[Enregistrement électronique]
Le mercredi 27 novembre 1996
[Traduction]
Le président: Je déclare la séance ouverte. Bienvenue à tout le monde.
Le comité des ressources naturelles poursuit son étude du développement rural. Nous allons entendre aujourd'hui la Canadian Co-operative Association. Nos témoins sont Lynden Hillier et Mme MacKinnon.
Bienvenue. Vous pourriez peut-être commencer par nous faire un rapide exposé, d'une dizaine de minutes, et les membres du comité vous poseront ensuite des questions. Vous avez la parole.
Lynden Hillier (directeur exécutif, Canadian Co-operative Association): Je vous prie d'excuser M. Turner, le président de notre conseil d'administration, qui n'a pas pu venir aujourd'hui en raison de changements de dernière minute. Je suis le directeur exécutif de la Canadian Co-operative Association, et je vais le remplacer.
Je tiens à vous remercier au nom de la Canadian Co-operative Association de nous donner l'occasion aujourd'hui de prendre part à cette table ronde sur le développement économique rural. Ma collègue, Mary Pat MacKinnon, directrice des affaires gouvernementales au sein de notre organisation, va m'assister.
Nous nous félicitons que votre comité ait entrepris une étude aussi importante pour nos collectivités au Canada. Je suis moi-même né et j'ai été élevé dans une petite localité rurale du sud de la Saskatchewan. J'ai fini par venir habiter dans cette ville, mais j'ai encore une grande partie de ma famille qui habite à la campagne, et je suis bien conscient des problèmes que rencontrent les collectivités rurales dans notre pays.
La Canadian Co-operative Association est l'association professionnelle nationale qui représente les coopératives et les caisses de crédit qui appartiennent avant tout au monde anglophone du Canada. Nous avons pour mandat de promouvoir et d'encourager le développement des coopératives ici même au Canada et aussi, avec l'aide de l'Agence canadienne de développement international, dans plusieurs pays en développement.
Tout en offrant à nos membres un cadre leur permettant de défendre strictement leurs propres intérêts dans le monde des affaires, nous leur ouvrons par ailleurs des perspectives plus larges sur les questions sociales et économiques. Cette orientation est conforme à la philosophie des coopératives, qui cherche à concilier et à intégrer les préoccupations économiques et sociales.
[Français]
Nous avons une très bonne relation de travail avec nos collègues francophones du Conseil canadien de la coopération. Nous avons beaucoup d'occasions de travailler ensemble sur plusieurs projets. Nos deux organisations représentent 10 000 organisations coopératives au Canada. Ces organisations ont des actifs de plus de 120 milliards de dollars.
Nous avons plus de 14 millions de membres et 133 000 employés. Soixante-six mille personnes sont impliquées comme membres des conseils d'administration des organisations coopératives. Nos membres sont les organisations centrales. Nous comptons 37 membres au Canada.
Nos membres sont impliqués dans les secteurs suivants: les services financiers, les coopératives de consommation, les coopératives d'agriculture et d'alimentation, la foresterie, les technologies, les coopératives de travailleurs et travailleuses, les coopératives de santé, des garderies et beaucoup d'autres types de coopératives.
Les organisations coopératives au Canada sont impliquées dans les régions rurales et urbaines. Notre niveau d'activité dans les domaines ruraux est très grand.
[Traduction]
Souvenez-vous qu'en juin, Michel Paulin, le directeur général de L'alliance des caisses populaires d'Ontario Ltée, a comparu devant votre comité au nom de la Centrale des caisses de crédit du Canada pour vous faire part du point de vue des coopératives financières en matière d'investissement et de développement rural. Les organisations membres de la CCA appartiennent à toute une gamme de secteurs ayant un intérêt particulier pour le développement économique rural.
Les coopératives contribuent activement au développement économique de leur collectivité. Les bénéfices que font les coopératives et les caisses de crédit sont réinvestis dans leur collectivité au moyen d'une redistribution aux membres qui en sont les clients selon l'usage qu'ils font de l'organisation coopérative.
Les projets novateurs entrepris par les coopératives sont nombreux. Ainsi, l'Alberta Honey Producers Co-operative Ltd. commercialise depuis 1940 du miel pour le compte des producteurs qui en sont membres. En 1994, cette coopérative a mis sur pied une entreprise à valeur ajoutée qui se charge de transformer et de commercialiser la cire des producteurs. Western Wax Works, une filiale de l'Alberta Honey Producers Co-operative, a la seule usine de transformation de cire au Canada. L'Alberta Honey Producers Co-operative a un chiffre d'affaires de 12 millions de dollars et emploie une quarantaine de personnes.
En Nouvelle-Écosse, Chéticamp Coop Ltd., une coopérative de consommateurs, a récemment fait l'achat d'une maison funéraire locale qui était à vendre. Cette coopérative a gardé les employés locaux et continue à offrir des services funéraires à la collectivité. La grande différence, c'est que désormais cette maison funéraire est possédée et supervisée par les membres de la coopérative de Chéticamp.
Certaines caisses de crédit ont déjà constitué ou sont sur le point de constituer des entreprises en coparticipation avec des organismes du gouvernement telles que la Banque de développement du Canada, la Société pour l'expansion des exportations ou la Société d'aide au développement des collectivités. Les centrales provinciales de caisses de crédit ont fait les premiers pas en vue de constituer une alliance stratégique avec la Banque de développement du Canada de manière à pouvoir dispenser des services financiers aux petites entreprises du secteur du détail, du commerce de gros, de la fabrication, de la transformation et des services. Nombre d'entreprises qui seront les bénéficiaires de cette alliance sont implantées dans les localités rurales du Canada.
