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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 6 mars 1997

.0919

[Traduction]

La présidente: Bonjour, mesdames et messieurs.

[Français]

Bonjour, tout le monde.

[Traduction]

Je vois que nous avons le quorum et je déclare donc la séance ouverte.

[Français]

Je m'appelle Sheila Finestone et je suis la présidente du Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes.

.0920

[Traduction]

Je tiens à vous souhaiter à tous la bienvenue à la première des six consultations publiques que le Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées tiendra dans les différentes régions du Canada. Nous nous pencherons sur la situation relative au droit à la vie privée dans notre monde technologique moderne.

Il est très intéressant que nous nous réunissions sur ce sujet aujourd'hui, étant donné que nous avons été à même de constater depuis une semaine à quel point la question suscite de plus en plus l'intérêt, alors que très peu d'entre nous pensaient que le public s'y intéressait. Je tiens à signaler à votre attention, pour que vous puissiez le lire quand vous rentrerez chez vous, l'article qui est paru dans le Globe and Mail d'aujourd'hui, où il est question de la possibilité que des renseignements confidentiels sur des contribuables aient été vendus sur le marché noir. La possibilité d'abus dans ce domaine est donc bien réelle.

Vous pourrez également lire l'article intitulé «Une carte d'identité multiservice pourrait voir le jour», qui se trouvait sur la première page de la Gazette d'hier et qui se poursuivait à la dernière page avec un reportage complet sur toutes les cartes de crédit. Il y est question de l'ampleur des préoccupations à cet égard ainsi que du potentiel que représenterait la carte d'identité universelle et les répercussions qui pourraient en découler.

[Français]

Dans Le Devoir, on lit un article ayant pour titre: Québec met la dernière main à son projet de «carte de citoyen». Un autre article a pour titre: Vers un registre central de la population du Québec?

[Traduction]

Il me semble que vous tous qui êtes ici aujourd'hui faites partie de ce mouvement de vigilance, de préoccupation et de sensibilité accrue des citoyens relativement au droit à la vie privée, aux répercussions des nouvelles technologies et à ce que nous réserve l'avenir dans notre société très moderne et très nouvelle qui évolue à un rythme effarant.

Le comité a décidé que, étant donné tout ce que nous avions entendu à l'occasion des tables rondes que nous avons tenues à compter de septembre et de tout ce que nous avions lu au sujet des nouvelles technologies de l'information et des pratiques à cet égard, nous voulions nous pencher sur les répercussions sur notre vie personnelle, sur notre droit à la vie privée et sur les droits de la personne.

Avec l'apparition de ces nouvelles technologies intrusives qui ne cessent d'évoluer, on ne peut faire autrement que de se demander: qui me surveille, qui sait quoi à mon sujet, et qu'est-ce qu'on a vraiment besoin de savoir à mon sujet? Où se trouve l'équilibre entre les intérêts socio-économiques, comme la prévention du crime et de la fraude, les soins de santé et les intérêts commerciaux, d'une part, et, d'autre part, le droit de protéger notre vie privée? Y a-t-il lieu de prévoir un cadre éthique et d'exiger que l'utilisation de toutes ces nouvelles technologies soit soumise au principe du consentement éclairé?

Je dirais pour ma part que le droit à la vie privée ne découle pas d'une source en particulier. Il découle plutôt du droit international, des lois constitutionnelles, des lois fédérales et provinciales, de la jurisprudence, des codes de déontologie professionnelle et de diverses lignes directrices. Le résultat est bien souvent qualifié, au Canada du moins, d'amalgame disparate de mesures visant à protéger la vie privée.

À l'échelle internationale, il existe plusieurs documents importants relatifs aux droits de la personne qui énoncent des garanties en ce qui concerne le droit à la vie privée. Je songe notamment à la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. Un Canadien du nom de John Humphrey a joué un rôle très important dans la rédaction de cette déclaration. Il ne faut pas oublier non plus que le Canada a joué un rôle très important dans l'élaboration de cette Grande Charte de l'humanité et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966, dont le Canada est signataire.

Il n'existe pas à l'heure actuelle de protection globale du droit à la vie privée au Canada. Le Québec est le seul endroit en Amérique du Nord où les pratiques du secteur privé en ce qui concerne les données à caractère personnel sont assujetties à une réglementation globale.

En Europe, par exemple, le principe du droit équitable à l'information de l'Union européenne et des pays de l'OCDE s'applique à toutes les données à caractère personnel, quelle que soit la nature du support utilisé et quel que soit le moyen qui permette d'y avoir accès, de les recueillir, de les stocker, de les utiliser et de les communiquer à d'autres. En Europe, chacun a droit au respect du caractère privé de sa vie personnelle et familiale, de son foyer et de sa correspondance.

Ce droit n'existe pas en tant que tel au Canada, même si les articles 7 et 8 de la Charte canadienne des droits, qui concernent les fouilles, les perquisitions et les saisies, de même que le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne, ont été interprétés par les tribunaux comme s'appliquant au droit à la vie privée. Comme je l'ai déjà dit, le Québec fait toutefois exception.

.0925

Le droit à la vie privée est reconnu dans le monde entier, je crois, comme le plus global de tous les droits personnels; il est reconnu comme droit d'une portée très vaste et d'application universelle. La question qui se pose est la suivante: ce droit devrait-il être inaliénable? Le droit à la vie privée est une valeur humaine fondamentale qui est au coeur même du maintien de la dignité et de l'autonomie humaine. Je crois que la plupart d'entre nous seraient d'accord pour dire que le droit à la vie privée a une importance primordiale dans nos vies.

[Français]

Certains experts le définissent comme le droit de disposer d'un espace à soi, d'effectuer des communications privées, de ne pas être surveillé et d'être respecté dans l'intégrité de son corps. Pour le citoyen ordinaire, c'est une question de pouvoir, le pouvoir que chacun exerce sur les renseignements personnels qui le concernent; c'est aussi le droit de demeurer anonyme.

[Traduction]

La question devient donc la suivante: que vaut le droit à la vie privée dans notre monde technologique moderne? Il ne fait aucun doute que les nouvelles technologies nous offrent à tous de précieux avantages, de même que des gains sur le plan de l'efficacité et de la commodité, et qu'elles peuvent permettre de réduire les dépenses publiques, mais les avantages qu'elles présentent comportent-ils un prix au chapitre de la vie privée? Ce prix est-il trop élevé?

Le compromis est-il inévitable? Où et comment faut-il en fixer les limites? La vie privée est une ressource précieuse. Une fois qu'on l'a perdue, que ce soit délibérément ou par inadvertance, on ne peut jamais la récupérer.

[Français]

En tant que membres du Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées, nous adoptons résolument l'angle et l'approche des droits de la personne pour mesurer les effets positifs et négatifs des nouvelles technologies sur notre droit à la vie privée.

[Traduction]

L'optique des droits de la personne est donc au coeur de la consultation pancanadienne que nous avons entreprise.

Les Canadiens n'ont jamais approuvé les voyeurs ni l'écoute électronique non autorisée, et nos lois pénales le reflètent. Leur désapprobation s'étend-elle aussi, par exemple, aux caméras vidéo cachées dans le milieu de travail, aux banques de données génétiques ou aux cartes d'identité des citoyens?

Pour échanger avec les Canadiens sur ces questions, le comité tient une série d'assemblées publiques appelant à la participation générale, en commençant par celle-ci que nous tenons à Ottawa aujourd'hui. Nous poursuivrons nos consultations la semaine prochaine: lundi, nous serons à Vancouver, mardi à Calgary, mercredi à Toronto, jeudi à Fredericton et vendredi à Montréal. Nous aurons à chacune de ces assemblées un groupe très divers.

Pour mieux cibler le débat à l'occasion de ces assemblées publiques, nous avons choisi de faire porter notre examen sur trois grands types d'activités qui empiètent sur le droit à la vie privée à l'aide d'études de cas, qui, bien que fictives, n'en sont pas moins fondées sur la réalité et qui mettent en cause des technologies en particulier: la surveillance électronique, les essais génétiques et les cartes à puce. Nous espérons grâce à ces études de cas sensibiliser davantage le public aux questions qui se posent, de même qu'aux risques et aux avantages que présentent les technologies en évolution, et entamer un débat franc et ouvert sur les possibilités et les menaces qui en découlent pour notre droit à la vie privée, donc droit de la personne, dans notre monde moderne où les technologies ne cessent d'évoluer.

En conclusion, nous ne nous attendons pas à régler de façon définitive toutes les questions soulevées par ces scénarios, mais nous espérons qu'avec votre participation et celle des Canadiens de tous les secteurs de notre société et de toutes les régions du pays nous pourrons formuler des recommandations quant aux mesures concrètes qui pourraient être prises à cet égard.

Nous sommes donc impatients d'entendre vos idées, vos préoccupations et vos propositions.

[Français]

Je vous remercie chaleureusement toutes et tous pour votre présence aujourd'hui. Le déroulement de la journée sera guidé par notre coordinatrice des consultations, Mme Valerie Steeves, professeur en droits de la personne à l'Université d'Ottawa.

[Traduction]

En fait, vous êtes responsable d'une section en particulier à l'Université d'Ottawa.

Avant de céder la parole à Valerie, je demanderais aux membres du comité de se présenter.

.0930

Je voudrais que nous commencions par les vice-présidents du comité.

M. Scott (Fredericton - York - Sunbury): Andy Scott, député de Fredericton - York - Sunbury.

[Français]

M. Bernier (Mégantic - Compton - Stanstead): Maurice Bernier, député de Mégantic - , Compton - Stanstead. Permettez-moi de souhaiter la bienvenue à tous les témoins qui se sont déplacés malgré cette température épouvantable. Merci d'être là.

[Traduction]

Mme Hayes (Port Moody - Coquitlam): Sharon Hayes, députée de Port Moody - Coquitlam.

M. Godfrey (Don Valley-Ouest): John Godfrey, député de Don Valley-Ouest, à Toronto.

M. MacLellan (Cap-Breton - The Sydneys): Russell MacLellan, député de Cap-Breton - The Sydneys.

Mme Augustine (Etobicoke - Lakeshore): Jean Augustine, députée d'Etobicoke - Lakeshore.

M. Assadourian (Don Valley-Nord): Sarkis Assadourian, député de Don Valley-Nord.

La présidente: Merci beaucoup.

Valerie, vous voulez bien prendre la relève?

Mme Valerie Steeves (conseillère du comité): Merci, madame Finestone.

Je profite de l'occasion pour vous souhaiter la bienvenue à cette consultation publique du comité parlementaire sur le droit à la vie privée et les nouvelles technologies.

[Français]

Bienvenue à cette consultation publique sur le respect de la vie privée et les nouvelles technologies. Nous tenons à vous remercier pour votre participation. Votre contribution à ces travaux nous est très précieuse.

[Traduction]

Votre participation à la discussion d'aujourd'hui est particulièrement importante parce que nous allons commencer à explorer le droit à la vie privée en tant que droit humain. Nous sommes tous conscients des changements rapides qui se produisent dans notre vie quotidienne en raison des nouvelles technologies, mais trop souvent, quand nous discutons de progrès technologique, nous n'abordons pas le résultat final du processus. Le comité espère que la consultation dans laquelle il s'engage sera l'amorce d'un dialogue permanent entre les Canadiens sur ce que ces changements signifient pour notre société.

Nous espérons explorer deux questions ici aujourd'hui. La première est la suivante: que signifie le droit à la vie privée pour les Canadiens, et comment pouvons-nous le protéger face aux nouvelles technologies? La seconde est la suivante: jusqu'où pouvons-nous aller quand il s'agit d'échanger notre droit à la vie privée contre les avantages que procurent les nouvelles technologies?

Pour situer nos discussions dans un contexte personnel ou social, le comité vous présente trois études de cas, portant sur trois thèmes: la surveillance électronique, les cartes à puce et les essais génétiques.

Comme vous le savez, ces études de cas sont des récits par lesquels nous avons cherché à illustrer tant les avantages que les inconvénients des nouvelles technologies. Nous espérons qu'en discutant de l'incidence des nouvelles technologies sur la vie personnelle des personnages qu'on retrouve dans les études de cas nous pourrons commencer à comprendre ce que le droit à la vie privée signifie pour les Canadiens et comment notre société pourra s'y prendre pour tenter d'équilibrer les avantages des nouvelles technologies avec nos valeurs sociales fondamentales, notamment notre attachement au respect de la vie privée.

