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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 30 avril 1996

.1535

[Traduction]

Le président: Bonjour, mesdames et messieurs. La séance est ouverte.

Nous avons un après-midi chargé. De nombreux témoins veulent prendre la parole, et d'autres arriveront plus tard. Vous pourriez peut-être commencer par vous présenter et nous dire qui vous représentez. Nous entendrons vos témoignages, puis nous passerons aux questions.

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M. John Radosevic (président, United Fishermen and Allied Workers' Union): Je ne vais pas intervenir moi-même, je me contenterai de coordonner les choses. Nous sommes une forte délégation, comme vous l'avez mentionné.

Nous avons cinq porte-parole principaux, venant de diverses régions. Premièrement, je vous présente Mme Teresa Ransome, qui représente à titre de membre du conseil la région du mont Waddington. On les appelle directeurs, mais ce sont des représentants élus de la région. Greg Wadhams vient du village d'Alert Bay, qui est essentiellement un village de pêche. Il nous donnera plus de détails lorsqu'il présentera son témoignage. Nous sommes aussi accompagnés de Ron Fowler, représentant de la Pacific Trollers Association, et Dennis Brown, premier vice-président de la United Fishermen and Allied Workers' Union, qui a participé aux travaux de la table ronde et qui est le porte-parole de notre organisation dans ce domaine.

Un des participants, David Suzuki, doit venir un peu plus tard. Il arrive par avion aujourd'hui, spécialement pour cette réunion du comité, et j'espère que le comité lui pardonnera son retard. Dès son arrivée, nous interromprons les discussions pour lui céder la parole afin que son intervention puisse être officiellement consignée.

J'aimerais que les principaux porte-parole exposent les positions de leurs secteurs respectifs. Il y a d'autres intervenants dans la salle; certains vont seulement se présenter, indiquer la région d'où ils viennent et ce qu'ils font. D'autres feront un bref exposé, pour vous donner une idée de la diversité et de la portée des intérêts visés par le plan dont nous sommes venus discuter aujourd'hui.

On vous a dit qu'il s'agissait d'un plan syndical. Nous voulons vous montrer que c'est beaucoup plus que cela. Les préoccupations sont essentielles celles de la communauté de la Colombie-Britannique. C'est tellement vrai que Stuart Culbertson, du gouvernement de la Colombie-Britannique va nous faire un bref exposé, et que Hemi Mitic, du Syndicat national des travailleurs et travailleuses de l'automobile du Canada, un de nos membres qui veut que le dossier soit connu dans tout le pays, et de nombreux autres. Pour donner au comité une meilleure idée des intérêts que nous représentons, il serait bon que chacun se lève, se présente et fasse un bref commentaire, puis pose des questions. Si le président est d'accord, c'est ce que nous ferons.

Le président: Très bien.

M. Radosevic: Je vais commencer par le bout de la table.

M. Dennis Brown (premier vice-président, United Fishermen and Allied Workers' Union): Merci, monsieur McGuire et mesdames et messieurs les membres du comité, de nous permettre aujourd'hui d'exposer notre point de vue sur une question qui est de la plus haute importance pour nous, sur la côte Ouest.

Je ne vais pas m'étendre inutilement sur les aspects négatifs du processus de la table ronde, mais je crois qu'il faut signaler que la table ronde ne s'est pas révélée suffisamment représentative ni efficace, compte tenu de l'ampleur des changements et des défis auxquels l'industrie est confrontée. Il nous manque encore de nombreux éléments pour en arriver à un consensus démocratique adéquat au sujet de la façon dont le changement doit se faire.

Non pas que cet échec soit une catastrophe en soi; de toute évidence, une industrie centenaire qui éprouve depuis longtemps des difficultés ne va pas se rétablir en six jours de réunions, d'autant plus qu'une grande partie des travaux ont porté sur des questions de procédure et, si je peux me permettre de le dire, sur la création de «simili travail» bureaucratique. Mais je crois que le comité, comme tous ceux qui prétendent que le tour qu'a pris la situation sur la côte Ouest est la conséquence des recommandations ou des conseils de la table ronde et qu'il est donc acceptable, doit au moins savoir que le processus présentait des lacunes structurelles et qu'il faudra mettre au point, tôt ou tard, d'autres solutions. J'y reviendrai.

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Les membres du comité ne s'étonneront évidemment pas que la question des pêches sur la côte Ouest constitue un grave problème politique. À en juger par l'exposé que nous venons d'entendre et le nombre de personnes dans la salle, il est évident que l'opposition vient d'un large éventail d'intérêts.

Comme John le faisait remarquer, nous avons des Autochtones ici, des pêcheurs au filet maillant, à la senne, à la traîne, des environnementalistes, des représentants des collectivités. Bref, c'est une alliance sans précédent, si l'on songe aux conflits qui séparaient autrefois tous ces groupes.

Je pense bien que personne ici ne se réjouit de la crise, de l'impasse dans laquelle nous nous trouvons. Je crois que nous souhaitons tous régler très rapidement les problèmes et passer à autre chose. Je tiens toutefois à préciser que même s'il y a de la résistance et de l'opposition, je n'ai rencontré pratiquement personne qui croit que le changement est évitable. Personne ne croit que le statu quo est une option viable.

Je crois que nous devons bien faire comprendre au comité et à d'autres intéressés ici, à Ottawa, que l'opposition n'est pas nécessairement un mal, que ce n'est pas nécessairement négatif. Notre opposition n'est pas une preuve de mauvaise volonté. À mon avis, elle repose sur une expérience concrète. Elle est fondée sur un vaste ensemble de connaissances et aussi, si j'ose dire, sur une véritable mine de ressources dont le comité peut tirer parti pour essayer de cerner des solutions. Je crois que l'opposition est aussi dans une large mesure le résultat du climat de crainte et d'incertitude que le ministère n'a pas encore su corriger. C'est parce que les gens tiennent énormément à leur mode de vie, à leurs emplois, à leurs collectivités et au poisson. Les gens sont engagés depuis longtemps dans cette industrie, ils se soucient de la ressource, de l'habitat, etc. On ne nous voit plus, je l'espère, malgré ce que certains médias entre autres, ont tenté de faire croire, comme des personnes sans scrupule qui n'hésiteraient pas à pêcher jusqu'au dernier poisson.

Nous avons l'occasion de modifier radicalement l'industrie de la pêche. Le comité voit devant lui un ralliement massif, comme il n'y en a jamais eu auparavant - et nous l'avons bien indiqué au ministre ce matin - , mais nous n'arriverons pas au résultat voulu en mettant en oeuvre le plan proposé par le MPO.

Que reprochons-nous à ce plan? Très brièvement, nous dirions que c'est un plan qui tente d'apporter des changements irréversibles sans avoir le soutien de la base. La table ronde a été mentionnée, aujourd'hui encore, comme le fondement du plan du MPO. Je ne sais pas si nous l'avons en main, mais j'aimerais que l'on fasse circuler un peu plus tard une lettre qu'ont signée la plupart des participants non gouvernementaux à la table ronde, pour se dissocier du plan élaboré par le MPO. Je ne sais pas si nous pouvons verser cette pièce au dossier aujourd'hui, mais je l'espère. C'est une information précieuse dont vous avez besoin. Certains soutiennent encore que la solution du MPO répond aux demandes de la table ronde.

Le soutien fait défaut surtout - et ce n'est pas la seule raison - à cause de la façon dont le ministère a décidé de réduire la flottille par cumul des permis. En gros, cela signifie que les pêcheurs devront se cannibaliser les uns les autres et acheter les permis de leurs collègues. Cela crée de nombreuses difficultés.

Premièrement, on donne ainsi un avantage à ceux qui ont le plus de ressources financières - les grandes sociétés, les bateaux de pêche hauturière, les détenteurs de permis multiples, etc. Ceux qui ont les ressources, ou du moins les garanties nécessaires pour obtenir des prêts, seront en meilleure position lorsqu'il faudra acheter les permis.

Ces permis, en passant, pourraient coûter entre 100 000$, pour un filet maillant, et 500 000$, dans le cas d'une senne. Nous parlons d'investissements considérables. Les pêcheurs moyens, les gens qui sont venus ici aujourd'hui - de petits exploitants indépendants - n'ont pas de telles sommes à leur disposition.

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Deuxièmement, je veux aussi vous mettre en garde contre la méthode du cumul des permis. Cette façon de faire entraînera inévitablement une concentration des permis, et cela ne peut être bon ni sur le plan économique ni sur le plan de la gestion.

Troisièmement, la concentration des permis fera des ravages dans l'économie des collectivités côtières. On sait d'expérience que les pêcheurs des collectivités rurales et côtières sont toujours les premiers à vendre les permis, parce qu'ils se retrouvent dans une situation économique sans issue lorsqu'on adopte des formules de contingentement, des programmes de rachat et d'autres mesures de rationalisation. Les pêcheurs urbains, parce qu'ils ont plus de possibilités, restent en règle générale plus longtemps dans la course. Éliminez les pêcheurs des collectivités côtières de l'économie locale et vous venez de faire disparaître les moteurs de cette économie.

Quatrièmement, la concentration des permis, en elle-même, ne réglera pas vraiment le problème que nous voulons tous régler, c'est-à-dire l'efficacité de la flottille et sa capacité de pêche, qui semble actuellement excéder ce que la ressource peut supporter. Nous avons toujours dit - et nous l'avons répété au ministre ce matin - , c'est une phrase qui s'applique à la côte Ouest mais qui pourrait valoir aussi ailleurs, que 20 p. 100 des pêcheurs réalisent 80 p. 100 des prises. Dans ce contexte, réduire la flottille de moitié ne réduira pas de moitié le taux de prise. Les 20 p. 100 qui produisent le plus sont toujours là, et vous aurez sans doute réduit ou éliminé la catégorie des petits producteurs. Et surtout, si vous adoptez ce type d'approche, vous doublez carrément la capitalisation de l'industrie.

Le MPO soutient - et je ne sais pas comment on peut le quantifier - que l'industrie de la côte Ouest représente à l'heure actuelle un capital de 1,2 milliard de dollars. Si on accepte ce chiffre sans discussion, un rachat à 50 p. 100, la cannibalisation, représente au moins 600 millions de dollars - un montant énorme - de dettes fraîches dans une industrie qui ne peut certainement pas se le permettre. Je vous demande encore une fois instamment de prendre note du fait qu'avec cette dette supplémentaire vous n'avez pas réduit la capacité de prise ni le taux de capture. De toute évidence, vous avez plutôt fait le contraire. Vous avez simplement poussé l'industrie à se montrer encore plus agressive, parce qu'il faut pêcher pour payer la dette. Il ne faut pas confondre la diminution des effectifs et des navires avec la question plus importante de l'effort de réduction.

Alors, que proposons-nous? Comme nous l'avons dit au ministre ce matin, nous ne pouvons nous contenter de contester, nous devons proposer. Nous devons concerter nos efforts, et nous vous demandons de nous aider. Nous ne devons pas travailler contre la base. Nous devons repenser ce que nous faisons.

Au départ, il y a les deux objectifs fondamentaux qui, en théorie, sous-tendent, ce que le MPO fait, soit de donner la préséance à la conservation et d'accroître la viabilité de l'industrie. À notre avis, ce n'est pas ce qui va se passer. Nous voulons aborder ces deux priorités de façon efficace.

Pour atteindre ces objectifs, la flottille doit être réduite. Nous l'admettons. Et nous ne nous attendons pas à ce que le gouvernement supporte tous les coûts de cette réduction.

Il nous faut d'abord définir le genre de flottille que nous voulons, en préciser la composition. Nous devons refuser l'approche commerciale actuellement proposée, cette philosophie de laissez-faire qui équivaut à un processus de sélection naturelle. Comme je l'ai dit au ministre ce matin, le marché vous donnera peut-être la flottille la plus rentable, au sens étroit du mot, mais ce ne sera pas nécessairement la solution politique idéale. En théorie, j'imagine que cinq senneurs pourraient réaliser toutes les prises sur la côte de la Colombie-Britannique, mais c'est absurde sur le plan politique. Ce n'est évidement pas la façon dont nous devrions utiliser la ressource, car personne n'en profitera: ni le gouvernement, ni notre communauté, ni les pêcheurs, personne.

Nous devons fonder notre approche à la rationalisation de la flottille sur une optimisation de l'emploi que la ressource permet d'assurer sans risque, et non pas l'inverse. Nous voulons créer des emplois, pas en éliminer. Il faut que les pêcheurs demeurent dans les collectivités de la côte. Il ne s'agit pas tant de réduire le nombre des pêcheurs, même si nous convenons de la nécessité de cette mesure, que de relever le niveau de la ressource.

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De quelle façon pouvons-nous y parvenir? Je vais exposer très brièvement quelques points, que mes camarades pourront développer dans le cadre de leur intervention.

Il nous faut protéger l'habitat. C'est évidemment la clé du problème.

Nous devons revitaliser le programme de mise en valeur du saumon en Colombie-Britannique. La Colombie-Britannique a la chance de posséder une espèce de poisson qui, contrairement à la morue du Nord, réagit bien à la mise en valeur, de façon relativement rapide; elle réagit certainement plus rapidement que la morue du Nord, ou que les arbres, dans le cas du reboisement. Le saumon revient parfois en quatre ans à peine. Nous devons établir dans ce domaine un partenariat avec le gouvernement fédéral, la province, l'industrie, les collectivités, etc.

Il nous faut aussi un programme de rachat volontaire, mais un programme qui ne repose pas sur le cumul et la cannibalisation des permis, pour ne pas gonfler artificiellement la valeur des permis en mettant le gouvernement en concurrence avec les pêcheurs sur un marché limité.

Nous avons parlé, sans trop de précision, d'un montant d'environ 200 millions de dollars. Cela paraît beaucoup, mais ce n'est même pas 10 p. 100 de ce qu'on a accordé à la côte est pour régler les problèmes là-bas. En outre, nous ne songeons pas à un simple don. Cet argent pourrait être fourni dans le cadre d'une subvention, il représenterait la part du gouvernement, une partie d'un prêt. Il y a eu des précédents. Je n'insisterai pas là-dessus.

Ce montant de 200 millions de dollars, combiné à des programmes qui encouragent le retrait volontaire - des abris fiscaux, des exemptions pour les gains en capital, etc. - , entraînera une réduction considérable de la flottille et pourrait être financé, avec l'accord de l'industrie, grâce à un système de droits fondés sur les débarquements, pour que ceux qui profitent de la ressource versent une certaine contribution progressive.

Pour un pêcheur, il y a une grosse différence entre fournir annuellement une contribution de1 000 ou de 2 000$, ou un montant de cet ordre, dans un fonds comme celui-là et être obligé de trouver 100 000 ou 200 000$ d'un seul coup.

Il nous faut une disposition qui nous permettra d'éviter la concentration des permis. À mon avis, la plus intéressante est mentionnée dans deux ou trois rapports déjà déposés au comité. Il faut les reprendre. Il s'agit des rapports Cruickshank, publiés en 1982 et 1990 par M. Don Cruickshank à la suite d'audiences. Le comité de rationalisation de la flottille du gouvernement fédéral avait chargé M. Cruickshank, en 1982, d'examiner ces questions. Il a recommandé, au sujet des propriétaires-exploitants, d'adopter une disposition qui n'enlève rien aux grandes sociétés de pêche mais garantit que ces sociétés ne seront pas en mesure d'accumuler encore plus de permis, pour que les permis restent aux mains des propriétaires-exploitants indépendants.

Il faut encourager les collectivités de la côte - elles vous le diront elles-mêmes - à prendre en charge un grand nombre des rôles et des activités qui relevaient du MPO avant les grandes vagues de compression budgétaire, des activités comme la surveillance des stocks, le dénombrement, la protection de l'habitat et d'autres services sur place, qui ne peuvent plus être assurés parce que l'infrastructure du personnel local du MPO a été complètement éliminée.

Il nous faut examiner divers aspects, entre autres la possibilité d'offrir de nouveaux produits du poisson; comme je l'ai déjà dit, il nous faut revoir nos méthodes de pêche pour arriver à pêcher, peut-être plus lentement, sans menacer la ressource; il nous faut aussi proposer un programme - et d'autres intervenants en parleront - à court terme, pour survivre à la mauvaise année que nous traversons, à l'année 1996.

En gros, je viens de vous donner un aperçu incroyablement condensé d'un défi très complexe mais aussi extraordinairement stimulant: une industrie héritière d'une grande histoire, un capital humain et des ressources énormes que nous pouvons exploiter, un potentiel qui commence à peine à se concrétiser en ce qui concerne le saumon. Je crois qu'il faut que le comité, le ministre, les hauts fonctionnaires du MPO, tout le monde, continuent à lutter sur la côte Ouest, pour lancer l'industrie et élaborer un nouveau processus. La table ronde n'a pas donné les résultats voulus.

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Je vous demande instamment de convoquer M. Don Cruickshank à Ottawa, ou si vous vous rendez sur la côte Ouest, de prévoir des réunions spéciales avec lui, parce que, comme je l'ai dit, ses rapports sont déjà versés au dossier mais ils contiennent sans doute les pièces qui manquent à notre casse-tête. Il connaît déjà de nombreuses solutions. Il ne les a pas toutes, mais l'industrie lui fait confiance. Il a des années d'expérience. Je vous recommande donc vivement de prendre contact avec lui.

Pour finir sur une note qui, je l'espère, ne sera pas négative, j'ajouterai que nous devons absolument agir dans le sens que je viens d'indiquer en termes généraux, et que d'autres préciseront sans doute mieux que moi. Si nous ne le faisons pas, j'ai bien peur que le processus de détérioration politique qui est déjà à l'oeuvre dans les collectivités, la polarisation, l'opposition, nous conduira tout droit à la catastrophe. Comme je l'ai dit, nous ne sommes pas venus proclamer notre volonté de résister à tout changement, mais je suis convaincu que si nous ne nous arrêtons pas un instant pour bien examiner la question, pour la repenser, nous le regretterons.

Je demande donc l'aide du comité. J'espère que vous voudrez bien examiner soigneusement certaines de nos idées. Beaucoup d'autres personnes éloquentes vont maintenant prendre le relais. J'espère que nous trouverons des solutions qui nous remettront sur la bonne voie.

Merci beaucoup.

Le président: Dennis, je voudrais que vous me précisiez si vous appuyez l'ensemble du rapport Cruickshank ou seulement certaines parties.

M. Brown: Personnellement, j'appuie le rapport Cruickshank. Je crois que d'autres ici l'adoptent comme cadre général. Personnellement, je suis parfaitement convaincu que c'est un élément essentiel de toute solution que vous allez rechercher.

Le président: Ron.

M. Ron Fowler (ancien président, Pacific Trollers Association): Merci, monsieur le président.

Le président: Pouvez-vous être un peu plus bref que Dennis?

M. Fowler: Je vais essayer. Dennis ne m'a pas laissé grand-chose à dire, de toute façon. Il a pratiquement fait le tour de la question.

Je suis heureux d'avoir l'occasion de m'adresser au comité permanent. Je crois que je vais répéter à votre intention certaines des observations que j'ai faites au ministre ce matin, au sujet de la confusion qui règne dans ce domaine.

On me dit que dans la région du Pacifique il règne une grande confusion chez les pêcheurs au sujet de la signification du plan de relance. Je veux d'abord dire, pour mémoire, qu'il n'y a absolument aucun doute chez les pêcheurs commerciaux de la Colombie-Britannique, en ce qui concerne la situation des stocks de saumon et la nécessité de protéger la ressource. Il ne fait aucun doute que le statu quo n'est plus acceptable. Nous devons réduire la taille de notre flottille. Nous pouvons discuter des chiffres, mais il faut réduire la flottille.