Pour garantir la viabilité économique des localités, il faut absolument constituer des partenariats avec les principales parties prenantes - les gens qui habitent et qui travaillent sur place. Les membres des coopératives et des caisses de crédit vivent au sein de la collectivité et ont intérêt à ce qu'elles soient florissantes. Les coopératives n'ont ni la possibilité, ni l'envie de se réinstaller à l'étranger pour réaliser des économies et abaisser leurs coûts de production.
Nombre de pays de l'OCDE, le Canada y compris, s'intéressent de plus en plus aux nouvelles façons de dispenser des services. L'effet de ces changements peut être bien plus grand dans les petites localités qui dépendent de ces services. En proie à de lourdes compressions budgétaires, plusieurs ministères du gouvernement ont recours à la facturation du coût des services et à différents mécanismes de recouvrement des coûts pour continuer à dispenser ces services. Ainsi, Agriculture Canada envisage de doubler le montant des recettes qu'il tire des frais imposés à l'industrie au titre des services fournis, le total devant se monter à quelque 87 millions de dollars en 1997-1998. En bout de chaîne, ces coûts sont répercutés sur les producteurs primaires, et certains de ces frais vont rendre les exportateurs canadiens moins concurrentiels.
C'est ainsi que la politique de recouvrement des coûts de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire inquiète fortement les milieux agricoles. Les producteurs ont accepté le principe d'un certain recouvrement des coûts, à condition qu'il s'accompagne de la mise en oeuvre d'un système plus efficace. L'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire a établi son budget, déterminé le niveau de ses services et fixé le montant du recouvrement de ses coûts sans tenir vraiment compte des besoins de l'agriculture.
Les études d'impact sur les entreprises et dans le monde agricole nous révèlent que la politique de recouvrement des coûts pourrait coûter la première année jusqu'à 30 millions de dollars aux agriculteurs. Il pourrait en outre s'ensuivre une baisse de 21 à 29 p. 100 du niveau de protection actuel des cultures. On n'a pas vraiment cherché à oeuvrer de concert avec l'industrie pour réduire les coûts, augmenter l'efficacité des systèmes et établir des mécanismes de contrôle des performances. Il faut que le gouvernement collabore avec le secteur concerné lorsqu'il s'agit de mettre sur pied des mécanismes de recouvrement des coûts si l'on ne veut pas que les effets soient préjudiciables, non seulement à l'agriculture, mais aussi au développement économique. Il va sans dire que les répercussions sur les campagnes canadiennes seraient négatives.
Le modèle des coopératives offre un excellent moyen de dispenser des services publics - c'est un modèle qui permet de rendre directement des comptes à ses utilisateurs tout en étant accessible et d'un coût abordable. La Canadian Co-operative Association, le Conseil canadien de la coopération et l'Institut d'administration publique du Canada ont mis au point un projet de recherche et d'expérimentation visant à justifier et à promouvoir le modèle coopératif pour ce qui est de la fourniture des services publics. Ce projet est actuellement déposé devant le Conseil du Trésor, le secrétariat des coopératives d'Agriculture Canada et plusieurs gouvernements provinciaux. Grâce à ce projet, nous espérons apporter la preuve que le modèle coopératif peut se substituer avec bonheur à la privatisation, la collectivité étant en mesure d'exercer un contrôle et de rendre des comptes.
La CCA invite votre comité à recommander un plan stratégique de développement économique des collectivités rurales faisant appel à des stratégies coopératives pour les besoins du développement économique et social de nos campagnes. La CCA a conçu et distribué à l'intention de toutes les organisations qui en sont membres un document de discussion en matière économique dans le but d'élaborer une position commune pour l'ensemble du secteur. Nous sommes convaincus que le secteur coopératif a une façon tout à fait originale d'envisager le développement économique, et les membres de la CCA s'efforcent de donner corps à ce projet.
La CCA a un représentant au sein du programme national d'accès des collectivités. Nous appuyons résolument le travail qui s'est fait pour garantir aux collectivités rurales un accès à la nouvelle technologie par l'intermédiaire du réseau scolaire canadien et d'autres programmes d'accès.
J'ai cité précédemment d'autres exemples de modèles de développement coopératif novateurs. Il faut aussi parler de la nouvelle génération de coopératives qui est apparue ces dernières années dans le nord des États-Unis et qui essaime dans les provinces de l'Ouest et en Ontario. Ces nouvelles coopératives s'intéressent avant tout au secteur de la transformation agricole à valeur ajoutée et, en se dotant d'une nouvelle assise industrielle, ces coopératives ont par ailleurs créé des marchés intérieurs viables pour leurs produits et leurs services.
En Saskatchewan, le Conseil régional de la CCA s'est réuni au début février pour discuter des possibilités offertes par les coopératives en matière de développement économique. Le bureau régional de la CCA dans la région de l'Atlantique du Canada, qui s'intitule Centre de développement coopératif régional, a récemment entamé un dialogue sur les moyens d'impulser le développement économique dans les collectivités locales grâce à des approches coopératives.
