[Enregistrement électronique]
Le mercredi 19 mars 1997
[Traduction]
La présidente (Mme Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.)): Je déclare ouverte la séance du Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées.
La réunion d'aujourd'hui a été retardée. J'espère que vous nous le pardonnerez; comme vous le savez, nous devons respecter les règles et la procédure de la Chambre. Une question sera mise aux voix d'ici 30 ou 45 minutes. Nous allons commencer les délibérations en attendant la sonnerie d'appel, qui indiquera que nous devons vous laisser. Je suis désolée que cela doive retarder nos délibérations justement aujourd'hui. Les affaires du gouvernement se poursuivent, même quand nous accueillons deux invitées de marque comme aujourd'hui.
Notre séance revêt une importance spéciale, parce que nous allons entendre ces deux témoins très particuliers. Il s'agit de Lynda Nancoo et de Laurie Bellefontaine, les lauréates de 1994 et de 1995 de la Bourse de recherches de la Flamme du centenaire.
Nous vous souhaitons chaleureusement la bienvenue. Nous sommes ravis que vous puissiez être des nôtres aujourd'hui.
La Bourse de recherches de la Flamme du centenaire a été créée par une loi du Parlement en 1991. Elle représente un effort du gouvernement du Canada et de notre comité en particulier - elle relève du comité - pour faire connaître grâce à ce message de vie, d'espoir et d'esprit communautaire, les réalisations des Canadiens atteints d'invalidité. L'argent ainsi distribué provient des pièces de monnaie recueillies dans la fontaine du Centenaire qui, comme vous le savez, se trouve au pied de la Colline parlementaire. Évidemment, tous les dons privés sont aussi acceptés avec reconnaissance.
La Loi sur la bourse de recherche de la flamme du centenaire, adoptée par le Parlement il y a près de six ans aujourd'hui, prévoit l'octroi d'une bourse annuelle à un Canadien atteint d'invalidité pour lui permettre de réaliser une étude et de produire un rapport sur la contribution de personnes atteintes d'invalidité à la vie publique. Trop souvent, nous oublions de voir non pas les handicaps mais les capacités des personnes. Nous en avons de très bons exemples avec nous aujourd'hui, et nous sommes très heureux que ces deux boursières aient pu se joindre à nous.
Mme Lynda Nancoo, de Toronto, a reçu la bourse en 1994; elle a beaucoup fait par ses écrits sur la question de l'invalidité et des droits de la personne, une question dont le comité traite régulièrement.
Lynda s'est aussi intéressée de très près au développement communautaire. Elle a collaboré à la fondation de la Ethno-racial People With Disabilities Coalition of Ontario, ce qui n'a pas été facile. Cet organisme a été créé pour défendre les droits des membres de minorités raciales qui sont atteints d'invalidité. L'engagement de Lynda s'exprime dans le rapport qu'elle a rédigé sur la vie de cinq femmes atteintes d'invalidité et qui sont membres de groupes ethniques ou raciaux et sur les efforts de ces femmes pour modifier les mentalités au sein de leurs collectivités. Évidemment, c'est là que nous vivons tous. Le simple fait d'avoir réalisé cette étude et d'insuffler...
Par la suite, Lynda nous dira de quelle façon elle a abordé la question et qui étaient ces personnes.
Elle a examiné les problèmes que ces femmes connaissaient relativement aux services existants, à leur participation à la vie publique et au processus législatif et à leurs efforts pour surmonter les obstacles qui les empêchaient de participer pleinement à la vie communautaire. Autrement dit, Lynda, vous avez véritablement travaillé sur les questions d'accès et sur l'intégrité des droits.
Notre deuxième invitée, Laurie Bellefontaine, a reçu la Bourse de recherches de la Flamme du centenaire en 1995. Laurie s'efforce depuis plusieurs années d'éliminer les obstacles pour les personnes atteintes d'invalidité dans son lieu de travail et sa collectivité. Elle a cherché à sensibiliser ses concitoyens et à aplanir les obstacles, en particulier pour les personnes ayant une déficience visuelle.