Comme Dennis l'a signalé, suivant ce plan, le cumul des permis que le ministre a choisi comme méthode pour réduire la flottille, a pour effet de faire supporter aux pêcheurs commerciaux la plus grande partie du coût total de ce programme, à un moment où ils peuvent le moins se permettre de participer. Il ne fait aucun doute que le système de permis de zone et la possibilité de cumuler des permis de zone sont totalement inacceptables pour les pêcheurs de la Colombie-Britannique, il n'y a aucun doute à avoir quant aux conséquences de ce programme pour l'industrie.

En outre, il est évident que les pêcheurs qui ont réussi à rembourser leurs dettes au fil des ans, ceux qui ont réussi à se constituer des fonds de prévoyance, ceux qui ont mis de l'argent de côté en vue de leur retraite ou pour se lancer dans d'autres entreprises, devront prendre cet argent pour acheter des permis afin de faire ce qu'ils font depuis plusieurs dizaines d'années sans autres frais que le coût du permis de pêche annuel.

C'est là tout un problème. Les banques ne vont pas accepter ces permis en garantie des prêts, et les pêcheurs devront faire preuve d'une grande ingéniosité. Ils vont hypothéquer leur maison. Ils vont faire beaucoup d'autres choses.

Ce qui complique encore les choses pour tous les intervenants, c'est que rien ne garantit l'accès à la ressource. C'est un coup de dés. Si vous achetez un permis pour une zone donnée, là où vous avez toujours pêché de toute façon, et si vous en achetez un autre pour cette autre zone, qu'est-ce que vous avez acheté? Le ministre ne s'est aucunement engagé à répartir la ressource entre les divers groupes d'utilisateurs de la région. C'est un élément fondamental qui a été mentionné dans le cadre de la table ronde. C'est un élément fondamental que le plan de relance du Pacifique, celui que le ministre a dévoilé, a totalement laissé de côté.

.1605

Il ne fait aucun doute que ce programme va produire une autre vague de surcapitalisation, comme le plan Davis, une surcapitalisation dans laquelle l'industrie de la pêche refuse de s'engager et qui ne devrait pas être proposé en ce moment. Il n'y a pas de poisson. Pour le moment, la pêche ne rapporte pas. Je crois qu'à long terme elle sera rentable, mais pour l'instant nous n'avons pas les moyens nécessaires.

Il n'y a aucun doute non plus - et c'est un aspect difficile à faire comprendre à la population en général, j'espère donc réussir à vous le faire comprendre à vous - , au sujet de la capacité. On a dit qu'il y avait trop de pêcheurs et pas assez de poisson, que nos navires étaient trop gros, trop puissants et trop nombreux sur la côte du Pacifique. Très bien. Parlons donc d'une réduction de la capacité.

La façon dont le plan du ministère est conçu ne permet pas de réduire la capacité de façon proportionnelle au nombre de permis retirés. Autrement dit, comme Dennis le mentionnait, ceux qui pourront se maintenir dans l'industrie sont ceux qui possèdent déjà plusieurs permis, ceux qui sont déjà prospères, la crème de la crème. Il ne restera plus qu'eux.

La capacité ne s'en trouvera pas réduite. En fait, on commencera une nouvelle ère de pressions, de manoeuvres politiques, de ronds de jambe de l'industrie auprès du ministre, pour obtenir un accès élargi au poisson alors même que nous avons des problèmes de conservation de la ressource. Ce plan ne semble donc pas très logique.

À mon avis, il est évident que les pêcheurs de la Colombie-Britannique appuieront un plan de réduction à long terme de la flottille, s'il est bien financé, sans échéancier ni aucune des mesures radicales qui ont été prévues dans le plan proposé pour créer une ruée vers les permis au sein de la flottille. Nous appuyons la notion de rachat à plus long terme, nous sommes prêts à accepter un système de droits fondés sur les débarquements, calculés en fonction des débarquements, pour payer les frais liés au plan de réduction de la flottille. Nous voulons agir de concert avec le gouvernement dans le cadre de ce plan de réduction.

Les détails du plan sont contenus dans un document que nous avons élaboré, et c'est une solution de rechange au plan actuel. Je crois que nous pouvons le mettre à la disposition des membres du comité. Il s'agit d'une contre-proposition. Nous en parlons comme d'une «meilleure solution». Nous voulons aider le ministre.

Comme le disait Dennis - et je le répéterai, parce que c'est essentiel à notre raisonnement - , nous avons besoin d'un engagement véritable en ce qui concerne la restauration et la préservation de l'habitat. La destruction de l'habitat est un facteur au même titre que la surpêche ou que tout autre facteur responsable du déclin de cette précieuse ressource qu'est le saumon en Colombie-Britannique. Il faut y mettre un terme.

J'aimerais faire une remarque. Cela a été mentionné à l'occasion d'une conférence qui s'est tenue récemment à l'Université Simon Fraser... et je n'arrive pas à comprendre pourquoi cela n'a pas été fait. Avant de faire une annonce comme celle-là, il serait normal de procéder à une analyse des impacts biologiques, sociaux et économiques du plan. Cela n'a pas été fait. J'ai toujours cru qu'il serait normal que les spécialistes de la planification de programme et de l'économie au ministère prennent le temps de penser à ce qui allait arriver dans les collectivités de la côte lorsqu'ils changeraient de bout en bout l'orientation. Qu'est-ce qui va arriver aux habitants de Prince Rupert? Qu'est-ce qui va arriver à ceux de la vallée du bas Fraser? Cela n'a pas été fait et il faut le faire.

Je n'en dirai pas plus. Nous avons besoin de votre aide pour modifier en ce sens la proposition de relance. Nous voulons que la pêche redevienne viable, durable et profitable - nous voulons retrouver ce que nous avions.

Merci.

Le président: Merci. Greg.

M. Greg Wadhams (pêcheur, nation namgis): Merci. Je m'appelle Greg Wadhams, je suis un pêcheur à la senne de la zone 12. Je fais aussi partie de la Fraternité des Autochtones et je représente la collectivité de la nation namgis.

Je veux parler de bien des choses. Je veux parler du risque pour les collectivités, etc. Il n'y a absolument aucune disposition qui protège notre collectivité dans le rapport Mifflin.

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Nous ne nous opposons pas entièrement au rapport Mifflin. Nous pouvons y voir certaines mesures qui s'imposent, comme la réduction de la flottille, la conservation. Mais tout cela a été discuté lors de la table ronde. La proposition de la Fraternité en faisait mention. Nous aurions aimé que certaines des mesures proposées par la Fraternité soient adoptées, pour continuer d'oeuvrer dans l'industrie.

Le gouvernement et le MPO répètent constamment qu'ils veulent que les Autochtones participent plus étroitement à l'activité de l'industrie. Pourtant, si le rapport Mifflin est mis en oeuvre, le peu qui nous reste dans l'industrie va disparaître. Au cours des deux dernières semaines, trois embarcations de notre réserve ont été vendues à l'extérieur. Deux autres sont prêtes à être vendues. À cause de ce rapport, cinq vieilles embarcations en bois que des résidents de la réserve utilisent vont être mises au rancart. Ça fait 50 emplois.

Nous avons de nombreuses embarcations. J'imagine sans peine que, dans cinq ans d'ici, nous aurons perdu environ 80 p. 100 de notre flottille. C'est tout ce qu'il y a chez nous. Nous sommes un village isolé, entouré d'eau. Nous ne sommes pas comme les autres nations, qui ont un territoire. Notre part des revendications territoriales, c'est l'eau qui nous entoure, ce que vous nous enlevez, comme toutes les autres ressources... C'est sans doute ce qui entraînera notre perte.

Les Autochtones dans nos collectivités côtières, à Alert Bay, à Campbell River, même à l'intérieur des terres dans la région de Guildford, d'où nous venons, à Kingcome, à Turnour, dans tous ces endroits, avant que le gouvernement élabore des plans, la population menait des activités économiques viables. Le plan Davis a ruiné nos collectivités, nos villages. Vous avez pris tous les bateaux de pêche au filet maillant, ou vous avez pris toutes les petites embarcations, et les grandes sociétés ont acheté des permis pour construire de plus gros bateaux. C'est ce qui se produira aussi avec le plan Mifflin.

À l'époque, nous représentions probablement bien plus que 50 p. 100 de l'industrie. Nous nous sommes retrouvés avec 5 ou 6 p. 100 de la flottille. Nous avons regagné du terrain depuis, avec un peu d'aide du gouvernement, comme dans le cas des Nisga'as, avec les bateaux à filet maillant. Nous représentons maintenant entre 14 et 18 p. 100 de l'industrie. Si le plan Mifflin est appliqué, nous risquons de retomber à 2 ou 3 p. 100. Nous n'avons pas besoin de ça. Cela ne nous aidera pas à participer aux négociations à venir.

Je suis d'accord avec un des intervenants qui m'ont précédé: les collectivités de la côte doivent commencer à surveiller le poisson. Elles doivent commencer à dénombrer les engins et à s'occuper de conservation et d'habitat dans leur région. Je crois qu'il faudrait confier cela à la population locale...

.1615

Enfin, nous croyons que le MPO est tenu par la loi de consulter les Premières nations lorsqu'il élabore des politiques qui les touchent comme il devrait le faire actuellement pour les collectivités de la côte, par exemple. Nous avons l'impression d'être pratiquement des étrangers dans nos territoires traditionnels, là où nous croyons avoir le droit héréditaire de gagner notre vie, économiquement et socialement.

Le plan Mifflin vient tout chambouler.

Merci.

Le président: Merci, Greg.

Teresa.

Mme Teresa Ransome (directrice régionale, district et collectivités côtières du mont Waddington): Je représente des collectivités de la Colombie-Britannique.

Le plan Mifflin est inacceptable. Aucune étude des répercussions sociales n'a été menée. Vous ne savez pas ce qui se passera dans les petites villes.

J'habite Sointula, essentiellement un village de pêche avec une population de 900 âmes, dont 500 pêcheurs. Si vous réduisez la flottille de moitié, vous faites disparaître 250 emplois chez nous. C'est ce qui se passera dans tous les villages de la côte. Est-ce que vous voulez que nous venions vivre à Ottawa? Avez-vous des emplois à nous offrir?

On m'a demandé de parler au nom des collectivités. J'aurais sans doute dû refuser. Je n'ai pas de talent d'orateur.

C'est très difficile. Pour préparer cette audience, notre collectivité a convoqué une réunion à laquelle 250 personnes ont assisté. Elle a réuni 8 000$ en une journée et demie pour envoyer quatre membres de la collectivité la représenter. Ce plan a exaspéré nos gens. On ne les a pas consultés. Le ministre ne s'est même pas rendu en Colombie-Britannique pour nous parler de son plan.

Est-ce qu'on a réalisé des études d'impact biologique, social et économique? Si c'est le cas, je veux voir les conclusions. Et si vous savez ce qui va nous arriver à cause de ce plan et si vous allez quand même de l'avant, c'est une honte!

Dennis a dit que le rapport Cruickshank était un bon point de départ. Dans l'industrie de la pêche, Don Cruickshank est respecté. Vous feriez bien de lui parler. Son rapport a été publié en 1991. C'est du moins ce qui est écrit sur l'exemplaire que j'ai.

J'ai écouté le ministre à la radio, il y a quelques jours, et il affirmait qu'il n'y avait pas d'autre plan. C'était juste avant notre visite à Ottawa. Le ministre a menti. Le rapport Cruickshank a été publié en 1991. Le ministre a affirmé qu'il y avait consensus à la table ronde. Ce n'est pas vrai. Comment pouvez-vous fonder un rapport sur des faussetés? Ce n'est pas bien.

.1620

Le président: Merci.

John, de quelle façon voulez-vous poursuivre?

M. Radosevic: Je vais présenter notre dernier intervenant, M. Suzuki.

M. David Suzuki (fondation David Suzuki): Merci beaucoup de m'avoir attendu. J'imagine que vous ne vous êtes pas tourné les pouces en m'attendant.

M. Radosevic: Nous avons étiré un peu nos exposés.

M. Suzuki: Je vous remercie infiniment de me donner l'occasion de présenter mes idées. J'imagine que je suis un de ceux que M. Louis Tousignant appelle les «remueurs de boue professionnels».

Les personnes réunies ici représentent les populations dont l'existence sera directement touchée par des décisions prises très loin de chez elles, ici à Ottawa, par des politiciens et des fonctionnaires comme M. Tousignant. Il y en a d'autres, comme moi, qui abordent la question du saumon du Pacifique dans un contexte social, écologique et économique. Je crois que dans les années à venir on verra de plus en plus de personnes autrefois classées comme environnementalistes qui formeront des alliances étroites avec les collectivités locales bouleversées par les effets directs de la dégradation environnementale.

Notre délégation représente de nombreux intérêts: les Premières nations, les pêcheurs commerciaux, les environnementalistes, les activistes communautaires, le monde du travail. Nous comptons peut-être même un politicien dans nos rangs. Nous avons des points de vue très différents sur la pêche au saumon. Je le sais parce que j'ai fait l'objet des foudres de quelques-uns de ces intervenants à plusieurs reprises. Mais je crois que c'est cette diversité qui donne à notre délégation son importance et sa crédibilité. Si nous étions tous des environnementalistes, si nous étions tous des pêcheurs commerciaux, il serait facile de nous assimiler à ces groupes de pression qui viennent défendre leurs propres intérêts. Ce n'est pas le cas.

Nous venons pourtant tous défendre une même cause. Nous voulons tous protéger le saumon. C'est notre grande priorité. Nous voulons protéger les collectivités humaines qui ont besoin du saumon. Nous croyons - et nous sommes tous de cet avis - que le programme proposé par le gouvernement ne permettra pas d'atteindre ces objectifs prioritaires. Nous savons que la situation du poisson est très précaire. Nous savons que des changements s'imposent. Je crois que les membres de la délégation sont disposés à payer le prix qu'il faudra pour protéger leur avenir, mais il n'est pas question d'accepter le plan Mifflin.

J'aimerais vous expliquer ce que je fais dans ce groupe. Je ne suis pas un pêcheur commercial, mais la pêche fait partie intégrante de ma vie, de mon histoire et de ma culture.

Mon grand-père paternel est venu s'installer en Colombie-Britannique au début du siècle. Il était pêcheur et constructeur de bateau. C'est avec orgueil que je peux dire que les bateaux Suzuki sont célèbres et qu'il y en a encore au moins un qui est encore en service aujourd'hui.

Mon père a travaillé comme acheteur de poisson pour la B.C. Packers. Il a été passionné de pêche jusqu'à sa mort, il y a deux ans.

D'aussi loin que je me souvienne, j'allais à la pêche. Si vous avez lu mon autobiographie, Metamorphosis, vous avez vu des photos de mon grand-père au retour de la pêche, de nombreuses photos de mon père qui rentrait avec du poisson, des photos de moi et de mes enfants avec nos prises. En fait, un critique littéraire du Globe and Mail m'a reproché de me soucier plus du poisson que de ma première femme. C'est peut-être vrai... Mais non...

Je veux simplement souligner que même si je ne vis pas de la pêche, cette activité a eu une grande importance dans ma vie et dans celle de ma famille au Canada.

Je viens ici pour vous parler à titre de père et de grand-père. Ce sont mes rôles les plus importants. Je veux que mes petits-enfants puissent pêcher et faire l'expérience de la nature comme je l'ai moi-même fait quand j'étais enfant. Mais depuis des années, mes enfants et mes petits-enfants ne vont plus à la pêche au saumon, parce que c'est une espèce menacée de disparition.

Je suis biologiste et je m'inquiète de l'avenir des animaux sauvages qu'on veut gérer en fonction de la politique et de l'économie plutôt que de la biologie.

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Comme les animaux sauvages dont les cycles de vie sont très complexes, le saumon obéit à un instinct qui le sert depuis des milliers d'années. Il ne se soucie pas des frontières et des limites tracées par l'homme. Nos institutions n'arrivent toutefois pas à le traiter comme un phénomène biologique. Nous pensons que le saumon est tellement stupide qu'il ne sait pas qu'il nous appartient, alors il se jette dans les filets d'autres nations. Lorsqu'il se comporte ainsi, nous devons convoquer des commissions internationales pour essayer de déterminer non pas ce qui convient au saumon, mais ce qui convient à ceux qui l'exploitent.

Même lorsque le saumon arrive enfin sur les côtes canadiennes, le gouvernement fédéral intervient parce que la pêche commerciale relève du ministère des Pêches et des Océans. Le ministère des Affaires indiennes régit la pêche menée par les Autochtones, et la province réglemente la pêche sportive, c'est-à-dire que le ministère du Tourisme s'en mêle.

Les activités relevant d'autres ministères touchent aussi l'existence du saumon. Ce qui se passe dans le domaine forestier influe profondément sur le saumon. Ce qui se passe dans le secteur minier, qui relève d'Énergie, Mines et Ressources, a des effets sur le saumon. L'aménagement urbain, la science et la technologie - de nombreux secteurs confiés à d'autres portefeuilles ont des activités qui se répercutent sur l'existence du saumon. Ce problème biologique est subdivisé suivant les sphères de la bureaucratie humaine, de telle sorte que le poisson ne sera jamais considéré dans son entité, et donc jamais adéquatement protégé.

Je viens aussi à titre de président de la fondation David Suzuki, parce que je souhaite trouver et proposer des solutions durables à nos problèmes environnementaux. Nous en sommes maintenant à la troisième étape de notre projet sur les pêches. C'est le premier grand projet que la fondation a mis en oeuvre, et nous appuyons actuellement la communauté locale de l'île de Vancouver qui tente d'appliquer des idées et des concepts que nous avons proposés au cours des deux premières étapes du projet.

Je veux remettre au comité le deuxième rapport de la série «Fisheries that Work», une compilation d'exemples choisis dans le monde entier, qui indiquent que la pêche durable est possible. Ce sont des exemples dont nous pouvons nous inspirer. Certains viennent de la Colombie-Britannique, des mesures que nous avons pu prendre au niveau local, à la base. J'aimerais vous les présenter et les verser au dossier.

Nous croyons que les collectivités locales sont l'unité de survie de l'avenir. Les collectivités auront intérêt à préserver la qualité de l'air, de l'eau et des sols ainsi que la biodiversité, elles auront le pouvoir de protéger leur avenir. C'est là le meilleur espoir pour la planète.

La métaphore du canari dans la mine de charbon est limpide et tout à fait appropriée. Nous avons vu ce qui s'est passé à Terre-Neuve, dans le cas de la morue du Nord. Cette morue était le canari. Nous voyons maintenant ce qui se passe dans le cas du saumon du Pacifique. Ce saumon est un canari. Les collectivités locales qui s'inquiètent des prochaines années sont, elles aussi, des canaris.

En tant que scientifique, je suis conscient de la profondeur de notre ignorance. Pour Richard Feynman, lauréat du prix Nobel à Cal Tech, chercher à en savoir plus au sujet de la nature grâce à la science est un peu comme de tenter de comprendre les règles du jeu d'échec lorsqu'on ne peut pas voir plus de deux cases à la fois. La recherche scientifique est absolument essentielle, et nous en faisons beaucoup trop peu dans notre pays; nous n'en savons pas assez pour gérer de façon scientifique la nature. Je parle à titre de scientifique, et je crois que tout scientifique qui soutiendrait le contraire est soit un ignorant soit un hypocrite. Nous n'en savons pas assez pour gérer les populations d'animaux sauvages.

