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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 21 octobre 1996

.1540

[Traduction]

La présidente: Bienvenue.

Le premier point à l'ordre du jour est le sixième rapport du Sous-comité du programme et de la procédure. Vous avez en main un exemplaire de ce rapport qui, je crois, a été distribué il y a deux semaines.

M. Hanger et M. Ramsay ont tous deux des motions. Il nous faudra aussi discuter de la composition des deux sous-comités.

Tout d'abord, examinons les motions de M. Hanger. La première demande que le Comité permanent de la justice et des affaires juridiques charge un sous-comité de faire une enquête concernant la Cour fédérale. Voulez-vous prendre la parole au sujet de la motion, monsieur Hanger?

M. Hanger (Calgary-Nord-Est): Oui. Allez-vous lire la motion, madame la présidente?

La présidente: Je pense que tout le monde en a un exemplaire. C'est votre motion.

M. Hanger: Madame la présidente, je souhaite effectivement prendre la parole au sujet de la première motion sur ma liste, qui porte sur Ted Thompson et le juge Isaac. Premièrement, la séparation de la magistrature et des tribunaux des organes politiques du gouvernement est un principe fondamental dans un système juridique impartial et équitable, et les Canadiens n'acceptent tout simplement pas l'affirmation du ministre de la Justice selon laquelle son troisième collaborateur, maintenant ex-collaborateur, Ted Thompson, a agi à son insu ou sans sa permission.

Le rapport de Charles Dubin, ami politique du ministre de la Justice chargé par lui d'examiner le bien-fondé des échanges entre les fonctionnaires du ministère de la Justice et la magistrature, n'empêche pas que le ministre de la Justice doive assumer sa responsabilité dans ce que d'aucuns ont qualifié de cas flagrant d'ingérence judiciaire, ce qui est précisément la raison pour laquelle le juge Jerome a décidé de ne pas entendre les causes.

Enfin, madame la présidente, seule une enquête indépendante menée par un sous-comité de notre comité, doté de vastes pouvoirs de recherche, pourra déterminer la vérité dans cette affaire. Autrement dit, cette instance a le pouvoir d'établir des lignes directrices, de convoquer des témoins et de les interroger sous serment. À cet égard, madame la présidente, le Parlement serait considéré comme le plus haut tribunal du pays. C'est d'ailleurs précisément la raison pour laquelle les citoyens élisent des parlementaires et pourquoi ce sont des parlementaires, par l'entremise du comité dont je propose la constitution, qui détiendraient l'autorité voulue pour interroger des membres de la magistrature de notre pays.

Mme Clancy (Halifax): Le vote.

La présidente: Y a-t-il d'autres interventions?

M. Kirkby (Prince-Albert - Churchill River): Premièrement, je pense que cette question a déjà été examinée en profondeur. Le ministre de la Justice a demandé à l'honorable Charles Dubin de faire enquête sur les questions entourant le rôle du ministère de la Justice lui-même. Ce dernier a mené une enquête impartiale, objective et fouillée de tous les faits, et il est arrivé à ces conclusions en se fondant sur une divulgation pleine et entière des faits. L'honorable Charles Dubin est un homme dont l'intégrité et la compétence ne font aucun doute. D'ailleurs, les recommandations qu'il a faites ont été suivies.

.1545

Quant à la conduite du juge en chef, elle a été pleinement examinée par le conseil de la magistrature. Ces faits et ces rapports ont été communiqués intégralement à la population. Le ministre et le ministère ont fait en sorte que cette affaire fasse l'objet d'une enquête sérieuse. Nous avons reçu le rapport, de sorte qu'on n'a pas besoin d'autres enquêtes.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Y a-t-il d'autres intervenants? Monsieur Ramsay.

M. Ramsay (Crowfoot): En dépit du fait que le juge Dubin ait fait enquête sur cette affaire et rendu sa décision et que le conseil de la magistrature ait lui aussi examiné la question et rendu sa décision, cela n'a pas apaisé les inquiétudes exprimées par madame la juge Barbara Reed. Permettez-moi de citer un passage du Toronto Star, en date du 1er octobre 1996, où elle dit:

Et elle ajoute:

Voilà la teneur d'une lettre que cette juge en particulier a cru bon d'écrire au ministre de la Justice pour exprimer ses craintes concernant l'indépendance de la magistrature.

Je suis d'avis que ni l'enquête Dubin ni les conclusions des recommandations du Conseil de la magistrature n'ont réussi à atténuer ces craintes.

Cela étant le cas, j'appuie la motion présentée par mon collègue Art Hanger. Manifestement, on n'a pas réussi à apaiser les inquiétudes entourant la possibilité d'atteinte à l'indépendance de la magistrature à la suite d'une ingérence gouvernementale ou autre.

La présidente: Merci.

M. Assadourian est le prochain intervenant, et ensuite, nous passerons au vote.

M. Assadourian (Don Valley-Nord): Après avoir entendu les deux versions de l'affaire, je suis entièrement satisfait de l'explication fournie par mon collègue, le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice. Je demande que nous passions au vote sur la motion afin d'en finir.

La présidente: D'accord. Tous ceux qui sont en faveur de la motion?

M. Ramsay: Pouvons-nous procéder par vote par appel nominal, madame la présidente?

La motion est rejetée [Voir Procès-verbaux]

La présidente: La motion est rejetée. La prochaine motion est celle de M. Hanger concernant...

M. Hanger: Voudriez-vous lire la motion, s'il vous plaît, madame la présidente?

La présidente: N'en avez-vous pas un exemplaire, monsieur Hanger?

M. Hanger: Oui.

La présidente: C'est votre motion; lisez-la vous-même.

M. Hanger: Merci.

La présidente: Je ne la lis pas.

M. Hanger: Je me ferai un plaisir de la lire.

Je propose que le Comité permanent de la justice et des questions juridiques charge un sous-comité, pour compte rendu au Parlement, d'enquêter sur le rôle de la sénatrice Thérèse Lavoie-Roux dans une affaire récemment dévoilée de présumée fraude de l'assurance-chômage. Le sous-comité aurait pour but d'utiliser ses pouvoirs d'enquête afin d'établir (i) pourquoi, étant donné les allégations des enquêteurs de la GRC voulant qu'Élizabeth Roux ait obtenu de façon mensongère environ 5 500 $ en prestations d'assurance-chômage, la fille de la sénatrice (Roux) n'a pas été accusée de fraude d'assurance-chômage et (ii) pourquoi la sénatrice Lavoie-Roux n'a pas fait l'objet d'accusations pour sa participation dans ce que les enquêteurs de la GRC ont qualifié de fraude évidente à l'égard de l'assurance-chômage.

.1550

La présidente: Quelqu'un veut-il intervenir?

M. Hanger: Personne ne saurait contester que les fonctionnaires de deux organismes fédéraux distincts, la GRC et Développement des ressources humaines Canada, ont conclu qu'Élizabeth Roux devrait être accusée de fraude. D'après la GRC, et je cite, Élizabeth Roux «par ruse, mensonges ou autres méthodes trompeuses, a escroqué le gouvernement du Canada... d'une somme de plus de 5 000 $.»

Treize employés de Développement des ressources humaines Canada ont dit:

Les mêmes employés concluent en ces termes:

Madame le président, j'ai un exemplaire de cette lettre, que je voudrais déposer auprès du comité.

La présidente: Je vous signale que vous m'avez appelée madame le président cinq fois environ. Je ne suis pas un homme et j'aimerais que vous m'appeliez madame la présidente.

M. Hanger: Je m'excuse, madame la présidente. Dorénavant, je vous appellerai madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup.

M. Hanger: Pour les enquêteurs de la GRC et les employés subalternes qui administrent les prestations d'assurance-chômage, il va de soi qu'Élizabeth Roux aurait dû être accusée de fraude. Un grand nombre estiment que sa mère, la sénatrice Lavoie-Roux, aurait aussi dû être accusée de complicité. L'excuse lamentable qu'ont invoquée les avocats du ministère de la Justice pour ne pas engager de poursuites a indigné les Canadiens. Ou la règle de droit s'applique à tous les citoyens, ou elle ne s'applique pas. En l'occurrence, elle ne semble pas s'appliquer.

Le comité a le devoir d'expliquer en détail aux Canadiens pourquoi aucune accusation de fraude n'a été portée contre Élisabeth Roux et sa mère, la sénatrice Lavoie-Roux. Voilà les arguments qui fondent ma deuxième motion.

La présidente: Monsieur Telegdi, voulez-vous répondre?

M. Telegdi (Waterloo): Madame la présidente, je veux faire un commentaire.

Monsieur Hanger, si vous voulez qu'on accorde quelque crédibilité que ce soit à ces allégations calomnieuses, vous devriez avoir le courage de les faire en public, à l'extérieur du comité, là où on pourrait vous demander de rendre des comptes. J'aurais bien aimé que vous alliez à Singapour et que vous y restiez car je trouve que vos commentaires discréditent notre système de justice.

Vous laissez entendre une chose pratiquement impensable. Vous nous dites qu'un procureur de la Couronne dans un cas comme celui-ci se serait abstenu de porter des accusations pour des motifs d'ingérence politique. Vos preuves insuffisantes et le fait que vous n'avez communiqué au comité aucun fait justificatif avant la présente séance suffisent à me convaincre que vous ne recherchez que le sensationnalisme. Je trouve votre démarche tout à fait répréhensible étant donné que ces manoeuvres portent atteinte à notre système de justice.

La présidente: Monsieur Bellehumeur.

[Français]

M. Bellehumeur (Berthier - Montcalm): Je suis d'accord qu'il ne faut pas en arriver à des conclusions précipitées dans un dossier semblable, mais je ne suis pas d'accord sur la dernière intervention. Les règles qui régissent l'assurance-chômage sont extrêmement restrictives et elles le deviennent de plus en plus, surtout à la suite des amendements apportés à la Loi sur l'assurance-chômage ces derniers temps.

Un grand principe veut que nul ne soit censé ignorer la loi, à plus forte raison un sénateur. On n'a pas besoin de beaucoup de preuves pour confirmer que des cartes d'assurance-chômage ont été signées par une sénatrice alors que sa fille était à l'extérieur du Canada. Ce sont là les faits. Tout le monde les a lus dans les journaux et même les principales intéressées ne les ont pas niés. Ont-elles agi de bonne foi ou pas? Ce n'est pas la question que nous devons examiner. Nous devons plutôt voir comment les choses se sont passées.

.1555

Est-ce que les fonctionnaires, la GRC et tout ce beau monde ont bien fait leur travail? Est-ce que les dossiers étaient complets? Si oui, pourquoi est-ce qu'on intente des poursuites dans d'autres cas, mais pas dans ce cas précis? Fut-elle traitée équitablement? Ce sont les questions que nous devons examiner. Nous ne traitons pas du dossier de monsieur et madame Tout-le-monde. Qu'on le veuille ou non, lorsqu'on est en politique, surtout avec la réputation qu'ont les hommes et les femmes politiques par les temps qui courent, il faut être encore plus scrupuleux face aux agissements que l'on pose.

Nous examinons le cas d'un sénateur. Cela aurait pu être celui d'un député, d'un maire ou de toute autre personne politique. Je pense qu'il faut être extrêmement prudent et examiner de façon scrupuleuse ce qui s'est fait, d'autant plus que l'actualité semble vouloir donner raison à ceux qui demandent une petite enquête.

De plus, les manchettes des journaux affirment que le ministère s'apprête à faire des réclamations pour des causes pendantes qui remontent à trois ans. J'estime que des personnes qui ont pris des vacances pendant qu'elles touchaient des prestations d'assurance-chômage ont commis une fraude beaucoup moins grave. Ces prestataires n'étaient pas tenus de signer une carte durant une période de deux semaines, alors que dans l'autre cas, qui s'échelonne sur une longue période de temps, des cartes étaient remplies et envoyées au ministère tous les 15 jours. Je pense que c'est une fraude. Si fraude il y a, c'est ce que nous devons examiner. Je ne veux pas porter de conclusions hâtives, mais je crois que ce montage visant à soutirer des sous du ministère alors que la personne, aux termes de la loi, n'y avait pas droit, est plus grave.

Je ne veux pas en venir à des conclusions comme l'ont fait les députés du Parti réformiste et du Parti libéral. Ce sujet mérite réflexion; il est suffisamment sérieux compte tenu des personnes impliquées dans cette affaire. Examinons-le et tirons une conclusion. Mme Lavoie-Roux n'a peut-être rien à se reprocher. Le comité aura au moins servi à faire la lumière sur ça.