Je suis très heureuse de voir que vous êtes venue avec une amie et avec votre chien-guide. J'aimerais que vous nous racontiez la façon dont vous avez trouvé un nom à votre chien. Je sais que nous sommes tous curieux de l'apprendre.
Laurie s'est attaquée à l'une des plus importantes questions auxquelles se heurtent les personnes ayant une déficience visuelle - c'est-à-dire les personnes incapables de lire les imprimés - notamment, l'accès à l'information, et elle a fait campagne pour que les documents soient offerts sous divers formats. Je suis très heureuse de vous informer que le comité publie aussi ses travaux sous forme non traditionnelle.
L'intérêt et l'engagement de Laurie se retrouvent dans le travail qu'elle a réalisé. Elle a utilisé la bourse pour faire connaître aux Canadiens les travaux de Charles Crane et de Paul et Judith Thiele, les fondateurs de la Charles Crane Memorial Library à l'Université de la Colombie-Britannique, la très belle université avec laquelle vous avez réalisé ce projet.
Le centre de documentation a été créé pour que les personnes ayant des déficiences visuelles puissent poursuivre des études universitaires d'aussi bonne qualité que celles des étudiants qui n'ont pas de telles déficiences. C'est là que joue véritablement le concept d'égalité des chances, relativement aux résultats équivalents que des personnes peuvent obtenir grâce à des mesures d'adaptation et d'accessibilité. L'entreprise des Thiele, comme l'a si bien dit Laurie, a permis à des personnes aveugles d'utiliser l'information auparavant inexploitable d'une bibliothèque pour réaliser leur rêve et poursuivre des études universitaires.
Je vais déposer les rapports de Lynda et de Laurie à la Chambre des communes, au nom du comité et dans l'intérêt de tous les Canadiens. Des exemplaires de ces rapports seront conservés à la Bibliothèque nationale du Canada et à la Bibliothèque du Parlement.
J'aimerais demander à nos deux invitées de bien vouloir résumer leurs rapports à l'intention des membres du comité permanent, que j'aimerais maintenant leur présenter.
Je suis désolée que tous ne soient pas présents. C'est en raison du vote et du changement d'horaire. Mais parmi ceux d'entre nous qui sont ici, je vais commencer par Maurice.
[Français]
M. Maurice Bernier (Mégantic - Compton - Stanstead, BQ): Je m'appelleMaurice Bernier. Je suis député de Mégantic - Compton - Stanstead, une circonscription de l'Estrie, au Québec.
La présidente: Et vous êtes vice-président du comité.
M. Maurice Bernier: Et avec beaucoup de bonheur et d'honneur, je suis le vice-président de Mme Finestone.
[Traduction]
La présidente: Nous avons aussi des représentants du parti au pouvoir.
Mme Georgette Sheridan (Saskatoon - Humboldt, Lib.): Je suis Georgette Sheridan, députée de la Saskatchewan. Je représente ma circonscription de Saskatoon - Humboldt.
Mme Jean Augustine (Etobicoke - Lakeshore, Lib.): Je suis Mme Jean Augustine, députée d'Etobicoke - Lakeshore. Je voudrais moi aussi vous féliciter.
La présidente: Merci beaucoup.
Je vous demande, Lynda, d'avoir la bonté de nous présenter la personne qui vous accompagne et de nous résumer l'objet de vos recherches ainsi que les conclusions que vous avez tirées de votre expérience.
Mme Lynda Nancoo (lauréate 1994, Bourse de recherches de la Flamme du centenaire): Merci. Rudy Balcaran est avec moi. C'est un ami de la famille qui a eu l'amabilité de venir ici afin que je puisse trouver l'endroit.
J'ai commencé mes recherches en 1992, lorsque je me suis intéressée de près à la loi et aux droits de la personne dans le cas des personnes handicapées. Je me suis trouvée personnellement mêlée à des questions de violation des droits de la personne. Je croyais qu'il y avait des gens qui protégeaient mes droits. Je croyais que la loi me protégeait contre tout type de violation, en particulier dans le domaine de l'emploi.
