[Enregistrement électronique]
Le jeudi 3 octobre 1996
[Traduction]
Le président: Je déclare la séance ouverte. Bonjour, mesdames et messieurs.
J'invite la sous-ministre adjointe de DRHC, Norine Smith, à se joindre à nous. Est-elle présente?
M. Gordon McFee (directeur général par intérim, Politique de l'assurance, ministère du Développement des ressources humaines): Elle sera là dans quelques secondes.
Le président: D'accord.
Nous accueillons également Gordon McFee, Doris Beeman et Mike Wood.
Chers collègues, nous avons un horaire très serré ce matin. Nous pourrons consacrer seulement une heure aux fonctionnaires de DRHC, de 9 heures à 10 heures. Nous avons deux autres groupes et nous devons terminer à 11 h 30. Les gens ont des avions à prendre à 12 h 30.
Au besoin, nous pourrons faire revenir les fonctionnaires de DRHC, mais pour ce matin, nous sommes très serrés. Nous avons une heure à consacrer à ces témoins et nous allons essayer de nous y tenir le plus possible.
Mme Smith est maintenant arrivée.
Vous avez reçu la documentation sur le règlement de l'assurance-emploi applicable aux pêcheurs. Chacun en a reçu un exemplaire et je donne donc la parole à Mme Smith.
Mme Norine Smith (sous-ministre adjointe, ministère du Développement des ressources humaines): Merci, monsieur le président. Merci de nous avoir invités aujourd'hui à vous donner quelques explications sur le règlement applicable aux pêcheurs.
J'ai pensé me reporter à la documentation contenue dans la trousse qui a été remise au comité hier pour passer en revue la teneur du règlement applicable aux pêcheurs. Dans la partie gauche de cette trousse que vous avez reçue hier se trouvent les documents qui ont été remis aux députés qui comptent des pêcheurs dans leur circonscription.
Le président: Les documents qui nous ont été remis la semaine dernière?
Mme Smith: Non, hier.
Le président: Ils nous ont été remis ce matin.
Mme Smith: Cette trousse devrait renfermer quatre documents. Du côté gauche se trouvent une lettre adressée aux députés par le ministre Young et un document d'information sur le règlement applicable aux pêcheurs. Ces documents ont été remis aux députés qui comptent des pêcheurs dans leur circonscription, ainsi qu'à un grand nombre de représentants - de 100 à 150 - du secteur et de ministères des gouvernements provinciaux qui s'intéressent à la pêche, afin de leur donner des renseignements de base sur la teneur du règlement applicable aux pêcheurs.
Ensuite, du côté droit de la trousse, vous avez une lettre du secrétaire parlementaire Bob Nault et les faits saillants du règlement. Ces documents ont été remis au même groupe de députés, de représentants des gouvernements provinciaux et du secteur le 19 septembre, date à laquelle le règlement applicable à la pêche a été déposé à la Chambre des communes. Je vais me servir du document sur les faits saillants pour passer en revue la teneur du règlement.
Le premier principe qui a présidé à la réforme du règlement applicable aux pêcheurs, c'est que toutes les mesures prises dans le cadre de la réforme globale du programme d'assurance-emploi ont été transposées au régime du secteur de la pêche. Donc, pour ce qui est des paramètres généraux du programme d'assurance, les pêcheurs sont assujettis exactement aux mêmes règles que n'importe qui d'autre.
Je vais énumérer rapidement les caractéristiques des réformes du projet de loi C-12 qui s'appliquent également aux pêcheurs.
Il y a par exemple le taux de prestation de base de 55 p. 100, la règle de l'intensité, le revenu assurable dès le premier dollar gagné, la réduction du maximum de la rémunération assurable au niveau annuel de 39 000 $, la réduction du maximum de la prestation hebdomadaire à 750 $, le supplément familial pour les prestataires qui font partie d'une famille à faible revenu, le remboursement des prestations dans le cas des prestataires qui ont un revenu annuel élevé, le revenu minimum de 50 $ avant que les prestations hebdomadaires versées à un prestataire ne soient réduites, le remboursement des cotisations aux travailleurs qui gagnent moins de 2 000 $ par année, et enfin l'admissibilité aux mesures d'emploi prises aux termes de la partie II de la loi. Ce dernier point s'applique à quiconque touche des prestations d'assurance ou en a touché au cours des trois dernières années, ou encore aux femmes qui ont reçu des prestations de maternité ou parentales au cours des cinq dernières années. Tout cela s'applique à tous.
Le règlement à l'intention des pêcheurs traite essentiellement de l'application du régime d'assurance aux particularités du secteur de la pêche. Un principe central a guidé la réforme du règlement à l'intention des pêcheurs, à savoir la mise en oeuvre d'un très grand nombre des recommandations énoncées dans le rapport du groupe de travail Cashin sur les revenus et l'adaptation dans les pêches de l'Atlantique.
Les changements apportés au règlement à l'intention des pêcheurs se rangent essentiellement dans trois catégories. Le premier type de changements visait à passer d'un système fondé sur le nombre de semaines d'emploi - système qui était très lourd, très artificiel, qui nécessitait des règles très complexes sur la répartition et l'étalement du revenu, ainsi que des règles différentes pour différents types de pêche, etc. - à un système qui est beaucoup plus simple et qui est fondé sur la rémunération totale pendant la saison de pêche ou pendant la période de référence.
La norme d'admissibilité pour la rémunération totale variera entre 2 500 $ et 4 200 $, selon le taux de chômage. C'est comparable aux normes d'admissibilité de 420 heures et de 700 heures qui s'appliqueraient aux prestataires du programme d'assurance ordinaire, si l'on suppose un salaire minimum moyen d'environ 6 $ l'heure.
La norme d'admissibilité pour les personnes qui deviennent ou redeviennent membres de la population active a été fixée à 5 500 $, ce qui est encore une fois comparable aux prestataires du régime ordinaire à 6 $ l'heure. Un certain nombre de changements connexes découlent du fait que nous passons à un système fondé sur la rémunération. Par exemple, l'élimination de la disposition des dix meilleures semaines d'emploi pour les pêcheurs, laquelle n'est plus nécessaire puisqu'ils peuvent comptabiliser toute leur rémunération, peu importe quand elle a été gagnée, à la mi-saison, pendant la saison intermédiaire, etc.
Il y a par ailleurs l'élimination de la semaine minimum pour le capitaine. De plus, il n'y a plus de minimums et de maximums hebdomadaires pour l'assurabilité, pour quiconque demande des prestations de pêcheur.
M. Wells (South Shore): Pourriez-vous nous en expliquer encore la raison?
Mme Smith: Parce que la notion de semaine disparaît. Il n'est plus nécessaire d'atteindre un revenu minimum dans une semaine donnée pour avoir une période d'emploi assurable, et il n'y a plus de plafond des prestations après que l'on a atteint un maximum hebdomadaire. Les minimums et maximums qui s'appliquaient dans le cadre du système fondé sur le nombre de semaines ne sont plus pertinents.
La deuxième catégorie de changements, qui reprennent encore une fois les recommandations du rapport Cashin, visaient à donner davantage de souplesse relativement à la période pendant laquelle la rémunération s'accumule et à la période pendant laquelle les pêcheurs peuvent toucher des prestations. Ainsi, la période de référence et la période de prestations peuvent être déplacées de part et d'autre, de quatre semaines plus tôt ou de quatre semaines plus tard. Essentiellement, on a créé un créneau plus large pendant lequel les pêcheurs peuvent choisir leur saison de pêche de 31 semaines et leur «saison de prestations», si je peux dire, de 26 semaines.
La troisième catégorie a trait à la durée d'une demande de prestation et aux changements visant à établir une période maximale de prestations ou un maximum de l'admissibilité qui sont applicables à tous les pêcheurs, peu importe dans quelle région du pays ils habitent et le taux de chômage de cette région. Ce maximum est fixé à 26 semaines. C'est une semaine de moins que l'ancien maximum pour les régions où le chômage est le plus élevé, mais c'est considérablement plus long que l'admissibilité actuelle dans certaines régions comme l'agglomération de Vancouver, où les pêcheurs ont actuellement des périodes d'admissibilité de 17 ou 18 semaines, environ.
Pour ce qui est du dénominateur, la rémunération gagnée pendant la période de référence est divisée par le dénominateur qui s'applique au taux de chômage régional en question. Par exemple, dans les régions où le chômage est élevé, le dénominateur serait de 14. La rémunération totale gagnée pendant la période de référence serait divisée par 14.
Voilà donc en bref la nature des changements. Je le répète, le règlement à l'intention des pêcheurs vise essentiellement les caractéristiques du régime d'assurance qui sont uniques au secteur de la pêche. En outre, il comporte quelques éléments qui sont nécessaires pour adapter les réformes générales opérées par le projet de loi C-12 aux caractéristiques uniques du secteur de la pêche.
Le président: Merci beaucoup. Vous n'avez pas envisagé d'appliquer ce système du revenu total à d'autres gens, par exemple aux aides-pêcheurs? Il semble que ce soit un mode de calcul très simple.
Mme Smith: Vous parlez des gens qui sont admissibles aux prestations ordinaires?
Le président: Oui.
Mme Smith: Ils ont un contrat de service et relèvent de l'autre régime.
Le président: D'accord. Eh bien, je vous félicite pour ces changements. C'est plein de bon sens et beaucoup de pêcheurs à qui j'ai parlé depuis qu'ils ont été rendus publics m'ont dit que pour la première fois, nous faisons preuve de bon sens pour leur secteur d'activité. Ils sont très contents parce qu'ils n'auront plus besoin de manipuler le système pour obtenir le nombre maximum de semaines.
Peu importe qu'ils travaillent une saison entière ou une saison intermédiaire, c'est le total qui compte, non pas le montant qu'ils pourraient toucher une semaine donnée par opposition à une autre semaine. Par exemple, après une tempête, un pêcheur de mousse peut en ramasser beaucoup, mais il doit répartir cette quantité sur deux ou trois semaines. L'acheteur subit des pressions pour fractionner le chargement et il manipule le système, de même que le pêcheur, etc. Ces changements suppriment toutes ces manigances et c'est assez simple.
Je pense donc que vous avez pris là une mesure très progressive.
Y a-t-il des questions? Monsieur Bernier.
[Français]
M. Bernier (Gaspé): Bonjour. Je tiens tout d'abord à saluer les membres du comité de même que les témoins. Monsieur le président, je m'excuse d'avoir manqué une partie de la présentation, mais soyez sans crainte, car j'avais déjà lu les nouveaux règlements pour les pêcheurs.
Pour une fois, je dois donner à César ce qui est à César. Pour une fois, le bon sens a triomphé. À la lecture de ces règlements, moi aussi je remarque que l'admissibilité des pêcheurs est facilitée. Quant à la durée de la prestation, de la façon dont l'étalement est fait, les pêcheurs pourront être satisfaits.
Cependant, ce règlement est encadré par le projet de loi C-12, Loi sur l'assurance-emploi. Fondamentalement, il va faire mal aux gens puisqu'il contient des plafonds de prestations qui sont à la baisse. Ils étaient à 468 $ l'an passé et sont maintenant à 413 $.
Maintenant que j'ai envoyé des fleurs, j'aimerais bien envoyer le pot qui vient avec. Monsieur le président, vous avez dit que, selon les règlements, on ne pouvait appliquer cela aux aides-pêcheurs. Il est vrai que la nouvelle façon de calculer, en fonction des heures, pour les travailleurs en usine pourra faciliter les choses. Cependant, on va tenir compte du nombre d'heures et non pas des gains totaux comme dans le cas des pêcheurs.
La chose qui fait le plus mal aux travailleurs en usine et aux aides-pêcheurs, qui sont aussi couverts par le régime ordinaire et aux pêcheurs qui n'ont pas la chance d'avoir de gros revenus, c'est la règle d'intensité, c'est-à-dire le fameux facteur qui fait que l'on diminue leurs prestations de 1 p. 100 par tranche de 20 semaines.
Je pense que vous pouvez reconnaître d'emblée que, bien qu'il y ait quatre saisons au Québec comme au Canada, on n'effectue qu'une pêche spécifique dans une saison. On peut pêcher le homard en Gaspésie au cours des mois de mai et juin; en Nouvelle-Écosse, je crois qu'on peut effectuer cette pêche dans certaines régions au mois de janvier. Mais, quoi qu'il en soit, ce n'est qu'une saison.
