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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 23 avril 1996

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[Traduction]

Le président: La séance est ouverte. Aujourd'hui, le comité poursuit son étude sur la réglementation environnementale dans le secteur minier. Nous avons la chance de recevoir aujourd'hui deux témoins: M. Gertler du Centre québécois du droit de l'environnement etM. Kennett de l'Institut canadien du droit des ressources.

Bienvenue, messieurs. Nous vous remercions d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui.

Nous allons d'abord demander à chacun d'entre vous de faire une déclaration liminaire. Puis, lorsque chacun d'entre vous l'aura faite, les membres du comité pourront vous poser des questions découlant de votre témoignage.

Monsieur Kennett.

M. Steven Kennett (agrégé de recherche, Institut canadien du droit des ressources): Je suis agrégé de recherche à l'Institut canadien du droit des ressources qui est un institut de recherche indépendant affilié à l'Université de Calgary. Notre mandat à l'Institut est d'entreprendre de la recherche indépendante, notamment de la recherche sous contrat, de l'éducation et des publications dans les domaines du droit environnemental et du droit et des principes directeurs concernant les ressources naturelles. Nous ne sommes donc pas un groupe environnemental et nous ne sommes pas non plus un groupe industriel. Je sais que M. Gertler a une longue liste de gens qui ont signé son mémoire. Personne d'autre que moi n'a signé mon mémoire. Je ne sais pas si cela va améliorer ou non ma crédibilité. Quoi qu'il en soit, c'est notre façon de travailler.

On m'a demandé de parler surtout de la question de l'harmonisation fédérale-provinciale dans le domaine de la réglementation environnementale. Depuis que j'en ai parlé avec M. Berg - j'ai parlé avec lui ainsi qu'avec deux autres personnes - et j'ai parlé tout récemment avec M. Franklin Gertler, car on se demande s'il y a actuellement une initiative d'harmonisation dont il vaut la peine de parler, car en autant que je sache, l'initiative d'harmonisation du CCME est remise en question à l'heure actuelle et ne survivra peut-être pas au cours des prochaines semaines ou des prochains mois.

Je pense cependant qu'il vaut la peine d'en parler. Un certain nombre de gens, particulièrement dans le milieu environnemental - et je sais que vous avez entendu le témoignage de certains d'entre eux - seront très heureux de voir cette initiative prendre fin. À mon avis, leurs inquiétudes à l'égard de cette initiative sont très valables. Cependant, je ne suis pas d'avis que l'on doive se réjouir de la disparition de cette initiative, car je pense qu'à long terme, la coopération fédérale-provinciale dans le domaine de l'environnement est dans l'intérêt de la gestion de l'environnement au Canada.

La Constitution répartit clairement les responsabilités environnementales entre les deux paliers de gouvernement. Il me semble que si les deux gouvernements sont actifs dans le domaine environnemental, il faut qu'ils coopèrent et qu'ils coordonnent leurs efforts en vue d'éviter tout chevauchement et tout double emploi. Si les gouvernements se retirent de leurs rôles environnementaux, comme on pourrait dire que c'est le cas, au moins dans certaines provinces d'aujourd'hui, il faut une certaine coordination pour combler les lacunes, assurer l'intégrité globale du système de réglementation et veiller à ce que les ressources soient utilisées efficacement. Par ailleurs, je pense que la coopération peut aider à rendre la réglementation plus claire et plus facile à comprendre, car le régime de réglementation est parfois compliqué.

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Par conséquent, je pense qu'il faut essayer de trouver des domaines où tout le monde peut sortir gagnant de la collaboration. Je pense par exemple aux procédures de demande de permis et d'approbation, qui sont des domaines auxquels je sais que vous avez déjà songé à cet égard.

La coordination du processus est une question importante, particulièrement en ce qui a trait au processus d'évaluation environnementale. Je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas y avoir de coordination dans le domaine des exigences de reddition de comptes et de surveillance et peut-être aussi une coopération intergouvernementale pour la collecte des données environnementales de base. Ce sont des domaines qui, à mon avis, ont un potentiel évident en matière de coordination.

Cela étant dit, je pense que pour que l'harmonisation soit un succès, il ne faut pas perdre de vue plusieurs objectifs fondamentaux. L'un de ces objectifs est la clarté du processus d'harmonisation comme tel. Le second principe est celui de la transparence de l'élaboration des politiques et des décisions dans l'harmonisation. Un troisième principe important est la préservation de l'obligation de rendre compte en démocratie. Enfin, le dernier objectif qui n'est certainement pas le moins important, est le fait que, dans le processus d'harmonisation, il faut tenir compte également de l'efficacité de la réglementation environnementale ainsi que de son efficience.

J'aimerais parler de quatre questions qui sont soulevées par l'initiative d'harmonisation. Elles ont toutes rapport avec les principes d'une façon ou d'une autre. Il s'agit du rôle fédéral dans la gestion de l'environnement, de la question de la transparence et de la responsabilité, de la question de la capacité et des ressources financières et, enfin, ce que j'appelle le processus d'examen et de surveillance de l'harmonisation comme tel.

Tout d'abord, il est clair que le rôle du gouvernement fédéral dans la gestion de l'environnement est une question controversée dans le contexte de l'initiative du CCME ainsi que dans un contexte plus général. Ses détracteurs ont soulevé certaines préoccupations quant à la façon dont le gouvernement fédéral perçoit son rôle exactement dans le domaine environnemental.

À cet égard, deux des principes que j'ai énumérés me viennent à l'esprit. L'un est la clarté des objectifs et l'autre est l'efficacité de la réglementation. L'accord d'harmonisation du CCME mentionne les intérêts fédéraux, et certains des domaines mentionnés sont ceux où on peut s'attendre à voir le gouvernement fédéral jouer un rôle, c'est-à-dire les questions transfrontalières, les terres fédérales, etc.

Je pense qu'il y a une certaine ambiguïté dans ce document pour ce qui est du rapport entre ces intérêts et les rôles et responsabilités. Lorsqu'on lit l'accord, on se demande exactement de quelle façon le gouvernement fédéral voit son rôle dans le contexte de l'harmonisation. Je pense qu'il y a un contexte plus large qui fait en sorte que l'incertitude est encore plus grande dans l'esprit de certaines personnes. À mon avis, le gouvernement fédéral envoie des messages contradictoires quant à la façon dont il voit son rôle dans le domaine de l'environnement. De toute évidence, il y a la réponse au rapport sur la LCPE, qui ne correspond peut-être pas tout à fait à l'idée que certaines personnes se font de l'initiative d'harmonisation.

Pour vous donner un exemple, en lisant l'accord d'harmonisation, on pourrait croire que le gouvernement fédéral jouera un rôle de premier plan dans le domaine scientifique, dans le domaine de la recherche environnementale. Il y a quelques semaines, j'ai lu dans The Globe and Mail que le gouvernement fédéral allait fermer le laboratoire de recherche aquatique, l'institut sur les eaux intérieures. Ces messages contradictoires créent des inquiétudes dans l'esprit des gens qui se demandent vers quoi le gouvernement fédéral se dirige.

Il me semble qu'il y a plusieurs domaines dans lesquels on pourrait s'attendre à ce que le rôle du gouvernement fédéral soit clairement défini. Il y a notamment les questions transfrontalières, et je veux parler ici à la fois des questions internationales et interprovinciales. Naturellement, je reviens à la question plus générale de la gestion des écosystèmes. Les écosystèmes sont de toute évidence transfrontaliers dans de nombreux cas. J'ai remarqué que l'initiative minière de Whitehorse met l'accent sur l'importance de la gestion des écosystèmes. Dans ce contexte, il me semble que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer.

Il y a des domaines de la réglementation où je pense qu'une approche nationale est nécessaire pour des raisons d'efficacité économique et de réglementation. Il y a des domaines où on peut réaliser des économies d'échelle importantes, notamment le domaine que j'ai mentionné, celui de la recherche scientifique. Du côté international, le gouvernement fédéral occupe une position unique pour jouer un rôle. Ce sont des domaines où, je pense, il faudrait un peu plus de clarté quant à l'intention du gouvernement fédéral.

J'aimerais faire deux autres observations au sujet du rôle fédéral. Je sais qu'il y a une question sur laquelle le comité s'est penché et qu'il a posée à d'autres témoins, c'est-à-dire la possibilité de confier le domaine de l'exploitation minière, en tant que domaine d'activité, aux provinces. Pourquoi ne pas tout simplement éliminer ce domaine d'activité de la réglementation environnementale et laisser les provinces s'en occuper? Je pense qu'il vaut la peine de se pencher sur certaines des complexités que cela soulève.

Pour vous donner un exemple très concret, prenons la proposition d'exploiter une mine appelée Windy Craggy dans le nord de la Colombie-Britannique, proposition qui a maintenant été annulée. J'imagine que bon nombre d'entre vous sont au courant de cette proposition. Il s'agissait d'une mine en Colombie-Britannique située sur des terres de la Couronne appartenant à la province.

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Pourquoi ne pas laisser la Colombie-Britannique s'en occuper? Je pense qu'il y a toutes sortes de questions intéressantes quant à la façon dont le gouvernement fédéral pourrait réagir dans un tel cas.

Dans le cadre de ce projet, il était question de construire une route et un pipeline qui traverseraient une rivière assez importante dans cette région, rivière qui est navigable. On sait que le gouvernement fédéral a le pouvoir constitutionnel en ce qui a trait aux eaux navigables. Le gouvernement fédéral doit-il alors décider que puisqu'il s'agit d'un projet minier et que c'est provincial, il ne se préoccupera pas de la question des eaux navigables, ou qu'il déléguera ses pouvoirs en la matière?

Prenons les pêches. Ce projet a un impact sur les pêches, plus précisément dans ce cas-ci sur la pêche au saumon. Le saumon est intéressant car, naturellement, il fraie en eau douce et s'en va ensuite dans l'océan. La pêche se fait dans l'océan. Dans ce cas-ci, il s'agit d'une pêche internationale.

La mine, en raison du drainage minier acide, aurait pu avoir un impact sur le frai. Est-ce que le gouvernement fédéral, qui a compétence en matière de pêche, doit décider qu'il ne se préoccupera pas de l'impact de ce projet pour les pêches car il s'agit d'un projet minier qui relève de la compétence provinciale, ou va-t-il déléguer? S'il délègue, comment va-t-il s'assurer que les intérêts fédéraux sont protégés?