Lorsque j'ai découvert que j'étais, moi-même, personnellement, touchée par des violations des droits de la personne, j'ai déposé une plainte en vertu de la loi contre une organisation. Dans le cadre de ce processus, j'ai constaté que d'autres femmes atteintes d'invalidité éprouvaient les mêmes difficultés. Nous nous sommes regroupées et nous avons formé la Ethno-racial People with Disabilities Coalition of Ontario.
Certaines de nos histoires figureront dans le livre que je m'apprête à rédiger. Malheureusement, on m'a dit que je ne pouvais pas entrer dans les détails tant qu'un avocat n'aurait pas examiné le contenu du livre et l'information au sujet de laquelle j'écris, parce que je nomme des organisations et des gens. En attendant, je ne pourrai pas divulguer à ma guise l'information. J'espère qu'au bout du compte, lorsque mon livre paraîtra, il provoquera des inquiétudes au sujet de la loi qui est censée protéger les droits des personnes handicapées dans tous les secteurs de la société, en particulier dans le domaine de l'emploi, qui est essentiel.
Les occasions d'emploi sont particulièrement importantes dans mon cas. L'an dernier, je n'ai même pas gagné 5 000 $. Il est très difficile de faire ce que je veux faire, en particulier de lutter pour les droits de la personne qui, à mon avis, sont bafoués. En 1992, et aujourd'hui encore en 1997, je n'ai pas pu trouver un emploi en raison de la plainte que j'avais déposée en matière de droits de la personne. J'ai essayé d'attirer l'attention en prenant la parole à des tribunes publiques et je vais enfin y parvenir grâce à mon livre. Je sais que ce qu'il y a dans mon livre suscitera des questions.
C'est tout ce que je peux dire au sujet de l'information contenue dans le livre, tant que je n'ai pas de nouvelles instructions de la part de mon éditeur. Je sais que cela n'est pas suffisant, mais j'espère avoir éveillé votre curiosité. Je vais certainement rester en contact afin que le résultat final, le livre, soit distribué à tous ceux d'entre vous qui sont ici aujourd'hui. Merci.
La présidente: Merci beaucoup, Lynda. Aujourd'hui, nous célébrons la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination, la discrimination raciale en particulier. De fait, j'ai présenté aujourd'hui à la Chambre un projet de règlement à cet égard.
Je peux vous dire que même si le Canada expose une vision d'ensemble dans la Charte des droits et des libertés où nous précisons spécifiquement que la non-discrimination est l'objectif qui fera du Canada un pays juste et équitable, ouvert à tous et où la tolérance et la compréhension des différences sont des choses reconnues, la diversité de notre société et sa réalité multiculturelle sont aussi inscrites dans notre charte comme valeurs à promouvoir. La vision a été élargie, elle s'est développée, elle a évolué, mais nous n'avons toujours pas atteint notre but.
Nous nous sommes heurtés à divers obstacles. Je suis heureuse de vous entendre décrire l'un d'entre eux, mais je suis désolée que cela puisse se produire. Je vous assure que si vous en parlez au personnel du comité, après la séance, nous examinerons la question pour voir ce que nous pouvons faire, premièrement pour faciliter la publication de votre histoire, afin qu'elle parvienne aux Canadiens, deuxièmement, parce que chaque histoire fait progresser le dossier et nous rapproche de notre objectif de non- discrimination dans une société libre et démocratique.
Je vous remercie beaucoup du travail et des efforts que vous avez déployés au profit des personnes atteintes d'invalidité qui sont membres de minorités visibles. D'une certaine façon, il s'agit là d'un double handicap.
Nous sommes impatients de voir et de lire votre livre. Je vous remercie d'être si franche avec nous aujourd'hui. J'espère que l'avenir sera plus rose pour vous et que vous arriverez bientôt à faire respecter votre droit à des perspectives économiques.
Mme Nancoo: Merci infiniment.