Le processus de consultation comportera deux volets. Tout d'abord, nous nous répartirons en petits groupes pour discuter des études de cas. Chacun des petits groupes sera animé par un expert du domaine du droit à la vie privée. Dans chaque groupe, il y aura aussi au moins un membre du comité qui participera à la discussion avec vous.

Une fois que nous aurons eu l'occasion d'examiner les études de cas dans nos petits groupes, nous nous réunirons en plénière pour discuter des questions soulevées par ces études de cas.

Pour donner le coup d'envoi à la plénière, nous demanderons aux députés membres du comité de nous faire un compte rendu et de résumer les principales préoccupations soulevées dans leurs petits groupes respectifs. Nous donnerons ensuite aux animateurs l'occasion de nous faire part de leurs observations ou de leurs préoccupations. Puis nous donnerons la parole aux participants.

Nous espérons que vous, les participants, et les membres du comité pourrez échanger librement et ouvertement sur ce que signifie le droit à la vie privée dans notre ère technologique.

J'ai l'honneur de vous présenter les cinq personnes qui animeront les discussions dans nos petits groupes aujourd'hui.

Je commencerai par Laurence Kearley, qui se trouve au bout de la table. Larry a obtenu sa licence en droit d'Osgoode Hall en 1974 et a été appelé au Barreau en 1975. Tout au long de sa vie professionnelle, il a enseigné et pratiqué diverses formes de droit administratif. En 1996, il a obtenu sa maîtrise en droit international à l'Université d'Ottawa, avec spécialisation dans la protection de la vie privée et les questions technologiques. Larry a écrit de nombreux articles et de nombreuses communications sur les questions relatives à la vie privée et prépare avec un autre auteur un ouvrage sur le droit à la vie privée et la technologie.

Kate White a une expérience exhaustive et spécialisée de l'évaluation des risques, de la communication des risques et de l'utilisation d'Internet dans la diplomatie électronique.

.0935

Kate dirige une entreprise axée sur les valeurs qui s'appelle Black and White Communications Inc. La démocratie électronique, les questions relatives aux femmes et au développement, l'intégration des marginaux à l'Internet et les droits de la personne sont au nombre de ses champs d'activité dans le domaine des communications.

Kate est aussi présidente du Centre for Open Media Studies International, groupe de réflexion sur les communications électroniques qui est associé à l'Université Carleton.

Kate publie des articles dans des revues tant universitaires que populaires et donne des discours sur des questions liées aux droits de la personne, sur les femmes et le développement, sur la démocratie électronique, sur le risque et sur la perception du risque.

Nous avons ensuite Pierrôt Péladeau.

[Français]

Pierrôt est actuellement chercheur invité à l'Institut de recherches cliniques de Montréal. À ce titre, il collabore à des projets de recherche sur les problèmes éthiques, juridiques et sociaux soulevés par l'utilisation de l'information génétique et par l'informatisation de l'information sur la santé des citoyens. Il est aussi vice-président de la recherche et du développement chez Progesta Communications Inc., une firme spécialisée en gestion de l'information personnelle, qui a notamment aidé plus de 500 organisations à implanter des programmes de protection des renseignements personnels. Il est aussi le rédacteur en chef de Privacy Files, une revue professionnelle spécialisée dans toutes les questions soulevées par l'utilisation des renseignements personnels.

[Traduction]

Puis nous avons Geoffrey Gurd. Il a un doctorat en communications de l'Université de Montréal. Il enseigne actuellement au Département des communications de l'Université d'Ottawa. Auparavant, il avait enseigné dans une université de Pittsburgh pendant quatre ans avant de rentrer au Canada.

Ses travaux de recherche portent notamment sur l'identité à l'ère de la technologie, la rhétorique de la culture cybérienne, les nouvelles théories de gestion et le discours sur l'avenir du travail et la technologie.

Vous ne l'avez peut-être pas remarqué, mais vos cartons d'identité portent tous un code couleur. Les participants ont été répartis tout à fait au hasard dans des petits groupes de discussion.

Si vous avez un carton jaune, vous ferez partie du groupe qui sera animé par Kate White. Si vous avez un carton bleu, vous serez dans le groupe dirigé par Larry Kearley. Si vous avez un carton vert, vous vous réunirez avec Pierrôt Péladeau. Si vous avez un carton beige, vous vous réunirez avec Geoffrey Gurd. Si vous avez un carton rose, vous vous réunirez avec moi.

Quand vous vous trouverez dans vos petits groupes, votre animateur commencera par demander au groupe de choisir l'étude de cas par laquelle vous voulez commencer. Nous avons très peu de temps, et je tiens à vous rappeler que les trois études de cas sont là uniquement comme point de départ à la discussion. Sentez-vous parfaitement libres de consacrer autant ou aussi peu de temps que vous le voulez à chacune des études de cas. Sentez-vous aussi libres d'établir des liens entre les trois scénarios différents et d'exprimer vos préoccupations quant à la façon dont les nouvelles technologies influent sur la mesure dans laquelle vous trouvez que votre vie privée est respectée.

Y a-t-il des questions avant que nous ne commencions?

Nous nous retrouverons en plénière à 11 heures pile, de sorte que plus vite nous nous réunirons dans nos petits groupes, plus nous aurons de temps pour nos discussions.

Je serai là pendant toute la matinée si vous avez des questions.

La présidente: Mesdames et messieurs, je veux simplement vous signaler que cette réunion est une séance officielle du comité permanent. La séance sera suspendue, puis nous reprendrons à 11 heures pile pour la seconde moitié de la plénière.

.0939

.1104

La présidente: Je vois que nous avons le quorum; alors nous reprenons les travaux du comité permanent.

Je crois que vous savez que nos consultations sont télédiffusées à l'échelle du pays. Au cas où vous ne le saviez pas, je tenais à vous le dire. Nous voulons avoir votre consentement éclairé. Pas les petits groupes, parce que

[Français]

selon les règles de la Chambre des communes, on ne peut faire de petits regroupements de cette nature sans avoir recours à une procédure très formelle.

.1105

[Traduction]

Les petits groupes ne seront donc pas télévisés en tant que tels, même si on aura pu voir à la télévision que nous nous sommes réunis en petits groupes et que nous sommes maintenant revenus en plénière.

La seconde moitié de l'assemblée publique commence maintenant. Je voudrais demander aux animateurs de bien vouloir rester pendant une vingtaine de minutes à la fin de la séance d'aujourd'hui. Nous voudrions faire une évaluation avant de nous lancer dans notre tournée pancanadienne. Merci beaucoup.

Madame.

Mme Steeves: Merci, madame Finestone.

Pour donner le coup d'envoi à notre assemblée publique, j'inviterais les députés qui ont participé aux discussions en petits groupes à nous résumer brièvement les deux ou trois principaux points qui ont été soulevés pendant ces discussions.

Je commencerai par Mme Hayes.

[Français]

M. Bernier: Combien de temps nous accordez-vous, madame la présidente?

La présidente: Environ trois minutes ou plus s'il le faut.

[Traduction]

Mme Hayes: Merci, madame la présidente.

J'ai bien aimé la discussion que nous avons eue dans notre groupe. Nous avons eu le temps d'examiner de façon détaillée deux des études de cas. Nous avons d'abord discuté du scénario sur les cartes à puce, puis nous sommes passés à l'étude de cas sur les essais génétiques.

J'ai pris des pages et des pages de notes, en fin de compte, à cause de toutes les idées qui ont été soulevées.

De manière générale, je crois que nous sommes allés au-delà des études de cas en ce sens que les liens que nous avons établis... [Difficulté technique]

La question de la confiance semblait être un leitmotiv - à qui peut-on faire confiance en ce qui concerne le traitement de l'information, que ce soit dans le secteur privé ou dans le secteur public? On a même parlé du secteur bénévole comme étant au nombre des groupes qui voudraient obtenir de l'information sur les particuliers. À qui donc pourrait-on faire confiance et dans quelle mesure pourrait-on leur faire confiance?

.1110

Pour ce qui est des limites au contrôle de l'information, étant donné que l'information circule d'un point à un autre, qu'il s'agisse d'information à caractère génétique ou d'une carte à puce, à quel niveau peut-on imposer des contrôles? À quel niveau les contrôles sont-ils sûrs et à partir de quel niveau porte-t-on atteinte à la vie privée? On a posé cette question.

Je m'interroge aussi sur les règles diverses des divers secteurs. Les mêmes règles s'appliquent-elles aux gouvernements, au secteur privé et au secteur bénévole? Chose certaine, alors, dans quelle mesure peut-on assurer le respect de ces contrôles au sein de chaque secteur?

On a mentionné un paradigme que j'aimerais rappeler - je pense que c'est très intéressant - concernant l'équilibre entre la gestion du risque et la potentialité. La «potentialité», ce sont en fait les informations qui en soi ne sont pas dangereuses; il s'agit simplement d'informations qui sont là. Mais tout dépend de qui dispose de ces informations et à quel niveau, et c'est pourquoi le gouvernement doit s'interroger sur la gestion du risque à ces divers niveaux.

Enfin, pour ce qui est de savoir si une loi est nécessaire, je crois qu'on s'entend pour dire qu'il faut songer à une loi. On dit aussi sans ambages que si l'on adopte une telle loi, celle-ci doit être très précise, et non pas rédigée en termes vagues. Je pense qu'il y a eu un débat et des désaccords de ce côté-là. Il faut donc s'entendre là-dessus.

Chose certaine, il faut trancher cette question, pour ce qui est de savoir s'il faut être très précis - encore là, pour ce qui est des informations à caractère génétique - par exemple, pour le clonage ou quoi que ce soit d'autre, ou s'il faut une loi très générale sur toute cette question. Je ne sais si l'on s'est entendu, mais chose certaine, c'est une question à débattre.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup.

Mme Steeves: Monsieur Scott, pouvez-vous résumer brièvement la discussion de votre groupe?

M. Scott: J'ai la certitude que les caméras vont me trouver, et c'est le sujet du jour, n'est-ce pas?

M. Godfrey: Du moment que les caméras ne filment pas votre âme.

Des voix: Ah, ah!

M. Scott: Et il est de mon côté.

Les sentiments de notre groupe pourraient se résumer ainsi; il n'est pas trop tôt pour en discuter, et il est peut-être trop tard.

Nous avons discuté des scénarios, mais nous n'avons fait que les effleurer. En réalité, tous ont fait état de leur expérience personnelle, et dans certains cas, à titre indirect, pour ce qui est de l'effet de ces technologies. En fait, je peux dire sans risque de me tromper que notre groupe était unanime à craindre que nous ne soyons allés trop loin, et à dire qu'il faut réagir rapidement.

Certaines de ces craintes tiennent au fait que très souvent ce sont les plus vulnérables, ceux qui sont le moins capables de résister à cette intrusion dans la vie privée, qui sont les premiers touchés. C'est peut-être parce qu'ils dépendent de l'État, et c'est pourquoi ils ne peuvent résister à la cueillette d'informations. S'ils résistent, ils perdent tout droit à certains avantages sociaux.

Pour ce qui est du fait qu'on a accordé trop d'importance au consentement éclairé, qui oublie-t-on à l'heure où le quart de la population est analphabète? Quel est l'effet psychologique de la quantification de nos identités?

En substance, tout le monde était d'accord pour dire qu'il faut de toute urgence protéger les droits de la personne, qui sont parfois oubliés dans notre élan dans le sens contraire, la poursuite de la technologie. Il faut agir sans délai. Il faut éduquer davantage le public et prendre acte de ces intrusions dans la vie privée.

.1115

Nous pensons qu'il y a lieu d'établir un meilleur équilibre dans le contexte du débat lui-même. Nous n'avions pas nos adversaires contre nous. Certains ont essayé de se faire l'avocat du diable, mais nous aurions préféré qu'il soit là en personne.

Merci.

Mme Steeves: Merci, monsieur Scott.

Monsieur Bernier.

[Français]

M. Bernier: Dans notre atelier, probablement comme dans tous les autres, la discussion a été très animée et très vive. Beaucoup d'idées en sont ressorties. Si j'essayais de résumer en une seule phrase l'idée principale qui s'est dégagée, je dirais que les nouvelles technologies doivent tenir compte de notre droit à la vie privée ou s'y adapter, et non pas le contraire.

Comme le mentionnait la première intervenante, nous avons voulu préciser qu'il ne fallait pas opposer vie privée à nouvelles technologies, ce qui a recueilli un consensus dans notre atelier. Il n'y a pas de concessions à faire entre l'un et l'autre. On doit respecter la vie privée, mais on doit également être ouverts face aux nouvelles technologies. C'est l'idée principale qui s'est dégagée.