Si, au contraire, il y a eu des interventions politiques, notre système permettra-t-il que cela se reproduise dans le cadre d'une loi aussi cruciale que la Loi sur l'assurance-emploi, loi que nous rendons de plus en plus restrictive? Cette loi fera-t-elle en sorte qu'à la suite d'interventions politiques, des gens vont pouvoir en bénéficier tandis que d'autres, qui n'auront pas recours à de telles interventions politiques, n'en bénéficieront pas? Le moment est opportun pour nous pencher sur cette question. Il y a un cas qui frappe, un cas que relève l'actualité et que tout le monde connaît, mais dont nous ne détenons pas tous les éléments. Je n'ai pas en main copie du rapport de l'enquête menée par la GRC ni ses conclusions. J'aimerais les obtenir et savoir ce qui s'est réellement passé dans ce dossier.

[Traduction]

La présidente: Merci, monsieur Bellehumeur. Monsieur Kirkby.

M. Kirkby: Merci, madame la présidente.

Au sujet de la motion, je tiens à signaler, que comme dans le cas de la motion précédente, l'affaire a fait l'objet d'un examen détaillé. Il existe, à l'intention des procureurs fédéraux, des lignes directrices concernant les poursuites judiciaires. Ces lignes directrices sont publiques et accessibles à tous. En l'occurrence, les procureurs ont respecté ces lignes directrices pour décider s'il y avait lieu ou non d'engager des poursuites. En outre, le procureur chargé de l'affaire a consulté ses supérieurs pour déterminer s'il y avait lieu d'engager des poursuites. Ces derniers en sont venus à la même conclusion, soit que des poursuites n'étaient pas justifiées.

Les responsables des poursuites ont examiné cette question sérieusement. Et, en rendant leur décision, ils ont respecté la procédure d'usage.

Il n'est pas exceptionnel, en diverses circonstances, que les procureurs ne soient pas d'accord avec les recommandations des services de police, qu'il s'agisse de corps policiers municipaux ou de la GRC un peu partout au pays. Ce sont des choses qui arrivent quotidiennement.

.1600

J'ajouterai qu'il s'agit là d'un cas très précis. Certes, notre comité est habilité à examiner n'importe quel cas en particulier, mais j'estime qu'il faut être prudent quand il s'agit d'examiner des cas particuliers. Des décisions sont rendues dans des milliers de cas d'un bout à l'autre du pays. Notre comité a déjà un menu législatif très lourd et ce serait le surcharger de travail que de lui demander de s'intéresser aux détails de tous les cas possibles.

Compte tenu du menu législatif de notre comité, l'examen efficace et sérieux des mesures législatives dont nous sommes saisis va certainement nous prendre tout notre temps dans un avenir prévisible. De toute façon, cette question a déjà été examinée. En outre, il faut nous soucier de notre échéancier.

La présidente: Souhaitez-vous un vote par appel nominal, monsieur Ramsay?

M. Ramsay: Je veux simplement prendre la parole au sujet de la motion.

La présidente: Allez-y.

M. Ramsay: Merci, madame la présidente.

Cette affaire est arrivée pendant que la Chambre ne siégeait pas. Madame la présidente, j'ai reçu une copie d'une lettre que vous a fait parvenir Mme Venne, ancienne porte-parole principale du Bloc en matière de justice, qui exprimait ses préoccupations et présentait une demande pratiquement identique à celle qui figure dans ma motion. J'ai aussi reçu de vous une lettre me faisant savoir que nous examinerions cette question et qu'il y aurait sans doute une téléconférence à la fin de juillet ou d'août, je crois. J'ai attendu en vain cette téléconférence. Ce n'est donc pas uniquement mon parti qui se préoccupe de cette affaire, mais aussi Mme Venne, comme en témoigne sa lettre. Je suis sûr que cette dernière est consignée au compte rendu du comité. J'espère que votre lettre s'y trouve aussi, madame la présidente. En fait, j'en suis sûr.

Il ne s'agit pas de savoir si notre comité a le temps d'examiner cela. Là n'est pas la question. L'important, ce sont les motifs pour lesquels la GRC et les autres enquêteurs ont recommandé que des accusations soient portées. S'agissait-il de motifs raisonnables? Pour quelles raisons le premier procureur de la couronne a-t-il rejeté ces recommandations? Cette décision était-elle fondée sur les faits et était-elle justifiée? Si tel était le cas, pourquoi ne s'est-il pas fondé sur sa propre décision? Pourquoi a-t-il cru bon de demander à ses supérieurs s'il n'y avait pas des problèmes dans ce cas particulier?

Manifestement, cela suscite des inquiétudes de ce côté-ci du comité. D'ailleurs, les mêmes inquiétudes ont été exprimées par certains de mes commettants lorsque l'affaire a été mise au jour. Je ne pense pas que l'on devrait prétexter le manque de temps disponible pour éviter d'examiner cette affaire. Je reproche à mon honorable collègue d'en face son attitude et je rejette ses commentaires à ce sujet. Je ne pense pas que nous devions détourner les yeux de cette affaire.

Madame la présidente, je réclame un vote par appel nominal. C'est ainsi que nous verrons qui est prêt à exiger que l'on examine cette question pour faire en sorte que justice soit rendue et qui n'est pas prêt à le faire.

C'est tout ce que j'ai à dire, madame la présidente. Merci.

La présidente: Vous réclamez donc un vote par appel nominal?

M. Ramsay: S'il vous plaît.

La motion est rejetée par 7 voix contre 4

La présidente: Nous allons maintenant passer à une motion de M. Ramsay. Monsieur Ramsay, voulez-vous présenter votre motion?

M. Ramsay: Oui, madame la présidente.

.1605

Comme les membres du comité le savent, nous avons demandé à la présidente de rendre une décision sur cette question. Je signale qu'au moment où le projet de loi C-234 a été torpillé par le comité - car c'est ce qui s'est passé - , le fait qu'on n'en fasse pas rapport à la Chambre a suscité certaines inquiétudes. J'ai écouté les commentaires des députés, qui sont au compte rendu, et ils semblent clairement indiquer que le comité avait l'autorité voulue de ne pas renvoyer le projet de loi à la Chambre. Il semble que les choses aillent un peu plus loin que cela. Si le comité ne renvoie pas le projet de loi à la Chambre, une motion peut être présentée à la Chambre et faire l'objet d'un votre pour savoir s'il convient ou non que le comité lui renvoie le projet de loi.

Dans l'intérêt de ce projet de loi en particulier, qui porte sur une question très importante, je propose qu'il soit renvoyé à la Chambre pour y faire l'objet d'un examen de la part de tous les députés à la Chambre.

La présidente: Des interventions? Madame Torsney.

Mme Torsney (Burlington): Premièrement, je tiens à préciser que c'est au président de la Chambre que l'on a demandé de se prononcer dans cette affaire, et non pas à la présidente. Deuxièmement, le président de la Chambre a en fait corroboré la décision de notre présidente dans cette affaire. Si l'on considère la teneur du projet de loi à l'heure qu'il est, étant donné que nous en avons rejeté toutes les dispositions, nous ferions rapport à la Chambre d'un titre, tout simplement, soit projet de loi C-234. Il n'y a rien d'autre que cela. Rien d'autre que le numéro d'un projet de loi étant donné que toutes ses dispositions ont été rejetées en comité. Est-ce vraiment ce que souhaite le député d'en face, que l'on fasse rapport à la Chambre d'un numéro? Il serait impossible aux députés de voter sur le contenu du projet de loi étant donné qu'à la suite des travaux du comité, ce contenu a été supprimé. De quoi veut-il vraiment faire rapport à la Chambre?

M. Ramsay: Je veux que l'on fasse rapport du projet de loi à la Chambre.

Mme Torsney: Il n'y a pas de projet de loi.

La présidente: Souhaitez-vous un vote par appel nominal, monsieur Ramsay?

M. Ramsay: Oui, s'il vous plaît.

La motion est rejetée par 8 voix contre 3

La présidente: Nous en sommes toujours au rapport du sous-comité. Selon le paragraphe 2 du rapport, le comité procédera à l'étude des projets de loi suivants dans l'ordre suivant: projet de loi C-41, pour lequel nous devons entendre des témoins aujourd'hui; projet de loi C-17; projet de loi C-53; et ensuite projet de loi C-27. Voilà la recommandation du comité directeur. Y a-t-il des objections à ce que nous les étudiions dans cet ordre?

Des voix: Non.

La présidente: Au paragraphe 3, au sujet du projet de loi C-41, dont nous commençons aujourd'hui l'étude, comme je l'ai dit tout à l'heure, le comité directeur recommande une liste de témoins. Ce qui s'est passé c'est que nous avions une très longue liste de témoins au sujet desquels nous avons heureusement pu recueillir des avis. Je pense que la présente liste réduit le nombre de témoins à ceux que nous devons absolument entendre. S'il n'y a pas d'objection, je passerai au projet de loi C-17. Le projet de loi C-17 est le projet de loi omnibus et il en est question au paragraphe 4.

Monsieur Bellehumeur, nous avons apparemment reçu une nouvelle version du projet de loi avec les annotations que vous avez demandées. Nous avons invité l'Ontario Criminal Code Review Board, ou nous le ferons, avec votre assentiment, ainsi que le Barreau du Québec et l'Association du Barreau canadien. Tous ces organismes tiennent à comparaître.

Si personne n'a d'objection, je vais passer au paragraphe 5, qui porte sur le projet de loi C-27 concernant la prostitution chez les enfants, le tourisme sexuel impliquant des enfants, le harcèlement criminel et la mutilation d'organes génitaux féminins.

Madame Gagnon, je sais que vous voudrez sans doute prendre la parole à ce sujet. Je veux simplement signaler que nous serons à Vancouver la semaine prochaine pour examiner la Loi sur les jeunes contrevenants. Des témoins bien spécifiques de Vancouver souhaitent comparaître et nous voudrons prendre le temps de les entendre, surtout parce que nous essayons d'économiser sur les frais de voyage, et ainsi de suite. Ce sont les seuls témoins qui figurent au paragraphe 5.

.1610

Étant donné que la liste est tellement longue, nous avons demandé au greffier de dresser une liste de témoins après nous avoir consultés, mais après avoir consulté également Mme Gagnon qui nous a saisis d'un projet de loi d'initiative parlementaire devant recevoir l'approbation du comité. Cette liste sera prête demain et nous pourrons en prendre connaissance. Si cela cause des problèmes, nous pourrons en discuter plus tard cette semaine.

Y a-t-il des désaccords?

M. Kirkby: Quand conviendrait-il de présenter une motion relativement à l'étude article par article du projet de loi C-41?

La présidente: Avez-vous une motion?

M. Kirkby: Oui, j'ai une motion.

La présidente: Vous pouvez la présenter à la fin. Nous allons simplement en terminer avec le rapport.

Le paragraphe 6 du rapport du comité directeur porte sur le projet de loi C-205, projet de loi d'initiative parlementaire de M. Wappel. Étant donné que nous nous sommes entendus pour examiner avec diligence les projets de loi d'initiative parlementaire, je demanderais au comité de convenir d'inviter M. Wappel à comparaître pour présenter son projet de loi.

Si personne n'a d'objection, je considérerai le rapport adopté. Monsieur Kirkby, vous aviez une motion.

M. Kirkby: Je propose que le comité procède à l'étude du projet de loi C-41 le jeudi 24 octobre 1996 à 19 h 30.

La présidente: Cela respecte l'échéancier établi pour la comparution des témoins et nous permet de passer à l'étude article par article jeudi.

Je constate que personne ne soulève d'objection.

Mme Jennings (Mission - Coquitlam): Excusez-moi, madame la présidente, pourriez-vous me donner des explications? Je ne comprends pas très bien ce qui se passe.

La présidente: M. Kirkby propose que nous fassions l'étude article par article du projet de loi C-41 jeudi soir. Notre comité n'a malheureusement pas beaucoup de temps. Nous sommes saisis de trop de projets de loi ministériels et d'initiative parlementaire.

Nous ferons donc l'étude article par article jeudi soir. S'il n'y a pas d'objection, il en est décidé ainsi.

[Français]

M. Bellehumeur: Ce sera le jeudi 24 octobre en soirée.

[Traduction]

La présidente: Jeudi.