Faut-il abandonner le combat? Certainement pas. Il existe une véritable mine de connaissances et de dévouement chez ceux qui ont tout à gagner de la prospérité de la ressource. Les collectivités autochtones pratiquent une pêche durable depuis des milliers d'années. Les pêcheurs non autochtones ont des années et des générations d'expérience, ils ont des connaissances que la science ne peut pas reproduire.

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Les collectivités de pêcheurs ont tout intérêt à ce que la ressource se maintienne à long terme, elles ont une qualité essentielle qui manque à bien des institutions gouvernementales - la responsabilité. Ce qu'elles décideront, au bout du compte, il faudra qu'elles en subissent les conséquences.

Les politiciens ne font que passer, pour de multiples raisons, et les spécialistes du gouvernement et les fonctionnaires semblent à l'abri de toute conséquence à long terme de leurs décisions. Les collectivités locales ne le sont pas, et je crois qu'elles doivent avoir l'occasion de faire valoir leurs connaissances et leurs points de vue.

Si l'on ne s'attaque pas à la capacité de prise, la réduction du nombre de navires sera sans effet sur le plan de la conservation. La concentration des permis aux mains des sociétés de pêche, au détriment des propriétaires de petits bateaux, pourra accroître la rentabilité et faciliter la gestion, mais elle ne mènera certainement pas à une multiplication des emplois ni à la viabilité des collectivités locales. J'aimerais savoir quelles sont les priorités de notre gouvernement.

S'ils ne reposent pas dans une large mesure sur les connaissances des pêcheurs autochtones et non autochtones, nos plans de gestion soi-disant scientifiques ne sont que duperie. Je presse le gouvernement de mettre le plan Mifflin au panier. Je crois que la population serait favorablement impressionnée de voir des politiciens prêts à se lever pour dire qu'ils ont entendu le message de la base et qu'ils sont disposés à changer. Commencez dès maintenant. Donnez-nous un peu de temps pour parfaire une stratégie, en collaboration avec la communauté la plus touchée et la plus préoccupée. De la sorte, nous pourrons conserver et protéger au maximum les propriétaires de petits bateaux et les collectivités. Votre plan n'aura pas cet effet.

Je vous en supplie, vous qui êtes la conscience du ministère des Pêches et des Océans, pressez le ministère de revenir sur sa décision. Merci.

Le président: Merci.

John, est-ce que les personnes qui sont derrière vous veulent se présenter rapidement s'il vous plaît? Nous allons passer aux questions.

M. Radosevic: Tout le monde a compris. J'aimerais commencer par Stuart Culbertson et faire le tour de la salle.

Le président: Qu'ils nous disent d'où ils viennent.

M. Radosevic: Je crois que je connais tout le monde par son nom et je sais ce que chacun fait, mais je crois que chacun devrait se présenter lui-même.

M. Stuart Culbertson (sous-ministre adjoint, Pêches et Alimentation, ministère de l'Agriculture, des Pêches et de l'Alimentation): J'aimerais remettre au greffier certaines pièces de correspondance échangées entre le premier ministre de la Colombie-Britannique, le ministre de l'Alimentation, David Zirnhelt, et le ministre des Pêches, M. Mifflin, au sujet de ce plan.

M. Nick Carr (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Nick Carr. Je suis pêcheur sur la côte Ouest. J'y pêche depuis plus longtemps que la plupart des habitants de cette planète.

Il y a exactement deux ans, j'ai rencontré M. Cummins, M. Bernier et quelques autres personnes. Nous étions venus pour discuter d'une autre question liée aux permis. J'espère que le problème actuel sera réglé de façon beaucoup plus satisfaisante. C'est tout ce que je voulais dire, monsieur le président.

M. Brian Lande (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Brian Lande. Je viens de la vallée de la Bella Coola. Je représentais les non-Autochtones à la table ronde. J'ai le sentiment d'y avoir fait le jeu des représentants du MPO. Ils n'ont pas fait ce que moi et la plupart des participants à la table ronde croyions qu'ils allaient faire - comme vous le constatez dans les lettres déposées aujourd'hui. Merci.

M. Mike Emes (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Mike Emes. Je suis un pêcheur au filet maillant et à la traîne de Vancouver. Je représente la troisième génération de pêcheurs, mon fils, la quatrième. Je pourrais pêcher avec un seul permis pour mon bateau, à l'heure actuelle. Si ce plan est adopté, j'aurai besoin de 500 000$ pour acheter les permis nécessaires pour mon petit bateau de 35 pieds.

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M. Steve Sainas (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Steve Sainas. Je siège au conseil du district régional du centre de la côte et je suis en outre un des directeurs du réseau des collectivités côtières. Nous comptons plus de 120 collectivités au sein de notre association et nous représentons plus de 500 000 personnes disséminées le long de la côte. Tous sont très inquiets de l'avenir.

M. Bill Irving (maire de Ucluelet): Je suis Bill Irving, maire de Ucluelet. J'ai une remarque à faire et je crois que c'est un principe fondamental du pays, que tous nos représentants élus doivent chérir: nous avons le choix entre faire des victimes par décret ou préserver un processus équitable et ouvert. Nous demandons au comité d'envisager les implications de ces principes fondamentaux appliqués sur la côte Ouest. Merci beaucoup.

M. Ross Wetzel (directeur, T. Buck Suzuki Environmental Foundation): Je m'appelle Ross Wetzel, je suis directeur de la T. Buck Suzuki Environmental Foundation et membre du comité des pêcheurs au filet maillant. Le plan Mifflin ne nous garantit aucunement l'accès à la ressource. Plus un seul poisson n'arrivera à terre. Ce n'est pas ce que recommandait notre comité. Cela ne reflète pas la décision prise sur l'ensemble de la côte à la suite d'un vote organisé par le regroupement contre les intentions du MPO et sans son aide. On aurait pu commencer par le rachat et l'allégement des droits de permis, pour permettre aux pêcheurs de s'abstenir de pêcher les mauvaises années, pour travailler à la restauration de l'habitat. Nous avons besoin de reconstituer la ressource, pas de la détruire totalement.

M. Dan Edwards (directeur, West Coast Sustainability Association): Je m'appelle Dan Edwards. Je suis pêcheur à Ucluelet, en Colombie-Britannique, et je suis aussi directeur de la West Coast Sustainability Association, une association qui regroupe des Autochtones et des non-Autochtones du secteur Nuu-chah-nulth de cette région. Nous avons reçu des fonds de la fonction David Suzuki, du ministère de l'Agriculture, des Pêches et de l'Alimentation, et d'autres organismes, pour tenter de trouver des solutions viables au problème des pêches au cours des15 derniers mois. Nous nous sommes heurtés à un mur, et le plan de M. Mifflin, annoncé le 29 mars, vient nous achever.

La proposition que nous avons soigneusement élaborée consiste à entreprendre un processus consultatif plus approprié. J'ai discuté avec Don Cruickshank cet après-midi, et il serait tout à fait disposé à prêter main-forte au comité qui regroupe déjà divers intérêts. Peter Pearse l'a aussi sondé à cet égard. Tous deux seraient prêts à collaborer à cette entreprise, pour améliorer le processus et définir des solutions durables au problème des pêches sur la côte Ouest.

M. Frank Cox (Georgia Strait Alliance): Je m'appelle Frank Cox. Je représente la Georgia Strait Alliance et la Wild Salmon Coalition. Nous comptons dans nos rangs plusieurs groupes soucieux de l'environnement et de la conservation. Comme l'a dit David Suzuki, nous sommes unis par la même inquiétude au sujet du plan Mifflin, par notre opposition à ce projet et par la crainte de ses conséquences, mais nous sommes aussi déterminés à collaborer avec les membres de l'industrie de la pêche et les collectivités pour trouver des solutions constructives. Nous espérons que tous ici poursuivent le même but, et que cet engagement ne disparaîtra pas au cours des prochaines semaines, des prochains mois et des prochaines années.

M. Serge Cartier (Tendermen of British Columbia): Je m'appelle Serge Cartier. Je représente les membres d'équipage de bateaux-annexes de la Colombie-Britannique. J'aimerais dire que le plan Mifflin risque de faire disparaître la plupart d'entre nous, sans doute 90 p. 100 de tous les membres d'équipage de bateaux-annexes dans l'ensemble de la Colombie-Britannique. Je m'y oppose.

M. Garth Mirau (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Garth Mirau, je suis un pêcheur à la senne de Nanaïmo. J'ai participé aux travaux du groupe des senneurs à la table ronde et j'ai signé la lettre que Dennis a déposée. Je me suis méfié du processus dès le départ et j'ai été très déçu du résultat. Je dois dire que je suis, en quelque sorte, un nouveau venu dans l'industrie de la pêche; il y a seulement 25 ans que je pêche. Ma famille a été élevée dans le monde de la pêche. Mes trois fils y travaillent et, d'après ce plan, nous serons tous les quatre chassés de cette industrie.

M. Stephen Nyce (nation nisga'a): Je m'appelle Stephen Nyce, de la nation nisga'a. Je viens de la collectivité de Gitwinksihlkw. Comme les autres intervenants ici, je m'inquiète du plan Mifflin, qui ne répond pas aux besoins et aux préoccupations des collectivités autochtones.

Mme Shannon Solby (organisatrice des travailleurs à terre, United Fishermen and Allied Workers' Union): Je m'appelle Shannon Solby. Je suis organisatrice pour la United Fishermen and Allied Workers. Moi aussi, je viens d'un petit village de pêcheurs. Je suis née là-bas. Je fais partie de la troisième génération de pêcheurs, mon fils, de la quatrième. Il ne s'agit pas seulement des pêcheurs; il y a aussi les petites collectivités et les travailleurs à terre. Tous sont touchés par ce plan - sans exception.

M. Skip McCarthy (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Skip McCarthy, je suis consultant auprès d'un certain nombre de groupes représentés ici. J'étais autrefois économiste au MPO et j'ai été pêcheur commercial.

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Je suis scandalisé de constater le peu de recherches élémentaires qu'on a effectuées avant d'entreprendre une restructuration aussi radicale de la propriété des pêches. Aucune étude de l'incidence sur les collectivités n'a été menée. Aucune étude d'impact environnemental n'a été faite. On n'a pas prévu de stratégie de réaménagement de la main-d'oeuvre, et les statistiques de 1994 ne sont mêmes pas encore publiées. Compte tenu de l'absence de données, il s'agit là d'une initiative de politique remarquablement audacieuse. En outre, le processus de consultation est un des plus manipulés dont j'ai jamais entendu parlé, et je crois que cela nous a donné une politique sans aucun fondement.

Je vous demande instamment d'écouter ce que notre délégation a à vous dire. Vous avez là une occasion unique en matière d'élaboration de politique: les principaux groupes d'intérêts sont tous réunis à la table, il y a des intérêts en matière de conservation, dans le domaine de l'emploi, dans la préservation des collectivités.

M. Don Sananin (témoigne à titre personnel): Don Sananin. Pêcheur à la senne. Je pêche depuis 29 ans sur la côte Ouest. Si le plan Mifflin est mis en oeuvre, 50 p. 100 des mes collègues à bord des senneurs perdront leur emploi.

M. Hemi Mitic (adjoint au président, Syndicat des travailleurs de l'automobile du Canada): Je m'appelle Hemi Mitic et je pêche. Je travaille au bureau du TCA à Buzz Hargrove. Notre syndicat, comme la United Fishermen and Allied Workers' Union, prépare actuellement la fusion des deux organisations. Je suis ici pour prêter main-forte à mes camarades.

Merci.

M. Rex Davey (témoigne à titre personnel): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je m'appelle Rex Davey. Je viens de Gibsons.

J'ai assisté à la destruction de la baie de Howe. En ce qui concerne le saumon, il n'en reste que très peu. Le hareng a disparu à cause de l'extrême détérioration du milieu. Le ministère des Pêches devrait avoir honte. Le plan Mifflin aura des conséquences similaires sur toute la côte.

Merci.

Mme Rafaela McLean (témoigne à titre personnel): Je suis Rafaela McLean, représentante de Port Hardy.

Les îles côtières n'ont pas été consultées avant la rédaction du plan Mifflin. À mon avis, le plan Mifflin rongera les éléments culturels et économiques des collectivités des îles côtières. La collectivité disparaîtra lentement parce qu'elle n'aura plus rien à offrir à ses habitants pour les faire vivre. La pêche est l'industrie la plus importante à Port Hardy. La mine a disparu, et la pêche va suivre. Si la pêche décline, je ne donne pas cher de nous.

M. Bruce Burrows (témoigne à titre personnel): Bruce Burrows, pêcheur à la senne de Sointula.

J'ai une brève remarque à faire au sujet de la crédibilité du MPO. Le ministère des Pêches et des Océans a créé un désastre sur la côte est. Il s'apprête à faire la même chose sur la côte Ouest.

Les politiques qui ont entraîné le déclin du saumon sur la côte Ouest n'ont pas été élaborées à Sointula. Elles n'ont pas été formulées à Alert Bay. Personne à Ucluelet n'a eu quoi que ce soit à dire à leur sujet. Ces politiques sont venues du MPO. Personne ne consulte les collectivités de la côte, et pourtant ce sont ces collectivités qui sont punies par le MPO pour la disparition des stocks de saumon.

Je crois que les députés libéraux ici présents doivent transmettre un message à Fred Mifflin. Dites-lui qu'il est tenu en otage par ses propres fonctionnaires. Ses fonctionnaires l'ont abandonné sur la place publique. S'il doit demeurer en poste au ministère des Pêches et des Océans, il devra prendre ses distances par rapport à ses fonctionnaires et formuler une politique fondée sur la sagesse des gens qui travaillent dans l'industrie de la pêche sur la côte Ouest.

Merci.

.1645

M. David Hunt (témoigne à titre personnel): Je m'appelle David Hunt. Je suis président du conseil de district kwakiutl, le regroupement politique de dix bandes parlant la langue kwakiutl entre Comox et Port Hardy.

M. Dave Siider (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Dave Siider, je viens de Sointula. Je suis un pêcheur de quatrième génération, sans doute la dernière génération à Sointula.

M. Bob Carpenter (témoigne à titre personnel): Bob Carpenter, de l'île de Vancouver - Nanaïmo. Je représente la flottille des bateaux-annexes. Je participe à la pêche commerciale du saumon, du hareng et du flétan. J'ai collaboré aux travaux de la table ronde. J'ai pris ma tâche très au sérieux. J'ai consulté, rencontré des gens, fait des téléphones, communiqué mon message à la table ronde. On m'a trompé. Ce n'est pas le message que nous avons transmis.

Mon père m'a dit de laisser la pêche il y a 45 ans. Je suis resté. Évidemment, son père lui avait dit la même chose 45 ans auparavant. Je suis encore là. Ce n'est pas par intérêt personnel. Je m'inquiète des collectivités de la côte, des gens, des travailleurs à terre, des équipages des bateaux-annexes, des emplois. Je suis un de ces détenteurs de permis multiples et je ne veux pas de votre plan. Faites passer ce message pour moi.

J'aimerais aussi vous remettre une allocution que je devais prononcer sur un sujet dont j'ai parlé. J'aimerais que le texte accompagne le compte rendu, s'il vous plaît.

Merci.

M. Leigh Bonar (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Leigh Bonar. Je suis propriétaire d'un petit magasin de marine à Nanaïmo, en Colombie-Britannique.

C'est la flottille de pêche commerciale qui me fait vivre, surtout les propriétaires de petits bateaux. Cette année, les affaires ont été désastreuses pour nous tous, commerçants, à cause de cette annonce. J'ai parlé à d'autres membres de l'industrie nautique. Ils sont tous dans la même situation. Ils parlent tous de mises à pied. Personne ne les écoute. Pourtant, ils savent de quoi ils parlent.

Merci.

M. Don Mollard (témoignage à titre personnel): Bonjour. Je m'appelle Don Mollard. Je viens de Victoria.

J'ai été propriétaire-exploitant d'un petit bateau de pêche à la traîne pendant 14 ans. Au cours de ces 14 années, je me suis efforcé de survivre dans le secteur des pêches et de faire une contribution à la société canadienne. Le plan Mifflin ne tient aucun compte des gens comme moi ni de leurs buts. Aujourd'hui, je suis un participant. Le 24 mai, je serai écarté par les gens mêmes à qui je fais confiance depuis 14 ans.

M. Mike Norum (témoigne à titre personnel): Mike Norum, senneur de quatrième génération. Je suis venu parce que le plan Mifflin ne me réserve aucune place dans l'industrie. J'aimerais essayer d'empêcher sa mise en oeuvre avant de devenir un ancien senneur. C'est la raison pour laquelle je suis ici.

Merci.

M. Robert Quannow (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Robert Quannow, je suis un senneur de Surrey, dans la vallée du bas Fraser. Je suis un pêcheur de troisième génération. J'adore la pêche. Sur le plan financier, je ne suis pas aussi bien établi dans l'industrie que mes collègues. Lorsque le plan sera mis en oeuvre, je serai le premier à devoir abandonner.

M. Richard Nomura (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Richard Nomura, je suis un pêcheur indépendant de la région de Steveston-Richmond. Je suis ici pour vous faire part des préoccupations de la population de cette région.

Nous voulons tous un changement, mais le changement que nous voulons doit améliorer l'industrie. D'après ce que nous savons de ce plan, il n'y aura pas d'amélioration.

M. John Aleksich (témoigne à titre personnel): Je m'appelle John Aleksich. Je suis un senneur de Sointula.

Autrefois, j'étais fier d'être pêcheur. Je ne le suis plus depuis que je sais ce que vous vous préparez à faire sur la côte Ouest. Nous semblons incapables de communiquer avec vous. Nous pouvons travailler avec la nature, nous pouvons travailler avec les sociétés de pêche. Nous semblons tout simplement incapables de collaborer avec Ottawa.

Merci.

M. Modestus Nobels (témoigne à titre personnel): Bonjour. Je m'appelle Modestus Nobels.

J'ai le grand plaisir de représenter 40 collectivités de la région de Prince Rupert, dans le Nord. La moitié de ces collectivités sont essentiellement autochtones. Je fais encore la pêche commerciale. Je suis un de ces exploitants de petit bateau que le plan veut écarter.

La plupart des gens que je représente sont dans le même pétrin. Nous avons vu la flottille du Nord disparaître lentement, bâtiment par bâtiment, à mesure que les changements apportés à la gestion des pêches étaient mis en oeuvre. Les difficultés économiques ont vidé la région, les habitants ont vendu leurs permis ou sont allés gagner leur vie ailleurs. Le plan que l'on propose aujourd'hui portera un coup fatal à la collectivité où je vis. Nous sommes une collectivité de pêcheurs. Nous n'avons rien d'autre. C'est ce que nous voulons faire.

Ce n'est pas un job. C'est un mode de vie. C'est une culture, une culture que l'on détruit de façon systématique, dans une certaine mesure par appât du gain et aussi par stupidité pure et simple. Il est difficile pour la grande majorité des personnes qui souffriront de ce changement de comprendre les raisons sous-jacentes à ce plan. Je ne sais pas ce que je pourrais dire de plus. Je parle au nom d'un groupe de personnes qui sont tellement découragées qu'elles ont de la difficulté simplement à parler pour elles-mêmes.

