date de naissance. Les données de sources fédérales ne seraient utilisées qu'avec la permission de l'intéressé.
Une fois en place, le registre pourrait être utilisé par les provinces, les municipalités ou les conseils scolaires, mais uniquement à des fins électorales. En partageant ces informations on permettrait aux Canadiens, en leur qualité de contribuables provinciaux et municipaux, de réaliser de nouvelles économies.
Il faut noter également que le projet de loi prévoit un nouveau processus de révision simplifié pendant la période électorale. Les séances de révision et le poste de réviseur seraient abolis. Leurs tâches seraient confiées aux directeurs du scrutin eux-mêmes. Le nouveau système permettrait aussi aux électeurs d'obtenir plus facilement les révisions. En effet, il deviendrait plus facile pour ceux d'entre eux qui ont déménagé de transférer leur inscription d'une liste à une autre ou de corriger les informations de la liste électorale.
On pourrait procéder à des révisions systématiques dans les régions où la population est très mobile, les campus universitaires et les nouveaux développements domiciliaires, par exemple. Dans ces cas-là, on enverrait par la poste des formulaires d'inscription à renvoyer par la même voie.
Maintenant, j'aimerais vous expliquer deux autres aspects de ce projet de loi. Pour commencer, tout comme le système actuel de recensement de porte-à-porte, le registre électoral demeure un système volontaire d'inscription des électeurs. Les Canadiens peuvent choisir de ne pas faire inscrire leurs nom, adresse et date de naissance sur le registre, et tout de même conserver leur droit de vote. Il leur suffit de se faire inscrire sur la liste des électeurs, soit pendant la campagne électorale, soit le jour du scrutin. Deuxièmement, nous prendrons les mesures nécessaires pour nous assurer que les informations personnelles des électeurs sont respectées et qu'elles demeurent gardées confidentielles.
Comment cela va-t-il fonctionner? Avant qu'Élections Canada puisse obtenir des informations sur un électeur à partir de sources fédérales, nous nous assurerons que le principe du consentement actif est respecté. C'est particulièrement important lorsqu'il s'agit de données de Revenu Canada. Lorsqu'ils rempliront leur déclaration d'impôt, les contribuables pourront cocher une case pour indiquer qu'ils acceptent qu'on communique leur nom, leur adresse et leur date de naissance à Élections Canada. C'est ce que nous appelons le «consentement informé actif». Citoyenneté et Immigration Canada appliquera le même principe en demandant aux nouveaux Canadiens s'ils souhaitent voir ces informations communiquées à Élections Canada.
Les ordinateurs d'Élections Canada et ceux de ces deux ministères fédéraux ne seront pas en ligne pour transmettre ces données. Au lieu de cela, ces données seront transmises à Élections Canada sur bande magnétique.
En ce qui concerne la protection des données de sources provinciales, les lois provinciales continueront à s'appliquer. Qu'il s'agisse des lois provinciales ou d'ententes entre Élections Canada et les organismes provinciaux ou municipaux avec lesquels Élections Canada sera appelé à échanger des données, on assurera la protection des renseignements personnels.
De plus, le projet de loi précise qui est autorisé à prendre connaissance des informations qui figurent au registre. Aux termes du projet de loi, tout abus dans ce domaine constitue un délit, par exemple communiquer ces informations à des personnes non autorisées ou encore à des fins non électorales. On me dit que cette démarche est conforme aux critères fixés par le commissaire à la protection de la vie privée.
Il y a un cas où l'opinion du commissaire à la protection de la vie privée n'a pas été retenue. La proposition actuelle permettrait de communiquer une liste établie chaque année en se fondant sur le registre. Le projet de loi propose le 15 novembre, mais vous aurez peut-être une date plus appropriée à nous proposer, peut-être plus tôt dans l'année. J'étudierai avec intérêt un amendement à cet égard. Cette liste serait communiquée aux parlementaires et aux partis politiques pour les circonscriptions où ils ont présenté un candidat lors des dernières élections.
Après avoir écouté attentivement les opinions du commissaire à la protection de la vie privée, je continue à recommander une publication annuelle de cette liste. À mon avis, cela permettrait aux membres du Parlement et aux partis politiques d'accomplir plus efficacement leurs tâches dans notre démocratie parlementaire.
Monsieur le président, membres du comité, j'espère que ce projet de loi sera adopté rapidement. J'ai l'impression qu'il est généralement bien accueilli, ce qui témoigne du travail considérable qui a déjà été accompli au cours des deux dernières années. Je signale également que cette initiative intéresse vivement les provinces.
En ce qui concerne les heures de scrutin selon les régions, au nom du gouvernement, et probablement aussi au nom des parlementaires et des Canadiens de l'Ouest, j'aimerais exprimer ma reconnaissance à notre collègue de Vancouver-Est, Anna Terrana. C'est son projet de loi d'initiative parlementaire qui a suscité un débat fort intéressant sur cet aspect important des élections, un débat auquel nous avons assisté à la Chambre hier, à l'occasion de la seconde lecture du projet de loi qui a ensuite été renvoyé à ce comité.
Quand j'ai déposé le projet de loi C-63 la semaine dernière, j'ai annoncé en conférence de presse que le gouvernement et moi-même étions favorables aux objectifs de Mme Anna Terrana dans son projet de loi C-314, mais qu'en même temps, nous voulions trouver un système qui réponde aux préoccupations des Canadiens de l'Ouest sans créer de problèmes indus ou de nouveaux problèmes aux Canadiens qui vivent dans l'est de notre pays. Le projet de loi C-314 tente justement de réaliser cet équilibre.
J'ai eu l'occasion de réfléchir encore à la question depuis le dépôt du projet de loi, et je suis maintenant convaincu que pour régler ce problème à temps pour les prochaines élections, il faudrait apporter des amendements au projet de loi C-63. Les membres de cette Chambre et de ce comité sont très désireux de régler ce problème, et pour cette raison, j'ai l'intention de proposer des amendements au projet de loi C-63 qui vont dans ce sens.
J'ajoute que j'ai discuté de ces questions avec Mme Terrana qui m'a dit qu'elle serait très heureuse que ce comité règle les problèmes en question en apportant des amendements au projet de loi du gouvernement.
Pour conclure, je dois dire que le projet de loi C-63 ne s'attaque pas aux dépenses des tiers, un problème qui, à mon avis, touche de très près la question des dépenses électorales en général. Le gouvernement a l'intention de déposer un projet de loi à ce sujet, mais le travail y afférent n'est pas encore terminé. Ce projet de loi tenterait de régler les problèmes soulevés par la décision de la Cour d'appel de l'Alberta dans l'affaire Somerville. Cette décision a infirmé les limites adoptées par le Parlement avant les dernières élections en ce qui concerne la publicité par des tiers.
Monsieur le président, membres du comité, c'est avec plaisir que je répondrai maintenant à vos questions. Il est possible que je fasse appel à mes collaborateurs, et il se pourrait même que je vous demande de poser certaines questions à M. Kingsley lorsqu'il comparaîtra, demain, je crois. Merci de m'avoir écouté, je vais maintenant essayer de répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Gray. Nous vous savons gré de prendre le temps de nous faire part de votre opinion ainsi que de celle du gouvernement sur cet important projet de loi.
J'invite maintenant mon collègue, M. Langlois, du Bloc, à commencer les questions.
[Français]
M. Langlois (Bellechasse): Monsieur le président, je voudrais tout d'abord remercier le personnel qui a permis que nous ayons ces cartables dans lesquels on retrouve toute la documentation.