[Français]

M. Bellehumeur: Nous pourrions peut-être siéger mercredi. Avons-nous des témoins? Quand on siège le jeudi après-midi, on se retrouve habituellement avec des gens nouveaux qui arrivent ici sans avoir suivi le débat, sans savoir ce dont on discute, et qui votent oui ou non, selon les commandes qu'ils ont reçues. Si l'on peut s'assurer que tous ceux qui ont suivi les débats du comité seront ici pour voter jeudi soir, il n'y a pas de problème. Mais si nous nous retrouvons avec des nouveaux, des substituts ou des gens qui ne sont pas trop au courant de ce sur quoi ils voteront, je préfère qu'on remette le vote au lundi suivant, en matinée s'il le faut. Il faut que les députés présents votent sur une question qu'ils connaissent.

Selon l'expérience que j'ai acquise depuis trois ans, les votes tenus le jeudi ne sont pas trop sérieux. Le gouvernement fait adopter ce qu'il veut. J'aimerais que les députés soient au courant de la question sur laquelle ils vont voter.

Je m'oppose à ce que le vote soit tenu jeudi. Je souhaite plutôt qu'il soit tenu la semaine suivante, le lundi.

[Traduction]

La motion est adoptée

La présidente: Nous procéderons à l'étude article par article jeudi soir.

[Français]

M. Bellehumeur: Cinquante pour cent des députés ne seront pas présents. Par surcroît, leur congrès aura lieu le lendemain. Les trois quarts seront partis.

[Traduction]

La présidente: Nous devons maintenant discuter de la composition de nos sous-comités. Nous avons approuvé la constitution de deux sous-comités. Les membres proposés par les divers whips pour le Sous-comité de la sécurité nationale - à l'ordre s'il vous plaît - seraient les suivants: M. Lee, M. Rideout, M. Discepola et M. Gallaway du côté ministériel; M. Langlois pour le Bloc québécois et M. Hanger pour le Parti réformiste. Pourrais-je recevoir une motion en ce sens?

Mme Torsney: Je présente la motion.

La motion est adoptée

La présidente: Au sujet du sous-comité sur le projet de loi C-25, qui se penchera sur l'ébauche des règlements, il est proposé par les divers whips des partis qu'il se compose des personnes suivantes: M. MacLellan, M. Kirkby, Mme Whelan et M. Maloney, pour le gouvernement; M. Lebel, pour le Bloc; et M. Ted White pour le Parti réformiste. Quelqu'un veut-il intervenir à ce sujet?

.1615

La motion est adoptée

La présidente: Au sujet du projet de loi C-41, j'invite le ministre et ses collaborateurs à s'approcher de la table.

Chers collègues, je prends un instant pour vous signaler la présence de visiteurs de Windsor dans la salle.

Des voix: Bravo!

La présidente: Je les invite à se lever pour que nous puissions savoir qui elles sont.

Mme Clancy: Je suppose que ces personnes sont de Windsor, Nouvelle-Écosse, madame la présidente.

La présidente: Elles sont de Windsor, Ontario.

Mme Clancy: Eh bien, elles sont les bienvenues de toute façon.

La présidente: Bienvenue, monsieur le ministre.

L'honorable Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Bon après-midi, madame la présidente. Je suis heureux d'être de retour devant le comité.

La présidente: Nous sommes heureux de vous voir.

M. Rock: Madame la présidente, je suis heureux de comparaître devant le comité au sujet du projet de loi C-41 qui, comme vous le savez, vise à modifier les règles concernant le calcul et l'étalement des montants de la pension alimentaire découlant d'un divorce, de même qu'à appliquer des mécanismes plus efficaces d'exécution des ordonnances de pensions alimentaires. Je parlerai aussi brièvement de la façon dont le gouvernement fédéral entend utiliser les revenus découlant de ce changement.

Il me faut tout d'abord énoncer que la nature de la famille canadienne évolue, ce qui est assez évident d'après les statistiques. Aujourd'hui, il y a plus de familles monoparentales que jamais. Lorsque les parents se séparent, ils doivent assumer deux résidences, ce qui réduit de beaucoup leurs ressources financières. Trop souvent, ce sont les enfants qui en souffrent. Depuis 20 ans, le nombre de familles dirigées par un parent seul a doublé. Il y a maintenant près d'un million de familles de ce genre au Canada.

En 1990, 61 p. 100 des familles monoparentales dirigées par des femmes vivaient sous le seuil de la pauvreté, comparativement à 10 p. 100 seulement des familles avec enfants pouvant compter sur deux parents. Les mesures que nous proposons dans le projet de loi C-41 à l'égard du système de versement des pensions alimentaires au Canada ne mettront pas fin à la pauvreté des enfants, mais nous pensons qu'elles représentent un progrès.

[Français]

Nous avons proposé une stratégie à quatre piliers. Tout d'abord, nous présentons des lignes directrices sur la pension alimentaire pour enfants pour établir des niveaux de pension alimentaire appropriés et uniformes et pour diminuer les conflits entre les parents qui se séparent.

Deuxièmement, nous changeons la façon dont les pensions alimentaires pour enfants sont imposées afin de rendre la situation plus juste et plus simple.

Troisièmement, nous améliorons les mesures fédérales et provinciales d'exécution en les axant sur les personnes qui s'obstinent à ne pas verser la pension alimentaire.

[Traduction]

Enfin, nous entendons aider les familles à faible revenu en doublant le niveau du supplément de revenu d'emploi des prestations fiscales pour enfants du gouvernement fédéral pour les deux prochaines années.

J'aimerais prendre quelques instants pour expliquer chacun de ces volets plus en détail.

[Français]

Premièrement, les lignes directrices et les montants uniformes qui seront utilisés partout au Canada par les tribunaux, les avocats et les parents pour établir des niveaux appropriés de pension alimentaire pour enfants sont au coeur de cette démarche.

À l'heure actuelle, des tribunaux fixent les niveaux de pension alimentaire pour enfants en fonction de chaque cas. Les litiges se prolongent et ajoutent à l'angoisse des parents. Ce ne sont pas tous les juges qui adoptent la même démarche ou qui préconisent la même philosophie. Par conséquent, les niveaux de pension alimentaire varient beaucoup, non seulement dans l'ensemble du pays, mais également d'une famille à l'autre.

[Traduction]

Le montant disponible pour répondre aux besoins d'un enfant ne devrait pas dépendre de la province de résidence, du tribunal auquel le cas est assigné ou encore du fait qu'une partie au divorce a un avocat plus convaincant que l'autre. La raison d'être des lignes directrices, c'est qu'elles établiront, sans recours à un procès, le niveau de la pension alimentaire pour enfant qui doit être versée et ce, selon le revenu du parent payeur.

.1620

Les montants en questions sont calculés selon une formule qui tient compte des dépenses moyennes consacrées aux enfants à divers niveaux de revenu. La contribution des parents aux besoins des enfants augmentera ou diminuera selon l'augmentation ou la diminution du niveau de revenu, tout comme ce serait le cas si la famille était restée ensemble. Les lignes directrices constituent une norme, mais elles sont aussi souples étant donné qu'il n'y a pas deux familles exactement semblables.

On peut y ajouter des dépenses extraordinaires pour les enfants, comme des dépenses médicales non assurées et des frais de garde pour les enfants d'âge préscolaire. Un tribunal peut aussi modifier à sa guise les montants en question si l'on peut faire la preuve de contraintes excessives.

[Français]

Cette méthode a des points forts exceptionnels. Elle est simple et uniforme. Elle garantit que les débiteurs alimentaires qui ont le même niveau de revenu paient le même montant de pension alimentaire.

[Traduction]

C'est un document facile à utiliser et le résultat est facile à comprendre. Il y aura moins de raisons pour les parents de se quereller au sujet de ce qui est ou n'est pas un niveau de soutien financier suffisant. Cela signifie moins de conflits, des honoraires d'avocats moins élevés, des coûts d'aide juridique réduits et moins de dépenses liées aux tribunaux. Avec le résultat qu'une bonne partie de l'argent qui sert maintenant à payer les tribunaux et les avocats peut rester dans la poche des parents, pour le plus grand bien des enfants.

Le deuxième pilier de la stratégie est une modification de la façon dont les pensions alimentaires sont imposées. Actuellement, les pensions alimentaires pour enfants sont déductibles d'impôt pour le payeur et imposables pour le bénéficiaire. Cette règle est vieille de 54 ans. Après en avoir étudié les tenants et les aboutissants, nous en avons conclu que cette règle était injuste et périmée.

Tout d'abord, à notre époque, on sait que les pères n'ont pas besoin d'incitatif ou de récompense pour les encourager à verser les pensions alimentaires de leurs enfants et qu'il ne convient pas que les contribuables versent une subvention universelle à toutes les familles dont les conjoints sont séparés ou divorcés. De toute façon, cette subvention n'est avantageuse que quand il y a un écart énorme entre le revenu de la mère et celui du père, et cela est de moins en moins courant. L'évolution des revenus a rétréci cet écart. Quand la mère touche le même salaire ou presque que le père qui verse une pension alimentaire, le système actuel est désavantageux pour elle. Plus d'un tiers de tous les couples séparés sont dans ce cas-là, et cette proportion ne cesse d'augmenter.

Même quand les revenus ne sont pas égaux, la subvention ne donne des résultats que si le tribunal veille, dans chaque cas, à faire un calcul complexe pour relever le niveau de la pension afin de prendre l'incidence fiscale en compte. Cela n'est pas fait dans tous les cas. Ainsi, il arrive que l'incidence fiscale gruge la pension accordée et ce sont les enfants qui en pâtissent.

En outre, les conjoints qui ont la garde des enfants ne souhaitent pas administrer le régime fiscal. Il leur appartient actuellement de calculer la somme due et de la verser le 30 avril de chaque année, même si les pensions alimentaires sont versées tard dans l'année.

Les pensions alimentaires pour enfants, et c'est encore plus fondamental, ne constituent pas un revenu pour le parent bénéficiaire. Il s'agit d'argent qui doit servir aux besoins des enfants et il ne doit pas être imposé une fois qu'il est remis au bénéficiaire.

Permettez-moi de parler brièvement de l'exécution, qui constitue le troisième volet de ces propositions.

[Français]

Il va sans dire qu'un régime de pensions alimentaires pour enfants juste ne se limite pas à fixer équitablement des niveaux de pension alimentaire et à les imposer justement. Il s'agit également de veiller à ce que les versements soient effectués en entier et à temps. C'est donc dire que les mesures d'exécution jouent un rôle primordial.

[Traduction]

Qu'il soit bien clair que la vaste majorité des parents qui versent les pensions alimentaires en totalité à l'échéance méritent notre respect. Ils assument leurs responsabilités avec sérieux et ils sont assidus. Il y en a qui ne peuvent pas verser leur pension parce qu'ils connaissent un revers de fortune, soit qu'ils ont perdu leur emploi, soit qu'ils sont tombés malades, et ils doivent demander au tribunal de les relever de responsabilités qu'ils ne peuvent plus assumer. Mais il y en a encore trop qui laissent des paiements en souffrance à dessein. Au mois de septembre dernier, on constatait que la moitié des cas relevés auprès de l'Organisme d'application du régime des obligations alimentaires envers la famille en Ontario étaient des cas où il n'y avait eu absolument aucun versement de la pension alimentaire. Quant à l'autre moitié, la pension n'était versée en totalité que dans un cas sur quatre.

L'omission volontaire et chronique de verser la pension par des gens qui peuvent le faire mais qui refusent de le faire est tout simplement inacceptable au Canada. Ces gens se désintéressent de leurs fils et de leurs filles. En outre, ils ne s'acquittent pas de leur responsabilité de citoyens car ce sont leurs enfants qu'ils lèsent, et leurs concitoyens canadiens sont forcés de s'en occuper à leur place.

.1625

Ce sont les provinces qui ont essentiellement la responsabilité de veiller à l'exécution des ordonnances alimentaires pour enfants. Et on constate que les organismes provinciaux font déjà beaucoup sur ce plan. Le gouvernement canadien a toutefois également un rôle à jouer, un rôle de leadership car il lui incombe de coordonner les efforts provinciaux, de les encourager et de les compléter.

Les mesures que nous proposons viennent appuyer et renforcer les stratégies des gouvernements provinciaux et territoriaux. Nous voulons travailler avec eux une cause commune. Il y a toute une liste de mesures que nous entendons prendre désormais. Permettez-moi de vous en citer quelques-unes.

