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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 11 février 1997

.1530

[Traduction]

Le président: Je vous souhaite la bienvenue. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le comité reprend son étude des taux d'intérêt sur les cartes de crédit.

Avant d'entendre nos témoins, nous avons deux points à régler. Premièrement, le rapport du Comité permanent de l'industrie sur l'examen de la science et de la technologie sera déposé à la Chambre demain au lieu d'aujourd'hui. Nous n'avons pas obtenu le consentement unanime pour le déposer aujourd'hui, aux heures où nous étions disponibles.

Une voix: [Inaudible]

Le président: Non. En fait, le Parti conservateur a enfin réussi à se faire entendre. Mais cela ne se reproduira plus.

Deuxièmement, M. Lastewka présidera le comité de 17 heures à 17 h 30. Je vous rappelle qu'il y a un vote à 17 h 30 et que nous pourrons siéger jusqu'à 17 h 25 environ, avant d'aller voter.

Au nom du comité, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des banquiers canadiens. Je demanderais à son président et chef de la direction, M. Raymond Protti, de nous présenter ses collègues et de nous expliquer comment il compte procéder. Nous avons informé les témoins à des séances précédentes que nous voudrions passer le plus rapidement possible à la période des questions.

Monsieur Protti, ce n'est pas la toute première fois que vous comparaissez devant des députés depuis que vous occupez votre nouveau poste, mais c'est la première fois que vous comparaissez devant notre comité, je crois. Je vous souhaite donc la bienvenue et j'espère que vous êtes satisfait de vos nouvelles fonctions. Je vous laisse la parole.

M. Raymond Protti (président et chef de la direction, Association des banquiers canadiens): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis en effet satisfait de mes nouvelles fonctions.

Je suis accompagné aujourd'hui de M. Mark Weseluck, vice-président, Opérations bancaires, à l'ABC, de M. Paul Vessey, vice-président directeur, Produits de prêt personnel à la Banque CIBC, de Rob Pearce, vice-président senior, Services bancaires électroniques, à la Banque de Montréal, de Jane Fershko, première vice-présidente, Produits de cartes, Services de cartes et TPV, à la Banque Royale du Canada, ainsi que de David Livingston, premier vice-président, Services de cartes et en direct, à la Banque Toronto-Dominion.

[Français]

Nous sommes ici aujourd'hui, à l'invitation du comité, pour fournir à ses membres des renseignements généraux sur le marché canadien du crédit, notamment sur le segment du marché qui représente les cartes de crédit émises par les banques. M. Weseluck présentera un court exposé portant sur les questions soulevées dans le communiqué de presse du président du comité, le 22 janvier dernier, soit une description du marché des cartes de crédit, l'information fournie aux consommateurs sur le choix d'une carte de crédit et la conformité aux recommandations formulées par le passé. Nous répondrons ensuite avec plaisir à vos questions. Nous avons remis à chacun d'entre vous une pochette de documents auxquels nous nous reporterons au cours de l'exposé.

[Traduction]

Avant de laisser la parole à M. Weseluck, je tiens à préciser que les questions reliées à la tarification et à la conception des produits, relèvent de chaque banque, et non de l'ABC. Les représentants des banques sont ici pour répondre à vos questions à ce chapitre, du point de vue de leur propre institution bancaire.

Mark.

M. Mark Weseluck (vice-président, Opérations bancaires, Association des banquiers canadiens): Merci.

On vous a remis quelques documents d'information. Vous avez également reçu aujourd'hui un mémoire que j'utiliserai pour mon témoignage. À la fin de ce document se trouvent quatre diagrammes auxquels je vais me référer durant tout mon exposé. En outre, on vous a également distribué ce cartable, dont je vous parlerai bientôt.

Nous vous remercions de nous donner l'occasion de vous rencontrer aujourd'hui pour discuter du marché concurrentiel des cartes de crédit au Canada. Les cartes de crédit sont largement acceptées par les commerçants et sont extrêmement populaires auprès des Canadiens. Environ 80 p. 100 des Canadiens détiennent au moins une carte de crédit.

La carte de crédit donne accès à divers services: c'est un moyen de payer ses achats de biens et de services, d'obtenir du crédit et de profiter de services à valeur ajoutée. Mais la carte de crédit n'est que l'un des modes de paiement qui existent. Dans toute la gamme des options, on trouve à un extrême le paiement comptant et la carte de débit qui comportent un transfert de fonds immédiat; il y a aussi des chèques pour lesquels le retrait des fonds dépend du moment où le bénéficiaire dépose le chèque. Et puis, il y a la carte de crédit.

Lorsqu'il paie par carte de crédit, le titulaire de la carte dispose d'un délai de grâce pouvant atteindre 51 jours avant d'effectuer un paiement ou avant que l'intérêt ne commence à courir. Pour environ 55 p. 100 des Canadiens qui règlent chaque mois la totalité du solde de leur carte, cela représente un accès gratuit au crédit.

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Quant à la carte de paiement, elle s'apparente à la carte de crédit, mais son solde doit être réglé en totalité à la fin du mois.

En outre, lorsque le commerce électronique sera chose courante sur le réseau Internet, le consommateur disposera d'un plus grand nombre d'options pour effectuer ses paiements.

Autre facteur qui contribue à la compétitivité du marché des cartes de crédit: le nombre important des émetteurs de cartes de crédit. On compte au moins 15 grands émetteurs de cartes Visa et MasterCard au Canada, dont les banques, les caisses d'épargne et de crédit, les sociétés de fiducie et d'autres institutions bancaires. Il existe également de nombreux émetteurs d'autres types de cartes de crédit, tels que les détaillants, les sociétés pétrolières et certaines sociétés émettrices de cartes, comme American Express.

Vous trouverez au diagramme 1 une illustration du pourcentage des cartes en circulation émises par des banques, comparativement à celles émises par d'autres établissements financiers qui émettent des cartes Visa, MasterCard et autres. Les banques ne détiennent que 44 p. 100 d'un marché de plus de 59 à 60 millions de cartes de crédit en circulation.

Il faut également remarquer qu'il n'existe aucune barrière majeure à l'entrée d'une entreprise sur le marché. Toute entreprise qui le juge rentable peut lancer un programme de carte de crédit.

Également, les cartes de crédit sont un produit à maturité sur le marché des services financiers. Les Canadiens les utilisent fréquemment et un grand nombre de commerçants les acceptent.

Comme la croissance de ce marché est plutôt faible, les émetteurs se livrent une vive concurrence afin d'acquérir les clients les uns des autres. Résultat: le consommateur bénéficie d'une large gamme de services offerts par les différents émetteurs. Parmi ces services, il y a la carte régulière, en général sans frais annuels, la carte première, qui comporte une série d'avantages, la carte émise en collaboration avec une société, qui permet de recevoir des rabais et des récompenses de la part de la société associée à la banque émettrice, la carte d'affinité, qui prévoit la remise d'un certain pourcentage des revenus à un organisme de charité ou à but non lucratif, et la carte à faible taux, dont le taux d'intérêt est inférieur à celui de la carte régulière, moyennant des frais annuels.

Cette différenciation accrue du produit a permis au consommateur de disposer d'un plus vaste choix d'options pour sélectionner la carte qui répond le mieux à ses besoins. Ils peuvent ainsi choisir les caractéristiques qui répondent le mieux à leurs besoins.

Prenons le cas de la carte à faible taux. Parmi les nombreux émetteurs de cartes de crédit, les banques font figure de chefs de file en offrant ces cartes aux consommateurs. Le diagramme 2 montre que le taux d'intérêt de ces cartes est près de deux fois moins élevé que celui des cartes régulières des banques et environ deux tiers moins élevé que les cartes de détaillants. Au 4 février 1997, le taux moyen de la carte à faible taux était de 9,35 p. 100.

Le diagramme 3 montre que depuis 1980, c'est-à-dire depuis que nous avons commencé à recueillir les données chaque mois, les taux d'intérêt que payent les consommateurs n'ont jamais été plus bas. D'après des données annuelles partielles remontant à 1973, les taux actuels des cartes de crédit à faible taux pourraient bien être les plus bas qui aient été offerts depuis.

Quelques banques offrent des cartes à faible taux depuis plus de cinq ans, soit depuis le début de 1992. Elles ont grandement fait la promotion de ce produit depuis son lancement, et ce, par divers moyens, dont je vous parlerai dans un instant. Pour ce qui est de leur popularité, ces cartes représentent plus de 7 p. 100 des cartes utilisées par les consommateurs. Elles représentent également près de 15 p. 100 des nouveaux comptes ouverts en 1996. Si l'on tient compte du fait qu'environ 45 p. 100 seulement des titulaires de cartes de crédit paient de l'intérêt sur leur solde pour un mois donné, les cartes à faible taux représentent déjà une part importante des cartes émises par les banques.

Je vous signale que dans les documents qui vous ont été remis, vous trouverez des documents comme ceux qui ont été utilisés pour la publicité de chaque type de carte de crédit ainsi que les documents utilisés pour éduquer les consommateurs et leur apprendre comment utiliser leurs cartes de crédit plus intelligemment. Je n'entrerai pas dans les détails, mais je vous signale que vous avez ces documents dans la trousse qui vous a été remise.

En bas, à gauche, vous trouverez diverses brochures et demandes d'adhésion. Si vous les consultez, vous constaterez que les banques offrent toute la gamme de leurs cartes et indiquent les diverses caractéristiques de chacune. C'est en fait un menu qui permet au consommateur de choisir ce qui correspond le mieux à ses besoins.

J'ai également inclus dans la trousse de la Banque de Nouvelle-Écosse un exemple d'encart joint au relevé de compte. On y trouve des trucs sur la façon de réduire au minimum le montant des intérêts calculés.

Nous avons également inclus des exemples de la publicité publiée par les banques dans divers journaux pour faire connaître les cartes à faible taux. Cette publicité a été faite au cours des dernières années - pas tout récemment, mais depuis l'arrivée sur le marché de ces cartes.

En outre, vous y trouverez des coupures de presse et des communiqués de presse. Vous remarquerez dans les coupures de presse qu'il y a eu une guerre des prix l'été dernier; c'était à quelle banque offrirait le taux le plus bas. Cette guerre des prix a fait les manchettes dans tout le Canada.

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Permettez-moi de passer en revue certaines des initiatives par lesquelles l'ABC, en conjonction avec ses membres, a cherché à informer les consommateurs sur la façon d'utiliser le crédit et les cartes de crédit. J'en ai donné quelques exemples dans certains de vos documents d'information. Pour cela, je n'entrerai pas dans les détails.

Tous les six mois, nous produisons un document d'une page qui est envoyé à plus de 2 000 médias au Canada. En juin 1996, nous avons publié «Savoir utiliser ses cartes de crédit». Ce document a été publié dans 17 journaux et a également été repris par d'autres médias. Il expliquait aux consommateurs comment utiliser plus efficacement leurs cartes de crédit.

Nous avons également publié une brochure intitulée «Le crédit à bon escient» qui explique ce qu'est le crédit, les types de crédit offerts et comment l'utiliser adéquatement.

Nous avons également publié un encart joint au relevé de compte que les banques ont utilisé pour informer les consommateurs sur les moyens de réduire leurs frais d'intérêt.

Pour aider à informer les étudiants, nous avons également produit un bulletin intitulé «Accès». Ce bulletin est publié chaque mois et distribué à quelque 40 000 enseignants canadiens, ce qui représente environ un exemplaire par école.

Les bulletins de janvier 1993, janvier 1995 et avril 1996 portaient plus précisément sur le crédit et les cartes de crédit. D'après les sondages que nous avons réalisés auprès des personnes qui reçoivent ce bulletin, il semble qu'il soit jugé fort utile.

Nous avons également conçu une trousse pédagogique, intitulée «Tout compte fait», qui a été distribuée dans 4 000 établissements scolaires. Cette trousse s'adresse aux élèves du secondaire et comporte une section consacrée au crédit. J'ai joint un exemplaire de cette section au document. Permettez-moi de faire une publicité gratuite à «Street Cents», la série télévisée dont nous sommes les commanditaires. Vendredi dernier, le 7 février, on a diffusé au réseau CBC une émission sur les cartes de crédit. Il s'agit d'une émission qui s'adresse plus particulièrement aux jeunes. Elle sera diffusée de nouveau les 12, 15 et 16 février sur Newsworld.

Visa Canada a également produit une trousse plus élaborée qui comprend deux disques optiques compacts et 13 sections sur la bonne gestion financière. Cette trousse a été envoyée dans 200 écoles. Nous espérons la distribuer à 89 p. 100 des écoles au cours des quatre ou cinq prochaines années.

Nous avons essayé de passer en revue les différents documents qui ont été publiés à l'intention des Canadiens. Passons maintenant à certaines suggestions que nous avons faites sur la façon de mieux faire connaître ces produits.

Nous avons écrit à un certain nombre de députés pour leur suggérer de communiquer avec leurs électeurs par le biais des bulletins parlementaires et des bureaux de circonscription. Il ne serait pas nécessaire de faire la publicité commerciale de produits en particulier. Il pourrait s'agir d'un document comme «Savoir utiliser ses cartes de crédit», dans lequel on donnait des conseils utiles aux consommateurs. Nous ne préconisions pas un produit plutôt qu'un autre. Nous expliquions aux consommateurs quels critères ils doivent appliquer lorsqu'ils cherchent un produit.

Pour revenir aux cartes de crédit, j'ai indiqué que le consommateur dispose d'un vaste choix. Il faut également tenir compte de tous les coûts lorsque l'on examine le prix de tels produits.

Il faut tenir compte non seulement du coût des fonds, mais aussi de toute une gamme d'autres facteurs comme le coût de dotation des fonds applicables au crédit, le manque à gagner des fonds versés aux commerçants avant réception du paiement des titulaires, le risque lié à l'octroi de crédit non garanti, puisque aucune valeur n'est donnée en garantie, les frais d'administration du programme pour que les consommateurs puissent utiliser leur carte 24 heures par jour partout au Canada et à l'étranger, les paiements en souffrance et les pertes imputables aux paiements non remboursés, aux faillites et à la fraude, ainsi que le coût de divers avantages qui constituent les caractéristiques de cartes comme les cartes premières, les cartes émises en collaboration avec une société et les cartes régulières.

Tout comme pour l'octroi des autres modes de crédit, tels les prêts, l'importance de chaque composante du coût dépend de l'efficacité de la gestion de l'émetteur. Tous les émetteurs doivent payer des coûts et doivent les gérer efficacement.

Dans la répartition des coûts, il y a également les facteurs économiques qui ont évolué au cours des dernières années. L'inflation a été ramenée à de faibles niveaux, ce qui a mené à une baisse du taux d'escompte. Par contre, le chômage a persisté et les défauts de paiement des consommateurs se sont considérablement accrus. Parallèlement, des pertes importantes se sont encore produites. Tout cela doit être pris en compte dans le coût de dotation des fonds et l'établissement du prix des produits.