Prenez les pipelines internationaux. Il y avait une proposition concernant un pipeline de coulis jusqu'à Haines en Alaska, qui traverserait la frontière canado-américaine. Les pipelines internationaux relèvent du fédéral aux termes de la Constitution. Mais cela fait également partie du projet minier. Que doit faire le gouvernement fédéral en ce qui a trait à cet aspect du projet si le secteur minier est délégué aux provinces?

Il faut tenir compte des conséquences pour les Américains. Les Américains s'inquiétaient beaucoup des conséquences de ce projet pour les pêches américaines, les parcs nationaux en aval, etc. En fait, Al Gore, en tant que sénateur, a soulevé la question au Sénat.

Disons que le projet avait eu le feu vert et que le vice-président Gore était venu à Ottawa pour dire au premier ministre Chrétien qu'il s'inquiétait du projet et de son impact sur les États-Unis. Le premier ministre Chrétien doit-il lui dire qu'il s'agit d'un projet minier qui relève de la compétence provinciale et qu'il devrait par conséquent s'adresser au premier ministre de la Colombie-Britannique? Il serait peut-être difficile pour lui de faire une telle chose. Je parle du point de vue politique plutôt que du point de vue juridique, même si que souvent, c'est une question de législation. Il y a les oiseaux migrateurs et d'autres questions du genre.

Voilà qui montre donc, je pense, qu'on ne peut pas tout simplement dire que puisqu'il s'agit d'un projet minier et que le secteur des mines relève de la compétence provinciale, le fédéral s'en lavera les mains. Ce projet illustre bien que les compétences en matière environnementale peuvent être réparties de plusieurs façons.

En deuxième lieu, au sujet du rôle fédéral, je voulais simplement mentionner un modèle qui est à mon avis utile pour ce rôle, c'est-à-dire la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et les accords bilatéraux qui ont été négociés aux termes de cette loi. En résumé, elle dit que le gouvernement fédéral a un intérêt important dans l'évaluation environnementale et que s'il doit prendre des décisions ayant un impact environnemental, il devrait disposer des meilleurs renseignements possibles pour ce faire. Il y a donc un intérêt fédéral important.

Une coordination est nécessaire afin de ne pas avoir deux processus d'évaluation environnementale à la fois. Ce qui est encore plus important peut-être, c'est que la loi donne des lignes directrices claires sur le plan juridique en ce qui a trait à la délégation de certaines activités, notamment la sélection, et la coordination ou un processus conjoint, comme des audiences conjointes. La loi stipule que si le processus respecte certaines normes, il peut y avoir un processus conjoint ou un processus délégué.

Donc, en un sens, le gouvernement fédéral dit qu'il a effectivement un intérêt. Il veut que certaines normes soient respectées, mais pourvu que ces normes soient respectées, il est prêt à coopérer.

Je pense qu'il s'agit d'une approche utile, car elle indique clairement de quelle façon l'harmonisation fonctionne. Elle offre des lignes directrices juridiques qui contrôlent le pouvoir discrétionnaire et donnent plus ou moins à tous des certitudes dans un certain nombre de domaines. Cette approche offre dans une certaine mesure de la certitude quant au fonctionnement de l'harmonisation, non pas pour ce qui est de la synchronisation du processus, ce qui est assez intéressant, mais dans d'autres domaines. Je pense qu'il s'agit d'un modèle qu'il serait utile d'examiner.

La deuxième question que je voulais mentionner concerne la responsabilité et la transparence. Il est clair que des accords fédéraux-provinciaux peuvent tout au moins obscurcir la hiérarchie des responsabilités et de rendre moins transparent le processus d'élaboration des décisions et des politiques.

Mon collègue ici, Franklin Gertler, a écrit un excellent article sur la question, que l'on a souvent cité, y compris dans le document que j'ai distribué au comité. J'ai remarqué que les observations de Franklin à ce sujet se retrouvent également dans le rapport du Comité permanent de la Chambre des communes sur la LCPE et dans la réponse du gouvernement.

Je n'entrerai pas trop dans les détails puisque l'expert est juste à côté de moi. Quoi qu'il en soit, la façon dont ces processus intergouvernementaux assurent la transparence et la responsabilité est une préoccupation importante, particulièrement dans un domaine comme celui de l'application de la loi.

Si le gouvernement fédéral délègue aux provinces ses pouvoirs pour ce qui est de l'application d'une loi fédérale, comment peut-on alors assurer la responsabilité et la transparence dans les décisions de poursuites?

Je ne pense pas qu'il soit possible d'assurer la transparence et la responsabilité. Je pense que l'harmonisation devrait idéalement améliorer cela. Peut-être un accord d'harmonisation serait-il une meilleure technique que toute une série d'accords bilatéraux. Je pense qu'il faut se pencher sur cette question.

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L'Entente-cadre pour la gestion de l'environnement, qui est l'entente du CCME, aborde la question dans une certaine mesure. L'annexe stipule par exemple que les parties demeurent ultimement responsables de l'application de leurs propres lois. Il y a des dispositions, bien qu'un peu vagues, en ce qui concerne la surveillance, mais je pense que l'entente devrait accorder davantage d'attention à cette question, car il s'agit d'une question importante.

La troisième question est celle de la capacité et des ressources financières. Cette question est vraiment liée à l'efficacité de la réglementation. L'Entente-cadre pour la gestion de l'environnement n'en traite pas de façon adéquate, ou du moins elle en traite d'une façon qui soulève des préoccupations légitimes.

Le problème est le transfert des fonctions entre les paliers de gouvernement sur le plan administratif, soit entre les gouvernements fédéral et provinciaux et vice versa. La préoccupation que les gens ont soulevée si l'on transfère les responsabilités sans prêter attention à la capacité - je ne parle pas uniquement d'argent mais également de la capacité technique et de l'infrastructure de réglementation, etc. - est la suivante: Si les responsabilités sont transférées, s'acquittera-t-on efficacement de ces rôles?

Une solution au problème consiste naturellement à transférer l'argent ou peut-être le personnel, avec les pouvoirs. Une autre façon consiste à créer des capacités pour aider les provinces à développer leur capacité de réglementation lorsqu'elles assument les responsabilités du fédéral. La troisième solution consiste à avoir une certaine souplesse au moment de la délégation des pouvoirs. En d'autres termes, la délégation de pouvoirs à une province comme l'Ontario, la Colombie-Britannique ou l'Alberta ne se ferait pas de la même manière que la délégation à une plus petite province qui a une capacité moindre de s'acquitter de telles responsabilités. L'Entente-cadre pour la gestion de l'environnement n'empêche pas une telle souplesse, mais il est clair qu'elle n'en parle pas. Je pense que s'il y avait plus de clarté à cet égard, alors on répondrait à certaines des préoccupations au sujet de cette entente-cadre.

J'ajouterais qu'à l'heure actuelle le contexte fait en sorte qu'il est très difficile de défendre l'harmonisation et d'en être certain. En effet, dans le domaine de la gestion de l'environnement, la situation est très fluide. De toute évidence, il y a d'importantes compressions budgétaires à l'échelle provinciale en Ontario et en Alberta. Il faut vraiment se demander si les provinces ont la capacité d'accepter de nouvelles responsabilités en matière de gestion de l'environnement.

Je ne dis pas qu'elles n'en ont pas la capacité, mais il est très difficile de répondre à cette question à l'heure actuelle. Je pense que le gouvernement fédéral, avant de décider de déléguer de telles responsabilités, devrait obtenir une réponse à cette question. Il est très difficile d'obtenir une réponse.

Cela étant dit, il y a également une autre solution - et cela m'amène à mon quatrième point - dans le contexte de l'incertitude. Il faut avoir les mécanismes appropriés pour examiner et surveiller les conséquences de ces ententes. Il me semble inévitable que dans un domaine aussi complexe que celui de la réglementation environnementale, surtout lorsqu'il s'agit de l'Entente-cadre pour la gestion de l'environnement, qui est une entente très générale, il y ait de l'incertitude quant à la mise en oeuvre d'une telle entente. Il y a par ailleurs la possibilité de conséquences non intentionnelles. Inutile de dire qu'il y a des groupes dans le monde qui considèrent ce processus comme un programme caché et, en un sens, comme une tentative, à certains égards, de régler ces questions de mauvaise foi.

Je pense que face à ces préoccupations, il existe une réponse qui ne nécessite pas un degré de certitude impossible à atteindre. Il s'agit de mettre en oeuvre des techniques de contrôle transparentes et efficaces permettant de voir si l'entente est bien mise en oeuvre. On trouve quelque chose de cet ordre dans la clause d'application de l'Entente-cadre pour la gestion de l'environnement. On y énumère des techniques de contrôle, dont certaines sont plus ouvertes et plus transparentes que d'autres. Mais cela n'indique pas la formule à retenir.

À mon avis, cette formule devrait s'appliquer à l'ensemble de l'entente. Autrement dit, s'il y a effectivement délégation et transfert de certaines fonctions, il faudrait vérifier, au bout de cinq ans, de trois ans ou d'un an, si le régime fonctionne bien. La gestion est-elle efficace? Est-ce que le gouvernement fédéral et l'ensemble des Canadiens sont satisfaits de la façon dont ces responsabilités sont assumées? Voilà un domaine où, à mon avis, la structure mériterait d'être renforcée.

Pour terminer, je ne pense pas que l'Entente-cadre pour la gestion de l'environnement et l'initiative d'harmonisation soient défectueuses au point d'être totalement inutiles. Je crois que nous avons cerné des problèmes importants. On devrait pouvoir les résoudre, à condition de considérer au départ qu'il s'agit d'une entente de bonne foi, et de la lire non pas de l'oeil le plus critique, mais d'une façon au moins équilibrée.

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Aucun des changements que j'ai proposés n'est incompatible avec cette entente. Si l'on veut miser sur l'ouverture, la transparence et l'efficacité de la réglementation, ces changements devraient pouvoir renforcer l'entente.