La législation fédérale permettra désormais de suspendre les permis et les certificats délivrés par le gouvernement fédéral, comme les passeports, en cas d'omission persistante.

[Français]

Nous donnerons aux provinces accès à la banque de données de Revenu Canada afin de les aider à dépister les personnes qui s'obstinent à ne pas verser la pension alimentaire. Nous allons consacrer également argent et efforts à la mise à niveau des systèmes informatiques pour partager de l'information entre les provinces et coordonner leurs efforts.

[Traduction]

Le quatrième aspect de notre stratégie est une mesure visant à venir en aide aux familles à faible revenu, qu'elles soient intactes ou séparées. Le gouvernement canadien grâce à la prestation fiscale pour enfants assure en partie une sécurité de revenu pour les enfants. Une des composantes de cette prestation est le supplément du revenu d'emploi qui prend la forme d'un montant non imposable venant s'ajouter aux gains d'emploi des familles dont le revenu net est inférieur à 25 900 $. Actuellement, le montant maximal versé en supplément du revenu gagné est de 500 $ par famille par année. D'ici deux ans, le gouvernement canadien portera ce supplément à 1 000 $ par famille, c'est-à-dire le double.

Les recettes supplémentaires dont nous disposerons du fait que la déduction des paiements des pensions alimentaires sera supprimée serviront à financer l'augmentation de ce supplément. Ainsi, d'ici à cinq ans, nous donnerons plus d'un milliard de dollars de revenu supplémentaire à 700 000 familles de petits salariés. Dans un tiers des cas, il s'agira de familles monoparentales.

[Français]

Cette stratégie présente des avantages évidents. Le supplément au revenu gagné, tel qu'augmenté, est non imposable et ira directement aux familles qui ont besoin d'argent pour leurs enfants.

[Traduction]

C'est distribué équitablement, pour profiter aux enfants des familles séparées comme à ceux des familles intactes. Nous voulons rejoindre ceux qui sont les plus nécessiteux.

En conclusion, madame la présidente, ce qui va assurer le succès de ces réformes, à mon avis, c'est la collaboration. Les lignes directrices vont garantir le versement des pensions alimentaires à des niveaux convenables en réduisant au maximum les conflits et les dépenses. Un règlement fiscal qui reflète les conditions et les valeurs sociales de 1942 sera modifié pour correspondre aux besoins actuels. Des outils efficaces vont permettre une meilleure exécution de sorte que ceux qui versent fidèlement leur pension sauront que ceux qui omettent volontairement de le faire seront poursuivis. Toutes les recettes qui seront disponibles à Ottawa du fait de la modification fiscale seront réinvesties dans le système au profit des enfants des familles à faible revenu.

Cela dit, je recommande aux membres du comité d'adopter ce projet de loi. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

La présidente: Merci.

Monsieur Bellehumeur, vous disposez de dix minutes.

[Français]

M. Bellehumeur: Monsieur le ministre, vous ne serez pas surpris que je vous dise que les députés du Bloc québécois sont d'avis que toutes les questions touchant à la famille, soit le divorce, la séparation, les pensions alimentaires et la garde d'enfant, devraient relever des provinces. Cependant, en attendant des jours meilleurs, je pense que les modifications que vous proposez sont bonnes dans l'ensemble.

Je veux profiter de votre présence pour être assez technique et parler du paragraphe 1(4) du projet de loi qui modifie l'article 2 de la loi. Le paragraphe 2(5) proposé stipule que:

(5) Le gouverneur en conseil peut, par décret, désigner une province pour l'application de la définition de «lignes directrices applicables» au paragraphe (1) si la province a établi, relativement aux aliments pour enfants, des lignes directrices complètes qui traitent des questions visées à l'article 26.1.

En votre qualité de ministre, pouvez-vous nous indiquer comment vous entrevoyez le fonctionnement de ce paragraphe (5)?

M. Rock: Notre objectif est de nous doter d'un système national uniforme. Un des défauts du système actuel est son imprévisibilité. Notre objectif général est de mettre sur pied un système pour déterminer des montants de pensions alimentaires pour enfant qui soient prévisibles, uniformes et nationaux.

.1630

Nous reconnaissons qu'il serait peut-être intéressant pour chaque province de développer son propre montant et ses lignes directrices, mais il est très important d'avoir une certaine uniformité pour atteindre l'objectif national.

En réponse à votre question, je dirais que j'aimerais beaucoup savoir si les montants proposés par une province, tout comme ses lignes directrices, sont plus ou moins comparables aux montants prévus dans les lignes directrices fédérales. S'il existe une grande différence, cela peut poser problème quand les familles déménagent dans un autre coin du pays. C'est la raison pour laquelle il est important d'établir une certaine uniformité.

Nous savons que le Québec désire avoir ses propres lignes directrices et nous sommes très près d'arriver à un accord avec le gouvernement du Québec à cet égard. Ils ont établi des montants acceptables dans leurs lignes directrices. En fait, ils sont très proches de ceux que nous avons établis nous-mêmes.

M. Bellehumeur: Je me reporte encore au paragraphe 1(4) du projet de loi. Vous me corrigerez si ce n'est pas exact. Le pouvoir du gouverneur en conseil est un pouvoir dit réglementaire, donc législatif. Est-ce exact?

M. Rock: En général, oui.

M. Bellehumeur: Par conséquent, comme dans le cas d'un pouvoir judiciaire ou quasi judiciaire, le terme «peut», dans une disposition comme celle proposée au paragraphe 1(4), indique un pouvoir lié à l'organisme.

Dans le cas que nous avons devant nous, la disposition proposée au paragraphe 1(4) dit que «le gouverneur en conseil peut, par décret,» agir si les provinces respectent certains critères. Si les provinces respectent ces critères-là, est-ce que le terme «peut» ne devrait pas plutôt être «doit», afin de ne laisser aucune discrétion au gouverneur en conseil, afin que les provinces aient la mainmise sur les critères ou sur les grilles parce qu'elles sont beaucoup plus proches de la population que le gouvernement fédéral?

M. Rock: La création des lignes directrices pour les pensions alimentaires pour enfants est un nouveau sujet pour le gouvernement du Canada. C'est la première fois que nous le faisons. Il est difficile de savoir à l'avance toutes les questions qui se poseront à l'avenir. Nous avons donc utilisé les mots que l'on trouve habituellement dans les articles de loi afin de laisser au gouvernement une certaine flexibilité.

[Traduction]

Je ne suis pas sûr de vouloir énoncer tous les facteurs sans exception, ce qui risquerait d'imposer des obligations rigides au gouverneur en conseil. Le député le sait, parfois «peut» est interprété de toute façon comme «doit» par les tribunaux. Ce sera peut-être le cas en l'occurrence.

Je peux vous assurer que l'esprit et l'intention est de répondre aux souhaits des provinces qui voudraient élaborer leurs propres lignes directrices pour leurs propres fins mais en même temps, nous voulons conserver une uniformité nationale, ce qui sert l'intérêt du public, à mon humble avis. Je ne pense pas qu'il soit souhaitable de remplacer le mot «peut» par «doit» et de lier ainsi les mains du gouvernement car dans les secteurs où nous avons très peu d'expérience, il vaut mieux conserver la latitude nécessaire car il se pourrait que certains facteurs imprévisibles interviennent. Si au cours des prochaines années, nous découvrons que nous pouvons cerner et faire figurer dans la loi tous les facteurs possibles, on pourra peut-être envisager à ce moment-là d'en faire une obligation.

.1635

[Français]

M. Bellehumeur: Vous ne me rassurez pas, monsieur le ministre, d'autant plus qu'au paragraphe 26.1(1) proposé, on énumère une série de lignes directrices. On trouve là l'adverbe «notamment», ce qui veut dire que d'autres choses pourraient éventuellement être ajoutées. «Notamment», ça veut peut-être dire que le gouvernement libéral actuel pourrait interpréter cela par décret d'une certaine façon, tandis qu'un autre gouvernement pourrait l'interpréter d'une façon tout à fait différente et procéder par décret pour changer ces fameuses lignes directrices. Pourquoi ne voulez-vous pas laisser aux provinces qui la désirent la pleine juridiction sur ces fameuses lignes directrices?

Prenons le cas du Québec. Le Québec a dit clairement son intention d'aller dans ce sens-là et a déjà un projet. Si on l'examine, on peut voir qu'il y a des différences importantes entre les critères du fédéral et ceux du provincial. Mais je suis cependant très heureux de vous entendre dire que les négociations sont en bonne voie.

Je voudrais dire aussi que je ne trouve pas très rassurant le fait de lire les mots «peut», «le gouverneur en conseil peut» et «notamment», dans le paragraphe 26.1(1) proposé de la loi. Je crois en votre bonne foi, monsieur le ministre, et je suis persuadé que tout va bien se passer, mais une loi n'est pas faite seulement pour un ministre; elle est faite pour une population et son avenir. Personnellement, j'aimerais ne pas prendre de risques et donner pleins pouvoirs aux provinces. J'aimerais remplacer «peut» par «doit» pour que le gouverneur en conseil n'ait pas de choix, et remplacer «notamment» par un mot plus précis.

M. Rock: Mais nous avons utilisé le mot «notamment» pour ces mêmes raisons. C'est-à-dire qu'il nous est impossible de savoir maintenant ce qui va se passer à l'avenir du fait que c'est la première fois que nous adoptons une telle approche, à savoir la création des lignes directrices. Nous avons utilisé le mot «notamment» parce qu'il est bien possible qu'il faille prendre en compte d'autres considérations. Et il en est de même du droit du gouverneur général en conseil de reconnaître les lignes directrices développées par les provinces.

Je pense, monsieur Bellehumeur, qu'il est préférable, puisque nous commençons une nouvelle chose, de donner une certaine flexibilité au gouvernement du Canada et de ne pas créer, pour l'instant, d'obligations pour chacun des cas qui seront présentés.

[Traduction]

Je pense que la souplesse est préférable ici. Je pense qu'il vaut mieux adopter cette approche au cours des prochaines années. Si nous pouvons améliorer le système de telle sorte que nous comprenions mieux tous les facteurs, il sera temps alors d'apporter cette modification.

La présidente: Monsieur Bellehumeur, vous aurez une autre occasion au prochain tour.

Mme Jennings: Monsieur le ministre, le projet de loi C-41 porte sur les paiements de pensions alimentaires en souffrance et les sanctions imposées dans ces cas-là. Je ne suis pas avocate. C'est plus en ma qualité de mère et de grand-mère que je participe à ces délibérations. Je peux concevoir qu'avec ce projet de loi, en voulant régler certains problèmes, nous risquons d'aggraver les problèmes en réalité.

Si un couple en train de divorcer ou déjà divorcé ne s'assoit pas ensemble, grâce au processus de médiation pour décider d'un paiement réaliste, d'un paiement qui soit à leur portée et à la mesure de leurs moyens, un paiement qui ne sera pas le reflet de bonnes intentions le premier mois, les choses se gâtant les mois suivants, si un couple donc ne procède pas ainsi et s'il ne se laisse pas guider par les besoins de l'enfant et la capacité de payer, je prévois qu'il se posera des difficultés graves. Le parent qui a la garde des enfants a besoin de cet argent. Les mères - et je vais dire mères parce que dans la plupart des cas le conjoint qui a la garde des enfants est la mère - comptent sur cet argent. Je dirais même que dans bien des cas elles en ont besoin pour subsister. Il va sans dire que les enfants en ont besoin. Je suppose que dans certains cas les enfants n'ont que le strict nécessaire.

.1640

Il faut également reconnaître que le conjoint qui n'a pas la garde des enfants, celui qui doit verser la pension alimentaire, se trouve face à une dette. C'est une dette qu'il faut reconnaître comme telle. En d'autres termes, il s'agit d'une facture.

Toutefois, cela étant dit, il faut veiller à ce que quelle que soit la somme sur laquelle on s'entend, cette dernière soit réglée. Selon moi, on trouve là une des explications au fait qu'il y ait tant de paiements en souffrance au Canada. Il y a quelque chose qui s'est produit car certaines de ces pensions alimentaires n'étaient pas réalistes, pour une raison ou pour une autre. Nous savons tous que le chômage est élevé au Canada. Nous savons aussi que pour toutes sortes de raisons, on peut perdre son emploi et ne pas pouvoir respecter ses engagements.

