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INDUSTRIE


L'industrie de haute technologie convertit les idées en produits et en services pour créer des emplois et de la richesse. Ces emplois créent indirectement du travail et de la richesse ailleurs dans l'économie. De nombreuses entreprises innovatrices prospères ainsi que des associations professionnelles ont pris part à nos audiences. Leurs points de vue sur les difficultés à trouver du financement et de la main-d'oeuvre spécialisée, ainsi qu'à établir des liens avec les sources de recherche et d'innovation, sont exposés en détail ailleurs dans ce rapport provisoire. Dans la présente section, nous présentons des témoignages sur l'incidence économique et la structure de cette partie de notre économie.

Statistique Canada a entrepris un certain nombre d'études utiles sur l'innovation et la technologie dans l'économie canadienne, qui s'appuient sur des données longitudinales et des enquêtes spéciales. Les résultats de ces études soulignent fortement les avantages que présente l'innovation.

L'innovation est la clé du succès [. . .]. Les entreprises qui réussissent le mieux (celles qui acquièrent une part du marché et qui sont rentables) placent non seulement beaucoup d'emphase sur leur capacité d'innovation mais elles consacrent également plus d'efforts aux activités dans ces domaines. Les entreprises qui réussissent le mieux sont plus susceptibles d'avoir un service de R-D et d'investir dans la R-D. . . L'adoption de la technologie est associée à un rendement supérieur. Il appert que les entreprises qui utilisent des technologies manufacturières perfectionnées ont acquis une part du marché et versent des salaires plus élevés que celles qui n'utilisent pas de telles technologies [. . .]. L'écart salarial entre les entreprises qui font appel à la technologie et celles qui ne le font pas augmente sans cesse.
John Baldwin, Statistique Canada

Le potentiel de croissance économique future dans le secteur de la haute technologie était très évident pour bon nombre de témoins. Ils avaient vu ce que leurs entreprises avaient accompli et savaient ce qu'elles pouvaient encore réaliser.

Aux États-Unis, après six ans d'existence, une entreprise qui opère dans le secteur des sciences de la vie va pouvoir en moyenne créer jusqu'à 282 emplois. C'est beaucoup d'emplois, parce que cela fait 28 000 emplois qui sont créés par 100 entreprises. C'est exactement ce qu'a fait Saskatoon dans son [regroupement] d'innovation; il y a je crois dans cette ville 100 entreprises qui se sont développées en moins de six ou sept ans. Je pense que l'on peut créer ainsi des [regroupements] d'excellence dans toutes les grandes villes du Canada.
En moyenne, une entreprise qui travaille dans le secteur de la technologie croît de 20 p. 100 année après année. C'est un rythme considérable et il nous faut prendre part à ce genre de réussite.
Dans notre secteur, et je crois que c'est caractéristique des entreprises technologiques, une entreprise en crée d'autres, il y a des retombées et l'on finit par avoir des pépinières à partir de quelques entreprises. Lorsque ces pépinières atteignent [une] masse critique, elles [prennent leur envol] et finissent par constituer de véritables secteurs industriels. Je ne vois pas pourquoi le Canada ne pourrait pas prendre part à cette croissance énorme. Prenez le cas du secteur des télécommunications à Ottawa-Carleton; je pense qu'il y a aujourd'hui quelque 750 entreprises qui procurent peut-être 36 000 emplois à valeur ajoutée. Je crois savoir qu'il y a 5 000 postes vacants. C'est une chose que nous aimerions voir dans le secteur des sciences de la vie au Canada. Naturellement, l'innovation entraînera la création d'un plus grand nombre de produits et, loin de retomber, la spirale tend constamment vers le haut.
Jom Aw, Kalyx Biosciences Inc.

En 1985, une étude du ministère du Commerce américain a déterminé qu'une entreprise de haute technologie - je pense que l'on peut résumer les choses ainsi - qui exporte sa production et emploie directement 1 000 personnes engendre 1 839 emplois supplémentaires ailleurs, tant dans le secteur de haute technologie que dans le secteur non technologique ou ailleurs dans l'économie. Au total, vous obtenez donc 2 839 emplois.
Ozzie Silverman, ministère de l'Industrie

Le secteur de la haute technologie de l'économie canadienne est caractérisé par un petit nombre de grandes entreprises et un grand nombre de petites et moyennes entreprises (PME), qui appartiennent souvent à des intérêts étrangers. À titre d'exemple, le secteur de la technologie de l'informatique et des télécommunications (TI&T) est dominé par quelques grandes entreprises, telles NORTEL et IBM Canada. Cependant, dans le secteur des logiciels et des services, ce sont de très petites entreprises, ne comptant en moyenne que six employés, qui tiennent le haut du pavé. En moyenne, elles consacrent annuellement moins de 25 000 $ à la R-D.