Mais si les objectifs sont différents et qu'on juge ces changements inacceptables, je ne pense pas que l'entente, dans sa forme actuelle, aille dans le sens d'une bonne gestion de l'environnement. Par contre, la coopération intergouvernementale va dans ce sens, et j'espère que si ce processus n'est pas mis en oeuvre, on saura au moins tirer les leçons de l'expérience de façon à progresser à l'avenir.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Kennett. À vous, monsieur Gertler.

[Français]

M. Franklin Gertler (vice-président, Centre québécois du droit de l'environnement): Je m'appelle Franklin Gertler et je suis vice-président du Centre québécois du droit de l'environnement.

Je devrais peut-être mentionner également que le Centre québécois du droit de l'environnement a, depuis le début, un représentant au comité consultatif sur la réglementation en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. C'est moi qui siège actuellement comme représentant, ce qui fait que nous avons suivi de très près le développement de la loi et de la réglementation fédérale en matière d'évaluation environnementale.

Nous tenons à remercier le comité de nous avoir convoqués aujourd'hui. Malheureusement, à cause des courts délais, nous ne pouvons vous présenter de mémoire adapté à la présentation d'aujourd'hui. Toutefois, nous vous avons distribué une certaine documentation.

J'aimerais dire quelques mots sur le Centre québécois du droit de l'environnement. Le Centre a été fondé en 1989. Il est composé de juristes et d'autres professionnels en environnement, des toxicologues, des urbanistes, etc.

Nous avons trois buts principaux.

Il y a premièrement le développement d'outils juridiques pour la protection de l'environnement. Deuxièmement, il y a la promotion de la participation publique aux processus décisionnels. Nous croyons que c'est là la meilleure garantie d'une bonne gestion de l'environnement. Également, de pair avec notre deuxième objectif, nous travaillons pour l'accès du citoyen à la justice en matière d'environnement. On travaille aux réformes qui permettront un meilleur accès et on donne une certaine aide aux citoyens et groupes de citoyens qui veulent participer aux processus décisionnels, qu'ils soient administratif ou judiciaire.

Comme je l'ai déjà dit, nous n'avons pas de mémoire. Par contre, j'ai remis trois choses au greffier: d'abord, un petit dépliant bilingue qui décrit le Centre québécois du droit de l'environnement; deuxièmement, l'executive summary d'un travail que nous avons fait pour le groupe de travail du réseau des groupes environnementaux canadiens et qui porte sur la révision proposée par le ministère des Pêches et des Océans de l'article 35 de la Loi sur les pêches; enfin, la liste des groupes qui donnent leur soutien à la position énoncée dans le résumé du document. Je tiens à vous dire que l'Union québécoise pour la conservation de la nature s'ajoute maintenant aux groupes qui appuient cette position.

Pour les fins de vos archives, j'ai également remis au greffier deux copies du discussion paper. Vous l'avez pour fins de consultation. D'autres documents peuvent être obtenus auprès du Canadian Environmental Network ici, à Ottawa.

[Traduction]

Monsieur le président, je serais heureux de répondre aux questions en français ou en anglais, mais je vais continuer mon exposé liminaire en anglais.

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Je voudrais parler de trois choses. Tout d'abord, je voudrais évoquer brièvement l'article 35 de la Loi sur les pêches et vous parler du travail que nous avons fait et des conclusions auxquelles nous sommes parvenus.

Deuxièmement, je vous parlerai brièvement des recommandations qui figurent dans le rapport provisoire de ce comité au Parlement, pour vous donner une idée de ce qui nous préoccupe et de notre perception des questions qui ont été soulevées.

Troisièmement, sur la question des chevauchements et des doubles emplois, je ferai quelques brefs commentaires sur la réglementation fédérale et québécoise actuelle dans l'industrie minière.

Notre document de travail est le fruit de rencontres avec le ministère des Pêches et des Océans il y a un an. Nous avons été invités à nous prononcer sur des propositions du ministère des Pêches et des Océans visant à réformer l'administration de l'article 35 de la Loi sur les pêches.

À cette époque, nous avons fait observer que la formule retenue n'était pas la plus avantageuse, et on nous a mis au défi de proposer des solutions de rechange. C'est ce que nous avons fait dans notre document.

La Loi sur les pêches et en particulier son article 35 sont véritablement au centre des mesures fédérales de protection de l'environnement et de gestion des pêches. Les responsabilités et pouvoirs fédéraux aux termes de l'Acte constitutionnel en matière de pêche sont le pouvoir environnemental le plus explicite, le plus fort et le plus direct de ce gouvernement. Si vous demandez aux Canadiens quelle mesure essentielle ils souhaitent de la part du gouvernement fédéral en matière d'environnement, la plupart d'entre eux parleront sans doute de la protection des eaux où ils vont nager, pêcher ou faire du canot.

De toute évidence, la Loi sur les pêches est un déclencheur très important de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Le comité consultatif sur la réglementation s'est mis d'accord pour recommander l'inclusion de la Loi sur les pêches parmi les mesures de déclenchement des évaluations dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale; de son côté, l'industrie a préconisé des rajustements pour rendre son application plus efficace. Mais il s'agissait d'une recommandation fondée sur un consensus.

L'article 35 est reproduit dans le corps du résumé que je vous ai donné, de même qu'en annexe. Je ne vais pas en donner lecture, mais je voudrais faire à son propos une remarque d'ordre général.

Lorsque Roméo LeBlanc, ministre des Pêches et de l'Environnement - les deux éléments étaient réunis à l'époque - a présenté devant la Chambre la disposition qui est devenue l'article 35, son intention était manifestement de mettre en place un régime de prévention et de planification fonctionnant de façon intégrée aux différentes étapes, que ce soit l'obtention de l'information, les échanges avec le promoteur d'un projet, l'obtention de modifications dans la conception et le fonctionnement de l'ouvrage, ou l'autorisation finale. Malheureusement, il s'est progressivement transformé en un simple régime d'approbations qui, il faut bien l'admettre, interviennent souvent à une étape trop tardive du processus.

Le ministère des Pêches et des Océans avait proposé trois choses: tout d'abord, de modifier la Loi sur les pêches pour permettre la délégation aux provinces de l'application du paragraphe 35(2) comprenant les autorisations ainsi qu'une invention de son cru, c'est-à-dire des exemptions, qui n'apparaît nulle part dans la loi.

D'après notre interprétation, pour ne jamais avoir à déclencher une évaluation environnementale, le ministère dit que dans certains cas, le faible niveau de complexité du projet ne justifie pas la délivrance de l'autorisation prévue au paragraphe 35(2), et le ministère peut lui accorder une exemption. C'est ce qui figure dans la directive dont vous trouverez copie au verso de notre résumé. Comme je l'ai dit, cette mesure est, à notre avis, dépourvue de fondement juridique et pourrait donner lieu à des contestations judiciaires aussi bien contre le promoteur du projet que contre les gouvernements en cause. Voilà pour le premier élément.

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Le deuxième consiste à enlever le paragraphe 35(2) de la liste des éléments déclencheurs d'une évaluation environnementale aux termes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Comme je l'ai dit, cet élément déclencheur était au coeur du compromis grâce auquel la communauté des groupes environnementaux a jugé la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale acceptable.

Dans la plupart des cas, il n'existe pas de régime provincial équivalant à l'évaluation environnementale fédérale, qui ne s'imposera plus si le paragraphe 35(2) est supprimé de cette liste.

D'un point de vue strictement politique, nous estimons que l'engagement à renforcer et à promulguer la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, y compris l'article 35 avec les éléments déclencheurs de la Loi sur les pêches, a été véritablement le grand engagement pris par le gouvernement actuel dans le Livre rouge en matière d'environnement et, jusqu'à maintenant, sa seule grande réalisation dans le domaine. Par conséquent, cette proposition de réforme de l'application de la Loi sur les pêches et de suppression du paragraphe 35(2) de la liste des éléments déclencheurs serait une mauvaise note dans le dossier environnemental du gouvernement.

Le troisième élément de la proposition, qui vise en quelque sorte à réagir à la critique précédente, consiste à ajouter à la Loi sur les pêches un paragraphe 35(3) en vertu duquel les grands projets - définis d'une façon quelconque - nécessiteraient automatiquement des autorités fédérales les permis et autorisations qui déclenchent une évaluation environnementale aux termes de la loi. Autrement dit, on ajouterait un nouveau paragraphe 35(3) à la liste prévue dans la loi.

Ici, la difficulté est évidemment de définir les petits et les grands projets. Chaque fois qu'on a essayé de le faire, ce fut un véritable cauchemar. En outre, il convient de poser une autre grande question: est-il prouvé que ce sont les grands projets, qui de toute façon seront sans doute soumis à une évaluation, qui constituent le principal problème du milieu aquatique dans ce pays, ou ce milieu n'est-il pas détruit par une multitude d'autres facteurs?

Il faut tenir compte de l'effet cumulatif des nombreux petits et moyens projets, et si l'on met l'accent sur les grands projets, on risque de ne pas saisir véritablement les éléments importants au plan écologique.

Nous devons maintenant répondre à une critique. Je vous en ai donné un avant-goût tout à l'heure. À notre avis, les provinces n'ont actuellement ni l'expertise, ni les moyens financiers, ni la volonté politique d'assurer l'application du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, ce qui pose une menace pour le milieu aquatique. Dans bien des cas, la province peut avoir un lien étroit avec les promoteurs, ou elle peut entreprendre elle-même des projets.

J'ai passé ma journée d'hier en réunion avec des hauts fonctionnaires ici pour discuter de cette question. Notre délégation se composait entre autres de gens qui communiquent quotidiennement avec des autorités responsables de la faune, notamment dans les provinces des Prairies, et on leur dit constamment que telle ou telle question pose un problème très grave, mais «N'en parlez à personne, sinon je perdrais mon emploi». Il y a donc là un véritable problème. Souvent les responsables provinciaux ne sont pas libres de dire leur façon de penser, et il est éminemment souhaitable qu'on puisse compter dans ce domaine sur le savoir-faire du fédéral et sur son indépendance d'action.

J'ai déjà dit que supprimer la disposition de la liste irait à l'encontre de ce qu'il a été recommandé par voie de consensus, tout comme j'ai déjà parlé de grands projets et du problème que pose cette distinction. Je n'y reviendrai pas.