Lorsque de nouvelles technologies apparaissent ou lorsqu'on recourt à de nouvelles technologies, il est nécessaires de connaître les raisons qui motivent leur utilisation et les buts recherchés. Que veut-on faire? Quels sont les objectifs visés? Ils doivent être clairs au point de départ et on pourra ensuite déterminer quelles technologies utiliser ou jusqu'où on doit aller.

Comme le soulevaient les participants d'autres ateliers, nous avons constaté que tout est une question d'équilibre entre la nécessité de protéger la vie privée, d'avoir plus ou moins de sécurité, d'avoir plus d'information, d'avoir une information plus rapide et plus efficace et, comme c'est très populaire par les temps qui courent au sein de tous les paliers de gouvernement, de diminuer les coûts des services qu'on donne. On a cité l'exemple du système pénitentiaire en Ontario, où on remplace des gardiens de prison par des caméras de surveillance. On a diminué les coûts, mais de nombreux autres problèmes ont surgi. Je dirais donc qu'il s'agit toujours de la recherche de l'équilibre entre la vie privée et d'autres besoins.

On pourrait peut-être revenir plus tard sur d'autres points, mais je vous ferai part d'un dernier constat qui est ressorti de notre atelier, soit la nécessité et l'urgence que les gouvernements, tant au palier fédéral qu'au provincial, puisqu'il y a des questions de juridiction dans ce domaine aussi, agissent et imposent plus de lois et plus de réglementation pour contrôler l'application des nouvelles technologies. Cette nécessité d'avoir plus de lois a aussi fait consensus dans notre atelier.

La présidente: Merci beaucoup.

[Traduction]

Mme Steeves: Merci beaucoup.

Monsieur Godfrey.

M. Godfrey: J'ai un rôle ingrat parce que, bien sûr, je dois attendre et me justifier devant Valerie Steeves, notre animatrice.

Nous avons discuté des trois sujets à l'ordre du jour. Nous avons peut-être un peu trop forcé au départ sur la télévision en circuit fermé, mais il y avait là en fait des thèmes précis et des thèmes à caractère général. Ce qui est de toute évidence propre à la télévision en circuit fermé - et non aux autres technologies - c'est l'idée de l'espace physique, l'idée que des problèmes comme l'espace comptent énormément, alors que ce n'est évidemment pas le cas dans les deux autres exemples. On s'est interrogé sur les attentes raisonnables en milieu de travail par rapport à la situation d'un particulier dans la rue; par rapport à la situation qu'il y a dans un immeuble à appartements, où l'on exige un dispositif de sécurité dans un garage; par rapport à son propre chez-soi. Ce sont des questions qui sont propres à la télévision en circuit fermé, et il faut y répondre.

Ce qui est commun, c'est l'idée d'attente, c'est-à-dire, qu'il s'agisse d'aller à l'hôpital ou d'éviter une fraude, quel objectif premier une personne raisonnable peut-elle prêter à une telle activité? Autrement dit, s'il s'agit de quelque chose qu'on n'attendait pas - par exemple, si on vend des données à une entreprise commerciale - cela fait évidemment problème.

.1120

Un troisième thème commun à nos trois cas, c'est l'idée de la commercialisation, parce que c'est là que l'on semble aller trop loin. Particulièrement dans le cas de la télévision en circuit fermé, où l'on transmet à la télévision les images d'un homme qui se suicide, le bien public n'est nullement gagnant là. Il s'agissait ici strictement d'une exploitation commerciale.

La question de la commercialisation se pose dans tous les cas, et cela conduit à des questions plus profondes, à savoir, par exemple, qui possède et contrôle la technologie? Dans un sens, il est évidemment plus simple de contrôler la technologie publique que de contrôler la technologie privée.

Dans le premier cas, tout cela nous a conduits à un accord général - et c'est vrai de tous les autres cas - , à savoir qu'il faut des principes clairs et des règles de base.

Cinquièmement, le citoyen doit pouvoir s'attendre raisonnablement à ce qu'on respecte sa vie privée, et le fardeau de la preuve doit incomber à celui qui viole la vie privée, qui doit montrer qu'il agit raisonnablement dans l'intérêt commun ou public. Le citoyen doit avoir des recours lorsque les gens vont trop loin. Il faut que ces recours soient évidents et inspirent la crainte, comme par exemple la législation en matière d'écoute électronique doit à tout le moins inspirer une certaine crainte, faire comprendre qu'il y a des choses qu'on ne peut pas faire.

Cette séance s'est terminée sur une observation de notre animatrice et de certains autres, qui ont dit qu'il y a des analogies qui peuvent nous être utiles. On a cité en exemple toute la question des perquisitions et des saisies déraisonnables et le fait que le droit de la responsabilité civile peut nous être utile comme moyen de défense.

Sous la rubrique génétique, ce qui a surgi tout de suite, c'était toute l'idée de la découverte accidentelle, qui est également commune au problème de la télévision en circuit fermé. Je songe ici au cas où l'on apprend par accident qu'une personne souffre d'une maladie. Encore là, il y a des analogies, que nous avons déjà, avec les analyses sanguines - où l'on découvre par accident qu'une personne est séropositive, et l'on se demande alors ce qu'il faut faire de cette information.

Le groupe a dit sans ambages qu'on n'a pas le droit de faire des découvertes accidentelles. On doit toujours savoir ce que l'on cherche et définir les attentes raisonnables des gens.

De même, on a aussi posé la question du droit de savoir et du droit de ne pas savoir, qui est propre au contexte médical. Tout particulièrement dans le cas du test d'empreintes génétiques, il y a le fait qu'à l'heure actuelle c'est un groupe de gens relativement restreint qui, par accident, se rendent compte qu'on pourrait attenter à leurs droits. Ce groupe va sans doute s'élargir au fur et à mesure que cette technologie se répandra, mais il faut mettre en place dès maintenant des mesures de protection particulière parce que le droit à la vie privée peut être compromis par accident.

Tout le monde a parlé du bien public par rapport au tort privé.

Enfin, pour ce qui est de la carte à puce, on a encore là à parler de commercialisation et de la crainte de voir la vie privée compromise avec des choses comme les dossiers sur les habitudes de dépenses. Il semble que l'une des solutions ici, c'est le fait que la meilleure défense contre toute intrusion de la technologie, c'est une défense technologique, par exemple l'encodage des cartes à puce, mais on a fait valoir énergiquement dans notre groupe que si rien ne change des entreprises commerciales comme Mondex et d'autres n'ont aucun intérêt à protéger l'anonymat. Il faut donc qu'il y ait une garantie quelconque ou une protection contre l'intrusion commerciale dans la vie privée, parce que rien ne se fera automatiquement si l'on s'en remet aux intérêts commerciaux.

Toute la question des objectifs primaires par opposition aux objectifs secondaires pour lesquels ces renseignements sont recueillis, toute la question du consentement en toute connaissance de cause pour la communication des données afin d'éviter toute mauvaise surprise et toute la question du renversement du fardeau de la preuve sont revenues sur le tapis.

Une distinction fondamentale entre la comparaison des données et les deux autres, c'est qu'il est impossible qu'un accident puisse apporter un avantage quelconque à la personne concernée ou à la société. Ce n'est pas comme quand on voit un accident sur un écran de télévision en circuit fermé ou quand on trouve par hasard un gène qui peut être le symptôme d'un problème. La comparaison de données n'a pas cette qualité. C'est très spécifique. C'est de la simple pêche. Regrouper toutes ces données ne peut que causer des ennuis.

.1125

Finalement, notre ami qui a mis quatre heures pour venir de Kingston, David Lyon, a résumé la situation ainsi. Le grand thème commun de ces trois technologies est l'obsession de la gestion des risques, la réduction des risques à tout prix, que cela soit dans le domaine de la santé, de la sécurité ou de la fraude financière. L'objectif, c'est de rendre la société plus prévisible, mais le problème, c'est qu'il se fonde sur toutes sortes de fausses suppositions sur l'éventualité d'une maladie quelconque simplement parce que quelqu'un a des gènes qui, par exemple, indiquent une certaine prédisposition. C'est ignorer non seulement le facteur humain, mais aussi les droits de la personne dans le sens le plus profond. La protection de l'individu dans la société devrait toujours avoir la priorité.

Mme Steeves: Merci beaucoup, monsieur Godfrey.

Je donne maintenant la parole à Mme Augustine.

Mme Augustine: Merci.

Notre animateur était Geoffrey Gurd, et la discussion dans notre groupe a été très animée. Nous avons commencé par les tests génétiques et nous avons abordé tous les différents cas d'espèce et leurs différents sujets particuliers.

Nous avons commencé, et toute notre discussion a tourné autour de cette question, par l'affirmation selon laquelle la technologie est bonne. À la fin de nos discussions, je crois que nous sommes tombés d'accord pour dire qu'elle est plus neutre que bonne. Je ne suis pas tout à fait certaine que nous soyons tombés d'accord pour dire qu'elle est bonne ou neutre ou sur la signification exacte et précise de ces deux adjectifs au niveau de l'utilisation de la technologie, de ses utilisateurs et de ce qu'ils font de la connaissance ainsi recueillie.

Nous avons alors ajouté que c'est cette connaissance qui est un dilemme pour nous. Qui est le propriétaire de ces renseignements ainsi recueillis? Je crois que certains d'entre nous ont été surpris d'apprendre que nous ne sommes pas propriétaires de nous-mêmes ou de nos organes, etc.

Nous sommes passés ensuite à la loi, aux dispositions qui nous protègent et au protocole prévu. Par exemple, le projet de loi C-104, une loi récente, contient un protocole qui ordonne la destruction de toutes les données recueillies pendant une enquête sur une personne si elle n'est pas coupable de l'infraction commise. Notre discussion a ensuite tourné autour des questions de l'ADN et des prélèvements de fluides, de cheveux et de toutes sortes, d'autres choses et de leur utilisation.

Nous sommes ensuite passés de l'individuel au collectif. Nous avons dit qu'il est important que des sommes de renseignements soient recueillis pour tirer des conclusions. Quelqu'un a fait allusion à Boom, Bust and Echo, de David Foot; si les renseignements n'étaient pas recueillis, la somme de renseignements acquise pour nous permettre de faire certaines projections et certaines prévisions pourrait ne pas être possible.

Nous avons ensuite mis dans la balance le coût de la surveillance et la sécurité publique. Je crois qu'un ou deux autres groupes en ont déjà parlé. Un des participants de notre groupe connaissait très bien la question de la surveillance en temps réel, comme le contrôle et l'accès aux édifices, etc. Nous avons parlé des valeurs et des règles sociales et éthiques qui devraient ou pourraient être imposées aux fabricants de ces systèmes par rapport aux gérants de ces systèmes. À notre avis, les fabricants de ces systèmes n'ont pas à respecter les mêmes règles ou les mêmes codes de déontologie que les gérants de ces systèmes. C'est à ce niveau que se pose la question du contrôle.

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Nous avons passé beaucoup de temps sur toute la question du contrôle - qui assume ce contrôle, dans quelles circonstances, et où ces renseignements sont-ils entreposés? Nous avons mentionné en passant qu'au Manitoba, par exemple, il y a un registre central des cancéreux. L'utilité scientifique d'un tel registre justifie-t-elle les dangers potentiels d'un détournement d'utilisation?

Nous sommes revenus à la question de la propriété. C'est un thème qui a été présent pendant toute la discussion. Pour un des participants, la propriété veut dire que si l'on donne quelque chose on doit pouvoir le récupérer. Si on peut donner et récupérer, cela veut dire qu'on est propriétaire de ses données.

Cela nous a amenés à toute la question de ce qui est périssable et de ce qui ne l'est pas; les décisions prises à la suite de la consultation de systèmes; les renseignements exacts et actuels; les extrapolations qui peuvent être faites à partir de renseignements qui peuvent ne pas être actuels ou exacts; et les avantages et les inconvénients dans les cas d'abus et de fautes professionnelles, etc.

Nous sommes revenus à la question du consentement informé et nous avons dit qu'à partir du moment où une signature entraîne un consentement, est-ce que c'est vraiment donner carte blanche? Et comment s'assurer que ce consentement informé soit réglementé d'une manière ou d'une autre?

Enfin, nous avons terminé par la question du rôle de l'industrie. Nous avons estimé qu'il est préférable que l'industrie s'impose des codes volontaires et s'autoréglemente. Cependant, en même temps, il importe que le gouvernement joue aussi un rôle et impose en conséquence des normes de réglementation minimums.