La présidente: John Godfrey vient d'arriver. John est de faction à la Chambre. Il est venu nous dire que la sonnerie d'appel se fait entendre.
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Elle n'avait pas commencé quand je suis parti, mais il s'agit peut-être d'une sonnerie d'une demi-heure. On nous demande au parloir.
[Français]
La présidente: A-t-on le temps?
M. Maurice Bernier: On a une demi-heure.
[Traduction]
La présidente: Très bien.
John, s'il vous plaît présentez-vous et mentionnez quelle circonscription vous représentez.
M. John Godfrey: Je suis John Godfrey, de Don Valley-Ouest, à Toronto. Je vous salue et je vous souhaite la bienvenue. Je suis désolé que nous soyons si bousculés aujourd'hui.
La présidente: C'est la Chambre qui est bousculée, pas nous, John. N'est-ce pas?
M. John Godfrey: C'est juste.
La présidente: Nous venons d'entendre Lynda Nancoo, boursière de 1994. Nous nous apprêtons à écouter ce que Laurie Bellefontaine a à dire.
Laurie, je vous demanderais de bien vouloir nous présenter la personne qui vous accompagne. Nous écouterons ensuite avec grand intérêt ce que vous avez à nous dire au sujet de votre projet.
Mme Laurie Bellefontaine (lauréate 1995, Bourse de recherches de la Flamme du centenaire): Il s'agit de Margaret Baker. Elle est présidente du Comité consultatif national de Revenu Canada. Je suis vraiment heureuse qu'elle ait pu venir avec moi aujourd'hui, tant à titre d'amie qu'à titre de collègue.
La présidente: Est-ce que vous travaillez à Revenu Canada?
Mme Bellefontaine: Oui, nous sommes toutes deux fonctionnaires à Revenu Canada.
La présidente: Très bien. Je vous demande de bien vouloir nous résumer ce que vous voulez nous dire, ce que vous aviez à faire relativement à l'exposé que vous avez présenté et pourquoi notre bourse vous a été décernée en 1995.
Mme Bellefontaine: Le comité a eu l'amabilité de m'accorder cette bourse, et je lui en suis très reconnaissante. La bourse m'a donné l'occasion de réaliser un projet que je caressais de longue date et d'écrire au sujet d'une question vitale pour les non- voyants, les malvoyants et les personnes souffrant de troubles visuels en général. Votre générosité m'a permis d'obtenir cette bourse, je vous en remercie.
J'ai étudié à l'Université de la Colombie-Britannique de 1981 à 1986, et cela n'aurait vraiment pas été possible sans l'appui de la Charles Crane Memorial Library. Comme je l'ai dit dans mes commentaires d'introduction, je menais une vie tout à fait ordinaire, j'étais chef de famille monoparentale et je travaillais à l'époque à Revenu Canada.
Il faut beaucoup de temps et d'énergie pour poursuivre des études, plus encore lorsqu'il vous faut constituer vos propres manuels et enregistrer des textes. Il vous faut encore plus de temps. Il vous faut encore plus d'énergie, mais le bon Dieu m'a donné à peu près la même quantité d'énergie qu'à tous les autres, et parfois cela ne me suffit pas. Je ne croyais vraiment pas que j'arriverais un jour à décrocher un diplôme universitaire.
Je suis allée à l'Université de la Colombie-Britannique et j'y ai passé cinq ans; j'ai travaillé très fort.
Je crois que c'est seulement quand j'ai quitté le milieu universitaire pour revenir sur le marché du travail que j'ai vraiment apprécié toute l'importance de la Charles Crane Memorial Library pour bien des gens, en particulier compte tenu du fait que son existence a souvent été menacée de bien des façons au fil des ans en raison des compressions budgétaires de la province.
Le gouvernement fédéral a accordé des fonds à la Crane Library à l'époque du PIL, le Programme des initiatives locales, mais la Crane Library a dû devenir autosuffisante et, comme tous les autres organismes, elle a dû fonctionner sur des bases économiques parfois plutôt fragiles.