À notre avis, ce qui se passe au sujet de l'examen de l'article 35 est tributaire de l'examen des programmes, d'une réforme de la réglementation, des compressions budgétaires, de la politique constitutionnelle ainsi que des craintes non fondées que la Loi sur les pêches après l'application de la Loi sur l'évaluation environnementale déclenchent un nombre considérable d'évaluations environnementales fédérales qui auraient un effet très perturbateur.

Cette dernière chose ne s'est certainement pas produite. Les statistiques dont je dispose sur les évaluations environnementales effectuées par Pêches et Océans montrent que du 19 janvier 1995 au 22 mars 1996 seulement 92 projets dans tout le Canada ont donné lieu à un examen préalable. Nous ne parlons pas d'audiences. Nous ne parlons pas du barrage de la rivière Oldman. Nous ne parlons pas d'affaires devant la Cour suprême ni de questions qui demandent un examen préalable de trois ans. Il y a eu 92 cas au cours des 15 premiers mois de mise en application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Quatre ont donné lieu à une étude complète, soit un total de 96.

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Les statistiques démentent donc les craintes d'une avalanche de problèmes. Nous estimons quant à nous que l'analyse de la politique laisse à désirer tout comme les efforts qui devraient viser à prévoir des réponses à ce qui pourrait être une solution à la recherche d'un problème. Nous pensons qu'il nous faut vider la question de l'article 35 de la Loi sur les pêches.

Il y a trois choses. Quel est le problème? Pour le savoir, nous devons nous demander notamment s'il est question de grands projets ou de petits projets. Combien cela coûte-t-il pour faire respecter les dispositions sur l'habitat du poisson? Combien cela coûte-t-il sur les plans environnemental et économique si on ne le fait pas? Combien d'évaluations environnementales faudra-t-il vraiment? Combien cela coûte-t-il pour les effectuer? On ne s'est pas penché sur ces questions. Et de une. Quel est le problème? Y a-t-il véritablement double emploi et chevauchement? On n'en a pas fait la preuve dans la majeure partie des cas.

Deuxième chose, que faudrait-il faire? Comment faudrait-il réglementer et administrer l'habitat du poisson?

Troisième chose, qui doit s'en charger? Et nous estimons - et j'y reviendrai dans un instant, parce qu'il ressort, il me semble, des recommandations de votre comité et de son rapport provisoire qu'on doit redoubler d'efforts pour régler cette question de savoir ce qu'on doit faire avant de se demander qui doit le faire?

À notre avis, l'article 35 - les dispositions sur l'habitat du poisson - de la Loi sur les pêches s'est révélée inapplicable dans les cas où, comme nous le disons, on ne peut pas faire la preuve d'un double emploi ni d'un chevauchement, où le nombre d'évaluations et leur effet perturbateur ne justifient pas les craintes de ceux qui redoutent l'apparition dans tout le pays de centaines de cas semblables à celui du barrage de la rivière Oldman. On dispose d'un tout petit budget, pas de grosses sommes. Pêches et Océans attribue un très petit budget à l'application de cette loi et aux dispositions relatives à l'habitat du poisson. Cela représente 1,3 p. 100 de son budget, ce qui, je pense, équivaut à 6 millions, 7 millions ou peut-être à 10 millions de dollars en tout. Ce n'est pas une grosse somme par rapport à l'ensemble de son budget.

Pour cette somme, on bénéficie d'un excellent travail et d'excellentes connaissances scientifiques qu'il serait très regrettable de répartir entre 10 provinces. Comme cette loi ne donne lieu à presque aucune poursuite, il n'y a pas d'efforts d'application sur ce plan. On ne tient presque aucun registre de ce qui se fait en matière d'autorisations, de projets ou de poursuites. Le paragraphe 42(1) de la Loi sur les pêches traite de l'obligation de faire rapport au Parlement, mais cette disposition n'est pas respectée comme elle devrait l'être.

Vingt ans après l'adoption de l'article 35, aucun règlement n'en régit l'application, si ce n'est la formule d'application, qui se trouve dans la partie générale du règlement sur les pêches. Autrement dit, il n'existe aucun règlement en vertu du paragraphe 37(1) qui décrive les situations où des renseignements doivent être fournis au ministre ni de quelle information il doit s'agir. Cette fonction doit donc être exécutée au cas par cas. C'est coûteux. C'est lent. C'est fastidieux. C'est incertain. Voilà donc un cas où des règlements pourraient en fait améliorer la certitude tout en réduisant les coûts.

Vingt ans plus tard, aucun règlement en vertu du paragraphe 37(2) ne décrit les conditions dans lesquelles on peut prendre des ordonnances pour modifier les projets. Et vingt ans plus tard, il n'existe aucun règlement en vertu du paragraphe 35(2) qui décrive dans quels cas, plutôt que d'obtenir une autorisation, on peut simplement éviter de devenir justiciable en vertu du paragraphe 35(1) si l'on se conforme aux conditions standards énoncées par voie de règlement eu égard à certains types de projets répétitifs, c'est-à-dire les ponceaux, les ouvrages de franchissement de cours d'eau, les pipelines, pour n'en nommer que quelques-uns.

Nous pensons donc qu'il y a beaucoup à faire sur ce que doit viser - et non pas sur qui doit s'en charger, mais bien sur ce que doit viser - la disposition de protection de l'habitat de la Loi sur les pêches.

Pour ce qui est de l'évaluation environnementale, d'après ce que nous savons, on n'a rien fait pour procéder à des examens collectifs préalables à certains de ces petits projets répétitifs ou standards de manière à alléger le fardeau de cette évaluation environnementale. Autrement dit, on n'a pas fait le moindre effort pour utiliser le mécanisme d'efficience prévu dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. On n'a fait aucun effort pour réexaminer la liste d'exclusion à cet égard ni pour dire que certains types de projets n'avaient nullement besoin d'être évalués.

.1145

On pourrait donc dire qu'on a paniqué avant même d'avoir vraiment mis le régime à l'essai, et qu'on a à tort pensé que les douleurs de l'enfantement, ou les difficultés inhérentes au lancement d'un nouveau régime, donnaient un avant-goût de ce que serait la situation à long terme une fois le régime bien en place.

Voilà donc ce qu'il en est de la Loi sur les pêches, et si vous le permettez, je vais maintenant parler très brièvement des recommandations. Je crois que je ne vais pas aborder la question de la réglementation fédérale ni du Québec parce que je suis sûr que la question sera soulevée au moment des questions. Je ne veux pas vous retenir trop longtemps.

Je ne vais parler que de deux ou trois de ces recommandations. La première dont j'aimerais parler est la recommandation 2, où il est question des agences responsables.

Il y a ici deux ou trois choses à examiner. D'abord, des groupes environnementaux ont travaillé sans relâche pour qu'une agence centrale assume la responsabilité de l'évaluation en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Cette recommandation a été rejetée. Dans sa sagesse, le Parlement a opté pour l'auto-évaluation, de sorte que chaque ministère responsable, chaque autorité responsable, a en vertu de la loi l'obligation de procéder à sa propre évaluation.

Je pense donc que nous sommes coincés avec ce système. Nous n'en raffolons pas, mais il présente quand même certains avantages environnementaux. Le problème que pose la question de l'agence responsable, c'est, d'abord, que cela va quelque peu à l'encontre de l'esprit de la loi qui veut que chaque autorité responsable dispose d'un pouvoir discrétionnaire indépendant et ait des fonctions indépendantes. En outre, il est souvent très difficile d'en arriver à un consensus sur la question de savoir quelle devrait être l'agence responsable. L'autorité responsable devrait être celle qui a le plus grand intérêt économique, celle qui a les liens les plus étroits avec le promoteur, ou celle qui a le plus grand intérêt environnemental eu égard à l'environnement qui sera touché? Je pense que le mieux à faire c'est de conserver la méthode actuelle des comités et qu'un type de processus coopératif facilitant l'administration de l'évaluation environnementale et sa coordination est sans doute le meilleur modèle à suivre.

En vertu de la loi, de toute façon - je crois qu'il s'agit de l'article 12 de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale - l'agence dispose en dernier ressort d'un certain pouvoir qui lui permet de forcer la main des ministères et les amener à coopérer en vue de la réalisation de l'évaluation. Voilà donc pour la première chose.

Pour ce qui est des échéanciers, le Québec a bien sûr récemment décidé de retenir cette option. Le gouvernement fédéral va dans la même direction, en proposant soit des règlements, soit des directives, soit des lignes directrices en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Ce sont les directives régissant les audiences publiques et l'étude publique.

En principe, nous n'avons rien contre les échéanciers. La notion «d'obligation» est un peu inquiétante, parce que le processus devrait être flexible. Si pour des raisons légitimes il faut plus de temps pour qu'une évaluation soit menée à bien, il faudrait qu'on prenne ce temps.

Il faut aussi qu'on soit de bonne foi tant du côté du gouvernement que du côté de l'industrie. Une des raisons pour lesquelles les promoteurs de projets estiment que l'évaluation environnementale dérange le processus, c'est qu'elle commence trop tard. L'évaluation doit faire partie de la planification. Il faut contacter le gouvernement aussitôt que possible pour mettre le processus en marche. Il dérange donc beaucoup moins, parce que le promoteur reçoit son acceptation rapidement, et parce que tout changement dans la conception du projet exigé par l'évaluation environnementale est beaucoup plus facile à incorporer s'il intervient tôt dans le processus.

Pour ce qui est de la recommandation no 5, les effets cumulatifs, il est vrai que l'article 16 de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale introduit une exigence assez nouvelle au Canada.

Il est important de comprendre qu'en général, une évaluation environnementale est conçue pour nous permettre de faire de notre mieux. Nous ne cherchons pas de vérité absolue. Une évaluation, ce n'est pas un procès devant les tribunaux. Il n'y a pas d'absolu. D'après nous, la loi exige qu'on fasse de son mieux, en utilisant tous les outils analytiques et scientifiques disponibles, pour analyser les effets cumulatifs d'un projet. Si on ne peut pas prédire tous les effets, on peut toujours arriver à une décision. Mais au moins, cette décision sera basée sur les meilleures informations possibles.

.1150

Pour ce qui est de la recommandation no 6, nous avons déjà proposé - Steve Kennett en a parlé - que les ententes fédérales-provinciales soient assorties de dispositions qui protègent la responsabilité, la transparence, la participation publique, les clauses d'extinction et des éléments comme la publication de projets d'entente et non d'ententes finales. Avec ces sauvegardes, toutes ces notions pourront être révisées après quelques années.