L'article 2 du projet de loi modifie l'article 15 de la Loi sur le divorce. Cet article dispose qu'un juge, dans le cas d'une ordonnance au profit d'un enfant ou d'un époux, peut examiner l'entente conclue entre les parties du point de vue de leur capacité de payer, et d'éléments qui seraient à l'avantage des enfants. Mais auparavant, le juge doit prendre en compte les lignes directrices, le barème établi par les dispositions de ce projet de loi-ci.

Ma première préoccupation vient précisément de là. Si les juges tiennent compte tout d'abord du barème, ce sera pour eux la ligne directrice. Je voudrais que vous me disiez ce que vous en pensez. Ne vaudrait-il pas mieux rendre la médiation obligatoire? Je sais que la médiation existe actuellement. On me dit, de source sûre, que la médiation est rarement utilisée concrètement. Ne vaudrait-il pas mieux que ces parents-là s'assoient et essaient de conclure une entente réaliste, une entente sur laquelle les deux parties seraient d'accord, ce qui permettrait sans doute au père, d'ordinaire le conjoint qui n'a pas la garde des enfants, de rester en contact avec ses enfants? Je pense que cela serait plus avantageux à tous points de vue pour les enfants. Cela ne serait-il pas plus réaliste que le barème?

Je vous demande deux choses dans ma première question. Pensez-vous que les pensions alimentaires devraient être accordées dans le meilleur intérêt de l'enfant, compte tenu de la capacité de payer? Dans la négative, pourquoi ne pensez-vous pas ainsi? Deuxièmement, comment pourrait-on procéder à l'inverse de ce qui est prévu, en faisant intervenir d'abord l'entente et ensuite le barème, sur lequel le juge va se fonder neuf fois sur dix puisque le barème existera?

M. Rock: J'ai exercé le droit pendant vingt ans. Pendant les dix premières années de ma carrière, je me suis occupé pour l'essentiel de dossiers matrimoniaux: le droit de la famille, représentant un conjoint ou un autre quand il y avait confrontation à propos de la pension alimentaire au profit du conjoint ou des enfants, ou encore des questions de garde et d'accès. Je suis entièrement d'accord avec vous: dans le meilleur des mondes possibles, l'intérêt général est bien servi quand les gens peuvent s'entendre sur ce qui constitue les meilleurs intérêts pour les enfants. Mais je crains d'avoir été forcé de constater qu'on ne peut pas compter sur cela car, la nature humaine étant ce qu'elle est, les sentiments sont exacerbés, les émotions à leur comble, et ce ne sont pas toujours les meilleurs intérêts de l'enfant qui priment. Il n'est pas toujours possible de réaliser une entente négociée grâce à la médiation.

Ainsi, on a constaté depuis une vingtaine d'années au Canada que les différends familiaux faisaient l'objet de procès. Je sais parfaitement bien que très souvent cela coûte des sommes faramineuses, que le processus est tout à fait imparfait, qu'il prolonge l'angoisse des parties et qu'il n'aboutit pas à servir au mieux les intérêts des enfants - absolument pas.

Un des principaux objectifs de ce barème est de régler une question, parmi d'autres, mais souvent celle qui occasionne le plus de divisions et de contestations. Ainsi, une question ne pourra pas faire l'objet du différend. Les parties découvriront qu'il n'est pas nécessaire, qu'il est en fait impossible, de se bagarrer sur cette question-là et nous espérons ce faisant que les différends seront moins coûteux, moins angoissants et dureront moins longtemps.

Selon moi, nous sommes plus susceptibles d'atteindre les objectifs énoncés par Mme Jennings en créant une ligne directrice présomptive que si nous laissons la chose être réglée par les parties et leurs médiateurs, car en procédant ainsi, nous courons à l'échec. Dans certains cas, cela peut donner des résultats, mais pas dans beaucoup de cas.

Alors, effectivement, je suis convaincu qu'il faut déterminer le montant de la pension alimentaire au profit de l'enfant en tenant compte de ses meilleurs intérêts, et je pense que les montants fixés devraient refléter les moyens financiers des parties. Je suis également convaincu que ces lignes directrices permettent d'atteindre cet objectif, et elles sont conçues de façon à réduire les frais juridiques, à diminuer le nombre des questions litigieuses qui opposent les parties et je suis persuadé qu'en dernière analyse, ce sont les enfants qui en profiteront.

.1645

Mme Jennings: Monsieur le ministre, nonobstant ce que vous dites, et compte tenu des arguments que j'ai fait valoir, je voudrais attirer votre attention sur un élément du programme en vigueur actuellement en Alberta. Le nouveau programme de divorce albertain force les gens d'Edmonton à suivre un cours de six heures avant d'intenter des poursuites pour obtenir l'accès ou la garde d'un enfant. L'objectif est d'aider les enfants et de faire épargner temps et argent aux tribunaux. Le but ultime est de réduire au minimum l'incidence du divorce sur les enfants. N'oublions pas qu'il s'agit ici d'enfants. Quant à moi, j'estime que les enfants devraient avoir la priorité, et qu'on ne devrait pas se soucier des adultes ou d'éventuels problèmes juridiques. Si les enfants souffrent psychologiquement et affectivement, il y a de fortes chances qu'ils aient un jour ou l'autre des démêlés avec la justice.

Je prétends qu'on ne peut pas morceler la question en petits compartiments, un pour le parent débiteur, un pour le conjoint qui a la garde des enfants, un pour l'enfant. Il se peut que l'appareil de justice pénale en ressente l'effet. Je pense qu'il faut regarder le tableau d'ensemble. Ce programme que j'ai cité, qui est déjà en vigueur et qui semble fonctionner assez efficacement, reconnaît qu'il est essentiel qu'un processus de médiation intervienne avant toute imposition d'un barème.

Le barème, je le répète, n'a rien à voir avec la réalité. Il est fondé sur des pourcentages et des chiffres. J'en ai pris connaissance. Il ne se fonde pas sur la situation de M. Untel, qui est dans une position donnée un jour, ou de quelqu'un d'autre qui se trouve dans une autre position. Il faut absolument une entente entre les deux parties. Ce sont elles qui doivent pouvoir compter sur une solution pratique.

Cela étant, pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?

M. Rock: Comprenez-moi bien. Je préconise tout à fait un règlement des différends entre les gens, s'ils peuvent y parvenir, et je préconise que les tribunaux sensibilisent les parties aux coûts - affectifs et autres - que la mésentente représente pour les enfants. Je suis ravi d'apprendre que le projet pilote d'Edmonton donne de bons résultats. Je sais qu'il y a une douzaine d'autres programmes de ce genre au Canada et dans certains cas, les choses marchent très bien.

Toutefois, si les parties n'arrivent pas à s'entendre, il faut bien pouvoir compter sur une méthode quelconque. C'est précisément ce que cette ligne directrice va nous fournir, et elle va réduire au minimum le temps des tribunaux, les coûts juridiques, l'intensité de la bagarre. On règle un élément de la question par là. On dit que quand on ne pourra pas s'entendre sur le montant de pension alimentaire au profit de l'enfant, le montant sera fixé. Je pense que c'est une dynamique tout à fait utile.

En outre, même si des parties s'entendent, madame la présidente, ces lignes directrices revêtent une grande importance. Je pense que la majorité des ententes concernant les aliments sont conclues entre les parties, à la table de cuisine dans une maison de ferme ou dans le foyer conjugal, et que les parties peuvent très souvent s'entendre et obtenir le versement des pensions. Mais trop souvent, leur montant est insuffisant parce que les parties ne comprennent pas bien ce qui est nécessaire ou ce qui est convenable.

Mon ami de Crowfoot sait bien que je m'intéresse aux électeurs des régions rurales et à la situation des agriculteurs. Il a déjà reconnu que je cernais bien ces questions-là.

Madame la présidente, ces lignes directrices offrent un autre avantage. Elles annoncent haut et fort les montants que le Parlement estime appropriés suivant les niveaux de revenu. Quand on conclura une entente assis à la table d'une maison de ferme, ou quand on conclura une entente directement avec un conjoint, on pourra se reporter à ces lignes directrices. Ainsi on saura ce qu'une personne devra verser si l'affaire va au tribunal, et ainsi on comprendra ce à quoi on a droit, ce que l'on peut exiger, au moment de négocier la pension alimentaire des enfants.

La présidente: Merci, madame Jennings. Votre temps est écoulé.

Mme Jennings: Déjà 10 minutes?

La présidente: Oui, 10 minutes et 23 secondes exactement.

Monsieur Telegdi.

M. Telegdi: Merci, madame la présidente.

Monsieur le ministre, pour parvenir à un règlement, c'est assurément la médiation qui est la plus efficace. J'ai pris connaissance du barème. Vous avez dit dans votre exposé que dans un tiers des cas, le conjoint ayant la garde était la mère et qu'elle gagnait autant d'argent sinon plus que son conjoint de sorte que le régime fiscal la pénalisait. Avez-vous des chiffres rendant compte de ce que les familles éclatées perdront à cause de la modification fiscale parce que le parent qui n'a pas la garde des enfants sera imposé sur le plein montant des versements?

.1650

M. Rock: Oui. Nous avons le total des recettes supplémentaires que le gouvernement fédéral va percevoir du fait que la déduction sera supprimée. Est-ce ce que vous voulez savoir?

M. Telegdi: Oui.

M. Rock: Voilà, il s'agit de 200 millions de dollars la première année avec augmentation avec les années pour devenir... Je n'ai pas de chiffres précis mais je peux certainement les obtenir, monsieur Telegdi.

M. Telegdi: Vous dites que cela va augmenter si les conjoints qui ont la garde de leurs enfants, comme vous l'avez dit, font autant d'argent, voire plus, pourquoi cette somme de 200 millions de dollars augmenterait-elle? Ne devrait-elle pas diminuer?

M. Rock: Cela s'explique du fait que de plus en plus d'ordonnances vont être rendues en vertu du nouveau régime. Avec le nouveau régime, il y aura de nouvelles ordonnances. Les anciennes ordonnances seront exécutées sans que l'on change nécessairement les règles de base. La déduction s'appliquera toujours. Ces modifications ne sont pas rétroactives. Mais au fur et à mesure que de nouvelles ordonnances seront rendues en vertu des nouvelles règles, il y aura de moins en moins de déductions possibles, de sorte que les gens verseront des impôts sur ces sommes-là.

M. Telegdi: Au départ, ce groupe de familles éclatées disposera de 200 millions de dollars de moins, n'est-ce pas?

M. Rock: Je pense qu'il faut songer à qui profite de cet avantage de 200 millions de dollars. Si, pour des raisons de politique, nous voulons supprimer cette déduction, c'est qu'elle profite essentiellement au parent qui n'a pas la garde des enfants et qui a un revenu élevé. Actuellement, celui qui profite le plus du régime actuel est le parent qui n'a pas la garde des enfants et qui touche un revenu élevé, alors que celui qui en a la garde, est parmi les gagne-petit. Il s'agit d'un couple où il y un écart énorme entre les deux niveaux de revenu. C'est le payeur qui déduit la somme versée en pension alimentaire. C'est lui qui profite essentiellement du régime actuel. Quand vous dites que c'est la famille qui va perdre l'argent, je ne suis pas sûr de comprendre votre logique.

M. Telegdi: Quand les tribunaux qui fixent le montant des pensions alimentaires étudient les revenus, je suppose que plus le revenu est élevé, plus le montant est élevé. Mais les revenus baissent quand il y a versement des impôts et il faut tenir compte des deux tiers des conjoints qui ont la garde des enfants mais qui gagnent moins que leurs conjoints qui versent la pension alimentaire.

M. Rock: Je ne suis pas sûr de bien comprendre votre question mais...

M. Telegdi: Monsieur le ministre, je vais essayer de m'exprimer autrement. Voici ce qui m'inquiète: cela signifie moins d'argent, 200 millions de dollars de moins, à partager entre les familles.

M. Rock: La valeur que représente la déduction dont bénéficient actuellement les parents payeurs correspond à environ 200 millions de dollars pour la première année. Cet argent, chaque dollar de cette somme, sera versé désormais aux enfants des familles de travailleurs économiquement faibles.

M. Telegdi: C'est une chose importante qu'il faut continuer de rappeler.

M. Rock: Ce n'est pas comme si on prenait cet argent pour acheter des sous-marins.

M. Telegdi: J'espère bien que non.

Mme Clancy: J'aimerais bien.