Le conseil régional de la CCA en Colombie-Britannique a récemment publié un rapport intitulé Solutions 2000, qui souligne l'intérêt des projets coopératifs en matière d'emploi, d'économie et de développement des collectivités en Colombie-Britannique. Il faut des collectivités locales dynamiques et florissantes pour que le secteur canadien des coopératives et des caisses de crédit puisse prospérer.
Pour terminer, je tiens à profiter de cette occasion pour féliciter le gouvernement de s'être engagé à déposer une nouvelle Loi sur les associations coopératives du Canada, loi qui s'applique aux coopératives régies par le gouvernement fédéral au Canada. Ces nouvelles dispositions vous donneront les moyens et le cadre légal indispensables au maintien de la croissance du secteur des coopératives, ce qui renforcera l'économie de nombreuses collectivités rurales de notre pays.
Je vous remercie.
Le président: Merci.
[Français]
Monsieur Deshaies.
M. Deshaies (Abitibi): Je connais un peu le mouvement coopératif, ayant moi-même été directeur général d'une coopérative durant un certain temps. Vous avez parlé d'une solution pour contrer un peu la privatisation des services publics. Pouvez-vous élaborer sur un exemple ou un modèle de cette privatisation?
[Traduction]
M. Hillier: Oui, j'ai pris connaissance en janvier dernier de l'exemple de Montréal. Il y a dans cette ville une coopérative d'ambulances qui est structurée comme une coopérative ouvrière. Cette coopérative d'ambulances fournit un excellent service ambulancier à différentes localités de la région de Montréal. D'ailleurs cette coopérative d'ambulances de Montréal a essaimé dernièrement à Hamilton grâce à un groupe de gens qui souhaitaient continuer à fournir un service ambulancier de qualité à Hamilton en établissant une coopérative dont les propriétaires étaient les conducteurs d'ambulance eux-mêmes. Voilà un exemple que je puis vous citer.
[Français]
M. Deshaies: Le système d'ambulanciers au Québec est composé de plusieurs groupes qui se sont associés à cette fin. En général, en ce qui a trait au mouvement coopératifs, les gens perçoivent qu'ils peuvent faire le travail à moindre coût. L'objectif en soi n'est pas de le faire à moindre coût, mais de le faire de manière qu'il rapporte plus aux gens.
Le projet dont vous nous avez parlé se veut-il un projet offrant une meilleure qualité de services à moindre coût?
[Traduction]
M. Hillier: Non. Je pense que c'est pour les deux à la fois. Ils sont évidemment motivés par la volonté de maintenir certains emplois. Je pense que c'est la motivation au départ en ce qui les concerne, mais nous disons toujours par ailleurs que le modèle coopératif doit tenir compte des besoins de la collectivité. Par l'intermédiaire de la structure de ses membres et de celle de son conseil d'administration, elle est aussi en mesure de rendre des comptes à la collectivité et aux usagers du service.
Je reconnais que dans le cas d'une coopérative de conducteurs d'ambulance, on s'éloigne quelque peu des usagers effectifs du service, mais si l'on oublie le service d'ambulance pour prendre le cas, par exemple, des services communautaires de soins de santé, on peut entrevoir un système communautaire structuré comme une coopérative dans lequel les patients d'un centre de santé en sont effectivement les membres et participent à l'administration de ce centre de soins de santé.
Il en résulte finalement un modèle de responsabilité qui rend des comptes à la collectivité et aux usagers du service. Grâce à ce mécanisme, on peut offrir un service de meilleure qualité parce ce que l'on fait de l'éducation en incitant davantage les gens à s'occuper activement de leur santé plutôt que de réagir après coup. On pourrait développer la même argumentation dans d'autres secteurs tels que les services de garde d'enfants, par exemple.
M. Deshaies: J'aimerais vous poser rapidement une autre question. Vous nous avez parlé de la création d'une nouvelle coopérative aux États-Unis, qui s'occupe de transformation de produits agricoles à valeur ajoutée. Pourriez-vous nous en dire davantage?
M. Hillier: C'est quelque chose qui prend de l'ampleur au Minnesota, dans le Dakota du Nord et le Dakota du Sud, et dans toute la région environnante, les producteurs prenant une participation significative dans le capital d'une installation de transformation à valeur ajoutée au sein de la collectivité. Cette participation en capital faite par les producteurs leur donne le droit de livrer chaque année une certaine partie de leur production, ce qui garantit ainsi un marché aux producteurs tout en leur permettant par ailleurs d'implanter une installation de transformation à valeur ajoutée dans la collectivité rurale, procurant ainsi des emplois et augmentant la valeur des matières premières qui sont produites par la collectivité.
On en voit un certain nombre d'exemples dans le nord et le centre des États-Unis et plusieurs colloques ont été organisés en Saskatchewan, en Ontario et au Manitoba pour envisager éventuellement l'adaptation de ce modèle dans notre pays.
M. Deshaies: C'est un modèle dans le cadre duquel un contrat est passé entre une localité rurale et une petite ou une grande ville qui fait que la production de ces milieux ruraux est vendue directement à des grossistes ou à des magasins.
M. Hillier: Ce modèle porte aussi sur la transformation et sur la commercialisation, de sorte que des accords de commercialisation sont passés aussi bien pour alimenter des marchés intérieurs que des marchés internationaux. Je pense que pour l'instant il s'agit en majorité du marché intérieur.