.1650

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Je veux d'abord remercier tous les intervenants, qui ont présenté d'excellents exposés.

J'aimerais passer aux questions. Nous avons ici cinq personnes de votre province - deux représentants du gouvernement, je crois, et trois représentants de l'opposition. En outre, nous comptons au sein du comité des députés de la Nouvelle-Écosse, de Terre-Neuve, de l'Île-du-Prince-Édouard et de la Gaspésie, au Québec, ainsi que le secrétaire parlementaire du ministre.

J'aimerais que l'on puisse poser le maximum de questions. Nous allons commencer parM. Bernier, du Bloc québécois.

[Français]

M. Bernier (Gaspé): Je vais devoir m'exprimer en français.

[Traduction]

Je ne parle pas bien l'anglais, alors pour me comprendre...

[Français]

J'aimerais tout d'abord remercier les témoins qui sont venus devant le comité. J'aimerais aussi féliciter la grande délégation qui est venue de la côte ouest. Je ne peux qu'être touché par le mouvement social qui existe là-bas.

Venant moi-même de l'autre extrémité du pays, c'est-à-dire le nez du Québec, Gaspé, qui est un petit patelin entouré d'eau, une péninsule, je comprends très bien que la pêche soit l'activité principale de votre région.

Ce que vous faites aujourd'hui me touche. Beaucoup de gens ont dit qu'il était difficile de se faire entendre à Ottawa et, sans vouloir faire de politique, je voudrais dire que je partage votre opinion.

Je ne comprends pas qu'il n'y ait pas eu de rencontre entre le bureau du ministre et les principaux représentants qui sont en face de moi, alors qu'ils semblent représenter différents groupes de la population. Pouvez-vous me dire quelle en est la raison?

Comme je sais que certains députés viennent de ces régions-là, je vais leur céder un peu de mon temps. Ce n'est pas mon habitude, mais je veux vous prouver que je ne veux pas faire un travail partisan, parce que je veux vraiment comprendre ce qui se passe. En effet, un bloquiste n'a pas l'habitude de partager son temps de parole avec un réformiste, mais cela peut se faire.

Je vois que vous avez compris ma plaisanterie seulement deux minutes après que je l'aie faite. Vous voyez ce que c'est que d'avoir à attendre la traduction, mon cher John!

Des voix: Ah, ah!

M. Bernier: C'est quand même amusant, et c'est plus vivant ainsi. Finalement, on peut toujours se comprendre entre gens de bonne volonté. J'espère donc que c'est ce qui va arriver au message que vous voulez transmettre à Ottawa par le comité permanent. Nous espérons bien pouvoir rejoindre M. Mifflin et ses méchants fonctionnaires qui, semble-t-il, ne font pas passer le message.

Je vous ai demandé si vous aviez pu rencontrer le ministre. Je voudrais aussi savoir si vous avez un plan à court terme. Je n'ai pas eu le temps de lire tout le document dont madame parlait, mais il me semble que la décision de M. Mifflin prendra effet immédiatement, probablement d'ici la fin du mois ou en tout cas au début mai. Par conséquent, avez-vous des des propositions concrètes pour passer l'été?

Ensuite, de quelle façon revoyez-vous le calendrier de travail? Je ne peux pas croire qu'un ministre ne tiendra pas compte de cette coalition, bien que cela puisse arriver. J'aimerais cependant que vous me disiez si des plans à court terme sont prévus.

Je vais arrêter là mon premier préambule et je me demande qui d'entre vous va répondre.

.1655

[Traduction]

M. Radosevic: J'aimerais donner à chacun l'occasion de répondre brièvement à cela, à commencer par Dennis.

Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Fowler: Je vais répondre à la première partie de la question.

Le processus de la table ronde a démarré à l'époque où Brian Tobin était ministre des Pêches et des Océans. M. Tobin s'est rendu dans la région du Pacifique pour discuter avec des membres de la table ronde, le printemps dernier, des objectifs du processus de table ronde qui visait à rationaliser la flottille en Colombie-Britannique. Comme vous le savez, Brian Tobin est maintenant passé à autre chose.

Le plan a été en suspens pendant quelques temps au ministère des Pêches et des Océans. Nous avons l'impression que le personnel des directions des programmes, de la planification et de l'économique du MPO en est l'artisan principal. Je crois que quelqu'un a fait allusion à une clique du ministère. Je n'irais pas jusque-là, mais ses visées ne me semblent pas conciliables avec celles de l'ensemble de la communauté en Colombie-Britannique. Ces fonctionnaires ont choisi une solution axée sur le marché, une médecine amère qui ne produira pas les effets recherchés. Voilà pour cet aspect.

Non, nous n'avons pas rencontré M. Mifflin depuis qu'il a pris la barre au ministère des Pêches et des Océans, pas avant cet après-midi. Cet après-midi, nous l'avons brièvement rencontré et il nous a dit qu'il se rendait à Vancouver demain. Je ne sais pas exactement pourquoi il va là-bas. Quelqu'un a affirmé qu'il allait discuter d'un programme de rejet des prises avec les représentants du secteur de la pêche sportive.

Il a affirmé être prêt à rencontrer certains membre de notre délégation. Je ne sais pas très bien pourquoi. Il ne s'est pas engagé fermement à décréter un moratoire applicable aux propositions qu'il a faites jusqu'à maintenant. Autrement dit, l'acquisition des permis et ce genre de choses se poursuivent encore à l'heure actuelle. La flottille répond. Les gens se battent pour survivre.

C'est un peu comme du darwinisme social pour l'instant. Les requins se jettent sur leur proie. Nous aurions aimé qu'un moratoire soit décrété dans tout ce dossier en attendant que des changements efficaces puissent être apportés au plan. Nous espérons encore y parvenir, et nous avons vu une lueur d'espoir aujourd'hui, mais rien n'est encore certain.

Pour ce qui est du deuxième plan, du plan à court terme, c'est Dennis qui l'a.

M. Brown: Je crois que nous avons certaines suggestions à faire à court terme. Pour reprendre un peu ce que Ron disait, la première consiste à mettre un terme à cette ruée, à laquelle on participe de gré ou de force, pour acheter des permis supplémentaires. Il faut prendre l'argent à ceux qui ont acheté ces permis de bonne foi, après l'annonce du plan. Il ne faut pas les pénaliser pour avoir acheté ces autres permis. Il faut leur offrir le premier choix si un programme de rachat est mis en oeuvre, pour éviter de dresser ce groupe contre le reste de l'industrie.

Le président: Combien ont été vendus?

M. Brown: C'est difficile à dire pour l'instant. Je ne crois pas qu'il y en ait beaucoup. Je ne parle pas, cependant, de ceux qui détenaient peut-être un certain nombre de permis avant l'annonce. C'est un problème tout à fait différent, une situation entièrement distincte.

Pour ce qui est du court terme, vous seriez étonnés de voir combien de pêcheurs, conscients de la crise environnementale dont M. Suzuki et d'autres intervenants ont parlé, seraient disposés à interrompre la pêche. C'est inscrit dans certaines de nos résolutions, lorsque nous avons appris le rendement qu'on prévoyait pour le sockeye du Fraser cette année. Ainsi, tous les groupes de l'industrie ont appuyé une motion interdisant la pêche pour la montaison de cette année, parce que les stocks sont trop bas.

Pour en revenir à mon idée, combien de personnes seraient prêtes à s'abstenir de pêcher jusqu'à ce que la situation soit rétablie ou jusqu'à ce qu'un nouveau programme de compensation soit offert? Vous pouvez nous aider, par exemple, si vous veillez à ce que les pêcheurs qui s'abstiennent de pêcher ne soient pas pénalisés, qu'on ne leur demande pas de payer les droits d'un permis qui n'est pas utilisé pendant un an, par exemple. Nous devrions envisager un programme de désarmement qui encouragerait les petits pêcheurs dont nous avons parlé tout l'après-midi à s'abstenir de pêcher, pour ne pas connaître les mêmes difficultés que par le passé.

Mon propre père, qui voulait laisser passer la saison, a récemment appris qu'il perdrait son permis s'il ne payait pas 800$ de droits.

Ce serait une solution. Nous pourrions aussi, avec l'argent que le gouvernement est déjà en train de distribuer, commencer à collaborer avec le ministère du Développement des ressources humaines et d'autres organismes gouvernementaux pour affecter des gens à la restauration de l'habitat, des bassins versants, etc. Un programme vient de se terminer sur la côte Ouest. C'était un programme parrainé par DRHC et qui nous a beaucoup aidés. Je ne connais pas tous les chiffres, mais ce programme a donné du travail à des centaines de personnes dans le cadre de projets communautaires réalisés dans des douzaines de collectivités le long de la côte.

.1700

Une grande partie de l'infrastructure nécessaire à la mise en oeuvre d'un tel programme est déjà en place, mais dans six mois ou un an elle ne le sera peut-être plus. Nous avons des travailleurs qui ont acquis de nouvelles compétences pour organiser le travail des autres dans les collectivités isolées et qui pourraient se mettre immédiatement à l'oeuvre pour rétablir la situation à long terme. Ce ne sont là que quelques idées, il y en a d'autres. Je crois que certaines mesures réellement constructives peuvent être prises.

M. Radosevic: Nous avons des documents que nous pouvons distribuer à ce sujet.

M. Wadhams: J'aimerais entre autres que l'on veille à ce que les Premières nations continuent de participer à cette activité sur la côte. Je crois que c'est très important, et je sais que nous en parlons dans la trousse. Si nous nous basons sur le rapport Cruickshank, certaines de ces idées s'y trouvent déjà.

Nous pouvons préserver cette participation grâce au programme de rachat du gouvernement, pour nous aider si l'on doit adopter un plan de pêche par zone, par exemple - pour nous aider à continuer à vivre de la pêche.

M. Suzuki: La communauté des environnementalistes, d'après ce que je sais, n'a pas participé à la discussion. J'ai écouté les personnes qui sont venues ici raconter leur histoire, moi qui défends la cause de l'environnement depuis plus de 30 ans, et je suis bouleversé d'apprendre qui sont véritablement les canaris dans ce scénario d'effondrement environnemental.

Selon ce que deviendront les collectivités de pêcheurs, nous saurons si nous nous écartons de la voie incroyablement destructrice que nous suivons à l'heure actuelle. Je suis honoré d'être ici aujourd'hui, de faire partie de ce groupe, et même si la communauté des environnementalistes ne s'est pas penchée sur ces questions, les collectivités locales - en particulier les collectivités de pêcheurs - vont devenir une de nos grandes priorités. Nous allons lutter avec vous jusqu'au bout.

M. Radosevic: Les collectivités n'étaient pas non plus à la table, et Dan et Teresa peuvent vous le dire.

M. Irving: Je suis un pêcheur de la côte Ouest. Je dirige une association sans but lucratif et j'ai participé aux travaux de la table ronde pour défendre les intérêts de ma collectivité. J'ai essayé de faire intervenir des représentants régionaux et des représentants élus. J'ai aussi essayé d'obtenir la collaboration de membres du mouvement écologique qui sont ici, mais tous ont été exclus.

Le conseil de la région centrale, un organisme provisoire composé d'Autochtones et de non-Autochtones qui a demandé par écrit de participer à la table ronde de septembre a été délibérément écarté, même s'il a pour mandat de surveiller l'utilisation des ressources dans la région de Clayoquot.

D'autres groupes, dont le réseau des collectivités côtières qui représente 500 000 personnes de la côte Ouest de la Colombie-Britannique, ont demandé de siéger à cette table mais n'y ont pas été autorisés. La représentante régionale de Port Alberni, qui était le seul représentant élu à la table ronde, n'est jamais venue. Il y avait donc une grave lacune dans tout ce processus du point de vue des collectivités de la côte. On n'a pas accepté de remplaçant. Parce qu'elle était membre d'office, c'était un poste désigné, elle ne pouvait pas être remplacée.

Le président: Voulez-vous ajouter quelque chose?

[Français]

M. Bernier: Je vous ferai remarquer que j'essaie toujours d'être très bref car je pense qu'il est important que les témoins puissent s'exprimer.

Je vais reprendre ma première question et enchaîner sur une deuxième, en espérant que l'on pourra me répondre. Je vais ensuite donner l'occasion à mes autres confrères de poser des questions, puis je reviendrai s'il nous reste encore du temps.

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Le but de ma dernière question était de m'assurer qu'il y avait un plan à court terme, parce que je crois savoir que c'est l'aspect biologique qui est en question. Tout le monde semble être d'accord sur le fait qu'il faut protéger les ressources. Personnellement, je ne sais pas comment se passe la pêche dans les rivières de cette région. En Gaspésie, on pêche la morue quand elle approche des côtes, mais je pense que c'est différent chez vous.

Je vous ai demandé tout à l'heure ce que vous proposiez comme industrie à court terme pendant l'été, parce que j'imagine que c'est une pêche qui s'effectue entre aujourd'hui et l'automne prochain. Que doit-on faire, à court terme, pour être certain de ne pas mettre le stock en danger?

Il y a eu deux propositions. Premièrement, les gens demandent qu'il y ait une forme de moratoire, c'est-à-dire qu'on arrête de faire pression sur les gens qui doivent acheter ou vendre des permis. Deuxièmement, on m'a dit que beaucoup de gens étaient prêts à s'arrêter de pêcher, en attendant. Je suis assez surpris, mais je pense que cela résoudrait les problèmes à court terme.

Ce qui m'inquiète aussi, c'est d'une part le communiqué de presse de M. Mifflin du mois de mars, et d'autre part les déclarations de M. Dennis qui a dit que, même si on achète un permis, on n'est pas du tout sûr que le stock sera là.

Lorsque j'étais dans l'industrie des pêches en Gaspésie, j'ai travaillé à mettre sur pied un système de contingents individuels, parce que nous aussi, nous étions fatigués d'avoir affaire à Ottawa. On avait donc pensé répartir la ressource entre les joueurs existants. C'était une façon qui nous permettait de calculer et de nous dire qu'on ne pouvait en prendre plus que ce à quoi nous avions droit.

Est-ce que vous avez exploré cette idée-là? Mais peut-être ne peut-on la mettre en pratique chez vous? Je peux vous dire que cela nous permettait de faire le lien. Une personne qui ne pouvait pas dépasser un certain contingent essayait, avec son permis, de financer ce qui lui restait à payer sur son bateau afin d'être capable de continuer les années suivantes.

Je voudrais donc savoir si vous avez étudié chez vous un quelconque système d'allocation individuelle. Je voudrais également dire, en passant, que nous avions introduit, dans le système de contingents individuels dans les Maritimes, une notion voulant que les allocations se fassent par communauté, de sorte que chacun puisse rester à un certain niveau.

Si cette idée pouvait être une base de départ de travail pour votre comité, on pourrait vous faire savoir ce qui a déjà été fait. J'ai hâte de lire le document dont on a parlé.

Je termine là-dessus. Vous avez peut-être trouvé que c'était un peu long pour quelqu'un qui voulait être bref.

[Traduction]

Le président: Monsieur Fowler a peut-être une réponse.

M. Fowler: Merci. C'est une question importante. Elle en recouvre beaucoup d'autres. Vous avez mis le doigt sur la plaie, les choses se corsent à partir de là.

Je veux vous donner une idée de ce que nous faisons à court terme pour ce qui est de la pêche du saumon cette année. Je suis membre du groupe de travail sur le quinnat à la Pacific Salmon Commission. Je suis un pêcheur de quinnat. Grâce au saumon quinnat, je gagne ma vie au large de l'archipel de la Reine-Charlotte depuis 20 ans. Auparavant, j'avais pêché pendant six ou sept ans au large de l'île de Vancouver et dans d'autres secteurs.

Je suis très attaché au quinnat. Je ne vais pas m'attendrir, mais cette année il n'y en a pas du tout. Nous avons subi un désastre environnemental sur la côte Ouest de l'île de Vancouver et nous n'avons pas pu y faire grand-chose. El Nino s'est manifesté, et une biomasse de maquereaux a migré sur la côte Ouest de l'île et dans le détroit Georgia. Le taux de prédation de ce poisson pour l'année d'éclosion a parfois été estimé à 95 p. 100, c'est donc dire que les stocks sont vraiment sur le point de disparaître.

Nous avons recommandé très clairement au groupe de travail de la commission du saumon que la pêche de ce poisson et de toutes les espèces de la côte Ouest de l'île de Vancouver soit frappée d'interdit cette année. Nous parlons des salmonidés de la Nitinat, de la Conuma, de la Robertson et de la Somass - tous les stocks de la côte Ouest de l'île de Vancouver.

.1710

Nous parlons là des espèces naturelles. Je ne veux pas être trop technique, mais il y a un certain nombre d'espèces améliorées dans la rivière Robertson. La rivière Robertson est le moteur des pêches sur la côte nord de la Colombie-Britannique et dans le sud-est de l'Alaska. On lui attribue jusqu'à concurrence de 50 p. 100 des prises de quinnat dans le sud-est de l'Alaska. En fait, les habitants du sud-est de l'Alaska n'ont plus aucun quinnat naturel à pêcher.

Mais je m'écarte du sujet. Nous avons recommandé l'interdiction totale pour ces stocks de quinnat cette année. Les flottilles commerciales ont promis de ne pas pêcher le quinnat sur les côtes nord et sud. Nous devons renverser la tendance, et nous sommes prêts à agir de la même façon en 1997, parce qu'il semble que 1997 sera aussi une mauvaise année d'éclosion, pour les mêmes raisons - l'intervention d'El Nino et une invasion de maquereaux.

Nous avons aussi des difficultés avec le saumon rouge du Fraser. Lorsque nous avons signé le traité du saumon du Pacifique, nous avons décrit le fleuve Fraser comme le joyau des pêches de la Colombie-Britannique et nous avons juré de le rendre aux Canadiens. Nous y sommes finalement parvenus, nous avons mis un frein aux visées américaines et cela signifiait que nous pouvions consentir d'autres sacrifices. Nous pouvions réduire le nombre de prises commerciales, parce que le saumon rouge est une espèce récoltée surtout à des fins commerciales. Nous avons décidé de réduire le nombre de prises et d'améliorer la gestion de la pêche. Nous n'avons pas coulé de béton, nous nous sommes contentés de ne pas prendre le poisson. Nous voulions remettre cette espèce en grand nombre dans les rivières, parce qu'après avoir conclu une entente avec les États-Unis nous savions que si nous réussissions à ramener cette population de poissons à ses sommets historiques, nous récolterions une part plus importante des bénéfices. C'est ce que nous avons fait. Nous avons retourné la situation et, depuis quelques années, nous connaissons des montaisons de saumon rouge qui sont presque équivalentes à celles des années record.

Je ne veux pas exposer ici les raisons des difficultés du saumon rouge ces dernières années, mais cette année la montaison devrait être assez faible. C'est une mauvaise année du cycle, de toute façon. Une année sur quatre est mauvaise, mais cette année doit l'être particulièrement. Nous avons dit que nous n'envisagerions même pas une pêche commerciale tant que nous ne serons pas certains qu'il y a plus de 3 millions d'échappées dans le fleuve, ce qui est supérieur aux exigences de la Pacific Salmon Commission.

En tant que pêcheurs commerciaux, nous n'avons aucune confiance dans les scientifiques... David Suzuki affirme que la science est absente, et elle l'est. Nous préférerons nous tromper dans l'intérêt du poisson, et c'est ce genre de difficultés immédiates que nous acceptons maintenant, pour renverser la tendance. Nous sommes prêts à mettre nos moyens de subsistance en péril.