En outre, les pressions exercées par le marché ont conduit à l'élimination des frais annuels des cartes de crédit régulières, à l'heure où un plus grand nombre de titulaires paient la totalité du solde de leurs cartes de crédit. Même si ces facteurs font augmenter le coût des cartes de crédit, les fortes pressions de la concurrence se sont traduites par une diminution de leurs taux d'intérêt.

Soulignons que des études de marché menées pour l'usage exclusif des banques montrent que les consommateurs tiennent compte de divers facteurs, et non seulement des taux d'intérêt, lorsqu'ils choisissent une carte de crédit.

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Si l'on compare la situation des cartes de crédit dans différents pays, dont les États-Unis et le Royaume-Uni, on constate que les cartes de crédit canadiennes sont concurrentielles.

Le président: Je ferai remarquer au témoin que s'il désire utiliser un sondage d'opinion publique dans son témoignage, ou il le présente, ou bien il ne le présente pas. On ne peut pas en parler et dire ensuite que c'est confidentiel.

M. Weseluck: D'accord.

Par exemple, lorsqu'on compare les États-Unis, le Royaume-Uni et le Canada, on peut établir que le marché canadien des cartes de crédit Visa et MasterCard est extrêmement concurrentiel. Non seulement les taux d'intérêt et les frais annuels sont inférieurs à ceux des autres pays, mais le Canada ne prélève aucun des frais supplémentaires qui s'appliquent aux cartes de crédit américaines, tels que les frais pour avances en espèces, pour paiement en retard ou pour dépassement de limite.

Les présentes audiences examinent plus précisément dans quelle mesure les recommandations des audiences tenues par le passé sur les cartes de crédit ont été suivies. Pour leur part, les banques ont essentiellement respecté toutes les grandes recommandations qui les concernaient.

Pour conclure, l'ABC est d'avis que la meilleure façon d'aider les consommateurs, c'est de leur fournir des renseignements et une gamme étendue de services de façon à ce qu'ils puissent choisir ce qui correspond le mieux à leurs besoins.

Nous tenons également à signaler que les autres modes de paiement qui ont été mis au point, dont les cartes de débit, se sont révélés très populaires. Interac estime que le nombre des transactions de ce type pourrait être supérieur à un milliard de dollars d'ici la fin de l'année. Voilà un résultat atteint en seulement trois ans, comparativement à quelque 30 années dans le cas des cartes de crédit.

M. Protti: Merci beaucoup, monsieur le président. Nous sommes prêts à répondre aux questions que vous et vos collègues souhaiterez nous poser.

Le président: Merci, monsieur Protti et monsieur Weseluck.

Avant de passer aux questions, je constate qu'un grand nombre de députés assistent à la séance aujourd'hui. Comme ils sont très nombreux sur ma liste, je demanderais à chacun de respecter le temps qui lui est accordé de façon à ce que tous aient la chance de poser des questions ou de faire connaître leurs opinions.

[Français]

Monsieur de Savoye.

M. de Savoye (Portneuf): Messieurs les représentants des banques, nous avons une occasion intéressante d'échanger sur un sujet dont on entend de plus en plus parler dans les médias. Il a été porté à l'attention du public en novembre dernier, alors qu'environ 150 députés vous ont demandé de ramener les taux d'intérêt sur les cartes de crédit à des niveaux plus acceptables, compte tenu de l'action de la Banque du Canada sur son propre taux d'escompte.

Cela dit, que les banques fassent un profit, c'est normal. C'est même heureux puisque ça leur permet de payer des impôts et de contribuer à l'assiette fiscale.

La question qui se pose, c'est: où prenez-vous l'argent qui constituera votre profit? Ce qui m'inquiète, c'est qu'alors que les lois du marché devraient faire en sorte que l'instrument d'emprunt que constitue une carte de crédit devrait suivre, au niveau de son taux d'intérêt, la tendance à la baisse des autres instruments, vos cartes de crédit semblent être fixées. C'est comme s'il y avait, non pas un plafond, mais un plancher.

Évidemment, ce n'est pas tout le monde qui paie des intérêts sur son état de compte. Ceux qui sont en mesure d'acquitter leur facture mensuelle dans un délai de 21 jours ne paient pas d'intérêt. Mais ceux qui n'acquittent pas leur facture en temps opportun payent des intérêts.

Or, ces intérêts sont une portion intéressante de vos revenus. J'apprécie que vous nous ayez remis un tableau sur vos coûts. J'imagine que les revenus sont importants pour une banque. Alors, d'où viennent vos revenus?

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Pour MasterCard et Visa, et je me fie aux données qui nous ont été fournies la semaine dernière par le Bureau de la consommation, vous avez un volume au détail de 68 milliards de dollars. Sur cette somme, le détaillant vous paye une redevance de 2, 3 ou 4 p. 100, ce qui fait, compte tenu que vous avancez ces sommes pendant environ 51 jours en moyenne, un taux annualisé de 14,3 p. 100 si on est à 2 p. 100 pour le détaillant, de 21 p. 100 si on est à 3 p. 100, ou de 28 p. 100 si on est à 4 p. 100. Oui, vous êtes là pour faire de l'argent, et percevoir un taux sur les transactions est une excellente façon d'en faire.

Cependant, à 2 p. 100 sur des ventes de 68 milliards de dollars, ceci vous donne des revenus de 1 360 millions de dollars. Ensuite, il y a les impayés. D'après les chiffres du Bureau de la consommation, les impayés sont de 17 milliards de dollars. En imaginant qu'ils seraient tous à 17 p. 100, cela représente 2 890 millions de dollars de frais d'intérêts perçus. Et il y a les prêts, au montant de 7,4 milliards de dollars qui, également à 17 p. 100, représentent 1 260 millions de dollars d'intérêt. On atteint un total de 5 milliards et demi de dollars de revenus et peut-être que certaines sommes m'échappent. Je n'ai pas inclus les contributions annuelles dans ce calcul.

Regardons maintenant les dépenses. Il y a les fraudes qui, toujours selon le Bureau de la consommation, s'élèvent à 83 millions de dollars. Il y a aussi, sans aucun doute, vos frais d'administration, incluant le coût des bénéfices comme l'assurance et les autres cadeaux que vous faites aux clients et qui, je le répète, ne sont pas payés par ceux qui paient leur compte à temps, mais par ceux qui n'ont pas les moyens de le payer à temps.

Il y a les frais d'administration. Estimons-les à 1 $ par transaction, ce qui comprend votre amortissement. Si mes chiffres sont inexacts, vous me corrigerez. Donc, on a ici des coûts d'environ 1 milliard de dollars pour traiter 900 millions de transactions.

Quant au crédit, vous admettrez avec moi que vous l'octroyez à du 14, du 21 ou du 28 p. 100. Le coût du crédit est celui que vous payez à celui qui vous a prêté l'argent, c'est-à-dire la personne qui dépose de l'argent chez vous, et je n'ai pas l'impression que vous me payez énormément ces temps-ci. Bref, j'estime votre profit à environ 4 milliards de dollars sur des revenus de 5 milliards et demi de dollars, ce qui fait en réalité que vous avez un bénéfice brut de l'ordre de 80 p. 100.

Mes chiffres sont certainement inexacts et j'aimerais que vous me donniez de vrais chiffres pour qu'on puisse avoir la vraie image. Sinon, je vais croire que j'ai la bonne image.

[Traduction]

Le président: Monsieur Protti, s'il vous plaît.

[Français]

M. Protti: J'aimerais faire deux remarques préliminaires à la suite de vos commentaires, qui touchaient à de nombreux points, puis je demanderai à mes collègues de faire des commentaires sur vos chiffres.

D'une part, j'aimerais vous remercier pour vos remarques sur la question des taxes parce que vous avez raison. Cette année, notre industrie déboursera 6 milliards de dollars en taxes. Nous subissons le taux de taxation le plus élevé dans le secteur privé et nous sommes un des secteurs qui paient le plus de taxes aux ministres des Finances aux paliers fédéral et provincial.

D'autre part, j'aimerais revenir sur la question des profits des banques, de cette source de profits dont vous avez beaucoup parlé. Les profits des banques pour l'année qui vient de se terminer et pour l'année 1995 se regroupent en trois catégories.

[Traduction]

Premièrement, ce qui a le plus accru le profit des banques, c'est que nous sommes devenus de meilleurs prêteurs. Les provisions pour pertes sur prêts, qui ont été mises en place pour l'exercice 1995-1996, sont de loin supérieures à ce qui existait au début de la décennie.

Deuxièmement, nous nous sommes engagés dans de nouveaux secteurs d'activités, plus particulièrement dans celui des valeurs mobilières. Cela a grandement contribué au profit réalisé par notre industrie en 1996.

Troisièmement, nous avons rapatrié de façon très efficace des revenus provenant de l'étranger. Nous sommes beaucoup mieux en mesure d'obtenir des revenus à l'étranger.

Ces trois facteurs ont été la principale source de profits pour les banques en 1995 et 1996.

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[Français]

M. de Savoye: Monsieur Protti, vous n'avez pas besoin de demander des taux d'intérêt aussi élevés sur les cartes de crédit, puisque le gros de vos revenus est bien assis sur des fondations solides.

M. Weseluck, cependant, nous disait plus tôt que les défauts étaient substantiels. Jusqu'à quel point sont-ils substantiels sur les cartes de crédit?

M. Protti: Je demanderai à mes collègues, dont M. Weseluck, de vous expliquer les chiffres que nous vous avons présentés.

[Traduction]

M. Weseluck: Pour ce qui est des soldes non payés, il faut remarquer qu'une partie du montant représente le solde non payé du mois. Un certain pourcentage de ce montant ne rapportera donc aucun intérêt. Ce pourcentage, qui représente environ 19 milliards de dollars, ne devrait pas être inclus dans les sommes sur lesquelles s'applique le taux d'intérêt. Je crois que vous vous êtes servi de cet élément dans vos calculs de revenu.

On a également parlé des avantages annuels, des coûts et de qui paie la facture. Les titulaires de ces cartes paient également des frais annuels à l'égard de ces avantages supplémentaires et le coût vise à payer ces avantages.

Quant aux frais que paient les marchands et les autres questions de ce genre, certains de mes collègues sont peut-être mieux en mesure de vous en parler.

M. de Savoye: Auparavant, monsieur Weseluck.

[Français]

je comprends les principes dont vous faites état et je pense que tout le monde ici les comprend bien. Pouvez-vous chiffrer les conséquences? Par exemple, en termes de défaut, combien devez-vous radier par année et combien vous coûtent les bénéfices?

Le président: C'était votre dernière question.

M. de Savoye: Merci.

[Traduction]

Le président: J'allais vous demander d'être plus précis. Je suis désolé, mais nous devrons être très brefs dans nos questions et nos réponses, s'il vous plaît.

M. Protti: Monsieur le président, je crois que Mme Fershko et M. Vessey aimeraient répondre à cette question.

Mme Jane Fershko (première vice-présidente, Produits de cartes, Services de cartes et TPV, Banque Royale du Canada): Vous avez parlé des 17 milliards de dollars en solde non payé sur lesquels nous pouvons percevoir de l'intérêt, pour donner un ordre de grandeur. Ce montant pourrait être réduit d'un tiers ou de la moitié, car il faut supposer que le douzième de toutes les dépenses sont celles du mois courant. Cela réduit donc le montant de 6 ou 7 milliards de dollars. C'est une diminution importante.

Également, d'une façon générale, les frais d'administration applicables aux gens qui ne paient pas chaque mois leur solde sont plus élevés parce qu'il faut leur envoyer des relevés de compte. Ces gens-là nécessitent également davantage d'examens administratifs et de crédit. Ce type de portefeuille est en général plus coûteux.

Il y a également toute une gamme d'autres frais généraux qui doivent également être inclus.

M. Paul Vessey (vice-président directeur, Produits de prêt personnel, Banque Canadienne Impériale de Commerce): J'ai deux observations à faire. Je répondrai à votre question sur le taux de pertes, mais d'abord, dans la même veine, la CIBC a l'an dernier facturé pour 17 milliards de dollars et doté en fonds la majeure partie de cette somme sans en retirer quelque intérêt que ce soit. Nos comptes clients, c'est-à-dire ce que nous facturons chaque mois, s'élèvent à environ 5 milliards de dollars. À partir de cette somme, on peut supposer que la moitié des clients paieront leur solde à la fin du mois et que l'autre moitié encourra des intérêts...

M. de Savoye: Nous n'avons pas besoin de supposer. L'Office des consommateurs nous a fourni les chiffres exacts, que j'ai mentionnés dans mon préambule. Nous n'avons pas à supposer quoi que ce soit, nous avons les chiffres nécessaires, à moins que vous contestiez les chiffres de l'Office des consommateurs.

M. Vessey: Moi, je ne puis me prononcer que sur les chiffres qui me viennent de mon institution financière. Ce que je voulais dire, c'est qu'il n'y a pas de corrélation directe entre l'intérêt gagné - et je crois que Jane disait la même chose - et les sommes facturées.

QQuel est notre coefficient de perte? À la Banque Canadienne Impériale de Commerce, il est du domaine public que le coefficient de perte sur notre portefeuille de 5 milliards de dollars est légèrement supérieur à 3 p. 100.

Si on suppose que de ces 5 milliards de dollars en comptes clients, la moitié sera payée sans intérêt à la fin du mois - autrement dit, il ne peut y avoir de perte attribuable à cette moitié-là, puisque le solde sera payé chaque mois - le coefficient de perte provenant des consommateurs qui paient des intérêts est donc environ de 6 p. 100 du portefeuille.

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Si nous disons que nous avons un coefficient de perte de 6 p. 100, des frais d'exploitation, etc... Dans la structure de ce type d'entreprise, on ne peut simplement tenir compte des sommes facturées, des 17 milliards de dollars, pour calculer le taux d'intérêt réel. Mais notre coefficient de perte est de 3 p. 100.

Le président: Merci.

Je reviendrai à vous dans une minute, monsieur Protti. Je vais maintenant laisser la parole à M. Harper.

M. Harper (Simcoe-Centre): Aujourd'hui, nous sommes ici pour représenter les consommateurs. En fait, nous représentons la moitié d'entre eux, si la moitié d'entre eux peut profiter des cartes. C'est l'autre moitié qui est piégée. Permettez-moi de décrire la situation des consommateurs puisque c'est ce que nous examinons.

Nous lisons dans les journaux quels profits les banques réalisent et les gens examinent leur situation personnelle, leur revenu qui diminue et leurs dettes qui augmentent. Il est bien connu que le pourcentage d'endettement de la famille canadienne moyenne a presque doublé. Souvent, lorsque les gens vont magasiner, ils n'ont pas d'autre choix que d'avoir des cartes de crédit. C'est maintenant une nécessité - ce n'est plus un choix. Je ne crois plus qu'il soit possible de louer une voiture ou de retenir une chambre d'hôtel sans carte de crédit. Les consommateurs n'ont pas le choix. Ils doivent avoir des cartes et payer des taux d'intérêt élevés. On leur dit tous les jours que les taux d'intérêt n'ont jamais été plus faibles que maintenant - que le loyer de l'argent n'a jamais été aussi bas - mais ils n'en voient pas les effets dans ce qu'ils paient aux banques pour leurs cartes de crédit.