Comme M. Gray est de loin notre doyen et s'intéresse à la vie parlementaire, ayant siégé tant au sein de l'opposition que du gouvernement, permettez-moi de lui transmettre, par votre intermédiaire, notre souci de ne conserver qu'un nombre minimal de ressources pour pouvoir effectuer notre travail.
Monsieur Gray, je suis heureux de vous voir en santé et parmi nous.
Quant au principe du projet de loi C-63, l'Opposition officielle a fait connaître qu'elle l'appuyait au chapitre des dispositions qui raccourciraient les délais d'élection, à condition que ce puisse être lié à l'établissement d'une liste préalable. Au moment où les nouvelles ont été connues sur la Colline parlementaire, il n'était pas évident que cet élément y apparaîtrait.
Ainsi donc, les premières critiques que nous avons dû faire ont été faites selon ce qui était connu, soit les déclarations faites en avril dernier par le directeur général des élections devant ce comité. Il affirmait alors qu'après juin, il ne serait plus possible d'établir une liste permanente.
Cependant, dans votre déclaration en Chambre, vous avez mentionné qu'il serait possible de faire les deux. Un recensement hors période électorale serait ainsi disponible dès l'émission des brefs ou au cours des quelques jours qui suivraient. Ceci répond à une de nos interrogations toutes particulières.
Je comprends d'autre part que nous aurons probablement à vivre pendant une certaine période avec possiblement deux lois électorales. Il n'y a pas de garantie formelle, à moins que vous ne nous en donniez une aujourd'hui, que le gouvernement n'utilisera pas sa prérogative de dissoudre les chambres avant que le recensement ne soit effectué.
Les partis d'opposition auront ce désavantage, qui est toujours leur lot, de ne pas savoir avec quelle loi ils fonctionneront. Si vous pouviez nous donner l'assurance aujourd'hui que le recensement sera terminé et en vigueur lorsque les brefs seront émis, ce serait déjà un pas en avant.
Bien sûr, un des éléments qui font que nous regrettons de ne pouvoir souscrire totalement à cette réforme qui, soit dit en passant est une réforme dans la bonne direction, c'est le fait que nous n'ayons pas été davantage associés à ce processus, monsieur Gray.
Vous aviez établi un précédent sous la 35e législature avec la motion M-10 que vous aviez vous-même présentée et dans laquelle vous aviez mandaté le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour préparer lui-même le projet de loi sur la redistribution électorale qui est devenu le projet de loi C-69.
J'aurais cru que vous auriez pu utiliser la même procédure et demander à ce comité, en collaboration avec Élections Canada, comme nous l'avons fait à l'époque, de rédiger un projet de loi électoral, et référendaire si besoin était, de telle sorte que ce projet de loi n'aurait pas été l'affaire de l'exécutif mais aurait émané de l'institution législative, puisque cette loi n'est pas la loi d'un parti politique.
La Loi électorale est une loi qui touche l'ensemble des Canadiennes et des Canadiens ainsi que les parlementaires, puisqu'ils auront à vivre pour la plupart avec cette loi à titre de candidats ou candidates se présentant à nouveau.
Je déplore que la consultation avec les partis d'opposition n'ait pas eu lieu. Je pense que la meilleur façon, et vous aviez tracé la voie dans ce sens-là, monsieur Gray, aurait été de présenter une motion pour renvoyer la rédaction du projet de loi à ce comité. Nous aurions pu être associés à toutes les étapes et aux difficultés que rencontrait Élections Canada. Nous aurions pu les vivre en même temps, comme lors du projet de loi C-69, et comprendre toute la dynamique et la logique de l'affaire. Cela aurait été beaucoup plus simple.
J'invite à l'avenir, dans la mesure du possible, le gouvernement à se servir de ces dispositions en matière électorale. Si ma mémoire est fidèle, je crois, monsieur Gray, que vous aviez demandé qu'on modifie le Règlement afin que l'on renvoie à ce comité la rédaction de projets de loi de cette nature qui, de par leur définition, ne sont ni litigieux ni contentieux et qui doivent, à mon avis, recevoir le plus large consensus possible.
Nous allons travailler, au cours du débat qui s'entame devant ce comité, à l'obtention de ce large consensus. Il serait impensable que nous puissions adopter ce projet de loi sur une simple majorité. Je pense que les trois partis devront souscrire aux dispositions fondamentales pour que ce soit vraiment le reflet d'une volonté très fermement ancrée dans la population.
Vous avez mentionné tout à l'heure que vous reviendrez bientôt avec un projet de loi sur la question de la publicité faite par les tiers, et j'espère que vous y donnerez suite. L'arrêt Somerville crée une disproportion inquiétante. Votre collègue, le ministre Martin, avait eu l'occasion de faire un brillant exposé en Chambre sur la notion de la réglementation des dépenses des partis politiques, préconisant que tout le monde ait une chance égale et que ce ne soit pas les forces de l'argent qui mènent à la victoire d'un candidat plutôt que de l'autre, mais que tout le monde ait un accès égal, du moins en théorie, aux médias d'information, à la publicité, etc.
S'il faut qu'en plus des partis politiques, les tiers aient le droit de dépenser autant qu'ils le veulent, nous serons dans une situation inquiétante. À cet égard, j'aurais une question à vous poser et je terminerai dans quelques instants mes remarques préliminaires.
Est-ce que le gouvernement serait prêt à considérer l'utilisation d'une clause dérogatoire, telle que celle prévue à l'article 33 de la Loi constitutionnelle de 1982, pour remettre en force les dispositions qui ont été déclarées inopérantes en vertu de la Charte par la Cour d'appel de l'Alberta dans l'arrêt Somerville? Ainsi donc, avec un seul article, nous pourrions possiblement faire revivre le limite de 1 000$ imposée aux tiers qui veulent intervenir.
Je pense qu'il est grand temps que nous nous dotions d'un outil efficace de travail en matière de contentieux électoral, et c'est à cet égard que le projet de loi C-63 fait défaut. Nous vivons avec un système électoral où il est beaucoup plus facile à la limite pour quelqu'un de tricher lors d'une élection, parce que les procédures judiciaires de contestation sont assujetties à une vieille loi sur les élections contestées qui, lorsqu'on doit y avoir recours, nécessite énormément de temps. Généralement, les députés ont le temps de servir pendant toute une législature avant que leur élection ne soit annulée s'il y a eu vraiment des manoeuvres frauduleuses de leur part.
Je pense qu'on pourrait donner à ce comité et à Élections Canada le mandat de travailler à la rédaction d'une nouvelle loi sur les contestations électorales. Nous devrions connaître au plus six mois après une élection le résultat d'une élection ou d'une contestation. On entend la sonnerie d'appel de la Chambre pour le quorum, mais je vais continuer.
Comme je le disais, il y a effectivement possibilité que deux lois se chevauchent. Si vous pouviez me donner l'assurance qu'on attendra avant que les bref soient émis, ce serait déjà pour nous un pas dans la bonne direction.
Seriez-vous disposé à revoir certaines dispositions de la Loi électorale adoptées par le gouvernement conservateur qui m'inquiètent et qui portent sur les fameux bulletins spéciaux en blanc que les électeurs pouvaient se faire envoyer à la maison et qui permettent à toutes fins pratiques et sans aucun contrôle que des gens votent à la place d'autres?
Cette loi m'a toujours stupéfait. Je m'étonne que quelqu'un demande un bulletin, que le bulletin soit envoyé chez lui et que, sans aucun contrôle, le bulletin soit retourné chez le directeur local du scrutin et compilé. Dans plusieurs circonscriptions, il est difficile de le faire, mais c'est probablement plus facile dans certaines circonscriptions parce que les gens se connaissent beaucoup moins. Seriez-vous disposé à ce que nous revoyions ces dispositions?