Mary Pat MacKinnon (directrice des politiques, Canadian Co-operative Association): J'aimerais ajouter que ce qui distingue cette nouvelle génération de coopératives, c'est le principe qui régit les droits de livraison de la production. Des producteurs individuels se regroupent pour constituer cette nouvelle coopérative et ils prennent une participation en capital. Cela s'apparente à une réciprocité. Ils prennent une participation dans le capital mais ils ont le droit et l'obligation de livrer une certaine quantité de produits à la coopérative, qui leur apporte alors une valeur ajoutée, qu'il s'agisse, par exemple, de la transformation de fruits en conserves ou en confitures... Ce qui est nouveau, c'est le principe des droits de livraison de la production, principe légèrement différent du fonctionnement normal des coopératives agricoles.
M. Deshaies: N'y a-t-il pas un problème pour fixer les prix?
Mme MacKinnon: Non. Par droit de livraison on entend pour eux l'obligation de livrer telle quantité de produit à la coopérative. La coopérative est alors assurée d'avoir les quantités nécessaires pour pouvoir alimenter en produits transformés les marchés qu'elle est en train de se constituer.
M. Deshaies: Je vous remercie.
Le président: Monsieur Chatters.
M. Chatters (Athabasca): Merci, monsieur le président.
Vous nous avez de toute évidence donné dans votre exposé un excellent aperçu du mouvement coopératif et de son intérêt. Je reconnais tout à fait l'intérêt du mouvement coopératif. J'appartiens au monde agricole, j'ai fait partie pendant longtemps de nombreuses coopératives et je les connais bien.
Toutefois, nous nous demandons ici comment favoriser le développement économique rural et je n'ai pas encore compris en quoi votre exposé répondait à cet objectif.
Vous nous avez bien parlé de la facturation des usagers et des problèmes posés, par exemple, par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, qui répercute les coûts découlant de sa politique de recouvrement. Je me demande si vous proposez que ces coûts - ou que ce type de service - soient assumés par une coopérative locale plutôt que par un organisme national. J'aimerais bien savoir ce que vous proposez au juste. J'aimerais éventuellement que vous précisiez ce que vous attendez du gouvernement fédéral pour ce qui est de favoriser le développement économique rural.
M. Hillier: En ce qui a trait à l'organisme de réglementation de la lutte antiparasitaire, nous ne faisons que refléter le point de vue de nos membres du secteur agricole. Ils ne sont pas opposés à la facturation du coût du service, mais ils veulent effectivement participer davantage à la définition du service et au partage des coûts. Je voulais simplement que ce soit clair.
M. Chatters: Toutefois, quel est le lien avec le mouvement coopératif? Vous ne proposez pas que ce service soit dispensé par une coopérative locale, n'est-ce pas?
M. Hillier: Non. Nous nous référons aux producteurs individuels qui sont membres de la coopérative dans ce cas particulier. Les frais qui sont facturés sont assumés par les membres et affectent la compétitivité des producteurs des collectivités rurales du Canada. Nous disons simplement...
M. Chatters: Vous préconisez donc en substance le maintien de la politique de recouvrement des coûts du gouvernement au titre de ce service.
M. Hillier: Nous n'y voyons aucun inconvénient, mais nous voulons participer davantage et les coopératives sont disposées à participer au nom des producteurs qui en sont membres.
M. Chatters: Très bien, je comprends.
Vous avez proposé dans votre exposé que le gouvernement fédéral, par l'intermédiaire du mouvement coopératif, je présume, puisse prendre part au développement économique rural.
M. Hillier: C'est exact.
M. Chatters: Je ne comprends toujours pas par quels moyens.
M. Hillier: Nous avons cherché dans notre exposé à vous donner une idée de la portée des activités commerciales des coopératives au Canada et du caractère novateur de certains projets coopératifs lorsqu'il s'agit par exemple de trouver d'autres façons de dispenser des services publics dans le secteur de la santé et dans toutes sortes d'autres secteurs... c'est la nouvelle génération de coopératives. Nous nous sommes efforcés de vous donner un certain nombre d'exemples novateurs dans ces domaines.
Ce que nous demandons à votre comité, c'est d'inclure une stratégie coopérative dans vos propositions sur le développement économique rural au Canada étant donné que les coopératives et les caisses de crédit sont très impliquées dans nombre de collectivités rurales du pays. Bien souvent, ce sont les seuls établissements financiers ou les seuls magasins de détail que l'on y trouve. Elles ne peuvent pas quitter la localité parce que leurs profits sont en baisse et aller ailleurs pour les améliorer pour la simple raison qu'elles ont pour raison d'être d'opérer au sein de la collectivité et de servir les membres de celle-ci ainsi que leurs propres membres. Nous voulons nous assurer que dans les directives qui seront présentées en fin de compte par votre comité en vue d'assurer le développement rural il y ait une orientation stratégique concernant le rôle devant être joué par les coopératives pour les besoins du développement rural au Canada.
M. Chatters: Vous entendez par «principes coopératifs», le principe qui veut que les usagers du service possèdent leur propre service de livraison. C'est de ce principe que vous nous parlez.
M. Hillier: Ce sont les usagers du service qui possèdent la coopérative et qui participent à ses activités. S'il s'agit d'une production agricole, oui, cela s'étend à la livraison. Dans d'autres cas, c'est la consommation d'un service financier ou d'un bien de consommation. Nous avons fait allusion à une autre situation ici, celle de la fourniture de services de soins de santé, par exemple. Oui, il s'agit d'un modèle dans lequel les usagers locaux possèdent l'entreprise et participent à ses activités.