Permettez-moi d'ajouter entre parenthèses que j'ai discuté de ces questions avec les gens de l'Agence canadienne de l'évaluation environnementale. On se demande si le fait que l'Entente-cadre sera négociée entre le gouvernement fédéral et certains gouvernements provinciaux pourrait être considéré comme illégal, dans la mesure où ces ententes lient les ministères, qui doivent après cela arriver à des décisions ponctuelles pour chaque évaluation. Ils doivent décider de la démarche qui s'appliquera à chaque évaluation.

Le président: J'aimerais vous prier de finir vos remarques, parce que nous n'aurons plus de temps pour les questions.

M. Gertler: Bien sûr. Excusez-moi d'avoir pris autant de temps.

Les recommandations nos 8 et 9 portent sur la Loi sur les pêches: nous sommes d'accord avec une bonne partie de vos propos. En d'autres mots, nous convenons qu'il faut avoir plus de certitude, surtout par le biais de règlements.

Je vais sauter la recommandation no 11 pour le moment. J'y reviendrai bientôt.

La recommandation no 14: Ce n'est pas une mauvaise idée d'essayer d'établir une définition pour les eaux navigables, mais bonne chance. J'ai été impliqué dans certains litiges, et ce ne sera pas facile.

Merci. Je suis prêt à répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup.

Passons aux questions. Monsieur Deshaies, du Bloc québécois.

[Français]

M. Deshaies (Abitibi): Ma question s'adresse à M. Kennett. Dans votre exposé, vous avez parlé de plusieurs sujets et je n'ai pas été capable de voir si votre objectif était que le fédéral prenne en main les réglementations provinciales pour qu'elles soient plus efficaces, en somme qu'il y ait des normes nationales. Êtes-vous partisan d'une meilleure efficacité en déléguant certaines responsabilités aux provinces et en gardant au fédéral certaines prérogatives? Quelle votre position?

[Traduction]

M. Kennett: En matière de règlement, il faut garder l'efficacité et l'efficience à l'esprit. C'est évident.

Il y a deux aspects à souligner. Premièrement, le gouvernement fédéral a un rôle unique et important à jouer dans certains domaines. J'ai déjà parlé des questions transfrontalières. J'ai mentionné les domaines où il y a des économies d'échelle, par exemple la recherche. J'ai mentionné des domaines dans lesquels une approche nationale est importante, pour des raisons économiques ou d'efficacité réglementaire. Un exemple serait la réglementation de l'importation de produits toxiques, et leur évaluation. Il serait peut-être logique de ne pas faire cela province par province.

Donc le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans certains domaines. Dans d'autres, il est peut-être plus efficace d'en faire une responsabilité provinciale. Tout cela est fort bien, mais il doit y avoir des mécanismes de responsabilité et de transparence si le gouvernement fédéral décide de déléguer certaines fonctions qu'il a exercées jusqu'à maintenant pour qu'il soit possible de vérifier jusqu'à quel point les provinces s'acquittent de ces responsabilités réglementaires à la satisfaction du gouvernement fédéral et de la population canadienne.

Je sais que ce n'est pas une réponse facile, mais la question ne se prête pas à une réponse simple du genre oui ou non.

[Français]

M. Deshaies: Au comité, nous nous étions donné comme objectif d'étudier une réforme possible de la réglementation minière relative à l'environnement. Nous voulions savoir s'il y avait une façon directe de diminuer le nombre de réglementations, sans nécessairement toucher à la qualité environnementale, et aussi de diminuer le nombre de paliers et d'intervenants.

.1155

Si vos objectifs sont la transparence, un budget suffisant et une réglementation suffisante, ne devrait-on pas viser une diminution du nombre de paliers de réglementation pour rendre plus efficace l'industrie minière et atteindre à l'avenir des objectifs environnementaux équivalents ou supérieurs?

[Traduction]

M. Kennett: J'hésite beaucoup à parler de la réglementation minière puisque je ne connais pas à fond ce domaine.

Je pense qu'il y a lieu d'harmoniser le processus réglementaire, notamment, comme je l'ai déjà mentionné, en ce qui concerne les procédures relatives à l'approbation d'un projet. S'il est nécessaire d'obtenir l'approbation à différents paliers, il est préférable d'avoir le même genre de formulaire de demande pour ne pas avoir à refaire toute la documentation et le travail. Si la réglementation exige la surveillance et des rapports, il faudrait certainement harmoniser ces exigences pour qu'on puisse faire les mêmes essais pour s'acquitter de cette responsabilité. Je pense qu'il existe très certainement des domaines où on peut simplifier les choses.

Un mot au sujet des normes. Je pense qu'on a tendance peut-être à exagérer un peu les différences en matière de normes environnementales. Pour donner un exemple simple, s'il existe deux normes différentes, disons en matière d'émission ou d'effluents, je crois que dans la plupart des cas le respect de la norme la plus stricte permettra de respecter les deux. Dans la pratique, je ne pense pas que ce soit un problème important dans la mesure où les deux sont compatibles, c'est-à-dire qu'on peut se conformer aux deux en même temps. Mais il pourrait parfois se poser un problème dans la pratique.

[Français]

M. Deshaies: Pensez-vous qu'un guichet unique permettrait aux groupes environnementaux de faire une meilleure surveillance du processus environnemental, parce qu'eux aussi n'auraient qu'un endroit à vérifier pour voir si l'environnement est bien suivi?

[Traduction]

M. Kennett: L'idée me paraît intéressante. Comme je l'ai dit, dans le domaine de l'évaluation environnementale, on ne peut pas encore parler de guichet unique, mais certains des accords bilatéraux entre le gouvernement fédéral et les provinces en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale évoluent dans ce sens.

Si c'est clairement prévu dans la loi avec l'obligation de rendre des comptes, je pense que cela facilite beaucoup les choses pour tous les intervenants dans le processus réglementaire d'avoir affaire à un seul guichet où envoyer la documentation, se renseigner au sujet des exigences, du calendrier à suivre, etc. Cela m'apparaît utile si toutes les sauvegardes sont en place.

[Français]

M. Deshaies: Monsieur Gertler, je suis très étonné qu'un organisme qui s'appelle le Centre québécois du droit de l'environnement présente un document uniquement en anglais. Je me demande si votre groupe est relié à un autre groupe particulier ou s'il est vraiment un groupe québécois. Normalement, à la Chambre des communes, on dépose des documents dans les deux langues lorsque c'est possible. Donc, je suppose que vous ne l'avez pas déposé en français. Ce serait une bonne chose que vous ayez des documents en français.

Dans votre déclaration, vous avez parlé davantage de l'article 35 de la Loi sur les pêches que du sujet qui nous intéresse, soit l'harmonisation potentielle des réglementations environnementales dans le domaine des mines. On pourrait aussi parler d'autres domaines. Est-il possible d'éliminer des paliers ou des intervenants tout en gardant une qualité environnementale égale ou supérieure, de façon à ce que les objectifs soient atteints et que l'exercice soit plus rapide?

M. Gertler: Pour ce qui est de vos remarques quant à notre mémoire, nous sommes certainement un groupe québécois et, jusqu'à nouvel ordre, également un groupe canadien.

Le travail en question a été effectué à contrat pour le ministère des Pêches et des Océans et nous avons reçu une subvention de 5 000 $ pour le réaliser. Nous y avons consacré environ 500 heures. Nous n'avons pas eu de budget pour la traduction. Une traduction a été faite, mais elle n'a pas encore été vérifiée par le ministère. C'est pour cela qu'il n'y a pas de version française. Il y en aura une bientôt. C'est ce qui arrive lorsque le gouvernement ne fait pas son travail en ce qui a trait au développement des politiques, à l'analyse de la situation et au travail juridique. Finalement, c'est fait de façon improvisée, à contrat et les rémunérations sont vraiment inadéquates.

.1200

On ne peut se payer le luxe de produire tout le temps des documents dans les deux langues. Dans ce cas-ci, le document a été produit en anglais. Si on reçoit une meilleure subvention la prochaine fois, ce sera peut-être dans les deux langues. Comme je l'ai dit, on souhaite qu'il soit dans les deux langues, mais il y aura peut-être au moins un résumé dans l'autre langue.

[Traduction]

Le président: Merci. Veuillez répondre brièvement à la question.

M. Gertler: M. Kennett a déjà répondu à la question en partie.

[Français]

Il est très difficile de dire qu'une réglementation sur un projet minier devrait être entièrement provinciale. La Cour suprême a dit dans l'affaire Oldman River Dam qu'on ne pouvait vraiment parler de projet fédéral et provincial. Il n'existe pas de champ de compétence qui s'appelle l'évaluation, c'est-à-dire la réglementation environnementale des mines. Il n'existe pas non plus de champ de compétence sur les mines qui donnerait tout l'aspect des mines exclusivement aux provinces.

Autrement dit, tant qu'il n'y aura pas de changement constitutionnel, il restera des responsabilités fédérales. Nous avons toujours soutenu une approche du droit positif. Dans la situation actuelle au Canada, certains pouvoirs et responsabilités sont dévolus au gouvernement fédéral. Cela étant dit, il est évident qu'il n'y a rien, au niveau des concepts, qui dit qu'un palier ne pourrait pas tout faire. Mais cela cadre-t-il avec la réalité actuelle? C'est une tout autre question.

Peut-on toujours être sûrs que les intérêts d'une province par rapport aux projets miniers, entre autres, cadrent bien avec son rôle de chien de garde de l'environnement? C'est la question qu'il faut se poser.

Je tiens à dire qu'au niveau de l'évaluation environnementale, c'est seulement avec l'adoption et la mise en vigueur de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale qu'après 15 ans d'attente, le Québec a enfin mis en vigueur sa réglementation sur l'évaluation environnementale des projets miniers. Les seuils sont très élevés mais, auparavant, le sud du Québec n'y était pas assujetti. Donc, c'est seulement lorsque le Québec s'est senti poussé par la réforme fédérale que cela a été fait. C'est le contexte dans lequel votre question doit s'inscrire, je crois.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Strahl.