Pourtant, le service qu'elle offre est d'une importance vitale parce que nous avons besoin d'information. La connaissance, c'est le pouvoir, c'est l'habilitation, et nous avons besoin d'être habilités afin de pouvoir occuper nos places au sein de la société.
Je me suis véritablement investie dans ce rapport et je me suis beaucoup attachée aux personnes dont il est question. Charles Crane a laissé un héritage incroyable sous la forme de ses travaux en braille. J'ai passé des heures dans cette bibliothèque. Je suis de ces gens qui se promènent dans les bibliothèques et feuillettent les livres au hasard pour lire deux ou trois paragraphes. J'aime chercher ainsi, et la Crane Library me donne la possibilité de le faire. Comme je l'ai dit dans mon rapport, la plupart des bibliothèques pour les aveugles, chose que j'ignorais, ne vous offrent pas cette liberté. Je ne savais même pas que c'était là une liberté et un privilège avant de pousser un peu mes recherches.
J'ai vu certains des travaux que Charles Crane a transcrit lui-même. Il était sourd et aveugle. Il transcrivait des ouvrages dans les années 30 et 40 au moyen d'une machine à écrire braille. Cela signifiait que quelqu'un devait épeler chaque mot, lettre par lettre, sur sa main. Mot par mot, il a transcrit de nombreux ouvrages qui se trouvent encore dans la collection.
Paul est toujours très actif. Il oeuvre au sein de la communauté. Il travaille en vue de la réinstallation de la Crane Library. Dans de nombreux dossiers, il se porte toujours vigoureusement à la défense des personnes atteintes de déficiences visuelles. Paul est là et il se porte bien, et j'en suis très heureuse.
La présidente: Laurie, je ne veux pas vous interrompre, mais est-ce que l'on recueille actuellement des fonds en vue d'agrandir la bibliothèque?
Mme Bellefontaine: Il y a un projet en cours. La bibliothèque s'est fusionnée avec le Disability Resource Centre. Sur les plans administratif et organisationnel, cela est logique, et la collecte de fonds devrait commencer sous peu. Des propositions ont été présentées, pour que l'on puisse bientôt s'attaquer à cette tâche.
La présidente: Très bien, merci.
Mme Bellefontaine: Je discutais avec Bill Young avant le début de la réunion. Il étudiait à l'UCB à l'époque où la Crane Library a ouvert ses portes. Comme je le lui ai fait remarquer, la bibliothèque se trouve toujours dans les mêmes locaux. Pourtant, la collection ne cesse de croître.
Je voulais simplement dire quelques mots au sujet de Judith Field, qui est morte en 1993. Comme je l'ai dit dans mon rapport, si Paul était le coeur de la Crane Library, Judy en était l'âme. Il émanait d'elle une force faite de sagesse et de calme. Elle était très déterminée. Elle est la première Canadienne aveugle et sans doute une des rares au monde, à avoir obtenu un diplôme en bibliothéconomie. Judy est encore très présente à la Crane Library.
La bibliothèque célébrera ses 29 ans le 4 avril. Les responsables ont hâte d'occuper de nouveaux locaux. Cette année, ils offrent pour la première fois des services à un étudiant étranger, un étudiant du Japon qui, je crois, étudie en bibliothéconomie. La bibliothèque a aussi aidé un étudiant à participer à un programme d'échanges avec Berkeley, dans le domaine des sciences politiques.
La bibliothèque continue son travail, et il faut qu'elle continue, parce qu'elle défend certainement la cause de ceux d'entre nous qui souffrent de déficiences visuelles. Comme je l'ai dit précédemment, l'accès à l'information est notre plus grave problème, parce que sans information nous sommes impuissants, nous sommes incapables de participer sur le même pied que les autres. C'est la raison pour laquelle j'ai rédigé mon rapport.