Nous avons consacré une partie de la discussion à l'éducation du public. Nous estimons que c'est l'éducation du public et la connaissance des consommateurs qui nous donneront le genre de public qui réagira aux invasions, aux nouvelles technologies et à leurs intrusions dans toutes sortes de domaines. Nous avons donc convenu qu'il faudrait éduquer le public et que le public a des droits. Il doit savoir qu'il peut se protéger.

Enfin, nous avons parlé de la nécessité de formuler un cadre législatif pour régir les rapports entre l'individu et les intérêts commerciaux. Au Canada, à l'exception du Québec, les lois protégeant la vie privée ont près de dix ans de retard sur celles des pays scandinaves.

Mme Steeves: Merci beaucoup.

Monsieur MacLellan, je sais que vous avez participé au groupe de discussion de M. Scott. Est-ce que vous avez des commentaires à ajouter?

M. MacLellan: Non, mais lorsque nous reprendrons notre réunion tout à l'heure, j'aurai quelques petits commentaires à faire. Je crois que M. Scott a très bien présenté notre discussion.

Mme Steeves: Monsieur Assadourian, voudriez-vous ajouter quelques commentaires?

M. Assadourian: Merci beaucoup.

Je crois que ma collègue, Sharon Hayes, a fait un excellent travail. J'aimerais aussi remercier Kate. Elle a fait un travail fantastique.

J'ai un problème général à propos de cette protection de la vie privée, des cartes à puce et des examens génétiques. Il y a quelques mois, nous avons adopté à la Chambre des communes un projet de loi sur l'ADN. Il ne nous a fallu, je crois, qu'une demi-heure pour adopter ce projet de loi. Je crois qu'il n'y a jamais eu d'autres projets de loi adoptés aussi vite, si ma mémoire est exacte. Je crois que nous devrions prendre le temps de réfléchir à ce que nous faisons aujourd'hui.

Je ne dis pas que nous ne devrions pas adopter un projet de loi pour contrôler ou pour réglementer les cartes à puce, les tests génétiques ou les procédures de surveillance en circuit fermé, mais il faut bien réfléchir à la question. Ce domaine évolue avec une telle rapidité, tout comme l'informatique, que ce qui était correct il y a six mois peut ne pas l'être aujourd'hui.

C'est le problème général que je vois. Je ne le dis pas parce qu'il faut que nous adoptions un projet de loi, mais il faut nous assurer d'avoir couvert toute la question avant de l'adopter. C'est une question très délicate. C'est une question très importante.

Le dernier point sur lequel j'aimerais revenir et insister, c'est que, comme il a déjà été dit, c'est une question de confiance. À qui faisons-nous confiance - au gouvernement, à l'industrie ou au citoyen? C'est à cette question qu'il nous faudra aussi répondre.

Merci.

Mme Steeves: Merci beaucoup.

Nous allons prendre quelques instants pour écouter les observations des animateurs s'ils ont quelque chose à ajouter avant d'étendre la discussion au parquet.

Kate, peut-être pourrions-nous commencer par vous.

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Mme Kate White (présidente, Black & White Communications Inc.): Pour commencer, on a déjà soulevé les sujets dont nous avons discuté; par conséquent, je vais me contenter d'ajouter quelques observations très rapidement.

À ma grande surprise, si les gens de notre groupe ont manifesté beaucoup d'opinions différentes, dans l'ensemble ils étaient d'accord sur beaucoup de choses. Nous avons observé que les schémas coopératifs sociaux entrent très souvent en ligne de compte. Par conséquent, l'emploi était affecté et l'industrie était infectée - je veux dire affectée, c'est un petit lapsus freudien - les notions que nous avons du capitalisme et de la démocratie étaient affectées également par tous les sujets dont nous discutons aujourd'hui et qui ont une importance toute particulière.

Mon collègue vient de mentionner, et cela a été dit plus tôt également, qu'on trouve au coeur de toute cette question une affaire de confiance. À qui faisons-nous confiance pour prendre ces décisions? À la fin, la discussion tournait autour de la façon de s'en occuper. Nous avons parlé de la législation, de l'application des lois et de la réglementation, de la nécessité d'avoir des ressources pour déterminer quand nos droits ne sont pas respectés, et, enfin, nous avons cherché à déterminer qui est responsable.

En dernière analyse, nous nous sommes dit qu'une loi est indispensable - maintenant. Dans cette affaire, le ton est crucial, et il importe d'agir. J'ajoute que pour nous il ne s'agirait pas d'une loi grandiose, mais plutôt de quelque chose de spécifique, de bien déterminé, et tout cela de concert avec d'autres activités sociales. Entre autres, nous avons parlé de l'éducation. C'est une chose qui doit évoluer en parallèle avec la loi.

D'autre part, nous avons reconnu très vite que la technologie offre d'énormes avantages et a le potentiel de faire beaucoup de bien. Partant de là, nous nous sommes rendu compte également que beaucoup de gens, individuellement et collectivement, ont des craintes lorsqu'il s'agit de comprendre la technologie et ses applications.

Cette notion de potentialité a fait surface plusieurs fois, et cela me semble important. Nous avons discuté également de notions hypothétiques; supposons qu'on ait déterminé chez moi une prédisposition pour le cancer du sein: l'État ne m'aurait pas aidée à faire des études universitaires, et je ne serais pas ici aujourd'hui. Je ne sais pas si j'ai cette prédisposition, mais c'est un aspect important.

Je pensais aussi à Albert Einstein, qui a fait ses découvertes les plus importantes à 26 ans. Lui aussi, peut-être qu'il aurait mieux valu ne pas l'envoyer à l'école.

Il y a un sentiment d'appréhension. Je pense qu'en prenant conscience de cette appréhension, nous pouvons déterminer le rôle de l'État et des autres organismes de la société civile dans tout cela.

Merci.

Mme Steeves: Merci beaucoup, Kate.

Larry, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Laurence Kearley (conseiller juridique principal, Documentation, information et recherche, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): M. Scott a très bien résumé tout ce dont nous avons discuté. Toutefois, j'aimerais insister sur certains aspects, principalement parce qu'ils me tiennent à coeur.

Dans notre groupe, nous nous sommes demandé si nous étions vraiment représentatifs de l'ensemble de la population, surtout parce que nous étions d'accord sur pratiquement tout. Nous aimerions bien que tout le monde soit d'accord avec nous, mais nous n'en sommes pas si certains.

D'une certaine façon, j'ai trouvé que c'était une expérience très émotive. En l'espace d'une heure et demie, nous sommes passés du désespoir au cynisme et à l'optimisme au sujet de la situation actuelle. Je ne sais pas très bien où nous avons fini par aboutir. Nous avons probablement conclu par un optimisme prudent, nous disant qu'il n'est pas trop tard, mais d'un autre côté je ne sais pas si nous en sommes vraiment convaincus.

Il y a un sujet dont nous avons discuté pendant pas mal de temps, celui du consentement, informé ou autre, et nous nous sommes demandé si nous avions vraiment la possibilité de consentir à ce que toutes ces données soient recueillies dans ces banques. Si vous tenez aux choses que la société vous offre, êtes-vous vraiment forcé de consentir, et serait-il bon de réfléchir à cette question?

En ce qui concerne la prise de conscience et l'éducation du public, nous étions convaincus, bien sûr, qu'il suffirait d'entendre les histoires d'horreur que nous échangions pour être d'accord avec tout ce que nous disions. J'ai l'impression que nous en sommes convaincus. Si l'homme de la rue, les parents, les collègues, etc., prenaient plus conscience... Dieu sait que ma famille et mes amis en ont assez de m'entendre prêcher, mais je suis certain qu'ils changent d'avis lorsqu'ils découvrent ce qui se passe.

Il y a une question qui était là au début de notre discussion et qui était encore là à la fin - une question semblable à celle qui se pose au sujet du clonage, dont on parle tellement en ce moment, à savoir, faut-il fabriquer des clones de moutons, de singes, d'êtres humains? - et cette question est la suivante: est-ce que nous devons vraiment faire quelque chose pour la simple raison que cela est possible?

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Nous avons observé qu'il est nécessaire d'organiser une discussion publique des valeurs en cause. Est-ce que notre société veut utiliser la technologie disponible, ou bien préfère-t-elle renoncer à certaines économies et efficiences pour préserver certaines valeurs humaines et protéger la vie privée? Voilà ce dont il faut discuter sérieusement.

Les comités parlementaires et le Parlement sont des endroits tout désignés pour discuter de ces valeurs qui se font concurrence. Nous étions tout à fait convaincus de cela. Merci.

Mme Steeves: Merci, Murray.

Pierrôt.

[Français]

M. Pierrôt Péladeau (Progesta Communications Inc.): Essentiellement, je n'ai rien à ajouter aux points qui ont été soulevés. Je ne prolongerai donc pas inutilement la rencontre.

J'aurai peut-être d'autres forums pour exprimer mes opinions personnelles, mais je suis ici comme une personne ressource. Je soulèverai simplement un point important qui n'a pas été dit, c'est-à-dire à quel point la participation a été, en tout cas dans notre atelier, à la fois vive et réfléchie, et aussi respectueuse du point de vue de l'autre, ce qui mérite d'être souligné. C'était le seul point que je voulais ajouter, madame.

La présidente: Merci.

[Traduction]

Mme Steeves: Merci, Pierrôt.

Geoffrey, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Geoffrey Gurd (Département des communications, Université d'Ottawa): Oui. Pour commencer, j'aimerais vous faire observer à tous que tous les animateurs choisis par Val portent la barbe.

Mme White: Excusez-moi.

Des voix: Oh, oh!

M. Gurd: Je parle des hommes.

Mme Steeves: Je tiens à préciser qu'elle n'a pas une prédisposition génétique qui lui donne une barbe.

Des voix: Oh, oh!

La présidente: La structure hormonale est différente.

M. Gurd: Gene a très bien résumé notre séance, et à ce sujet il y a deux ou trois choses qui m'ont particulièrement intéressé, hormis le fait que nous n'avons pas eu assez de temps.

Pour commencer, nous nous sommes rendu compte que la réglementation de la criminalité et des éléments criminels de notre société est un système assez élaboré et détaillé, mais que le cadre n'est pas aussi défini en ce qui concerne la partie commerciale de notre vie.

J'ai l'impression que nous aurions aimé approfondir un peu cela. Nous devrions au moins revenir sur cette question, car en écoutant notre discussion j'ai eu l'impression - et cela est confirmé par les autres rapports - que la technologie et les impératifs commerciaux régissent toutes ces questions, qui, à cause de cela, deviennent très problématiques pour nous.

Cela dit, je m'en tiendrai là, et j'attends avec impatience les observations de l'assistance.

Mme Steeves: Malheureusement, David Lyon a été retardé par la tempête de neige.

David est directeur du Département de sociologie de l'Université Queen's. Il a écrit de nombreux articles et ouvrages sur l'impact social des technologies de l'information et des communications.

David, avez-vous des observations à ajouter avant que nous ne donnions la parole à l'assistance?

Le professeur David Lyon (Département de sociologie, Université Queen's): Je suis arrivé en retard, et je m'en excuse.

J'ai été frappé par certaines choses au sujet des études de cas à la fois dans les discussions des groupes et dans les discussions ici ce matin.

À mon avis, il est important d'oublier la notion trop bien ancrée qu'il s'agit d'un problème individuel ou personnel. Dès qu'on mentionne la vie privée, on a tout de suite l'impression que cela ne regarde que l'individu.

Selon moi, cette discussion porte bel et bien sur un problème social. Les questions que nous nous posons portent sur le genre de société que nous voulons, et non pas simplement sur la protection de la vie privée des particuliers.

On a déjà cité une de mes observations, où je dis que la situation ressemblerait à un mouvement massif vers la gestion du risque. En effet, la gestion du risque est devenue une caractéristique cruciale dans un grand nombre de situations, et certainement dans les trois études de cas que nous avons étudiées.

Il s'agit de la détermination de l'identité, de tout l'appareil qui entoure cette question, et des tentatives de prédiction qui ont pour objet d'éviter ou d'empêcher certaines choses de se produire. Évidemment, la plupart du temps, on invoque des raisons tout à fait plausibles dans des cas particuliers.

Et tout cela nous conduit à ce désir de surveillance, à cette obsession de recueillir le plus de données personnelles possible dans des machines qui sont conçues pour faire de la discrimination et pour créer des catégories de personnes. Qu'il s'agisse des aspects commerciaux, des questions de disposition génétique ou de la propension à se livrer à des activités frauduleuses, dans tous les cas nous créons des catégories de personnes qui ne correspondent pas forcément aux véritables personnes derrière ces catégories de données.

