FINANCEMENT
Le financement constitue l'élément vital de toute entreprise. Au cours de nos travaux, nous avons entendu parler des problèmes financiers des entreprises innovatrices, ainsi que de certaines des mesures constructives que prennent les secteurs public et privé pour améliorer les marchés financiers au Canada. L'apport de nouvelles idées sur le marché pose des problèmes plus difficiles pour les institutions financières que le financement d'une entreprise existante. La nouveauté du produit signifie que l'institution financière doit composer avec plus de risques et d'incertitude.
Il est très difficile de convaincre un investisseur potentiel de risquer de l'argent dans une petite entreprise qui démarre dans le secteur de la technologie alors que cet investisseur peut obtenir un rendement significatif en plaçant son argent dans des actions ordinaires des banques, par exemple, ainsi que dans un certain nombre d'autres [. . . ].
Susan Smith, de la Banque Royale du Canada, nous a dit que le «Canada est inondé de capitaux», mais qu'il y a des lacunes du fait que nos institutions financières craignent de financer des entreprises à certains stades de leur croissance.
[I]l y a des milliards de dollars de capitaux non investis dans notre pays. D'un autre côté, je dirais par ailleurs qu'il y a au Canada des sciences et des techniques commercialisables de qualité supérieure qui ne réussissent pas à bénéficier d'un financement. Le déficit se trouve donc au niveau du financement des projets qui démarrent. La majeure partie de ce financement [. . .] bénéficie aux entreprises déjà bien installées où les risques sont plus faibles, les coûts dus à la responsabilité pas plus élevés, et qui offrent suffisamment de possibilités d'investissement dans notre pays.
Le véritable déficit au Canada se situe au niveau de ce que je qualifierais de capacité à créer des entreprises [. . .] et à développer des entreprises en mesure d'attirer les capitaux disponibles au tout début de leur exploitation. Je suis persuadée qu'il nous faut pouvoir nous doter de cette capacité si nous ne voulons pas risquer de perdre notre capacité scientifique et technique en faveur de pays qui savent la mettre à profit et la commercialiser et qui nous revendront ensuite les produits à valeur ajoutée qui en résultent.
Une société à capital de risque qui se spécialise dans les entreprises émergentes de haute technologie a souligné ce qui suit :
[U]ne très faible partie de ces capitaux a été investie dans les compagnies émergentes du secteur des hautes technologies. Nous tentons constamment de trouver des coinvestisseurs acceptant de partager les risques de ces types d'investissements. Croyez-moi, cela n'a rien d'évident [. . .] qui voudrait, en effet, prendre le risque d'investir de grosses sommes dans ce genre d'entreprises?
On doutait que les institutions financières puissent influer sur ce problème, rendant ainsi nécessaires des allégements fiscaux additionnels.
[D]es banques ont récemment annoncé des projets d'investissement dans ce secteur des entreprises qui démarrent mais, à mon avis, il est encore trop tôt pour en connaître les répercussions.
Le gouvernement pourrait aussi envisager la mise en place d'un taux préférentiel de taxation des gains en capitaux dans ce genre d'investissement. Il est clair qu'un programme de ce genre devrait s'accompagner de conditions très restrictives pour que l'on puisse s'assurer que les coûts ne deviennent pas prohibitifs. Ces coûts devraient être reportés dans une certaine mesure étant donné que [la période de prérentabilité de ce genre d'investisement peut nécessiter] cinq à dix ans .
La Banque de développement du Canada a décrit son nouveau programme qui vise à combler des insuffisances et des lacunes en matière de financement offert par le secteur privé. Cette société d'État offre de nouveaux produits de financement aux PME de haute technologie.
[I]l y a un déficit pour ce qui est de la façon dont opèrent les marchés pour mettre à la disposition des entreprises les investissements disponibles. [. . .] [L]orsqu'une entreprise a un produit bien établi, des marchés bien établis, des techniques connues et des éléments d'actif traditionnels, elle a tendance à trouver ses capitaux et son financement en s'adressant à des sources classiques.
Les banques à charte ont de très solides réseaux lorsqu'il s'agit d'accorder des prêts à terme et des crédits d'exploitation. De manière générale, plus l'entreprise domine la technique qu'elle emploie, plus il lui est facile de trouver un financement.
À partir du moment où une entreprise met au point de nouvelles solutions, a des marchés non établis et des éléments d'actif non conventionnels qui entrent dans l'équation, elle a tendance à se détourner des sources de prêts à terme classiques pour s'adresser à des entreprises [telles que Capital Alliance Ventures Inc.] qui financent des projets à plus haut risque.