J'ai peut-être moins de récriminations sur le contenu des règlements des pêcheurs que j'en ai sur ce qu'il ne prévoit pas. J'aurais souhaité que l'on inclue une exemption à l'article 15 de la Loi sur l'assurance-emploi qui aurait porté justement de cette règle d'intensité.
C'est peut-être du domaine politique et il n'appartient peut-être pas aux témoins qui représentent le ministère ce matin de nous dire qu'on va corriger cela, mais j'aimerais examiner avec eux la façon dont on pourrait présenter cette chose-là pour que le côté politique en tienne compte. J'ai cru comprendre que pour modifier ce règlement en Chambre, il aurait fallu que 30 députés en fassent la demande. J'ai cru comprendre des greffiers à la Table que je ne pouvais y apporter une addition et que je ne pouvais en soustraire quoi que ce soit. Je devais demander qu'on efface la proposition au complet. Humainement, je ne voyais pas comment je pouvais faire cela.
Je cherche à voir, avec les représentants du ministère, de quelle façon on pourrait insérer cette exemption supplémentaire. Je pense que tout le monde devra reconnaître que, comme on ne pêche qu'une saison, nos pêcheurs vont être atteints par la récurrence. Ils seront frappés par la règle d'intensité et leurs prestations d'assurance-chômage ne seront pas calculées selon le facteur de 55 p. 100, mais bel et bien selon le facteur de 50 p. 100 d'ici trois ans.
Sans vous prononcer sur le bien-fondé de ma requête, en termes de mécanisme, pouvez-vous me dire de quelle façon les députés pourraient introduire cette mesure-là? Après cela, le gouverneur en conseil pourra trancher. Je dois avouer que j'étais désarmé quand j'ai vu quelle était la façon d'introduire cette chose-là et d'en discuter. Je sais que le gouvernement n'était peut-être pas très intéressé à rouvrir tout le débat sur l'assurance-chômage. Donc, que peut-on faire et comment pouvons-nous corriger cette situation? Merci.
[Traduction]
Le président: Madame Smith.
[Français]
M. Bernier: Vous pourriez peut-être attendre 30 secondes avant de répondre parce que je vois Mme Wayne qui arrive. Je pense que votre réponse risque de l'intéresser fortement.
[Traduction]
Je veux seulement dire au témoin que j'espère qu'il vous restera suffisamment de temps pour écouter la réponse. Je viens de soulever la règle de l'intensité et vous pourrez revenir à la charge plus tard.
Mme Smith: Je crois que pour donner suite à votre suggestion, il faudrait modifier la loi elle-même.
Mme Wayne (Saint John): D'abord et avant tout, je voudrais qu'une chose soit bien claire à l'intention de mes collègues autour de la table. J'ai pris la parole hier à la Chambre. Auparavant, il était possible de modifier ou d'abroger, avec 30 signatures. Le gouvernement a supprimé le mot «modifier» dans cette disposition, de sorte que la seule chose qu'on puisse faire, c'est d'abroger la loi en entier. Voilà le problème qui se pose à nous.
Certaines dispositions de cette mesure sont bonnes, mais le reste... C'est la règle de l'intensité qui nous inquiète et nous aurions aimé discuter d'un amendement à cet article. Mais ils ont changé cela en supprimant le mot «modifier», de sorte que l'on ne peut qu'abroger le texte en entier. Voilà notre problème, monsieur le président. Je tenais à ce que ce soit bien clair.
Le président: Je crois que M. Bernier en a terminé. Vous avez répondu à sa question.
Mme Smith: Je voudrais faire observer que la disposition de la Loi sur l'assurance-emploi qui traite du règlement à l'intention des pêcheurs demeure inchangée. Il n'y a eu aucune modification des procédures de la Chambre relativement à ce règlement.
M. McWhinney (Vancouver Quadra): Monsieur le président, il faut préciser un point. Quelqu'un a dit qu'«ils» avaient changé cela. Il faudrait évidemment pour cela une décision du Parlement; cela ne peut pas se faire unilatéralement par le gouvernement ou quelqu'un d'autre.
Le président: Monsieur Wells.
[Français]
M. Bernier: Je veux être sûr d'avoir bien compris. Ma question était: existe-t-il une possibilité de modifier cela sans avoir à révoquer toutes les mesures réglementaires? La réponse du témoin est-elle oui ou non?
[Traduction]
Le président: Elle a dit non.
Mme Wayne: A-t-elle dit qu'elle nous avait expliqué si l'on peut modifier la loi ou l'abroger? Je n'ai pas bien compris.
Mme Smith: Seulement l'abroger en ce qui a trait au règlement.
Mme Wayne: Merci.
Mme Smith: Je voudrais aussi apporter une précision. Pour exempter les pêcheurs de la règle de l'intensité, je crois qu'il faudrait légiférer, pas seulement modifier le règlement. Or pour apporter une modification législative, je suppose qu'un projet de loi d'initiative parlementaire pourrait permettre de modifier uniquement cet article.
Le président: Il faudrait donc un projet de loi du gouvernement ou d'initiative parlementaire pour modifier le projet de loi C-12.
Mme Smith: Ou bien le chapitre 23, tel qu'il existe actuellement.
Le président: La question serait donc de savoir si nous pourrions abroger la règle de l'intensité pour les pêcheurs tout en la laissant intacte pour les autres travailleurs. C'est alors une toute autre paire de manches.
Monsieur Wells.
M. Wells: Je voudrais revenir aux changements qui ont trait aux membres de l'équipage. Pour faire suite à la question de M. Bernier, quelles étaient les anciennes règles relativement aux membres d'équipage des bateaux de pêche et quelles sont les nouvelles règles? En quoi sont-elles différentes, ou bien le sont-elles?
M. McFee: Voulez-vous parler du capitaine du navire? Lorsque le navire prend la mer pour une expédition de pêche, le capitaine a une certaine déduction pour ses frais, après quoi le reste des prises est réparti entre les membres d'équipage. C'est de cela que vous parlez?
M. Wells: Si je comprends bien, il y a deux séries de règles, une pour les pêcheurs indépendants et l'autre pour les membres d'équipage salariés, qui gagnent 6 $ ou 10 $ l'heure, peu importe.
Le capitaine indépendant, si l'on peut utiliser cette expression, a un statut spécial parce que la plupart des travailleurs indépendants ne cotisent pas à l'AC et ne touchent pas de prestations. Nous avons donc un système fondé sur la rémunération pour le capitaine ou le pêcheur indépendant. C'est bien cela? Tandis que pour le membre d'équipage qui gagne six ou 8 $ l'heure, le système n'est pas le même.
M. McFee: C'est exact.
M. Wells: Dans son cas, le système est le même que pour tous les autres travailleurs, que ce soit dans le domaine du bâtiment ou de l'hôtellerie.
M. McFee: Oui.
M. Wells: Vous avez expliqué les changements qui s'appliquent aux travailleurs indépendants en disant que l'on passe d'un système fondé sur les heures à un système fondé sur la rémunération. Qu'y a-t-il de changé pour le membre d'équipage ou le travailleur d'usine qui est payé à l'heure?
M. McFee: Vous m'arrêterez si je ne vous ai pas bien compris; ce n'est pas intentionnel.
Il y a eu un changement dans le secteur à cet égard ces dernières années. Ce n'est pas vraiment nécessairement dans le cadre de la mesure législative dont on parle aujourd'hui. C'est-à-dire que dans certains coins du pays, il y a des gens qui ont choisi de modifier leurs relations de travail pour passer des arrangements de partage dont j'ai parlé il y a un instant à ce que l'on appelle dans le jargon un «contrat de service», qui place les gens au même niveau que tous les autres travailleurs, comme vous l'avez fait remarquer. Les gens ont fait cela pour diverses raisons personnelles, mais c'est ce qui s'est passé.
Donc, pour répondre banalement à votre question, pour les gens qui ont choisi de modifier leurs arrangements de travail et qui travaillent désormais dans le cadre d'un contrat de service ordinaire, les éléments du projet de loi C-12 dont Mme Smith a parlé il y a quelques instants s'appliqueraient à eux, bien sûr, et les règles qui entreront en vigueur en janvier 1997, c'est-à-dire le passage au nombre d'heures et les autres rubriques qu'elle a abordées, s'appliqueront à ces personnes comme à tous les autres travailleurs, parce qu'ils seront désormais sur un pied d'égalité avec tout le monde.
Ce dont on parle dans cette trousse s'applique bien sûr aux gens qui fonctionnent de l'ancienne manière, c'est-à-dire qu'ils partagent leurs prises; ce dont nous avons discuté ce matin s'appliquera à eux. On aura donc des situations où un capitaine de navire à son propre compte a à bord de son navire des matelots qui partagent les prises et d'autres qui travaillent dans le cadre d'un contrat de service. Ce n'est pas un nouveau phénomène. Cela existe déjà depuis un certain temps.
M. Wells: Oui, je comprends cela. Je voulais seulement que ce soit clairement consigné au compte rendu.
M. McFee: Oui, monsieur.
M. Wells: Nous avons donc en fait presque trois catégories différentes, et puis nous avons le capitaine qui est à son compte. S'il a à son bord des gens qui sont payés 6 $ l'heure, pour ces gens-là, c'est le même système qui s'applique que pour tout le monde. Mais si le matelot travaille sur la base du partage des prises, il fonctionnera dans le cadre du nouveau système fondé sur le revenu que l'on vient de décrire.
M. McFee: C'est bien cela.
M. Wells: Donc, le membre d'équipage pourrait en fait toucher une part des prises et ces nouvelles règles s'appliqueraient, ou bien il pourrait être un employé salarié et, dans son cas, les règles générales du projet de loi C-12 s'appliqueraient.
Mme Smith: C'est bien cela.
M. McFee: Exactement.
M. Wells: On a discuté de la règle de l'intensité. Je pense que nous comprenons tous les inquiétudes qui ont été exprimées à ce sujet et qui ont fait l'objet d'un très long débat pendant l'étude du projet de loi C-12. Je ne pense pas qu'on l'ait mentionné, à moins qu'on l'ait fait avant mon arrivée, mais pouvez-vous expliquer comment la règle de l'intensité s'applique à ceux dont le revenu familial est inférieur à 26 000 $?
Mme Smith: Elle ne s'applique pas.
M. Wells: Elle ne s'applique pas.
Mme Smith: Ces gens-là sont exemptés de la règle de l'intensité.
M. Wells: Donc, pour un travailleur, que ce soit dans le secteur des pêches ou dans tout autre secteur, qui gagne moins de 26 000 $, la règle de l'intensité ne s'applique pas.
Mme Smith: C'est bien cela.
M. Wells: J'ai lu un article que je ne suis pas sûr de bien comprendre. Je vais vous en lire un passage et vous demander de me l'expliquer. Je ne sais pas trop quelle est la source de ce texte; on l'a cité pendant le débat qui a suivi la présentation de la mesure. Je cite:
- Une réforme qui pourrait avoir des répercussions importantes est l'élimination de la catégorie
des pêcheurs à longueur d'année pour le calcul de la rémunération.
- Je cite encore un document:
- Aux termes des nouvelles règles, les demandeurs peuvent être admissibles à des prestations
hivernales ou estivales, selon la saison pendant laquelle ils ont gagné leur rémunération. Il
s'ensuit que les prestations seraient fondées sur un revenu inférieur dans le cas des pêcheurs qui
gagnent leur argent dans le cadre de différentes pêches à différentes périodes de l'année.
Mme Smith: Je vais d'abord faire quelques observations générales, après quoi, si vous voulez plus de détails, je céderai la parole à ma collègue Doris Beeman.
Premièrement, il y a très peu de pêcheurs à longueur d'année qui réclament des prestations au titre de cette catégorie; actuellement, il y en a une centaine. Les pêcheurs seraient admissibles aux prestations estivales ou hivernales et pourraient choisir la période de référence qu'ils souhaitent utiliser, selon les aléas de leur saison de pêche. Mais fondamentalement, la raison pour laquelle nous avons éliminé cette catégorie, c'est qu'il reste tellement peu de pêcheurs dans cette catégorie, que cela ne faisait qu'ajouter à la complexité des règles, tout à fait inutilement, semble-t-il.
M. Wells: Mais les gens qui utilisaient cette règle, que feront-ils désormais? Je ne comprends pas vraiment.
Mme Doris Beeman (conseillère principale, Politique de l'assurance, ministère du Développement des ressources humaines): A l'heure actuelle, c'est assez compliqué pour les pêcheurs à longueur d'année.