Si l'on regarde cet énorme pouvoir, dans ces trois exemples, nous parlons de réglementation, de droit, d'élargissement des lois sur la protection de la vie privée, etc.

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Il me semble que cela pose une difficulté car, dans l'ensemble, les lois sur la protection de la vie privée que nous avons au Canada imposent à l'intéressé lui-même la responsabilité de sa propre protection. S'il s'agit vraiment d'une question sociale, cet aspect-là me semble problématique. Quel genre de société voulons-nous?

C'est la raison pour laquelle des discussions comme celle d'aujourd'hui sont particulièrement importantes. En effet, nous avons besoin de mesures concertées, nous devons favoriser une prise de conscience de la situation véritable, et cela est urgent.

Le consentement informé ne signifie rien quand la plupart des gens ne savent pas comment les données qui les concernent sont recueillies. Cela n'a rien à voir avec le problème. En fait, le problème va beaucoup plus loin. Par conséquent, un débat informé sur les aspects déontologiques et politiques, un débat axé sur la nécessité d'intégrer dans les systèmes que nous créons la protection des personnes, ce genre de débat est extrêmement indiqué.

Mme Steeves: Merci beaucoup.

Mesdames et messieurs, nous allons maintenant vous demander de faire des observations et d'exprimer vos préoccupations dans le cadre de cette discussion. Comme cette séance va être transcrite, je vous demanderais de dire votre nom avant de parler.

Dr John Williams (directeur, Déontologie, Association médicale canadienne): Je suis John Williams.

La question des tests génétiques m'intéresse particulièrement. C'est un aspect de la protection de la vie privée qui, à mon avis, s'étend aux trois domaines. Divers problèmes se posent en ce qui concerne la protection de la vie privée, et cela dans trois domaines au moins: la façon dont les informations sont recueillies, l'accès à ces informations et la façon dont elles sont utilisées.

La question des tests génétiques pose des problèmes particuliers en ce qui concerne les deux dernières catégories.

En ce qui concerne l'accès à l'information, on pourrait prétendre que des gens autres que l'individu concerné ont le droit de prendre connaissance de ces informations, car ce sont des informations qui les concernent également. Ce genre de question doit être approfondie.

En ce qui concerne la façon dont l'information est utilisée, comme on l'a prouvé avec l'étude de cas concernant une discrimination possible, cela pose de véritables problèmes.

Par conséquent, lorsque le comité étudie la question de la vie privée, il doit décider jusqu'où il convient d'aller. Faut-il se contenter d'étudier la confidentialité des informations concernant une personne à la fois sur le plan de la cueillette des informations et sur le plan de l'accès à ces informations, ou bien faut-il aller en aval, un peu plus loin, et considérer les moyens d'éviter la discrimination? C'est particulièrement crucial en ce qui concerne la génétique, où le potentiel de discrimination contre les particuliers est très élevé.

Est-ce que cela signifie qu'en plus de lois ou de règlements sur la protection de la vie privée il convient de rendre plus sévère la législation actuelle sur les droits de la personne, qui interdit certaines formes de discrimination? Par exemple, il pourrait y avoir une disposition, même dans la Charte, pour interdire la discrimination fondée sur le statut génétique.

Mme Steeves: Merci beaucoup.

M. Ken Rubin (témoignage à titre personnel): Je suis Ken Rubin.

Madame la présidente, j'aimerais soumettre une préoccupation, un défi, ou une question aux membres du comité.

J'ai entendu dire que le Parlement a consacré une demi-heure au projet de loi sur l'ADN. Aujourd'hui, nous passons un peu plus de temps à discuter de certaines de ces questions d'une façon plus abstraite. Ensuite, vous allez vous déplacer dans tout le pays.

Voici ce que j'aimerais savoir: supposons qu'avant de rédiger son rapport le comité fasse une enquête et convoque à titre de témoins les gens qui actuellement planifient certaines mesures en secret, par exemple une carte d'identité nationale au ministère des Ressources humaines ou en collaboration avec les provinces. Est-ce que vous allez convoquer le directeur du Centre de la sécurité des télécommunications et les gens de la Défense nationale qui sont responsables des satellites d'espionnage? Est-ce que vous allez convoquer des représentants des banques, qui disposent d'une technologie moderne leur permettant de s'immiscer dans notre vie privée? À mon avis, ce sont des choses que le comité devrait entendre. Est-ce que vous allez revenir sur la loi sur l'ADN maintenant que le Parlement semble changer d'avis, du moins sur les aspects surveillance électronique?

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À mon avis, c'est une grave question. C'est bien joli d'entendre des discussions.

C'est en 1978 que j'ai, pour la première fois, comparu devant un comité parlementaire pour discuter de la protection de la vie privée. Effectivement, la technologie a changé depuis cette époque, mais j'espère que le comité convoquera des témoins utiles, les mettra sur la sellette, et réussira à se faire une bonne idée de la situation, parce qu'en effet c'est à ce niveau-là qu'il faut éduquer le public.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Rubin. Les membres de ce comité vous connaissent tous, et en particulier tout ce que vous avez écrit. J'ajoute que vos ouvrages sont très réfléchis, et c'est en partie pour cette raison que nous avons voulu vous inclure dans ce groupe et vous demander de nous aider à examiner certaines questions particulièrement intéressantes, troublantes et difficiles. Pour l'instant, nous n'avons pas encore de conclusions claires.

Je ne saurais vous dire exactement ce que nous ferons lorsque nous aurons terminé ce rapport. Nous espérons pouvoir le déposer dans le courant du printemps. Nous verrons alors quelles conclusions nous aurons atteintes, et dans tout cet exercice vos observations seront très importantes.

En fait, après cette réunion, le comité va procéder à une évaluation de ce qu'il a entendu et s'interroger sur les changements à apporter au processus. Nous tiendrons compte également des questions de fond qui ont été portées à notre attention. Il est certain que vos observations seront étudiées. C'est à ce moment-là que nous prendrons une décision sur la marche à suivre.

Je pense que nous devrions écouter l'intervenant suivant et laisser le groupe répondre aux observations de M. Williams, qui faisait partie du groupe où je me trouvais.

M. Peter Brandon (président, Sysnovators Limited): Merci, madame la présidente. Je suis Peter Brandon.

J'aimerais reprendre les observations de David Lyon. J'ai fait les mêmes observations au sein de notre groupe, et à mon avis il y a ici deux concepts qui sont particulièrement importants pour le comité dans son étude de la protection de la vie privée et des rapports qui existent entre la protection de la vie privée des particuliers et de la société en général.

Un de ces concepts considère l'information que nous associons généralement à la vie privée comme une potentialité. Disons qu'il s'agit de l'information qui nous concerne nous-mêmes. Ces informations peuvent être tirées de tests génétiques ou de détecteurs, par exemple, situés à une intersection. Supposons qu'il y ait une puce dans votre automobile. Vous franchissez l'intersection, et le fait que vous avez franchi cette intersection est enregistré.

Il y a donc tous ces types d'information. Supposons qu'on vous ait filmé dans un endroit public ou privé. Quel que soit le format, le moyen, c'est un élément d'information, cela représente une potentialité.

Prenez l'exemple du code génétique. Les résultats d'un test génétique indiquent que vous avez une prédisposition au cancer du sein ou aux maladies cardiaques; c'est une potentialité.

Le fait que vous ayez franchi l'intersection peut signifier que vous avez le potentiel de tromper votre femme, parce que vous n'avez aucune raison de vous trouver à cet endroit-là à ce moment-là.

C'est la potentialité. Cette potentialité n'est pas réalisée tant que quelqu'un n'utilise pas cet élément d'information. Nous avons donc ce concept de potentialité. Il serait peut-être utile de considérer tout ce concept de la vie privée comme quelque chose qui a un rapport avec la sphère des données, les données sur les méthodes, les informations qui existent sur nous-mêmes, et de considérer tout cela comme une potentialité.

Comme David Lyon l'a fort bien expliqué, à tous les niveaux, qu'il s'agisse du gouvernement, du secteur du bénévolat ou du commerce, notre société est obsédée par la notion de gestion du risque. La gestion du risque est devenue un élément fondamental de la société.

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En fait, on pourrait expliquer toute la question de la vie privée par la relation qui existe entre la potentialité que représentent les informations sur nous-mêmes et la gestion du risque dans la société. Supposons que je sois une compagnie d'assurances; plus je sais de choses sur les gens qui m'ont acheté une police d'assurance, plus je réduis le risque. Par conséquent, j'ai le potentiel de réduire le risque, je gère mieux le risque, je réussis mieux sur ce plan-là dans la mesure où j'en sais plus sur la potentialité des gens qui m'entourent.

On peut supposer que si, grâce à des caméras vidéo placées dans les endroits publics, on recueille des renseignements sur un criminel éventuel qui pénétrerait dans une voiture par effraction, la sécurité de la société s'en trouve accrue.

Selon moi, il est important que les débats et les discussions, de même que la réflexion des membres du comité, gravitent autour de la dynamique fondamentale qu'il y a entre la vie privée en tant que potentialité et la gestion du risque dans la société. En effet, ce rapport entre la potentialité et la gestion du risque détermine tout un éventail d'effets sur la société, primaires, et secondaires.

Je pense qu'il importe de ne pas trop s'appesantir sur l'aspect technologique et de ne pas trop présumer des effets néfastes du recours aux cartes à puce par exemple. Songez-y. Quand vous passez la frontière en utilisant une carte à puce et que votre passage est ainsi enregistré, ce n'est pour ainsi dire pas différent des renseignements qui sont inscrits sur une carte à la frontière pour ensuite être mis sur ordinateur et devenir un dossier dans une banque de données. Il n'y a absolument pas de différence dans l'accomplissement de l'acte, sauf qu'on y gagne en efficacité.

Ainsi, la technologie, plutôt que de changer la nature de ce qui se produit, en améliore l'efficacité. Rien n'est changé. Ainsi, le geste que vous accomplissez se trouve confiné plus rapidement dans une base de données, de façon plus efficace, à meilleur marché, et cela facilite donc la tâche de l'agence gouvernementale, de l'agence privée ou du particulier. Selon moi, il est important de ne pas se laisser obnubiler par la technologie.

Par ailleurs, on suppose d'emblée que si nous créons une carte à puce, elle contiendra toutes les formes de renseignements. Ce n'est pas le cas. Nous pourrions avoir recours à des agences intermédiaires qui détiendraient certains renseignements personnels, alors que la carte à puce contiendrait uniquement un index d'accès à des renseignements donnés et une piste permettant d'avoir la permission de les obtenir.

Essentiellement, donc, il ne faudrait pas à mon avis être frileux devant la technologie. Ce n'est pas la technologie qu'il faut réglementer, mais nous devons discuter de l'opposition entre la gestion du risque et la potentialité. Merci.

Mme Steeves: Merci beaucoup, monsieur Brandon.

Y a-t-il un membre du comité qui voudrait répondre à ce qui a été dit jusqu'à présent?

M. Gurd: Oui. À mon avis la technologie a de quoi nous inquiéter, car c'est une cible en mouvement, et malgré les lois sur le droit d'auteur nous ne semblons pas en mesure de la cerner.

Deux auteurs américains ont écrit un livre intitulé: Connections, dans lequel ils analysent beaucoup de ces organismes de publipostage électronique. Les auteurs se penchent sur les effets primaires et secondaires des nouvelles techniques. Nous nous attendons à ce que les nouvelles techniques produisent comme effet primaire une rapidité accrue, une plus grande efficacité, du moins sur le plan des coûts, etc. Voilà les avantages immédiats que nous comptons en tirer à brève échéance.

Ce que nous ne pouvons pas prédire, ce que nous ne pouvons pas prévoir, ce sont les effets secondaires des nouvelles techniques, par exemple l'utilisation d'Internet, ou l'apparition de collectivités virtuelles, dont les activités nous échappent. La technologie change la nature des choses, et nous ne sommes pas clairvoyants à cet égard. Parfois les choses se produisent à longue échéance, et il se peut que ce soit à notre insu. Il faut donc considérer les effets intentionnels primaires de la technologie, mais aussi ses effets secondaires, indirects, à long terme, car ils sont indéniables. Ils sont plus difficiles à cerner, si bien que nous avons tendance à les oublier.

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Mme Kathleen Connors (présidente, Fédération nationale des syndicats d'infirmières/infirmiers): Je m'appelle Kathleen Connors et je représente ici la Fédération nationale des syndicats d'infirmières/infirmiers.