M. Strahl (Fraser Valley-Est): Merci de votre exposé.

J'ai une question qui découle de vos remarques d'ouverture, monsieur Kennett, quand vous avez évoqué la possibilité que les discussions du CCME soient sur le point d'échouer. Ils essaient depuis quelque temps d'en arriver à un accord entre les deux paliers de gouvernement et je crois qu'il y a environ 12 ou 13 ministres qui y participent.

Je m'inquiète de ce qui se passe en Colombie-Britannique, ma province, surtout en ce qui concerne les revendications territoriales des Autochtones. Le premier des nouveaux traités, l'accord de principe entre le Nisga'a et les gouvernements fédéral et provincial, déclare que les parties vont essayer de négocier une entente pour la coordination des exigences en matière d'évaluation environnementale établies par le Nisga'a, le fédéral et la province afin d'éviter le double emploi lorsqu'un projet sera soumis à plus d'un processus d'évaluation gouvernementale.

Je crois qu'au départ, les négociations engloberont non seulement les 13 administrations qui participent actuellement, mais aussi, du moins en Colombie-Britannique, probablement 50 ou 60 autres administrations qui seront partie prenante de ce processus.

.1205

On ajoute ici que le gouvernement central Nisga'a peut légiférer en ce qui concerne l'évaluation environnementale des projets:

On va même jusqu'à dire dans ce chapitre que le gouvernement central Nisga'a peut légiférer relativement à la protection environnementale des terres Nisga'a, y compris en ce qui concerne les déversements dans les voies d'eau en territoire Nisga'a. Si l'on revient aux arguments mettant en cause l'article 35, quant à savoir qui contrôle l'élément pêche, on dit que le Canada devra aussi consulter le gouvernement central Nisga'a pour la formulation de la position du Canada dans le cadre de discussions ou de négociations internationales ayant un rapport quelconque avec la pêche. Ce n'est que le premier d'une cinquantaine ou d'une soixantaine d'accords, celui-ci pavant la voie à l'arrivée de ce qui me semble un monstre environnemental.

Monsieur Kennett, si votre analyse est bonne quant à savoir si nous serons en mesure de tirer le meilleur parti possible des tentatives du CCME de coordonner la politique environnementale, avez-vous réfléchi à la question ou examiné cet accord Nisga'a, ou l'entente de principe que j'ai ici, pour voir quelle en sera l'incidence sur l'efficacité de tout futur processus d'évaluation environnementale? Je pense que ce sera monstrueux comme système. Je me demande si vous y avez réfléchi sous l'angle juridique.

Je ne veux pas m'en prendre aux Nisga'a qui forment un groupe fort responsable. Le problème viendra des autres groupes qui n'ont pas nécessairement les ressources voulues ou qui ne voient pas à long terme. Nous nous retrouverons avec plusieurs administrations superposées qui essaieront toutes de conclure des ententes, ce qui aboutira peut-être à la fragmentation, y compris au niveau des règlements sur l'eau et les effluents, en 50 ou 60 groupes différents, y compris pour ce qui est des écosystèmes environnementaux de Colombie-Britannique, qui sont très fragiles et dont certains pourraient être déstabilisés par l'activité économique ou Dieu sait quoi.

Je me demande si vous avez réfléchi à tout cela. Est-ce une bonne idée? Qu'en pensez-vous?

M. Kennett: En bref, je n'ai pas examiné cette entente et je ne veux vraiment pas m'aventurer sur le terrain des droits des Autochtones parce que c'est un dossier très compliqué. Je peux dire toutefois que j'ai réfléchi à la question dans un autre contexte, à savoir le Yukon, où il y a également eu des règlements territoriaux globaux créant des processus d'évaluation environnementale. Des discussions sont en cours actuellement à différents niveaux sur la façon de coordonner tout cela avec la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et les éventuels processus du Territoire du Yukon.

C'est donc assurément un problème. Est-ce insurmontable? Non, je ne le crois pas, mais je pense qu'il faut inscrire une certaine souplesse dans le régime. Comme je l'ai dit, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale comporte des dispositions permettant de déléguer certaines fonctions, sous certaines réserves. On y envisage assurément des audiences mixtes, etc. Ce genre d'outils existe, et il faudra s'en servir. Évidemment, si vous parlez d'un grand nombre d'ententes individuelles comportant chacune un processus différent, cela pourrait créer une situation difficile à gérer.

C'est peut-être inévitable. Il y aura assurément les douleurs de l'enfantement, comme Franklin l'a dit, avec l'instauration de ces processus, mais je crois qu'il faudra aplanir les problèmes au fur et à mesure. Je le répète, il faudra pour cela mettre au point des mécanismes de coordination.

Quant à l'encadrement, cela pose encore une fois la question de savoir si le fédéral, et parfois les provinces, ont un rôle à jouer dans les dossiers transfrontaliers et aussi en ce qui concerne les écosystèmes, la pêche, surtout la pêche au saumon et la protection de l'itinéraire emprunté par les saumons pour frayer, jusqu'à l'océan. Je pense qu'il faut être prudent avant de déléguer tout cela au niveau le plus bas, parce que ce sont des questions plus générales. Je le répète, la gestion de l'écosystème fait partie de l'initiative de Whitehorse, cela figure dans les mémoires des groupes environnementaux, c'est le simple bon sens, c'est assez fondamental. Il faut toutefois tenir compte de ces questions d'harmonisation des compétences.

M. Strahl: Au sujet du saumon, il me semble que l'une des raisons pour lesquelles nous n'arrivons pas à nous entendre sur la réglementation ou à conclure une quelconque entente internationale avec les Américains, c'est parce qu'il y a trop de participants au débat; ce serait bien de discuter entre nous, avec les Américains, nous pourrions nous entendre, mais il y a le Canada, Washington, l'Alaska, diverses bandes indiennes dans la queue de poêle de l'Alaska, etc. Le problème est que nous n'arrivons pas à nous entendre parce qu'il y a trop de parties à la table, à mon avis. Le Canada et les États-Unis veulent préserver les stocks de saumon. Le problème, c'est que chacun défend ses propres intérêts. Tout le monde veut danser, mais personne ne veut payer le violoneux.

.1210

Si cette entente est ratifiée, je soutiens que l'on pourrait se retrouver avec 20 ou 30 administrations à la même table et je crois qu'à ce moment-là, on aura ruiné la ressource. Le ministre ne sera pas capable de gérer la ressource s'il a affaire à un grand nombre d'intervenants qui disent tous «mes intérêts passent en premier».

Je me rends compte que vous n'avez pas examiné cela. C'est une situation difficile pour vous, mais en principe, ou du moins en théorie, il me semble que le fédéral a parfois un rôle à jouer, comme vous l'avez dit vous-même. Je crois que le gouvernement fédéral abdique ses responsabilités, surtout dans le domaine de la pêche, en étant partie à des ententes internationales.

Quelqu'un doit coordonner tout cela. S'il y a trop de gens, si c'est sous-traité à un trop grand nombre de parties, c'est un rôle que le gouvernement fédéral pourrait trouver impossible à jouer et cela pourrait être catastrophique à l'avenir.

J'espère que vous aurez copie de cela. En fait, je vais vous envoyer copie des articles pertinents. Je voudrais obtenir vos commentaires sur le plan juridique, et je me rends compte que c'est justement votre spécialité, parce qu'au premier coup d'oeil, pour un profane, il me semble, puisque c'est le premier d'une série, que nous nous assignons à l'avenir un rôle très difficile à la fois sur le plan de l'environnement et de la protection de l'habitat et du saumon.

M. Kennett: Je me ferai un plaisir d'examiner tout cela et de réfléchir à ces questions.

M. Strahl: Merci.

Le président: Merci. Merci beaucoup.

Madame Cowling.

Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Merci, monsieur le président.

Premièrement, je tiens à vous remercier tous les deux d'être venus comparaître devant le comité.

J'ai au moins quatre questions à poser. Ma première question est celle-ci: Pourquoi, à votre avis, les provinces s'inquiètent-elles de la participation du gouvernement fédéral au processus d'évaluation environnementale?

Ma deuxième question: À votre avis, la participation fédérale-provinciale à la gestion de l'habitat du fédéral entraînerait-elle des retards et des incertitudes?

Troisièmement, quelle initiative votre organisation a-t-elle prise pour travailler directement avec le secteur minier ou l'industrie et les organismes fédéraux de réglementation afin de trouver des solutions à vos préoccupations?

Quatrièmement, avez-vous des suggestions quant à ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour réduire l'incertitude et les retards tout en assurant le maintien de normes élevées de protection environnementale?

M. Kennett: Ces questions s'adressent-elles à moi ou à Franklin, ou aux deux?

Mme Cowling: À vous deux. Je voudrais que vous me répondiez tous les deux.

M. Gertler: La question omnibus est toujours une bonne technique. La présidence ne peut pas vous interrompre quand vous posez quatre questions d'un seul coup. Je vais m'en rappeler.

Je vais répondre à vos questions. Je ne suis pas sûr d'accepter toutes les prémisses sur lesquelles vous les avez fondées.

Comme nous l'avons dit, nous ne pensons pas que les plaintes relativement au double emploi et au chevauchement - ces deux termes me semblent d'ailleurs parfois synonymes, ce qui est plutôt ironique - s'appuient sur des faits. En fait, de façon générale, en matière de réglementation environnementale au Canada, soit les règlements ne sont pas assez sévères, soit ils ne sont pas appliqués assez rigoureusement.

Quand on voit ce qui se passe, avec la ruée vers les diamants dans les Territoires du Nord-Ouest et la guerre qui se joue à coup de milliards de dollars pour acheter le droit d'exploiter Voisey Bay, je ne crois pas que le secteur minier soit étouffé sous la réglementation au Canada, mais si quelqu'un a la preuve du contraire, j'aimerais bien l'avoir.

Pourquoi le rôle joué par le gouvernement fédéral en ce qui concerne l'EE inquiète-t-il les provinces - c'est votre première question?

Mme Cowling: Oui.

M. Gertler: C'est une question importante qui ne date pas d'hier. Dans certains cas, j'imagine qu'on craint de voir le gouvernement fédéral prendre la direction des choses, imposer ses normes et peut-être également s'approprier le programme économique pour tirer un plus grand crédit politique de son souci de l'environnement.