M. Wells: Je le sais. C'est pourquoi j'essaye de comprendre.
Mme Beeman: Premièrement, il leur faut plus de semaines que n'importe qui d'autre. Il leur faut 20 semaines. Ils doivent avoir fait de la pêche toute l'année, c'est-à-dire dans trois trimestres consécutifs. Et ils doivent pêcher à bord de navires spécifiques et désignés. Cela veut dire qu'ils peuvent toucher des prestations n'importe quand pendant l'année. Ils peuvent demander des prestations n'importe quand, pourvu qu'ils aient le nombre de semaines requis.
Nous croyons qu'étant donné qu'ils sont si peu nombreux et puisqu'ils pêchent normalement pendant l'été, ils pourront très facilement gagner les 2 500 à 4 200 $ dont ils ont besoin pour être admissibles. Ils présenteront leur demande pour la période estivale ou hivernale. Mais je dirais que la plupart d'entre eux voudront toucher leurs prestations entre octobre et mai.
M. Wells: Serait-ce la raison pour laquelle vous avez élargi le créneau de quatre semaines aux deux bouts, je veux dire la période pendant laquelle...
Mme Beeman: Ce n'était pas vraiment destiné aux pêcheurs à longueur d'année, mais cela les aidera certainement.
M. Wells: Donc, même si on a éliminé cela, il reste une certaine souplesse à l'autre extrémité.
Mme Beeman: Oui, bien sûr.
M. Wells: Je crois qu'il y a une différence de huit semaines. Il y a quatre semaines qui s'ajoutent au début et à la fin, pendant lesquelles ils pourraient toucher des prestations.
Mme Smith: Oui. C'était une recommandation du Groupe de travail Cashin, comme vous le savez probablement. C'était pour mieux refléter la grande diversité des saisons de pêche sur les deux côtes.
M. Wells: Vous l'avez peut-être dit avant que Mme Wayne n'arrive, mais ce règlement reflète-t-il les recommandations faites par le Groupe de travail Cashin?
Mme Smith: Oui, de très près.
M. Wells: Merci.
Le président: Monsieur Dromisky.
M. Dromisky (Thunder Bay - Atikokan): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je précise d'abord à l'intention des témoins que je suis un nouveau venu au comité et que je ne comprends pas vraiment tout cela encore. Je ne suis pas des Maritimes ni de la Colombie-Britannique.
Toutefois, je me rappelle avoir vu l'année dernière un documentaire de Radio-Canada dans lequel on révélait que sur la côte Ouest - c'est ce point particulier qui m'a frappé - les capitaines prennent à leur bord un certain nombre de jeunes matelots supplémentaires pour les amener pêcher. Ces jeunes doivent payer le capitaine pour monter à bord, même s'ils ne travaillent pas nécessairement sur le navire. Ces jeunes gens peuvent ainsi devenir très rapidement admissibles à l'assurance-chômage. C'est une pratique courante sur la côte Ouest.
Est-ce encore possible aux termes du nouveau régime? Est-il possible qu'un capitaine à l'honnêteté douteuse puisse ainsi augmenter ses propres bénéfices en agissant de la sorte?
Mme Smith: Ma première réaction, c'est de dire que le scénario que vous décrivez est de la fraude. Ce n'était pas légal auparavant, ce ne l'est pas non plus maintenant. Ce ne sera jamais légal à l'avenir. Nous ne ménageons aucun effort pour détecter les cas douteux de ce genre, afin que ces gens-là n'aient pas droit aux prestations.
M. Wells: Il a dit qu'il n'était pas des Maritimes.
Le président: Il n'aurait pas posé cette question.
Des voix: Oh, oh!
Mme Smith: Nous espérons que la plus grande simplicité des règles d'admissibilité nous aidera à réprimer les agissements de ce genre.
C'est maintenant assez simple: avez-vous ou n'avez-vous pas gagné de l'argent? On a éliminé bon nombre de règles qui permettaient de manipuler les prises, l'étalement, la répartition, etc., de sorte qu'il sera un peu plus facile de déceler les cas de ce genre.
M. Dromisky: C'est hypothétique. Estimez-vous que dans un cas de ce genre, aux termes des nouvelles règles, les vrais pêcheurs qui sont embauchés par un capitaine pour travailler sur un navire donné surveilleront la situation et s'inquiéteront s'il y a un membre d'équipage supplémentaire? Autrement dit, ces gars-là savent combien d'hommes devraient se trouver à bord d'un navire d'une certaine taille et quelles devraient être leurs fonctions. Ils se rendent compte s'il y a un membre d'équipage supplémentaire, ce qui pourrait faire baisser de beaucoup leur rémunération totale.
À votre avis, les vrais pêcheurs auront-ils un rôle important à jouer à cet égard? Autrement dit, ils pourraient se plaindre et dénoncer les cas de ce genre?
Mme Smith: Je crois que le règlement comporte de façon intrinsèque un encouragement à exercer de telles pressions au sein du système.
M. Dromisky: Je n'ai qu'une autre petite question. Elle concerne les autres personnes qui sont travailleurs saisonniers. A-t-on réfléchi aux gens qui travaillent, disons, dans le secteur des ressources comme l'exploitation forestière, etc., dans d'autres régions du pays, qui ne peuvent travailler que pendant certaines parties de l'année et qui sont assujettis à un programme d'assurance-emploi complètement différent? A-t-on envisagé d'élaborer à l'intention de ces gens-là un plan semblable à celui que l'on présente ici pour les pêcheurs?
Mme Smith: Parlez-vous des travailleurs indépendants dans ces autres secteurs ou des travailleurs réguliers?
M. Dromisky: Je songe surtout à ceux qui sont employés par une compagnie mais seulement pour une courte période.
Mme Smith: Ces travailleurs touchent des prestations ordinaires. Il y a un certain nombre de changements qui les concernent directement et qui sont mieux adaptés à leur régime de travail.
Par exemple, pour ceux qui travaillent pendant une saison courte mais très intensément, il peut être désormais plus facile d'être admissibles aux prestations. Le passage au système reposant sur le calcul des heures prévoit qu'une semaine de 60 heures par exemple sera comptabilisée comme telle. Par conséquent, cela est l'équivalent d'une semaine et demie de travail ouvrant droit à des prestations.
Contrairement aux pêcheurs, la période de référence de ces travailleurs n'est pas limitée. La période de référence, la saison de pêche, est celle au cours de laquelle les pêcheurs peuvent gagner de l'argent. Ensuite, ce n'est que pendant une certaine saison qu'ils peuvent toucher des prestations.
Les travailleurs de ces autres secteurs peuvent demander des prestations d'assurance-chômage dès qu'ils n'ont plus de travail, jouissant ainsi de conditions plus souples. Le régime ordinaire offre donc certaines caractéristiques de souplesse qui prennent en compte leur régime de travail.
M. Dromisky: Très bien. Merci beaucoup.
Le président: Merci, Stan.
Je voudrais vous poser une question. Pouvez-vous nous expliquer les anciennes règles et les nouvelles qui s'appliquent aux pêcheurs qui ont un autre gagne-pain?
Mme Smith: Vous parlez de ceux qui ont un emploi régulier?
Le président: Oui. Ils sont employés, mais ils font de la pêche en plus. Comment les choses se passent-elles actuellement pour eux?
Mme Smith: Actuellement, on demande que dans le nombre total de semaines exigées pour être admissible, il y en ait six qui soient consacrées à la pêche. Nous parlons ici d'employés saisonniers.
Avec les nouvelles règles, l'admissibilité sera déterminée strictement à partir du nombre de semaines consacrées à la pêche comme travailleurs indépendants. Toutefois, une fois admissible, une fois qu'un pêcheur aura gagné la rémunération minimale pour être admissible, il pourra faire intervenir ce qu'il aura gagné comme employé pour déterminer le taux de ses prestations. Nous ferons deux calculs séparés et ensuite le total des gains pour la période. C'est ensuite qu'interviendra le pourcentage du taux de prestation et il sera appliqué au total.
Le président: Pouvez-vous nous donner un barème?
Mme Smith: Vous trouverez un barème dans le détail du règlement que nous vous avons fourni et cela vous indiquera quels gains tirés de la pêche doivent être accumulés pour être admissibles. Pour ce qui est de l'emploi régulier, le calcul sera fait suivant le règlement qui s'applique à tous les travailleurs. On fera les mêmes calculs pour ce qui est du nombre de semaines fixé d'après le taux de chômage. Par exemple, si un pêcheur travaille pendant sa période de référence qui recoupe la période au cours de laquelle le taux est calculé - le maximum de semaines étant alors, vous...
Le président: Mais il faut être admissible comme pêcheur avant tout, n'est-ce pas?
Mme Smith: Oui, absolument.
Le président: Si, en plus, un pêcheur travaille comme journalier, il peut très bien ajouter les gains qu'il tire de cet emploi à ses autres gains, n'est-ce pas?
Mme Smith: Oui.
Le président: Autrement dit, ses prestations seront calculées d'après sa rémunération totale, n'est-ce pas?
Mme Smith: C'est cela. Toutefois, quel que soit le total, la prestation maximale est de 750 $ par semaine.
Le président: Monsieur Johnston.
M. Johnston (Wetaskiwin): Merci, monsieur le président.
Je voudrais bien savoir si l'assurance-chômage, le régime qui s'applique aux pêcheurs qui sont des travailleurs indépendants, doit être considérée comme un régime d'assurance, une compensation en cas de perte temporaire d'emploi, ou comme un régime de stabilisation du revenu, ou encore comme un programme social? Dans quelle catégorie le mettriez-vous? Peut-être que l'on pourrait le désigner autrement également.
Mme Smith: Je dirais que c'est un programme d'assurance qui donne à ces travailleurs un revenu pendant la période où il n'y a pas de travail pour eux. Le régime qui s'applique aux pêcheurs est exactement fondé sur le modèle de celui qui s'applique aux travailleurs saisonniers. Il s'agit d'un revenu d'appoint dont les pêcheurs ont besoin quand ils n'ont pas d'autres débouchés d'emploi.
M. Johnston: Étant donné qu'il n'y a pas de programme comparable visant d'autres groupes de travailleurs indépendants saisonniers, les agriculteurs par exemple, comment expliquez-vous qu'ils soient traités différemment?
Mme Smith: Vous avez raison, les pêcheurs qui sont des travailleurs indépendants constituent le seul groupe de travailleurs indépendants qui aient accès au programme d'assurance. Pour trouver une explication à cela, il faudrait remonter très loin dans les antécédents du programme et je reconnais que cela s'est passé bien avant mon temps.
M. Johnston: Je vois.
Mme Wayne: Monsieur le président, vous avez dit que nous avions eu l'occasion de débattre des dispositions du projet de loi C-12 concernant les travailleurs saisonniers, n'est-ce pas?
Je dois poser la question suivante. Nous nous sommes penchés sur d'autres projets de loi qui concernaient des questions diverses et où on trouvait les mots «modifier ou révoquer». Ainsi, les parlementaires, grâce à cette disposition, avaient le loisir de modifier un règlement quelconque, dans la mesure où ils pouvaient réunir 30 signatures. C'est alors que l'on pouvait engager un débat. Dans le cas qui nous occupe, le mot «modifier» a été supprimé. On lit en lieu et place, «révoquer ou abroger». Nous aimerions qu'on nous explique pourquoi. Nous avons en effet l'impression que notre droit est lésé du fait que les députés représentant les pêcheurs de leur circonscription, ou d'autres députés du reste, ne pourront plus défendre aussi bien les intérêts de leurs commettants.
Voilà donc ce que nous voulons savoir. Nous ne prétendons pas que le projet de loi est tout à fait nul, mais des articles y figurent qui inquiètent les parlementaires des deux côtés de la Chambre. Notre droit de défendre les intérêts de nos commettants a disparu. Pourquoi a-t-on supprimé le mot «modifier»?
Mme Smith: Permettez-moi de demander des explications à mon collègue concernant la mécanique de cet article en particulier de la Loi sur l'assurance-emploi.
Les dispositions de la loi prévoyant une procédure de réglementation n'ont pas été modifiées en ce qui concerne le règlement visant les pêcheurs. En effet, cette procédure a été adoptée en 1990, avec à l'époque le projet de loi C-21, et ce projet de loi-ci ne le modifie en rien.