Le message est certainement que nous avons besoin de services tels que ceux qu'offre la bibliothèque, et il nous faut admirer le courage de ces personnes. C'est très décourageant de travailler sans cesse et de se battre pour quelque chose alors que le sol semble se dérober sous vos pieds constamment. Pourtant, ces personnes ont montré force et courage et elles ont vraiment donné à de nombreuses personnes, à l'échelle internationale, nationale et locale, un grand espoir et le courage de continuer à poursuivre leurs rêves.
Merci.
La présidente: Je crois que nous avons tous été très touchés par votre exposé. M. Bernier désire s'adresser à vous en premier.
[Français]
M. Maurice Bernier: J'aimerais d'abord remercier Mme Nancoo et Mme Bellefontaine d'avoir accepté l'invitation du comité de venir nous rencontrer et, naturellement, j'aimerais leur rendre hommage pour le travail qu'elles font pour la promotion des droits des personnes handicapées et pour obtenir les ressources dont elles ont besoin.
Malheureusement, je n'ai pas eu l'occasion de lire le document de Mme Bellefontaine, et j'ai compris que le texte de Mme Nancoo allait nous parvenir plus tard. C'est avec beaucoup d'intérêt que j'examinerai ces documents.
J'aimerais, en mon nom personnel, et je pense que mes collègues vont partager mon point de vue, vous dire qu'il est nécessaire d'avoir des services pour les personnes handicapées, ainsi que des lois qui permettent aux personnes handicapées d'avoir accès à ces services-là afin qu'elles puissent mener une vie aussi normale que possible, une vie qui se déroule un peu comme celle de l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes. Même si on arrive à avoir ce genre de lois et de services, vous savez très bien, puisque vous êtes des personnes vivant avec un handicap, que le combat pour la reconnaissance de vos droits ou tout simplement pour pouvoir participer à une vie normale se fait au quotidien, au jour le jour.
Je tiens à vous dire que c'est une initiative extraordinaire et à souligner votre apport à la société en tant que personnes handicapées. La population des personnes handicapées, comme la population en général, a besoin d'avoir des modèles. Vous êtes des modèles pour les personnes handicapées, mais également pour les personnes qui se pensent sans handicap. J'ai eu l'occasion dans ma vie de côtoyer des personnes handicapées. Souvent, quand je me regarde, j'ai l'impression d'être plus handicapé qu'un très grand nombre de personnes que j'ai l'occasion de rencontrer.
J'insiste sur le fait qu'autant les personnes handicapées que la population en général ont besoin de votre exemple, non seulement pour améliorer nos lois ou les services qu'on peut accorder aux personnes handicapées, mais aussi pour faire comprendre aux gens qu'on peut avoir des limitations dans sa vie et quand même être un actif incroyable pour notre société. Merci beaucoup.
La présidente: Merci, Maurice.
[Traduction]
Je dois vous dire, Laurie, que les membres du comité attendent certainement avec impatience la parution de votre ouvrage et qu'ils veilleront à ce qu'il soit publié en divers formats. Il sera certainement très émouvant de le feuilleter.
Georgette Sheridan.
Mme Georgette Sheridan: C'est à moi que revient l'honneur de vous remercier toutes deux d'être venues témoigner devant nous aujourd'hui et de nous avoir donné une idée non seulement des obstacles auxquels vous êtes confrontées, mais aussi de la façon dont vous en avez déjà surmonté de nombreux. J'aimerais faire écho aux commentaires de mon collègue, M. Bernier, pour ce qui est de l'importance de faire connaître la communauté dans son ensemble, comme vous le dites, et de lui offrir des modèles.
J'aimerais faire un commentaire au sujet de ce que Lynda a dit, un aspect qui m'a frappé. Elle a parlé des répercussions économiques du handicap. Elle a signalé qu'elle était à la fois atteinte d'une invalidité et qu'elle faisait partie d'une minorité visible. J'aimerais ajouter à cela le fait d'être femme.
Cette question me tient vraiment à coeur, parce que je sors tout juste d'un déjeuner où les femmes du caucus du Parti libéral ont rencontré le premier ministre pour examiner certaines questions de ce genre. Malheureusement, nous, femmes, n'avons pas encore obtenu l'égalité en milieu de travail pour ce qui est de la capacité de gagner sa vie, de la capacité économique, je voudrais donc dire que c'est encore un combat que nous devons livrer, toutes.