J'aurais peut-être un dernier point. Vous m'excuserez d'avoir tout émis en même temps, mais j'aime autant tout mettre dans mon pâté chinois avant de le manger. Je me demande si le gouvernement a songé à prolonger la période où les sondages sont interdits, la fixant peut-être aux dix derniers jours de la fin de la campagne électorale pour éviter cette influence ou cette amplification de la victoire. Il y a toujours une masse de la population qui, au cours des derniers jours, veut se rallier au gagnant ou tout simplement rester chez elle en se disant que le gouvernement est déjà élu d'avance et que ça ne donne rien d'aller voter. Il me semble qu'un black-out de 10 ou 15 jours à la fin de la campagne électorale serait souhaitable, parce qu'il forcerait tous les gens à travailler sur le terrain et à convaincre les citoyens sans qu'ils se disent que les journaux vont faire le travail à leur place en rapportant des sondages.
Les sondages peuvent nous éclairer pour nos plates-formes politiques et nous aider à savoir où on doit se diriger, mais je ne pense pas que l'utilisation massive actuelle des sondages doive faire de nous une «sondo-démocratie» plutôt qu'une véritable démocratie le jour de l'élection.
C'étaient là mes remarques préliminaires. J'aurai bien d'autres questions à poser à M. Girard, M. Kingsley, M. Phillips et M. Côté qui seront ici mercredi et jeudi pour traiter du même sujet.
J'apprécierais entendre vos remarques ou celles des personnes qui vous accompagnent sur les sujets que j'ai abordés.
Le président: Merci beaucoup. Monsieur le ministre.
[Traduction]
M. Gray: Monsieur le président, je vais essayer de répondre aux observations particulièrement intéressantes de mon collègue.
Je commence par ce qu'il a dit à la fin, au sujet de l'amendement qui aurait pour effet d'autoriser les gens à demander un bulletin au bureau de scrutin, un bulletin qui pourrait être envoyé à domicile par la poste et renvoyé par la même voie. Vous avez parlé également des procédures judiciaires, des plaintes sur le déroulement des élections, etc., toutes observations très intéressantes mais qui démontrent bien, à mon avis, que la réforme électorale est un processus permanent. Ce n'est pas un domaine où on peut régler tous les problèmes avec un projet de loi général. Une telle démarche donnerait très peu de résultats positifs. À mon avis, il est préférable d'adopter périodiquement des modifications et, chaque fois, de se limiter à certaines questions sur lesquelles il est possible de se mettre d'accord.
Les observations que vous avez faites méritent certainement d'être étudiées, mais je pense qu'elles vont au-delà des objectifs que nous nous sommes fixés pour cet exercice, et qui consistent à étudier la modernisation de notre processus électoral.
En ce qui concerne la possibilité pour le gouvernement d'utiliser la clause dérogatoire pour annuler les effets de la décision de la Cour d'appel de l'Alberta dans l'affaire Somerville, c'est une idée qui ne m'était pas venue. Toutefois, même si nous le faisions, il faudrait tout de même légiférer.
Quoi qu'il en soit, notre intention pour l'instant est d'adopter un projet de loi dont nous espérons qu'il atteindra les objectifs dont nous avons parlé, c'est-à-dire qui mettra tout le monde sur un pied d'égalité en ce qui concerne les dépenses électorales, qu'il s'agisse des dépenses des candidats, des partis politiques ou des tiers, et cela, en tenant compte des arguments de la Cour d'appel de l'Alberta. Si je me souviens bien, la cour n'a pas dit que ce n'était pas possible, mais s'est contentée de soulever certaines préoccupations, en particulier au sujet de la limite de 1 000$ qui lui a semblé trop restrictive.
Je fais exactement ce que j'ai dit qu'il ne fallait pas faire, à savoir tout faire dans le même projet de loi. J'ai la certitude que nous aurons la chance d'en discuter en détail une autre fois.
Pour en revenir aux observations de mon honorable collègue, plus particulièrement au sujet du projet de loi C-63, il a parfaitement raison de dire que le directeur général des élections a dit qu'on ne pourrait pas établir de registre permanent des électeurs avant les prochaines élections si la loi n'était pas adoptée en juin dernier. On n'a pas eu le temps de le faire parce que d'autres lois plus importantes avaient la priorité.
C'est pourquoi l'approche utilisée, en vue de fixer à 36 jours la durée de la prochaine campagne électorale, nous amène à procéder à un dernier recensement avant les élections elles-mêmes. Ce recensement nous permettra de faire deux choses. Premièrement, il constituera la base du registre que nous utiliserons aux élections suivantes. Deuxièmement, il nous permettra d'atteindre l'objectif de mon honorable collègue, à savoir l'établissement d'une liste électorale préliminaire peu de temps après le déclenchement des prochaines élections. Il a dit que lui et son parti étaient favorables à l'idée d'une campagne électorale plus courte à condition que l'on dispose d'une liste électorale préliminaire au début de la campagne électorale.
Nous avons atteint cet objectif dans ce projet de loi-ci en prévoyant un dernier recensement en dehors de la période de 36 jours - avant que celle-ci commence - si bien qu'on établirait la liste, si l'on en croit le directeur général des élections, dans les cinq jours suivant le déclenchement des élections.
Lorsque j'ai commencé à étudier cette question, cette idée me plaisait. Ayant moi-même été candidat à 11 élections consécutives, j'ai toujours pensé que la véritable campagne commençait lorsque j'avais en main une liste électorale pour chaque bureau de scrutin et que mes collaborateurs et moi-même pouvions ainsi nous rendre dans chaque secteur et faire du porte-à-porte et solliciter les électeurs en nous servant de cette liste. À cette fin, nous allons donner à tout le monde une semaine de plus qu'aujourd'hui.
Mon honorable collègue me demandait si l'on risquait d'avoir deux lois électorales et s'il pouvait se tenir des élections en vertu de la loi actuelle et de celle dont nous sommes saisis aujourd'hui. Il est impossible d'éviter cela dans un régime parlementaire parce que, on le conçoit - je ne dis pas que c'est probable - le gouvernement pourrait être défait demain sur un vote de confiance et il faudrait déclencher des élections en conséquence, en vertu de la loi actuelle, qui fixe à 45 jours la durée de la période électorale, le recensement ayant lieu au cours de cette période.
En outre, dans n'importe quel régime parlementaire, que ce soit au niveau provincial ou fédéral, il pourrait se produire une crise où le premier ministre fédéral ou provincial estimerait que la seule solution résiderait dans le déclenchement d'élections. C'est ce qu'on a vu avant que n'entre en vigueur la dernière série de modifications à la loi électorale. Il se pourrait fort bien que des élections soient déclenchées en vertu de la loi existante pour les deux raisons que je viens de mentionner.
Cependant, je dois dire que si ce projet de loi est adopté et que le dernier recensement a lieu comme prévu en avril - et je ne peux pas lier le premier ministre ici - il est fort improbable que des élections soient déclenchées avec une période de 36 jours sans un recensement complet, ce qui veut dire que les élections ne pourraient avoir lieu avant le mois de mai ou juin. En tenant compte strictement des réalités de la situation, encore là je ne peux lier le premier ministre, mais l'on peut supposer qu'il ne serait pas pratique de tenir des élections avec une période électorale de 36 jours selon ce projet de loi-ci avant que le dernier recensement ait eu lieu. Le directeur général des élections prévoit effectuer ce recensement en avril, et je le répète, cela veut dire que des élections assorties d'une campagne de 36 jours, où les résultats du dernier recensement seraient disponibles dans les cinq jours suivant l'émission des brefs, devraient être déclenchées en mai ou en juin.