J'ai regardé votre tableau. C'est un bien joli tableau qui illustre ce qui s'est produit depuis l'introduction de la carte à faible taux. J'aurais bien voulu voir un tableau illustrant en parallèle la situation des cartes à taux élevé. D'après ce que je sais des chiffres, je soupçonne qu'il n'y a pas eu grand changement dans leur taux, par rapport à la chute du taux de base. Cela dérange bien des gens qui se trouvent obligés d'utiliser des cartes de crédit.

Si je dis cela, c'est que notre société fonctionne de moins en moins en espèces sonnantes et trébuchantes. Les gens doivent avoir des cartes et sont donc contrôlés par des entreprises dans une certaine mesure. Ils sont contrôlés par les banques, des banques qui occupent une position privilégiée au Canada, dans une certaine mesure, grâce au gouvernement. Les consommateurs sont donc désespérés et se sentent prisonniers. Qui représente les consommateurs ici? Comment pouvez-vous justifier de ne pas avoir diminué le taux que paient les utilisateurs de carte à taux élevé proportionnellement à la diminution du taux de base?

M. Protti: Je vous remercie de votre question, monsieur Harper. Vous avez soulevé toutes sortes de points intéressants. Je répondrai à deux ou trois d'entre eux et mes collègues voudront peut-être vous fournir des réponses sur les autres.

Vous avez beaucoup parlé des consommateurs et des différentes situations dans lesquelles ils se retrouvent quand ils veulent acheter des produits. Lorsque les consommateurs vont acheter des produits au détail, ils ont cinq options, les espèces, les chèques, les cartes de débit... Je m'arrête là. Ces chiffres sont inquiétants, mais je pense qu'ils reflètent très bien la réalité. Les trois premiers choix dont dispose un consommateur représente à peu près 70 p. 100 de tous les achats au détail, par conséquent, la question des taux d'intérêt ne se pose pas ici.

Le quatrième choix consiste à utiliser une carte de crédit et à payer tout le solde à la fin du mois. Comme les membres du comité le savent, 55 p. 100 des titulaires de cartes de crédit bancaires payent tout leur solde à la fin du mois. Je ne peux pas parler des 45 p. 100 de consommateurs qui détiennent des cartes de caisses d'épargne, de caisses populaires, de compagnies pétrolières et de grands magasins, car je n'ai aucune information là-dessus.

Cela représente de 10 à 15 p. 100 des ventes au détail. Ainsi donc, la question des taux d'intérêt ne se pose pas dans 80 à 85 p. 100 des ventes de biens ou des services au détail. Il reste 15 p. 100. Vous avez raison de signaler que nous avons mentionné le problème des 15 p. 100 des ventes au détail pour lesquelles les consommateurs reportent le solde. C'est pour cela que, dans notre mémoire, nous mettons l'accent sur le diagramme 2, où nous démontrons très clairement aux consommateurs qu'ils ont une variété de choix quand il s'agit d'acheter des biens et des services au détail s'ils estiment qu'ils ne seront pas en mesure de les payer à la fin du mois.

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En effet, les consommateurs disposent d'une grande variété de choix sur le marché. Certaines cartes imposent des taux atteignant 28 p. 100, et vous avez raison de souligner que ces taux n'ont pas bougé depuis bien longtemps - j'ignore depuis combien de temps ça dure, mais certains de mes collègues le savent peut-être. Par contre, il existe aussi des cartes à faible taux d'intérêt qui ont été lancées par les banques en 1992, et qui imposent en moyenne 9,35 p. 100 d'intérêt actuellement. La différence est énorme, et de toute évidence, le consommateur a intérêt à savoir que ces choix existent.

M. Robert W. Pearce (vice-président senior, Services bancaires électroniques, Banque de Montréal): Je voudrais parler des personnes dont vous avez dit qu'elles étaient «piégées». En fait, les cartes à faible taux leur donnent la possibilité de se tirer d'affaire.

Sur le marché des cartes de crédit, il y a effectivement trois groupes de personnes. Il y a celles qui payent leur solde tous les mois et qui ne le reportent jamais d'un mois à l'autre - soit un tiers environ de notre portefeuille. À l'autre extrémité, il y a les gens qui utilisent leurs cartes de crédit comme mécanisme d'emprunt - c'est-à-dire ceux que vous estimez piégés - qui empruntent tous les mois et qui reportent leur solde. Ensuite, on a un groupe qui se retrouve en quelque sorte au milieu. Ils représentent également un tiers environ de la clientèle, et ils payent généralement leur solde, même s'ils le reportent occasionnellement d'un mois à l'autre.

C'est pour ce tiers de la clientèle - c'est-à-dire les personnes qui utilisent des cartes de crédit pour emprunter - que nous avons créé les cartes à faible taux d'intérêt. À la Banque de Montréal, ces clients peuvent obtenir la carte à 9,4 p. 100 d'intérêt. Nous leur avons envoyé des millions de documents d'information dans leur relevé, par le courrier et par d'autres moyens pour les en aviser. Ils peuvent passer de notre carte ordinaire, dont le taux d'intérêt est de 18,4 aujourd'hui, à celle de 9,4 p. 100 tout simplement en appelant notre centre d'appel - et ils le font tous les jours. Par conséquent, ce sont effectivement aux personnes que vous avez qualifiées de piégées - personnellement, je n'utiliserais pas ce qualificatif pour désigner le groupe en question - que nous avons offert des cartes à faible taux d'intérêt. Cette initiative a entraîné un changement énorme dans ce marché au cours des dernières années.

Il y a cinq ans, les banques comparaissaient devant le comité au sujet des cartes de crédit. À l'époque, nous étions la seule banque qui offrait une carte à faible taux d'intérêt. Actuellement, la plupart des banques ici présentes en offrent, et notre secteur s'engage dans cette voie précisément pour répondre aux besoins des personnes piégées que vous défendez à juste titre aujourd'hui.

M. Protti: Monsieur le président, je pense que M. Livingston veut faire une observation.

M. David Livingston (premier vice-président, Services de cartes et en direct, Banque Toronto-Dominion): Je pense qu'il est très important pour nous tous de déterminer les avantages pour le consommateur. À notre avis, nous représentons également ce dernier. La concurrence est très forte dans notre secteur, et nous nous battons férocement pour attirer les clients.

Nous essayons de nous assurer que les consommateurs y trouvent leur compte. Jusqu'ici, on n'a pas encore mentionné le fait que nous avons remboursé bon nombre de frais aux consommateurs au cours des dernières années, et ce, à un degré sans précédent. Par exemple, nous avons supprimé les frais annuels et d'autres types de frais que les consommateurs payaient il y a plusieurs années pour avoir une carte de crédit.

Nous avons aussi accru les avantages de nos cartes afin que les clients qui le désirent puissent en profiter. Ce sont des avantages pécuniaires réels dont profitent également tous les utilisateurs des cartes. En effet, l'annulation de certains frais profite à tout le monde. Si vous offrez des points et d'autres types d'avantages, tout le monde en profite.

Ainsi donc, nous livrons la concurrence en essayant de déterminer les besoins des consommateurs et en leur offrant des options. S'ils veulent les options que nous offrons, ils feront affaire avec nous.

Le président: Très bien, je vous remercie.

Monsieur Harper, votre temps de parole est pratiquement épuisé. Nous reviendrons à vous, mais vouliez-vous faire une observation?

M. Harper: Je terminerai par un commentaire. Si j'ai bien compris la réponse de M. Pearce, tous vos clients n'ont qu'à vous écrire. Il n'y a pas de conditions et pas de refus. Il leur suffit de vous écrire pour obtenir automatiquement le faible taux d'intérêt. Ai-je bien compris?

M. Pearce: Oui, c'est exactement ce que j'ai dit.

À la Banque de Montréal, s'il y a des détenteurs de cartes de crédit qui veulent adopter notre carte de 9,4 p 100 qui, soit dit en passant, est assujettie à des frais annuels de 25 $ - qu'il faut payer en contrepartie du faible taux d'intérêt, ce n'est pas pour tout le monde, mais pour une partie de la clientèle seulement - nous leur disons que s'ils détiennent une carte de la Banque de Montréal, ils peuvent passer d'un taux d'intérêt élevé à un taux d'intérêt faible tout simplement en appelant notre centre d'appel. De plus, étant donné que nous sommes dans un secteur très compétitif, nous essayons également d'attirer les clients des banques offrant des cartes Visa à fort taux d'intérêt vers la Banque de Montréal et sa carte à faible taux d'intérêt. Nous voulons gagner cette clientèle et nous faisons des efforts dans ce sens.

Le président: Merci, monsieur Pearce.

Passons maintenant à M. Shepherd.

M. Shepherd (Durham): Monsieur Pearce, je voudrais faire une remarque à ce sujet. Si la carte à faible taux d'intérêt est une si bonne idée, pourquoi ne l'offrez-vous pas d'emblée à tout le monde?

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M. Pearce: Il est clair que ce n'est pas tout le monde qui veut une carte à faible taux d'intérêt.

M. Shepherd: Les clients veulent une carte à taux d'intérêt élevé?

M. Pearce: Non, c'est parce qu'ils ne veulent pas payer les frais de 25 $, et je pense que c'est très important. Beaucoup de gens utilisent la carte à taux d'intérêt élevé pour les transactions quotidiennes - en fait, ils dépensent beaucoup d'argent sur leurs cartes - et ils paient tout leur solde à la fin de chaque mois. En tant que client de notre institution et de toute autre institution, vous pouvez l'obtenir gratuitement. Il n'y a pas de frais annuels, et on peut bénéficier de programmes de fidélisation et d'un certain nombre d'autres avantages connexes. Par conséquent, on n'a aucun intérêt à adopter une carte à faible taux d'intérêt.

Au fond, la clientèle n'est pas monolithique. Il y a des groupes très différents de clients ayant des besoins très différents. Comme M. Livingston l'a souligné, nous avons essayé de présenter un choix aux clients afin qu'ils puissent choisir le produit répondant le mieux à leurs besoins.

M. Shepherd: Je voudrais cibler un groupe d'âge. J'ai ici une étude réalisée par Angus Reid le mois dernier, c'est-à-dire en janvier. En tant que gouvernement, nous nous intéressons beaucoup à la jeunesse, au chômage chez les jeunes, etc. L'étude porte sur les personnes âgées de 18 à 34 ans. Elle révèle que 58 p. 100 d'entre elles utilisent une carte Visa et une autre carte de crédit; 45 p. 100 ne paient pas leur solde, 70 p. 100 paient des taux d'intérêt supérieurs à 16 p. 100. En plus, à la question de savoir si elles détiennent une carte à faible taux d'intérêt, 84 p. 100 ont répondu par la négative.

Sur les campus des universités, nous voyons ce genre de brochure - il ne s'agit pas de celle qui figure dans votre trousse, mais d'une autre où figure votre banque - dans une trousse appelée «campus kit». Pour obtenir une carte de crédit par cette voie, si j'ai bien compris, les étudiants doivent simplement avoir un revenu annuel de 1 200 $. Autrement dit, vous voulez donner un crédit supérieur à 1 000 $ à des gens dont le revenu annuel est de 1 200 $.

Je veux vous citer quelques informations figurant dans cette trousse: «la limite de crédit initiale peut être augmentée sur demande»; «chaque émetteur de carte vous enverra des informations complètes sur les conditions en même temps que vos cartes de crédit». Par conséquent, vous ne connaîtrez votre taux d'intérêt qu'après avoir obtenu la carte de crédit.

La raison pour laquelle vous voulez procéder ainsi lorsqu'un client n'a pas de revenus réguliers et ne fait que débuter ses études universitaires est la suivante: «Il vaut mieux avoir de bons antécédents en matière de crédit avant d'avoir besoin d'un prêt.»

Au fond, vous faites la promotion du crédit dans un groupe d'âge qui n'a pas de revenus réguliers. Vous créez ici une culture de l'endettement. Quelle est votre responsabilité dans tout cela?

Le président: Avec une question comme celle-là - et c'est ce qui arrive souvent lorsque l'ABC comparaît - je voudrais que vous fassiez très attention dans le choix de la personne qui va répondre afin de ne pas susciter un tollé, car les députés ont beaucoup de questions à poser.

Allez-vous donc répondre à cette question?

Mme Fershko: Oui.

Je parle au nom de la Banque Royale en ce qui concerne notre portefeuille et notre démarche à l'égard du marché étudiant. Je sais qu'il y a beaucoup d'idées fausses au sujet des étudiants, par exemple, que nous leur prêtons à la légère et qu'ils présentent des risques en matière de crédit. Récemment, nous avons analysé notre portefeuille estudiantin et nous avons constaté que la qualité du crédit ou les pertes étaient moindres chez les étudiants que chez les autres titulaires de nos cartes. Je ne peux parler que de notre démarche, mas je pense que cela s'explique par le fait que lorsque nous prêtons aux étudiants, nous commençons par leur accorder un maximum de 500 $ par an. Si l'étudiant a un bon dossier de crédit pendant une année, nous augmentons légèrement sa limite.

Nous essayons de leur enseigner une gestion prudente du crédit pendant un certain nombre d'années afin qu'ils apprennent à bien gérer. Évidemment, il ne serait ni dans l'intérêt d'un étudiant, ni dans le nôtre de lui accorder d'emblée 5 000 $. Et je pense que d'autres banques ont également constaté que le portefeuille étudiant s'avère très solide, car elles enseignent aux étudiants à gérer le crédit.

Une fois de plus, je ne peux parler que pour la Banque Royale, mais je pense que cela reflète également le fait que notre coefficient de perte sur prêts est très faible en général. La plupart des banques canadiennes ont un coefficient de perte sur prêts trois fois moins élevé que celui de leurs homologues américaines, et je pense que cela est dû au fait que nous connaissons nos clients depuis longtemps, depuis des générations. En effet, 71 p. 100 des détenteurs de nos cartes sont nos clients, et ils ne traitent pas avec nous simplement parce qu'ils veulent nos cartes de crédit.

M. Shepherd: Mais je ne parle pas de votre coefficient de perte sur prêts. Vous réussissez bien à gagner de l'argent en vendant le crédit. Je dis plutôt que vous créez de la dépendance chez les gens à partir d'un très jeune âge, et ils ne peuvent pratiquement plus se passer du crédit.

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Ainsi donc, en suivant l'évolution de ces jeunes dans l'économie, on se rend compte que vous avez absolument raison: vous faites un excellent travail, parce qu'ils constituent les 45 p. 100 des personnes qui ne payent pas leur solde et qui assument les taux d'intérêt élevés.

Autrement dit, peu m'importent vos coefficients de perte sur prêts, et vous parlez d'accorder 500 $ à un étudiant. Les autres compagnies de cartes de crédit lui accordent le même montant. N'est-ce pas? Je ne doute pas que certains étudiants puissent gérer leurs dettes, mais il y en a beaucoup qui ne le peuvent pas. N'importe quel conseiller financier dans cette ville vous dira que chaque jour, il reçoit des gens ayant sur leurs cartes de crédit des dettes de 25 000 $ qu'ils ne peuvent pas rembourser.