.1215

Si la législation fédérale est nécessaire, c'est que ces domaines relèvent de la responsabilité et des décisions fédérales. Nous ne voulons pas reprendre toute la discussion sur la légitimité de l'évaluation environnementale fédérale. C'est un rôle distinct, un rôle indépendamment légitime et qui repose sur de solides bases constitutionnelles.

Il est certain que très souvent la législation fédérale représente une amélioration des normes. On peut citer le cas du Québec à titre d'exemple. Comme je l'ai dit, la législation fédérale a finalement convaincu le Québec d'exiger une évaluation environnementale pour les projets du secteur privé.

Il y a un autre aspect du système fédéral que certaines provinces ont peut-être du mal à avaler: il s'agit du financement d'interventions qui met tous les intervenants sur un pied d'égalité et facilite la participation des groupes intéressés tout en assurant la qualité de cette participation. Lorsque les groupes sont bien financés, nous pensons que cela permet de mieux cerner les problèmes, et d'agir sur le plan scientifique au lieu de se contenter d'une action d'obstruction des projets.

Dans votre seconde question, vous avez parlé de l'«habitat du fédéral» et des délais et des incertitudes; est-ce que vous faisiez allusion à l'habitat du poisson...

Mme Cowling: Oui.

M. Gertler: ...ou bien à l'habitat en général?

Je ne veux pas trop revenir sur cette question, car nous en parlons beaucoup dans notre résumé et je peux également vous donner un exemplaire de notre mémoire.

Nous pensons que Pêches et Océans a du travail à faire sur le plan de la réglementation pour que l'administration de l'article 35 n'exige plus autant de décisions au cas par cas. Il ne s'agit pas seulement de l'article 35, mais également de l'article 37 qui porte sur les informations nécessaires et sur les pouvoirs de modifier un projet si bien que, quand le moment arrive de passer à l'article 35, le travail est déjà fait. Autrement dit, en considérant ces dispositions comme un régime de planification, on avancerait plus rapidement et on aurait une meilleure idée du moment où l'évaluation environnementale serait déclenchée.

En ce qui concerne la coopération avec le secteur minier, notre groupe n'a rien fait d'explicite, je dois le dire, mais depuis des années, j'ai pour collègue Justyna Lauri-Lean, qui représente l'Association minière. Je crois qu'elle a comparu devant ce comité avec M. Miller. J'ai d'excellents contacts avec elle, nous travaillons bien ensemble.

Si j'ai bien compris son programme, l'Association minière recherche plus de certitude et de rigueur et, dans de nombreux cas, surtout lorsque des intérêts miniers considérables sont en cause, on préférerait une plus grande uniformité fédérale dans la réglementation. En effet, ses intérêts miniers s'étendent sur plusieurs juridictions, et ils auraient tout intérêt à supprimer les multiples compartiments de la réglementation provinciale.

Nous avons énoncé assez sommairement les mesures qui pourraient être prises pour réduire les incertitudes et les délais en ce qui concerne l'évaluation environnementale et la protection de l'habitat, mais je préfère en rester là pour l'instant.

M. Kennett: Deux mots seulement, après quoi nous pourrons passer aux autres questions.

En ce qui concerne les aspects de l'évaluation environnementale qui préoccupent les provinces et l'industrie, il y a certainement le caractère imprévisible du processus réglementaire qui provoque des délais imprévisibles. Dans l'ensemble, j'ai l'impression que c'est la principale source de préoccupation en ce qui concerne la réglementation.

En fait, ce n'est pas une question de coût, et de toute façon, surtout dans le cas d'un grand projet, les coûts de l'évaluation environnementale seraient minimes comparés aux coûts d'un retard de six mois ou d'un an.

Comme Franklin vous l'a dit, ce qui inquiète les provinces, c'est en partie les ajustements qui sont nécessaires lorsqu'on met en place un instrument comme la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Au fur et à mesure que les choses se préciseront, que des accords bilatéraux seront négociés, lorsqu'on connaîtra mieux les délais, peut-être, j'imagine que les préoccupations s'atténueront.

À propos de nos propres groupes: comme je l'ai dit, le groupe pour lequel je travaille n'est pas un groupe de défense des intérêts. Nous ne défendons ni l'environnement, ni l'industrie. Au cours de l'année qui vient de s'écouler, nous avons publié un guide exhaustif sur le droit minier canadien. Nous préparons des commentaires, comme l'article que je vous ai apporté, pour essayer d'encourager le débat sur la politique. Voilà notre mode de coopération, si on peut dire, de communication.

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Mme Cowling: J'aimerais faire une dernière observation, en guise de conclusion.

Le président: Oui, très rapidement.

Mme Cowling: Je tiens à vous assurer à tous deux que ce gouvernement écoute le public dans le cadre d'un processus de consultation, que nous faisons notre travail et que nous sommes loin d'ignorer les gens que nous représentons.

Le président: Monsieur Reed.

M. Reed (Halton - Peel): Merci, monsieur le président. Pour gagner du temps, et également parce que nous devons commencer à avoir faim, je serai le plus bref possible.

Monsieur Gertler, je tiens à vous dire tout de suite que vous et moi sommes d'accord au moins sur une chose, il s'agit du caractère indispensable de la réglementation prévue par la Loi sur les pêches. S'il y a une chose que mes relations avec le gouvernement m'ont appris, c'est qu'en l'absence de règlements, en l'absence de règles du jeu, toute interprétation devient très subjective.

Dans certains cas, cela dépend des personnes impliquées, cela provoque de véritables crises qui n'auraient pas existé autrement. Par exemple, lorsqu'un promoteur d'un projet commence à faire des démarches, par exemple s'il s'agit de terrains de la Couronne, il peut fort bien entrer en conflit avec des personnes dont le principal but est de garder leur emploi, ce qui provoque une crise de toutes pièces. Dans une autre région, des circonstances absolument identiques pourraient conduire à une opinion totalement contraire.

Autrement dit, il importe d'introduire le plus d'objectivité possible dans un processus qui tient souvent, surtout dans le cas des pêches, de l'alchimie autant que de la science. Bref, il faut coucher sur le papier quelque chose de raisonnablement clair. En Ontario, on a assisté à des évaluations environnementales par catégorie. Une sur les petits barrages, par exemple, et également sur la foresterie. Je ne sais pas ce qui se passe dans les autres provinces.

J'ai une question à vous poser. Trois éléments sont mis en relief dans votre brochure, et vous parlez de l'accès du public à une justice environnementale. Pourriez-vous développer cette idée? En Ontario, à l'heure actuelle, n'importe quel citoyen peut interrompre un projet. Cela pourrait être très coûteux pour le promoteur mais s'il s'avère que l'accusation a été portée à la légère, le citoyen qui a porté l'accusation n'a aucune obligation financière. Quel rapport établissez-vous entre cette situation et votre objectif d'accès du public à une justice environnementale?

M. Gertler: Je veux commencer par revenir à votre introduction. Vous avez raison, nous sommes d'accord, mais je précise qu'il n'est pas toujours possible d'être objectif, aussi extraordinaire que soit le texte. Il y a des limites, à la fois littéraires et scientifiques, à cette objectivité.

La complexité des problèmes est telle qu'on sera forcé d'exercer une certaine discrétion, mais tout comme vous, nous pensons que cette discrétion doit être aussi structurée que possible, c'est probablement l'élément essentiel. Dans le cas de la plupart des règlements en vertu du paragraphe 35(2), le ministre et ses collaborateurs peuvent toujours se pencher plus particulièrement sur les cas qui exigent un complément d'étude.

Je dois mentionner également, et c'est le corollaire de ce que vous avez dit, que la délégation n'est pas un remède à l'incertitude. Si on veut que quelqu'un fasse le travail, ce n'est pas en faisant appel à différents exécutants qu'on remédiera à l'incertitude. Voilà ce que j'ai voulu dire quand j'ai parlé de faire une distinction entre l'exécution du travail et l'exécutant.

Je ne crois pas que ce soit vraiment le sujet de la séance, mais pour ce qui est de l'accès du public à une justice environnementale, tout d'abord, nous ne parlons pas seulement de poursuites ici. Nous parlons de tout le processus, des audiences publiques aux poursuites, j'imagine. Au Québec, aux termes des lois provinciales, il n'y a pas de poursuites au privé. Les poursuites se font au fédéral. Le procureur général a toujours le pouvoir de suspendre les procédures lorsqu'il s'agit de poursuites au privé.

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Dans l'état actuel des choses, avec l'absence de financement pour les intervenants, l'absence d'aide juridique pou les groupes environnementaux, il n'y a à peu près pas d'accès à une justice environnementale. Nous croyons - et je l'ai dit plus tôt - que la structuration de la participation des groupes environnementaux facilitera autant l'harmonisation que la qualité des décisions qui seront prises. Les gens peuvent faire du piquetage ou dresser un barrage sur une route, ou alors on peut les intégrer dans le processus décisionnel par les mécanismes structurés que nous mettons au point dans nos sociétés démocratiques. Je pense que c'est la raison d'être d'un centre du droit environnemental tel que le nôtre.

Le président: Madame Hickey.

Mme Hickey (St. John's-Est): Monsieur le président, excusez-moi d'être en retard. Je demande également pardon à ces messieurs d'avoir manqué leur exposé. Cependant, il y a une question que j'aimerais...

M. Gertler: Vous entendrez parler de nous dans le The Globe and Mail, j'en ai la certitude.

Mme Hickey: J'espère qu'on n'entendra pas parler de moi, c'est tout.

Je me demandais seulement s'il y en a qui sont favorables à la création d'un programme commun fédéral-provincial-territorial d'évaluation et de gestion de l'environnement.

M. Gertler: Vous parlez d'un système national unique?

Mme Hickey: Oui, parce que pour des projets comme celui de Voisey Bay, s'il existait un mécanisme comme celui-là, le projet de Voisey Bay pourrait commencer beaucoup plus tôt, beaucoup plus vite, et cela créerait plus de travail pour les gens de Terre-Neuve.

M. Gertler: Dans l'état actuel des choses, il n'existe certes aucune initiative visant à créer une structure unique supergouvernementale chargée de faire des évaluations environnementales, si c'est ce à quoi vous songez, même si je sais qu'on a brassé cette idée en vue du premier examen quinquennal de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement qui est à venir. J'en ai entendu parler.