Mme Wayne: Mais en 1992, quand on a introduit le règlement, il était assorti d'un projet de loi. Ainsi, on prévoyait qu'«une motion soumise à la Chambre portant modification ou révocation d'une ordonnance ou d'un règlement» doit être signée par 30 députés. Voilà.
Mme Smith: De quel projet de loi parlez-vous? S'agit-il d'un article de la Loi sur l'assurance-emploi?
Le président: Je pense qu'il s'agissait d'une motion d'initiative parlementaire et non pas d'une motion du gouvernement.
Mme Smith: Dans la partie VIII de la Loi sur l'assurance-emploi, au paragraphe 153.(8), on trouve une description de la procédure. La loi prévoit une procédure précise qui s'applique à la prise de règlements concernant les pêches. Cette procédure est spécifique.
Mme Wayne: Donc, pour qu'il y ait un débat à la Chambre des communes, nous devons obtenir 30 signatures mais nous serons forcés de demander l'abrogation de toute la loi, même si en notre âme et conscience, ce n'est pas ce que nous souhaitons. Nous voulons tout simplement discuter de la règle de l'intensité et il nous faut pour cela 30 signatures, n'est-ce pas?
Mme Smith: Les 30 signatures sont exigées pour que l'on puisse discuter du règlement applicable aux pêcheurs et non pas de la loi.
Mme Wayne: C'est cela.
Mme Smith: Oui, c'est ce qui est prévu dans la loi.
Mme Wayne: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Harold, il nous reste encore cinq minutes. Si vous voulez poser une question, allez-y.
M. Culbert (Carleton - Charlotte): Merci, monsieur le président. Veuillez excuser mon retard. J'ai dû retourner dans ma circonscription hier soir et je viens d'arriver car l'avion avait un peu de retard.
Je vous souhaite la bienvenue ce matin. J'ai lu avec un vif intérêt, et de fond en comble, tous les règlements concernant le secteur des pêches. Pouvez-vous me dire en quelques mots quelle est essentiellement la différence entre ce règlement-ci et les règlements précédents qui visaient tous les autres secteurs? Je sais bien que la méthode de calcul n'est plus la même dans le règlement applicable aux pêcheurs.
Mme Smith: Vous avez raison car les paramètres généraux du régime d'assurance-emploi qui s'appliquent à tous les travailleurs s'appliquent aussi aux pêcheurs. Grosso modo, le règlement porte sur les aspects qui concernent de façon plus précise les pêcheurs et il permet donc d'adapter le régime d'assurance afin qu'il puisse être mis en oeuvre efficacement dans ce secteur.
Par exemple, comme je l'ai dit tout à l'heure, toutes les règles concernant le maximum de la rémunération assurable - la somme maximale d'une demande, la récupération, la règle de l'intensité, le supplément du revenu familial - et toutes ces caractéristiques du programme d'assurance et des réformes qui figurent dans le projet de loi C-12 s'appliquent aux pêcheurs comme à tout autre travailleur.
M. Culbert: Monsieur le président, les modifications au règlement visant les pêcheurs prévoient que l'on tiendra compte désormais de la rémunération plutôt que des heures de travail, comme ce sera le cas partout ailleurs à compter du 1er janvier 1997. J'ai parlé de cela avec certaines personnes. Si l'on fait intervenir le salaire minimum, 6 $ l'heure par exemple, on peut très bien calculer l'équivalent en semaines de travail. C'est bien un revenu de 2 500 $ par saison qui interviendra dans le calcul, n'est-ce pas?
Mme Smith: C'est cela.
M. Culbert: Alors, en semaines...
Mme Smith: Cela dépend du taux de chômage dans la région au moment...
M. Culbert: Je sais, je comprends. Il s'agit d'une fourchette de 2 500 $ à 4 200 $, n'est-ce pas?
Mme Smith: C'est cela.
M. Culbert: Cela tient compte des conditions de travail de nos pêcheurs. De toute façon, bien qu'ils soient assurément prêts, disposés et aptes, en raison du système de contingentement ou des critères d'obtention d'une licence - c'est-à-dire une période de six ou huit semaines, de deux ou trois mois, suivant l'espèce pêchée - ils ont la possibilité, en toute justice, d'avoir ce revenu au cours de cette période. Un pêcheur qui détiendrait plusieurs licences n'aurait assurément pas beaucoup de moments oisifs, à vrai dire seulement entre les périodes visées par ces licences, n'est-ce pas?
Les modifications ont-elles été apportées pour tenir compte de la réalité des pêcheurs? S'est-on dit que les pêcheurs restaient chez eux non pas parce qu'ils ne voulaient pas travailler mais parce que la période réglementaire de pêche est fixe?
Mme Smith: Vous avez là une des caractéristiques positives de cette modification. En outre, elle tient compte du fait que le temps passé à bord d'un bateau est pratiquement impossible à calculer.
M. Culbert: Monsieur le président, y a-t-il dans ce règlement, à part l'aspect que nous venons d'aborder, autre chose qui se démarque des règlements précédents?
Mme Smith: Il y a deux autres grandes catégories de changements. Tout d'abord, la notion d'une saison de référence et d'une saison de prestations pour les pêcheurs. Étant donné la souplesse offerte, les conditions faites aux pêcheurs sont différentes de celles des autres prestataires. Par ailleurs, il existe une période maximale au cours de laquelle on peut toucher des prestations, et c'est 26 semaines pour les pêcheurs, quel que soit le taux de chômage dans la région où ils habitent. Il n'y a rien de changé pour ce qui est de l'admissibilité.
M. Culbert: Quelle est la différence par rapport à la situation présente?
Mme Smith: Désormais, suivant le taux de chômage dans la région où ils habitent, les travailleurs réguliers toucheront de 17 à 45 semaines de prestations. C'est cela, je pense.
M. Culbert: Je vois.
Mme Smith: En fait, c'est de 14 à 45 semaines.
Le président: Ainsi, étant donné que la période de référence est de 31 semaines désormais, un pêcheur pourra faire valoir ses droits à prestation plus tôt et il pourra toucher des prestations plus longtemps que par le passé, n'est-ce pas?
Mme Smith: Il pourra désormais faire sa demande quatre semaines plus tôt, mais il ne pourra...
Le président: Il ne pourra pas toucher plus de 26 semaines de prestations, c'est cela, n'est-ce pas?
Mme Smith: ...pas toucher de prestations pendant plus de 26 semaines, ce qui représente une semaine de moins dans le cas de certains pêcheurs ou cinq à sept semaines de plus dans d'autres cas.
Le président: Par le passé, certains pêcheurs ne pouvaient jamais toucher plus de 26 semaines. Certains ne pouvaient toucher que 20 semaines car ils devaient attendre le 15 décembre avant de faire valoir leur droit.
Mme Smith: Et en plus, la saison commençait plus tôt.
Le président: Effectivement. Donc, pour bien des gens, il est avantageux de passer à une période de référence de 31 semaines.
Mme Smith: Oui. Le régime est désormais plus souple pour eux.
Le président: C'est vrai.
Mme Wayne: Monsieur le président, le dénominateur est-il différent?
Le président: Il est le même, mais il varie suivant la région.
Mme Wayne: Je vois.
Le président: C'est cela.
Norine, merci beaucoup à vous et à vos collègues d'être venus ce matin. Si nous avons besoin de plus de renseignements, nous ne manquerons pas de faire appel à vous. Merci beaucoup d'être venus.
Mme Smith: Merci beaucoup. Le plaisir était pour nous.
Le président: M. Bevan, M. Robichaud et Kathryn Bruce sont ici. Nous allons commencer par M. David Bevan, directeur général de la Direction générale de la conservation et de la protection. À notre réunion de la semaine dernière, on a demandé une séance d'information sur les activités de surveillance du ministère.
M. David Bevan (directeur général, Direction générale de la conservation et de la protection, ministère des Pêches et des Océans): Merci, monsieur le président.
Le mandat du ministère en matière de gestion et de protection des ressources halieutiques canadiennes est manifestement une composante clé de la stratégie ministérielle.
Dans le secteur de la gestion des pêches, nous avons modifié de façon assez fondamentale notre façon de faire en raison, notamment, des réductions dans nos budgets qui ont suivi l'examen des programmes. Le secteur de la conservation et de la protection, dont s'occupe notre direction, a donc subi lui aussi des changements fondamentaux.
Notre budget est passé de 90 millions de dollars en 1993-1994 à environ 66 millions de dollars en 1997-1998. Il nous a donc fallu envisager des changements majeurs si nous voulions continuer d'assurer une présence dans le secteur.
Nous avons renforcé notre gestion fonctionnelle. Nous avons rationalisé nos méthodes d'imputabilité et introduit un nouveau processus de planification et de rapport pour que nos efforts du côté de l'application de la loi portent sur les pêches de haute priorité où nous souhaitons obtenir des résultats et assurer le respect des règles.
Nous avons conservé une équipe d'agents des pêches et comme le nombre de ces agents est passé de 606 en 1993-1994 à environ 500 actuellement, nous avons modifié la portée de leurs responsabilités en supprimant les activités concernant les licences et l'habitat qui leur incombaient jusque-là. Ils s'emploient essentiellement à faire respecter les règles nécessaires pour protéger les ressources halieutiques du Canada.
La plus grosse compression a été la réduction du nombre des bateaux de patrouille. Ces derniers sont passés de 44 à 19. Pour compenser, nous travaillons avec la Garde côtière à une diversification des tâches et à une formation conjointe des équipages en matière d'application de la loi. Certains des bateaux à bord desquels il y avait des équipages ont été remplacés par des bateaux plus rapides, plus économiques et plus souples manoeuvrés par nos agents des pêches.
En outre, nous avons réaffecté les ressources administratives et autres aux opérations sur le terrain. Nous avons pu augmenter les budgets dont disposent les agents des pêches pour leurs activités de fonctionnement et c'est ainsi qu'ils peuvent passer davantage de temps sur le terrain. Nous tachons aussi d'améliorer l'équipement dont ils disposent afin de les rendre plus efficaces.
Quant aux autres composantes du programme, les autres activités de surveillance dont ne s'occupent pas notre flotte et les agents des pêches, nous les confions au secteur privé. Nous avons toujours en recours à des firmes privées de surveillance aérienne. L'entreprise privée nous fournit également des observateurs, des surveillants à quai, des répéteurs satellite et des gardiens. Nous trouvons nos gardiens non seulement dans le secteur privé mais chez nos partenaires comme les Premières nations et les autres organismes qui se consacrent à la conservation. Les gardiens s'occupent des taches moins exigeantes concernant le respect de la loi.
Toutes les autres composantes du programme sont assurées par le secteur privé. Cela nous donne toute la souplesse souhaitable pour mener à bien de façon efficace et efficiente nos activités d'application de la loi. En outre, au fur et à mesure que de nouvelles technologies sont disponibles, le secteur privé les met à notre disposition.
Pour avoir l'assurance d'obtenir le meilleur service possible des fournisseurs du secteur privé, nous prévoyons d'appliquer des normes de gestion de la qualité - les normes ISO 9000 - aux fournisseurs; nous voulons ainsi nous assurer un bon rapport qualité-prix.
Au-delà de l'examen des programmes, nous essayons de voir comment nous pourrions mieux cibler le rôle des agents des pêches. Leur rôle comprendra trois grandes activités: les activités de surveillance en mer, notamment la lutte au braconnage visant à réduire la pêche illégale, les systèmes de vérification mis en place par les entreprises privées et les mesures visant à assurer le respect des lois et règlements par les flottes commerciales.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous mettons beaucoup l'accent sur les services de surveillance sous contrat, de sorte que nous avons moins besoin de faire appel à nos gestionnaires pour s'occuper des hélicoptères, de la surveillance aérienne, etc. Nous nous en remettons pour cela au secteur privé et nous avons ainsi pu réduire nos coûts administratifs.
Nous prévoyons d'établir, pour chaque type de stock, un plan de gestion intégrée qui tiendra compte de l'aspect scientifique, de la gestion des poissons et de l'application des lois et règlements, de manière à pouvoir déterminer quelles sont les pêches qui présentent un risque élevé et qui devraient en priorité faire l'objet de mesures visant à assurer l'application des lois et règlements et celles qui présentent des risques moins élevés et qui peuvent être gérées par des observateurs du secteur privé, des mécanismes de surveillance au sol, etc.