La question que j'aimerais poser aux institutions financières est la suivante: qui est responsable de cette situation?

Mme Fershko: Je pense que nous avons une responsabilité, et je pense que nous l'assumons très bien.

Je sais par exemple qu'à la Banque Royale, si un étudiant veut augmenter sa limite de crédit au bout d'un an, nous faisons une autre vérification de crédit. Si nous constatons qu'au cours de cette période, il a obtenu des cartes de crédit de la part de toutes les autres institutions financières, cela montre qu'il a probablement atteint son maximum et qu'il n'a peut-être plus la capacité de rembourser. Cela ne nous servirait à rien d'aggraver sa situation; par conséquent, je pense que nous travaillons ensemble. Nous voulons développer des relations à long terme au Canada. Comme vous le savez, les grandes banques sont peu nombreuses, et nous voulons maintenir de bonnes relations pendant toute une vie et non pas de façon ponctuelle.

M. Shepherd: Parmi les conditions d'obtention du crédit, vérifiez-vous d'abord auprès des autres institutions financières le montant total qu'un client a déjà emprunté?

Mme Fershko: Oui, par l'entremise d'un bureau de crédit.

M. Shepherd: Certains craignent que cela ne se fasse pas au Canada.

Mme Fershko: Au Canada, le coefficient de perte sur prêts représente le tiers de celui des États-Unis; par conséquent, nos résultats sont pratiquement les meilleurs au monde.

M. Shepherd: Je ne parle pas des personnes qui sont coincées. Je comprends que les gens soient coincés. Mais je parle d'un autre groupe de personnes qui ne seront jamais en mesure de gérer leurs ressources financières puisqu'elles ont commencé à emprunter à un très jeune âge et ont continué dans cette voie.

Mme Fershko: Vous constaterez que les banques ont changé leur philosophie en ce qui concerne les relations avec la clientèle. Elles s'efforcent davantage d'offrir des conseils financiers au lieu de promouvoir simplement leurs produits, car nous tenons aux relations à long terme.

Par exemple, nous savons que, lorsqu'on est jeune, on est plus enclin à emprunter. À mesure qu'on vieillit, on a plus tendance à investir - et nous essayons d'encourager les clients dans ce sens - afin d'avoir des ressources substantielles à la retraite.

Puisque nous tenons à la santé financière de nos clients, nous avons changé notre démarche au fil du temps. Vous constaterez que nous sommes plus axés sur les conseils et les relations avec la clientèle que sur la simple vente de nos produits.

M. Shepherd: Nous avons d'autres statistiques que la Banque du Canada...

Le président: Monsieur Shepherd, M. Pierce demande la parole. Je vais la lui donner. Veuillez donc poser la dernière question, monsieur Shepherd, et nous reviendrons à M. Pierce.

M. Pearce: Dans l'ensemble, je suis d'accord avec Jane.

Pour les étudiants, surtout dans l'enseignement postsecondaire, l'obtention d'une carte de crédit donne un certain prestige et correspond à un certain rite de passage. Cela montre qu'ils commencent à devenir indépendants et à gagner un certain degré de maturité. Nous voulons éviter de les plonger immédiatement dans des difficultés financières. Cela n'est ni dans notre intérêt, ni dans le leur. Ainsi donc, nous imposons nous-mêmes une limite de 800 $ à 1 000 $ sur les cartes d'étudiant, et nos résultats sont très semblables à ceux de la Banque Royale. Ce portefeuille a été très avantageux pour nous.

Nous ne leur disons pas qu'ils doivent acheter notre carte. Nous la leur offrons, et ils la veulent. Mais nous nous assurons qu'ils ne s'endettent pas outre mesure en leur imposant des limites très raisonnables compte tenu de la conjoncture actuelle. Ils utilisent généralement leurs cartes pour acheter des biens et des services, au campus et ailleurs.

Le président: Monsieur Shepherd, veuillez faire votre dernière observation.

M. Shepherd: La Banque du Canada nous montre qu'en termes de pourcentage du revenu disponible dans ce pays, le niveau d'endettement augmente. Il atteint 92 p. 100 du revenu disponible. Le nombre de faillites a atteint un niveau record. J'ai du mal à comprendre quand vous me dites aussi que cette situation est tout à fait avantageuse pour les gens, que nous leur apprenons à utiliser le crédit. En réalité, beaucoup de Canadiens ont du mal à comprendre ce raisonnement.

J'estime qu'il faudrait faire preuve de responsabilité en ce qui concerne l'accès au capital, qu'il y a peut-être des gens qui ne devraient pas recevoir de crédit ou qui devraient être assujettis à des limites précises en fonction de leur revenu. À mon avis, une marge de crédit de 500 $ - elle l'a dit elle-même - pour une personne ayant 1 200 $ de revenu... est-ce raisonnable?

M. Pearce: Je pense que l'expérience à la Banque de Montréal et, comme Jane l'a dit, à la Banque Royale, a démontré que c'est raisonnable. En fait, les étudiants s'en sortent très bien, et ils ne se retrouvent pas dans des difficultés financières.

M. Shepherd: Pour vous, les difficultés financières correspondent à la faillite.

M. Pearce: Non, pas la faillite...

M. Shepherd: Ou le défaut de paiement.

M. Pearce: ... ou les arriérés, ou tout autre manquement que vous voulez...

Je dirais deux choses... Eh bien, laissons tomber.

Le président: Merci beaucoup pour ces questions. Passons maintenant à M. de Savoye.

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J'espère vraiment que vous allez m'aider avec vos réponses. La seule raison pour laquelle je le fais c'est que j'en ai une longue liste ici, et cette question suscite beaucoup d'intérêt autour de la table; j'aimerais donc vraiment que chaque député ait l'occasion de poser au moins une question.

[Français]

Monsieur de Savoye.

M. de Savoye: Mesdames, messieurs, je dois dire que tantôt je n'ai pas été comblé en termes de chiffres. Alors, on va oublier les chiffres et on va voir si vous êtes plus adroits sur le plan de la conscience sociale.

Lorsque la Banque du Canada baisse son taux d'escompte, c'est pour permettre à chacun et à chacune et aux entreprises d'avoir des revenus disponibles et de relancer la consommation. Lorsque vous avez des taux élevés sur des cartes de crédit, vous privez des gens d'une portion de leurs revenus disponibles qu'ils pourraient utiliser pour alimenter la consommation.

Par conséquent, ne considérez-vous pas que ces taux élevés, anormalement élevés parce qu'ils n'ont absolument pas suivi la tendance, vont à l'encontre même de la reprise économique qui repose entre autres, je vous le rappelle, sur le gagne-petit qui n'a les moyens, à la fin du mois, de payer sa facture quand il la reçoit parce qu'elle est trop élevée à cause du taux d'intérêt?

M. Protti: Monsieur le président, je vais commencer à répondre à cette question. Je reviens au diagramme 3. Vous avez mentionné les taux élevés; c'est votre remarque. Tel qu'on le démontre au diagramme 3, le taux d'intérêt des cartes de crédit est le plus faible qu'on ait vu depuis près de 25 ans dans ce pays-ci.

M. de Savoye: J'aimerais vous dire que le Bureau de la consommation - et j'imagine que ses chiffres sont exacts - nous indique que depuis les trois dernières années, les taux de MasterCard et Visa sont restés à peu près au même niveau alors que le taux de la Banque du Canada chutait considérablement. En fait, l'écart s'est agrandi; il y a maintenant au-delà de 13 p. 100 d'écart entre le taux que vous demandez sur vos cartes ordinaires et le taux d'escompte de la Banque du Canada. Ce que je vous dis ici, c'est que tout votre système de cartes de crédit, vous le financez en vaste proportion sur le dos de celui ou celle qui n'a pas les moyens de payer son compte à la fin du mois. Le résultat net de ceci, c'est qu'on a une justice sociale à l'envers. Ceux qui ont de l'argent ne paient pas et ceux qui n'en ont pas paient pour tout le système. Qu'est-ce que vous avez à dire?

M. Protti: Monsieur le président, j'aimerais faire un commentaire et mes collègues en auront peut-être d'autres. Je vous ferai remarquer que l'analyse d'Industrie Canada est basée sur les cartes régulières des banques. Comme nous l'avons noté dans le diagramme 2, on a des cartes à faible taux, à 9,35 p. 100.

M. de Savoye: Je vous demanderais une précision sur ce que vous venez de dire, monsieur Protti. Quel pourcentage des cartes en circulation sont des cartes à faible taux?

[Traduction]

Le président: Monsieur Weseluck, ou...?

M. Weseluck: Actuellement, 7 p. 100 des cartes en circulation ont un faible taux d'intérêt.

M. de Savoye: Ainsi donc, vous avez perdu 93 p. 100 de votre réponse. Merci.

Le président: Monsieur Bodnar, suivi de M. Harper, puis d'un libéral et de M. Solomon, qui doit nous quitter.

M. Bodnar (Saskatoon - Dundurn): Merci, monsieur le président.

J'ai examiné les demandes que les banques ont laissées ou que nous avons obtenues d'elles. J'ai celles de la Banque TD, la Banque de Nouvelle-Écosse, la CIBC et la Banque Royale. J'ai remarqué, surtout depuis que M. Livingston a indiqué que vous avez des préoccupations pour les consommateurs, qu'aucune de ces demandes n'indique votre taux d'intérêt, sauf dans le cas des cartes à faible taux d'intérêt, soit 9,9 p. 100 dans le cas de la Banque TD. On ne mentionne jamais le taux d'intérêt de la TD Or Élite, de la TD Or Voyage, de la TD Verte ou de la carte GM - jamais. Si vous vous souciez tant des consommateurs, pourquoi ne divulguez-vous pas cette information?

.1625

Ma question s'adresse également à la Banque Royale, car au verso de sa demande, probablement dans l'une des plus belles brochures que j'aie jamais vues, il est indiqué: «Les frais: taux d'intérêt standard». Au moment de remplir la demande, on ne sait pas quel est le taux d'intérêt.

Le président: Madame Fershko.

Mme Fershko: On ne divulgue pas les taux d'intérêt. Ils ne figurent pas sur ces brochures parce qu'elles sont datées et nous voulons avoir la possibilité de modifier les taux suivant les fluctuations du marché. Dans toutes nos succursales au Canada, les taux d'intérêt sont affichés très visiblement à plusieurs endroits. Nous ne pouvons pas les inscrire dans les brochures parce qu'elles sont datées et cela pourrait entraîner une augmentation des coûts.

M. Vessey: J'ajouterais que dans chaque publipostage ou chaque promotion que nous envoyons, toutes les banques ici présentes indiquent le taux d'intérêt. Cela rejoint les propos de Jane. Dans nos succursales, il y a des brochures dont la durée utile est beaucoup plus longue que celle des taux d'intérêt, mais les taux d'intérêt sont affichés de façon prédominante dans chaque succursale.

M. Bodnar: Et si tel est le cas, pourquoi afficheriez-vous le taux d'intérêt faible? Par exemple, la carte Visa Émeraude de la Banque TD, dont le taux d'intérêt est de 9,9 p. 100... Je comprends que cela puisse être daté, mais il y a une explication: que le taux est exact à une date précise. Pourquoi ne donnez-vous pas le taux des autres cartes, avec un astérisque indiquant qu'il est valable à une certaine date? Si vous pouvez le faire pour la carte à faible taux d'intérêt, pourquoi pas pour les autres?

Le président: Monsieur Livingston.

M. Livingston: Cette brochure a été imprimée au moment précis où nous lancions la carte. Nous avons indiqué le taux d'intérêt, et honnêtement, nous aurions probablement dû indiquer les autres taux.

M. Bodnar: L'un des plus gros problèmes, même si les taux d'intérêt ont diminué considérablement au Canada et même si cela facilite davantage l'achat d'une maison actuellement, c'est que les taux d'intérêt demeurent élevés sur les cartes de crédit, et bon nombre de consommateurs n'achètent qu'avec ces cartes. Si les taux des cartes ne diminuent pas, il est difficile de stimuler l'économie en diminuant les taux d'intérêt alors que ceux des cartes de crédit demeurent élevés.

Ne convenez-vous pas que, pour que l'économie soit mieux stimulée par les dépenses de consommation, il est essentiel que les banques participent à l'effort en réduisant sensiblement et immédiatement les taux d'intérêt?

Le président: Monsieur Protti.

M. Protti: Merci beaucoup pour cette question, monsieur Bodnar.

Comme nous avons essayé de le démontrer tout à l'heure dans notre exposé, la réponse à la question est évidemment que les banques ont effectivement réagi. Si nous revenons aux diagrammes 2 et 3, nous verrons la nature de cette réaction.

Vous avez raison de souligner l'incidence des taux d'intérêt sur le pouvoir d'achat des consommateurs. Comme l'indique le diagramme 2, les consommateurs qui veulent acheter, reportent leur solde et paient les frais d'intérêt, disposent d'une vaste gamme de choix. Pour ceux qui veulent réduire au minimum l'intérêt sur le solde reporté, les banques à charte du Canada offrent la solution des faibles taux d'intérêt.

Le président: Vous avez une dernière question, monsieur Bodnar.

M. Bodnar: Monsieur Protti, prenons l'exemple de Visa. Mettons un peu Visa sur la sellette. Quels sont les taux d'intérêt aux États-Unis pour des cartes comparables? Quelle est la carte américaine offrant le taux d'intérêt le plus bas? Quelle est la carte offrant le taux d'intérêt le plus élevé?

Mme Fershko: Aux États-Unis, la situation est un peu trompeuse à cause d'une pratique qui est très répandue. Probablement, au moins la moitié des compagnies de cartes de crédit ont cette pratique appelée... si je veux être polie, je l'appellerai «taux spécial d'introduction», mais en réalité, on l'appelle un «taux-amorce». Ce taux est appliqué pendant un laps de temps très court et varie de 6 p. 100 à 9 p. 100. Toutefois, au bout d'une période de six mois - en fait, ce délai diminue constamment - tout le monde passe au «prime plus», qui correspond habituellement au taux préférentiel plus 10 p. 100 ou 11 p. 100 environ. Leurs chiffres sont très influencés par le fait que la plupart des cartes vous attirent avec un taux qui sert d'appât. Ensuite, les gens sont coincés et le facteur d'inertie entre en jeu.

Mais j'aimerais souligner de nouveau que les banques mettent énormément l'accent sur le choix. Vous pouvez utiliser une carte de débit. Vous pouvez utiliser une ligne de crédit personnelle. Vous pouvez aussi utiliser une carte de crédit.

Je ne devrais peut-être pas mentionner cela, mais personnellement, j'ai une ligne de crédit et une carte à taux d'intérêt élevé. Même si je suis consciente du taux d'intérêt élevé associé à cette carte, je m'en sers parce que j'aime bien ses autres caractéristiques.

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Nous offrons une carte à faible taux d'intérêt depuis novembre 1992. Dans notre ancienne brochure, disponible de 1993 à 1995, on vantait en page couverture cette option d'un taux réduit. Je n'ai trouvé que neuf communiqués de presse - et je suis sûre qu'il y en a davantage - dans lesquels nous annoncions cette option. À deux reprises récemment on en a parlé dans les journaux nationaux.