C'est toute l'assurance que je peux vous donner, à moins que l'Opposition officielle et le Parti réformiste ne s'engagent à ne pas défaire le gouvernement sur un vote de confiance avant ce moment-là, ou nous assurent qu'il n'y aura jamais de crise qui obligerait le premier ministre à en appeler au peuple. Je ne pense pas qu'on puisse exiger cela. Je ne pense pas que ce serait équitable pour vous ou pour le fonctionnement de notre régime parlementaire.
Mon honorable collègue a raison de dire qu'on a avantage à confier le façonnement de la loi électorale non seulement au gouvernement mais aux partis reconnus à la Chambre. Il est vrai que nous n'avons pas suivi la procédure que nous avons suivie pour le projet de loi actualisant le processus de découpage électoral... en invitant par exemple le comité à proposer une loi, mais je suis d'avis que ce que nous avons fait est très semblable. Nous avons attendu que le directeur général des élections étudie la question pendant près de deux ans avant de proposer une loi. Pendant ce temps, du moins au cours de la dernière année, il vous a consultés sur le contenu de ce projet de loi. Ce que nous vous proposons, en ce qui me concerne, reflète fort bien le travail qu'a accompli le directeur général des élections au cours des deux dernières années et les consultations qui ont été effectuées auprès de votre comité.
J'incline à croire que, d'une manière quelque peu différente, nous visions l'objectif dont vous parliez, avec lequel je suis en accord. J'espère que ce projet de loi connaîtra un aboutissement plus favorable que celui sur le découpage de la carte électorale, mais il est inutile de rappeler cette histoire. Cela ne sert à rien.
Pour ce qui est des assurances que je peux vous donner, quand je vous dis qu'adopter ce projet de loi est la chose à faire, je pense que vous conviendrez avec moi que, de manière générale, on est favorable à l'élimination du recensement porte-à-porte, avec toutes les difficultés que cela suppose pour les partis, avec tous ces gens qui ne veulent pas ouvrir leur porte aux recenseurs le soir, sans compter cette économie pour le contribuable. Si j'ai raison de dire qu'on voit déjà des signes d'appui public, je pense que cela devrait vous rassurer. Si vous jugez bon d'adopter ce projet de loi, sous réserve de certains amendements que je vous ai déjà proposés, et peut-être quelques autres que vous aurez, vous allez faire votre devoir dans une optique équilibrée et relativement non partisane.
Monsieur le président, voilà comment je peux répondre aux observations très utiles et intéressantes de mon collègue. J'espère avoir encore l'occasion de donner une réponse plus détaillée aux préoccupations qu'il soulève.
Le président: Merci, monsieur le ministre.
Monsieur Harper, s'il vous plaît.
M. Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le ministre, je dois admettre que votre exposé suscite des réserves chez moi, à savoir que vous semblez avoir changé d'avis. Vous avez mentionné le projet de loi de Mme Terrana - le projet de loi C-307; je pense que vous avez dit le projet de loi C-314 - et vous avez dit qu'on pourrait incorporer dans ce projet de loi-ci des éléments ou des modifications émanant de ce projet de loi-là. Nos porte-parole ont bien dit hier qu'ils ont de nombreuses réserves quant à ce projet de loi et qu'ils voulaient l'étudier. Nous avons des réserves quant à celui-ci également, mais nous en avons encore plus quant au projet de loi C-307. Je tiens donc à le mentionner.
Deuxième chose - et je tiens à vous poser une question à ce sujet, afin que nous sachions parfaitement de quoi il en retourne ici - j'aimerais savoir si la prochaine campagne électorale durera 47 jours ou 36 jours. Tout comme l'Opposition officielle, nous pensons qu'il est très important pour les partis d'opposition de le savoir. Le gouvernement dispose d'un avantage énorme car c'est lui qui décide du moment où les élections sont déclenchées. Nous nous préoccupons donc de le voir aussi décider de la durée de la campagne nationale.
À notre comité - mais je n'étais pas présent à cette séance - , le 30 avril 1996, M. Kingsley nous a dit ce qui suit. J'ai lu cette partie du procès-verbal, je l'ai relue, et je crois la bien comprendre. Il a dit que pour créer un registre des électeurs, en vue d'une période électorale de 36 jours pour des élections ayant lieu à l'automne de 1997 - on n'a même pas parlé du printemps ou de l'été - il faudrait que la loi soit adoptée avant l'été de 1996. Cela ne s'est pas fait.
C'était le dernier délai pour des élections ayant lieu à l'automne de 1997. On envisage maintenant une période électorale de 36 jours pour la fin du printemps. Il a proposé autre chose, à savoir la création du registre par le recensement porte-à-porte au cours de la prochaine campagne. Il excluait complètement des élections générales avec une période de 36 jours.
D'après ce qu'en j'en sais, il n'a mentionné que ces deux scénarios à la séance du comité d'avril. Il y a peut-être des choses que je ne sais pas. Est-ce qu'on parle oui ou non d'une campagne de36 jours pour les prochaines élections, et est-ce bien ce qu'on nous a dit plus tôt?
M. Gray: Tout d'abord, vous avez raison de penser que si ce projet de loi est adopté, les prochaines élections seront assorties d'un calendrier de 36 jours, sauf que je ne peux pas vous donner l'assurance, au nom du premier ministre ou de toute la classe parlementaire, qu'il n'y aura pas d'élections en vertu de la loi actuelle si le gouvernement est défait sur une motion de confiance avant que ce projet de loi-ci entre en vigueur. Je ne peux pas non plus, au nom du premier ministre, mais vous pouvez lui poser la question directement, dire qu'il ne peut pas se produire de crise où, connaissant la tradition parlementaire tant au niveau provincial que fédéral, le premier ministre provincial ou fédéral se verrait obligé d'en appeler au peuple. Mais si les choses demeurent telles qu'elles sont, et que cette législature-ci va jusqu'à son terme, avec des élections générales vers la fin, on peut penser que le prochain calendrier électoral durera 36 jours.
Permettez-moi de revenir à la question qu'a posée votre collègue du Bloc et celle que vous posiez d'une autre manière, au sujet de ce que M. Kingsley a dit. Je ne vois pas de contradictions entre ce qu'il a dit et ce que je dis ou propose. Je ne dis pas que s'il y a des élections normales en mai ou en juin ou à l'été ou même l'automne prochain, on se servira d'un registre permanent des électeurs. On n'aura pas de registre permanent des électeurs parce qu'on n'aura pas eu le temps de le créer. Le créer exige des activités de base, et nous proposons le recensement porte-à-porte, ainsi que la conclusion d'accords avec les provinces. Certaines seront obligées d'adopter leur propre loi si elles veulent transmettre à M. Kingsley des renseignements comme ceux qui figurent sur les permis de conduire ou sur leurs propres listes électorales, etc.
Il faudra aussi conclure des accords avec Revenu Canada et avec Citoyenneté et Immigration pour avoir accès à leurs données d'une manière conforme aux exigences du commissaire responsable de la protection de la vie privée, et il faut ici un consentement informé, par exemple un formulaire de déclaration d'impôt sur le revenu où il y aura une case que les gens devront cocher s'ils veulent communiquer de tels renseignements.
Pour faire tout cela, s'il y a des élections l'an prochain - et je ne peux pas dire s'il y en aura, et je tiens à rappeler qu'en réponse à notre collègue, je partais de l'hypothèse qu'il n'y aurait pas d'élections au début de la prochaine année avant que le recensement soit fait, et cela ne veut pas dire qu'il y aura des élections en mai ou en juin ou à l'été, ou à l'automne quant à cela.