Nous examinons la possibilité d'établir des normes de conservation en fonction des informations biologiques et environnementales afin de responsabiliser encore davantage les pêcheurs et de faire en sorte qu'ils jouent le rôle qu'ils doivent juger pour assurer la conservation des stocks. Nous prévoyons de poursuivre le perfectionnement et la formation du personnel afin qu'il puisse assumer ce nouveau rôle et faire en sorte d'optimiser l'utilisation du peu de ressources dont nous disposons.
Voilà, monsieur le président, un court aperçu du programme.
Le président: Merci beaucoup, David. Le nombre d'agents des pêches a-t-il baissé ou augmenté sous ce nouveau régime?
M. Bevan: Il a baissé. Il a été ramené de 606 ETP à environ 500. Alors qu'auparavant les agents des pêches consacraient un pourcentage important de leur temps à l'octroi de permis ou à des consultations sur les habitats, aujourd'hui, ils s'occupent presque uniquement du respect des lois et règlements.
Par ailleurs, nous avons constaté qu'ils ne pouvaient pas se rendre sur le terrain aussi souvent qu'ils auraient dû le faire à cause d'un manque de fonds. Ils n'avaient pas assez de fonds pour exercer leur activité de manière efficace cinq jours sur cinq ni pour effectuer des patrouilles sept jours sur sept. Nous avons donc augmenté les fonds dont ils disposent, de sorte que, même si leur nombre a baissé, nous croyons qu'ils pourront être plus présents sur le terrain d'ici un an environ.
Le président: Prévoyez-vous d'accroître le nombre d'agents des pêches?
M. Bevan: Non, nous prévoyons de le maintenir aux alentours de 500.
Le président: Où en est le processus d'intégration des flottes? Êtes-vous satisfait des progrès réalisés par le ministère des Pêches et des Océans et la Garde côtière et des navires qu'ils ont choisis d'utiliser dans certaines zones d'application en particulier?
M. Bevan: Évidemment, le processus de fusion des flottes est toujours en cours. Il s'agit d'un défi considérable, car nous essayons de fusionner les deux flottes au moment même où les compressions découlant de l'examen des programmes entrent en vigueur. C'est tout un défi. Le processus se poursuit. Je crois qu'il nous faudra encore un an environ pour aplanir toutes les difficultés et optimiser l'utilisation de ces ressources.
Le président: Merci. M. Bernier, puis M. Johnston.
[Français]
M. Bernier: J'aimerais d'abord saluer les témoins. Je dois avouer que j'ai manqué la séance du comité directeur où on a décidé d'inviter le directeur de la Protection et le directeur de la Gestion des ressources. Mais le petit Jésus fait bien les choses. Je ne sais pas si on peut me répondre d'une façon précise, mais j'aimerais connaître la philosophie du ministère des Pêches et des Océans en cette matière.
J'aimerais attirer votre attention sur un problème particulier que l'on vit actuellement en Gaspésie. Je crois que M. Robichaud est au courant puisqu'il a déjà oeuvré dans le secteur du Québec. Monsieur Bevan, vous êtes responsable de la protection et de la conservation. Je parle du problème relatif à la pêche au homard par les Micmacs de Restigouche. Il y a là un conflit.
Je reconnais d'emblée qu'au Québec comme au Canada, on vit dans un État de droit. Si certains droits doivent être accordés aux autochtones, il faut prendre les moyens de les leur accorder. Le problème dont je parle nous est arrivé comme un cheveu sur la soupe cet automne.
Les autochtones trouvaient peut-être que les négociations entre eux et le ministère des Pêches et des Océans n'allaient pas assez vite et ils ont décidé d'aller pêcher. Mais il y avait déjà eu de la pêche commerciale dans ce secteur en début d'année, de mai à juin. Il s'agit d'un stock qui n'est pas très rentable. Pour les cinq ou six pêcheurs actuels, la moyenne des débarquements n'est que d'environ 5 000 livres.
J'ai appris que Pêches et Océans Canada avait accordé un permis de subsistance aux autochtones. La limite reconnue actuellement est de 200 cages. Avec 200 cages, à ce moment-ci de l'année, on amasse quand même... On m'a dit qu'il y avait de 5 000 à 6 000 livres d'amassées à l'heure actuelle. Cela aura un impact sur le niveau de capture l'an prochain.
De quelle façon peut-on concilier conservation et protection et permettre un gentlemen's agreement entre les deux groupes qui vont devoir pêcher maintenant? Votre premier mandat, c'est la conservation. Deuxièmement, je comprends qu'on doit offrir le droit de pêche aux autochtones. Le troisième joueur, qui auparavant était le deuxième, c'est-à-dire les pêcheurs commerciaux, sera peut-être moins exigeant, mais le fait que vous êtes obligés de reconnaître le droit des autochtones a un impact sur eux. Qu'allons-nous faire? Les pêcheurs commerciaux devront-ils accepter cela sans mot dire? Je sais qu'il y aura une négociation et je ne veux pas entrer dans le détail de tout cela, mais il faudra reconnaître que, dès le départ, il y a impact pour ces pêcheurs commerciaux. Ce qui chatouille les pêcheurs, c'est que si les autochtones exercent leur droit de pêche de subsistance à l'année longue, cela aura un impact sur la pêche commerciale durant toute l'année. Peut-on limiter les permis de subsistance à période des pêcheries commerciales?
Deuxièmement, peut-on limiter le nombre de livres qu'ils pêchent durant l'année?
Je vous laisse répondre à ces deux premières questions et, par la suite, j'aurai peut-être un autre commentaire.
[Traduction]
M. Bevan: Merci. Je voudrais apporter un éclaircissement: bien que le permis communautaire autorise jusqu'à 200 cages, le niveau de pêche actuel est de 80 cages, et les prises n'ont certainement pas approché même des 5 000 livres.
En vertu du jugement Sparrow, nous avons comme obligation fiduciaire d'autoriser les Autochtones à pêcher à des fins alimentaires, sociales et cérémoniales. Nous avons aussi pour obligation de réduire au minimum les contraintes relatives à l'exercice de ce droit. Par conséquent, nous avons fait en sorte que le permis ne soit pas trop restrictif. Nous avons essayé de répondre aussi aux objectifs en matière de conservation. Nous avons inclus des critères de conservation dans le permis et nous veillons à ce que ces critères soient respectés. Nous contrôlons les débarquements, etc., afin de nous assurer que les pêcheurs respectent les critères en ce qui concerne la taille minimale de la carapace et l'absence de femelles oeuvées.
Nous avons eu l'occasion d'expliquer la situation aux pêcheurs commerciaux avant d'attribuer le permis aux Listuguj. Nous essayons de maintenir le dialogue entre les deux groupes afin qu'ils trouvent un moyen de concilier leurs différences. Nous tiendrons demain une réunion avec les pêcheurs commerciaux où nous explorerons les moyens d'atténuer l'effet des activités des Listuguj dans la zone 21B. Nous cherchons donc des moyens de concilier les deux groupes.
Nous nous sommes engagés auprès des pêcheurs commerciaux à ne pas confisquer leurs entreprises commerciales dans nos efforts pour satisfaire les aspirations commerciales des communautés autochtones - nous chercherons plutôt à les indemniser. La situation dont il est question ici est un peu différente dans ce sens que la communauté autochtone a le droit de pêcher dans cette zone et que nous devrons essayer d'en arriver à une entente entre les deux groupes. La question est loin d'être réglée.
[Français]
M. Bernier: Lorsqu'on vit dans un État de droit, lorsque les droits sont reconnus par les tribunaux, il faut trouver les moyens de faire reconnaître ces droits-là. Je suis heureux qu'on cherche à concilier le droit des uns et ceux des autres, puisque tout le monde doit trouver son compte là-dedans. C'est vrai qu'on travaille un peu par ouï-dire. Restigouche est un peu loin d'Ottawa. Certaines choses nous échappent parfois dans les conversations téléphoniques.
J'aimerais être bien sûr d'avoir compris. Les plaintes viennent actuellement des pêcheurs commerciaux du Québec. Je crois savoir qu'il y a une différence entre la taille des homards que l'on a le droit de débarquer au Québec et la taille de ceux qui sont débarqués au Nouveau-Brunswick. Cela a une incidence sur les casiers de homards qui sont utilisés.
Dans un premier temps, puisque les pêcheurs micmacs de Restigouche pêchent dans la zone québécoise, j'aimerais que l'on tente de recommander à ces derniers de se plier aux mêmes règles du jeu que les pêcheurs commerciaux qui vont oeuvrer dans le même secteur. Cela permettrait à tout le monde de partir à armes égales.
J'avais cru comprendre que la limite du permis de subsistance des pêcheurs micmacs était de 300 livres par personne résidant dans la réserve. Si la réserve comptait 2 000 personne, cela représenterait 600 000 livres. Je vais vous laisser la chance d'aplatir ce ballon, parce que c'est un chiffre astronomique compte tenu du fait que les pêcheurs commerciaux n'ont sorti eux-mêmes que 30 000 livres au maximum. Il faudrait rassurer la population.
Vous ne pouvez peut-être pas me répondre actuellement, mais vous pourrez au moins mettre ma question dans votre sac et y réfléchir plus tard. Si c'est vraiment pour la subsistance ou pour les rites et les cérémonies que les pêcheurs micmacs veulent pêcher le homard à l'année longue, est-il possible de leur suggérer, de façon à rétablir l'harmonie avec les pêcheurs commerciaux, que pour ce qu'ils vont capturer dans la période dite de pêche commerciale - parce qu'ils vont sûrement en capturer plus que ce qu'ils sont capables de manger durant cette période - , ils utilisent les méthodes que le Regroupement des pêcheurs professionels du sud de la Gaspésie utilise actuellement, c'est-à-dire: tu vas manger ce que tu peux manger aujourd'hui et le reste, tu vas le mettre dans un casier au fond de l'eau et tu vas le nourrir jusqu'à ce que tu ailles le chercher? Cette pratique pourrait permettre de concilier les deux choses. En tout cas, c'est une suggestion.
Quelle est la taille des homards et la taille des casiers utilisés? Est-ce selon les normes québécoises ou du Nouveau-Brunswick? Cela aurait pour effet de d'aplatir le ballon populaire qui prétend que les pêcheurs autochtones peuvent pêcher jusqu'à 600 000 livres. Ma question est facile. J'espère que vous êtes capables d'y répondre.
[Traduction]
Le président: M. Bevan, puis M. Johnston.
M. Bevan: La taille de la carapace qui est précisée dans le permis communautaire est la même que celle qui s'applique aux pêcheurs québécois. Le mécanisme d'évasion est le même que celui qui figure dans le règlement sur les pêches. C'est donc précisé dans le permis communautaire de sorte que les mêmes normes s'appliquent. Le permis communautaire ne prévoit pas pour l'instant de limite au nombre de prises. Je puis toutefois vous donner l'assurance que les prises totales ne dépasseraient pas plus de quelques livres par personne dans la réserve des Listuguj. Ainsi, les 300 livres par habitant ne s'appliquent pas dans ce cas-ci.
La situation fait toujours l'objet de discussions. Nous avons dû nous acquitter de nos obligations fiduciaires, et nous l'avons fait par l'attribution du permis communautaire. Nous nous attendons toutefois à tenir un certain nombre de discussions avec les Listuguj et les pêcheurs commerciaux, et nous espérons que nous arriverons à nous entendre tous les trois pour régler cette question.
Aucune décision finale n'a encore été prise à ce sujet, loin de là. Nous poursuivrons le dialogue avec les particuliers et les groupes intéressés afin d'en arriver à une entente qui satisfera toutes les parties en cause.
Le président: Merci beaucoup. Monsieur Johnston.
M. Johnston: Merci, monsieur le président.
Vous avez dit que le nombre d'agents des pêches avait été ramené de 606 à 500 et le nombre de bateaux de 44 à 19. Les activités sur le terrain se trouvent donc réduites et la taille de la zone dont les agents des pêches peuvent facilement s'occuper se trouve aussi réduite. En tout cas, ils sont moins présents sur l'eau. Ces gens-là, bien sûr, travaillent sur le terrain, et je me demande combien il y a d'employés au ministère qui ne travaillent pas sur le terrain et si le personnel administratif a été soumis à des compressions semblables.
M. Bevan: Je tiens à apporter une précision ici: même si le nombre d'ETP a été ramené de 606 à 500, les agents des pêches devraient vraisemblablement être plus présents sur le terrain du fait qu'ils n'auront plus à effectuer tout le travail de bureau qu'ils devaient faire auparavant et qu'ils auront plus de fonds pour leurs activités sur le terrain. Nous prévoyons donc que leur présence sur le terrain se trouvera accrue, et je crois que nous voyons déjà des résultats en ce sens dans certains endroits.