Premièrement, au niveau macro, la force de notre secteur de la [technologie de l'information et des télécommunications], en ce qui concerne surtout la balance commerciale et la R-D, est fonction du sort d'une poignée de gros joueurs sur leurs marchés respectifs. En dehors du maintien d'un cadre national qui ne défavorisera pas ces gros intervenants, l'important, pour eux, se jouera dans les marchés internationaux, où les accords commerciaux et la déréglementation des régimes de télécommunications à l'échelle mondiale sont des facteurs critiques.
La deuxième conclusion est qu'en mettant de côté ces très gros joueurs, la santé future de notre secteur canadien de la TI&T est très dépendante de notre capacité de favoriser la création et le développement de petites et moyennes entreprises prospères, surtout dans les secteurs d'exportation tels ceux des logiciels et du matériel. Ces sociétés auront peut-être davantage besoin de soutien sous forme, premièrement, d'un cadre qui favorise la commercialisation et augmente la capacité réceptrice de l'industrie; deuxièmement, d'incitations ciblant la R-D; troisièmement, de fourniture de renseignements sur les marchés internationaux qui soient pertinents pour les petites sociétés; et, quatrièmement, de processus d'appui à l'élaboration de partenariats incluant des sociétés canadiennes, y compris des partenariats internationaux.
En bref, le secteur canadien de la TI&T est essentiellement bimodal, et il nous faut reconnaître l'importante contribution des quelques très grosses entreprises et des nombreuses entreprises relativement petites à la croissance économique du pays.
Andrew K. Bjerring, CANARIE Inc.

Les PME jouent un rôle essentiel dans la création d'emplois; cependant, leur petite taille s'accompagne d'un manque de compétences et de ressources nécessaires à l'expansion. Contrairement aux grandes sociétés, c'est le manque de gestionnaires compétents et spécialisés qui leur fait défaut. Le besoin de commercialiser leurs produits sur le marché international exerce des pressions sur les ressources et sur la gestion. Même les crédits d'impôt pour la R-D s'avèrent moins utiles pour elles. Ces crédits n'améliorent pas immédiatement la trésorerie, à moins qu'il n'existe une autre source de profits.

Par compagnies émergentes, nous voulons dire ceci. Il s'agit de compagnies intervenant sur les nouveaux marchés mondiaux, auprès d'une clientèle limitée, et offrant à celle-ci des produits qui ont quelque chose de spécial. Disons, au plan interne, que ces compagnies ne possèdent que des stratégies commerciales incomplètes, si tant est qu'elles en aient une. Leur direction manque d'expérience, elle a besoin d'être étoffée, ce qui est également vrai de leurs systèmes d'information et de leurs systèmes de comptabilité.
Roger Jenkins, Groupe Aérocapital-Logisoft-Infosoft

[T]undra consacre à l'heure actuelle 20 p. 100 de ses revenus à la R-D pour sortir de nouveaux produits. Nous sommes à la limite de nos possibilités pour ce qui est des dépenses consacrées à la R-D; et pourtant, le soutien financier consacré à la R-D par le gouvernement diminue parallèlement. Notre industrie a besoin d'un plus grand financement de la R-D.
En second lieu, en raison des pressions financières qui s'exercent dans le secteur universitaire, les universités diminuent en fait les crédits qu'elles consacrent à l'ingénierie. Elles réduisent le nombre de leurs professeurs et appliquent des compressions budgétaires dans les services qu'elles fournissent. Elles le font au moment même où l'on manque terriblement d'ingénieurs, non seulement dans le secteur des semi-conducteurs mais dans l'ensemble des secteurs industriels. C'est une situation très pernicieuse.
Troisièmement, nous n'avons pour le moment aucun investissement étranger dans le secteur des semi-conducteurs au Canada - aucun. C'est une situation qu'il nous faut changer si nous voulons atteindre la masse critique dans notre pays.
Enfin, nous sommes incapables pour l'instant d'attirer au Canada des talents en provenance des États-Unis en raison de notre fiscalité.
Adam Chowaniec, Tundra Semiconductors

Faisant référence, pour susciter la réflexion, au système d'associations stratégiques qui connaît beaucoup de succès au Japon, Newbridge Networks a décrit le système de sociétés affiliées, qui existe dans ce pays, et qui semble combiner ce que les PME et grandes entreprises ont de mieux à offrir. Les sociétés affiliées peuvent réagir vite et innover tout en ayant accès à un savoir-faire considérable en gestion et à des débouchés que seule une grande entreprise peut offrir.