M. Rock: Bien sûr, j'oubliais que vous êtes de Halifax.

En procédant ainsi, cet argent sera distribué aux enfants des familles des travailleurs à faible revenu. C'est un élément essentiel de ce train de mesures.

La présidente: Monsieur Assadourian.

M. Assadourian: La question est très simple, monsieur le ministre. Je suis sûr que vous pourrez y répondre, mais je n'ai pas pu trouver ce renseignement dans votre exposé.

Monsieur le ministre, à la dernière ligne, dans ce barème, on parle des revenus supérieurs à 150 000 $. Prenez le cas de trois provinces: l'Ontario, l'Île-du-Prince-Édouard et les Territoires du Nord-Ouest, et l'on constate que c'est dans ces derniers que le montant sera le plus élevé. Pourquoi? À cause du revenu? Vous le savez, à Toronto, un appartement de deux chambres à coucher coûte 1 200 $. À Yellowknife, je suis convaincu que le même appartement ne coûte pas 1 200 $.

Mme Clancy: Vous seriez étonné.

M. Assadourian: Bon, disons à l'Île-du-Prince-Édouard. Un appartement de deux chambres à coucher ne coûte pas 1 200 $ là-bas. Pourquoi en Ontario le montant est-il fixé à 3 268 $ alors qu'à l'Île-du-Prince-Édouard il est de 3 795 $? Ou bien, c'est trop élevé pour l'Île-du-Prince-Édouard, ou bien c'est trop bas pour l'Ontario. Voilà où je veux en venir. A-t-on appliqué ici une formule?

.1655

M. Rock: Nous avons pris la proportion moyenne du revenu dépensé pour les enfants et nous l'avons appliquée à des tranches de revenu. Les seuls rajustements que nous avons faits entre les provinces prenaient en compte le taux d'imposition provincial. S'il y a des différences, elles sont dues au taux d'imposition qui varie d'une province à l'autre, d'un territoire à l'autre.

M. Assadourian: Reprenons. En Ontario, c'est moins qu'à l'Île-du-Prince-Édouard. Est-ce que...

M. Rock: De quel niveau de revenu parlez-vous?

M. Assadourian: Je parle de la dernière ligne, 150 000 $ et plus. Il s'agit du pourcentage qui figure au bas.

M. Rock: Vous regardez...

M. Assadourian: À la page 21, à la dernière ligne, le pourcentage appliqué dans le cas d'un revenu supérieur à 150 000 $, dernière colonne, pour six enfants ou plus. On dit 2,18 p. 100.

M. Rock: Oui.

M. Assadourian: Mais dans le même cas, à l'Île-du-Prince-Édouard, ce pourcentage est de 2,26 p. 100 et dans les Territoires du Nord-Ouest, il est de 2,46 p. 100, ce qui est presque...

La présidente: Le coût de la vie est plus élevé là-bas.

M. Rock: Pour six enfants ou plus.

M. Assadourian: C'est cela.

La présidente: Les impôts sont plus élevés.

M. Rock: Nous tenons compte ici du taux d'imposition qui varie d'une province à l'autre, d'un territoire à l'autre.

M. Assadourian: D'accord. Merci.

La présidente: Madame Clancy.

M. Rock: Le pourcentage du revenu est un facteur que nous avons appliqué dans toutes les provinces et dans tous les territoires. Les fonctionnaires peuvent...

La présidente: Ils font signe que oui.

Madame Clancy, il reste environ deux minutes et demie.

Mme Clancy: Merci. Je voudrais faire une remarque et vous demander votre réaction, monsieur le ministre. Je trouve ce barème formidable. Au cours des dix années où j'ai exercé dans ce secteur particulièrement pénible qu'est le droit familial, j'aurais bien voulu pouvoir compter sur un barème pareil. Étant donné ce que vous avez dit en réponse aux questions de Mme Jennings concernant la médiation, je voudrais que vous me disiez ce que vous pensez de ceci.

Je me souviens d'un cas en particulier dont je m'occupais et moi-même et l'avocat de la partie adverse étions le quatrième tandem d'avocats utilisé par les parties. L'affaire durait depuis près de cinq ans et l'on se préparait à aller au tribunal. Il y avait une liste de meubles et biens qui remplissait 38 pages d'imprimés d'ordinateur. Les questions de garde, de pension alimentaire, d'aliments au profit du conjoint, etc., n'étaient pas plus près d'être résolues au bout de quatre ans malgré l'intervention de huit avocats qui avaient dû se remplir les poches. À un moment donné, dans un moment de faiblesse, nous avons réussi mon collègue et moi-même à amener les deux parties à s'entendre sur une somme exécutoire. Je ne sais pas comment nous y sommes arrivés. Je n'ai pourtant pas utilisé de pistolet. Ce n'était pas dû à moi. Tout ce que je sais c'est que nous avons réussi à les faire signer et nous avons finalement obtenu une ordonnance de médiation.

D'après ce que vous en savez, cette situation ne serait-elle pas un peu hors de l'ordinaire mais pas vraiment extraordinaire?

M. Rock: Elle est trop commune, et même après qu'on aura adopté ces changements, on trouvera toujours des cas de ce genre. On ne règle ici que la question du soutien aux enfants, et non la question du soutien au conjoint, et on ne règle pas non plus la question des droits de visite. Il n'est pas question ici des droits de visite. Il n'est pas question non plus du partage des biens. Donc les conjoints qui veulent continuer de se quereller auront amplement de quoi le faire, et c'est tragique pour eux et les enfants. Mais comme je l'ai dit en réponse à Mme Jennings, il y aura au moins un contentieux de moins grâce à cette mesure, et cela facilitera les choses de beaucoup. On restaure également une apparence d'uniformité.

J'espère, madame la présidente, que vous allez entendre les gens du Barreau qui nous ont aidés à articuler ces propositions. L'Association du Barreau canadien a été très active au Comité du droit de la famille.

Je tiens à dire, soit dit en passant, et je voulais le faire plus tôt - c'était dans mes notes, j'imagine que j'ai dû sauter ce passage - qu'il a fallu six ans pour mettre au point ce train de mesures. Oui, six ans. On a commencé en 1990. Je me rappelle que peu après mars, après que l'annonce a été faite, je me suis rendu à Vancouver pour y rencontrer des avocats et des parents, et l'une des personnes qui étaient là se souvenait que la première séance du Comité du droit de la famille qui étudiait le soutien aux enfants avait eu lieu il y avait exactement six ans de cela.

.1700

Au cours de ces six années, le comité, qui était composé de fonctionnaires provinciaux et fédéraux de même que de praticiens du droit de la famille, s'est penché sur toute une gamme de possibilités. Il a envisagé divers montants pour les lignes directrices ainsi que divers mécanismes d'exécution, et il a produit en 1992, je crois, son rapport intérimaire qui a fait l'objet de nombreux commentaires, dont certains étaient très critiques.

Le comité a remis son ouvrage sur le métier, et il a publié un rapport en janvier 1995, qui encore là a fait l'objet de plusieurs remarques, surtout au sujet des montants. En conséquence, le comité a augmenté de 15 p. 100 tous les montants des lignes directrices pour les revenus de moins de 40 000 $.

Ces mesures ont donc été mises à l'essai. Le comité a considéré la question sous tous les angles possibles. Ces lignes directrices ont fait l'objet de discussions entre professionnels et fonctionnaires pendant littéralement des années. Il en est résulté l'espoir que si l'on supprime à tout le moins ce contentieux, les règlements sans poursuites seront d'autant plus probables. Ce n'est nullement assuré, mais c'est beaucoup plus probable.

Mme Clancy: Je pense que c'est excellent.

La présidente: Madame Gagnon, cinq minutes.

[Français]

Mme Gagnon (Québec): Vous avez parlé tout à l'heure des lignes directrices proposées par le fédéral et de celles proposées par les provinces. Je vais parler de la province de Québec parce que l'on sait que les lignes directrices diffèrent beaucoup. Vous nous dites que vous pourriez accepter les lignes directrices des provinces si elles concordaient avec celles du fédéral. Mais quand on regarde les lignes directrices de la province de Québec, en particulier, on s'aperçoit que celles-ci diffèrent sur beaucoup de points. Pourtant, vous dites que les négociations vont bon train et que vous pensez vous entendre avec le Québec et accepter sans problèmes ses lignes directrices.

Je prends l'exemple des lignes directrices établies en fonction des programmes québécois en matière de sécurité du revenu et de fiscalité. Vous nous dites que vous ne voulez pas d'harmonisation avec ces programmes. Comment pensez-vous pouvoir accepter des lignes directrices comme celles du Québec avec des différences aussi énormes dans la façon de les appliquer?

Considérons aussi le lieu de résidence. Au Québec, on favorise le lieu de résidence de l'enfant alors qu'au fédéral, on favorise le lieu de résidence du payeur. Tout cela est bien contradictoire. Pour ma part, je ne vois pas comment vous allez accepter qu'une province puisse avoir des lignes directrices allant à l'encontre de vos normes, surtout avec des écarts aussi grands.

M. Rock: Nous sommes en train de discuter de toutes ces questions avec les fonctionnaires du gouvernement québécois. Il reste des questions à étudier, y compris celles que vous avez mentionnées, et nous sommes sûrs d'avoir la possibilité d'arriver à un accord pour approuver les lignes directrices proposées par le gouvernement du Québec.

J'ai reçu récemment le rapport du Barreau du Québec sur une étude des lignes directrices provinciales comparées aux lignes directrices fédérales. J'ai remarqué que les montants étaient plus ou moins proches. Il est vrai que les différences sont plus grandes aux niveaux plus élevés, mais dans la plupart des cas, les montants sont très très proches.

En ce qui concerne le lieu de résidence des parents, je pense que les fonctionnaires discutent de cette question à l'heure actuelle. Nous espérons en arriver à une approche commune.

Quelqu'un qui m'accompagne a été impliqué dans les discussions et, si vous le désirez, vous pourrez obtenir des réponses plus détaillées.

Mme Gagnon: En application de ce règlement-là, le choix de la résidence du parent payeur pourrait faire en sorte qu'un parent pourrait déménager ailleurs si la pension alimentaire lui coûtait moins cher.

M. Rock: Madame la présidente, j'aimerais vous présenter Me Lise Lafrenière Henrie.

Me Lise Lafrenière Henrie (conseillère juridique, Équipe sur les pensions alimentaires pour les enfants, Section de la famille, des enfants et des adolescents, Ministère de la Justice): En ce qui concerne l'application des lignes directrices, si jamais on acceptait les lignes directrices d'une province, celles-ci s'appliqueraient si les deux parents résidaient dans la même province. Dans le cas du Québec, par exemple, si les lignes directrices étaient approuvées, il n'y aurait pas de problème pour appliquer les lignes directrices du Québec lorsque les deux conjoints habiteraient le Québec.

.1705

Cependant, si un des conjoints habitait à l'extérieur du Québec, on appliquerait alors les lignes directrices fédérales pour assurer l'uniformité dans tout le pays.

Le fait d'appliquer les lignes directrices fédérales éviterait à la province où réside un parent d'avoir à obtenir une ordonnance provisoire qui devrait être confirmée par l'autre province, ou de mettre en oeuvre la loi d'une autre province, ce qui obligerait chaque tribunal provincial à connaître les lignes directrices de 12 juridictions différentes plus celles du fédéral. C'est pourquoi nous souhaitons une uniformisation du système.

M. Bellehumeur: Il est donc important, madame la présidente, que les provinces aient pleine juridiction dans ces domaines. Je comprends qu'il n'y ait pas de problèmes lorsque les deux conjoints habitent la même province et qu'il faille appliquer un autre système lorsque les conjoints n'habitent pas la même province, mais il me semble que les enfants sont notre seule et unique préoccupation. Alors, pourquoi n'accepterions-nous pas tout simplement les lignes directrices du lieu de résidence des enfants?

Je sais bien que les juges devraient prendre connaissance des différentes lignes directrices, mais je pense que les avocats pourraient faire leur travail et aider les juges.

Monsieur le ministre, dois-je comprendre que vous négociez avec le gouvernement du Québec sur ces questions-là?

Me Lafrenière Henrie: Nous n'avons pas encore commencé à négocier. Ce ne sont pas encore des négociations officielles, mais nous avons commencé les pourparlers.