En Colombie-Britannique, par exemple, quand nous comparons l'année 1995 à l'année 1994, nous avons pu doubler le nombre de personnes ayant fait l'objet d'un contrôle et doubler aussi le nombre de patrouilles, etc., dans le fleuve Fraser sans que cela ait exigé plus qu'un accroissement modeste du nombre d'agents des pêches.
Le personnel de gestion a été touché par les compressions. À l'administration centrale, par exemple, le nombre de cadres a été ramené de 26 à 18. Le programme n'a d'ailleurs pas beaucoup de cadres à sa tête - nous n'avons que quatre personnes au niveau exécutif pour l'ensemble du pays. Ainsi, il y avait déjà eu un dégraissage assez important qui avait été fait avant que nous ne commencions à effectuer les réductions.
M. Johnston: Ainsi, il n'y aurait plus que 22 personnes qui seraient au service du ministère à Ottawa.
M. Bevan: Non, il y a au total 18 personnes à la Direction générale de la conservation et de la protection à Ottawa. Nous avons cinq régions dont chacune est confiée à un directeur régional. Les directeurs des petites régions n'appartiennent pas à la catégorie exécutive - ils ont plutôt une autre classification. Chacune des régions est dotée d'un petit effectif qui s'occupe des tâches administratives. L'effectif a déjà été pas mal rationalisé. Il est composé à environ 85 p. 100 d'agents en uniforme qui travaillent sur le terrain.
M. Johnston: Le budget total a été ramené de 90 millions de dollars à 60 millions de dollars, et ça, c'est aussi bien pour les gens qui travaillent à Ottawa que pour ceux qui s'occupent de l'application et ceux qui travaillent sur le terrain.
M. Bevan: C'est exact. Le budget est de 66 millions de dollars.
M. Johnston: C'est tout pour le moment. Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Dromisky.
M. Dromisky: J'ai pas mal de questions, mais je tâcherai de me limiter à deux ou trois questions.
Vous avez parlé de réaffecter les ressources pour assurer une plus grande efficacité, comme dans le cas de la fusion des flottes. Quand je me suis rendu sur la côte Est et sur la côte Ouest, j'ai constaté que les gens de la côte Est se plaignaient de ce que le type de navires que vous aviez affectés à une côte aurait dû être affecté à l'autre côte. Les navires qui se trouvaient sur la côte Atlantique étaient des navires de haute mer, alors que les eaux sont moins profondes de ce côté-là, et les gens de la côte Ouest voulaient les navires de haute mer, qui convenaient davantage là-bas. Maintenant que vous avez réduit l'importance de la flotte, vous attaquez-vous à ce problème et aux autres problèmes de ce genre? Je vous rapporte simplement ce que m'ont dit les capitaines de navires et d'autres personnes.
M. Bevan: En fusionnant les flottes, nous avions bien sûr un nombre imposant de navires du ministère et de la Garde côtière. La Garde côtière et les gestionnaires de navires ont décidé, après examen, de conserver les navires qui correspondaient le mieux aux besoins de chaque région et ont retiré de la flotte les navires qu'ils jugeaient moins utiles. Ainsi, les navires qu'on aura décidé de garder correspondront davantage aux besoins.
M. Dromisky: J'ai visité les services de recherche et j'ai été fort impressionné par les employés et par le travail qu'ils font. Quel effet les compressions budgétaires ont-elles sur les services de recherche de Pêches et Océans?
M. Bevan: Cette question concerne le volet scientifique. Je suis incapable d'y répondre.
Kathryn, pouvez-vous répondre à cette question?
Mme Kathryn Bruce (directrice, Direction de la recherche sur les pêches, ministère des Pêches et des Océans): En fait, je ne suis pas en mesure de répondre à cette question tout de suite, mais je pourrais vous faire parvenir une réponse par écrit.
M. Dromisky: Je vous en serais reconnaissant.
J'ai une autre courte question. Je m'interroge sur la relation entre le ministère de l'Environnement et le ministère des Pêches et des Océans. J'ai appris qu'il n'y avait à peu près aucun lien entre les deux ministères. J'ai rencontré les fonctionnaires des deux ministères sur les deux côtes pour discuter de leurs préoccupations et de leurs problèmes, notamment des déversements en mer, de la pollution océanique et de l'introduction de matières toxiques dans les océans. Pouvez-vous me dire ce que vous allez faire pour améliorer le lien entre les eux ministère?
M. Bevan: Encore là, il s'agit d'une question qui dépasse mon champ de compétences, qui se limite aux activités d'application. Je ne peux vraiment pas répondre à votre question maintenant, mais nous pourrions peut-être recommuniquer avec vous à ce sujet.
M. Dromisky: D'accord. Merci.
Le président: Je me demandais, monsieur Bevan, si vous examiniez la possibilité de la cogestion en matière de protection. Il y a deux ans environ, les pêcheurs de Tignish et d'Alberton ont recueilli 200 $ chacun pour payer les services d'un navire qui devait patrouiller la ligne de démarcation entre le homard d'automne et le homard de printemps. Ils ont fait cela de leur propre initiative. Les résultats ont été assez bons. Je crois même que si les stocks de homard étaient là le printemps dernier, c'est à cause des efforts de ces pêcheurs sur la ligne pour empêcher le braconnage, la surpêche et la pêche hors saison.
Avez-vous envisagé la possibilité de collaborer avec des groupes de pêcheurs comme ceux-là, des groupes qui ont à coeur de...? Dans les alentours de l'Île-du-Prince-Édouard, si nous n'avons pas de homard... Le homard est le pivot de la pêche là-bas. Si nous n'avons plus de homard, nous n'avons plus de pêche. Les pêcheurs là-bas sont donc très inquiets au sujet des stocks, du braconnage et de la protection des stocks. Avez-vous des discussions avec les pêcheurs eux-mêmes pour ce qui est de la façon de protéger leur ressource?
M. Bevan: Oui, nous prévoyons de tenir de ces discussions. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons décidé de recourir au secteur privé pour un certain nombre de nos activités de surveillance... À Terre-Neuve, par exemple, certains groupes écologiques participent au financement des activités des gardiens des cours d'eau. Nous travaillons aussi bien sûr avec les Premières nations au dossier des gardiens, et ce dans le cadre de la SPA, mais certaines Premières nations participent aussi au financement d'agents de pêche autochtones ayant toute la formation voulue. Nous avons notamment reçu de l'argent des bandes pour la surveillance de la rivière Skeena. Les bandes peuvent à leur tour disposer des services d'un agent des pêches pleinement compétent qui s'intéresse aux préoccupations de leur collectivité. Nous travaillons aussi avec les pêcheurs de morue charbonnière, les pêcheurs de flétan et d'autres groupes de pêcheurs de la côte Ouest, qui nous fournissent de l'argent en échange d'activités d'application répondant plus particulièrement à leurs besoins. Nous sommes prêts à conclure des ententes de ce genre dans plusieurs régions. Naturellement, nous tentons d'encourager les pêcheurs à assumer une plus grande de responsabilités et à nous aider à financer des activités, comme le travail des observateurs et des surveillants à terre, etc. Nous travaillons donc avec les pêcheurs et les groupes qui se soucient de conservation afin d'assurer une présence accrue pour les fins d'application de la loi dans les zones qui font particulièrement problème.
Le président: Monsieur Wells.
M. Wells: Je veux vous interroger au sujet du contrôle et de la surveillance des navires. Où en est le processus de planification au ministère pour ce qui est de mettre sur pied un système de contrôle électronique à distance? Il s'agit de quelque chose dont nous discutons depuis un certain nombre d'années.
M. Bevan: Nous travaillons actuellement avec des fournisseurs du secteur privé qui seraient en mesure de nous fournir cette technologie. Nous avons un projet pilote en cours dans la zone soumise à la réglementation de l'OPANO ainsi qu'en Colombie-Britannique. Des répéteurs de satellite nous permettent de repérer la position des navires. Nous avons aussi en Colombie-Britannique un système d'interpellation électronique qui nous permet de recevoir directement du navire les données sur les prises à l'aide des données provenant du répéteur de satellite.
Toute cette technologie est à la disposition des flottes. Quand il s'agit d'élaborer des plans de gestion intégrée du poisson, il existe déjà des technologies qui peuvent être utilisées comme aide pour le contrôle et la surveillance des activités de pêche. Nous encouragerions les flottes à en tenir compte dans l'élaboration des plans de gestion intégrée.
M. Wells: Le projet de l'OPANO dont vous avez parlé est-il celui qui exige l'inclusion d'un terminal satellite à bord de 35 p. 100 des navires canadiens?
M. Bevan: C'est bien celui-là.
M. Wells: Est-il prévu d'accroître cette proportion de 35 p. 100? À quel moment l'entente en question prend-elle fin?
M. Bevan: Elle prendra fin à la fin de 1997. À la réunion de l'OPANO qui aura lieu à St. John's en 1997, il faudra discuter de l'orientation future du programme d'observateurs et du programme de repérage par satellite.
M. Wells: Il s'agit toutefois d'une entente internationale. Qu'en est-il à l'échelle nationale? A-t-on songé, par exemple, à la possibilité d'exiger quelque chose de ce genre de la flotte de pêche au pétoncle dans l'Est, où certains navires ont été accusés, à tout le moins, d'empiéter sur le territoire d'autres navires? Il me semble que le système de surveillance pourrait être utile pour cette flotte.
M. Bevan: Il pourrait être efficace si nous décidions de l'imposer à la flotte en question. Je crois que nous voulions essayer de travailler en collaboration avec les flottes pour les encourager par des mesures positives à se servir de cette technologie au lieu d'obliger les navires à se doter de la technologie en question pour que nous puissions vérifier qu'ils n'empiètent pas sur le territoire de quelqu'un d'autre. Nous essayons d'encourager les flottes à utiliser volontairement la technologie dans le cadre de leur propre plan de gestion du poisson.
M. Wells: La question est-elle vraiment à l'étude? Dans le cas notamment des deux grandes flottes, y a-t-il de véritables discussions à ce sujet?
M. Bevan: Vous comprendrez sans doute qu'une des deux flottes serait très enthousiaste alors que l'autre le serait peut-être moins dans le contexte de la pêche au pétoncle dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse.
M. Wells: Comment expliquer cela?
M. Bevan: Cela serait peut-être perçu par... Eh bien, je ne devrais pas faire d'hypothèses à leur place.
Nous n'avons pas décidé d'imposer ces technologies à qui que ce soit. Elles sont disponibles si quelqu'un juge que c'est avantageux pour sa propre flotte.
M. Wells: Je comprends pourquoi vous ne voudriez pas imposer ces technologies. Je voudrais savoir si à l'heure actuelle on en parle activement comme d'une chose positive ou de quelque chose que l'on veut mettre de côté pour l'instant.
M. Bevan: Ce que nous essayons de faire à l'heure actuelle, c'est travailler avec les compagnies de répéteurs de satellite qui établissent les normes pour leurs services. Nous travaillerons ensuite avec ceux qui s'occupent de la gestion du poisson et de la gestion de la ressource pour nous assurer qu'ils comprennent que ces services sont offerts et qu'ils devraient être considérés comme une option pour la flotte.
Le président: Monsieur Bernier.
[Français]
M. Bernier: Je vais être très bref. En ce qui a trait au conflit entre les pêcheurs commerciaux et les Micmacs de Restigouche, je vais poser une question qui va peut-être vous apparaître hypothétique.
Pour la résolution du conflit entre les homardiers et les Micmacs de Restigouche, le ministère pourrait-il aller jusqu'à offrir le rachat d'un permis à l'un des pêcheurs commerciaux, puisque ces pêcheurs disent que si on faisait entrer un joueur nouveau, il y en aurait un de trop? Ils ne veulent que savoir si les choses pourraient aller jusque-là. Quant à la mécanique, ferait-on un tirage au sort? Je ne le sais pas.
J'ai cru comprendre qu'au ministère, on avait déjà créé des précédents. Pourriez-vous me renseigner sur ces précédents-là, de façon à ce qu'on puisse savoir à quel taux cela a pu se négocier ailleurs? Quels sont les barèmes de référence pour établir la valeur marchande dudit permis d'une façon équitable pour les deux parties?