Nous avons constaté depuis longtemps qu'il s'agit d'un produit à créneau. En fait, les gens sont attirés par d'autres caractéristiques. Aux États-Unis, la firme J.D. Power a fait une étude d'où il ressort que les principaux facteurs de satisfaction ne sont pas les taux d'intérêt, mais le choix de cartes, les bonis, les points aériens, etc. Le taux d'intérêt vient au troisième ou quatrième rang sur la liste.

Une étude canadienne menée il y a deux mois montre, encore une fois, que parmi les principaux facteurs de satisfaction qui expliquent le choix d'une carte ou le changement de carte, les taux d'intérêt ne sont jamais parmi les deux premiers mentionnés. Une étude Angus Reid confirme cela. C'est un élément qui ne semble tout simplement pas intéresser le consommateur.

Le président: Merci. Vous avez utilisé de façon interchangeable les verbes «attraper» et «attirer». Il serait intéressant que vous nous en donniez la définition.

Monsieur Harper.

M. Harper: Merci, monsieur le président. Puis-je poser une ou deux questions?

Le président: Vous avez cinq minutes.

M. Harper: J'espère que nous pourrons obtenir deux réponses. Je vais poser deux questions au cours des cinq minutes qui me sont allouées.

Voici la première. Il y a une controverse dans les médias quant aux profits réalisés à partir des cartes. C'est la Banque de Montréal, je crois, qui a parlé de 8 $ par carte. Les autres - je ne sais pas trop de qui il s'agit - ont mentionné des chiffres allant de 14 $ à 18 $ par carte. C'est là un écart important. Pouvez-vous m'expliquer à quoi tient cet écart?

M. Pearce: Volontiers. Voici quelques remarques au sujet de la divulgation des profits. Si ma mémoire est bonne, c'est devant votre comité, en 1992, que Al McNally, qui était responsable à l'époque du service des cartes de crédit à la Banque de Montréal, a affirmé qu'au total, les profits associés aux cartes de crédit représentaient environ 3 p. 100 des profits du groupe de sociétés de la Banque de Montréal. Votre comité sait sans doute qu'en 1996, le chiffre qu'on avançait était 3,9 p. 100.

Cela représentait environ 8 $ par carte. Il y a environ cinq millions de cartes sur le marché au Canada. Notre profit net s'établissait environ à 8 $ la carte. C'est un chiffre officiel qui a été repris dans la presse, et il est effectivement exact.

Notre banque tend vers une divulgation intégrale de ses divers secteurs d'activité. En fait, notre président a dit officiellement que dans notre rapport annuel de cette année nous allions divulguer les résultats d'une trentaine de nos secteurs d'activité. Nous allons rendre publics les profits et pertes de 30 secteurs d'activité différents, et il va de soi que celui des cartes de crédit y figurera.

Votre comité, les investisseurs et nos clients peuvent s'attendre à ce que la Banque de Montréal divulgue intégralement les profits réalisés dans le secteur des cartes de crédit, parmi nos nombreux autres secteurs d'activité.

Nous sommes à l'avant-garde en matière de divulgation. Ces deux dernières années, nous avons remporté la médaille d'or décernée par l'Institut canadien des comptables agréés et le journal The Financial Post à la suite d'une étude sur la divulgation. Nous sommes donc des chefs de file dans ce domaine.

En 1996, notre profit s'établissait à 8 $ par carte de crédit, et nous en avons environ cinq millions en circulation.

M. Harper: Merci. Voici ma dernière question, monsieur Pearce. Vous avez dit tout à l'heure que les cartes de crédit à faible taux d'intérêt n'étaient pas pour tout le monde. Je peux comprendre qu'elles n'intéressent pas les personnes qui paient intégralement leur solde, car elles se fichent bien du taux d'intérêt applicable. Elles sont en mesure de tirer parti de leur carte.

Mais pour parler de l'autre colonne du grand livre, quel est le solde moyen courant? Je crois avoir lu quelque part que le solde moyen sur les cartes de crédit était d'environ 1 500 $. Pourquoi les détenteurs de ces cartes ne sauteraient-ils pas sur l'occasion de payer la moitié moins d'intérêt? J'ai entendu parler des divers incitatifs, comme les voyages, mais j'ai du mal à accepter cela.

M. Pearce: Je crois que dans le cas des cartes dont les soldes sont reportés de mois en mois, il y a effectivement des gens qui se dotent sans hésiter d'une carte de crédit à faible taux d'intérêt.

Voyez notre portefeuille à l'heure actuelle. Nous avons lancé la carte de crédit à faible taux d'intérêt avec fanfare en mai 1996, il y a environ dix mois. À l'heure actuelle, 9,6 p. 100 des soldes impayés sur carte de crédit visent des cartes à faible taux d'intérêt. Nous voulons que ce soit davantage. Si un consommateur est en mesure de devenir titulaire d'une carte de crédit et qu'il veut emprunter pour combler ses besoins, nous voulons qu'il adhère à la carte à 9,9 p. 100 d'intérêt de la Banque de Montréal.

Excusez-moi, il s'agit de 9,4 p. 100. Le taux a été abaissé. Au départ, il était de 10,9 p. 100, et il est tombé à 9,4 p. 100.

M. Livingston: Deux brèves réponses. Comme Mme Fershko l'a dit tout à l'heure, les clients ne sont pas tous motivés par le taux d'intérêt, et c'est parce que la valeur des avantages qu'ils obtiennent est considérable.

Prenez l'exemple d'une carte qui offre des points, comme celle de la Banque Toronto-Dominion et celle de la Banque Canadienne Impériale de Commerce. Le consommateur gagne 5 p. 100 sur ce qu'il dépense alors que les économies de taux d'intérêt ne visent uniquement que ses emprunts. Il utilise sa carte pour des dépenses qui sont beaucoup plus considérables par rapport à ce qui reste en souffrance.

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Pour de nombreux consommateurs, c'est une simple équation économique: quelle carte va me donner plus d'argent? Dans de nombreux cas, les avantages représentent davantage d'argent que les économies sur l'intérêt.

Le président: Monsieur Regan, je vous prie, suivi de M. Solomon.

M. Regan (Halifax-Ouest): Merci, monsieur le président.

La semaine dernière, nous avons accueilli des représentants de la Direction des produits de consommation d'Industrie Canada qui nous ont dit que pour chaque baisse de 1 p. 100 de l'intérêt des cartes de crédit, c'est 10 millions qui étaient injectés dans l'économie. Auparavant, les taux tournaient autour du taux préférentiel plus 10 p. 100, alors qu'à l'heure actuelle, ils semblent en moyenne s'établir au taux préférentiel plus 12 p. 100, 13 p. 100 ou 14 p. 100. À mes yeux, et aux yeux de nombreux consommateurs, c'est comme si les banques retiraient chaque mois 20 millions, 30 millions ou 40 millions de l'économie canadienne, à un moment où nous avons besoin d'une reprise et où les consommateurs sont en mesure d'injecter leur argent dans l'économie pour créer des emplois.

Vous avez dit - et c'est intéressant - qu'aux États-Unis, les banques lient les taux des cartes de crédit au taux préférentiel. Les taux des cartes de crédit s'établissent au taux préférentiel plus 8 p. 100, 10 p. 100, etc. Pourquoi ne pouvons-nous pas faire cela au Canada, si on le fait aux États-Unis?

Vous avez aussi dit que vous essayiez d'apprendre aux gens comment gérer leur crédit. Je voudrais bien savoir combien d'heures vous avez passées avec votre client moyen pour l'aider en ce sens, car je n'ai jamais vu d'exemple de cela, mis à part ce que l'on peut apprendre en regardant chaque mois son relevé.

Nous avons reçu de vous aujourd'hui une trousse renfermant de nombreuses brochures. Je constate que certaines d'entre elles mentionnent les cartes à faible taux d'intérêt, alors que d'autres n'en parlent pas. Il y a en l'occurrence une brochure de la Banque Royale qui date de 1994. Cela me semble quelque peu dépassé, mais vous nous la donnez quand même.

Je constate aussi que la brochure de la Banque Royale mentionne quatre différentes cartes de crédit, mais pas celle qui est assortie d'un faible taux d'intérêt. Pourquoi ne pas la mousser? Est-ce que je fais erreur? Est-ce que l'une de ces cartes commande un faible taux d'intérêt?

Mme Fershko: La bleue offre cet avantage. La carte bleue est la carte classique. Je suis désolée, c'est la première.

M. Regan: Celle-ci.

Mme Fershko: Oui. C'est là-dessus.

M. Regan: C'est une de ses caractéristiques?

Mme Fershko: Oui. Vous pouvez choisir cela ou...

M. Regan: C'est l'une des options?

Mme Fershko: C'est exact.

M. Regan: C'est un avantage supplémentaire de cette carte?

Mme Fershko: C'est exact.

M. Regan: Merci. Il y a autre chose qui me frappe. J'ai remarqué qu'à la Banque Toronto-Dominion, la carte à faible taux d'intérêt n'offre pas les mêmes avantages que d'autres, notamment cette période de 21 jours sans intérêt. Autrement dit, avec cette carte à faible taux d'intérêt, l'intérêt commence à courir au moment de l'achat d'un article, contrairement à ce qui se passe pour d'autres cartes à faible taux d'intérêt. Il me semble que d'une façon ou de l'autre, le consommateur écope. Il ne réalise guère d'économies en adoptant ce système.

M. Livingston: Mais les frais sont également plus bas.

M. Regan: Vous dites que les frais sont également plus bas. Il s'agit des frais annuels?

M. Livingston: Oui.

M. Regan: C'est ce qui fait la différence?

M. Livingston: Bien sûr. Nous essayons d'équilibrer tous ces éléments pour faire en sorte que les titulaires d'une carte à faible taux d'intérêt de la TD ne payent aucun frais annuels.

M. Regan: Permettez-moi de vous demander ceci.

Le président: Tout à l'heure, vous avez posé certaines questions à Mme Fershko. Vouliez-vous obtenir une réponse en particulier ou souhaitez-vous présenter un autre argument d'abord?

M. Regan: Le problème c'est que j'ai trop de questions, et pas suffisamment de temps. En raison du processus qui est le nôtre, les députés ministériels ne peuvent poser que très peu de questions par rapport à leurs collègues. De par sa nature, le système favorise avec raison l'opposition, leur permettant de poser de nombreuses questions, et c'est une bonne chose.

Voici donc ma principale question. Quels sont les revenus totaux des services de cartes de crédit ventilés par les revenus totaux tirés des taux d'intérêt et des frais annuels payés par les titulaires? Quels sont les coûts totaux de ces services selon les grands principes comptables, si l'on fait une ventilation selon les frais généraux d'administration, les frais d'exploitation, la publicité, les coûts promotionnels, les mauvaises créances, les coûts liés à la fraude et au remplacement des cartes perdues ou volées?

Je sais que c'est une question plutôt détaillée. Je peux vous en donner copie pour que vous puissiez répondre de votre mieux. Si vous ne pouvez pas nous répondre en détail aujourd'hui, vous pourriez peut-être nous faire parvenir la réponse à toutes les questions qui figurent sur la liste.

Le président: Cette liste sera déposée auprès du comité.

Avez-vous une brève réponse? Je sais que la question est complexe. Voulez-vous faire un commentaire général? Monsieur Protti?

M. Protti: Peut-être un bref commentaire sur les questions. Étant donné que le temps nous est compté, monsieur le président, nous sommes tout à fait disposés à accepter des questions écrites auxquelles nous renverrions rapidement les réponses aux députés.

Le président: Le recherchiste est très doué pour garder le compte de ces questions. Pour ce qui est des choses qui resteraient en suspens, nous ferons en sorte de...

M. Regan: Examinons la question du taux préférentiel. Pourquoi ne pourriez-vous pas lier vos taux au taux préférentiel, comme cela se fait aux États-Unis?

Mme Fershko: Le taux préférentiel ne représente qu'un volet des revenus des sociétés émettrices de cartes aux États-Unis. Leurs frais sont beaucoup plus élevés que les nôtres et en fait, si vous me permettez l'expression, ils arnaquent les gens à tout coup. Elles imposent des frais pour les paiements en retard, ainsi que pour les avances en espèces. La totalité de leurs frais dépasse de loin ce qui existe au Canada.

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En outre, comme je l'ai déjà dit, leurs taux d'intérêt sont trompeurs car les taux d'intérêt que payent les consommateurs au bout du compte sont généralement plus élevés que ceux que l'on paye au Canada. Un examen à long terme vous permettra de constater que les Américains payent davantage en général, sans se rendre compte que c'est le cas. En outre, ils en obtiennent beaucoup moins pour leur argent.

Ainsi, il est arrivé que des retraités migrateurs nous écrivent - en fait, je lis toute la correspondance que nous envoient nos clients. Les retraités migrateurs nous écrivent souvent pour nous dire qu'ils arrivent des États-Unis et qu'ils ont vu annoncer une carte or de la Chase Manhattan que l'on peut se procurer sans frais, et à tel ou tel taux d'intérêt. Voici ce que je leur réponds: Avez-vous remarqué qu'après six mois, le taux grimpe à tel ou tel niveau, généralement plus élevé que le nôtre, et que cette carte or n'offre pas d'assurance médicale à l'extérieur de la province, ni d'annulation de voyage, d'assurance-collision, de programme de primes, etc., etc.?

On en obtient généralement beaucoup plus pour son argent au Canada si l'on regarde toute l'équation, et je me livrerai volontiers à cet examen.

Le président: Monsieur Solomon.

M. Solomon (Regina - Lumsden): Merci, monsieur le président.

Les Canadiens qui se sont plaints auprès de moi des taux d'intérêt élevés qu'exigent les banques et d'autres établissements pour les cartes de crédit sont au courant des mêmes indicateurs économiques que nous tous. J'en ai mentionné cinq aujourd'hui: l'inflation est à son plus bas depuis longtemps; les faillites sont à un niveau record; l'endettement personnel comme pourcentage du revenu disponible atteint des sommets; les taux d'intérêt n'ont jamais été aussi bas depuis les années 40 ou 50 et les banques affichent les profits les plus considérables de leur histoire.

Face à ces indicateurs économiques, ils examinent la tendance. Ils savent que traditionnellement les cartes de crédit MasterCard et Visa ajoutaient 9 ou 10 p. 100 au taux préférentiel. Comme mon collègue de Halifax-Ouest l'a mentionné, cet écart s'est maintenu de façon assez stable jusqu'à la dernière moitié de l'année dernière et le premier trimestre de cette année, alors que l'écart n'est plus de 9 ou 10 p. 100, mais entre 13 et 14 p. 100.

Nous nous demandons pourquoi il faut attendre aussi longtemps avant de voir une baisse de cet écart. Je suis très curieux de savoir pourquoi.