Mais il y a déjà beaucoup de coordination. On pourrait parler de ce qu'on évalue à Voisey Bay, de la question de savoir s'il faut faire une évaluation complète dès maintenant ou s'en tenir seulement aux travaux d'infrastructure et d'accès. Mais hormis cette question, tout semble indiquer que cette évaluation fera l'objet d'une coordination fédérale-provinciale quelconque. Ce serait un cas typique auquel s'appliqueraient la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et les régimes provinciaux. Chose certaine, ce serait une situation très inhabituelle dans notre régime actuel, où l'auteur d'un projet devrait préparer deux évaluations environnementales complètes ou se prêter à deux séries d'audiences complètement séparées.

Il se peut qu'il faille respecter les normes et les exigences réglementaires de plus d'un régime, mais à l'intérieur d'un processus consolidé. Ce qui se passe alors, c'est que toutes les informations sont dévoilées au cours d'une audience publique, ou s'il n'y a pas d'audience publique, tout est dévoilé au cours de la médiation, ou simplement dans le cadre de l'étude exhaustive. Après que toutes les informations ont été réunies et traitées, la décision de donner le feu vert à un projet peut se fonder sur les informations réunies dans le cadre de l'évaluation environnementale commandée par les gouvernements compétents.

Il y a donc une coordination dans le processus, mais elle ne mène pas à une décision unique. Il faut qu'il y ait des décisions séparées, du moins dans le cadre de notre régime actuel.

Mme Hickey: Mais ne croyez-vous pas qu'il faudra y arriver un jour ou l'autre? À l'heure actuelle, nous faisons une évaluation environnementale provinciale et une évaluation environnementale fédérale, ce qui dans certains cas fait double emploi.

M. Gertler: Pour réaliser un tel exploit, à mon avis, il faudrait être un magicien constitutionnel sans pareil. Je pense qu'ici il faudra apprendre à marcher avant de courir. Chose certaine, je serais surpris si cette idée prenait corps dans un avenir rapproché.

Le président: La dernière personne à poser des questions sera M. Stinson, qui brûle d'impatience.

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M. Stinson (Okanagan - Shuswap): En fait, je serais surpris si on ne se précipitait pas sur l'approche à guichet unique.

Monsieur Gertler, vous avez parlé de l'imposition de limites de temps obligatoires. Un des problèmes auxquels fait face le Canada, et ce sur quoi le gouvernement a insisté pendant sa campagne électorale, est la pénurie d'emplois. Nous avons écouté les représentants de l'industrie - et j'ai un grand respect pour les gens qui ont témoigné devant le comité - il semble que ce soit un des obstacles majeurs, surtout dans l'industrie minière. Il n'y a pas de limite de temps. Leurs capitaux et les emplois miniers peuvent être paralysés pendant sept ans, parfois même plus longtemps.

En examinant davantage la réglementation environnementale et ses implications, au niveau tant provincial que fédéral, on s'aperçoit qu'il existe un certain nombre de problèmes en Colombie-Britannique qui ont récemment été relevés par les journaux. Il y a eu, entre autres, le cas de la mine Kemess et le fait que neuf paires de poissons qui n'étaient pas sur la liste des espèces en danger et qui auraient pu être transportés ailleurs - mais le gouvernement fédéral - après que le gouvernement provincial se soit désisté, sous prétexte qu'il n'y avait pas de problème a décidé qu'après tout les neuf paires de poissons constituaient un problème, en dépit du fait qu'ils pouvaient facilement être déplacés ailleurs.

Pourquoi ne restait-il que neuf paires de poissons dans un lac de cette grandeur? Évidemment, quelque chose n'allait pas.

J'aimerais soulever une autre question au sujet des réclamations minières, vues sous l'angle environnemental. On a dit - et j'aimerais connaître votre opinion là-dessus - que lorsque les compagnies minières donnent une garantie, elles doivent trouver l'argent nécessaire au cas où il y aurait plus tard une réclamation au niveau du terrain. À votre avis, est-ce que l'idée de permettre aux compagnies de placer de l'argent dans un compte REER a du mérite, puisqu'elles ne seraient pas pénalisées au niveau de l'impôt pour la période de temps nécessaire? Cela pourrait-il faire partie de la solution?

M. Gertler: Pour ce qui est des limites de temps, je ne suis pas un expert en ce qui concerne les problèmes de l'industrie minière. Mais cela m'étonnerait que les retards soient tous imputables aux règlements environnementaux. Cela m'étonnerait également d'apprendre que les capitaux autrement destinés à être investis dans de bons projets soient investis à l'étranger à cause de nos règlements environnementaux.

Comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, la question des retards est quelque peu une voie à deux sens. Si les parties intéressées font leur possible pour communiquer avec le gouvernement au début du processus, et non après avoir effectué le travail de conception et après avoir réglé la question du financement, mais dès que l'idée se présente à leur esprit - je sais qu'il existe des problèmes au niveau du secret commercial - mais si les compagnies communiquent avec le gouvernement avec le plus de renseignements possible, l'évaluation environnementale leur posera moins de problème.

En revanche, le gouvernement devrait pouvoir garantir certains échéanciers, sauf dans des cas où c'est vraiment nécessaire de les reporter. Mais le gouvernement devrait vraiment clarifier certaines étapes du processus, notamment les règlements en vertu de la Loi sur les pêches.

Donc, c'est une voie à deux sens, et il faut reconnaître que l'évaluation environnementale et d'autres processus connexes ne représentent pas simplement un feu vert automatique, mais plutôt un dialogue réel entre l'industrie et le gouvernement. Les discussions devraient commercer dès le début, plutôt qu'à la fin, et le gouvernement devrait faire son travail de façon efficace et efficiente.

Pour ce qui est des réclamations, ce n'est pas vraiment la position que nous avons prise. Mais pour répondre à votre question, c'est une excellente idée que de mettre de l'argent de côté pour composer avec le déclassement d'une mine après sa fermeture. En fait, cette approche est nécessaire. C'est notamment un des aspects intéressants de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Elle stipule qu'il faut également évaluer, dès le départ, la fermeture d'une mine.

Pour ce qui est de l'exploitation minière, il faut employer évidemment la méthode de la capitalisation du coût entier.

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On pourrait certes étudier la nécessité d'offrir une dépense fiscale ou un avantage fiscal. Cependant, il faut comprendre qu'essentiellement vous demandez aux contribuables d'assumer le coût total de l'exploitation. La solution idéale serait de tenir compte de ce coût dans l'évaluation globale de la rentabilité du projet; autrement dit, il ne faut pas considérer les questions environnementales comme des facteurs externes, et il ne faut pas non plus demander au secteur public d'offrir des avantages fiscaux pour assurer la rentabilité du projet. On pourrait alors se demander tout simplement si le projet lui-même est rentable.

M. Stinson: Étant donné que des emplois vont disparaître, qu'est-ce que vous préconisez? Il faut comprendre que nos concurrents ne sont pas dans les autres provinces mais à l'échelle internationale. Lorsque les représentants d'une compagnie vous disent qu'ils considèrent un projet rentable et qu'ils sont prêts à y investir 700 millions de dollars, vous les remerciez mais devez aussi leur expliquer qu'ils sont obligés d'investir encore 600 millions de dollars pour la remise en état des terres, qu'ils doivent payer les impôts correspondants, et qu'ils auront les mains liées pendant sept ans en attendant les résultats de l'évaluation environnementale. Il se peut aussi que les règles changent après l'investissement initial. Je ne sais pas comment vous arriverez à convaincre un investisseur potentiel d'accepter ces conditions. Franchement, je ne sais pas.

M. Gertler: Mais est-ce que vos chiffres sont corrects? On dirait que la remise en état coûtera plus cher que le développement.

Je ne sais pas. Je ne peux pas vous donner de réponse à ce sujet.

Pour ce qui est des emplois, il faut se demander si l'investissement minier, qui est à fort coefficient de capitaux par rapport à d'autres investissements, est la façon la plus efficace de créer des emplois au Canada. C'est une question que vous devez étudier. Vous devez comparer ce secteur avec d'autres activités comme la pêche commerciale, autochtone et sportive ainsi que d'autres exemples de développement durable. C'est là où il faut faire le travail de front. Il me semble que les hypothèses de base sont peut-être contestables.

Le président: En guise de conclusion, j'aimerais en revenir à certains des points qu'a soulevés M. Stinson. Vu ses efforts constants pour démontrer le succès du gouvernement dans le domaine de la création d'emplois, je sais qu'il me remerciera de mes commentaires.

J'ai lu dans un communiqué de presse portant sur une enquête au sujet des dépenses au chapitre de l'exploration minérale au Canada, qu'en 1996 l'exploration minérale non pétrolière s'élèvera à 945 millions de dollars. Cela représente une augmentation de 24 p. 100 en un an, soit plus que le double du niveau d'investissement enregistré depuis que le gouvernement actuel est arrivé au pouvoir.

Monsieur Stinson, je savais que vous aimeriez avoir ces renseignements.

Sur un autre sujet, j'aimerais en revenir à ce qu'on disait au sujet de la traduction. Votre mémoire a été soumis au ministère des Pêches et des Océans, et je crois qu'on a décidé que ce dernier s'occuperait de la traduction. Ils sont en train de la faire, et une fois le mémoire traduit on le fera parvenir à tous les membres du comité. Je crois que c'est la façon dont on a procédé.

M. Gertler: C'est exact, monsieur le président. Je ne cherchais à diffamer personne. Le ministère des Pêches et des Océans a pris l'initiative d'aider ceux qui veulent exprimer leur opinion à participer au processus. On a préparé une traduction. Nous avons dit tout simplement que le document est assez volumineux et que si l'on ne nous affecte pas les fonds nécessaires pour examiner la traduction, nous ne serons pas en mesure d'en garantir la qualité, ce que nous aimerions pouvoir faire.

Le président: Nous veillerons à ce qu'on vous fasse parvenir un exemplaire du document traduit.

[Français]

M. Deshaies: Vous auriez pu livrer le document en français au ministère. Le ministère l'aurait fait traduire et tout le monde aurait été content.

[Traduction]

Le président: La séance est levée jusqu'à 15 h 30 demain. Nous siégerons alors en séance conjointe avec le Comité de l'environnement. Merci.

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