M. Chatters: Vous avez aussi fait mention de la nouvelle formule de coopératives qui, aux États-Unis, s'intéressent aux produits agricoles à valeur ajoutée. Je discutais de cette question avec les autres membres du comité pendant que nous parcourions le pays. Bien évidemment, le problème que pose la production agricole à valeur ajoutée au Canada c'est que personne n'a accès aux matières premières. Je veux parler des céréales à l'état brut. On ne peut pas faire du blé soufflé, des Cheerios ou que sais-je encore si l'on ne peut pas se servir de la matière première pour la transformer en produits à valeur ajoutée sans payer à la Commission canadienne du blé les coûts de la manutention dans les silos-élévateurs, qui sont substantiels. C'est une situation tout à fait différente de celle que rencontrent les entreprises aux États-Unis et c'est l'une des principales raisons pour laquelle nous n'avons pas d'industrie de la fabrication des pâtes dans notre pays.
J'aimerais savoir ce que vous préconisez pour que les industries à valeur ajoutée puissent être viables au Canada compte tenu de l'existence de la Commission canadienne du blé.
M. Hillier: Il y a eu, je pense, d'assez nombreuses consultations avec la Commission canadienne du blé et il me semble que l'on a fait un certain nombre de propositions devant permettre de disposer d'une certaine marge de manoeuvre en la matière. Toutefois, dans le cadre du modèle de commercialisation de référence de la production agricole au Canada, nos membres considèrent de manière générale que la Commission canadienne du blé a un rôle à jouer même si certains modèles envisagés en vue de nous doter d'une plus grande marge de manoeuvre prévoient éventuellement certaines possibilités de transformation à valeur ajoutée en dehors de ce cadre.
M. Chatters: Vous voulez parler de la possibilité que quelqu'un puisse avoir accès aux matières premières sans payer ces frais à la Commission canadienne du blé lorsqu'il s'agit d'une production locale à valeur ajoutée?
Mme MacKinnon: Nos membres collaborent avec la Commission canadienne du blé. Les trois syndicats des Prairies, le Syndicat du blé de la Saskatchewan, les Silos-élévateurs du pool du Manitoba et le Syndicat du blé de l'Alberta, ont fait connaître très clairement leur position au sujet de la Commission canadienne du blé. Ils appuient cette dernière. Ils sont prêts à discuter de certains changements susceptibles d'en améliorer l'efficacité, mais ils sont en faveur d'un organisme unique de commercialisation.
Quant à la nouvelle génération de coopératives à laquelle vous vous référez, elle peut se lancer dans toute une gamme de produits qui n'ont absolument rien à voir avec les céréales à la base. En réalité, la plupart d'entre elles s'intéressent davantage à des secteurs comme ceux du bétail, des fruits et des légumes, et non pas à la vente et à la commercialisation du blé et de l'orge.
M. Chatters: Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Reed.
M. Reed (Halton - Peel): Merci, monsieur le président.
Pour que les choses soient bien claires, je ne veux pas soulever de polémiques, mais la Commission du blé est elle-même une coopérative. Pour ce qui est de l'industrie des pâtes au Canada, l'une des entreprises de fabrication de pâtes qui progresse le plus vite au Canada est implantée à moins de cinq milles d'où j'habite. Italpasta y produit des pâtes à pleins camions.
M. Chatters: Je ne pense pas que la Commission du blé soit le bon exemple parce que ce n'est pas une véritable coopérative. Ce n'est toutefois pas le moment d'en discuter.
M. Reed: Elle est recensée dans cette liste comme étant une coopérative.
M. Chatters: Oui.
M. Reed: J'ai une question à vous poser. Elle se rapporte au paragraphe 4 de la page 3. Ce que vous dites dans la dernière phrase du paragraphe 4 pique ma curiosité. Je vous cite: «Les coopératives n'ont ni la possibilité ni l'envie de se réinstaller à l'étranger pour réaliser des économies et abaisser leurs coûts de production.»
Nous savons tous que le mouvement coopératif est international. C'est un projet mondial. On se demande alors, compte tenu du fait que les marchés se mondialisent de plus en plus, pour quelle raison une coopérative ne voudrait pas y participer pour réaliser des économies et abaisser ses coûts de production, conséquence dont on semble reconnaître la réalité ici.
M. Hillier: Les coopératives s'occupent beaucoup d'importation et d'exportation. Toutefois, ce que nous voulons dire dans cette phrase, c'est que les coopératives ou les caisses de crédit locales de la Saskatchewan ou des campagnes de l'Ontario ne peuvent pas fermer leurs portes et aller ailleurs pour exercer leurs activités pour la seule raison qu'elles ne font pas suffisamment de profits au niveau local. Elles ont été créées par des gens de la collectivité pour dispenser des services sur place et faire leur travail, qu'il s'agisse de produire des biens de consommation ou d'exporter les produits de l'agriculture. Il n'en reste pas moins qu'elles ne ferment pas leurs portes pour déménager dans un autre pays.
M. Reed: Je comprends bien. Je pense à une organisation comme celle des Coopératives unies de l'Ontario. C'est devenu, si l'on peut dire, une énorme bureaucratie qui chapeaute différentes organisations. J'imagine que vous adoptez ici un point de vue très local. Toutefois, pour ce qui est du mouvement coopératif lui-même, il m'apparaît tout à fait logique qu'une organisation comme celle des Coopératives unies se mette activement à faire du commerce international pour faire baisser ses coûts, par exemple.