[Traduction]
M. Bevan: Il est difficile pour moi de faire des commentaires au sujet de la situation des Listuguj, car la question n'a pas encore été réglée. Je peux dire cependant qu'au ministère, dans le cadre de la stratégie sur les pêches autochtones, nous avons un programme qui prévoit des fonds pour acheter des permis du secteur commercial et offrir ainsi des possibilités de pêche commerciale aux collectivités autochtones.
Il s'agit de programmes de vente volontaires et en Colombie-Britannique, par exemple, il s'agit d'une vente aux enchères. Le critère utilisé est donc le meilleur rapport qualité-prix. Ces permis et la capacité sont ensuite transférés en vertu d'ententes dans le cadre de la stratégie sur les pêches autochtones à des collectivités autochtones pour la pêche commerciale. Je ne peux préjuger ce qui ressortira des entretiens qui ont lieu à l'heure actuelle relativement aux Listuguj.
Le président: Merci. Monsieur Johnston.
M. Johnston: Merci, monsieur le président.
Pour revenir à ce dont nous avons parlé précédemment, monsieur Bevan, vous représentez la conservation et la protection, M. Robichaud représente la gestion des ressources et Mme Bruce la recherche. Tous ces éléments sont très importants, et sans eux nous n'aurions pas de pêche. Lorsque je vous ai posé des questions au sujet des budgets, de la dotation, etc., j'ai pensé par la suite que peut-être vous ne parliez que de ces trois domaines.
M. Bevan: Je parlais uniquement de la conservation et de la protection.
M. Johnston: Comment est-ce que cela se compare par rapport au budget total du ministère des Pêches et des Océans? Il me semble que les domaines dont nous parlons à l'heure actuelle - la conservation, la protection et la gestion des ressources - devraient avoir priorité. Si nous n'avons pas de ressources... C'est assez élémentaire. Cela devrait être prioritaire.
Ce que je veux savoir, c'est si nous avons toute une armée de bureaucrates ici à Ottawa ou ailleurs qui n'ont pas été touchés comme ces secteurs par les réductions budgétaires?
M. Bevan: Je pense que l'on peut dire que tout le monde a été touché par les réductions budgétaires, et en fait...
M. Johnston: Mais dans la même mesure?
M. Bevan: En fait, je dirais que l'administration est davantage ciblée que les bureaux de l'exploitation régionale, mais je ne peux vraiment vous donner de détails.
Avez-vous plus de détails, Jacques?
M. Jacques Robichaud (directeur général, Direction générale de la gestion des ressources, ministère des Pêches et des Océans): Monsieur le président, tel qu'on nous l'a demandé, nous avons déjà fourni la ventilation des diverses coupures pour chaque secteur. Je crois que ces renseignements ont été fournis au comité. Vous n'avez peut-être pas eu l'occasion d'en prendre connaissance, mais...
M. Johnston: Non. Je suis nouveau.
M. Robichaud: Très bien. Les chiffres concernant les divers groupes ont été fournis. Je ne les ai pas ici, mais je sais que notre ministère les a fournis.
M. Johnston: Très bien. Je voulais tout simplement dire que la conservation, la recherche et l'application de la loi sont tout à fait vitaux. Je voulais savoir si ces domaines ont été les plus durement touchés par les coupures budgétaires ou si ces dernières ont été réparties équitablement. Je ferai certainement de la recherche dans ces documents. Merci.
Le président: Merci, Dale.
Nous n'allons pas entendre M. Robichaud. Nous allons entendre Kathryn Bruce qui, de toute évidence, en connaît beaucoup plus que M. Robichaud sur cette question et sur la question de la morue. Vous avez donc la parole, madame Bruce.
Des voix: Oh, oh!
Mme Bruce: Oui, monsieur, je vais tenter d'être aussi brève que possible, monsieur le président. Il y a cependant beaucoup de matière à couvrir.
J'aimerais vous faire un exposé sur l'état des stocks de poisson de fond de l'Atlantique. Cet exposé a été présenté au Conseil pour la conservation des ressources halieutiques en juin dernier et donne un aperçu des renseignements scientifiques sur l'état d'environ 30 stocks de poissons de fond de l'Atlantique au Canada.
Certaines études ont été effectuées à la suite de cet exposé de juin et d'autres résultats ont été fournis au Conseil pour la conservation des ressources halieutiques. Je vais vous résumer ces résultats à la fin de mon exposé. J'aimerais par ailleurs vous faire un bref résumé du programme des pêches sentinelles, les résultats jusqu'à ce jour et où nous nous situons dans les résultats de l'étude.
Tout d'abord, permettez-moi de faire un bref historique. Nous avons devant nous un graphique qui montre les quantités débarquées de 1981 à 1995. Cela comprend les prises étrangères et canadiennes dans l'Atlantique.
Après l'agrandissement de la zone de pêche relevant de la compétence du Canada en 1977, les stocks se sont rétablis rapidement. Les prises à l'époque sont passées à environ 800 000 tonnes au début des années 80. Elles sont demeurées stables jusque vers le milieu des années 80. Puis il y a eu une chute graduelle suivie d'une chute précipitée jusqu'en 1995. Comme nous le savons tous, il s'agit de la chute la plus grave et la plus dramatique que nous ayons connue dans toute l'histoire du poisson de fond.
Un certain nombre de facteurs ont contribué à cette chute. On ne peut attribuer cette chute à un seul facteur en particulier. En tête de liste, il y a cependant la surpêche nationale et étrangère. Au cours des années qui ont précédé la fermeture de la pêche, on a pêché la moitié des jeunes poissons. Cela représente une pression énorme sur les stocks de poissons.
Deuxièmement, il y avait de mauvaises pratiques de pêche, comme les rejets globaux et sélectifs, ce qui a fait qu'un grand nombre de poissons étaient tués sans contribuer cependant aux débarquements.
Troisièmement, il y a eu les conditions défavorables du milieu. Les mauvaises conditions environnementales peuvent avoir mené à une augmentation de la mortalité naturelle due à la famine pendant l'hiver. La mortalité a donc augmenté et au cours de la même période les prédateurs ont également augmenté.
L'an dernier, nous avons publié des estimations de la population de phoques du Groënland. La population avait augmenté d'environ 4,8 millions de bêtes. C'était le nombre estimatif en 1994. Cette population mange des quantités considérables de morues et d'autres poissons de fond. L'année précédente, nous avions publié des résultats des estimations concernant la population de phoques gris. En 1993, le nombre de ces phoques était évalué à 144 000. Par ailleurs, leur nombre augmentait progressivement à raison de 13 p. 100 sur le plateau néo-écossais et de 8 p. 100 dans le golfe du Saint-Laurent. On estime que la population a maintenant atteint les 175 000 bêtes.
L'augmentation de la chasse au phoque du Groënland cette année signifie que la population de phoques du Groënland est sans doute toujours à 4,8 millions et consomme sans doute toujours un grand nombre de jeunes morues et d'autres espèces de poisson commerciales.
La chute a affecté une grande variété d'espèces. Le graphique montre plusieurs stocks en déclin. La ligne verte montre la morue 2J3KL. On peut voir le déclin ici, tout comme pour la plie canadienne, 2J; la plie grise 2J; et les espèces non commerciales comme la loquette qui n'avait jamais été exposée à la pêche systématique. Il y a eu un déclin aussi marqué chez les espèces non commerciales. De façon générale, il y a un déclin systématique de toutes les espèces, qui étaient au niveau le plus élevé vers le milieu des années 80 et qui ont atteint le niveau le moins élevé au début des années 90. Ce ne sont donc pas uniquement les espèces principales qui ont subi un déclin.
Le déclin affecte la morue de l'Atlantique dans toute la zone. Ici, nous avons pris quatre zones où la morue de l'Atlantique représentait une pêche importante: 2J au large du Labrador; 4TVn au sud du golfe du Saint-Laurent; 4VsW dans l'est de la plate-forme Scotian et 5Z sur le banc Georges.
M. Alan Nixon (attaché de recherche du comité): Ce graphique montre-t-il les estimations de stock ou l'augmentation des débarquements?
Mme Bruce: Je vais expliquer cela. Il y a une tendance à la baisse dans les estimations de stocks.
M. Wells: Cela ne va que jusqu'en 1992, il y a quatre ans. Prenez par exemple le banc Georges. Qu'en serait-il de ce graphique, si c'était basé sur l'année dernière...?
Mme Bruce: Je vais expliquer cela au fur et à mesure.
Dans la division 2J, le déclin de la morue a commencé plus tôt et a été plus fort. Je veux simplement ici vous montrer où sont allés les déclins.
Quand on en arrive à 1992, les relevés des bateaux de recherche atteignent un point se rapprochant de zéro. C'était très faible. Pour le sud du golfe, il y a également un fort déclin à la fin des années 80 et cela se poursuit jusqu'en 1992. Le niveau des stocks, toutefois, n'est pas aussi bas qu'en 2J.
En 4VsW le déclin a commencé plus tôt. Il a atteint environ 20 p. 100 du sommet de 1980. C'est allé jusque-là.
Par contre, si vous prenez le banc Georges, la division 5Z, il n'y a pas de déclin systématique. C'est plus au sud. C'est une population très dynamique. Le poisson arrive à maturité à l'âge 2. Il croît très rapidement. Il peut donc contrer le déclin de façon plus dynamique et rapide.
Les déclins ont touché le taux de croissance des poissons. Ce graphique montre le poids à l'âge 6 pour la morue 2J3KL. Nous constatons un déclin très systématique, d'environ 2,5 kilos à la fin de 70 à moins de 1,5 kilo en 1992. Cela signifie qu'il y aurait beaucoup plus de morues dans une tonne de morues en 1992 qu'à la fin des années 80.
C'est à peu près la même chose pour pratiquement tous les stocks de morue. Les chiffres varient peut-être un peu, mais le tableau général est une tendance à la baisse des taux de croissance partout. Il y a tellement d'éléments qui entrent en jeu qu'il est très difficile de tout présenter à la fois.
Ce graphique montre le facteur condition - le gras du poisson - dans la division 2J pour la morue au large du Labrador. On voit que dans les années 80, le facteur condition était plus ou moins constant. En 1991 et 1992, il a chuté. N'oubliez pas qu'il s'agit essentiellement du rapport entre le poids et la longueur du poisson. Lorsque les valeurs tombent en dessous de 0,7 - et nous avons là 0,7 - le risque que le poisson meure de faim au cours de l'hiver est élevé. C'est la conséquence de ce facteur condition. Si c'est inférieur à 0,7, il est très probable que le poisson meure de faim au cours de l'hiver. C'est peut-être en partie ce qui est arrivé à la morue du Nord dans le golfe du Saint-Laurent.
Le déclin a également touché la grosseur par classe d'âge, c'est-à-dire le nombre de poissons produits. Ce graphique montre un certain nombre de jeunes poissons calculés grâce aux sondes de nos bateaux de recherche. Il s'agit donc ici d'une évaluation du nombre de jeunes poissons.
Dans le cas de la morue dans la division 2J, il s'agit de poissons de trois ans. Après le début des années 80, les productions annuelles étaient habituellement faibles, à l'exception de 1986. En 1986, nous avons eu une bonne production, et cela a donné une pointe pour les poissons de trois ans que vous voyez en 1989. Les années suivantes, les classes d'âge ont diminué.
Dans le sud du golfe, il y a une bonne série de classes d'âge jusque vers le milieu des années 80 puis un fort déclin à la fin des années 80 et au début des années 90.
À l'est du plateau néo-écossais, il y a certaines variations, avec quelques bonnes classes d'âge jusqu'à 1984 environ. Les classes d'âge suivantes ont toutes été faibles et il n'y a pratiquement pas eu de bonnes classes jusqu'au milieu des années 80.
Par contre, nous avons là le banc Georges et il n'y a pas de tendance apparente; cela monte et descend. La situation varie d'année en année sans tendances évidentes. Rien que nous puissions observer.
M. Wells: Ces données sont strictement tirées des navires scientifiques de Pêches et Océans.
Mme Bruce: Oui.
M. Wells: Il n'y a pas de pêche sentinelle à ce moment-là.
Mme Bruce: Non, pas à ce moment-là.
Le président: Il s'agirait là de débarquements...
Mme Bruce: Je répète que la réaction aux déclins rapides dans le poisson de fond de l'Atlantique a été très forte et très radicale.
Il y a une série de pêches qui ont été fermées et on a imposé des limites de prises, à commencer par la morue du Nord en 1992 puis cela s'est étendu à toute la région de l'Atlantique les années suivantes jusqu'en 1995 où il y a eu 23 fermetures. C'est très important; c'est radical. Seule la division 4X et le banc Georges n'ont pas eu de fermeture de la pêche au poisson de fond.