Je suis ravie de voir que des femmes s'avancent pour prendre la parole, car nous sommes en pleine Semaine internationale de la femme.

Je commençais à réfléchir aux enjeux qui font l'objet de ce processus de consultation, lorsqu'une question s'est imposée à moi: qui contrôle la quantité de renseignements de plus en plus grande que nous recueillons, y a accès et en profite? Je suis ravie de constater que l'enjeu individuel de la question a progressé et que nous nous inquiétons désormais de l'enjeu collectif, parce que je travaille pour un collectif. Pour ma part, je mets toujours le collectif avant toute chose, et je pense qu'il importe...

Voici un autre défi pour les membres du comité et le gouvernement du Canada: les Canadiens élisent des représentants pour travailler dans l'intérêt de la collectivité. Il est donc capital que vous ne vous contentiez pas d'étudier les questions que l'on tourne et retourne ici comme dans d'autres pays depuis bien des années, mais que vous agissiez, car nous comptons sur vous et nous vous exhortons à le faire. Bien des pays européens ont déjà adopté des lois de protection des collectifs, et nous espérons que vous vous orientez dans le même sens.

On a parlé de la confiance, et même s'il y a des divergences d'opinions concernant les degrés de confiance relatifs que l'on peut accorder au gouvernement, aux entreprises, ou aux autres groupes quant à ce qu'ils peuvent ou doivent faire, nous n'en sommes pas moins un régime démocratique. Nous espérons que sera préservée l'intégrité du processus démocratique, et nous espérons que les meilleurs intérêts des collectifs vont être pris en compte.

Je suis infirmière, et je défends les intérêts de ceux qui ne peuvent pas le faire eux-mêmes. Je compte sur vous pour défendre nos intérêts.

Il y a quantité de renseignements que je donne sur moi-même, renseignements que je souhaite voir protégés. Pour ce qui est de la gestion du risque, je suis fière de constater que nous avons un régime de soins de santé très public. C'est un système de filets de sécurité sociale qui est de plus en plus troué, mais parce que nous avions une protection publique pour cet aspect-là de notre vie, cette protection doit être maintenue. Je vous lance donc ce défi.

En tant que collectif, nous ne voudrions pas que votre rapport soit mis en veilleuse. Nous souhaitons qu'on adopte une loi musclée et que l'on prévoie le financement nécessaire à son application pour protéger les collectifs. Merci.

Mme Steeves: Merci.

Monsieur Assadourian, voulez-vous répondre à cela?

M. Assadourian: Non, j'aurai une remarque générale à faire quand nos témoins auront fini de s'exprimer.

Mme Linda Rheaume (directrice des programmes spéciaux, Association des droits civils, région de la capitale nationale): Je m'appelle Linda Rheaume. Je représente l'Association des droits civils. Mon président n'a pas pu venir à cause de la neige, et la raison pour laquelle les femmes sont ici, c'est qu'elles voyagent en autobus.

Je trouve vivement intéressantes les discussions philosophiques, mais pour ma part je suis une personne très pratique. Comme sont présents ici des députés fédéraux, je vais tout de suite parler de questions qui à mon avis pourraient être réglées très rapidement, en l'occurrence par les gens qui sont ici présents.

Tout d'abord, les délais d'attente quand on fait une demande de renseignements concernant sa propre personne sont beaucoup trop longs. Il semble que M. Phillips n'ait pas le bras assez long pour affronter ces fonctionnaires qui se font tirer l'oreille. À mon avis, attendre trois ans avant d'obtenir des renseignements, c'est beaucoup trop long, et je pense qu'on pourrait augmenter les recettes de l'État si on imposait des amendes aux fonctionnaires qui ne respectent pas les dates limites.

Quelqu'un m'a dit ce matin que la GRC respecte un délai de 30 jours, qu'il s'agisse de l'étranger ou non. Il est possible que la Gendarmerie royale ait des choses plus importantes à faire, et on voudra peut-être revoir ce délai de 30 jours.

Je remercie la présidente d'avoir prévu ce genre de consultation qui me permet d'entendre le point de vue de mes collègues.

.1205

Quand le gouvernement fait appel à des sous-traitants, ce qui se fait couramment, les contrats ne prévoient pas automatiquement l'obligation de respecter les lois fédérales en ce qui a trait aux renseignements. En outre, si quelqu'un, cinq ans après les faits, disons, veut obtenir les renseignements qui ont été recueillis par une firme employée par le gouvernement, il risque de découvrir qu'ils ne sont pas accessibles. Je pense que des clauses devraient être prévues à cet effet dans les contrats. Pour des considérations de coût, ce pourrait être pour une durée limitée, mais on devrait prévoir quelque chose.

Je voudrais signaler deux autres choses concernant les particuliers.

Si je ne m'abuse, rien n'empêche l'employeur des fonctionnaires qui ont des boîtes vocales d'écouter l'enregistrement et de savoir ainsi quels rendez-vous les employés ont chez le médecin, chez leur maîtresse, ou que sais-je encore? À moins que quelqu'un ne soit en congé ou malade, un employeur ne devrait pas avoir accès à la boîte vocale de ses employés.

Je voudrais également attirer votre attention sur le fait que la compagnie d'assurances Sun Life a désormais le contrat d'assurance-invalidité pour les fonctionnaires fédéraux. Elle s'occupe également du régime d'assurance-médicaments. Par conséquent cette compagnie d'assurances sait quels médicaments un fonctionnaire prend ou ne prend pas. Je pense que, comme c'était le cas auparavant, on devrait faire appel à deux firmes différentes, une pour l'assurance-invalidité et une autre pour le régime d'assurance-médicaments, qui permet d'avoir accès à des renseignements personnels.

Merci.

Mme Steeves: Merci beaucoup.

La présidente: Il semble que vous voudriez qu'il y ait étanchéité entre les deux secteurs quant à ces renseignements fournis à la Sun Life, n'est-ce pas?

Mme Rheaume: Oui.

La présidente: Merci beaucoup.

Mme Steeves: Monsieur Assadourian.

M. Assadourian: Je constate en prenant connaissance de la liste que nous accueillons de nombreux témoins intéressants. Jusqu'à présent nous avons entendu la voix de ceux qui fournissent des renseignements, mais nous n'avons pas entendu celle de la GRC, par exemple, ou d'autres organismes qui utilisent ces renseignements, comme l'Association canadienne des chefs de police, le commissaire à la protection de la vie privée, le ministère de la Justice. Est-il possible qu'ils s'expriment avant la fin de la séance?

Mme Steeves: En fait, j'ai cru remarquer qu'il y a un délégué de la GRC. Le voilà.

Je suppose qu'il faut du courage pour s'approcher du micro.

La présidente: En fait, le représentant de la GRC a participé activement à la table ronde.

M. Assadourian: Pouvons-nous l'entendre?

La présidente: Monsieur Assadourian, vous avez fait une remarque fort intéressante, et je vous en remercie. Nous allons revoir la liste des gens que nous comptons inviter, car ces représentants de nos propres services figurent assurément sur notre liste, et s'ils ne viennent pas ici à Ottawa nous les retrouverons à Toronto ou à Montréal. Si par hasard nous avons besoin de plus de renseignements, nous les inviterons à témoigner quand nous reviendrons à Ottawa.

M. Assadourian: Merci.

Mme Steeves: Madame Moll.

Mme Marita Moll (chef, Recherche et technologie, Fédération canadienne des enseignantes et enseignants): Je m'appelle Marita Moll. Je représente la Fédération canadienne des enseignantes et enseignants.

J'habite à Ottawa, et plusieurs fois auparavant j'ai dû venir dans cet édifice-ci. Ce matin, quand je suis arrivée, j'ai dû passer par trois vérifications pour des raisons sécuritaires. Cela m'a scandalisée et étonnée, et j'étais presque en larmes de voir que c'est ainsi que s'est transformée ma société, que cela se passe dans ma collectivité. J'ai été rassérénée d'entendre David Lyon dire que les questions de vie privée et de surveillance sont des questions sociales et reflètent la façon dont nous appréhendons les diverses tensions au sein de notre société.

Les questions de la protection de la vie privée et des nouvelles technologies évoluent très rapidement, mesdames et messieurs. Cela fait deux ou trois ans qu'elles font l'objet de discussions parlementaires. Dans tous les cas, c'est une question de ressources.

La répartition des ressources est une question de priorité. J'affirme quant à moi que nous sommes aux prises avec une question hautement prioritaire et qu'il faudrait que l'on consacre les ressources nécessaires pour préparer les mesures législatives que les Canadiens, en tant que citoyens, décideront de se donner. Actuellement, rien ne se fait dans ce sens-là.

J'ai une question précise à poser. Il y a deux ans, le Comité consultatif sur l'autoroute de l'information a recommandé que l'on adopte certaines mesures législatives. A-t-on fait quelque chose? Quelqu'un peut-il me dire où nous en sommes sur ces questions-là?

La présidente: Nancy ou Susan, pouvez-vous nous renseigner?

Mme Susan Alter (attachée de recherche du comité): Je pense qu'il y a quelqu'un ici aujourd'hui qui pourrait vous répondre. Je ne veux pas mettre Stephanie Perrin sur la sellette, mais elle pourra sans doute vous mettre tout à fait au courant, car elle travaille pour Industrie Canada et surveille comment évoluent ces dossiers-là.

La présidente: Stephanie, pouvez-vous vous approcher, s'il vous plaît?

Tous ceux qui se sont occupés des questions de protection de la vie privée dans le secteur privé connaissent Stephanie. Elle est l'artisane - derrière Industrie Canada et le ministère de la Justice - de la réflexion très importante qui se fait actuellement autour du modèle de code de l'Association canadienne de normalisation du point de vue de la protection de la vie privée et des entreprises.

Stephanie, allez-y.

.1210

Mme Stephanie Perrin (conseillère spéciale en politique, Analyse et planification à long terme, ministère de l'Industrie): Merci.

Comme vous le savez, le gouvernement a pris un engagement dans sa réponse au rapport du Comité consultatif sur l'autoroute de l'information, qui portait sur ce qui s'impose en matière de protection des citoyens. Ce comité du secteur privé recommandait qu'un projet de loi sur la protection de la vie privée soit déposé et qu'il s'inspire de la norme nationale canadienne élaborée par l'Association canadienne de normalisation, à savoir le modèle de code de l'association en matière de protection de la vie privée.

C'est le 23 mai de l'année dernière que les ministres de la Justice et de l'Industrie ont répondu à cette recommandation en annonçant que le Parlement serait saisi d'un plan de protection de la vie privée. Pour l'instant, nous attendons la diffusion d'un document de consultation sur la question. Je ne peux pas vous dire quand ce document sera prêt, malheureusement. Nous sommes en pourparlers avec nos collègues provinciaux pour préparer une conférence des ministres sur l'autoroute de l'information, et la protection de la vie privée est un des points importants à l'ordre du jour de cette conférence. Il faudra voir quelle sera la réaction provinciale, car, comme vous le savez, la protection de la vie privée est de compétence législative partagée au Canada.

Voilà donc où en sont les choses, en résumé. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

La présidente: Je pense qu'on a reconnu l'urgence de la question, et je pense que l'on peut dire qu'il va se passer quelque chose d'ici à un an. Le ministre, si je ne m'abuse, a affirmé qu'il y aurait quelque chose d'ici à 1998, n'est-ce pas?

Mme Perrin: Le ministre Rock a pris un engagement en septembre à la conférence des commissaires à la protection de la vie privée et a dit que ce projet de loi serait en vigueur d'ici à l'an 2000. Nous savons tous qu'il faut du temps pour adopter une mesure législative, de sorte que vous pouvez prévoir tout de suite quand le projet de loi sera déposé. Nous espérons que le document de consultation sera diffusé dans les plus brefs délais pour que soit entrepris le genre de débat qu'on a réclamé ici même autour de cette table.

Mme Moll: Une brève question complémentaire, madame la présidente. Pourquoi n'a-t-on pas eu accès à cela? J'aurais aimé savoir avant le début de la séance qu'il existait des renseignements de cette nature, et cela aurait peut-être influencé nos discussions.

La présidente: J'ai essayé de circonscrire la discussion, comme en témoignent les documents qui vous ont été envoyés. Nous voyons les choses sous l'angle des droits de la personne par rapport à la protection de la vie privée. Les ministères de l'Industrie et de la Justice réfléchissent aux droits commerciaux.

Mme Steeves: David Lyon.

M. Lyon: Je suis un petit peu en retard, car je voudrais répondre à ce qui a été dit sur les potentialités et les collectivités.