Deuxièmement, vous avez dit dans votre exposé que vos taux étaient compétitifs par rapport aux taux en vigueur aux États-Unis, en Grande-Bretagne et dans d'autres pays. Or, le taux préférentiel américain est 8,5 p. 100. Le taux préférentiel canadien est 3,25 p. 100 ou 3,5 p. 100. Pourtant, vous affirmez être concurrentiels. Il y a manifestement cinq points ou cinq points et demi qui manquent quelque part dans cette équation pour expliquer dans quelle mesure nos taux sont compétitifs.

J'aimerais que vous abordiez ces deux questions, si vous le pouvez.

M. Protti: Monsieur le président, nous reviendrons certainement par écrit sur cette question des écarts car, comme vous le savez, nous avons certaines préoccupations à l'égard de toute comparaison fondée sur les écarts.

Les consommateurs ne payent pas un écart; ils payent un taux d'intérêt. L'analyse que nous avons vue est fondée sur le taux d'une carte standard, alors qu'en fait, les consommateurs peuvent se procurer sur le marché une carte de crédit à 9,25 p. 100 auprès d'une banque canadienne. Or, cela ne vaut pas pour les autres sociétés émettrices sur le marché qui exigent des taux beaucoup plus élevés que le taux de base d'une carte à faible taux.

Évidemment, nous pensons que l'écart ne représente pas ce que paye le consommateur. Ce dernier paye un taux d'intérêt, et non un écart. De multiples autres facteurs entrent en ligne de compte, comme nous avons essayé de vous le montrer sur le quatrième diagramme, qui dressait la liste des composantes des coûts associés à une carte de crédit. Or, le coût des fonds n'est qu'un des six éléments de base.

Monsieur le président, je pense que sur cette question, vous méritez une réponse par écrit de notre part, et nous vous en fournirons une.

Le président: Monsieur Solomon.

M. Solomon: Je suis impatient de recevoir votre réponse écrite, mais je pense que vous esquivez la question, surtout parce que lorsqu'on examine les écarts... Par exemple, en 1991, le taux d'inflation était plus élevé qu'il ne l'est à l'heure actuelle, le taux préférentiel était trois fois plus haut qu'il ne l'est à l'heure actuelle et les faillites étaient moins nombreuses. D'autres indicateurs économiques révèlent que l'endettement personnel comme pourcentage du revenu disponible total était inférieur à ce qu'il est maintenant. Pourtant, si l'on tient compte de tout cela, la marge n'est sans doute pas 13 ou 14 p. 100 plus grande, mais probablement dans les 20 p. 100.

J'ai l'impression que les Canadiens veulent connaître un peu plus en détail... Je ne parle pas des primes et autres choses du genre. Nous comprenons tous cela. C'est un coût commercial. Les gens vont choisir leurs cartes de crédit comme bon leur semble, selon leur préférence. Mais pour ce qui est de la marge ou de l'écart, je crois que les choses sont hors de contrôle.

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Vous vous souviendrez qu'avant 1981, un projet de loi à l'étude au Canada voulait imposer un plafond de 12 p. 100 à toutes les institutions financières. À l'époque, les taux d'intérêt avaient atteint des sommets inégalés, mais le gouvernement libéral a abrogé ce projet de loi. À l'heure actuelle, les taux ne sont plus de 12 p. 100, mais de 18 p. 100, et dans bien des cas, les cartes de détail exigent des taux de 28 p. 100, alors que le taux préférentiel s'élève à 3,5 p. 100. On n'a plus des taux de 17, 18 et 19 p. 100, comme au début des années 80.

Il y a donc quelque chose qui cloche. Les Canadiens ont du mal à avaler qu'ils doivent payer ce genre de pourcentage, et je pense que vous devriez réagir à cette situation de façon générale.

Le président: Monsieur Vessey, voudriez-vous donner une réponse?

M. Vessey: Oui.

Monsieur Solomon, l'un des problèmes en l'occurrence tient à la multiplicité des produits que nous offrons... Un thème revient constamment dans la bouche des membres du comité: ils souhaitent que nous offrions dans le même paquet tous les avantages aux titulaires de cartes, y compris un faible taux d'intérêt. M. Shepherd a demandé pourquoi nous n'abaissions tout simplement pas les taux sur toutes nos cartes.

Voici une ventilation du portefeuille de la Banque Canadienne Impériale de Commerce, pour vous donner certains faits et chiffres. Quand nous avons abaissé le taux de notre carte classique, cela représentait l'équivalent de 170 points de base, ou 12 $ par carte pour chaque carte classique en circulation.

Il y a différents prix pour les avantages disponibles, notamment les voitures, l'assurance médicale, les points aériens, etc. Pour vous donner un chiffre approximatif aux fins de la discussion, et parce que je ne pense pas que cela soit mentionné, cela représente en moyenne 100 points de base. Prenons donc ces chiffres. Nous sommes maintenant rendus à 270 points de base.

Monsieur Solomon, vous avez mentionné que le nombre de faillites avait augmenté l'année dernière. Il est indéniable que depuis un an ou un an et demi le pourcentage des pertes a augmenté, certains, ont commencé à différents points, et les différents portefeuilles ont donné des résultats différents. Mais approximativement, on peut dire que 100 points de base, ce n'est pas hors de question pour ce qui est de ceux qui ont augmenté... Sans parler des taux de fraudes, et je pourrais continuer sur ma lancée.

Nous nous heurtons à un problème avec les cartes émises en collaboration avec une société. Prenez l'exemple du client qui souhaite une carte sans frais. Si nous exigeons des frais, cette personne ira adhérer à la Banque de Montréal parce que les frais représentent pour ce client en particulier le facteur le plus important.

Nous avons compartimenté le marché dans notre pays, et nous ne pouvons revenir en arrière. Nous l'avons compartimenté en divers segments. Il y a des personnes qu'intéressent vivement des programmes de primes très coûteux. Ces personnes affichent des comportements différents quant au pourcentage d'entre elles qui paie ou qui ne paie pas le solde de leur carte. Il y en a d'autres qui veulent de l'assurance médicale à l'étranger et nous avons dû en refuser parce que les compagnies d'assurance avaient augmenté nos taux. Vos commettants se plaignent à vous et ils se plaignent à nous parce que nous avons dû refuser une couverture aux personnes âgées de plus de 65 ans. Je n'ai jamais été aussi malmené au bureau que lorsque nous avons dû faire cela en raison des coûts faramineux que cela représentait.

Il y a aussi, parmi notre clientèle, les gens qui veulent des autos. Et nous avons maintenant un segment de marché qui veut des taux d'intérêt plus faibles. Je suis étonné - en fait, j'attendais les coups - que la CIBC n'offre pas une telle carte. Eh bien, nous en aurons une et nous en aurons une parce que mes bons amis autour de moi ont créé un marché.

Je voudrais soulever un point...

Le président: Monsieur Vessey, je dois...

M. Vessey: C'est mon dernier point. Sept p. 100 du marché canadien des cartes de crédit, c'est énorme, compte tenu du peu de temps qui s'est écoulé depuis l'introduction de ces cartes. Les gens se précipitent en foule pour se procurer ces cartes à faible taux d'intérêt et un marché important a été créé. Et même si la CIBC met plutôt l'accent sur les cartes émises en collaboration, nous ne ménagerons aucun effort pour conserver notre clientèle dans le marché des cartes à faible taux.

Le président: Merci, monsieur Vessey. Merci, monsieur Solomon.

Monsieur Lastewka.

M. Lastewka (St. Catharines): J'ai trois questions, la première portant sur la trousse qui s'adresse aux étudiants universitaires. On a dit tout à l'heure que vous gardez les taux bas, etc. Mais en examinant ces trousses, il n'y est pas question des cartes ordinaires. Nous ne disons pas à nos étudiants qu'ils peuvent se procurer des cartes ordinaires. Toute la promotion, du moins d'après ce que j'ai en main - les trousses portent sur les milles aériens, une nouvelle maison ou quoi que ce soit. C'est donc ma première question - et j'ai remarqué que le nom de la CIBC figure là-dessus.

Mon autre question porte sur les renseignements donnés aux consommateurs quant au montant d'intérêts payés. Cette question a déjà été posée. Je pensais que cela faisait partie du plan, que l'on dirait aux consommateurs au moins une fois par année, combien d'intérêts ils ont payés sur leur carte. On leur dit à chaque mois à combien s'élèvent leurs achats. Je sais que vous allez me répondre que c'est «un problème d'informatique», mais j'espère que non.

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Pourquoi ne pas renseigner nos consommateurs, afin qu'ils soient bien au courant? Comme quelqu'un l'a dit tout à l'heure, il est nécessaire, d'après moi, de mieux renseigner le consommateur. Ceux qui ont une hypothèque devraient recevoir une fois par année un relevé précisant combien ils ont payé sur leur hypothèque et combien d'intérêts ils ont payés, afin de pouvoir mieux planifier leurs affaires. J'aimerais beaucoup voir un programme de ce genre.

La semaine dernière, on nous a donné des renseignements concernant l'écart. Je suis content que M. Protti ait dit que le taux d'intérêt n'est pas déterminé par l'écart.

Je vais mettre cette question de côté, mais je vous demande d'y réfléchir, monsieur Protti. Si les taux d'intérêt augmentent quatre ou cinq fois, j'espère que ce n'est pas pour cette raison que l'on a lancé les cartes à faible taux.

Le président: Monsieur Protti ou monsieur Pearce?

M. Pearce: J'ai déjà fait deux interventions sur les étudiants et je répondrai donc à votre deuxième point, à savoir la divulgation au consommateur du montant d'intérêts qu'il a payés.

Nous, à la Banque de Montréal, l'inscrivons tous les mois sur nos relevés. J'en ai ici une copie. Il y a une case au bas où l'on précise au consommateur quel taux d'intérêt il doit payer et le montant d'intérêts que nous lui demandons de payer chaque mois. On ne peut donc pas nous reprocher de ne pas le faire au moins une fois par année, puisque nous le faisons tous les mois.

M. Lastewka: Est-ce cumulatif, depuis le début de l'année?

M. Pearce: Non, c'est simplement un calcul mensuel. Si le consommateur veut connaître le total depuis le début de l'année, il n'a qu'à faire l'addition, puisque la plupart des gens conservent leurs relevés. Nous l'affichons sur notre relevé mensuel et c'est clairement indiqué à la première page, ce n'est pas enfoui quelque part en petits caractères. C'est là, en première page; on indique clairement quel est le taux et combien d'intérêts le consommateur doit payer pour le mois.

Franchement, je ne vois vraiment pas comment nous pourrions être plus clairs en fait de divulgation du taux d'intérêt. C'est simple et c'est sur la première page du relevé, là où l'on indique les achats.

M. Lastewka: Le montant des achats est-il indiqué cumulativement, depuis le début de l'année, ou bien seulement pour le mois?

M. Pearce: Seulement pour le mois. Essentiellement, c'est un relevé mensuel, mais à chaque mois, nous disons au consommateur, exactement, à un cent près, le montant d'intérêts qu'il paye. S'il veut faire l'addition, c'est sa prérogative. Nous recevons très peu ou pas du tout d'appels à notre centre téléphonique de gens qui demandent «quel est mon coût annuel en intérêts?» Les gens qui veulent savoir cela conservent leurs relevés.

Le président: Monsieur Lastewka, voulez-vous entendre ce qu'a à dire un des autres témoins, qui voulait intervenir?

M. Lastewka: Oui, madame Fershko.

Mme Fershko: Si nous ne l'avons pas, c'est simplement parce que nos clients ne le réclament pas. Comme je l'ai déjà dit, je lis les 300 quelques lettres que nous recevons chaque année de nos clients - c'est à peu près tout ce que nous recevons; nous recevons plus d'appels téléphoniques - et je n'ai pas encore vu une seule demande de la part d'un client qui voulait qu'on calcule le montant d'intérêts qu'il ou elle avait payés sur l'année, et je suis dans le domaine des cartes de crédit depuis deux ans maintenant.

Cela dit, il ne s'agirait pas simplement de tourner un bouton. Il faudrait en fait apporter des changements assez considérables aux systèmes, lesquels coûteraient cher. Il n'y a pas vraiment de demande. S'il y avait une demande importante, comme nous le faisons dans la plupart des cas, nous répondrions à la demande de nos clients.

M. Lastewka: Je pourrais peut-être simplement vous photocopier les lettres que j'ai. Si c'est ce qu'il faut faire pour obtenir quelque chose des banques, eh bien, c'est ce que nous ferons, mais il me semble que ce n'est pas ainsi qu'il faudrait procéder. Si les gens veulent savoir combien d'intérêts ils paient, on devrait le leur dire. Je ne suis pas membre de la Banque de Montréal, mais je suis heureux de savoir que c'est ce qu'on y fait chaque mois.

Mme Fershko: Nous faisons tous cela.

M. Lastewka: Bien sûr, et certains le font en des caractères bien plus petits que d'autres.

Mme Fershko: [Inaudible]

M. Lastewka: Bon...

Suffit-il de réagir aux plaintes, ou faut-il réagir parce que ce serait bien que les clients sachent combien ils paient? Vous avez parlé d'information et de sensibilisation; je veux vous prendre au mot à ce sujet.

Le président: Monsieur Vessey.

M. Vessey: Nous recevons huit millions d'appels téléphoniques à nos centres d'appel VISA à la CIBC; nous tenons compte du motif de l'appel, de ce que demandent les gens quand ils appellent et des questions qui les préoccupent. Nos clients nous demandent toutes sortes de modifications à nos systèmes, et je dois dire, comme Jane, que cette question n'apparaît même pas sur notre écran radar.

Je comprends ce que vous dites au sujet du mérite qu'il y aurait à faire cela de nous-mêmes, mais je dois m'aligner avec Rob là-dessus. Nous avons répondu à plusieurs demandes qui nous ont été faites par des comités antérieurs. Toutes les institutions financières qui sont représentées ici ont en fait répondu à ces demandes de manière à éviter les caractères de micro-imprimerie sur nos relevés. En fait, nous indiquons tous clairement sur nos relevés mensuels le taux d'intérêt qui s'applique et le montant des intérêts à payer.

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Nous tenons compte des autres choses que nos clients nous demandent de changer dans nos systèmes. Nous donnons suite à ces demandes. Nous devons y donner suite pour pouvoir demeurer compétitifs sur le marché d'aujourd'hui.

Le président: Monsieur Pearce, avez-vous une dernière remarque à faire à ce sujet?

M. Pearce: Le comité n'a pas à s'inquiéter; si je croyais pouvoir inciter des clients de Visa à venir prendre notre MasterCard à la Banque de Montréal en indiquant sur le relevé le montant des intérêts qu'ils paient sur l'année, je le ferais.

M. Lastewka: Je veux entendre ce que M. Protti a à dire en réponse à ma dernière question.

Nous avons parlé la semaine dernière de l'écart entre le taux d'escompte de la Banque du Canada et le taux qui s'applique aux cartes de crédit. Vous avez beaucoup insisté sur le fait que l'écart n'est pas le seul élément qui entre en ligne de compte; il y en a d'autres qui interviennent quand il s'agit de maintenir le taux d'intérêt à un niveau peu élevé.

M. Protti: Vous avez parfaitement raison, monsieur. C'est exactement ce que nous avons essayé de démontrer, et c'est pourquoi nous vous avons présenté le diagramme 4 au sujet des éléments qui déterminent les coûts liés aux cartes de crédit.