M. Bellehumeur: J'ai été surpris lorsque le ministre a dit tantôt que les négociations avec le Québec allaient bien. En effet, lorsque j'ai communiqué avec les gens du Québec, ils m'ont dit avoir l'impression très nette que leurs lignes directrices étaient acceptées automatiquement par le fédéral. Quand je leur ai dit qu'avec la conjugaison du terme «peut» au paragraphe 1(4) du projet de loi et du terme «notamment» du paragraphe 26.1(1) de la loi, ce n'était pas automatique, ils ont été fort surpris.

S'il n'y a pas d'entente, est-ce qu'il y aura un mécanisme de conciliation ou autre pour faire respecter la réalité provinciale? Comment allez-vous fonctionner? Qui va décider, finalement? Le mot «notamment» ne veut pas dire qu'il faut nécessairement respecter intégralement tout ça. Ça veut dire «notamment à l'esprit, à l'ensemble de...», et il pourrait y avoir des critères plus précis. Je voudrais donc savoir à qui il appartiendra de décider.

M. Rock: Me Lafrenière Henrie va répondre, mais je voudrais dire simplement qu'il est important de se rappeler que tous ces efforts que j'ai décrits et qui ont duré six ans ont été faits conjointement par le fédéral et les provinces. Il s'agissait d'un comité fédéral, provincial et territorial. Nous partagions tous le même objectif, c'est-à-dire essayer de mettre en place un système plus prévisible et uniforme.

La question n'est donc pas celle de deux perspectives opposées, celle du fédéral et celle du provincial, en l'occurrence le Québec. En fait, nous partageons le même objectif.

M. Bellehumeur: Le Québec voudrait qu'il y ait un système uniforme pour toutes les provinces.

M. Rock: Non. En ce qui concerne le divorce, le Québec voudrait avoir un système uniforme et prévisible, et nous avons dit clairement qu'il était possible d'utiliser les lignes directrices créées par les provinces selon les critères identifiés dans la disposition que vous avez lue, mais qu'il fallait en même temps avoir une certaine uniformité fédérale donnant un pouvoir discrétionnaire au gouverneur général.

.1710

Comme j'ai fait allusion aux négociations, je voudrais ajouter que j'ai parlé avec le sous-ministre, la semaine passée, dans le but de préparer mon témoignage d'aujourd'hui. Il m'a dit avoir discuté de ces questions avec ses homologues à Québec et qu'on avait fait des progrès sur ces questions. Il se peut que les négociations formelles n'aient pas encore commencé, mais il est certain que les fonctionnaires ont eu des discussions concernant ces questions.

Me Lafrenière Henrie voudrait peut-être ajouter quelque chose.

[Traduction]

La présidente: Allez-y.

[Français]

Me Lafrenière Henrie: J'aimerais juste ajouter, comme le ministre l'a dit, qu'il n'y a pas encore de négociations formelles à ce sujet, mais qu'on parle déjà aux fonctionnaires du Québec. D'autre part, la raison pour laquelle aucune décision ne peut être prise actuellement, c'est que nous n'avons pas encore la version finale des lignes directrices du Québec. D'après ce que j'ai pu comprendre, des modifications peuvent encore être proposées.

[Traduction]

La présidente: Madame Torsney.

Mme Torsney: Merci.

Monsieur le ministre, le projet de loi dont nous sommes saisis ne traite pas de deux des quatre volets. Est-ce exact? Il n'est pas question ici de l'imposition ou du supplément de revenu. Il faut que ce soit la loi de mise en oeuvre du budget qui voie à l'exécution de ces volets. Quand peut-on s'attendre à ces mesures?

M. Rock: On me dit qu'on les aura peut-être en novembre.

Mme Torsney: Deuxièmement, il y en a qui ont soulevé deux questions. Même s'il y a des lignes directrices minimales pour le parent qui n'a pas la garde, quelle est la responsabilité du parent qui a la garde? Et en ce sens, qu'en est-il de la reddition de comptes pour les dépenses? Même si ces mesures sont excellentes pour les gens qui ont un employeur défini et qui émet un formulaire T-4 qui est explicite, les personnes qui sont à leur compte peuvent faire des tas de choses pour dissimuler leurs revenus. Bien sûr, on ne dit pas qu'ils dissimulent leurs revenus, on dit qu'ils ont seulement des mécanismes de reddition de comptes différents. Ça devient beaucoup plus difficile d'établir ces divers niveaux de soutien si l'on divorce d'avec une personne qui est à son compte.

M. Rock: En réponse à la première question, où vous dites, si je comprends bien, que les lignes directrices sont calculées uniquement selon le revenu du payeur, le Comité du droit de la famille a débattu longuement la question de savoir s'il fallait adopter un modèle fondé sur le revenu des deux parties ou sur le revenu d'une seule partie. L'approche que vous voyez dans ces lignes directrices se fonde sur les hypothèses suivantes, hypothèses que le comité a jugées praticables.

Premièrement, le niveau de vie de l'enfant et celui du parent qui a la garde sont inséparables. Si je suis le seul à avoir la garde de l'enfant, cet enfant a mon niveau de vie. Si je suis le seul à avoir la garde de deux enfants, ils ont mon niveau de vie. Ces niveaux de vie sont inséparables.

Deuxièmement, les parents consacrent une proportion moyenne de leur revenu à leurs enfants, quel que soit leur niveau de revenu. Que je gagne 10 000 $ ou 100 000 $ par année, on peut déterminer statistiquement quelle est la proportion moyenne de mon revenu que je consacre à mes enfants.

Troisièmement, lorsque les parents se séparent, le niveau de vie de l'enfant doit autant que possible demeurer le même que si ses parents étaient restés ensemble.

Si l'on tient compte de ces trois hypothèses pour produire une politique visant à déterminer les lignes directrices, on aboutit à ce que vous avez devant vous. Pour déterminer ce que le payeur doit payer, on tient compte de son revenu ainsi que de la proportion moyenne que les gens consacrent à leurs enfants, compte tenu aussi du nombre d'enfants en cause, parce que la personne qui a la garde des enfants leur consacre déjà cette proportion de son revenu.

Si vous considérez les choses de cette façon, l'enfant est alors le bénéficiaire des deux revenus quant à la proportion moyenne, et l'on abandonne alors la vieille approche qu'on utilisait lorsque j'exerçais le droit. Si je représentais le parent qui avait la garde, j'étais obligé de réunir une foule de reçus pour la pâte dentifrice, l'épicerie, le nettoyage à sec et les leçons privées, je faisais le total et je produisais un affidavit qui établissait le total des dépenses mensuelles. Puis j'étais contre-interrogé, ou c'était mon client qui l'était - et le juge déterminait à partir de cela...

Nous avons dépassé ces lignes directrices et nous appliquons à la place le principe de la proportion moyenne.

Pourquoi est-il équitable de ne pas tenir compte du revenu du parent qui a la garde? Parce que le parent qui a la garde paie déjà sa proportion moyenne. C'est inévitable.

.1715

Pourquoi est-il équitable de tenir compte du niveau de revenu du parent qui n'a pas la garde et de prendre la proportion moyenne? Imaginez que le parent qui n'a pas la garde gagne 60 000 $ par année puis est promu et gagne tout à coup 80 000 $ par année. Selon ce système, le montant de la grille augmentera de la catégorie de 60 000 $ à la catégorie de 80 000 $. Et ce, peu importe le parent qui a la garde. Si ces parents étaient encore ensemble, l'enfant serait le bénéficiaire de cette augmentation. Le niveau de vie de cet enfant serait bonifié par le fait que l'un des parents gagnerait 20 000 $ de plus par année.

Selon l'une des hypothèses sur lesquelles se fonde notre approche, l'enfant doit être le bénéficiaire, même après la séparation, comme c'était avant. Voilà pourquoi on ne tient compte que du revenu du conjoint qui n'a pas la garde.

Mme Torsney: Mais on entend toutes sortes d'histoires où les gens disent: «Écoutez, je lui donne 1000 $, et chaque fois que les enfants me rendent visite, ils sont en haillons. Je me demande où va l'argent.» On a tous entendu parler de cette mère seule qui ne dépense pas un sou pour nourrir ses enfants et qui garde tout l'argent pour elle. Ces pères-là me racontent la même chose tout le temps. Sauf que je ne me rappelle pas en avoir rencontré un seul. Existe-t-il un mécanisme qui permet de s'assurer que les enfants conservent le niveau de vie d'avant?

N'oubliez pas non plus ma question au sujet des personnes qui sont à leur compte.

M. Rock: Oui, j'ai une note au sujet de la deuxième question qui portait sur les personnes qui sont à leur compte, mais avant, permettez-moi de répondre à la question que vous venez de poser.

Mme Torsney: Shaughnessy va me couper la parole.

M. Rock: Il se peut que ces considérations aient trait à la question de la garde. Il s'agit ici d'un parent qui a la garde. La cour a décidé qu'il est dans l'intérêt supérieur de l'enfant de vivre avec ce parent-là. Si l'on peut établir que le parent qui a la garde ne dépense pas un sou pour les enfants, ne s'occupe pas des enfants, dépense l'argent pour autre chose, l'autre parent peut demander un changement de garde, mais je ne suis pas sûr que ce soit pertinent autrement.

En réponse à votre question sur les personnes qui sont à leur compte, j'attire votre attention sur les éléments du règlement qui traitent du calcul du revenu. Ils ont été libellés de telle sorte qu'on prend en compte le fait que certains parents qui n'ont pas la garde et qui versent une pension alimentaire sont à leur compte. Il peut être difficile de déterminer le revenu de telles personnes.

Lorsque nous avons rédigé les dispositions sur la définition du revenu dans le règlement, nous avons prévu des mécanismes qui visent à définir le revenu réel. Si, par exemple, certaines dépenses sont destinées à des parties prenantes, il faut en tenir compte dans le calcul du revenu.

De la même façon, si la personne est actionnaire et qu'elle touche des dividendes qui n'apparaissent pas dans les livres de l'entreprise, on en tient compte dans le calcul du revenu. Donc, dans la mesure du possible, nous avons tâché de définir le revenu de manière telle que la cour aura une bonne idée du vrai revenu dont dispose le parent qui n'a pas la garde.

La présidente: Merci, madame Torsney. C'était là cinq minutes à la Bellehumeur.

Qui va prendre la parole au nom du Parti réformiste? Monsieur Ramsay.

M. Ramsay: Monsieur le ministre, je vous sais gré d'être des nôtres aujourd'hui.

Je n'ai que quelques questions et elles rejoignent ce dont Mme Torsney parlait. Vous avez établi une ligne directrice à laquelle les tribunaux doivent se conformer, et vous avez bien sûr utilisé les pouvoirs coercitifs de l'État pour pénaliser les parents qui ne s'acquittent pas de leurs obligations en matière de pension alimentaire.

Ce que me disent bon nombre de ces parents qui n'ont pas la garde, c'est que même s'ils versent fidèlement leur pension alimentaire, on leur nie tout simplement leurs droits de visite. Il n'y a rien dans ce projet de loi qui règle ce problème, et c'est un problème très important pour ces gens. Ils sont séparés, leur mariage s'est effondré, et ils ne peuvent même plus voir leurs enfants, même s'ils disposent d'une ordonnance de la cour qui leur accorde des droits de visite.

.1720

Il y a plus d'une personne qui est venue me voir après que ces propositions ont été rendues publiques et qui m'ont dit: «Écoutez, je paye tant par mois. La cour m'oblige à payer tant, et pourtant, on me refuse le droit de voir mes enfants.» Il n'y a rien ici en ce sens, et j'aimerais avoir votre avis à ce sujet. Mais avant que vous me donniez votre avis, j'aimerais poser une autre question, parce que vous allez gaspiller... utiliser mes cinq minutes. Vous ne les gaspilleriez pas, bien sûr.

M. Rock: Vous voulez dire que je prendrais tout votre temps pour répondre à votre question.

M. Ramsay: Oui.

M. Rock: C'est terrible.

M. Ramsay: Terrible est bien le mot.

M. Rock: Tout le monde sait qu'on ne pose des questions que pour faire de l'effet.

M. Ramsay: C'est exact. Pour ce qui est des mesures que vous avez prises concernant les autorisations et les passeports, y a-t-il un modèle qui vous a inspiré?

Ce sont là deux questions. La troisième a trait à la question de la médiation dont vous avez discuté avec Mme Jennings. Vous semblez enclin à penser que ce serait une bonne chose, mais il n'y a rien en ce sens dans le projet de loi. Est-ce que votre ministère ou vous-même envisagez d'inclure une mesure en ce sens, étant donné que les amendements au projet de loi émanant de votre ministère ont beaucoup plus de chance d'être adoptés par notre comité que s'ils émanent de l'opposition?