Les potentialités sont capitales, car ce que l'on appelle parfois des ombres de données, ou des images de données, peuvent avoir des conséquences bien réelles pour la gestion, la coordination et le contrôle de bien des secteurs, et cela même si elles ne sont pas reliées directement à des situations réelles ou même si elles ne sont pas reliées directement à ce que nous pensons ou savons que nous sommes. Voilà pourquoi les potentialités sont si importantes même si elles ne reflètent pas avec justesse ce que nous pensons être des situations réelles.

Elles sont reliées également aux collectivités, car nous croyons vivre dans une société participative et démocratique où l'on nous garantit une confiance mutuelle, parce que dans nos rapports avec les autres nous révélons des choses sous le sceau de la confiance, nous révélons certaines choses suivant les situations. C'est une question sociale très différente de la question résiduelle de la protection de la vie privée.

Les remarques portant sur les potentialités et celles portant sur les collectivités à mon avis se marient très bien.

Mme Steeves: Merci beaucoup.

Monsieur Long.

M. Murray Long (témoignage à titre personnel): Je suis conseiller en protection de la vie privée et je travaille à mon compte. Moi aussi je suis venu en autobus ce matin. Je ne sais pas ce que cela révèle sur moi, ou comment ma compagnie d'assurances ou ma banque utiliseront ce renseignement.

La présidente: Vous voulez dire que cela n'est pas uniquement une question de gènes ou d'hormones, n'est-ce pas?

M. Long: On m'a aussi filmé avec une caméra vidéo, et ces images pourraient être transmises à ma banque. Qui sait?

J'ai deux observations à faire. D'abord, il y a toute cette question des tests génétiques, qui, à mon avis, ne posent pas seulement une question de protection de la vie privée, mais aussi une question fondamentale de déontologie.

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Comme le mentionnait David Lyon, il s'agit de recherches médicales prédictives. Mais cela ne signifie pas pour autant que les prévisions se réaliseront. Cette recherche permet simplement de détecter certains indices de ce qui pourrait arriver. Ces renseignements doivent être administrés en fonction de lignes directrices en matière de déontologie de façon à ce qu'ils ne puissent être utilisés pour des futilités.

Nous savons que les sociétés d'assurances, comme tant d'autres institutions économiques, évitent à tout prix les risques. Le fait que l'on puisse recueillir de tels renseignements, démontrer que quelqu'un ne correspond pas à la norme, prédire non pas que cette personne aura un problème, mais plutôt qu'elle pourrait en avoir un... Ces théories sur la prédisposition à certains problèmes, sur ces facteurs de risque, finissent par être utilisées au détriment des gens.

Le principal problème, c'est que l'institution prendra les décisions en fonction de ses intérêts. Il est très difficile, lorsque cela se produit, de contester cette décision et de gagner la bataille. Il est très important de régir l'utilisation de la recherche génétique en fonction de lignes directrices rigoureuses en matière de déontologie, pour éviter les usages inutiles. Car l'utilisation de cette recherche en vue d'obtenir des avantages économiques indirects peut être futile, et mérite une vaste consultation de la société.

Deuxièmement, il est absolument impératif que nous disposions d'un cadre législatif. Ce n'est pas une panacée, mais, de concert avec l'information du public, c'est une solution qui peut résoudre bien des problèmes.

Également, ce cadre législatif ne saurait être imposé simplement par le gouvernement fédéral, puisque ce gouvernement n'a pas compétence sur une très grande partie de l'activité économique canadienne, qui relève plutôt de la compétence des provinces. Il est donc très important que les provinces collaborent entre elles et, de concert avec le gouvernement fédéral, mettent en place un cadre législatif harmonisé qui s'appliquera sans égard aux frontières économiques pour régir tous les aspects de notre vie économique et personnelle.

Prenez par exemple l'Internet. On ne sait jamais où les données s'en vont. Il peut s'agir d'un centre de données à Dayton, en Ohio, ou à Los Angeles, ou encore à Moncton. Par conséquent, au Canada du moins, il nous faut avoir un cadre législatif général de façon à éviter que soient créées des banques de données occultes. Ce cadre garantirait également que des normes communes s'appliquent, de façon à ce que tous les citoyens sachent que les renseignements personnels à leur sujet sont régis en fonction des mêmes lignes directrices.

Merci.

Mme Steeves: Merci beaucoup.

M. Evert Hoogers (représentant syndical national, Syndicat des postiers du Canada): Merci.

Je travaille dans un milieu très automatisé et très surveillé: les bureaux de poste. Par conséquent, je sais personnellement à quel point la surveillance électronique et l'utilisation de la télévision en circuit fermé peuvent constituer une intrusion dans votre vie privée. Je sais cela depuis bien des années. J'en parle depuis de nombreuses années et j'examine depuis longtemps cette question avec mon syndicat. Nous savons un peu, également, que si les travailleurs ont un problème, ils peuvent le résoudre en étant solidaires. Par exemple, dans mon syndicat, on a pu se débarrasser il y a dix ans de la télévision en circuit fermé qui servait aux enquêtes.

Je suis assez chanceux, parce que mon syndicat est prêt à me défendre pour ce genre de questions. J'ai également la chance de travailler pour un organisme régi par le gouvernement fédéral. Cela signifie que dans une certaine mesure nous sommes protégés par la Loi sur la protection des renseignements personnels. Ce qui m'inquiète, toutefois, c'est que des millions de travailleurs subissent chaque jour une intrusion dans leur vie personnelle, intrusion qui s'accroît au même rythme qu'évolue la technologie.

Mes propos montrent un peu pourquoi il est si important de contrôler la technologie. Dès 1982, les travailleurs de ces organismes avaient affirmé devant le groupe de travail sur la microtechnologie et l'emploi de Travail Canada que la surveillance en circuit fermé des travailleurs constituait une grossière intrusion dans la vie privée et devait être interdite. Nous sommes maintenant en 1997, et depuis 15 ans rien n'a été fait.

Les organismes gouvernementaux avaient reconnu à cette époque qu'il y avait un problème. Aujourd'hui, tout le monde reconnaît ce problème. On en parle et on a à ce sujet des discussions très intéressantes. Je suis heureux d'apprendre qu'il y a eu certains progrès. D'ici à l'an 2000, peut-être, des mesures pourront être appliquées pour résoudre d'autres problèmes.

.1220

J'en appelle à votre comité pour qu'il reconnaisse qu'à titre de comité du gouvernement, il lui incombe non seulement de déclarer clairement quelle est sa position sur cette question d'atteinte à la vie privée en milieu de travail, mais aussi d'insister pour qu'une loi soit adoptée très rapidement pour mettre fin au problème. Tant de choses pourraient être faites. Ce n'est pas que les problèmes soient si complexes, ni dans la théorie ni dans la pratique, qu'il soit impossible de les régler.

Il y a donc de nombreuses solutions et j'exhorte votre comité à veiller à ce que le problème soit réglé.

Mme Steeves: Merci beaucoup de vos commentaires.

Il nous reste environ huit minutes dans nos consultations. M. Péladeau souhaite faire des observations, de même que le professeur Crelinsten. Je demanderai ensuite si les témoins ont d'autres observations à faire, eux ou les membres du comité.

[Français]

M. Péladeau: J'avais demandé d'intervenir plus vers la fin afin de permettre aux gens de s'exprimer, parce que je m'exprime évidemment ici comme expert. Je désirais soulever certains points à la suite de la discussion.

Ce comité s'occupe de droits de la personne. Les enjeux de l'utilisation de renseignements personnels ne sont pas liés à un seul droit de la personne, qui serait le droit à la vie privée. En fait, j'ai déjà fait l'exercice de prendre le livre intitulé Thesaurus: Droits de l'homme l'Université d'Ottawa et en parcourant tous les usages possibles d'une information personnelle, je suis tombé sur 150 concepts de droits de la personne qui pourraient être affectés. Il peut s'agir de choses aussi fondamentales que le droit à la santé, le droit à l'éducation, le droit de vote, la liberté de circulation, etc.

J'exprime ici une opinion très personnelle. La question de la vie privée est peut-être notre entrée sur ces questions, bien qu'elle soit une fenêtre passablement étroite. Au chapitre des droits de la personne, on doit étudier l'ensemble des questions de droits de la personne soulevées par l'usage de renseignements personnels, dont la collecte et les questions de surveillance. Cela nous ramène justement à cette question entre question individuelle et question sociale et communautaire.

Un autre élément entre aussi en ligne de compte. J'étudie des projets sur le terrain, entre autres dans le domaine de l'informatisation de la santé, et je fais une enquête sur une quarantaine de projets d'informatisation. Certains projets visent carrément à mettre en réseau toute l'information de santé pour qu'elle circule d'un bout à l'autre de la planète. On se rend compte que quand on discute avec les gens, ils parlent spontanément de protection de la vie privée et des renseignements personnels. Mais quand on creuse, on se rend compte que les vrais enjeux sont d'ordre social et portent sur les valeurs. On a constaté que 15 p. 100 des projets avaient échoué, cela essentiellement sur des enjeux de questions de pouvoirs, de conflits de valeurs ou conflits d'éthique, donc des enjeux beaucoup plus larges.

En conclusion, je dirai que l'enjeu est très très large et qu'il implique énormément de questions de valeurs et de pouvoirs. Il faut l'aborder dans une vision résolument prospective. Nous sommes aujourd'hui dans une société qui s'engage dans le développement technologique et nous devons nous demander où nous voulons aller à l'avenir, quelle société nous voulons construire et comment les technologies pourront nous servir.

Pour garder cette perspective, certaines agences spécialisées ont un rôle important à jouer, dont le commissaire à la protection de la vie privée et le Conseil consultatif national de l'autoroute électronique. En bout de piste, un des endroits privilégiés, au-delà de toute cette expertise technocratique - je suis un technocrate et un expert - , est à mon avis un forum tel un forum parlementaire, où les citoyens ont plus facilement accès à cette expertise, où ils ont plus facilement le pouvoir de s'exprimer et où les débats pourront se faire de façon plus large en tenant compte de tous les enjeux possibles.

C'est le commentaire que je voulais faire. Merci.

[Traduction]

Mme Steeves: Merci beaucoup.

Monsieur Crelinsten.

M. Ronald Crelinsten (professeur, Faculté de criminologie, Université d'Ottawa): Merci. J'aimerais également revenir à ce dernier commentaire et féliciter le comité. On a parlé de gestion du risque, mais dans ce cas-ci, ce risque touche les droits de la personne. Tout tourne autour de cela. C'est l'un des principaux risques.

Une brève observation au sujet de l'Europe et de l'antiterrorisme. À Wiesbaden, en Allemagne, on a mis au point une vaste base de données de façon à détecter les terroristes éventuels. Cette base de données sert maintenant à retracer les réfugiés.

.1225

Le concept du glissement des fonctions, qu'on trouve je crois dans la troisième étude de cas, est un concept très important car il illustre l'une des grandes difficultés de l'élaboration des politiques. On dit qu'il y aura des élections cette année. Les politiques doivent être élaborées très lentement, généralement de façon progressive, et c'est également de cette façon que se fait le glissement des fonctions. Ces choses-là se font sur une longue période de temps.

Quelqu'un a dit que la technologie n'avait pas d'importance, mais elle évolue. Je suis contente que Geoffrey Gurd ait dit que la technologie change, mais il faut longtemps pour s'en rendre compte. Les paradigmes aussi évoluent lentement. Comment peut-on élaborer des politiques quand on ne sait pas ce qui se produira à long terme?

L'une des études de cas était datée de 2004, mais lorsque je l'ai lue je me suis dit que cela se produisait déjà. Vos scénarios existent déjà dans la réalité, ils ne sont pas limités à l'avenir. C'est pourquoi nous vous disons qu'il est important d'agir maintenant.

Vous avez à votre disposition toute une gamme d'outils d'intervention et vous devez travailler de concert avec le secteur privé puisque nous vivons dans un climat de privatisation, surtout en matière de droit pénal. Nous l'avons constaté. Comment peut-on amener le secteur privé à s'autodiscipliner? Faut-il imposer des sanctions pour mauvais usage d'informations? Devons-nous créer des murs coupe-feu, comme la présidente l'a mentionné? Toute cette action doit être concertée.

Je vous souhaite bonne chance. C'est très difficile de prévoir l'avenir lorsqu'on dispose d'aussi peu de temps. Merci.

La présidente: Nous entendrons deux autres intervenants.

Mme Marnie McCall (directrice, Recherche sur les politiques, Association des consommateurs du Canada): Je m'appelle Marnie McCall, je suis directrice de la recherche sur les politiques à l'Association des consommateurs du Canada.