Il y a une multitude de facteurs qui entrent en ligne de compte dans l'établissement des taux d'intérêt de ces cartes. Le loyer de l'argent est manifestement de ce nombre, tout comme les mauvaises créances, les pertes attribuables à la fraude, le coût des avantages dont mes collègues des banques qui sont ici présents vous ont parlé, les coûts d'administration et les risques qu'il y a à faire crédit sans avoir de garantie, car c'est ce que nous faisons dans le secteur des cartes de crédit. Aucun des détenteurs n'est tenu d'offrir quelque garantie que ce soit.

Ce sont là autant de facteurs génériques qui entrent en ligne de compte dans la décision d'exiger tel ou tel taux d'intérêt.

M. Lastewka: Ainsi, si le taux d'escompte augmente une ou deux fois à l'avenir, ce ne sera pas nécessairement pour cette raison que le faible taux d'intérêt augmentera immédiatement.

Le président: Monsieur Vessey, je vous permets une dernière intervention rapide à ce sujet.

M. Vessey: C'est la concurrence qui sera le facteur déterminant. Vous avez d'ailleurs été témoin des coups que nous échangeons même à cette table. Il ne va pas venir me prendre un de mes détenteurs de cartes.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur de Savoye, puis ce sera au tour de M. Ianno.

[Français]

M. de Savoye: Monsieur Vessey, vous dites que le client ne paie pas un écart; il paie un taux d'intérêt. C'est vrai, mais c'est la banque qui fait son profit sur l'écart. Alors, regardons les écarts. En 1981, la Banque du Canada a un taux d'escompte de 17,93 p. 100 et MasterCard et Visa sont à 22 p. 100. C'est un écart de 4,07 p. 100. En 1997, 16 ans plus tard, la Banque du Canada a un taux d'escompte de 3,25 p. 100 et Visa, pour citer les chiffres du Bureau de la consommation, est à 16,5 p. 100. C'est un écart de 13,25 p. 100. En bon français, ou bien vous êtes trois fois moins productifs dans vos affaires, ou bien vous faites au minimum trois fois plus de profit, ou bien vous étiez de très mauvais administrateurs à l'époque et vous perdiez de l'argent par-dessus la tête.

Il y a quelque chose qui ne va pas là-dedans. Quand je paie un habit plus cher, j'ai un habit plus élaboré. Quand je paie une voiture plus cher, j'ai une voiture avec plus d'options ou d'une meilleure qualité. Mais quand je paie un taux d'intérêt plus élevé sur vos cartes, je me fais avoir. Il y a quelque chose quelque part qui ne fonctionne pas dans votre système.

Vous avez dit également que vos amis des autres banques avaient créé un marché. Vos amis des autres banques ne sont pas en train de créer un marché. Ce sont les députés de cette Chambre, au nombre de 150, qui sont en train de faire en sorte que les lois du marché vont s'appliquer dans le cas des cartes de crédit. Encore une fois, je vous pose la question: Comment se fait-il que le taux d'escompte de la Banque du Canada a chuté dramatiquement? Vous avez multiplié votre écart par trois: 300 p. 100 d'inflation sur votre écart. C'est quoi, l'histoire? Vous faites plus de profit ou vous êtes de moins en moins productifs? Où se situe la vérité?

[Traduction]

M. Vessey: Je serai heureux de répondre à cette question puisque j'ai passé toute ma vie dans le secteur des cartes de crédit.

Tout d'abord, si nous remontons dans l'histoire, il ne fait aucun doute que, à l'origine, dans les années 70, les entreprises émettrices de cartes de crédit des institutions financières n'étaient pas rentables. Elles ont même perdu beaucoup d'argent. Nous pouvons dire que c'était à cause de problèmes de gestion ou nous pouvons attribuer ce manque de rentabilité à la nouveauté du produit, mais le fait est que le produit ne générait pas de bénéfices. C'est un fait bien connu de ceux qui se livrent à ce genre d'activité à l'époque.

.1700

Revenons maintenant au passé plus récent... Voyons ce qui s'est passé depuis ces périodes auxquelles vous avez fait allusion; les taux de perte sur ces instruments ont grimpé de façon spectaculaire. Quand je dis spectaculaire, c'est que, dans l'intervalle qui s'est écoulé depuis la période à laquelle vous avez fait allusion dans votre argument, c'est qu'ils ont augmenté de 300 points de base.

Il faut donc revenir à certains des autres facteurs dont j'ai parlé tout à l'heure. Auparavant, nous exigions des frais. Je crois même que la plupart des institutions financières représentées ici, quand elles ont institué des frais, exigeaient plus de 20 $ des détenteurs de cartes. La concurrence a fait baisser les frais à 12 $ à peu près. Je crois que la Banque de Montréal a lancé une carte qui ne comportait pas de frais du tout et qu'elle a ainsi créé un marché différent. Il s'est produit des changements énormes dans le fonctionnement de ces produits. Je reviens à mon argument de tout à l'heure: le marché devient de plus en plus fragmenté.

Je ne veux pas du tout nier que le travail des députés a contribué à sensibiliser la population au marché des cartes de crédits à faible taux d'intérêt. Cela ne fait aucun doute. Je ne veux pas du tout le nier, mais je vous ferais remarquer par ailleurs que certains des représentants qui sont ici aujourd'hui avaient déjà lancé des cartes à taux réduit il y a de cela trois ans ou trois ans et demi. Quand mon collègue ici et moi-même...

[Français]

M. de Savoye: Vous mentionnez que des cartes à taux réduit ont été introduites sur le marché il y a déjà trois ans. Or, M. Weseluck me disait que ces cartes à meilleur marché ne représentent que 7 p. 100 des cartes détenues. J'ai une question à vous poser.

Combien d'argent les banques ont-elles investi collectivement en publicité pour les cartes à taux réduit et, pour faire une comparaison intelligente, combien investissez-vous présentement en publicité pour les REER?

M. Protti: On n'a pas le montant total de l'investissement de chaque banque pour la promotion des cartes à faible taux. Il est évident que cela doit se situer dans les millions de dollars. Je vous rappelle la remarque qu'un de mes collègues a faite il y a une quinzaine de minutes, à savoir qu'un progrès de 7 p. 100 en l'espace de quatre ans, c'est un progrès vraiment important dans un marché aussi compétitif que celui-ci.

[Traduction]

M. Weseluck: J'ajouterais à cela que, pour les nouveaux comptes, la proportion est de 15 p. 100, de sorte que la tendance semble vouloir s'accentuer. Même si la proportion est de 7 p. 100 pour l'ensemble des détenteurs, la proportion pour les nouveaux clients est plus importante. Si vous me permettez de revenir à ce que disait M. Regan, c'est là une autre raison pour laquelle nous avons inclus des données de 1994, voire des données de 1992; nous voulions montrer que ces cartes existent depuis déjà cinq ans et que nous en avons fait la publicité. Voilà ce qui explique que nos données remontent à ces années-là.

Le vice-président (M. Lastewka): Merci beaucoup.

Monsieur Ianno.

M. Ianno (Trinity - Spadina): Je veux aborder la question dans une optique différente, celle des détenteurs les plus défavorisés, qui se trouvent coincés chaque mois et qui représentent le tiers de tous les détenteurs. Il y a quelque chose qui m'intrigue à ce sujet. Quand ces gens ont du mal à payer les intérêts sur le montant qu'ils doivent - l'intérêt atteint au moins 18 p. 100 - , quand ils viennent vous demander un prêt, à quel taux leur accordez-vous le prêt si tant est qu'ils réussissent à en obtenir un sans garantie?

M. Vessey: Je vous répondrai de deux façons. Premièrement, il faut comprendre que les instruments ne sont pas les mêmes. Quand quelqu'un vient demander...

M. Ianno: Excusez-moi. Vous me disiez qu'il fallait comprendre...

M. Vessey: J'essaie de bien préciser la différence entre les deux types de prêts, entre le prêt sur carte de crédit et celui que nous accordons à la personne qui se présente chez nous pour demander un prêt.

M. Ianno: Ma question porte sur ceux qui se présentent chez vous pour demander un prêt.

M. Vessey: Oui. Pour ces gens-là qui viennent demander un prêt, quand nous discutons avec eux et que nous examinons... tout dépend de la situation la personne et de ses antécédents de crédit.

M. Ianno: Je vois. Ces antécédents de crédit sont donc un facteur.

M. Vessey: Absolument.

M. Ianno: À quel taux prêteriez-vous de l'argent à ces gens s'ils avaient du mal à effectuer leurs paiements mais qu'ils continuaient à les effectuer?

M. Vessey: Au taux préférentiel plus 4 p. 100. Je suis désolé, mais je n'ai pas ici les lignes directrices à ce sujet.

M. Ianno: Au taux préférentiel plus 4 p. 100. À combien cela reviendrait-il si l'on tient compte du taux préférentiel actuel?

M. Vessey: À 8 ou 9 p. 100.

M. Ianno: C'est donc 8 ou 9 p. 100 comparativement à 18 p. 100.

M. Vessey: Pas 18 p. 100...

M. Ianno: Non, 18 p. 100, c'est ce que vous exigez pour votre carte de crédit.

.1705

M. Vessey: Non, je ne crois pas qu'aucune des institutions représentées à cette table n'exige ce taux pour sa carte de crédit.

M. Ianno: Quelle est la norme pour les cartes de crédit?

M. Vessey: C'est 16,5 p. 100.

M. Ianno: Je suis désolé; 16,5 p. 100 par rapport à 18 p. 100 - la différence est énorme. Nous parlons donc du double en tout cas, n'est-ce pas?

M. Vessey: Oui.

M. Ianno: Les étudiants qui se présentent chez vous, qui n'ont pas d'antécédents de travail, pas de revenu - quel taux exigez-vous pour les cartes de crédits que vous leur donnés?

M. Vessey: Je voudrais tout d'abord faire deux observations.

M. Ianno: Ça va pour les observations. Je n'ai que cinq minutes. Je vous demanderais de bien vouloir répondre à la question.

M. Vessey: Quand on émet une carte de crédit, cependant, - il est important de le comprendre - , c'est pour la vie. La carte est émise, et nous ne réexaminons jamais la situation financière du détenteur. Si donc le détenteur se retrouve en difficulté pendant qu'il a la carte, l'institution financière émettrice subit une perte.

Quand on accorde un prêt à terme, le remboursement se fait sur une période déterminée, soit de 12, de 24 ou de 36 mois. Il est possible d'évaluer le risque lié à ce prêt.

M. Ianno: Excusez-moi, c'est bien beau de me faire une réponse aussi longue, mais je n'ai pas beaucoup de temps.

Le vice-président (M. Lastewka): Je vous demanderais de poser votre question, de lui permettre d'y répondre et, si la réponse est trop longue, j'interviendrai.

M. Ianno: Allez-vous m'accorder plus de temps, monsieur le président, si vous décidez que la réponse est très longue?

Le vice-président (M. Lastewka): Je veux simplement veiller à ce que la question soit posée et que la réponse soit ensuite donnée.

M. Ianno: Je veux savoir si l'étudiant qui se présente chez vous pour demander une carte de crédit, que vous encouragez à demander une carte de crédit... et le maximum est de 500 $ ou 2 000 $? Quelle est la norme, 500 $? Si l'étudiant vient vous demander un prêt de 500 $ sur un terme de six mois, comment faites-vous pour décider si vous devriez lui accorder le prêt qu'il demande?

M. Vessey: Pour ce qui est de la norme, un prêt de 500 $, c'est assez petit et il est assez rare qu'on vienne nous demander un prêt pour ce montant.

M. Ianno: L'étudiant en question réussirait-il à obtenir le prêt s'il n'avait ni revenu ni emploi?

M. Vessey: Non.

M. Ianno: Non. Et si vous deviez accorder un prêt à cet étudiant, le taux se rapprocherait plutôt de 8 ou de 9 p. 100, comme vous l'avez dit tout à l'heure, ou du taux préférentiel plus un certain pourcentage?

M. Vessey: Je ne sais pas trop où vous voulez en venir avec cette question.

M. Ianno: Vous n'êtes pas sûr de la question? La voici: si l'étudiant en question se présentait à l'une des banques pour demander un prêt de 36 mois, le taux auquel vous lui accorderiez le prêt serait de 8 p. 100, si tant est qu'il réponde aux conditions.

M. Vessey: C'est juste.

M. Ianno: Cependant, comme l'étudiant n'a pas d'emploi, il y a peu de chances qu'il réponde aux conditions. Par contre, il y aurait de fortes chances qu'il réponde aux conditions pour obtenir une carte de crédit avec un taux d'intérêt de 16,5 p. 100 ou de 18 p. 100, sans même avoir d'emploi. Cela n'équivaut-il pas en fait à encourager les gens à accepter un taux d'intérêt plus élevé, qui est le double de l'autre, et à vous payer beaucoup plus d'argent?

M. Vessey: Non, je ne le crois pas. Je crois que Rob l'a dit de façon très éloquente tout à l'heure; ce n'est pas là notre intention dans le secteur des cartes de crédit.

Monsieur Ianno, nous accordons beaucoup de prêts étudiant qui ne sont pas de ceux qui sont garantis par le gouvernement et auxquels certains d'entre nous participent de façon importante, non pas seulement avec vous, mais avec les provinces. Nous accordons beaucoup de prêts étudiant à des étudiants qui ne répondent pas aux conditions des programmes gouvernementaux qui sont financés...

M. Ianno: De quels programmes gouvernementaux parlons-nous?

M. Vessey: Des prêts étudiant.

M. Ianno: Le gouvernement garantit le montant que vous prêté sur vos cartes de crédit...

M. Vessey: Non, je parlais des programmes de prêts étudiant comme tels.

M. Ianno: Ce ne sont pas les programmes de prêts étudiant qui m'intéressent, mais bien la carte de crédit que vous offrez à des étudiants qui, dans d'autres conditions, ne pourraient obtenir de prêt et se trouvent ainsi à payer le double du taux d'intérêt qu'ils payeraient s'ils pouvaient obtenir un prêt.

Voici ma question: à part les étudiants, combien de mes électeurs ne peuvent pas obtenir un prêt de 2000 $ mais peuvent néanmoins obtenir une carte de crédit avec un maximum de 2000 $, à un taux d'intérêt qui est le double de celui qu'ils payeraient sur un prêt, soit 16 ou 18 p. 100 par rapport à 8 p. 100? Que faisons-nous pour veiller à ce que ces gens qui ont du mal à joindre les deux bouts à la fin du mois ne soient pas exploités?

M. Vessey: Tout d'abord, j'ai un chiffre à vous communiquer qui, je l'espère, vous aidera: quelque 50 p. 100 des gens qui viennent demander une carte de crédit aux institutions financières qui sont représentées ici - et le chiffre peut varier - n'en obtiennent pas. J'ai l'impression que vous vous imaginez que nous donnons ces cartes à tout un chacun qui se présente chez nous.