Pour ce qui est des contingents individuels, c'est un panier de crabes. Il y a bien de gens qui considèrent les contingents individuels comme une forme de privatisation de la ressource. Certaines personnes affirment que c'est une meilleure façon de gérer. Nous avons des exemples de pêche contingentée en Colombie-Britannique: la morue charbonnière, le flétan et l'haliotide. Il y a eu contestation. Il existe sans doute des plans pour assujettir d'autres pêches à des contingents individuels, mais pour l'instant nous avons tellement de difficulté à rétablir les stocks de saumon que ce serait mettre la charrue avant les boeufs de même discuter des contingents individuels dans le cas du saumon. Pour l'instant l'accent doit porter sur la reconstitution des stocks, la création d'ententes de partage appropriées et des régimes de gestion adaptés.

Dire à la flottille où elle doit aller pêcher et l'obliger à acheter des permis de 200 000$, c'est un rêve de gestionnaire mais pas un rêve de pêcheur. Ce n'est pas la façon de procéder.

Le président: Avez-vous quelque chose à ajouter, Teresa?

Mme Ransome: J'aimerais dire que le saumon est une ressource cyclique. Certaines années, il revient en grand nombre et d'autres, il ne le fait pas. À mon avis, un système de contingent est inapplicable. Je ne crois pas que ce soit quelque chose à... Si vous lisez le rapport Cruickshank, vous le comprendrez.

Le président: Monsieur Cummins.

M. Cummins (Delta): Merci, monsieur le président. On ne manque pas d'humour ici, aujourd'hui. Je ne sais pas si vous avez remarqué le t-shirt de Modestus - «Il y a trop de bureaucrates et trop peu de pêcheurs». Vous saisissez? C'est subtil.

Des voix: Oh, oh.

M. Cummins: Voilà, c'est officiel.

J'aimerais maintenant revenir aux personnes qui sont au fond de la salle. Certaines d'entre elles sont venues de loin et ont fait des exposés très brefs, mais elles peuvent replacer toute cette question dans le contexte humain qui est le leur. Avant de passer à cela, Ross Wetzel a souligné quatre points qui me semblent très valables.

.1715

Ross, vous avez mentionné un scrutin. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet et indiquer aux membres du comité ce sur quoi on a voté.

Le président: Présentez-vous à nouveau, s'il vous plaît.

M. Wetzel: Je m'appelle Ross Wetzel. J'ai été membre du groupe des pêcheurs au filet maillant et je suis membre du conseil d'administration de la T. Buck Suzuki Environmental Foundation. À la fin de la table ronde, fidèle à son sens de la démocratie, le syndicat a insisté pour que les recommandations de la table ronde soient soumises à un vote de tous les pêcheurs. Il a demandé au ministère des Pêches et des Océans de l'aider dans cette tâche de manière à ce que tous les pêcheurs aient la possibilité d'accepter ou de rejeter les recommandations. Le ministère n'a pas jugé bon d'apporter son aide et nous avons donc décidé d'organiser des réunions communautaires, d'installer des stands dans les centres commerciaux et ailleurs pendant une période de deux ou trois semaines, et d'amener autant de pêcheurs que possible à choisir entre le cumul des permis ou leur rachat. Quatre-vingt-onze pour cent d'entre eux ont voté contre le cumul et lui ont préféré un système de rachat financé et géré par l'industrie.

M. Cummins: Merci, Ross.

Mike Norum est un jeune homme de ma circonscription; il représente probablement la quatrième génération de pêcheurs dans sa famille. Mike voudriez-vous dire au comité l'effet que ce plan aura sur vous, en tant qu'individu?

M. Norum: Ce plan me condamne pratiquement à abandonner l'industrie car il est impossible d'y survivre avec un seul permis. Je le sais car les poissons viennent par cycles et, dans certaines régions, il y a des périodes de creux. Je vous signale, en passant, que je pêche au filet maillant.

Comme je vous le disais, il n'est pas possible de gagner sa vie dans une seule zone car il y a toujours des cycles où les prises sont faibles. Jusqu'à présent, on nous a permis de pêcher où nous voulions sur la côte. Lorsque l'année est mauvaise sur la côte sud, nous remontons au nord où, avec un peu de chance, la pêche sera bonne, et même dans le sud, on réussit aussi à prendre un peu de poisson. Le fait de pouvoir utiliser toute la côte vous permet de faire une saison de pêche acceptable.

Pour faire la même chose aujourd'hui, pour essayer de pêcher suffisamment de poissons pour payer leurs factures et rembourser les prêts pour l'achat du bateau - nous sommes tous hypothéqués - des gens comme moi sont obligés d'acheter deux permis de plus, parce qu'il y a déjà trois zones et qu'on parle d'en créer une quatrième. Cela signifie que je suis obligé de débourser60 000$ par permis pour pêcher une année sur quatre dans une zone donnée. Chaque permis représente une dépense supplémentaire de 12 000$ au début de la saison - à supposer que vous puissiez obtenir une aide financière, car les banques ne prêtent pas d'argent pour l'achat de permis.

La seule autre solution consiste à s'adresser à une société de pêche pour essayer d'obtenir le permis ou pour qu'elle vous fournisse l'argent nécessaire pour l'acheter, mais vous vous trouvez alors lié à cette entreprise à laquelle vous devez garantir une certaine production, probablement à un prix moins élevé. Il devient alors impossible pour vous de traiter avec des sociétés différentes et de négocier avec elles le prix de votre poisson.

D'ailleurs, ces sociétés ne m'apporteront pas nécessairement leur aide car bien d'autres pêcheurs se tourneront vers elles dont certains seront détenteurs de permis multiples avec des contingents de prise de flétan et de hareng. Il suffit à ces gens-là de réserver leurs prises de flétan ou de hareng à la société de pêche pour que celle-ci leur accorde l'accès à une autre zone de pêche ou les aide à obtenir un permis supplémentaire.

.1720

Je ne suis pas dans la situation de ces pêcheurs et de telles possibilités me sont donc refusées. À mon avis, si ce plan est adopté, je ne pourrai plus pêcher. En un mot, voilà la situation.

Je vous remercie.

M. Cummins: Monsieur le président, Greg voudrait intervenir brièvement à ce sujet.

M. Wadhams: Tout à l'heure, je n'avais pas tout à fait terminé. Comme vous le savez tous, lorsque vous vivez dans une réserve, il est impossible d'obtenir une hypothèque pour quoi que ce soit. Même lorsque vous êtes propriétaire d'un bateau de pêche, il est exclu d'utiliser ce bateau comme garantie. Comme on vient de vous le dire, les banques n'aident pas du tout les pêcheurs.

Les Autochtones des collectivités côtières ont donc encore plus de difficultés. Tout le monde a des problèmes mais je crois que nous en avons encore plus lorsqu'il s'agit d'obtenir des prêts pour participer. Si l'on ne change rien à ce rapport, la partie est pratiquement terminée pour nous.

Le président: Merci.

Mme Ransome: Je vous signale que les banques n'ont jamais prêté d'argent pour acheter un permis. Elles vous en prêtent pour votre bateau, mais c'est à vous de payer votre permis. Dans les cas de cumul, on peut vendre son permis, mais personne ne veut acheter le bateau avec.

Comment les gens vont-ils trouver l'argent nécessaire pour acheter un permis, pour cumuler les permis sur leur bateau, si ce plan est adopté? Combien de bateaux seront abandonnés? Combien de pêcheurs seront acculés à la faillite à cause des droits de quai qu'ils devront acquitter pour un bateau de 40 ou 50 pieds alors qu'ils ne peuvent plus l'exploiter puisqu'ils ont perdu leur permis? Ces droits de quai sont énormes. Je tiens simplement à le souligner. Les permis n'ont jamais été...

Le président: Sur la côte est, c'est le permis qui a de la valeur. Il arrive qu'un pêcheur achète un autre permis et ne sorte jamais en mer. Tout ce qu'il veut c'est le permis. Manifestement, la situation est différente chez vous.

Mme Ransome: En effet, les banques ne vous donnent pas d'argent pour acheter un permis.

M. Edwards: Une des propositions que nous avons faites à la table ronde - elle n'a pas été incluse dans les documents finals de politique générale - portait sur l'établissement d'un système bancaire fédéral-provincial destiné à aider les pêcheurs et comportant une disposition relative aux propriétaires-exploitants. Ce que nous voulions, c'est créer un système qui permettrait aux jeunes pêcheurs et à d'autres personnes de devenir membres de l'industrie. À l'heure actuelle, c'est impossible. Ce système est utilisé en Alaska et dans d'autres pays. Cela fait partie d'une solution à long terme.

Le président: Une dernière question et nous passerons à Anna.

M. Cummins: J'en ai encore trois ou quatre que je voudrais bien poser.

Leigh Bonar, vous êtes propriétaire d'un magasin de matériel pour la pêche à Nanaïmo. Voudriez-vous évoquer pour nous quelques-unes des difficultés que des gens comme vous vont connaître? Si vous le désirez, vous pourriez parler au nom de ceux qui ont des magasins dans quelques-unes des collectivités les plus éloignées, car ce sont eux qui souffriront le plus de la situation.

M. Bonar: C'est exact. Nous expédions du matériel dans les petites localités qui jalonnent la côte. Nous faisons aussi affaire avec les petits exploitants de bateau mais nous ne traitons pas du tout avec les grosses sociétés. Celles-ci se fournissent directement ailleurs, si bien que beaucoup de petites gens vont en souffrir. En ce moment même, j'ai du mal à payer mes factures. J'ai perdu50 000$ au cours des trois premiers mois de l'année parce que les pêcheurs n'achètent pas, ce qui déclenche une réaction en chaîne. Parmi les victimes de cette situation, il y a aussi les fabricants de cordages, de filets, de poulies, d'ancres - enfin, à peu près tout le monde.

M. Cummins: Et le paiement de votre loyer n'attend pas.

M. Bonar: En effet, j'ai quand même un loyer à payer et des factures à acquitter.

.1725

L'ennui est que nous constituons tous nos stocks à l'automne et que nous sommes obligés d'acheter beaucoup de matériel pour obtenir les meilleurs prix et être capables d'affronter la concurrence des autres magasins et sociétés. En ce moment-ci, nous faisons vraiment les frais de la situation.

Le président: Je reviendrai tout à l'heure à vous, John, mais nous allons passer à la seconde série de questions.

Mme Terrana.

Mme Terrana (Vancouver-Est): Merci, monsieur le président.

J'ai rencontré bon nombre des personnes présentes à Vancouver et à Ottawa, et je leur souhaite à toutes la bienvenue ici.

Il y a beaucoup de pêcheurs dans ma circonscription. Dès le début, ils ont pris contact avec moi, à l'époque où j'allais tirer les cordons de sonnette pendant la campagne électorale. À peine leur porte entrebâillée, ils m'ont demandé ce que j'allais faire pour eux et pour leur industrie. Je crois que nous en sommes à ce point.

Je voudrais tout d'abord vous remercier tous d'être venus. Mieux que quiconque, vous êtes capables de présenter le problème et d'aider des personnes comme moi à expliquer pourquoi la Colombie-Britannique est bien différente de ce que nous imaginons tous.

On a tendance à croire qu'en Colombie-Britannique il n'y a pas de problème, tout le monde est riche, tout le monde a un emploi, mais ce n'est pas vrai, en particulier dans les régions côtières d'où viennent beaucoup de ces personnes, parce que, dans bien des cas, elles n'ont pas d'autre ressource que la pêche. Ce plan va donc être extrêmement difficile à accepter en Colombie-Britannique et il va être particulièrement dur pour les personnes qui ont leur propre entreprise. C'est tout d'abord à ces personnes qu'il faut songer.

J'ai été très touchée par certains des exposés. Je comprends très bien ce que nos interlocuteurs essaient de nous dire. Ce n'est pas la première fois que je les entends. Ce qui me préoccupe aussi beaucoup, c'est la conservation des stocks de poisson dans notre région.

C'est tout ce que j'avais à dire. Je voulais vous remercier de nous avoir proposé une meilleure formule de relance. Merci d'être venus et de nous avoir apporté votre aide.

Je souhaiterais aussi avoir plus de renseignements sur le programme dont vous parlez, celui que Dennis a mentionné, je crois, celui que vous avez entrepris avec DRHC. Nous étudions avec plusieurs ministres les moyens de vous aider.

Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur McWhinney.

M. McWhinney (Vancouver Quadra): Je tiens, moi aussi, à remercier les témoins d'être venus. J'ai déjà rencontré plusieurs d'entre vous. J'ai lu le rapport Cruickshank que j'ai trouvé très instructif. Il présente un point de vue original et il vaut son pesant d'or.

J'ai deux brèves questions à poser. Premièrement, cette table ronde m'intrigue. D'après ce que vous avez dit, c'était l'idée de Brian Tobin. Plus que toute autre personne rencontrée à Ottawa, il me donne l'impression de savoir comment établir un consensus, de savoir prendre le pouls de l'opinion. Avez-vous l'impression que tout marchait bien jusqu'à son départ et que cela a été ensuite l'effondrement?

M. Radosevic: Au début du processus j'étais moi-même vivement partisan d'adopter une approche holistique à l'égard de tous les problèmes de l'industrie, au lieu de concentrer tous les efforts sur quelques points clés. Cependant, et je ne répéterai pas ce qui a déjà été dit, je n'ai pas tardé à être gagné par la désillusion. Je dois d'ailleurs dire que cela avait déjà commencé avant queM. Tobin ne s'embarque dans une nouvelle carrière.

Un processus très prometteur au départ n'a pas tardé à devenir une entreprise plus ou moins subtile de manipulation et de contrôle du programme. Au début, nous devions discuter de toutes sortes d'idées intéressantes. Même dans le rapport final, on en retrouve quelques vestiges, mais il est tout à fait frappant de constater que le produit final, celui qui a été recommandé par le MPO, ressemblait étrangement aux multiples tentatives faites au fil des années pour présenter certaines choses sous forme de documents tels que Vision 2000 et autres rapports que nous avons vus.

Ce qui avait commencé comme un processus plus ou moins structuré, malgré l'absence de représentants des collectivités côtières - je ne voudrais pas vous donner l'impression que le processus était valable en ce qui concerne les représentants - ce qui me paraissait être une tentative de règlement de l'ensemble du problème s'est dégradé et s'est confondu avec le programme que s'étaient fixés les bureaucrates du MPO.

.1730

M. McWhinney: John Fraser présente aussi un plan uniquement destiné à un examen scientifique, mais je crois que la grosse différence est qu'il prévoit un groupe d'environ15 personnes. Si nous recommencions - ce qui ne résout manifestement pas les problèmes actuels - serait-il possible, selon vous, d'organiser une table ronde avec moins de participants, pour faciliter les échanges?

M. Brown: Je crois que d'autres personnes voudraient répondre à votre première question.

M. Edwards: Monsieur McWhinney, je voudrais vous répondre.

J'ai assisté à la première séance de planification de cette table ronde. Je vis depuis dix ans dans la région du détroit de Clayoquot. Les processus de consultation sur l'utilisation des sols ont posé bien des problèmes car ils avaient le défaut d'appliquer dès le début certaines règles d'exclusion. Lorsque j'ai essayé de contribuer à la planification de ce processus, en mars de l'an dernier, j'ai clairement expliqué à M. Tousignant qu'il fallait s'assurer la participation de tous les intéressés et en particulier des écologistes et des collectivités côtières.

Nous avons proposé - en fait il s'agissait de notre groupe de travail sur la pêche à la ligne traînante - qu'il y ait des représentants de toutes les régions côtières parce que les problèmes sont tout à fait différents selon la région de la Colombie-Britannique. Il aurait en effet fallu que chacune de ces régions soit représentée à la table, ce qui est la définition même d'une table ronde.

L'autre défaut majeur du processus était que la table ronde était présidée par la personne la plus influente du ministère des Pêches et des Océans dans la région du Pacifique. Notre groupe a donc demandé à M. Tousignant de bien vouloir se retirer puisqu'il ne lui était pas possible de diriger impartialement le débat, mais il a refusé de le faire.

Voilà les défauts fondamentaux du processus.

Notre association a fait beaucoup d'efforts pour qu'on envisage l'adoption d'un processus plus transparent et inclusif, destiné à s'attaquer à la racine même des maux de nos pêcheries et de trouver les solutions appropriées, solutions qui auraient d'ailleurs été proposées dès le début si l'on avait adopté un tel processus.

M. McWhinney: Le plan Fraser prévoit une commission ou un comité sans lien de dépendance, qui serait probablement composé seulement d'intéressés, des scientifiques ou d'autres personnes, mais d'aucun représentant du gouvernement. C'est peut-être la solution.

À ce propos, j'ai noté certaines des suggestions détaillées que m'ont faites Dennis Brown et d'autres. Dans l'une de vos propositions, Dennis, vous mentionniez notamment la disposition concernant l'absence de pénalité. Vous aviez un document écrit là-dessus. Je voudrais qu'il soit inclus. Vos deux suggestions me paraissent éminemment raisonnables et réalistes. Bien entendu, je ne peux pas m'engager au nom du ministre, mais je crois que ce que vous proposez devrait être inscrit à l'ordre du jour. C'est-à-dire pas de pénalité pour sauter cette année, où l'on n'en est plus qu'à un million de dollars et, si je comprends bien, pas de pénalité ou d'augmentation exorbitante des droits par la suite, au moment du renouvellement. Je ne vois personnellement aucun problème à le faire. Je crois donc qu'il serait utile que vous nous soumettiez un document écrit.

Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur McWhinney.

Commençons la seconde série de questions; monsieur Scott.

M. Scott (Skeena): Monsieur Carpenter, je crois que lors de votre brève déclaration devant le comité vous avez dit que vous aviez participé à la table ronde et qu'en tant que membre de ce processus, vous avez eu l'impression qu'on vous avait trompé. Pourriez-vous expliquer au comité pourquoi vous avez eu cette impression.

M. Carpenter: J'ai eu ce sentiment car le processus de consultation de la table ronde sur lequel, comme je l'ai déjà dit, nous avons beaucoup travaillé - énormément de travail bénévole, de coups de téléphone, de réunions pour préparer ces recommandations, avec documents à l'appui - et qu'après cela le MPO prétende que le processus tout entier et le plan Mifflin lui-même sont inspirés des orientations adoptées à la table ronde, qu'ils correspondent à ce que nous avons recommandé... J'affirme ici que ce que l'on nous propose n'a rien à voir avec nos recommandations. C'est pourquoi j'ai le sentiment d'avoir été trompé.

Les personnes que je représentais m'avaient dit ce qu'elles voulaient. Je me suis fait l'écho de leurs préoccupations à la table ronde. J'ai eu l'impression que nous étions manipulés. Il y avait tout simplement trop d'économistes qui entraient et sortaient sans cesse de la salle pour aller voir d'autres groupes et qui revenaient nous dire que tel groupe avait fait telle chose et tel autre groupe telle autre chose. Ce n'est pas ainsi qu'une table ronde fonctionne.

.1735

Je déclare solennellement, et que j'aille en enfer si je mens, que j'ai eu le sentiment d'avoir été trompé et que je continuerai à l'avoir tant qu'on n'aura pas fait quelque chose.

M. Scott: Monsieur Carpenter, voulez-vous dire par là que vous considérez que les délibérations de la table ronde et les questions qui ont été discutées ici sont reprises mais déformées dans le plan Mifflin?