Le premier ministre dit qu'il a 24 mois jusqu'à la fin des cinq années de la législature pour recommander au gouverneur général la dissolution de la Chambre. Ce projet de loi-ci ne fait que permettre la tenue d'élections au printemps, à l'été ou à l'automne, avec un calendrier de 36 jours, car nous aurions la liste électorale préliminaire en effectuant un dernier recensement, non pas au cours de la période électorale elle-même mais avant, ce qui vaudrait tout autant qu'un registre permanent d'électeurs.
J'ajoute que si je n'ai pas proposé à votre comité que le dernier recensement se fasse au cours de la période électorale, c'est parce que si l'on avait une période de 36 jours, au lieu d'avoir une semaine de plus pour faire campagne en se servant de listes complètes, tout le monde aurait au moins une semaine de moins, et je ne pense pas que ce serait juste pour quiconque, particulièrement les partis d'opposition.
Donc M. Kingsley avait parfaitement raison de dire que, pour créer un registre dont on se servirait pour établir la liste préliminaire à temps pour des élections au printemps, ou même à l'automne, il fallait que la loi soit adoptée en juin dernier, parce que si cela avait été le cas, il aurait pu mener à terme les activités de base. Il aurait profité de l'été dernier et de l'automne pour conclure des arrangements avec les gouvernements provinciaux - l'Alberta, l'Ontario, tous - et les ministères fédéraux. Mais tout ce travail n'a pas été fait. Il ne pourra être complété avant que le comité recommande à la Chambre d'adopter ce projet de loi, que la Chambre l'adopte, que le Sénat l'adopte, ce qui lui donnera le cadre législatif nécessaire pour créer le registre.
Ce que nous avons fait, c'est créer l'équivalent, non pas d'un registre permanent, mais d'une activité de base qui permettra de produire les listes préliminaires à l'usage de tous les partis et de tous les candidats dans les cinq jours qui suivront le déclenchement des élections, si celles-ci sont déclenchées après que le projet de loi entre en vigueur et que le recensement est fait au mois d'avril, les élections ayant lieu entre la fin avril et l'automne prochain. Après cela - et l'on me dit que ce serait fait en 1998 - parce que l'on a accompli un certain travail avant que ce projet de loi-ci soit soumis au Parlement, et cela comprend le travail que votre comité a effectué, M. Kingsley pourra agir promptement pour mettre en place le registre avant des élections qui auraient lieu en 1998 et dans les mois subséquents.
M. Harper: J'aimerais compléter ma question ici. Je vous sais gré des éclaircissements que vous nous avez donnés sur la question du registre et sur ce qui avait été dit au comité.
Je tiens à dire - et mes collègues peuvent me corriger si j'ai tort - qu'il n'a jamais été question ici d'un calendrier de 36 jours pour le printemps de 1997. Ce n'est pas le registre qui fait problème; c'est la question de la période électorale. Il n'y a rien ici qui dit qu'un calendrier de 36 jours aurait été possible avant l'automne de 1997.
Je vais vous poser ma question. Le gouvernement serait-il disposé à accepter un amendement - nous pouvons produire un amendement qui recueillerait l'aval de tous les partis - qui nous permettrait de fixer une date à laquelle on passerait de la période électorale de47 jours à celle de 36 jours, au lieu de laisser tout cela à la discrétion du gouvernement et des responsables des élections?
M. Gray: Je crois que ce qui est arrivé, c'est qu'après que votre comité a été informé et que j'ai commencé à étudier la question au courant de l'été, parce que si l'on veut proposer cette loi au Parlement, sachant les priorités du gouvernement et le temps dont il dispose... Nos règles sont telles que pour avoir l'assurance qu'une loi sera adoptée promptement, il faut se servir du temps du gouvernement; c'est pourquoi j'ai dû faire un exposé au Cabinet, le Cabinet devait donner son accord, après quoi le projet de loi devait être déposé.
Lorsqu'on a vu qu'on avait dépassé le délai pour la création d'un registre en vue du printemps prochain, parce que votre comité et le Parlement n'avaient pas été saisis d'un nouveau projet de loi à la fin de juin, je me suis mis à y réfléchir et à étudier la question avec M. Kingsley. Nous nous sommes entendus pour tenir le dernier recensement, qui constituerait la base du futur registre, avant les prochaines élections.
Donc oui, on n'en a pas discuté avec vous, mais j'imagine que je dois en assumer la responsabilité ou le blâme car ce n'est qu'au cours de l'été dernier que j'ai commencé à étudier la question, étant préoccupé par d'autres considérations plutôt personnelles. Je me suis demandé comment nous pourrions atteindre le but que M. Kingsley vous proposait sans un projet de loi adopté en juin.
L'ayant consulté, je lui ai proposé de tenir un recensement en marge des prochaines élections, si bien que s'il devait y avoir une campagne électorale de 36 jours au printemps de la prochaine année, ou à l'été ou à l'automne, l'on satisferait tout de même une condition que je juge sine qua non, une exigence fondamentale - et je pense que tous les partis s'entendent là-dessus - à savoir que les listes ne seraient pas faites à la dernière minute, mais qu'on les aurait avant les élections, même longtemps avant.
C'est donc ce qui s'est fait. J'espère avoir éclairé votre lanterne. Je n'ai peut-être pas répondu à votre question, mais c'est parce que je voulais vous expliquer pourquoi nous n'avions pas de projet de loi à la Chambre en juin - pas seulement déposé à la Chambre mais bien adopté en juin - et c'est pourquoi j'ai proposé cette idée, qui donne le même résultat, je crois.
Au sujet de...
M. Speaker (Lethbridge): La loi comporte-t-elle une date cible pour la tenue du recensement? Avez-vous une suggestion à faire au comité à ce sujet?
M. Gray: Oui, je tiens à en parler. Je tiens à étudier cela de plus près.
Je ne crois pas qu'il y ait de date cible, mais j'aimerais en discuter davantage avec M. Kingsley. Il a déclaré publiquement, en s'appuyant sur son crédit d'agent du Parlement, de directeur général des élections, qu'il compte réaliser le dernier recensement en avril.
Pour procéder à ce recensement, il faut se préparer. Nous devons lui recommander des noms, les directeurs de scrutin doivent ouvrir des bureaux, etc. Il a dit, en s'appuyant sur son crédit d'agent du Parlement, que le recensement sera fait en avril et qu'il doit être complété d'ici la fin avril si l'on veut avoir une liste électorale pour une campagne de 36 jours après cela.
Je serais heureux de discuter avec lui de la possibilité d'accepter un amendement, mais je me suis fié à l'assurance qu'il a donnée, qu'il a donnée publiquement en sa qualité d'agent du Parlement. Je serais heureux d'en discuter avec lui en détail si cela peut vous aider à accepter cette proposition.
Le président: Je tiens à rappeler à mes collègues que M. Kingsley lui-même sera ici demain après-midi. Il ne fait aucun doute qu'il connaît ce dossier.
Monsieur Harper, il vous reste quelques minutes. J'essaie d'être équitable envers tout le monde. M. Langlois a eu à peu près 20 minutes. Je veux que chacun sache à quoi s'en tenir.
M. Harper: Permettez-moi de poser une dernière question, après quoi je céderai la parole à un autre.
Le président: D'accord.
M. Harper: On a exprimé plusieurs préoccupations, mais celle que je tiens à vous communiquer, monsieur le ministre, n'a pas trait aux élections générales mais bien aux élections partielles. On a vu des cas par le passé, et au cours de cette législature-ci, où le gouvernement a déclenché subitement des élections partielles, des élections partielles auxquelles personne ne s'attendait. Du jour au lendemain, un député était nommé au Sénat, ou ailleurs, et des élections partielles étaient déclenchées.