M. Hillier: C'est effectivement ce qu'elle fait.
M. Reed: Très bien.
M. Hillier: Les Coopératives unies font désormais partie de GROWMARK Inc. Elles collaborent avec les Coopératives fédérées de Saskatoon et Coop Atlantique de Moncton, au Nouveau-Brunswick. Elles participent à un mouvement qui s'intitule Coopératives interprovinciales, qui leur procure leur label en tant que coopératives. Elles collaborent au sein d'un groupe pour écouler une partie de leur production au Canada. Une autre partie est par ailleurs importée des États-Unis ou d'autres pays. Sur le même modèle, les syndicats de commercialisation des céréales ont Ex-Can Grain Pool Ltd., qui se charge d'exporter leurs produits dans de nombreux pays.
Ces coopératives sont donc fortement impliquées dans tous ces secteurs. Toutefois, elles ne ferment pas pour autant leurs installations locales. Les installations locales restent dans les régions rurales du Canada, auxquelles elles procurent un service.
M. Reed: J'ai compris. De toute évidence, cette phrase veut mettre en valeur la couleur locale des coopératives.
M. Hillier: En effet.
M. Reed: Merci, monsieur le président.
Le président: Madame Cowling.
Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Merci, monsieur le président.
Je suis originaire d'une petite localité comptant quelque 900 habitants et j'ai participé activement en tant qu'administratrice aux activités du Conseil de notre coopérative locale. Je me souviens qu'à une époque, non seulement le mouvement coopératif exploitait l'épicerie de cette petite ville, mais que c'était en outre à lui qu'il fallait s'adresser si l'on voulait acheter une automobile, de l'essence ou des pièces de rechange. Il desservait en fait l'ensemble de la collectivité.
Ma question a trait au mouvement coopératif. Quelle est la population que vous desservez? Dans la petite localité d'où je viens, il ne reste à présent du mouvement coopératif que l'épicerie. Qu'est devenu ce mouvement et quelle est la population que vous desservez en fait? Est-ce que ce sont de petites localités ou de plus grosses villes à l'heure actuelle?
M. Hillier: Les coopératives desservent principalement les petites et moyennes localités au Canada. Il y a aussi une présence urbaine. Le Mouvement des caisses Desjardins, au Québec, est très présent aussi bien dans les villes que dans les campagnes. La VanCity Credit Union de Vancouver est bien évidemment une grosse coopérative urbaine. Toutefois, le secteur des coopératives dessert principalement les petites et moyennes localités.
Mme Cowling: La Fédération internationale des producteurs agricoles s'est réunie à Québec il y a quelques années et lors de cette assemblée nombre des participants étaient tout à fait convaincus qu'il fallait en revenir au mouvement coopératif à l'échelle internationale. Envisagez-vous la possibilité d'une telle évolution?
M. Hillier: Oui, tout ce que nous venons d'exposer au sujet des coopératives vise en partie à proposer une autre façon de dispenser les services publics. Nous estimons qu'une véritable chance s'offre à nous en ce moment.
Toutes les personnes présentes dans cette salle savent que les gouvernements sont en train de se dégager. Les gouvernements ne peuvent plus s'impliquer comme ils l'ont fait jusqu'ici. En raison du vide laissé par les gouvernements, il faut que les collectivités se fassent davantage confiance à elles-mêmes, et le modèle coopératif revient à s'aider soi-même. Ce sont les gens eux-mêmes qui créent leur propre entreprise pour dispenser des services à la collectivité. Il apparaît donc que c'est la vocation toute trouvée du modèle coopératif dans ce domaine en particulier.
Je m'éloigne peut-être du sujet, mais j'ai assisté la semaine dernière à la publication du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones. Nous avons aujourd'hui, au sein de notre conseil d'administration, un membre inuit de l'île de Baffin. Il a en effet présenté son organisation, Coopératives de l'Arctique, dans les Territoires du Nord-Ouest.
Coopératives de l'Arctique est le principal employeur du secteur privé dans les Territoires du Nord-Ouest, qui dessert 35 collectivités de la région. Je pense donc que dans des régions comme celle-là et dans des secteurs liés à la restructuration des services publics, par exemple, nous avons besoin d'un modèle comme celui des coopératives, dans lequel les gens se prennent eux-mêmes en main, pour véritablement progresser face à des situations qui évoluent.
Mme Cowling: Votre comité envisage certaines solutions pour renouveler les régions rurales du Canada. L'étude que nous faisons nous a permis de constater qu'il y a une quantité de gens très compétents dans les régions canadiennes. Que fait le mouvement coopératif pour promouvoir l'esprit d'entreprise et tirer parti de ces compétences? Est-ce que vous jouez un rôle?
Mme MacKinnon: Nous y participons par l'intermédiaire de notre organisation nationale, la CCA, et par celle de nos organisations régionales. Ces deux dernières années, nous avons mis en application deux projets pilotes, l'un dans l'Est et l'autre dans l'Ouest, afin de promouvoir l'esprit d'entreprise chez les jeunes en collaboration avec Développement des ressources humaines Canada.
En Saskatchewan, on a mis sur pied un projet permettant de prendre en charge des jeunes ayant terminé leurs études, des études postsecondaires dans certains cas, en collaborant avec ces derniers pour mettre sur pied des coopératives de jeunes travailleurs. Il s'agissait d'un projet réalisé sur le terrain. Le bureau de la Saskatchewan de la Canadian Co-operative Association s'est chargé de l'administrer en collaboration avec le Centre d'étude des coopératives et a bénéficié d'un certain financement de DRHC.