M. Carpenter: Absolument.

M. Radosevic: Nous avons tous la même impression. Nous sommes unanimes à ce sujet.

M. Scott: Vous étiez essentiellement d'accord sur les principes et vous avez discuté de ceux-ci aux réunions de la table ronde. Vous aviez des propositions à présenter et vous avez discuté des moyens de restructurer la pêche. Vous croyiez de bonne foi que vous participiez à la poursuite d'un objectif. Pourtant, lorsque vous avez appris le contenu du plan, vous avez eu le sentiment que d'autres principes entraient en jeu et qu'un objectif totalement différent était proposé. C'est bien cela?

M. Carpenter: Oui, c'est essentiellement ce que je dis. Sachez bien que nous comprenons tous qu'un problème existe. La conservation est une question prioritaire à régler. C'est bien ce que je veux dire, en effet.

M. Scott: Merci beaucoup, monsieur Carpenter.

M. Radosevic: Au nom de Leigh Bonar, homme d'affaires de Nanaïmo, je voudrais vous présenter officiellement ce répertoire de toutes les entreprises dont l'existence dépend de l'industrie de la pêche. Nous avons parlé des retombées et des effets négatifs sur les personnes qui n'appartiennent pas à cette industrie. Le répertoire vous permettra de vous faire une idée de l'ampleur du problème. Je ne sais pas combien d'entreprises y figurent mais il y a des pages et des pages d'entreprises qui souffriraient beaucoup de la mise en oeuvre du plan.

M. Scott: Parmi les personnes présentes, il y en avait beaucoup, monsieur le président, qui étaient là à titre individuel ou qui représentaient divers secteurs de ces collectivités. Je sais que nous n'avons pas suffisamment de temps pour les entendre toutes, mais si vous me le permettez, je voudrais donner la parole à l'une d'entre elles.

Monsieur Nomura, dans votre exposé vous avez évoqué les effets que tout cela aurait sur vous-même, sur vos activités de pêche, sur votre entreprise. Pourriez-vous expliquer au comité l'effet que le plan, dans son état actuel, aurait sur vous et sur votre capacité de vivre de la pêche.

M. Nomura: Je suis probablement dans la même situation que Mike. J'ai un seul permis, et ce que me réserve l'avenir est assez clair, mais il y a d'autres membres de notre industrie qui ont essayé de fonctionner avec ce plan. J'ai discuté avec les gens qui avaient de l'argent et envisagé avec eux la présentation d'une proposition telle que celle-ci. Pour beaucoup d'entre eux, elle pose ainsi un problème car il n'y a aucune allocation de pêche garantie pour les trois zones entre lesquelles la côte a été partagée.

Ces pêcheurs pensent maintenant que même s'ils avaient trois permis, cela ne signifie pas qu'ils gagneraient trois fois plus que le détenteur d'un seul permis. Considérez la situation: l'exploitant d'un bateau qui cumule trois permis passera toujours d'une zone à l'autre en espérant capturer plus de poissons dans la zone suivante.

Quelle que soit la zone de pêche qu'il quitte, il laissera toujours derrière lui du poisson qu'il a le droit de pêcher puisqu'il est titulaire d'un permis pour cette zone. Voilà donc des gens qui sont propriétaires de permis pour trois zones de pêche, qui ont acheté trois permis. Actuellement, le prix du permis est d'environ 75 000$, mais il change constamment.

Ces gens-là considèrent que le poisson qu'ils laissent derrière eux et qui leur appartient sera capturé par un pêcheur qui n'a peut-être qu'un seul permis. Ils disent donc qu'ils n'utilisent qu'un tiers de leur capacité de pêche, puisqu'ils ne pêchent que dans une seule zone à la fois.

Personnellement je pense que la situation va bientôt un peu changer. Beaucoup de membres de notre industrie sont des personnes d'âge mûr et même plus. La plupart d'entre eux sont plus ou moins fortunés et n'ont peut-être pas besoin de beaucoup d'argent pour bien vivre. Je crois que si l'on adopte le plan tel qu'il est proposé, on risque de se retrouver avec une industrie dans laquelle les gens d'un certain âge considéreront qu'ils pourront s'en sortir en ne gagnant que 20 000$ dans une zone de pêche et que s'ils n'y parviennent pas, ils devront simplement se serrer la ceinture.

.1740

Les personnes qui se sont efforcées de maximiser leur revenu auront donc subventionné des pêcheurs à temps partiel. De leur point de vue, plus ils ont de permis, plus c'est le détenteur d'un permis unique qui profitera de la situation. Même ceux qui ont de l'argent et qui l'ont utilisé à titre spéculatif remettent aujourd'hui le plan en question. Certains de ceux à qui j'ai parlé m'ont dit qu'ils seraient même prêts à revendre leur permis parce qu'il leur pose plus de problèmes qu'il n'en vaut la peine. Il n'y a aucune garantie d'allocation. Ce n'est qu'une promesse creuse.

Si l'on reléguait aujourd'hui le plan Mifflin aux oubliettes, je sais de source sûre que les titulaires de permis multiples n'hésiteraient pas un seul instant à vendre leur deuxième ou leur troisième permis. Ils seraient ravis de s'en débarrasser. Le gouvernement ne serait d'ailleurs pas obligé de racheter ces permis à un prix excessif. À cause du plan Mifflin, le prix des permis est en hausse. J'ai parlé à de nombreux pêcheurs et je leur ai demandé quel prix ils demanderaient pour leur permis. Certains m'ont dit 3 000$ le pied, alors qu'avant le plan, le prix en vigueur sur le marché était de l'ordre de 1 300$ le pied. Si ce plan était éliminé, le détenteur n'aurait plus besoin de plusieurs permis puisqu'il pourrait pratiquer la pêche sur toute la côte. Il serait tout à fait d'accord pour se débarrasser d'un des permis au prix coûtant - probablement 1 300 ou 1 400$ le pied. Cela permettrait d'éliminer les permis excédentaires sur lesquels certains ont spéculé et dont ils ont peur aujourd'hui.

Si vous incluez un encouragement fiscal dans ce plan, le pêcheur qui prend sa retraite choisira probablement la formule du rachat plutôt que celle du marché libre pour vendre ses permis, sans compter qu'un encouragement fiscal aurait un caractère non inflationniste. Beaucoup de ceux auxquels j'ai parlé ont essayé de continuer à travailler en respectant les contraintes du plan et comme je l'ai déjà dit, certains ont cru qu'ils pouvaient profiter de l'occasion pour acheter à bas prix au moment où l'industrie était en difficulté. Ils se retrouvent maintenant avec des problèmes.

En fin de compte, ce plan ne fonctionne même pas d'un point de vue économique. Il est irréalisable. Voilà comment je vois les choses.

Le président: Merci.

M. Culbert (Carleton - Charlotte): Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie d'être venus nous faire part de vos préoccupations, car je crois qu'il est important que nous les entendions.

Cela dit, je voudrais revenir à certaines des remarques préliminaires, en particulier celle qu'a faite Dennis Brown. Il a dit quelque chose du genre «une optimisation de l'emploi réalisable dans l'industrie», et il a dit que son groupe recherchait un programme de remplacement. Il avait auparavant déclaré qu'à son avis, il y avait une surcapacité dans l'industrie de la pêche et qu'il fallait trouver un moyen de la réduire; il avait conclu en disant qu'il était partisan de la conservation.

La question qu'il se posait alors était de savoir comment y parvenir. Si je comprends bien, à court terme, vous envisagez une clôture de la pêche pendant toute une saison. Est-ce à peu près cela? Et que comptez-vous faire à long terme?

.1745

Parler de surcapacité m'inquiète. Les stocks diminuent. Moi qui viens de la région de la baie de Fundy, au Nouveau-Brunswick... La pêche n'est pas morte au Canada atlantique. Permettez-moi de rétablir la vérité. Il y a des gens qui, après un bref voyage au Canada atlantique, deviennent instantanément des experts et déclarent que le glas de la pêche a sonné dans cette région. Nous avons créé une industrie très diversifiée là-bas. C'est pour des raisons de conservation que nous avons réduit la durée de nos saisons de pêche et que nous avons commencé à exploiter d'autres espèces.

Quels sont vos plans à long terme en ce qui concerne la conservation?

M. Brown: Vous avez posé une question très complexe, mais M. Fowler a mentionné le fait que l'industrie est cyclique. Comme M. Fowler et d'autres l'ont dit, 1996 est une année creuse. Je suis convaincu que vous serez heureux d'apprendre que, pour certaines remontées de saumon, l'année 1997 sera meilleure. En 1993, sur le Fraser, qui est le principal centre de pêche commerciale du saumon de la côte Ouest - avec les rivières Nass et Skeena - les échappées de saumon rouge ont atteint un chiffre record. Je crois que nous avons capturé plus de 5 millions de saumons rouges géniteurs. Chose curieuse, nous avons alors connu le problème inverse. On nous a dit qu'il y avait trop de poisson et les entreprises ont même refusé d'en acheter à nos membres. Quelques années plus tard c'était le contraire. Je tiens simplement à souligner qu'avec un peu de chance, l'année prochaine les choses devraient aller nettement mieux.

Le fait que la pêche dans le Fraser va s'améliorer l'an prochain ne signifie cependant pas que nous pouvons dormir maintenant sur nos deux oreilles et que tout est réglé. Les centaines de petits cours d'eau qui ont tant d'importance sur le plan de la biodiversité continuent à être terriblement menacés.

Donc, à long terme, il faut que nous survivions à cette année creuse et que nous essayions de tenir jusqu'à ce que les choses s'améliorent, il faudra également tenir compte des deux points que j'ai évoqués plus tôt. Le cliché selon lequel il y a trop de pêcheurs et pas assez de poisson mérite une analyse attentive.

À mon avis, pour répondre à la question, le MPO s'attaque aux pêcheurs et dit ensuite au public, vous êtes contents, n'est-ce pas, de ce que nous avons fait? Mais il y a aussi une autre solution, celle qui consiste à accroître la ressource.

M. Fowler et d'autres ont dit qu'il ne s'agissait pas de créer une propagation artificielle des poissons grâce à des écloseries. Lorsque nous parlons de créer plus de poissons, cela veut dire, comme M. Fowler l'a mentionné, qu'il faudrait augmenter le nombre des poissons dans les frayères grâce à un système de gestion des risques et d'autres genres de programmes tels que la revitalisation des bassins hydrographiques et la protection de l'habitat dans les canaux de frai. Les canaux de frai sont tout à fait différents des écloseries; ils offrent des conditions de frai optimales aux espèces naturelles. Si nous réussissons à combiner les deux, nous parviendrons un jour à faire ce que nous voulons.

Certains ont dit au gouvernement de l'époque, n'hésitez surtout pas maintenant, c'est votre dernière chance; s'ils réussissent à tenir une année de plus, ils voudront tous continuer. Je l'ai entendu dire. Il faut être bien cynique pour donner de tels conseils, et je crois que ceux qui ont dit qu'ils profitaient de ce creux ont fait leur une partie de la dynamique politique existante.

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Il faut aborder ces questions à de multiples niveaux mais il convient de noter que les possibilités de rétablissement du saumon en Colombie-Britannique sont énormes. Nous pouvons le faire et nous le ferons; voilà nos perspectives à long terme. Je vous propose donc une réduction volontaire de la flottille, accompagnée d'un nouvel effort de développement des stocks.

Je ne sais pas si l'on prête suffisamment attention à ce que nous disons, même aujourd'hui, le ministre a fait allusion au fait que les gens demandent à être indemnisés. Ce n'est pas du tout ce que nous réclamons. Tout ce que nous vous demandons c'est que vous nous laissiez vous payer une redevance sur une bonne partie du coût d'investissement initial et que vous mettiez cette redevance en réserve pour l'industrie - en attendant de voir comment nous nous débrouillons, comment se portent les stocks, comment réagiront les flottilles, sous une forme ou sous une autre - et que vous utilisiez cet argent pour la revitalisation permanente des stocks. Cela vous montre bien que nous ne sommes pas venus demander l'aumône.

M. Edwards: Je voudrais dire quelque chose dans le même domaine. Il y a 20 ans que je suis impliqué dans les problèmes de la pêche du saumon sur la côte Ouest de l'île de Vancouver. Je suis président d'un système d'écloseries sans but lucratif. Nous réalisons de très petits projets d'amélioration.

Nous nous efforçons d'empêcher que les remontées qui ont souffert de la dégradation de l'habitat ne disparaissent complètement. Le chef d'une des directions du PMVF a dit que le 24 mai, lorsque nous perdrons nos permis parce que nous avons décidé de ne pas participer à ce plan, on annoncera le nom des écloseries qui perdront le bénéfice des 3 millions de dollars dont le budget du PMVF sera amputé. On nous a dit qu'il est probable que 17 sur 28 d'entre elles seront les écloseries créées dans le cadre du développement économique des petites collectivités côtières, c'est-à-dire celles qui sont financièrement soutenues par ces collectivités. Elles nous aident effectivement à nous occuper d'un grand nombre des petits cours d'eau qui sont en très mauvais état.

Cette mesure est absolument contraire à ce que nous avons demandé à la table ronde et c'est vraiment faire preuve de beaucoup de cynisme que de dire que l'on va commencer par se débarrasser des pêcheurs et ensuite, des programmes d'amélioration. Nous considérons au contraire que la solution à long terme consiste à associer les petits pêcheurs aux projets communautaires dont nous nous occupons depuis des années sur la côte, au lieu de supprimer ceux-ci.

Le président: Anna.

Mme Terrana: Lorsque le syndicat a présenté ses vues, il avait évoqué un projet de transformation du poisson. Voilà un autre problème, d'ailleurs aggravé par la situation, que connaît l'industrie.

Je voudrais que quelqu'un développe cette idée. Je sais que l'ACDI a manifesté un certain intérêt et c'est une question qui pourrait être discutée plus à fond.

M. Radosevic: Nous avons ici des représentants du secteur. Manifestement, s'il y a un bouleversement dans le domaine de la pêche - s'il n'y a pas de poisson, les collectivités de pêcheurs en souffriront - il n'y a pas que les détenteurs de permis qui en subiront les conséquences.

Des secteurs tout entiers de l'industrie, tels que celui des travailleurs à terre, ont été tenus complètement à l'écart de la table ronde. Nous avons bien sûr été représentés par un ou deux matelots du même bateau, mais c'est bien peu de chose lorsqu'on considère que 1 500 à 2 000 emplois risquent de disparaître.

Nous recherchions des services de transition et d'autres mesures d'aide aux personnes déplacées qui n'ont aucun contrôle sur le fait que les permis pourraient être éliminés.

Je crois que c'est une question à laquelle tout le monde s'intéresse. Qu'il s'agisse du plan Mifflin ou d'un autre, il va y avoir une réduction de la flottille. La vie des collectivités va être perturbée. Ce que nous répétons depuis le début c'est qu'il faudra trouver un moyen d'aider les gens à faire la transition.

Nous n'avions pas l'intention de faire de cela la partie principale de notre intervention car nous considérons que ce qui prime c'est la sauvegarde de nos emplois. Nous sommes ici pour sauver notre industrie. Nous sommes ici pour présenter un message en faveur de la conservation de la ressource. Nous ne voulions pas qu'il y ait confusion là-dessus. Certains, je crois, ont délibérément essayé de donner l'impression que tout ce qui nous intéressait, c'était l'argent. Nous avons besoin de bons services de transition, mais c'est secondaire.

Deux ou trois matelots sont présents - Nous avons ici Garth Mirau et Don Sananin. Rafaela et Shannon Solby sont les mieux placées pour vous parler des travailleurs à terre. Si vous voulez avoir le point de vue de l'autre moitié de l'industrie qui a été tenue presque totalement à l'écart des discussions de la table ronde, vous pourriez les consulter. Ils pourraient vous donner des explications beaucoup plus valables sur ces deux secteurs. Nous avons également ici deux membres d'équipage de tenders; ce sont des bateaux-annexes qui embarquent le poisson.

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À ce propos, Bob Carpenter, dont le bateau ne bénéficie pas des dispositions de rachat et qui risque donc de perdre ses moyens de subsistance avec son bateau - l'embarcation n'est pas admissible car il ne s'agit pas d'un bateau de pêche; Bob est un matelot de bateau-annexe - n'a aucun rôle à jouer ici, en dépit du fait qu'il était à la table ronde. Le plan Mifflin ne prévoit rien à ce sujet...

Le président: [Inaudible - La rédaction].

M. Radosevic: Des membres d'équipage de tenders? En dépit du nom, on n'est pas toujours très tendre chez ces gens-là. C'est même souvent le contraire. Le mot tender est un vieux terme de la marine qui est utilisé pour les annexes chargées de s'occuper des bateaux de pêche ou de les desservir. Elles les ravitaillent ou embarquent le poisson pour le livrer au port. Il s'agit donc en fait de bateaux de transport. On les appelle aussi bateaux collecteurs.

Si vous avez des questions, vous pourriez peut-être les poser à certaines des personnes présentes.

Le président: John, nous avons convenu que nous nous arrêterions dans un quart d'heure. Si tous les autres sont d'accord, c'est ce que nous allons faire.

Comment voulez-vous procéder, Anna?

Mme Terrana: L'exposé ne sera pas bien long. L'autre gros problème est celui du nombre de personnes qui sont sur le point de perdre leur emploi. C'est déjà fait pour certaines.

Le président: Veuillez donc vous asseoir à la table.

M. Sananin: Je m'appelle Don Sananin. Je suis mécanicien à bord d'un senneur. Je pratique la pêche depuis 29 ans.

Dans le cas qui me concerne, il y a environ deux semaines, j'ai demandé au propriétaire d'un bateau si nous allions continuer à pêcher. Le propriétaire de ce bateau qui est un bateau de pêche de la côte sud n'a pas l'intention d'acheter un autre permis car cela lui coûterait 500 000$. Une fois que vous choisissez la côte sud, vous êtes obligé d'y rester pendant cinq ans - voire de manière permanente, car il est quand même possible qu'on change encore les règles du jeu.

Comme il n'y aura pas de pêche sur la côte sud parce que les stocks ont disparu, je vais rester chez moi. Dans la pratique, c'est comme si j'avais perdu mon emploi. Cinquante pour cent des autres membres de l'équipage perdront eux aussi leur emploi à cause de ce double système d'octroi de permis.

Le président: Quelqu'un a-t-il une remarque à faire à ce sujet?

Mme Shannon Solby (témoignage à titre personnel): Je m'appelle Shannon Solby. Je travaille comme organisatrice à terre pour la United Fishermen and Allied Workers Union.

J'ai déjà discuté avec Anna et je me demande si elle parle de la proposition concernant le saumon rose. Je crois que les États-Unis ont un excédent de saumon rose et qu'ils le transforment pour que les ouvriers d'usine puissent continuer à travailler. Les conserves de saumon rose sont envoyées aux établissements hospitaliers.

Je crois que M. McWhinney a lui aussi une copie de la proposition concernant le saumon rose. J'ai des copies supplémentaires que je peux distribuer si vous le voulez. Il s'agit essentiellement de continuer à faire tourner les usines de transformation et de continuer à employer les travailleurs à terre car très peu d'entre eux auront du travail cette année.

M. McWhinney: Pourriez-vous résumer brièvement la situation de manière à ce que cela puisse être inscrit au compte rendu - je veux parler du plan de Jim Sinclair pour les usines de transformation.

Mme Solby: Pardon?