Dans le cas de cette législature-ci, cela s'est fait au cours de la période des Fêtes. Le gouvernement serait-il disposé à modifier le projet de loi afin qu'il y ait une période d'attente quelconque en cas de vacance de sorte qu'il devrait s'écouler 30 jours avant que n'ait lieu une campagne électorale de 36 jours ou une campagne raccourcie?
M. Gray: Je devrai y réfléchir. Je ne peux pas vous répondre aujourd'hui. Je n'y ai pas réfléchi.
Selon la loi actuelle, le Président a six mois pour émettre un bref d'élection partielle. La date doit être fixée dans les six mois, mais elle pourrait être...
M. Harper: Mais il n'y a pas de minimum.
M. Gray: Non, il n'y a pas de minimum.
Je suis disposé à étudier la question. Je n'y ai pas réfléchi dans le contexte de ce projet de loi-ci, mais je suis sûrement disposé à y réfléchir.
M. Harper: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Harper.
Monsieur Milliken, s'il vous plaît.
M. Gray: Avant que M. Milliken n'intervienne, et avec la permission du président, je tiens à dire que je vais relire le débat d'hier au sujet du projet de loi de Mme Terrana, et j'espère que votre comité jugera bon d'accepter ma suggestion, à savoir d'étudier les deux projets de loi en même temps, car d'après ce que je vois - et je suis du sud-ouest de l'Ontario et non de l'ouest du Canada - il s'agit là d'un véritable problème pour les Canadiens de l'Ouest et de la Colombie-Britannique.
Je tiens seulement à dire que je n'écarte pas du revers de la main les préoccupations que vous avez exprimées lors du débat d'hier. J'espère seulement qu'on pourra en tenir compte dans le contexte de ce projet de loi-ci.
M. Harper: À mon avis, il est important de rappeler que ni moi ni M. White ne sommes en désaccord avec le projet de loi de Mme Terrana; nous nous demandions seulement si la solution qu'elle propose est la bonne. M. White, et pas seulement moi, a bien dit que nous voulions envisager d'autres solutions à ce problème
M. Gray: Je suis heureux de vous l'entendre dire. Mme Terrana elle-même a dit qu'elle ne tenait pas mordicus à l'approche qu'elle propose dans son projet de loi; que si le projet de loi avait été étudié ici séparément, il aurait fait l'objet d'amendements.
Je ne dis pas que je proposerais des amendements qui seraient empruntés tels quels à son projet de loi. Je dis plutôt, au nom du gouvernement, que je reconnais les préoccupations que ce projet de loi exprime et que je proposerais une approche qui ne serait pas exactement la même mais qui répondrait aux préoccupations qui ont été soulevées.
Je fais toutes mes excuses à mon collègue, M. Milliken, mais j'ai jugé bon de préciser ma pensée, et lorsque j'ai dit qu'à mon avis il serait bon d'étudier son projet de loi à elle dans le contexte de ce projet de loi-ci, je voulais seulement que l'on propose des amendements qui incorporeraient l'esprit de son projet de loi. J'ai pensé vous proposer des solutions qui seraient quelque peu différentes de la sienne, et elle-même - je le dis en toute justice envers elle - s'attendait à ce que ce soit le cas, même si c'était son projet de loi qui était le véhicule de ce débat.
Le président: Chers collègues, une précision. Comme vous le savez, le projet de loi deMme Terrana a été renvoyé à notre comité depuis notre dernière séance. En votre nom, j'ai invité Mme Terrana à expliquer son projet de loi d'initiative parlementaire au comité mardi prochain. Nous tâchons d'établir notre calendrier de travail relativement à ce projet de loi.
L'avantage, si vous me passez l'expression, d'entendre le ministre aujourd'hui - comme vous le savez, nous étudions ce projet de loi avant la deuxième lecture - c'est que cela nous donne beaucoup plus de souplesse. Donc peut-être le fait que M. Gray a indiqué au nom du gouvernement qu'il était prêt à accueillir des amendements supplémentaires... Si j'ai bien compris M. Gray, il appartiendrait à notre comité d'envisager des amendements supplémentaires, qui rejoindraient le projet de loi de Mme Terrana, ou Mme Terrana elle-même pourrait les proposer. On nous donne donc cette possibilité. J'en remercie le ministre.
Monsieur Milliken.
M. Milliken (Kingston et les Îles): Monsieur le président, il est question dans ce projet de loi de la création d'une liste électorale permanente. Si l'on me permet un bref rappel historique, en 1992, lorsque l'ancien comité sur la réforme électorale discutait des changements à la Loi électorale du Canada, ce qui a donné le projet de loi C-114 au cours de cette législature-ci, l'une des questions qui ont été débattues au comité avait trait à une disposition de la loi électorale qui permet aux électeurs ruraux de se présenter le jour des élections et de s'inscrire sur la liste électorale sur la foi d'une preuve quelconque et avec la garantie de deux autres électeurs, je crois. Le comité voulait la même règle pour les électeurs ruraux et urbains parce que l'on disait que si la règle n'était pas la même dans les deux cas, on pourrait invoquer la Charte et dire que les électeurs urbains étaient défavorisés du fait qu'ils ne pouvaient s'inscrire sur la liste électorale le jour des élections au même titre que les électeurs ruraux. Plusieurs membres du comité voulaient abolir le droit qu'ont les électeurs ruraux de s'inscrire sur la liste le jour des élections, mais les caucus ont jugé la chose inacceptable. Donc le comité, à contrecoeur, à mon avis, a abondé dans le sens contraire et permis aux électeurs urbains de s'inscrire sur la liste le jour même des élections. Cela a été fait pour la première fois au cours de la dernière campagne électorale. Certains d'entre nous ont de fortes réserves au sujet de cette procédure car ils jugent qu'elle ouvre la porte à toutes les fraudes imaginables.
L'une des caractéristiques de cette liste permanente est que les gens peuvent demander que leur nom n'apparaisse pas du tout sur la liste; autrement dit, qu'ils ne soient pas recensés. Deuxièmement, ils peuvent refuser que d'autres ministères gouvernementaux transmettent à Élections Canada les renseignements qu'ils possèdent à leur sujet, de sorte que la liste pourrait comporter des inexactitudes en cas de déménagement ou de changement de statut, par exemple, dans le cas d'un décès; par ailleurs, il pourrait ainsi arriver que de nouveaux citoyens ne soient pas ajoutés à la liste. Cela causera de nouvelles complications puisque ces gens-là voudront se faire inscrire sur la liste le jour des élections s'ils veulent aller voter.
En étudiant ces changements, le gouvernement a-t-il envisagé la possibilité de supprimer le droit de se faire inscrire sur la liste électorale le jour des élections et d'insister pour que les gens soient inscrits sur la liste électorale d'avance s'ils veulent aller voter? De cette façon, les partis en présence auraient une possibilité raisonnable de s'assurer que les personnes inscrites sur la liste sont bel et bien des électeurs, résidant dans le district électoral et ayant le droit de voter aux élections, au lieu de l'actuel arrangement plutôt boiteux pour l'inscription le jour des élections. Il devient de plus en plus difficile de vérifier la véracité des dires des gens qui se présentent le jour des élections et réclament le droit de voter dans une circonscription électorale quelconque.
M. Gray: La chose a été examinée, mais pas dans le contexte que vous décrivez. On craignait que des gens ne veulent pas que leur nom figure au registre, mais qu'ils se réveillent tout à coup pendant la campagne électorale et décident d'aller voter. Je me suis demandé comment nous pourrions faire en sorte que ces gens-là ne soient pas privés de leur droit de vote.