On a effectivement donné la possibilité à des jeunes de se pencher sur les conditions devant leur permettre de faire progresser leurs propres entreprises. Un projet très semblable, chapeauté différemment mais toujours placé sous l'égide de DRHC, a été mis en application dans l'ensemble de la région de l'Atlantique du Canada. Deux projets différents, avec celui de Service jeunesse Canada, dont vous avez peut-être entendu parler. L'un porte davantage sur l'esprit d'entreprise et l'autre sur la participation au sein de la collectivité qui permet d'impliquer les jeunes en leur donnant les moyens de travailler dans la collectivité pour l'améliorer et s'améliorer d'eux-mêmes.
Le secteur coopératif s'intéresse beaucoup à toute cette question de l'esprit d'entreprise chez les jeunes. J'ajouterais qu'en plus de ces projets il y a de nombreuses organisations coopératives qui, dans notre pays, collaborent tant avec les gouvernements provinciaux qu'avec les municipalités à des projets comme l'école avant tout ou Choices Canada, qui les amènent à se rendre dans les écoles et à les intéresser aux questions financières. Elles aident les élèves des écoles secondaires à établir une vraie caisse de crédit - ça se passe à Winnipeg - la caisse de crédit locale travaillant en partenariat avec l'école secondaire pour apprendre aux jeunes les techniques de gestion financière.
Coop Atlantique a un programme bien particulier qui lui permet de faire venir les jeunes dans ses magasins coopératifs en fin de semaine pour leur apprendre à connaître les réalités du marché.
Je considère donc que c'est un domaine particulièrement intéressant et que dans ce domaine nous allons continuer à oeuvrer au sein d'un partenariat avec le gouvernement afin de concevoir un certain nombre de modèles novateurs susceptibles d'être reproduits ailleurs.
Nous avons par ailleurs une entente toute nouvelle avec DRHC en matière d'études internationales en entreprises qui va nous permettre, dans le cadre du programme de développement international de la CCA, de placer des jeunes Canadiens ayant terminé leurs études postsecondaires, soit au collège, soit à l'université, dans des coopératives ou des caisses de crédit à l'étranger pour qu'ils y fassent un stage de huit mois. Une fois qu'ils seront rentrés au Canada, nous les aiderons à se trouver un poste dans une coopérative ou une caisse de crédit au Canada.
Voilà donc un exemple récent, un tout nouveau projet passionnant qui s'adresse à la communauté mondiale dont parlait M. Reed et avec laquelle il nous faut d'ailleurs être en contact.
Mme Cowling: Combien de ces jeunes retrouvent en fait leurs racines et retournent dans leur collectivité d'origine lorsqu'ils sont originaires comme moi, par exemple, d'une localité de900 habitants?
Mme MacKinnon: Je dirais qu'en fait le secteur coopératif réussit mieux que bien d'autres sur ce point parce que nous sommes implantés dans des collectivités rurales et parce que nous faisons tout notre possible pour qu'ils y restent. Il y a au Canada 900 localités qui ne possèdent qu'une caisse de crédit, une caisse populaire ou une coopérative de vente au détail, cet établissement financier ou de vente au détail étant le seul à s'y trouver.
Le président: Merci, Mme Cowling.
Allez-y, monsieur Deshaies.
[Français]
M. Deshaies: Vous avez dit que spécialement dans le nord du Canada, surtout chez les autochtones...
[Traduction]
Faut-il répéter? Est-ce que vous me comprenez?
M. Hillier: Je n'ai pas bien compris, excusez-moi.
M. Deshaies: Bon, je vais reprendre en anglais.
Vous nous avez dit dans votre exposé que nombre de collectivités autochtones possédaient de petites installations coopératives, surtout dans le secteur des services, et parfois des coopératives de travail, et qu'elles avaient parfois besoin qu'on les aide à construire ces coopératives et qu'on les encourage à poursuivre ces activités. Quel rôle joue votre organisation pour développement ce genre d'activité et que fait le gouvernement pour vous aider?
M. Hillier: Il faut signaler que dans le nord du Canada, les coopératives ne nous demandent pas beaucoup d'aide. Elles font tout elles-mêmes par l'intermédiaire de leur propre organisation. Les Coopératives de l'Arctique, le groupe dont je vous parle, a réalisé un chiffre d'affaires de plus de 78 millions de dollars l'année dernière. Elles se sont donc doté d'une organisation coopérative centralisée de vente en gros qui permet d'apporter à peu près tout le soutien que...
M. Deshaies: Elles sont parfois subventionnées pour ce faire?
M. Hillier: Oui, elles l'ont été. Le gouvernement du Canada a investi il y a 15 ans dans le Fonds de développement des coopératives des T.N.-O. quelque chose comme 1 million de dollars. Ce million de dollars a été prêté au titre des activités de développement des coopératives dans le cadre d'un prêt renouvelable. Aujourd'hui, ce fonds vaut 19 millions de dollars. On a donc effectivement versé des crédits au démarrage, mais le fonds s'est largement développé et il est autosuffisant à l'heure actuelle.
Nous oeuvrons en compagnie des Coopératives de l'Arctique pour l'obtention d'une législation bien adaptée aux coopératives et pour que l'on appuie le développement des ressources humaines, qui font grandement défaut. Nous avons nous-mêmes des fonds de développement que nous utilisons à cet effet, mais nous les aidons par ailleurs à rencontrer différentes organisations gouvernementales pour voir quelle forme d'aide il est possible d'obtenir.