.1710

M. Ianno: Vous en donnez même aux chiens.

M. Vessey: Excusez-moi. À la BCIC, le taux d'approbation finale des demandes de cartes de crédit... Quelque 48 p. 100 de ceux qui demandent une carte de crédit n'en obtiennent pas. Leur demande est refusée. Je crois que vous constaterez - et je vous inviterais à regarder mes collègues qui vous signifieront leur accord - que les chiffres sont à peu près les mêmes partout.

Je ne veux pas laisser entendre que nous n'avons pas commis des erreurs par le passé en ce qui concerne les approbations préalables, les listes que nous produisions à partir d'autres listes en supposant que les données de la première liste étaient exactes, ou encore dans le cas de ceux qui essayaient de nous jouer des tours en ne nous donnant pas le bon bureau de crédit ou le bon nom ou quelque chose du genre. Je ne veux toutefois pas que vous ayez l'impression, monsieur Ianno, que nous donnons des cartes à tout un chacun qui se présente chez nous. Je suis désolé, mais ce n'est pas du tout le cas.

M. Ianno: Quel est donc le pourcentage de refus?

M. Vessey: Je viens tout juste de vous le dire.

M. Ianno: C'est 48 p. 100?

M. Vessey: À mon institution, c'est 48 p. 100.

M. Ianno: Vous parlez donc pour votre institution, je voudrais que l'ABC réponde à la question, pour que nous sachions ce qu'il en est de l'ensemble des institutions.

M. Protti: Nous n'aurions pas de données à ce sujet.

M. Ianno: Pouvons-nous obtenir ces données?

M. Protti: L'information serait différente d'une institution à l'autre.

Le vice-président (M. Lastewka): Pouvons-nous demander à ceux qui sont ici de nous dire quel est le chiffre pour leur institution?

M. Livingston: C'est plus de 50 p. 100 à la TD.

Mme Fershko: C'est plus de 50 p. 100.

M. Ianno: Ceux à qui on refuse des cartes de crédit?

M. Pearce: Notre taux est légèrement meilleur, je crois. Je crois que nous refusons quelque 45 p. 100 des demandes que nous recevons. La différence est finalement négligeable.

M. Ianno: Et la plupart de ceux qui demandent des cartes de crédit travaillent?

Un témoin: [Inaudible]

M. Ianno: Pourtant, l'étudiant qui n'a pas d'emploi peut obtenir une carte de crédit?

M. Livingston: Les étudiants se révèlent le plus souvent le genre de clients que nous voulons avoir. Leur comportement est excellent. C'est pour eux une bonne éducation. Ils veulent ces cartes; ils les trouvent utiles. Les étudiants constituent une des meilleures catégories de risque que nous ayons.

Le vice-président (M. Lastewka): Bon, nous allons poursuivre. Merci, monsieur Ianno.

Nous passons maintenant à M. Murray.

M. Murray (Lanark - Carleton): Merci monsieur le président.

Je voudrais aborder la question de l'effet global du crédit sur l'économie. Je sais que certains de mes collègues en ont déjà parlé.

Mais avant, j'ai une brève question qui ne porte pas directement sur les cartes. Les frais que les marchands doivent payer ont-ils changé ces dernières années?

M. Pearce: Oui, à la baisse.

M. Murray: Ils ont baissé.

M. Pearce: Chose certaine, pour ce qui est de MasterCard, les frais ont baissé constamment depuis 24 ans que notre institution suit l'évolution des frais que doivent payer les marchands. On a dit tout à l'heure que nous faisons payer 2 p. 100. 3 p. 100 ou 4 p. 100 aux marchands. Je crois que c'était une question de ce côté-ci. Les frais moyens payés par les marchands sont inférieurs à 2 p. 100 actuellement, dans le monde de MasterCard. Franchement, c'est nettement inférieur à 2 p. 100 et je n'en dirai pas plus. Cela n'a cessé de baisser depuis 24 ans.

M. Murray: Autrement dit, ce n'est pas une considération importante quand on examine le coût global des biens et services dans l'économie.

Beaucoup d'entre nous conviennent qu'il y a de bonnes raisons d'emprunter et de mauvaises raisons d'emprunter, pour un consommateur. Les bonnes raisons, ce sont souvent des choses comme les hypothèques, ou encore les emprunts contractés pour investir dans un REER ou pour gagner de l'argent. Je pense que la plupart des gens conviennent que c'est une mauvaise chose que d'emprunter pour acheter l'épicerie, ce qui est essentiellement le cas quand on a un solde impayé sur une carte de crédit. On emprunte pour acheter des articles.

Encore une fois, j'essaie de comprendre quelle est l'incidence globale sur l'économie, plutôt que sur les particuliers. Vous nous avez peut-être donné ce chiffre et je l'ai raté, mais savez-vous quel est le montant total de l'intérêt payé sur l'ensemble des cartes bancaires en une année donnée? Est-ce que c'est un chiffre connu?

M. Protti: Je n'ai pas ce chiffre, mais pour vous donner une petite idée, la dette totale à la consommation est d'environ 470 milliards de dollars, je crois. Les frais d'intérêt sur les cartes de crédit représentent environ 19 milliards de dollars de ce chiffre, ce qui donne environ 5 ou 6 p. 100.

M. Livingston: Mais non. Cela comprend l'argent à l'égard duquel aucun intérêt n'est payé, et il faut donc retrancher probablement le tiers de ce chiffre.

Une voix: Oui, il faut réduire ce chiffre d'environ 6 milliards de dollars.

Mme Fershko: Quelqu'un a lancé un autre chiffre tout à l'heure, disant que la moitié ou le tiers des gens sont piégés. S'il est vrai qu'environ 45 p. 100 de tous les détenteurs de cartes de crédit ont un solde impayé à un moment donné, ceux qui sont endettés de façon chronique - ce qui ne veut pas dire qu'ils sont en difficulté financière - ne représentent vraiment qu'environ 16 p. 100.

M. Murray: Peut-on nous brosser un portrait composite de ces gens-là, qui se retrouvent dans cette situation de l'endettement chronique, pour ainsi dire?

Mme Fershko: Beaucoup d'entre eux sont assez à l'aise.

.1715

M. Pearce: Les gens qui empruntent constamment sur leurs cartes de crédit appartiennent à toutes les catégories de Canadiens. La réalité est presque le contraire de ce que l'on pourrait penser intuitivement. On pourrait s'attendre à ce que les gens qui empruntent sur leurs cartes de crédit soient généralement des gens qui n'ont pas d'autre choix que d'emprunter sur leurs cartes de crédit. Cela n'est pas le cas, d'après les données de la Banque de Montréal.

M. Vessey: Je crois qu'il est important de tenir compte de deux autres aspects, quand on examine le niveau d'endettement total comparé du Canada et des États-Unis. Premièrement, au Canada, l'endettement hypothécaire est beaucoup plus élevé qu'aux États-Unis. Donc, si l'on prend ce chiffre de 92 p. 100 du revenu, il importe davantage d'examiner la capacité des consommateurs de rembourser leur dette. La plus grande partie de nos dettes, au Canada, est composée d'hypothèques, ce qui est tout à fait sain. C'est une différence importante par rapport aux États-Unis.

Je voudrais soulever un dernier argument, monsieur Murray. Nous sommes préoccupés par le taux de pertes, tout comme les députés le sont. Je fais une mise en garde, car c'est purement anecdotique, mais nous travaillons actuellement sur les chiffres. Quand j'examine mes affaires, je constate que la principale cause des problèmes que nous éprouvons en matière de mauvaises créances, ce n'est pas l'endettement total ou la situation de l'emploi, c'est plutôt les ruptures conjugales.

Nous voyons des familles - vos électeurs - qui gagnent en moyenne 55 000 $ à 65 000 $ par année et qui sont déchirées par une rupture conjugale. Ces gens-là doivent alors élever leurs familles et payer deux maisons, deux paiements hypothécaires, des dettes sur deux cartes de crédit, etc. Je pense que c'est à ce moment-là que vos électeurs se présentent à vos bureaux pour dire qu'ils ont des problèmes, parce que c'est alors que nous avons des problèmes.

Je n'ai pas encore les statistiques pour prouver cela, mais je peux vous garantir que si l'on examine le comportement, et si l'on tient compte du fait qu'il n'est plus socialement inacceptable de déclarer faillite, comme ce l'était il y a 10 ou 15 ans, si l'on tient compte de tout cela, de même que du chômage et des changements dans l'économie, c'est tout cela qui explique les problèmes que nous observons.

Le vice-président (M. Lastewka): Merci. Nous allons donner la parole à M. de Savoye pour trois minutes.

[Français]

M. de Savoye: Les banques ont-elles une conscience morale? Tous ces gadgets, ces air miles, ces cadeaux, ces points, tous ces bénéfices qui sont rattachés à la mise en marché de ces cartes à taux d'intérêt plus élevés sont essentiellement payés par ceux et celles qui, à la fin du mois, ne peuvent pas régler l'entier de leur note.

Je comprends que vous voulez placer vos produits, que vous êtes en compétition, mais est-ce qu'il y a des limites à la manière dont vous entendez vous accaparer de parts de marché alors que vous savez très bien que ce sont les moins nantis de la société qui sont en train de faire les frais de votre course aux profits?

[Traduction]

M. Protti: Je voudrais répondre à cela.

Les banques emploient 206 000 personnes au Canada. Il y a 8 000 succursales dans 1 800 localités. Elles constituent l'épine dorsale du système financier de notre pays.

Nous avons 680 000 clients qui sont de petites entreprises. Nous avons 62 milliards de dollars en prêts aux petites entreprises d'un bout à l'autre du pays. Dans la campagne de Centraide du Toronto Métropolitain, un cinquième de tout l'argent amassé vient des banques et des employés de banques. Cette proportion est la même partout au Canada.

Je ne pense pas que vous puissiez poser la question à savoir si nous avons une conscience morale ou une conscience sociale. Nous sommes en affaires depuis 100 ans. Notre but, c'est de faire fonctionner le pays. Nous avons été la pierre d'assise financière du Canada et nous continuerons de l'être pendant les 100 prochaines années.

Mme Fershko: Inutile de dire que je souscris à tout ce que mon collègue vient de dire. Il suffit de rencontrer certains de nos employés dans les localités pour savoir à quel point ils sont engagés envers leurs collectivités. Mais je voudrais revenir au groupe du siège social.

Nous tous ici présents, nous ne nous occupons pas seulement de cartes de crédit, mais aussi d'autres types de cartes. Je pense que la preuve la plus probante que nous nous intéressons au consommateur, c'est que nous avons établi le système des cartes de débit, parce que cela donne le choix pour le paiement, tout en offrant la même facilité que les cartes de crédit. Cela permet de payer rubis sur l'ongle, sans s'endetter le moindrement, et nous ne faisons pas là-dessus des profits aussi intéressants que sur le crédit, loin de là. Donc, si nous étions...

M. de Savoye: [Inaudible]

Le vice-président (M. Lastewka): Je vais permettre à M. Regan de poser une brève question.

M. Pearce: Cette question comportait un sous-entendu, à savoir que dans le cas de quelqu'un qui n'a jamais de solde impayé sur sa carte de crédit et qui ne paie donc jamais d'intérêts, nous perdons de l'argent sur ce compte. Cela n'est pas vrai. Nous pouvons quand même faire de l'argent sur ces comptes des gens qui n'empruntent pas de mois en mois. L'hypothèse sous-jacente de votre question, c'est que les emprunteurs subventionnent les gens qui obtiennent des points de grands voyageurs et qui peuvent ainsi voyager; cette hypothèse n'est pas fondée.

.1720

M. de Savoye: Je ne pensais pas que vous faisiez autant d'argent.

Le vice-président (M. Lastewka): Monsieur Regan.

M. Regan: Merci, monsieur le président.

Je suis surpris et heureux d'avoir la chance de poser une autre question.

Premièrement, on a dit que les taux devraient être liés au taux préférentiel du Canada et Mme Fershko a ajouté qu'aux États-Unis, les banques ont une foule d'autres moyens de tirer de l'argent de leurs consommateurs. Laissez-moi vous dire que beaucoup de consommateurs canadiens ont le sentiment qu'eux aussi ils se sont fait faire les poches quand on leur a imposé une foule de frais divers pour diverses formes de crédit ou de services.

Toutefois, il me semble que même s'il y a un système différent aux États-Unis, cela ne veut pas dire que nous ne pourrions pas au Canada faire en sorte que les taux des cartes de crédit soient liés au taux préférentiel et fluctuent à la hausse ou à la baisse en même temps que le taux préférentiel. Si vous avez besoin de plus de revenus, vous n'avez qu'à relever le taux d'un point ou d'un demi-point ou d'un quart de point pour toucher autant d'argent qu'aux États-Unis. Ce n'est pas une excuse pour ne pas lier ces taux au taux préférentiel et ne pas en informer les consommateurs.

Je vais donc vous poser une question. Pour les banques qui ont une carte de crédit à faible taux d'intérêt, combien de gens demandent une telle carte chaque année, combien de demandes sont approuvées et combien sont rejetées, en comparaison du nombre de demandes et des taux d'approbation et de refus pour les cartes à taux élevé? Pouvez-vous nous donner ce renseignement?

M. Livingston: Je peux vous donner une réponse générale. Pour ce qui est du taux d'approbation, il n'y a pas de différence. Nous refusons un peu plus de 50 p. 100 des demandes pour les cartes à taux élevé. Nous refusons un peu plus de 50 p. 100 des demandes de cartes à faible taux. Comme nous l'avons déjà dit, les titulaires de cartes sont un échantillon représentatif de l'ensemble des consommateurs: les gens qui veulent des points ou qui veulent une carte à faible taux sont représentatifs de l'ensemble des consommateurs, et on peut en dire autant des gens qui empruntent.

Quant au nombre de demandes, il serait plus difficile à obtenir, mais il y en a des centaines de milliers.

M. Regan: Pourriez-vous nous donner ces chiffres plus tard?

M. Pearce: Je n'ai pas les chiffres quant au taux de refus, mais je crois que c'est comme David l'a dit. C'est probablement semblable au taux applicable à nos cartes ordinaires et aux demandeurs de ces cartes.

En fait, la grande majorité des gens qui adoptent la carte à faible taux sont des clients existants qui passent de la carte ordinaire à la carte à faible taux. Par conséquent, les gens qui obtiennent des cartes à faible taux sont pour la plupart déjà clients de la Banque de Montréal, ayant été titulaires d'une carte à taux élevé ou à taux plus élevé. Par conséquent, le nombre de nouveaux demandeurs de cartes qui frappent à nos portes ne peut permettre d'établir le nombre de personnes qui sont titulaires d'une carte à faible taux.

Le vice-président (M. Lastewka): Merci beaucoup.

Je voudrais remercier les témoins pour la discussion, le débat et la séance d'information de cet après-midi.

Monsieur Protti, je vous suis reconnaissant de votre offre de faire un suivi des points que vous avez abordés cet après-midi.

Je vais maintenant lever la séance jusqu'à mercredi le 12 février. Nous nous réunirons alors à 15 h 30 pile, dans la salle 253-D de l'édifice du Centre.

Merci beaucoup.

La séance est levée.

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