J'ai conclu que les changements apportés dans la dernière mesure législative, donnant aux gens non seulement le droit de se faire inscrire sur la liste le jour des élections, mais aussi le droit de voter au scrutin anticipé ou presque n'importe quand en se présentant au bureau du directeur du scrutin de l'endroit, ajoutés aux propositions de ce projet de loi relativement à la révision, seraient très utiles pour rassurer les gens, c'est-à-dire que ceux qui ne veulent pas que leur nom figure au registre ou dont le nom a été omis en dépit du partage des données, seraient quand même en mesure de voter.
Je ne me rappelle pas que le droit des électeurs urbains de faire ajouter leur nom sur la liste le jour des élections ait donné lieu à des abus. Je pourrais peut-être demander au fonctionnaire d'Élections Canada, qui s'occupe entre autres choses des éventuelles infractions à la Loi électorale, de nous faire part de son expérience relativement aux gens dont le nom est ajouté à la liste le jour des élections. Avez-vous des renseignements à donner au comité à ce sujet?
M. Jacques Girard (directeur, Services juridiques, Élections Canada): En 1993, nous n'avons eu connaissance d'aucun cas de fraude ou de problèmes particuliers découlant du fait que pour la première fois, les électeurs des régions urbaines étaient autorisés à s'inscrire et à voter le jour même du scrutin.
Il ne faut pas perdre de vue qu'il y a encore une différence entre les régions urbaines et rurales. Dans une région urbaine, un électeur ne peut pas se porter garant d'un autre. Pour avoir le droit de voter, il faut prouver son identité en présentant des documents valides. Dans une région rurale, une autre personne peut se porter garant de l'identité d'un électeur. Cette sauvegarde semble avoir bien fonctionné puisque nous n'avons pas eu connaissance du moindre problème.
M. Milliken: Combien de personnes ont demandé à se faire inscrire sur la liste le jour des élections? Avez-vous des chiffres?
M. Girard: Oui, nous avons des chiffres là-dessus. Je peux vous les faire parvenir demain. Je ne les ai pas sous la main.
M. Milliken: Ce qui me préoccupe, monsieur le président, c'est que quelqu'un pourrait invoquer l'argument qu'avec la liste permanente, il n'est plus nécessaire d'avoir quelqu'un qui se porte garant de vous dans une région rurale. Si cette possibilité disparaît, peut-être que l'on pourrait supprimer le droit de s'inscrire le jour des élections en région urbaine.
Il me semble que si l'on prend la peine de dresser une liste électorale fort coûteuse, au lieu de mettre une marque sur les doigts ou d'employer une méthode plus grossière comme celles qui sont utilisées dans d'autres pays, alors il devrait être entendu que pour pouvoir voter, il faut être inscrit sur la liste. Quiconque ne se fait pas inscrire sur la liste dans un délai raisonnable avant les élections ne devrait pas pouvoir voter du tout.
Quand la liste était confectionnée à chaque élection, les électeurs des régions rurales pouvaient soutenir qu'ils avaient peut-être été oubliés parce qu'ils n'étaient pas à la maison, parce qu'ils étaient aux champs quand le recenseur est passé, ou quelque chose du genre. Je comprends tout cela, mais une fois que l'on a établi une liste permanente qui est valable d'une élection à l'autre, une fois inscrits sur cette liste, les gens y restent jusqu'à leur mort ou jusqu'à ce que quelqu'un raye leur nom pour des raisons valides et légales. Cet argument pourrait donc sauter et l'on pourrait envisager de supprimer le droit de se faire inscrire le jour des élections autant en région rurale qu'urbaine.
M. Gray: Le directeur général des élections et son ministre de tutelle peuvent examiner la question. Chose certaine, ce monsieur et ses collaborateurs doivent suivre le dossier de près pour s'assurer que le système fonctionne correctement.
Le président: Merci, monsieur Milliken.
M. Speaker et ensuite M. Pagtakhan.
M. Speaker: Merci beaucoup, monsieur le président.
Un article intéressant a été publié dans le Hill Times sur la nomination des directeurs du scrutin. Par ailleurs, à la page 64 de son rapport, le directeur général des élections recommande que les directeurs du scrutin soient nommés par le directeur général des élections, qui ferait son choix à l'issue d'un concours officiel auquel pourraient se présenter tous les Canadiens intéressés.
Je ne suis pas naïf quant à la façon dont on a procédé jusqu'à maintenant. A-t-on envisagé de procéder de façon plus objective? Puisque nous apportons d'importants changements à la loi, ce serait peut-être le bon moment d'agir dans ce dossier.
M. Gray: L'affaire est à l'étude. Nous ne nous proposons pas d'apporter des changements à cet égard dans ce projet de loi. Je le répète, nous voulions faire porter nos efforts sur un aspect particulier de la loi électorale, et non pas apporter des changements à gauche et à droite. Je fais toutefois observer qu'il y a un assez grand nombre de directeurs du scrutin nommés sous le précédent gouvernement conservateur qui ont conservé leur poste. Combien, environ?
M. Girard: Pas tellement - au moins 40 ou 50.
M. Gray: Pour chaque directeur du scrutin qui a été changé, il y en a une quarantaine ou une cinquantaine qui étaient déjà en place avant l'établissement des nouvelles limites de circonscriptions exigeant la nomination de nouveaux directeurs du scrutin. Quoi qu'il en soit, certaines de ces personnes n'ont pas été reconduites à leur poste parce qu'elles n'habitent pas dans les nouvelles circonscriptions. La loi est très claire à ce sujet: même si l'on souhaite qu'une personne reste à son poste, elle ne peut pas le faire si elle n'habite pas dans la nouvelle circonscription.
Je fais aussi observer que, même si l'on n'a pas modifié la façon de procéder, on s'est efforcé de nommer des gens possédant les qualités requises pour occuper un poste de ce genre. Il y a un assez grand nombre de personnes, beaucoup plus qu'on pourrait le croire, qui ont conservé leur poste, même si elles avaient été nommées avant le redécoupage.
Le président: Monsieur Pagtakhan, après quoi nous terminerons avec M. Langlois.
M. Pahtakhan (Winnipeg-Nord): Merci, monsieur le président.
Monsieur Gray, dans le cas du recensement, la participation est obligatoire. Pourquoi l'inclusion est-elle optionnelle? Pourquoi n'est-ce pas obligatoire dans le cas de la liste des électeurs?
M. Gray: Nous n'avons pas le vote obligatoire au Canada. Puisqu'il n'est pas obligatoire de voter, je ne vois pas personnellement pourquoi il devrait être obligatoire d'avoir son nom sur la liste des électeurs. Certaines personnes peuvent choisir de ne pas participer au processus, quoiqu'en comparaison de la plupart des pays nous avons une très forte proportion du corps électoral qui figure sur la liste et qui exerce son droit de vote.
L'une des raisons de cela, c'est que, contrairement aux États-Unis, où les gens doivent prendre l'initiative de s'inscrire, chez nous, nous avons un système de recensement dans lequel la collectivité prend l'initiative et demande aux gens de s'inscrire. Vous pensez peut-être qu'en mettant fin au recensement porte-à-porte, nous abandonnons ce concept. Je soutiens que ce n'est pas le cas. Je dirais plutôt que nous remplaçons les recenseurs humains par ce que j'appellerais des recenseurs informatisés.
Les gens n'ont pas besoin de faire quoi que ce soit pour être inscrits sur la liste. Ils sont inscrits automatiquement grâce au partage des données de Revenu Canada, de la Citoyenneté, de sources provinciales. Dans le cadre de cette proposition, entre les élections, les gens peuvent s'adresser au directeur général des élections pour demander d'être inscrits sur la liste, mais ils n'ont pas besoin de le faire. En fait, nous remplaçons le recenseur humain par la technologie informatique. Nous continuons de prendre l'initiative et d'inscrire les gens sur la liste. Nous avons encore l'avantage de ne pas forcer les gens à aller s'inscrire eux-mêmes, comme c'est le cas aux États-Unis.