Une entreprise qui fait de l'innovation se heurte à deux grands obstacles lorsqu'elle veut passer du concept à l'exécution. Je dirais que le premier d'entre eux est celui des tracasseries administratives, qui ralentissent l'entrepreneur ou le novateur qui veut fabriquer son produit. Ce que va dire Newbridge à la société qui lui est affiliée, c'est de ne pas s'inquiéter à propos des finances, de ses ressources humaines, de ses systèmes d'information, de son assurance-maladie; que l'on s'occupera de tout cela. Nous leur disons de faire porter leurs efforts sur la fabrication du produit.
En second lieu, ce qui gêne en général une société canadienne qui fait de l'innovation, c'est qu'étant axée par définition sur un travail spécialisé, il est très difficile et très onéreux pour une petite entreprise de distribuer très rapidement son produit dans le monde entier. Ce que dit alors Newbridge aux sociétés qui lui sont affiliées, c'est que ses canaux de distribution mondiaux sont à leur disposition que si elles veulent utiliser ses bureaux parisiens, qu'elles le fassent comme si c'étaient les leurs; que si elles veulent être présentées à un client chinois, nous sommes tout disposés à le faire.
Nous faisons donc deux choses qui reviennent essentiellement à raccourcir le cycle qui va de la conception du produit à l'exportation. La première consiste à dire au novateur de ne pas s'inquiéter des formalités administratives et de se concentrer sur son produit. La seconde consiste à l'aider à vendre son produit dans le monde entier dès qu'il est prêt, ce qui est un grand avantage sur la concurrence pour une petite entreprise.
Chris Albinson, Newbridge

Je crois qu'il faut aussi, en parlant d'affiliation, citer notre relation avec l'entreprise d'à côté. Nous pouvons nous tourner vers ceux qui ont bâti Newbridge, des gens qui ont oeuvré ensemble, si on a besoin de technologies, des équipes qui ont créé ces technologies, si c'est une question de capitaux, d'accès aux méthodes utilisées pour les réunir. Il y a une perspective mondiale et l'idée que le succès se mesure à l'aune de la croissance et des réussites auxquelles Newbridge est parvenu.
Bruce Linton, CrossKeys Systems Corporation

Le Canada compte peu d'entreprises de la taille de Newbridge; cependant, lorsque des entreprises s'établissent à proximité les unes des autres, elles peuvent facilement former un réseau informel et créer une demande suffisante pour rentabiliser les services spécialisés dont elles ont besoin.

Je crois qu'il est important de focaliser notre action, mais surtout de favoriser les [regroupements]. Regardez ce qui s'est passé dans le cas des autres [regroupements] qui ont réussi. Revenez même sur les vieilles technologies, comme dans le secteur de l'automobile où le gouvernement a joué un rôle très important en signant le pacte de l'automobile en 1967, et en créant ainsi, dans la région de Niagara, l'un des plus importants moteurs économiques que nous ayons eus au Canada. Il a fallu beaucoup de temps et d'efforts pour y parvenir. Eh bien, il nous faudra déployer le même genre d'efforts dans le cas [du regroupement] de connaissances.
La Silicon Valley a été, en grande partie, créée par le gouvernement américain. Si vous regardez ce qui s'est passé dans la plupart des [regroupements] dans le monde, vous constaterez que les gouvernements ont participé à la mobilisation des ressources, publiques et privées, dans le dessein très net de créer un [regroupement] de classe internationale dans tel ou tel domaine, pour parvenir à une suprématie commerciale et pour se doter d'une solide capacité d'exportation dans ces secteurs [. . .] et c'est précisément ce qui s'est fait.
On commence à assister à quelque chose du genre à Ottawa, dans le secteur des technologies de l'information, le capital de risque étant devenu intelligent. Les entreprises commencent à créer des retombées, mais nous n'en sommes certainement pas encore à la Silicon Valley. Ici, on ne trouve pas encore de cabinets d'avocats se faisant rémunérer [au moyen d'une participation sur les avoirs]. Pour moi, c'est cela qui détermine si nous avons réussi ou pas.
Dans la Silicon Valley, les cabinets d'avocats, les cabinets de comptables, les distributeurs et les fabricants sont tous rémunérés [selon la valeur de réalisation]. Cela, nous ne l'avons pas encore. Nous n'avons pas cette mentalité. Nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir pour rattraper les Américains. Mais nous pourrons réussir si nous arrivons à focaliser nos efforts pour créer deux ou trois [regroupements] et faire collaborer des ressources du secteur public et du secteur privé à la réalisation d'un objectif commun. Mais pour cela, nous devrons pouvoir compter sur ce genre d'action dirigée.
Chris Albinson, Newbridge

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