Voilà mes trois questions, monsieur le ministre, si vous voulez bien y répondre.

M. Rock: J'espère ne pas gaspiller trop de votre temps en répondant à vos questions, non pas que répondre à vos questions soit une perte de temps, monsieur Ramsay.

Tout d'abord, pour ce qui est des droits de visite, il n'y a rien de plus triste qu'un parent qui n'a pas la garde et à qui la cour a accordé des droits de visite mais qui ne peut pas en jouir parce que le parent qui a la garde n'est pas raisonnable ou ne respecte tout simplement pas l'ordonnance. J'ai vu des cas de ce genre. C'est très triste et très irritant.

Je pense que nous devons absolument séparer les querelles entre parents des besoins des enfants. Les enfants ont besoin de soutien financier, que les parents se soient entendus ou non sur les droits de visite. Il faut à tout prix éviter que le droit de visite soit lié au soutien matériel, parce que si l'on fait ça, ça veut dire que les enfants sont les otages des parents tant et aussi longtemps qu'ils ne se sont pas entendus. Il faut absolument éviter ça.

Les enfants doivent être soutenus peu importe ce qui se passe entre les parents. On ne peut pas se servir du soutien aux enfants pour contrôler les droits de visite. C'est inacceptable. Jamais je ne prendrais cette approche et je ne la recommanderais jamais.

Pour ce qui est de toutes les difficultés que posent les droits de visite, ultimement, la seule solution est d'amener les deux parties à se conduire en adultes responsables, à respecter les intérêts de chacun et à reconnaître que c'est presque toujours dans l'intérêt supérieur des enfants de garder contact avec les deux parents.

Madame la présidente, je ne veux pas que M. Ramsay pense que la Loi sur le divorce est muette sur ce point. Il est vrai que le projet de loi C-41 ne fait pas mention des droits de visite, mais la cour est obligée de prendre en compte les droits de visite lorsqu'elle détermine qui a la garde. Voyez le paragraphe 16(10) de la Loi sur le divorce - qui a été adopté il y a dix ans, madame la présidente - qui s'intitule «Maximum de communication» et qui prévoit ce qui suit.

Autrement dit, la cour tiendra compte du fait que le parent qui a la garde est disposé à accorder des droits de visite à l'autre parent. C'est le principe sur lequel la cour se fonde pour déterminer qui a la garde.

M. Ramsay: Il n'y a pas de disposition d'exécution.

M. Rock: La loi ne peut pas tout faire. Ce n'est pas parce que le législateur modifie la loi qu'on modifie les attitudes des gens. On ne peut pas entrer dans chaque foyer et obliger les gens à penser différemment. Tout ce qu'on peut faire, c'est énoncer les principes qui doivent inspirer de telles décisions, et c'est ce que fait cet article.

À un certain moment, les provinces ont un rôle à jouer, la police aussi parfois, et les parents doivent se conduire en adultes responsables. Dans la mesure où la loi pourrait faire quelque chose, je pense que le paragraphe 16(10) énonce le principe dont nous parlons. Mais je ne veux pas que le droit de visite soit lié au soutien à l'enfant.

.1725

Permettez-moi également de dire, en réponse à la deuxième question, que je ne suis pas tout à fait sûr de bien comprendre ce que veut dire M. Ramsay lorsqu'il demande quel modèle nous allons suivre pour ce qui est des dispositions d'exécution ayant trait aux passeports et aux autorisations.

M. Ramsay: Y a-t-il un modèle? Vous êtes-vous inspirés d'un modèle d'un autre pays?

M. Rock: Je l'ignore.

Marilyn Bongard m'accompagne; elle peut peut-être répondre. J'ignore si nous nous sommes inspirés de ce qui se fait dans un autre pays.

Mme Marilyn Bongard (avocate spécialisée en droit de la famille, Initiative sur le soutien aux enfants, ministère de la Justice): Plusieurs États ont un modèle quelconque de refus d'autorisations. Nous ne nous sommes pas inspirés d'un modèle en particulier. Nous avons là une approche proprement canadienne qui a été négociée avec les provinces.

Pour que fonctionne le modèle du refus d'autorisations, il faut faire une demande au service provincial chargé de l'exécution. Il en est ainsi parce que cette mesure vise l'état de non-paiement chronique.

M. Ramsay: Est-ce que ça marche?

Mme Bongard: Nous espérons que ça va marcher.

M. Ramsay: Est-ce que ça a marché dans d'autres pays?

Mme Bongard: Dans les autres pays, ça s'est avéré utile, oui, pour percevoir les montants dus. Il y a divers modèles. On procède de manière différente dans divers États. J'ai des textes que je peux vous envoyer et qui traitent de la façon dont ça marche dans divers États.

M. Ramsay: Vous pourriez peut-être les remettre au comité.

M. Rock: Oui, absolument. Nous serons ravis de le faire.

Dans sa dernière question, M. Ramsay a mentionné la médiation. Je ne serais pas favorable à un amendement qui exigerait la médiation. Je pense que c'est bon d'avoir de telles ressources à sa disposition, mais vous allez constater, parmi les gens qui vont témoigner devant le comité, qu'on ne s'entend pas pour dire si cela doit être obligatoire ou non. Il y en a qui croient qu'une médiation forcée perpétue des déséquilibres conjugaux et cause des iniquités, et qu'il ne faut pas l'imposer aux parties. Je pense que c'est bon d'encourager les solutions négociées, il est bon que les tribunaux restent à l'écart de tout cela, il est bon d'avoir de tels services à sa disposition, mais je ne veux pas que la médiation soit obligatoire. Chose certaine, on obligerait ainsi les provinces à dépenser sans leur demander la permission, parce que ce sont les provinces qui doivent administrer la loi et franchement, elles seraient peut-être obligées de dépenser pour mettre ces services en place.

M. Ramsay: Je ne voulais pas savoir si la médiation doit être obligatoire ou non, seulement s'il y aurait une disposition qui permettrait à la cour d'agir en ce sens. Il n'y a rien de tel ici.

M. Rock: Mais les tribunaux ont déjà assez de pouvoirs pour faire ce qu'ils doivent faire. D'ailleurs, dans certaines provinces - et l'administration de la justice est une compétence provinciale, et j'ai la certitude que vous le savez, vous qui êtes un défenseur acharné des droits des provinces - les tribunaux ont déjà ajouté des mécanismes de règlement des différends au droit de la famille et certains de ces mécanismes fonctionnent très bien.

La présidente: Monsieur Discepola.

M. Discepola (Vaudreuil): J'ai deux questions pour le ministre. Premièrement, qu'advient-il des gens qui ont déjà des ententes sur les pensions alimentaires? Plus précisément, s'il existe déjà une entente pour la pension alimentaire nette après impôt, par exemple, faudra-t-il qu'elle soit renégociée pour prendre en compte cette grille?

Deuxièmement, vous avez apaisé bon nombre de mes préoccupations lorsque vous avez répondu à la question de Mme Torsney sur la grille, mais je me demande, si vous avez vraiment à coeur l'intérêt supérieur des enfants, pourquoi vous ou le Comité de la famille vous êtes limités strictement au revenu annuel, et pourquoi vous n'avez pas tenu compte de facteurs comme l'âge ou la qualité de la vie dont ces enfants jouissaient. Étant moi-même père de quatre enfants, il me semble qu'il en coûte beaucoup plus cher au fur et à mesure que les enfants avancent en âge.

De même, toujours au sujet du revenu comme seul facteur, on sait que le coût de la vie varie beaucoup d'une province à l'autre. Il y a de grands écarts aussi entre la ville et la campagne. Je vois bien l'avantage de la grille et je pense que c'est très bien, mais pouvez-vous m'expliquer pourquoi on s'en est tenu au revenu seulement et pourquoi on n'a pas tenu compte d'autres facteurs?

M. Rock: Si vous me permettez de répondre d'abord à la deuxième question, je dirai que les études scientifiques ont démontré que la proportion du revenu, selon le niveau du revenu, que les parents consacrent aux enfants demeure la même peu importe l'âge des enfants, que l'on soit en milieu urbain ou rural, et quel que soit également le coût de la vie - c'est toujours la même proportion du revenu. C'est ce que les études démontrent.

Votre question traitait également des accords existants. Pour les parents qui ont aujourd'hui des ententes ou des ordonnances en place régissant le calcul de la pension alimentaire, rien ne changera après le 1er mai. Ces mesures n'ont aucun effet rétroactif. On a essayé de faire cela en Angleterre et ça a été le fouillis. C'était tout simplement affreux.

.1730

Nous n'allons pas rouvrir toutes ces ententes. Nous pensons que si les parties ont négocié leurs propres accords ou obtenu leurs propres ordonnances du tribunal, celles-ci devraient rester intactes. Cependant, après le 1er mai, les parties qui disposent déjà d'une entente ou d'une ordonnance auront le loisir de s'adresser aux tribunaux et de leur demander de modifier la pension alimentaire selon les nouvelles lignes directrices et les nouveaux règlements fiscaux. Ce sera permis mais ce ne sera pas obligatoire. Les deux parents peuvent décider que l'entente les satisfait pleinement et qu'aucun changement n'est nécessaire. Ou alors un parent peut examiner les nouvelles règles et penser que le nouveau système lui conviendra mieux, et de là il peut s'adresser au tribunal pour obtenir un changement.

Si nous avons permis cela dans ces lignes directrices, c'est parce que les circonstances peuvent évoluer considérablement. C'est pourquoi on peut demander un changement. Mais je m'empresse d'ajouter que nous avons aussi prévu dans ces dispositions qu'au reçu d'une telle requête visant à modifier une entente ou une ordonnance, la cour peut réexaminer toute l'entente existante. Si le tribunal, ayant examiné l'entente existante, qu'il s'agisse de la pension alimentaire ou du transfert d'un bien ou du versement d'une somme forfaitaire, décide qu'il serait inéquitable de rouvrir l'entente pour adapter la pension alimentaire aux lignes directrices, la cour peut rejeter une telle requête.

Imaginez qu'il y a cinq ans, je me suis entendu avec mon conjoint, et que l'entente faisait mention du REER, du capital - comme si j'en avais - de la distribution des biens, que l'entente disait à qui irait le foyer conjugal, les actions dans les sociétés et que l'entente faisait également mention du soutien au conjoint et aux enfants. Disons qu'en raison de certaines considérations, le montant alloué au soutien des enfants était relativement modeste, plus modeste qu'il ne le serait habituellement. À compter du 2 mai prochain, et c'est ce que prévoit ce projet de loi, la cour peut juger inéquitable la requête du conjoint bénéficiaire qui voudrait modifier la pension alimentaire en fonction des nouvelles lignes directrices, parce que changer seulement cet aspect-là alors que tout le reste demeure en place pourrait constituer une injustice.

Nous avons donc prévu une disposition dans le projet de loi C-41, selon laquelle, si l'on demande à la cour de modifier l'entente, le tribunal peut considérer l'ensemble de la situation et rejeter la demande si elle estime qu'elle est inéquitable pour ce qui est de tous les éléments de l'entente.

M. Discepola: Merci.

La présidente: Merci, monsieur Discepola.

Monsieur le ministre, je vous remercie vivement de nous avoir consacré tout ce temps. Nous vous en sommes reconnaissants.

M. Rock: Je vous en prie.

La présidente: Vous alliez conclure? Pardonnez-moi, je ne voulais pas vous couper la parole.

M. Rock: Je n'ai plus rien à dire. Je pense que c'est un projet de loi très important. Je suis ravi que le comité ait décidé de l'étudier et de lui accorder la priorité. Si le ministère peut vous venir en aide, nous disposons d'une documentation considérable et nous serons plus qu'heureux de vous la faire parvenir. Le comité peut compter sur la collaboration de mes fonctionnaires.

La présidente: Merci.

M. Rock: Merci beaucoup.

La présidente: Chers collègues, s'il vous plaît, il vous reste un article à l'ordre du jour. M. Thompson nous a donné un avis de motion.

Monsieur Thompson, une précision, étant donné que vous n'êtes pas membre permanent du comité, je dois la déclarer irrecevable. Vous pouvez demander à quelqu'un d'autre de nous donner cet avis de motion, mais nous ne pouvons pas l'accepter tel quel aujourd'hui.

Voilà. Merci.

La séance est levée.

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