Les sociétés émergentes se trouvent donc entre les deux. D'une part, il y a les sources classiques de capitaux. D'autre part, les financements à plus haut risque. Entre les deux, il y a un grand nombre d'entreprises qui ont beaucoup de succès mais qui, pour une raison ou pour une autre, que ce soit leur stade de développement, le type d'actif qu'elles possèdent, ou éventuellement le montant d'argent dont elles ont besoin, n'ont pas les pieds fermement ancrés dans l'un des deux camps. Notre banque s'efforce de mettre au point toute une gamme de financement pour le développement qui combine à la fois les caractéristiques des obligations et des prises de participation de façon à s'adapter à la fois aux besoins des petites et des moyennes entreprises.
Les efforts visant à combler ces insuffisances de financement ont mené à la création de fonds de capital de risque. Certains fonds visent surtout les secteurs des sciences et de la technologie. D'ailleurs, un fonds de ce genre a été créé pour exploiter les travaux de recherche de calibre international effectués par un éminent chercheur canadien du conseil de recherches médicales du Canada (CRM).
Entre 1994 et 1995, le montant de capital-risque investi dans les sciences de la vie a doublé et il me semble qu'il soit appelé à doubler à nouveau.
Voilà le point essentiel sur lequel presque tout le monde ici a insisté. Nous avons manqué, au Canada, de cette source d'investissements permettant normalement aux découvertes d'être transformées en produits susceptibles d'être commercialisés. [Je considère déterminantes] l'instauration de partenariats dans le cadre du CRM et les incitations fiscales au profit du Fonds de découvertes médicales canadiennes [. . .].
Il pourrait exister des raisons institutionnelles et culturelles plus profondes qui expliquent pourquoi le financement des entreprises de haute technologie s'avère difficile au Canada.
Nos grands entrepreneurs par contre, ne reçoivent pas autant d'attention que leurs homologues américains. Cette relative obscurité entraîne une double conséquence.
D'abord, le rendement des actions canadiennes dans le domaine de la technologie nous montre que le public canadien connaît mal la situation. Il faut faire quelque chose pour assurer une meilleure croissance du marché canadien des valeurs mobilières. Nous ne pouvons plus nous permettre de voir nos entreprises-phare être obligées de se faire coter au NASDAQ pour que l'actionnaire reconnaisse leur valeur.
Deuxièmement, de manière générale, les fonds de pension canadiens n'investissent pas autant que leurs homologues américains dans le secteur des hautes technologies. Il fut un temps où le gestionnaire d'un fonds de pension n'avait, hormis des investissements directs, presque aucun moyen d'investir dans le secteur, les investissements directs ne représentant pas une solution pratique pour des fonds d'une telle importance. Mais la situation a évolué, et, selon les statistiques disponibles, les sociétés canadiennes de capital-risque ont évolué et les gestionnaires de fonds de pension sont davantage en mesure d'investir dans le secteur des hautes technologies.
Je tiens, pour conclure, à recommander que les sociétés de capital-risque, le gouvernement et les gestionnaires de fonds de pension se concertent et fassent en sorte que les capitaux disponibles puissent être utilisés de manière efficace pour favoriser la création et le développement des compagnies canadiennes émergentes dans le secteur des hautes technologies.
L'industrie canadienne de la haute technologie accorde une grande importance aux crédits d'impôt à la R-D. Cependant, plus d'un témoin s'est montré inquiet des procédures administratives employées par Revenu Canada à cet égard.
Il faut [. . .] que le gouvernement continue à offrir un crédit d'impôt à l'investissement [CII] de recherche scientifique et de développement expérimental. Ces crédits d'impôt continuent à jouer un rôle très important pour toutes les entreprises fondées sur la connaissance. C'est particulièrement vrai pour les entreprises situées aux deux extrémités de l'échelle du développement, les jeunes entreprises canadiennes du secteur de la technologie, d'un côté, et les multinationales, de l'autre, qui font de la recherche et du développement dans un certain nombre de pays.
La seule ombre éventuelle au tableau des [CII], c'est le fait que Revenu Canada a tendance à rejeter de plus en plus les demandes. Cela se fait par le biais de mesures administratives et il s'ensuit que des activités [. . .] auparavant [éligible au] crédit d'impôt à l'investissement ne peuvent plus [. . .] en bénéficier. On est donc de moins en moins certain de pouvoir encaisser les CII, ce qui en diminue donc la valeur pour les entreprises.
Plusieurs témoins ont indiqué que le traitement fiscal en matière de R-D est plus avantageux au Canada que celui qui prévaut dans d'autres pays.
Le traitement fiscal accordé par le Canada à la R-D est très favorable par rapport aux normes internationales. L'étude nous démontre que les mesures d'incitation fiscale prises par le gouvernement fédéral du Canada en association avec les deux provinces examinées, le Québec et l'Ontario, mettent notre pays au deuxième rang au sein de l'OCDE.