Je fais depuis peu partie du Comité des droits de la personne. J'y ai été nommée le mois dernier. Je remplace un autre député. Peu après notre élection, le Comité du développement des ressources humaines a commencé sa tournée pour examiner les politiques sociales et les autres mesures de notre gouvernement dans ce domaine.
Je me souviens d'une audience à Regina. En fait, Jean Augustine était avec moi. Il y avait de nombreux témoins de tous les horizons, le débat ne portait donc pas seulement sur les personnes handicapées ou les choses de ce genre. Il portait sur tous les aspects de la société. Un jeune homme s'est avancé et nous a parlé avec beaucoup d'éloquence. J'ai écouté. Lorsqu'il a eu fini, j'ai pensé qu'il devait être doyen d'une université, quelque chose de ce genre. Puis, il a déclaré, après son exposé sur ce que le gouvernement devrait faire en matière de politique sociale, qu'il était handicapé.
Il avait mené ses études jusqu'à je ne sais plus trop quel niveau à ce moment, car nous avons entendu de nombreux témoins différents. Il nous a raconté que lorsqu'il était à l'école secondaire on lui avait dit qu'en raison de son handicap il devrait peut-être devenir horloger et travailler chez Eaton, dans une petite cabine.
Je me suis rendu compte, Lynda, pendant que vous parliez, que de dire de telles choses à une jeune personne est un peu de l'aveuglement de la part des gens qui prennent ces décisions et font ces recommandations, et qui risquent d'orienter un adolescent dans la mauvaise direction.
Par conséquent, il est très important que ces histoires soient publiées. J'espère que votre livre réussira à le faire, pour que la population soit bien consciente des conséquences.
Enfin, Laurie, vous avez parlé de l'énergie et du fait que nous n'en avons jamais assez pour faire tout ce que nous avons à faire. Nous aussi, nous manquons parfois un peu d'énergie. Vous avez parlé de la vie quotidienne. Vous dites avoir une vie tout à fait ordinaire, mais il me semble que vous avez fait des efforts extraordinaires et que vous avez manifesté une force de caractère extraordinaire.
Je vous remercie toutes les deux d'être venues ici aujourd'hui, et je vous souhaite beaucoup de succès. Merci infiniment.
La présidente: Merci, Georgette. Jean, vous avez huit ou neuf minutes.
Mme Jean Augustine: J'utiliserai une minute à la fois.
Madame la présidente, je vais adresser moi aussi des félicitations à nos témoins. Je suis heureuse que vous ayez surmonté les difficultés et que vous soyez parvenues à réaliser ces deux travaux. C'est un exploit en soi d'être arrivé à ce point, de pouvoir dire voici un livre, une oeuvre terminée, quelque chose que l'on peut maintenant publier. Dans votre cas, Lynda, le document pourrait paraître très bientôt. Vous avez travaillé dans des conditions très difficiles.
Lynda, vous avez parlé de Charles qui a fait sa vie même s'il était sourd et aveugle, et vous avez tenté de vous imaginer ce que serait votre vie si vous étiez sourde. Je suis ici aujourd'hui et j'essaie de voir ce que je ferais si j'étais aveugle et si je voulais accomplir ce que vous avez accompli.
J'avais, il y a 30 ans, une amie qui était, je crois, directrice administrative, je crois, de l'Institut national canadien pour les aveugles, Elle s'appelait Louise Cowan. J'ai passé beaucoup de temps au bureau de l'INCA, rue Bayview, à Toronto. Vous devez connaître cet endroit, Lynda. J'y ai appris le braille et comment me servir de l'ancien... Comment est-ce que l'on appelait cela? Il y avait deux morceaux qu'il fallait mettre ensemble pour pouvoir faire des trous.
Mme Bellefontaine: Le poinçon et la tablette braille.