Je le répète, puisque nous n'avons pas le vote obligatoire, je ne vois pas pourquoi il devrait être obligatoire d'avoir son nom sur la liste des électeurs. Voilà la réponse que je donne à votre très intéressante question.
M. Pagtakhan: Vous avez dit que la liste servirait uniquement à des fins électorales. Est-il clairement précisé dans le projet de loi comment on définit ces fins électorales? Est-ce en rapport avec la période qui suit l'émission des brefs? Est-il nécessaire de préciser cette définition?
M. Gray: C'était l'objectif de M. Kingsley et de moi-même de préciser cela très clairement. Si ce n'est pas clair, essayons d'y remédier pendant l'étude article par article. Je vous remercie de nous signaler cette préoccupation.
Le président: Monsieur Frazer, je ne voulais pas vous laisser de côté, mais vous ne m'avez pas fait signe...
M. Frazer (Saanich - Les Îles-du-Golfe): J'y suis habitué.
Le président: Habituellement, vous me le faites savoir. Nous serions ravis de vous donner la parole.
Monsieur Langlois.
[Français]
M. Langlois: Monsieur le président, il faut que j'intervienne pendant la période des affaires émanant des députés. Si M. Frazer me le permet, je vais faire une très brève intervention tout de suite.
Je voudrais d'abord remercier M. Pagtakhan pour la pertinence de ses remarques. Monsieur Gray, j'aurais aussi souhaité soulever la question des directeurs de scrutin locaux. Le Bloc québécois a remporté 72 p. 100 des circonscriptions au Québec lors des dernières élections. Je ne crois pas que beaucoup de directeurs de scrutin qui ont été nommés soient venus nous dire qu'ils avaient auparavant milité pour le Bloc. Je pense que c'est un amendement que le gouvernement devrait envisager.
Je voulais toutefois vous demander si les amendements que vous prévoyez déposer relativement aux heures d'ouverture des bureaux de scrutin seront mis à la disposition des membres du comité lors de la comparution de Mme Terrana qui, je crois comprendre, a été fixée à mardi prochain.
M. Gray: Je dois encore travailler à obtenir un consensus au sein du gouvernement. Je ferai mon possible pour vous fournir de telles informations au moment de la comparution de Mme Terrana. Je ne peux pas vous donner un engagement, mais je ferai mon possible.
M. Langlois: Le gouvernement a sûrement la même préoccupation que la plupart des députés de la Chambre, à savoir qu'il faut faire les poids et contrepoids de cette mesure. Mon collègue, l'honorable député de Calgary-Ouest, a fait une brillante intervention en Chambre.
M. Gray: Je vais essayer de vous donner quelques options.
M. Langlois: Oui.
M. Gray: Il m'est impossible pour le moment de m'engager à vous livrer nos amendements dans une forme finale. Je ferai toutefois mon possible.
M. Langlois: Je vous remercie beaucoup.
[Traduction]
Le président: Le dernier intervenant sera M. Frazer.
M. Frazer: Merci, monsieur le président. Je ne sais trop s'il serait mieux de poser ces questions au ministre ou bien à M. Kingsley quand il comparaîtra. Si je les pose tout de suite, peut-être M. Kingsley aura-t-il les réponses si l'on décide que c'est à lui d'y répondre.
Vous avez dit que la personne qui remet sa déclaration d'impôt sur le revenu a le choix d'accepter ou de refuser que les renseignements qui y figurent soient partagés avec Élections Canada.
M. Gray: En effet.
M. Frazer: Savez-vous si cette disposition s'applique également aux renseignements des services provinciaux du permis de conduire et aux renseignements que détient la citoyenneté, qui servent à mettre à jour la liste?
M. Gray: Je vais vous donner une réponse partielle et je suis certain que M. Kingsley vous en dira plus long. Le même concept s'applique à la citoyenneté. Il y a des gens...
M. Frazer: Les gens ont le choix.
M. Gray: Oui, c'est bien cela.
Pour ce qui est des renseignements provinciaux, cela dépendra de la loi provinciale, soit de la loi en vigueur et des ententes conclues entre le gouvernement provincial et le directeur général des élections, soit de nouvelles lois. Autrement dit, nous ne pouvons pas dicter leur conduite aux provinces. Je sais que la question a été abordée au cours des consultations tenues entre M. Kingsley et ses homologues, et je crois que ce dernier sera mieux placé pour vous dire comment chaque province entend s'y prendre. Nous devons nous en remettre aux autorités et aux législateurs provinciaux.
M. Frazer: Comme le fait de pouvoir voter aux élections fédérales est en fait une question de compétence fédérale, et puisque les Canadiens peuvent décider d'accepter ou de ne pas accepter, ne pourrait-on pas inscrire dans la loi fédérale que chaque Canadien aura le choix de préciser sur le permis de conduire s'il veut participer aux élections fédérales?
M. Gray: Cela pourrait être utile et c'est peut-être ainsi qu'on procédera dans les provinces, mais on m'informe que nous ne pouvons pas dicter cela aux provinces. J'espère que l'on tiendra compte de votre suggestion. Ce serait une bonne façon de procéder. Les gens sont habitués, de toute façon, à cocher diverses cases sur leur demande de renouvellement de permis de conduire.
M. Frazer: J'ignore si la question a été abordée dans votre étude gouvernementale, mais si je comprends bien, le but premier du projet de loi C-63 est d'économiser de l'argent. Il vise aussi à simplifier quelque peu le système, mais surtout à économiser. Je crois savoir que dans la seule province où il existe une liste électorale permanente, la Colombie-Britannique, on a constaté, et des études l'attestent, qu'au lieu d'économiser de l'argent, cela coûte en fait plus cher que le système du recensement. A-t-on examiné cela à fond? Ou bien devrais-je poser la question à M. Kingsley?
M. Gray: Je sais que M. Kingsley a examiné la question. Vous pourrez consulter son analyse de coûts très détaillée et faire des comparaisons avec d'autres systèmes. Pour ma part, on m'a mis au courant de son analyse, que j'ai trouvée non seulement convaincante, mais aussi très pesante. Je préférerais donc que vous l'invitiez à vous en faire part. Si vous la trouvez trop pesante, ne dites pas que je ne vous ai pas averti.
M. Frazer: Merci.
Le président: Monsieur Gray, au nom du comité, je vous remercie et vous exprime notre reconnaissance pour avoir été notre premier témoin relativement à cet important changement à la loi électorale.
Pour ceux d'entre vous qui veulent mettre à jour leur agenda, mardi prochain, nous recevrons Mme Terrana à 11 heures. C'est le 5 novembre. Par la suite, chers collègues, je proposerais que l'on entame l'étude article par article cette même semaine, afin de pouvoir faire rapport à la Chambre le jeudi 7 novembre ou le vendredi 8 novembre.
Je donne un préavis à tous. C'est le calendrier que je vous propose à titre de président. S'il y a des changements, veuillez en aviser la présidence.
Je veux aussi vous rappeler que nous sommes saisis de ce projet de loi après la première lecture. Donc, si vous avez des idées ou des suggestions, je vous demanderais, par respect pour vos collègues, de passer par la présidence. Je me ferai un plaisir, de même que le greffier, de diffuser ces idées et ces suggestions, parce qu'après mardi prochain, nous serons saisis... Comme vous le savez, M. Gray nous a déjà donné certaines idées de changements,
Voilà donc ce que je propose. Y a-t-il d'autres observations?
La séance est levée. Merci.