M. McWhinney: Je vous demande de mentionner brièvement le plan élaboré par M. Sinclair, de manière à ce que nous puissions en faire état au compte rendu.

Mme Solby: Oui, Jim Sinclair, qui est deuxième vice-président de la United Fishermen and Allied Workers Union, a élaboré un plan; j'en ai quelques copies supplémentaires que je vais distribuer.

Le problème est le suivant: nos travailleurs à terre seront au chômage cet été, et cela pourrait toucher plus de 5 000 personne. Je vous remercie.

M. Carpenter: J'ai remis un bref formulaire à tout le monde. Je résume le tout en deux mots: il y a longtemps que nous avons amélioré la flottille de bateaux-annexes. Au nom des membres des équipages, j'ai remis un mémoire aux auteurs du rapport Pearse en 1982. Les subventions aux chantiers navals, il y a des années, ont permis de construire ces bâtiments qui transportent le poisson des lieux de pêche aux usines. C'est un moyen d'assurer la viabilité économique, la qualité et la quantité du produit et, surtout, d'assurer la conservation à bord de navires capables d'intervenir instantanément sur les lieux de pêche. Le MPO connaît tout de suite le poids, les chiffres. Ce ne sont pas des approximations. Il leur faut du concret.

.1800

Toutes les statistiques du ministère des Pêches et des Océans... À la fin de la journée, à l'usine, ils sont en forte majorité et cela pourrait jouer un grand rôle dans la conservation.

Nous avons installé un matériel de réfrigération très perfectionné à bord de ces navires. Leur modernisation nous a permis d'être concurrentiels sur les marchés mondiaux. Ces navires ont amené le poisson aux usines de toute la côte. Leur fonction est de desservir une foule de petites collectivités où il y a des usines, ce qui implique aussi le transport par camion et d'autres emplois. La fonction du bateau-annexe est donc extrêmement importante et a été complètement négligée. Je viens de vous la décrire très brièvement.

Il faut donc tenir compte du fait que ces annexes constituent une part importante de l'industrie. Ces 70 à 80 bâtiments valant de 80 000 à 600 000$ ont à leur bord 400 ou 500 hommes. Avec le plan Mifflin, c'est terminé, on n'aura plus besoin d'annexes.

J'ai terminé.

Le président: Merci. Garth Mirau.

M. Mirau: Merci de ne pas m'avoir oublié.

Je m'appelle Garth Mirau et je suis capitaine d'un senneur à Nanaïmo. Je ne suis pas détenteur d'un permis. J'ai investi un peu d'argent dans des engins de pêche et j'ai participé à la table ronde.

Si j'ai accepté l'idée de la réduction de la flottille - j'hésite à parler de rationalisation car je ne crois pas qu'il suffise de réduire le nombre des permis pour cela - c'est parce que j'y ai été contraint et forcé. Nous avons parlé d'un système dans lequel les gens quitteraient volontairement l'industrie grâce à une formule de rachat financée conjointement par l'industrie et le gouvernement. Nous avons parlé tout à l'heure d'un vote sur la côte dans lequel 92 p. 100 environ des gens se sont prononcés en faveur d'une formule de rachat cofinancée par l'industrie et le gouvernement.

Le rachat semblait acceptable dans un contexte de réduction de la flottille parce que le ministre précédent avait donné l'assurance, ou du moins avait évoqué la possibilité, que les victimes de la restructuration de l'industrie - à la suite de la vente des bateaux ou pour toute autre raison du même genre - aient accès à un programme de recyclage et bénéficient d'une période de transition qui leur permettrait de trouver du travail ailleurs.

Dans mon cas, je ne pense pas qu'un autre permis soit économiquement possible pour le bateau à bord duquel je travaille. Si je ne quitte pas l'industrie d'ici un an ou deux, je finirai par mourir de faim. Dans le plan Mifflin, aucune mention n'a été faite du sort des personnes qui, sans que ce soit leur faute, sont obligées de quitter l'industrie.

J'ai déjà dit que j'ai trois fils. J'ai 54 ans. J'ai travaillé toute ma vie, j'ai payé mes impôts, j'ai apporté ma contribution aux collectivités où je vivais, j'ai élevé une famille et j'ai aujourd'hui huit petits-enfants. Tous ces gens-là vont être victimes de ce plan car, sans exception, nous nous retrouverons tous littéralement jetés à la rue.

Lorsque nous avons interrogé Louis Tousignant pour savoir ce que l'on allait faire de ceux qu'il va ainsi rejeter, il a répondu qu'il existe déjà des programmes provinciaux d'aide à ces personnes. Ce n'est ni plus ni moins que du bien-être social et je ne pense pas que ce soit suffisant. Après cela, il a dit à Dennis Brown et à John Radosevic qu'il irait avec eux, la main dans la main, supplier DRHC de donner un peu d'argent aux personnes ainsi déplacées.

Ce n'est pas une réponse satisfaisante pour des personnes qui ont toujours travaillé et qui sont prêtes à continuer à le faire dans cette industrie. Elles s'en trouvent chassées sans aucune raison.

Le président: Merci.

Mme Burma Lockett (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Burma Lockett, je suis vice-présidente des travailleurs à terre. J'appartiens à un des secteurs qui n'ont pas été invités à la table ronde. Il y a 31 ans que je travaille dans notre industrie. Ma société, la B.C. Packers de Steveston, a informé mes 600 membres qu'ils n'auront pas de travail cet été à cause du plan Mifflin.

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Permettez-moi de faire un petit historique de notre groupe. Il comprend un grand nombre de femmes âgées, Chinoises ou Indiennes de l'Inde, qui connaissent mal l'anglais. Quand on vous dit qu'il suffit de leur donner une formation pour les réinsérer dans la population active, il est bien évident que cela ne marchera pas. C'est un gros problème pour nous. J'ai toujours travaillé, et on m'a catégoriquement assurée...

D'autres usines de la vallée du bas Fraser ont également reçu le même avis. Si le plan Mifflin entre en vigueur, les collectivités côtières, tous les travailleurs à terre de ces régions ainsi que tous les autres travailleurs de l'industrie de la pêche ne s'en sortiront pas. À Steveston, les entreprises ferment leurs portes. Les avis sont unanimes. Il faut que quelqu'un nous écoute. Il faut que nous empêchions la mise en oeuvre de ce plan.

Le président: Merci.

Si vous avez tous terminé, M. Byrne a une question à poser.

M. Byrne (Humber - Saint Barbe - Baie Verte): Merci, monsieur le président. J'ai en effet quelques questions à poser.

Si je puis m'exprimer à titre personnel, un des témoignages les plus frappants de cet après-midi a probablement été celui de Teresa. Je viens de Terre-Neuve, d'une région où un moratoire a été imposé sur la pêche de la morue et du poisson de fond. Je vivais dans une petite localité de375 habitants dont les signes extérieurs de richesse les plus marquants étaient un bureau de poste, une épicerie, et c'était à peu près tout. Nous vivions du bûcheronnage et de la pêche.

Un de mes souvenirs les plus troublants m'est revenu en mémoire en écoutant Teresa. Je connais la douleur, la souffrance et le désespoir d'une collectivité dont l'avenir est incertain.

Teresa, je suis de tout coeur avec vous et avec les personnes que vous représentez. Je sais ce que vous vivez actuellement. Très franchement, je ne vous envie pas. Être représentante d'une collectivité n'est pas une tâche facile de nos jours où il y a tant de souffrances et d'incertitude, comme celles auxquelles vous êtes aujourd'hui confrontés.

Je vous remercie d'être venus cet après-midi et de nous avoir fait part de vos opinions, de nous avoir décrit vos expériences, car cela nous instruit et nous rend plus capables de traiter les réalités auxquelles vous êtes exposés.

Je dirais simplement qu'il est très important de faire front commun. C'est une des choses que j'ai apprises. Je suis biologiste. J'ai travaillé pour une association de développement économique communautaire pendant de nombreuses années. J'ai travaillé dans le domaine de la mise en valeur du saumon et j'ai lutté pour créer un esprit de coopération entre les groupes communautaires et les particuliers ainsi que les utilisateurs concurrents de la ressource afin qu'ils s'unissent pour faire face aux problèmes que vous connaissez sans doute aujourd'hui. Je connais les difficultés d'une telle entreprise.

Tout ce que je peux vous dire, moi qui suis déjà passé par là, c'est de demeurer unis. Cela a été très difficile pour moi, car si je défendais les intérêts de ma collectivité, je savais également qu'il fallait que je protège avant tout la ressource. Je crois que c'est une des premières choses que nous devons faire, alors même que nous faisons face aux problèmes socio-économiques créés par la diminution de la ressource. Alors même que nous sommes confrontés aux problèmes socio-économiques créés par cette diminution, je crois qu'une des premières choses à faire - M. Suzuki l'a fort bien dit dans son témoignage - est de tenir compte des exigences et des priorités de la ressource elle-même. Les décisions que nous prenons dans le domaine socio-économique viennent en second lieu, même pour les collectivités qui, sans la ressource, disparaîtraient.

Je n'ai jamais rien vécu de plus difficile, mais il a fallu prendre d'abord soin de la ressource, car c'est elle qui joue un rôle déterminant dans la vie de la collectivité. À Terre-Neuve, il a fallu beaucoup de temps avant que cela soit accepté.

Une des raisons pour lesquelles cela a été si difficile, c'est que les politiciens d'autres parties de la région me disaient que ma collectivité ne méritait pas d'être indemnisée, qu'elle ne méritait pas qu'on se préoccupe de son sort. Je n'ai d'ailleurs pas particulièrement apprécié cette attitude et je comprends donc très bien ce que vous demandez. Tout ce que vous voulez c'est que l'on permette à vos collectivités de survivre. Je vous dirai simplement d'agir avec prudence et de demeurer unis.

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Étant donné que nous en arrivons aux mêmes conclusions, tant sur la côte est que, maintenant, sur la côte Ouest - et j'espère que nous pourrons utiliser certains des exemples de la côte de l'Atlantique pour trouver des solutions aux problèmes de la côte du Pacifique - acceptez-vous le principe selon lequel, bien que les besoins socio-économiques de la collectivité soient extrêmement importants, c'est la ressource qui prime? J'aimerais avoir votre avis à ce sujet.

Mme Ransome: Absolument, c'est le poisson qui passe avant tout. Je n'ai pas le moindre doute que tout ceux qui se trouvent dans cette salle et tous les membres de nos collectivités sont d'accord avec cette déclaration - absolument personne n'est opposé à ce qu'on fasse un effort en faveur du poisson.

M. Byrne: Si l'expérience de la côte de l'Atlantique peut nous être utile, c'est probablement parce qu'il a été un peu plus difficile pour les gens de se faire confiance. Par exemple, sur la côte du Pacifique, il y a beaucoup de secteurs de flottille concurrents. Bien que vous soyez très unis aujourd'hui - je vous encourage à le demeurer et je crois que vous le ferez - il y a des questions d'allocation qui exigent une réponse. Je crois qu'il est très facile de cultiver le fractionnement. Je crois qu'il est très facile d'être cynique. Je me contenterai donc de vous encourager à faire front commun et à défendre la ressource.

Le rapport Cruickshank a été un des leitmotivs du témoignage. Malheureusement, je n'ai pas eu l'occasion de l'examiner très en détail. Si mes souvenirs sont exacts, ce rapport était entre autres favorable à l'existence de secteurs d'engins communs.

Pouvez-vous me dire ce qui vous plaît et ce qui vous déplaît dans le rapport Cruickshank? Il ne suffit pas en effet de dire que le plan Mifflin n'est pas le meilleur. De quoi êtes-vous partisan?

M. Brown: Nous pouvons vous présenter un sommaire très abrégé des principaux points du rapport Cruickshank. Je crois que nous l'avons ici.

M. Radosevic: Nous le remettrons à tous les membres du comité.

M. Brown: Permettez-moi simplement de dire que M. Cruickshank était partisan - je crois l'avoir déjà dit - d'un programme de recouvrement des coûts grâce à une redevance, pour réduire la flottille par le jeu d'une formule de rachat, du renouvellement de la ressource grâce à la mise en valeur du saumon, d'une disposition touchant les propriétaires-exploitants, pour lutter contre la concentration des permis aux mains des sociétés, et d'un certain nombre d'autres points. Nous vous communiquerons le document. Mais chaque point évoqué dans vos questions et votre exposé a été confirmé dans le rapport Cruickshank.

M. Byrne: Pensez-vous que nous devrions maintenant revenir au rapport Cruickshank et appliquer les plans qu'il contient tels quels?

M. Brown: Je crois qu'il serait bon que votre comité invite M. Cruickshank à venir témoigner le plus tôt possible, à votre prochaine réunion par exemple. Comme je l'ai déjà dit, c'est peut-être l'homme qui nous aidera à nous sortir des difficultés actuelles. Je vous conseille donc non seulement d'appuyer son rapport mais de lui demander de venir répondre en personne à vos questions.

M. Radosevic: Une dernière remarque à ce sujet. Je crois que le groupe est en général d'accord sur le fait que pour les questions qui affectent directement l'industrie, comme c'est le cas de la réduction de la flottille et de la délivrance des permis, le rapport Cruickshank constitue le point de départ. L'opinion est unanime à ce sujet.

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Il y a certains point que le rapport Cruickshank... et Cruickshank a lui-même d'ailleurs reconnu que son mandat ne consistait pas à rentrer dans le détail de la mise en valeur du saumon, du rôle que les collectivités pourraient y jouer, et de certaines autres questions.

Le groupe reconnaît également à l'unanimité qu'il faudrait instaurer un processus permettant aux collectivités, aux organismes de protection de l'environnement, à l'industrie, de s'occuper de ces questions de mise en valeur. Il y a donc une double offensive à amorcer mais indiscutablement, le rapport Cruickshank est la base sur laquelle le groupe s'est fondé pour présenter ses remarques au sujet de la délivrance des permis et de la réduction de la flottille.

Le président: Madame, vous vouliez faire quelque chose.

Mme Solby: Oui. M. McWhinney voulait que cela soit inscrit au compte rendu... maintenant que j'ai distribué les propositions concernant le saumon. Le document a été rédigé par M. Jim Sinclair.

M. McWhinney: Vous avez mentionné la dernière page, en particulier, la recommandation en faveur d'une allocation de 8 millions de dollars par le gouvernement fédéral...

Mme Solby: Est-ce à la dernière page?

M. McWhinney: Oui. Peut-être pourriez-vous la lire aux fins du compte rendu, pour que nous la retrouvions facilement.

Mme Solby: En commençant par la première, voici nos recommandations:

1) Que les gouvernements fédéral et provinciaux établissent immédiatement un groupe d'étude mixte en vue de la mise en oeuvre d'une stratégie de règlement des problèmes à court et à long terme liés à la crise de l'industrie de la conserve en Colombie-Britannique.

2) Que le gouvernement fédéral affecte 8 millions de dollars de son budget d'aide alimentaire à l'achat de saumon rose transformé en 1996 par les conserveurs de la Colombie-Britannique et que le prix par caisse soit fixé par le ministère des Pêches et des Océans, après consultation de l'industrie au sujet des coûts de production. Ce montant est similaire à celui qui a été consacré aux achats de poisson en conserve sur la côte est et représente une faible portion du budget global. Si cette proposition était acceptée, cela ramènerait simplement le pourcentage de l'aide pour les achats de poisson au niveau de l'an dernier.

3) Que les gouvernements fédéral et provinciaux établissent un fonds commun de 8 millions de dollars pour l'achat de saumon rose destiné à l'usage domestique et institutionnel. Le saumon serait acheté dans les mêmes conditions que celles qui sont énoncées dans la recommandation 2 et il serait utilisé en consultation avec l'industrie.

Je vous remercie.

Le président: Merci, madame Shannon.

Monsieur Wells aimerait probablement terminer par quelques questions.

N'y a-t-il pas d'autres questions?

M. Cummins: Je tiens à vous signaler que Bill Irving, le maire de Ucluelet, se trouve ici. Je crois que nous avons peut-être fait preuve d'un peu de négligence en ne lui donnant pas l'occasion de nous parler plus longtemps. Il serait sans doute bon de lui en offrir la possibilité.

M. Irving: J'ai résumé.

Le président: D'accord. Nous allons donner la parole à Derek et nous reviendrons ensuite à vous, John. Le temps passe.

M. Wells (South Shore): Merci, monsieur le président. Je dispose de combien de temps?

Le président: Dix minutes.

M. Wells: Merci à tous d'être venus.

John, je suis heureux de vous revoir. Je vous ai parlé l'an dernier lorsque je suis allé en Colombie-Britannique étudier l'industrie de cette province. Vous vous en souvenez?

M. Radosevic: Fort bien.

M. Wells: Vous m'aviez présenté cinq solutions qui vous paraissaient indispensables, et vous en avez mentionné quelques-unes. Ce dont je voudrais vous parler un peu - c'est un point qui a déjà été soulevé par trois ou quatre personnes mais qui mérite qu'on y revienne - c'est de l'assainissement et de la conservation de l'habitat.

Lorsque j'étais en Colombie-Britannique l'an dernier, nous avions parlé du fait qu'il ne s'agissait pas strictement d'une responsabilité fédérale. Les provinces et les municipalités ont elles-mêmes une grosse part de responsabilité dans la destruction de l'habitat. A-t-on fait quelque chose aux niveaux provincial ou municipal pour régler ce problème? Deuxième question, quel est, à votre avis, le rôle fédéral dans la conservation de l'habitat?

M. Radosevic: J'en ai parlé très brièvement tout à l'heure. Je crois que ce qu'il nous faut c'est une approche globale. La table ronde a recommandé que M. Mifflin en discute avec les municipalités et la province et qu'il effectue quelques études d'impacts afin que nous puissions nous faire une idée des mesures à prendre. Ceux qui travaillent dans l'industrie de la pêche sont certainement très bien placés pour participer à la revalorisation de l'habitat dans les collectivités.

Puisqu'il faut que ce travail soit fait par quelqu'un, pourquoi pas alors par des gens de l'industrie de la pêche, qui pourraient ainsi améliorer leurs revenus, réduire la pressions sur la ressource et sur les revenus? Cela me paraît tout à fait logique.

Si vous pouvez nous aider à rencontrer M. Young, nous proposerons à DRHC d'effectuer cette étude d'impacts. Cela aurait dû être fait dans le cadre du processus de la table ronde. Il nous paraît inconcevable qu'il n'y ait pas eu d'études d'impacts sur les collectivités autochtones, qu'il n'y en ait pas eu sur les collectivités en général, sur la conservation, sur les personnes qui ne détiennent pas de permis, notamment les travailleurs à terre, les membres d'équipage de bateaux-annexes et les matelots.

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Rien n'a été fait dans ce domaine. Nous ne savons donc pas exactement quelles questions poser - nous savons seulement que nous demanderons aux gens de DRHC, à ceux des provinces, des municipalités, de l'industrie, et des collectivités, y compris les écologistes, de se réunir et de s'engager vraiment à renouveler l'habitat des salmonidés, entre autres choses.

C'est l'approche qui s'impose. Nous proposerons à M. Young d'adopter une approche globale, au lieu de lui dire que nous voulons 5 ou 10 millions de dollars, ce qui n'a aucun sens pour nous. Quel que soit le chiffre, ce n'est pas ainsi qu'il faut s'attaquer au problème.