Mme Jean Augustine: C'est cela. J'ai commencé avec le vieux poinçon. Souvent, lorsque je retourne à l'INCA, je suis fière de certains des travaux à la traduction desquels j'ai pu contribuer. Pour ce qui est de certains des noms qui se trouvent sur les plantes à l'extérieur, je faisais partie de l'équipe affectée à ce genre de travaux.
J'ai aussi passé quelque temps à l'école pour les aveugles, aux environs de Niagara Falls. Je pensais que je serais en mesure d'enseigner aux aveugles, mais je me suis rendu compte que c'était vraiment une des tâches les plus difficiles que l'on pouvait envisager. Je me suis rapidement orientée vers ce que l'on appelait une école normale et j'ai enseigné dans le système d'éducation à Toronto.
Je suis donc consciente de ce que vous avez réalisé. Vous avez travaillé dans des conditions très difficiles. Le combat vient de ce que vous êtes handicapée, membre d'une minorité, femme, et chef de famille monoparentale. Doux Jésus, quelles autres difficultés avez-vous dû surmonter? Vous avez relevé tous les défis, et je vous en félicite, parce que je crois que vous avez fait de l'excellent travail. Je suis très heureuse de participer à ce que nous faisons ici.
La présidente: Merci beaucoup, Jean Augustine.
Il nous reste quatre ou cinq minutes. Nous devons aller voter - vous entendez la sonnerie d'appel - nous allons donc partir dès que John aura terminé ses commentaires et nous vous rejoindrons dans la salle Commonwealth tout de suite après le vote. Les deux présidents, le Président de la Chambre des communes et le Président du Sénat, viendront eux aussi rendre hommage à vos réalisations remarquables.
M. John Godfrey: Premièrement, j'aimerais vous féliciter. Deuxièmement, je voudrais vous exprimer les remerciements du comité pour les efforts que vous avez consacrés à ce travail.
Je dois dire, dans le cas de Laurie, que ma circonscription contient à la fois l'administration centrale de l'INCA, rue Bayview, où Jean a fait son apprentissage, et Voiceprint, une organisation qui préconise une nouvelle approche aux problèmes des personnes handicapées. Cette organisation exploite avec profit la technologie de la câblodistribution et des signaux alphanumériques. Je suis très conscient des questions que vous avez soulevées lorsque vous avez parlé de Charles Crane, qui est un véritable monument en lui-même, et je vous ai écoutée avec plaisir.
J'aimerais vous dire, Lynda, que je suis sensible aux difficultés que vous avez surmontées et que vous surmontez encore en ce qui concerne la dépression, simplement parce que j'ai vécu cette expérience dans ma propre famille.
Merci.
La présidente: Voulez-vous répondre, Laurie ou Lynda?
Mme Bellefontaine: Madame la présidente, auriez-vous l'amabilité, lorsque vous déposerez le rapport à la Chambre des communes, d'en déposer aussi la version audio?
La présidente: Certainement.
Mme Bellefontaine: Je vous en ai apporté un exemplaire.
La présidente: Vous avez apporté la version audio?
Mme Bellefontaine: J'ai apporté la version audio.
La présidente: Pour l'auditoire de CPaC, je précise que c'est la version qui sera imprimée sous forme traditionnelle. Vous avez été fort aimable, même si c'était là notre intention, de déjà produire la version audio.
Nous aurons aussi une version en braille. Ne me dites pas que vous avez aussi apporté une version en braille?
Mme Bellefontaine: Non.
La présidente: Nous veillerons à ce qu'une version braille soit réalisée.
Mme Bellefontaine: Oui. Cela a été fait par la Charles Crane Memorial Library.
La présidente: Cela me paraît une bibliothèque extraordinaire, où la connaissance mène véritablement à l'habilitation. Vous êtes très certainement des exemples parfaits de cela.
Je vous demande de nous pardonner. Nous devons partir maintenant. Wayne Cole est notre greffier, et Bill Young reste avec vous. Nancy Holmes, notre recherchiste de la Bibliothèque du Parlement, vous tiendra compagnie en attendant.
La séance est levée.