C'est avec plaisir que j'ai écouté M. Rubin et M. Hoogers. M. Rubin a dit qu'il avait témoigné la première fois sur ce sujet en 1978. M. Hoogers a parlé d'une recommandation qui datait de 1982. Pour sa part, l'Association des consommateurs du Canada a fait une première recommandation au gouvernement fédéral en 1973. Cela fait longtemps - très très longtemps. Très peu a été fait.

La Loi sur la protection des renseignements personnels était un pas dans la bonne direction. Comme l'ont dit tous les groupes, je crois, le commissaire à la protection de la vie privée n'a que des pouvoirs consultatifs. Il n'a pas le pouvoir de voir à l'exécution de la loi non plus que celui d'imposer des sanctions. Les gens estiment que c'est assez. Voilà 12 ou 13 ans maintenant que nous avons un commissaire à la protection de la vie privée. On peut maintenant affirmer qu'un pouvoir consultatif n'est pas suffisant et qu'il conviendrait d'augmenter les pouvoirs du commissaire.

L'Association des consommateurs a réclamé l'adoption du code modèle de l'Association canadienne de normalisation comme norme minimale, soit de façon sectorielle, soit au moyen d'une loi-cadre. Nous appuyons l'adoption d'une loi-cadre. Pour être pragmatique, je crois qu'une telle loi sera adoptée pour répondre aux exigences du commerce international avec l'Union européenne. Tant qu'à devoir se plier à la directive de la CE, autant adopter une loi.

Mon message, c'est que c'est très important, c'est même essentiel pour les consommateurs. Je suis d'un optimisme prudent et je crois qu'il n'est pas trop tard, mais si nous attendons encore trop longtemps, nous ne serons plus en mesure de reprendre la situation en mains.

Cela dit, sur une note plus personnelle, j'aimerais savoir comment je peux faire supprimer mon numéro de permis de conduire dans l'ordinateur à l'entrée de l'immeuble, car je suis également inquiète des mesures de sécurité appliquées dans cet immeuble. Je crois que vous devriez en être mis au courant. Vous n'avez peut-être pas besoin de subir toutes ces mesures de sécurité parce que vous travaillez ici.

Au cas où vous ne le sauriez pas, pour entrer dans cet immeuble du Parlement, il faut passer par l'étage inférieur. On vous fait ensuite traverser une barrière qui détecte le métal, comme dans les aéroports. Votre valise, votre sac à main, votre manteau et vos autres effets personnels sont examinés dans une machine à rayon X. Ensuite, vous devez vous rendre au comptoir et montrer des cartes d'identité dont les données sont saisies sur ordinateur. Je suis bien d'accord pour montrer mon permis de conduire et faire vérifier que je ressemble approximativement à la photo qui s'y trouve pour venir ensuite à la salle du comité. Ce que je n'aime pas, c'est que le numéro de mon permis de conduire se trouve dans l'ordinateur du service de sécurité de la Chambre des communes.

Je reviens à cette femme qui disait avoir l'impression de posséder ses renseignements personnels si elle peut les fournir et les récupérer par la suite. Ici, j'ai donné des renseignements mais je ne crois pas pouvoir les récupérer. Le nombre de fois où je viens au Parlement ne pose pas à mon avis un problème de sécurité. Ma photo se trouve sur mon permis de conduire, il suffit de vérifier que mon visage correspond à cette photo et que mon nom figure sur la liste. Je crois que c'est suffisant.

.1230

Mais je m'écarte de notre sujet d'aujourd'hui. Il faut que soit adoptée une loi-cadre pour la protection des renseignements personnels, et ce, dès maintenant. N'attendons pas que la Communauté européenne nous y oblige; réfléchissons-y et faisons-le de notre propre initiative.

La présidente: Je vous remercie de ces renseignements que vous avez fournis aux députés. Nous ferons une visite de la Chambre des communes plus tard, aujourd'hui, après la période des questions. Il sera intéressant de prendre note de vos observations. Nous examinerons ce que vous nous avez dit, au sujet de la saisie des données de votre permis de conduire, ainsi que les autres questions qui seront portées à notre attention à 15 h 30.

Nous entendrons un dernier intervenant et quelques observations, s'il y en a, car nous serons obligés de lever la séance.

[Français]

M. André Thouin (coordonnateur ministériel de la protection de la vie privée et de l'accès à l'information, Gendarmerie royale du Canada): Je m'appelle André Thouin et je travaille à la GRC.

On a soulevé un intérêt pour les agences d'application de la loi. Mme Rheaume a parlé d'un délai de 30 jours. Je me permets de préciser qu'il s'agit d'un délai que prévoit la loi et qui s'applique à tout le monde. Ce délai cause à des institutions de l'ampleur de la GRC de sérieux problèmes parce qu'il est difficile de satisfaire aux besoins de tous les demandeurs en raison du volume de demandes.

Les discussions tenues ce matin au sujet de l'installation de vidéocaméras dans des lieux publics ont retenu mon attention. Je me demande quel est vraiment le problème qu'on essaie de régler. On a parlé d'un problème social. On éprouve beaucoup de soucis ou d'inquiétude au niveau de la sécurité. Si on installe des caméras un peu partout, c'est parce qu'il y a un problème de sécurité pour la population. Ainsi, les points qui ont fait l'objet des discussions deviennent ni plus ni moins, pour une agence d'application de la loi, des outils avec lesquels elle peut travailler. D'un point de vue policier, la clé, c'est qu'on a besoin d'outils pour travailler dans un contexte qui vise à assurer le bien-être social, soit en appliquant la loi et en combattant le crime.

La solution réside dans une bonne réglementation et un bon contrôle des outils. Un autre élément très important est la consistance: on doit utiliser l'information policière à des fins policières et elle doit être contrôlée et réglementée. Nous éviterons ainsi des zones grises, des abus et des accidents de parcours.

La présidente: Merci beaucoup de votre intervention. Vous aurez certainement un appui au niveau de la sécurité. Mais on se demande si la sécurité est accrue. C'est une question qui se pose après que la Jeep est entrée dans nos corridors.

Que faites-vous des vidéos que vous avez filmés? Est-ce que vous les conservez? Avez-vous le droit de les utiliser? Comment disposez-vous de cette information et comment la classifiez-vous? Comment se retrouve-t-on là-dedans?

[Traduction]

Si je vais trop vite, allez-vous me donner une contravention?

[Français]

M. Thouin: C'est ce que je me demande aussi. On parle d'un contrôle et d'une réglementation de leur usage. Il faut que cet usage soit compatible et que l'information qu'on recueille dans un but précis soit utilisée afin de mieux protéger les gens et d'éliminer de telles situations.

La présidente: Vos démarches sont actuellement régies par un certain encadrement, n'est-ce pas?

M. Thouin: C'est exact.

La présidente: Merci. Nous devrions être soulagés de savoir qu'elles s'effectuent dans un encadrement. Nous nous pencherons sur cette question cet après-midi.

[Traduction]

Mme Steeves: Stéphanie, vous aviez quelque chose à ajouter?

Mme Perrin: J'allais simplement ajouter que les gens semblent très intéressés par la possibilité d'adopter une loi. Si nous pouvions avoir une liste des personnes présentes, avec leur permission, nous pourrions leur envoyer le document de consultation lorsqu'il sera publié. Autrement, vous pourriez me donner votre carte d'affaires, mais ce serait plus facile si je pouvais envoyer le document à tous les gens qui sont inscrits à la liste.

.1235

Comme on l'a dit précédemment, beaucoup de choses peuvent être faites, c'est certain, mais ce n'est pas une mince affaire que de rédiger cette mesure législative et de mettre en place les politiques qui garantiront des résultats. Nous avons besoin de toute l'aide que nous pouvons obtenir.

La présidente: Même si je n'aime pas beaucoup cette façon de procéder, nous pourrions peut-être appliquer l'abonnement par défaut. Vous avez tous entendu l'invitation lancée par Industrie Canada par le truchement de son directeur général. Je crois que c'est bien cela. Bon, je viens de vous nommer sous-ministre adjoint.

Des voix: Oh, oh!

La présidente: Il n'y a que les gens d'ici pour comprendre à quel point tous ces propos sont futiles.

Conformément à la méthode de l'abonnement par défaut, si vous ne voulez pas recevoir le livre blanc ou le document de consultation, veuillez en informer le greffier. Autrement, vous serez automatiquement inscrits à la liste. Nous avons besoin de votre consentement éclairé. Merci.

Un certain nombre de députés veulent faire des observations, mais voyons d'abord si notre premier groupe de témoins souhaite faire des observations pour conclure.

Vous vouliez laisser les députés parler d'abord?

Mme Steeves: Mme Hayes et M. Bernier souhaitaient prendre la parole, n'est-ce pas?

Madame Hayes.

Mme Hayes: Je suis abasourdie par ce que j'ai entendu. Certaines idées étaient très intéressantes.

À titre de législateurs, nous devons nous rappeler que le droit à la vie privée doit s'appliquer de façon constante, et ce, non seulement dans les trois secteurs que nous avons proposés, mais surtout dans la façon dont le gouvernement traite avec la population canadienne.

Lorsqu'on parle de droits collectifs et de potentialités, j'aimerais que le comité détermine, si l'on décide d'opter pour une loi sur la protection de la vie privée, dans quelle mesure une telle loi serait conforme au traitement qui est fait, par exemple, en droit pénal, d'éléments comme la connaissance publique de torts ou d'activités criminelles éventuels et qu'il détermine également quelles sont nos fonctions relativement aux lois en matière pénale.

On a dit qu'en Europe, le droit à la vie privée s'appliquait à la vie familiale, au domicile et à la correspondance. Il faut donc se demander quel droit le gouvernement a de légiférer relativement aux familles. Cela nous amène à des questions comme le droit à la propriété, la discipline appliquée aux enfants et la relation entre les droits des parents et ceux des enfants.

Nous avons également parlé d'équité en matière d'emploi, entre autres, ce qui nous amène aux questions de viabilité commerciale et des droits des entreprises à l'égard des plans d'affaires, comparativement aux lois et aux règlements que le gouvernement peut adopter dans ces domaines.

Tout cela relève de la vie privée et dépend des relations que le gouvernement entretient avec différents éléments de la société. Cela fait également partie des enjeux.

La présidente: Merci beaucoup. C'est une ample discussion à laquelle le comité devra se livrer lorsque nous rédigerons notre rapport.

Russell, vouliez-vous dire quelque chose?

M. MacLellan: Pas maintenant.

La présidente: Andy? D'accord.

Je vous rappelle que si vous avez d'autres renseignements, des questions ou des observations dont vous voudriez faire part au comité, il faut les faire parvenir au greffier de façon à ce qu'ils soient intégrés au compte rendu du comité et fassent partie des éléments qui seront pris en compte lorsque nous commencerons à rédiger notre rapport.

Je tiens à vous présenter le greffier du comité. Il s'agit de M. Wayne Cole.

Vous avez déjà rencontré notre coordinatrice, Valerie.

Cela m'arrive toujours. Je les connais si bien que j'oublie leur nom.

Nancy Holmes, Susan Alter et Bill Young s'occupent de la recherche, des politiques et de toutes ces choses. Ils nous sont prêtés par la Bibliothèque du Parlement. Je puis vous assurer qu'ils jouent un rôle essentiel dans notre entreprise.

Il est maintenant temps pour moi de vous remercier d'être venus nous rencontrer. Vous avez parcouru une longue route et traversé une tempête de neige pour le faire. Nous ne devrions plus avoir de tempête de neige maintenant. Je vous remercie de votre participation. Au nom de mes collègues, je vous remercie d'avoir élargi nos horizons et augmenté la portée de notre entreprise.

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Ne vous attendez pas à des miracles du jour au lendemain. Ce ne serait pas réaliste. On nous a donné des indications très claires et ample matière à réflexion sur ce dont il nous faudra tenir compte dans notre visite de tout le pays. Nous entendrons ainsi les différents points de vue selon les régions de notre pays. Ce sera très intéressant, car il y a là un bon mélange.

Nous allons donc continuer d'écouter ce que les gens nous diront sur la gestion du risque, les potentialités, les droits de la personne ainsi que les effets primaires et secondaires, ce qui est, en résumé, l'essentiel de ce que j'ai entendu.

John, vous vouliez faire une observation? J'ai bien fait cela? Merci beaucoup.

La séance est suspendue. Merci.

Nous allons maintenant siéger à huis clos, s'il vous plaît.

[La séance se poursuit à huis clos]

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