Voilà quels sont les nombreux avantages de ce genre de projet. Nombre d'employés du secteur coopératif dans le nord du Canada se sont retrouvés à l'emploi du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest ou bien encore sont devenus députés à l'assemblée législative, par exemple. L'investissement en ressources humaines a été véritablement très profitable.
M. Deshaies: Je vous remercie.
Le président: J'aimerais vous poser rapidement une ou deux questions.
Il y a une chose qui m'intrigue et j'ai tendance à être d'accord avec vous lorsque vous nous dites que le modèle coopératif peut probablement être utilisé dans le développement rural. J'aimerais que l'on prenne quelques exemples précis qui illustrent ce potentiel, l'un d'entre eux étant le tourisme, dont nous avons entendu parler dans nos déplacements.
L'un des problèmes que l'on a évoqué c'est qu'une grande part de l'aide apportée au tourisme, notamment au niveau fédéral, même si je pense que c'est probablement vrai aussi en Ontario, pour ne citer que cette province, s'adresse souvent à un organisme de trop grande envergure pour intéresser comme nous le voudrions les régions rurales du Canada. Si l'on a comme partenaire Air Canada, les hôtels du CP ou une autre entreprise de ce genre, ce n'est pas la même chose que de faire équipe avec le petit exploitant que nous avons l'habitude de voir au niveau local.
Est-ce que vous avez déjà vu le mouvement coopératif mettre en place ce genre d'organisation pour commercialiser des projets touristiques dans une région ou une sous-région donnée?
M. Hillier: Oui, il en existe quelques exemples. J'irai du plus grand au plus petit.
Nous avons deux agences de voyages. Il y a tout d'abord une coopérative de travailleurs qui exerce ses activités à Burlington, en Ontario; elle s'intitule Canadian Travel Co-op. Ensuite, l'Association des coopératives de Calgary possède sa propre agence de voyages. Nous nous occupons donc de tourisme de ce point de vue.
L'exemple le plus intéressant est celui qui est le plus local. Nous venons tout juste d'investir dans un petit projet touristique de certaines localités francophones du sud de la Saskatchewan. Ces localités francophones de la Saskatchewan font la promotion des particularités qu'elles ont à offrir aux touristes francophones de l'étranger et des autres régions du Canada.
Nous avons investi dans certains projets commerciaux qu'elles doivent réaliser pour promouvoir leurs activités touristiques - un congrès touristique à Montréal, par exemple. Elles travaillent de concert au niveau local pour se doter d'installations et les promouvoir à l'échelle nationale et internationale.
Voilà donc un certain nombre de projets dans ce domaine.
Le président: Dans cet exemple de la Saskatchewan, combien y aura-t-il de membres? Le savez-vous?
M. Hillier: C'est très restreint. Je ne sais pas s'il y a des gens qui connaissent la Saskatchewan ici, mais c'est dans la région de Willow Bunch, Lafleche et Gravelbourg. Dans toute cette région, il doit y avoir environ 1 500 ou 2 000 membres des coopératives.
Le président: En outre, les entreprises elles-mêmes peuvent être membres des coopératives, si je comprends bien. C'est ainsi que si les entreprises touristiques de ma circonscription de Parry Sound - Muskoka veulent constituer une coopérative à des fins de commercialisation, il n'y a aucun empêchement selon les sept critères que vous avez établis.
M. Hillier: Non, c'est toujours possible.
Le président: Nous nous sommes aussi penchés sur toute cette question des services professionnels dans les régions rurales du Canada. Il y a une situation préoccupante qui fait que pour des raisons économiques les membres de la profession juridique, les comptables et autres professionnels doivent s'installer dans les grands centres comme Calgary, Montréal ou Toronto et déserter les régions.
Ne serait-il pas utile que ces professionnels se regroupent en coopérative pour se mettre précisément au service de leurs clients des régions rurales et développer suffisamment leur marché pour pouvoir réussir?
M. Hillier: Évidemment, il me faudrait y réfléchir davantage, mais l'idée mérite que l'on s'y attarde.
Pour approfondir quelque peu le sujet que vous évoquez, je dois vous dire que nous sommes étroitement en contact avec la Coalition canadienne de réseaux d'entreprises, qui dépend de la Chambre de commerce du Canada, que vous connaissez bien. Il s'agit d'un projet pilote sur trois ans qui se penche sur des regroupements de petites et moyennes entreprises en vue d'améliorer leur compétitivité.
Nous avons effectivement fait la promotion du type même de projet que vous évoquez, en amenant un certain nombre de petites entreprises à envisager la création de coopératives pour partager des services, des activités de commercialisation ou autres. Nous serions tout à fait prêts à envisager ce genre de projet si des gens s'y intéressaient.
Le président: Très bien.
Je vous remercie. J'apprécie que vous ayez pris le temps de venir témoigner.
Je demanderai aux membres du comité de rester environ trois minutes après le départ des témoins. Je veux leur parler de quelque chose.
Je vous remercie. Nous avons beaucoup apprécié votre témoignage.
M. Hillier: Merci de nous avoir consacré votre temps.
Le président: Si les membres du comité sont d'accord, nous allons prolonger la séance à huis clos. Merci.
[La séance se poursuit à huis clos]