M. Wells: Peut-être serait-il bon de demander à M. Culbertson, que j'ai également rencontré lors de mon voyage en Colombie-Britannique l'an dernier, de nous parler des problèmes éventuels et de la manière d'amener les municipalités à adopter en matière de planification les règlements appropriés dont nous avons parlé l'an dernier et qui doivent être appliqués pour protéger l'habitat.

M. Stuart Culbertson (sous-ministre adjoint, Pêches et Alimentation, ministère de l'Agriculture, des Pêches et de l'Alimentation de la Colombie-Britannique): Merci. Je suis heureux de vous revoir, monsieur Wells.

Au cours des deux ou trois dernières années, le gouvernement de la Colombie-Britannique a beaucoup fait pour assurer la protection de l'habitat. Nous avons présenté le code de pratiques d'exploitation forestière, qui fixe des amendes allant jusqu'à 1 million de dollars en cas d'infractions, qui impose la création de zones tampons destinées à protéger les aires riveraines et qui définit des normes améliorées pour les ponts et les routes afin d'empêcher l'exploitation forestière de polluer les cours d'eau.

Nous avons adopté des mesures de régénération forestière en Colombie-Britannique en lançant un programme de 15 millions de dollars pour la protection et l'inventaire de l'habitat du poisson. Dans le cadre de la régénération forestière, nous avons lancé le programme de régénération des bassins hydrographiques, avec un budget de 88 millions de dollars pour l'exercice en cours, destinés à la régénération et au rétablissement du bassin hydrographique, à la régénération de l'habitat du poisson dégradé par l'exploitation forestière.

Pour revenir plus précisément à ce que vous disiez, l'an dernier, nous avons mis en oeuvre un programme de protection de l'habitat du saumon en milieu urbain, avec un budget de 12,5 millions de dollars sur cinq ans. Ce programme aide les groupes communautaires à gérer le bassin hydrographique se trouvant dans le bassin de Géorgie en Colombie-Britannique, mais il bénéficie d'une aide importante des gouvernements locaux, dont les agents de planification et les agents de surveillance de l'environnement participent à la protection de l'habitat du poisson, soumis à d'énormes pressions dans la partie continentale inférieure du bassin de Géorgie.

Ajoutons à cela que, l'an dernier, on a investi des sommes considérables dans la modernisation des installations d'épuration des eaux usées des îles Annacis et Lulu. C'est le plus important projet technique en cours dans l'ouest du Canada. La province a investi 174 millions de dollars dans ce projet pour prévenir la pollution du Fraser, qui est le principal cours d'eau fréquenté par les salmonidés.

Permettez-moi de mentionner aussi le fait qu'une part importante du discours du Trône de la province de la Colombie-Britannique, prononcé la semaine dernière, était consacrée aux salmonidés et à la collaboration entre le gouvernement et les groupes représentés ici aujourd'hui pour des questions telles que le traité sur la pêche du saumon et les initiatives de régénération. Nous nous sommes engagés à présenter, au cours de la présente session de la législature, une loi sur la protection de l'habitat du poisson qui permettra de donner une base législative plus solide aux engagements financiers déjà pris par la province.

Si vous le désirez, je pourrai examiner ces divers points plus en détail avec vous.

M. McWhinney: L'assemblée législative n'a-t-elle pas été dissoute?

M. Culbertson: Oui, je crois. Mais je ne sais pas exactement si le projet de loi a été présenté. Je crois qu'on avait l'intention de le faire avant la fin de la session.

M. Wells: Je voudrais passer à un autre point. C'est peut-être M. Fowler qui l'a soulevé. À ce moment-là nous ne parlions pas du saumon mais des contingents individuels pour la morue charbonnière et le flétan. Je ne sais plus exactement qui en a parlé.

C'était donc vous. J'aimerais savoir si ces contingents individuels sont transférables. S'agit-il de CI ou de CTI?

M. Fowler: De contingents transférables, de contingents transférables individuels.

M. Wells: Ce sont donc des CTI.

M. Fowler: Oui.

Il y a plus d'une façon de les transférer. Je peux par exemple acheter le contingent accordé à une autre personne, ou je peux tout simplement le prendre à bail. Donc si j'avais un contingent de10 000 livres de flétan et que je voulais accroître mes possibilités de capture, je pourrais louer un contingent supplémentaire de 20 000 livres en m'adressant à Dennis, mon riche ami, ce qui le rendrait encore plus riche et me permettrait aussi d'arrondir un peu mon revenu.

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C'est ainsi que fonctionne le système des CTI. Ces contingents sont individuels et transférables. Un des problèmes tenait au fait que le contingent était transférable et pouvait être loué à bail. Si ce système soulève des critiques dans la région - arrêtez-moi si je me trompe - c'est parce qu'il y a environ 700 permis de pêche du flétan et que moins d'un tiers des détenteurs pratiquent réellement la pêche. Cela fait pas mal de pêcheurs en chambre, si j'ose dire.

Les CTI donnent lieu à beaucoup de manoeuvres politiques en Colombie-Britannique. Ce système a beaucoup de partisans, mais aussi beaucoup de détracteurs. Je suis un de ceux qui ne sont ni vraiment pour ni vraiment contre. En gros, l'idée n'est pas mauvaise; cependant, il faut que le poisson continue à être capturé par autant de pêcheurs que possible. C'est probablement la raison pour laquelle la notion de transférabilité ne me plaît pas beaucoup. Lorsque vous avez un contingent, c'est vous qui devriez l'exploiter. L'idée de le louer me paraît très discutable et pose bien des problèmes d'ordre politique. Je ne suis pas venu créer la dissension au sein de la délégation, mais je ne veux pas...

M. Wells: Non, je ne veux pas entamer un débat là-dessus. J'ai simplement soulevé la question parce que je sais que vous suivez de très près la situation sur la côte est.

M. Fowler: C'est vrai, et je sais que la pêche de la côte est approche de valeurs records. J'ai parlé à beaucoup de gens de cette région de la pêche du crabe, des pétoncles et du homard. Je suis allé dans l'Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Je suis un néophyte pour ce qui est des questions intéressant la côte est, mais mon ignorance n'est pas totale.

M. Wells: Je crois que nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres.

Vous avez peut-être entendu parler des récents actes de désobéissance et de l'occupation des bureaux du MPO. Je ne sais pas si on en a parlé dans l'ouest.

M. Fowler: Si. Nous l'avons appris récemment à Montréal.

M. Wells: Cela a débuté dans ma circonscription. Vous comprenez donc un peu ce à quoi j'ai affaire. Une des principales questions - pas la seule, car il y en avait beaucoup d'autres - était celle des CTI et, en particulier, celle de savoir si ce système serait adopté pour la pêche côtière.

M. Fowler: Il y a la pêche côtière et la pêche hauturière, les flottilles de gros navires et de petites embarcations.

M. Wells: C'est une question très litigieuse sur la côte est, en va-t-il de même sur la côte Ouest?

M. Fowler: Dans certains camps oui, dans d'autres, non. C'est selon l'endroit.

M. Wells: Je ne tiens pas à discuter du pour ou du contre de la situation. Là n'est pas la question.

M. Fowler: Cela crée en tout cas bien des conflits. Dès que vous commencez à parler de privatiser ce que certains appellent une ressource en copropriété, cela risque de créer aussitôt un groupe de possédants et un autre de non-possédants. Le débat est très politique.

M. Wells: Avez-vous poursuivi la discussion des contingents communautaires sur la côte Ouest?

M. Fowler: Oui et nous avons également examiné ce que vous appelleriez des contingents d'entreprise, qui sont une forme de CTC. Je crois que cela pose des problèmes. En Colombie-Britannique nous avons des stocks de passage, des stocks de poisson hautement migrateurs. Si quelqu'un, sous prétexte qu'il vit dans une zone géographique donnée, prétend qu'il a droit à un certain pourcentage des poissons qui passent chez lui, les Autochtones qui vivent sur le Fraser pourraient en dire autant. Ils pourraient dire que le frai se passe chez eux, sur leurs lieux de pêche traditionnels, et que tous les poissons devraient donc leur appartenir. De tels arguments sont très difficiles à combattre.

M. Wells: Je voudrais ajouter un mot pour conclure, monsieur le président. Un des problèmes du comité est que certains de ses membres viennent de l'Est et d'autres de l'Ouest et que, parfois, nous n'avons pas suffisamment étudié la pêche chez nos collègues. Nous n'allons pas assez souvent sur la côte Ouest pour être vraiment au courant des problèmes qui s'y posent. C'est pourquoi j'ai pris l'initiative d'y aller l'an dernier, pour le faire. Les membres du comité qui viennent de la côte est devraient... Nous avons beaucoup de problèmes communs à résoudre. Je crois que nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres et je voudrais que nous fassions plus d'efforts en ce sens.

M. Fowler: Il y a un point que je vous recommanderais particulièrement d'examiner. C'est la manière dont le plan dit de rationalisation de la flottille, tel qu'il est actuellement proposé, fonctionne.

D'un côté, on nous a dit qu'on a créé un fonds de 80 millions de dollars pour le rachat de bateaux. On nous a ensuite dit qu'on allait diviser la côte en trois zones et, en passant, que nous ne pouvons pas pêcher le saumon rouge du Fraser dans deux de ces trois zones. Si nous voulons le faire, nous sommes obligés d'acheter un permis et, toujours dit en passant, le 24 mai est la date limite pour le faire. Ce permis est applicable à une seule zone, et cela de manière définitive; si nous voulons avoir accès à au moins deux de ces zones, nous sommes obligés d'acheter un autre permis.

Le gouvernement tient donc 80 millions de dollars en réserve pour nous et nous dit qu'il sera ravi de racheter notre permis, de le déchirer et de réduire la flottille. Notre réaction est de dire, c'est parfait, c'est tout à fait ce que nous voulons. En revanche, le gouvernement me dit qu'il faut que j'aille acheter ce permis. Je me retrouve donc en concurrence avec le gouvernement et ses 80 millions de dollars.

Et tous les courtiers de Colombie-Britannique, les intermédiaires pour ces permis et tout le reste, vous diront aussi que tout cela est bien fragile. L'an dernier, nous avons eu un manque à gagner de 150 millions de dollars à cause de l'effondrement de la pêche du saumon rouge du Fraser.

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Chaque année, en moyenne, nous pêchons 80 000 tonnes de saumon en Colombie-Britannique. Cette année, le chiffre sera de l'ordre de 20 000 tonnes. Pourtant, on nous conseille d'aller dépenser notre argent et on ajoute en passant qu'il y a un fonds de 80 millions de dollars qui a été établi pour concurrencer le capital privé.

Quelqu'un a mentionné tout à l'heure que le coût des permis était passé de 1 100$ le pied avant l'annonce du plan Mifflin à plus de 1 700$ le pied en moyenne maintenant. Quiconque veut acheter aujourd'hui un permis se heurte à la concurrence représentée par ces 80 millions de dollars.

Le fonds de 80 millions de dollars disparaîtra s'il n'est pas totalement épuisé à la fin de juin. Il ne sera pas utilisé à cause de la surenchère du capital privé. Les gens achètent par peur de tout perdre. C'est cela le fond du problème.

De toute façon, ce système est bien fragile car lorsque les 80 millions de dollars disparaîtront, le prix des permis s'effondrera. Si je paie 1 700$ le pied demain, j'aurai bien de la chance si j'obtiens1 000$ du pied en septembre, après la saison de pêche catastrophique qui est prévue.

Voilà le genre de chose que nous voulons que vous sachiez.

Le président: Une dernière remarque de Greg.

M. Wadhams: Lorsque Ron parle du prix au pied, il s'agit du bateau de pêche aux filets maillants ou peut-être du bateau de pêche à la traîne, mais dans le cas du senneur, le montant est beaucoup plus élevé et donc plus compétitif.

Depuis que la côte Ouest peut compter sur les 80 millions de dollars pour le rachat des permis, le prix des permis monte en flèche. Il paraît que certains senneurs ont payé 6 800 à 8 000$ le pied. Et ça augmente tous les jours.

Le président: Merci beaucoup.

Mike, vous avez une motion?

M. Scott: Oui, monsieur le président. J'ai une motion à présenter au comité, avec deux ou trois modifications mineures que je voudrais apporter.

Le président: Avant de recevoir votre motion, je voudrais remercier tous ceux qui sont venus de si loin.

Des voix: Bravo!

Le président: Monsieur Suzuki nous a mis au pied du mur. Il a dit que nous sommes ou devrions être la conscience du ministère des Pêches et des Océans. Je crois que la première chose à faire est donc de poursuivre l'étude de cette question.

Je recommande que M. Cruickshank, et peut-être notre Président et M. Pearse viennent combler quelques lacunes dans nos connaissances. Nous ne sommes pas des experts. Vous avez comblé beaucoup de ces lacunes aujourd'hui et je tiens à vous en remercier. Comme le dit M. Byrne, nous demeurerons unis et peut-être parviendrons-nous à un résultat.

Nous n'avons pas encore la traduction de la motion.

M. Scott: J'ai dit à M. Bernier que nous faisions de notre mieux pour lui fournir le texte traduit le plus tôt possible.

M. Culbert: Monsieur le président, je ne sais pas exactement quelle était l'intention deM. Scott, mais après avoir écouté les exposés faits cet après-midi, je souhaiterais beaucoup poursuivre l'examen de problèmes et de préoccupations de ce genre.

Je recommande donc vivement que l'on essaye d'obtenir la comparution de M. Cruickshank le plus tôt possible. D'autre part, à cause de certains problèmes connexes, il serait peut-être bon d'entendre également M. Fraser. Une foule de points extrêmement importants sont en train de se préciser.

Pendant les exposés, on a fait circuler un avis de motion qui circonviendrait ma proposition et cela m'inquiète un peu. Si le président a l'intention de traiter cette question, je propose que l'avis de motion soit déposé, s'il est recevable, jusqu'à ce que nous poursuivions dans ce domaine.

M. Scott: Monsieur le président, lorsque le ministre est venu en Colombie-Britannique, le29 mars, et qu'il a annoncé son plan, je me souviens très clairement qu'il a déclaré que le plan n'était pas parfait et pourrait être modifié, en particulier si des défauts étaient signalés.

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À en juger d'après les témoignages de nombreux témoins présents, je crains fort que le ministre n'ait surtout écouté les conseils de ses collaborateurs et qu'il n'ait aucun contact avec les personnes que nous avons entendues aujourd'hui.

Ce qui m'inquiète aussi beaucoup, c'est qu'il ne reste pas beaucoup de temps. Le 24 mai, c'est à dire dans 24 jours, ceux qui ne se seront pas fait inscrire en vue du rachat de leur permis seront éliminés.

Nous avons ici quatre recommandations. Je voudrais apporter deux ou trois changements mineurs à leur libellé. Je crois qu'ils correspondent aux vues de bon nombre des témoins.

Je voudrais lire la motion aux fins du compte rendu et je voudrais que le comité l'examine aujourd'hui.

M. Culbert: Monsieur le président, une motion de dépôt a été présentée.

M. Scott: Nous ne l'avons pas lue aux fins du compte rendu.

Le président: À l'ordre!

La motion de dépôt est irrecevable.

M. Byrne: Les témoins entendus aujourd'hui nous ont mis en garde contre tout opportunisme politique. Tout ce que je peux dire c'est qu'au lieu de diviser - je ne veux insulter personne cet après-midi - vous nous avez soumis une recommandation que je juge très bonne.

Parlons à Cruickshank. Si le comité conclut ou se prononce immédiatement avant même d'avoir parlé à un témoin considéré comme extrêmement crédible et utile pour le comité, cela revient à mettre la charrue avant les boeufs. Cela affaiblit la portée de toute recommandation de notre part.

Je demande à tous ceux qui sont présents de ne pas s'inquiéter du fait que nous n'examinons pas immédiatement la motion de M. Scott pour appliquer tout ce qu'il propose. Nous voulons assurer la crédibilité de la procédure et celle du comité lui-même, et c'est pourquoi nous voudrions demander à M. Cruickshank de comparaître devant nous. Ne soyons pas divisés sur ce point.

M. Scott: L'objet de cette motion est de ne pas faire de recommandation sur l'octroi des permis en Colombie-Britannique; son objet est de suspendre provisoirement le processus en attendant la prise de certaines mesures.

Les mesures à prendre sont décrites dans cette motion, notamment l'établissement des allocations, l'exécution d'une analyse indépendante des impacts socio-économiques, et la réaffectation de fonds au projet de mise en valeur des salmonidés.

Cela n'a rien à avoir avec ce que M. Cruickshank pourra nous apprendre ni avec les changements qui pourraient être apportés au plan. Il s'agit simplement d'en suspendre la mise en oeuvre jusqu'à ce que ces objectifs puissent être atteints.

J'estime donc, monsieur le président, que la motion est recevable. Nous disposons de très peu de temps. Le comité a là l'occasion de faire au ministre des recommandations qui reflètent les préoccupations exprimées par les témoins venus de la Colombie-Britannique.

Le président: Votre motion est recevable.

M. Byrne: Ce qui m'inquiète c'est que la motion comporte des conclusions; elle indique notamment qu'il faut établir des allocations, ce à quoi s'ajoutent d'autres recommandations très précises.

Je dirai simplement, en tant que membre du comité, que présenter des conclusions avant même d'avoir entendu tous les témoins... Je crois que M. Cruickshank sera un témoin extrêmement crédible et je voudrais l'entendre avant que nous ne tirions des conclusions au coup par coup. C'est tout ce que je demande.

M. Duncan (North Island - Powell River): Nous voulons donner lecture d'une motion. Tout le monde est en train de discuter d'une motion qui n'a même pas encore été présentée et je considère que cela enfreint le règlement.

M. Scott: Aux fins du compte rendu, je vais lire la motion.

M. Duncan: Nous voulons que cela soit inscrit au compte rendu.

Le président: M. Scott a dit qu'il allait apporter quelques changements.

M. Scott: Très mineurs.

Le président: Nous les attendons. La traduction est-elle prête?

Nous pourrions discuter de la motion en attendant.

M. Duncan: J'en appelle encore au règlement. Pourquoi avez-vous besoin d'une traduction écrite pour présenter une motion en comité? Vous ne...

Le président: M. Scott et M. Bernier se sont entendus. Je n'ai rien eu à faire avec cela.

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M. Duncan: On peut simplement la lire, non?

M. Scott: Je vais le faire. Je lirai ensuite deux changements mineurs du libellé, proposés par moi. M. Bernier recevra la traduction française au moment où je lirai la motion aux fins du compte rendu.

Le président: Monsieur Scott, je crois...

M. Scott: Mon adjoint travaille aussi avec M. Bernier. Si vous me le permettez, monsieur le président, je vais maintenant lire la motion.

Le président: Si vous insistez, car tout le monde l'a déjà lue. Nous pouvons considérer qu'elle a été déposée ou a été présentée. Si vous tenez vraiment à la lire, allez-y, mais je crois que tout le monde en a déjà pris connaissance.

Monsieur Culbert.

M. Culbert: Je note qu'au début de la motion il est indiqué qu'on considère qu'elle a déjà été présentée ou qu'on nous a demandé de la considérer comme telle. Le greffier m'a dit qu'en comité, une motion de dépôt n'est pas recevable alors qu'elle l'est dans toute autre procédure parlementaire. Quoi qu'il en soit, j'accepte. Je propose donc un ajournement.

Le président: Nous avons une motion d'ajournement. Elle prime sur toutes les autres motions, et elle n'est pas sujette à débat.

La motion est adoptée

Le président: La séance est levée.

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