Outre la fermeture de pêches, des mesures ont été prises pour améliorer les pratiques de pêche. Il y a ici une longue liste de mesures qui ont été mises en place:
On a interdit le rejet sélectif des prises.
Les pêcheurs ont proposé des plans de pêche axés sur la conservation leur permettant de prendre leurs quotas sans conséquence pour les autres variétés. Ces plans de conservation ont été mis en oeuvre.
Des protocoles pour la protection des petits poissons ont été mis au point.
On a accru la surveillance à quai et élargi le programme des observateurs. Ces deux mesures ont permis d'améliorer l'exactitude des relevés de prises et le respect des règlements.
On a décidé un accroissement du maillage et l'utilisation obligatoire de mailles carrées. Ainsi les engins de pêche deviennent-ils plus sélectifs, ce qui évite d'attraper de tout petits poissons.
On a également adopté... Oui, monsieur.
M. Johnston: Je suis désolé de vous interrompre. Mais interdire le rejet sélectif des prises me semble pratiquement impossible?
Mme Bruce: Je demanderai à M. Robichaud ou à M. Bevan de répondre.
M. Bevan: Il faut utiliser les rapports des observateurs et faire des extrapolations à partir de ce qu'ils ont vu, de ce que la surveillance à quai a permis de constater et de ce que l'on voit lorsque l'on monte à bord du bateau et que l'on compare le dernier coup de chalut à toutes les autres données. On ne peut pas le faire individuellement, bateau par bateau. Il faut le faire pour l'ensemble de la flotte.
Quand on constate qu'il y a une différence entre ce que l'on voit à quai et ce qu'a constaté l'observateur ou l'inspecteur des pêches, il faut fermer la pêche en attendant une amélioration de la situation.
M. Johnston: Mais avec le nombre de personnes qu'il vous faut pour cela, il semble pratiquement impossible de surveiller si le poisson est ou non rejeté.
M. Bevan: Il faut prendre un échantillon. On sait ce que donne la surveillance à quai; c'est couvert à 100 p. 100. On considère 10 p. 100 et ce qu'a vu l'observateur et l'on compare. Si l'observateur trouve des petits poissons et qu'il n'y en a pas quand arrivent à quai tous les autres bateaux, il faut supposer qu'on les a rejetés et prendre des mesures pour fermer cette pêche. On ne peut pas le faire individuellement; il faut fermer toute la pêche.
M. Culbert: Monsieur le président, pourrons-nous demander quelques précisions après l'exposé?
Mme Bruce: J'irai aussi vite que possible.
Le président: Nous sommes loin d'avoir fini, pourtant, n'est-ce pas?
M. Wells: Avez-vous des copies de ce document?
Mme Bruce: Oui, j'en ai pour vous tous.
L'amélioration des pratiques de pêche n'a pas toujours été l'initiative de Pêche et Océans. Les pêcheurs ont mis sur pied un certain nombre de programmes qui ont beaucoup contribué à la conservation du poisson. Nous avons institué des programmes plus développés de relevés scientifiques des pêches sentinelles à Terre-Neuve, dans le golfe du Saint-Laurent et au large du plateau néo-écossais.
Pour le relevé des pêches sentinelles, les pêcheurs commerciaux se chargent en fait des relevés et fournissent leurs résultats et leurs observations aux chercheurs du ministère. Ceux-ci compilent alors ces renseignements pour essayer d'obtenir un tableau beaucoup plus global de la situation du point de vue scientifique.
Cela a beaucoup rapproché les chercheurs et les pêcheurs qui examinent et évaluent les ressources de poisson de fond.
Les pêcheurs ont également proposé plusieurs choses telles que des fermetures de pêche par secteur et par période pour protéger le petit poisson. Ils ont proposé des limites de prises par sortie et, dans certains cas, des journaux de bord plus détaillés pour les scientifiques.
Un système de déclaration des prises a également été mis en place par les pêcheurs dans certaines pêches pour améliorer la transmission des données concernant les prises et les quantités débarquées. Outre les relevés de pêches sentinelles, dans certains cas où les pêches sont encore ouvertes, les pêcheurs effectuent des relevés scientifiques à leurs frais et fournissent ces renseignements pour aider à évaluer les stocks.
Un certain nombre de facteurs ont ainsi contribué au déclin. J'en ai cité un, à savoir, les conditions défavorables du milieu. Vous avez déjà vu cela. Le déclin de la température de l'eau a notre station de surveillance au nord-est de Terre-Neuve est indiqué sur ce graphique. Il s'agit de la station 27. Cela révèle un déclin assez régulier, avec certaines interruptions, depuis les années 60 jusqu'au minimum atteint dans les années 90, avec un certain retour à la normale ces deux dernières années.
Ce rétablissement est prometteur. Ce changement dans la condition du milieu est réconfortant mais nous ne pouvons pas dire encore si cela va se maintenir et nous ramener où nous en étions vers 1980 ou s'il y aura une autre anomalie à la baisse.
Ces graphiques donnent une autre dimension du facteur ambiant, qui me semble très intéressante. Il s'agit de ce que l'on appelle la couche intermédiaire de froid où la température de l'eau est inférieure à zéro. Nous avons là une ligne qui part de la côte pour aller jusqu'au bord du plateau continental. On a exagéré ici l'échelle. Cet axe représente seulement 300 mètres de profondeur alors que ceci représente de 120 à 150 miles. Il ne faut pas l'oublier.
Si vous considérez les années 60, période de forte productivité dans la pêche à la morue à Terre-Neuve et ailleurs, vous constatez que l'été l'eau froide était très limitée et n'atteignait pas le fond. Le graphique suivant montre jusqu'où allaient les eaux où la température était inférieure à zéro en 1991 qui fut une année très froide. Vous voyez ici l'importante couche d'eau froide. Il s'agit de température à -1,5o et cela va presque jusqu'au fond dans certaines régions. Ce sont là des conditions très défavorables pour la morue.
Par contre, si l'on considère l'été 1995, en juillet, on voit que la couche intermédiaire froide est à nouveau plus réduite. Bien qu'elle ne soit pas aussi réduite qu'au milieu des années 60, elle l'est beaucoup plus qu'au début des années 90. Ceci, en 1995, représente de meilleures conditions ambiantes pour la morue de Terre-Neuve.
Même s'il y a quelques améliorations dans les conditions ambiantes à Terre-Neuve, le Golfe du Saint-Laurent reste froid. Le graphique suivant montre que ce froid persiste.
CIF, couche intermédiaire de froid, couvre toujours une bonne partie du fond du sud du golfe et atteint le fond dans pas mal de secteurs du nord du golfe et à l'embouchure du golfe du Saint-Laurent. Cette couche intermédiaire de froid, atteint près de 1o actuellement. C'est mauvais pour la morue dans ce secteur et l'amélioration que nous constatons à Terre-Neuve ne se retrouve pas dans toute la région.
Si nous passons maintenant au plateau néo-écossais, la situation est variable. Le banc Misaine qui est à l'est du plateau néo-écossais, est resté assez stable et relativement chaud depuis les années 50 et jusqu'aux années 80. Puis on est passé à des températures relativement froides à la fin des années 80 et jusqu'en 1995. Lorsque les températures ont commencé à chuter, nous avons commencé à voir du capelan dans les relevés de nos bateaux de recherche. Le capelan est devenu de plus en plus abondant, à tel point que l'on pratique maintenant à titre expérimental la pêche au capelan dans cette région.
Pour ce qui est de Basse Lurcher, au sud-ouest du plateau néo-écossais, il y a également une chute de température dans les années 80. Si l'on considère les deux points rouges, on constate un retour vers la normale dans ce secteur. La ligne verte continue indique les tendances alors que l'on indiquait les deux dernières années par des points.
Par contre, dans le cas du bassin Émeraude, ces dernières années, les températures dépassent la normale et ce particulièrement depuis deux ans. Le bassin Émeraude est alimenté par les eaux du plateau néo-écossais, c'est-à-dire par des eaux chaudes de pentes sous l'influence du gulf stream ce qui explique le réchauffement des conditions océanographiques.
Pour faire le point donc à la lumière de cette information, de façon générale, on a arrêté le déclin de la morue. Voici la morue. Dans le cas du Labrador, les stocks sont à leur niveau le plus faible et donc on peut dire qu'il y a arrêt du déclin. Dans le nord du Golfe, la ligne n'a pas beaucoup bougé depuis 1992 et dans l'est du plateau néo-écossais, il n'y a pas non plus beaucoup de mouvements. Le déclin des stocks de morue semble arrêté.
Par ailleurs, dans la zone du plateau néo-écossais, on constate les signes très réels de reprise chez l'aiglefin, surtout dans la zone du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse dans la division 4X. Les données de recherche révèlent qu'il y a eu déclin, mais reprise après 1993. Si la ligne remonte, c'est que les relevés scientifiques que nous avons réalisés révèlent l'existence d'un grand nombre de petits aiglefins jeunes, ce qui est bon signe.
Par contre, dans l'est du plateau néo-écossais, le nombre de poissons propres à la pêche est assez stable, mais il n'y a pas le même nombre élevé de jeunes poissons.
M. Wells: Quelle classe d'âge [Inaudible]
Mme Bruce: Il me faudrait vérifier pour savoir d'où venait cette classe d'âge. Nous avions plusieurs tableaux, mais je vous communiquerai la réponse.
Dans le cas du poisson plat, là où la pêche s'est poursuivie pendant cette période, c'est-à-dire jusqu'à 1994, on constate un déclin plutôt soutenu, qui se maintient jusqu'au bord du tableau.
Je vais essayer d'aller plus vite, monsieur le président, je sais que le temps presse, je n'entrerai pas dans les détails des diverses espèces.
En ce qui concerne le déclin qui est arrêté - nous prétendons que c'est le cas et qu'un revirement est en cours - il y a lieu de se demander ce qu'il nous faut pour effectuer un revirement réel et le rétablissement des stocks de morue. Tout d'abord, il nous faut une réduction de la mortalité totale. La fermeture des pêches ciblées et les diverses autres mesures prises ont réduit de beaucoup la mortalité du poisson de fond de l'Atlantique. Il est à noter également que l'état actuel des stocks de morue révèle que la morue ne risque plus de mourir de faim au cours de l'hiver. Elle est en meilleur état à l'approche de l'hiver. Le poisson devient alors plus gras et s'est ce que nous constatons. L'état de la morue s'est considérablement amélioré en 1994 et en 1995.
Il faut également une augmentation des taux de croissance. C'est-à-dire qu'il faut que le poisson prenne du poids plus rapidement. Il doit être plus gros, plus lourd, et c'est ce que nous constatons. Les signes sont que la morue s'améliore. On est encore loin des niveaux du début des années 1980, pour mettre les choses en perspective, ou même du milieu des années 1980, mais la situation s'est considérablement améliorée par rapport au début des années 1990.
On peut donc conclure que la morue adulte donnera des jeunes plus nombreux et en meilleure santé. L'état du poisson entre en jeu ici. La morue plus grasse, plus lourde produit plus d'oeufs et de larves que la morue plus maigre et plus légère. Les conditions de frai s'améliorent donc. La seule difficulté s'est qu'il n'y a pas de nombreux reproducteurs. C'est donc dans ce contexte qu'il faut juger cette amélioration.
Enfin, on devrait pouvoir compter sur l'accroissement du recrutement, c'est-à-dire du nombre de jeunes morues qui peuvent être pêchées, ce qui n'est pas le cas. Voilà l'élément manquant pour l'instant. Les signes de recrutement qui indiqueraient un rétablissement réel sont absents. Évidemment, c'est le dernier élément de la chaîne. Il faut que toute une série d'événements se déroulent avant que l'on ne commence à constater une augmentation du recrutement. Il y a très peu de signes de recrutement sauf dans le cas de l'aiglefin dans la zone 4X et dans le cas de certains stocks de poissons plats.
Regardez la biomasse, c'est-à-dire le poids total de poisson vivant dans l'eau - nous avons beaucoup de chemin à faire. Voici la morue du plateau néo-écossais. La fermeture de la pêche signifie que la morue qui reste gagne du poids ce qui relève tranquillement la biomasse, mais nous sommes encore loin des niveaux atteints au cours des années 1980. Si vous regardez les taux de recrutement, le nombre de jeunes morues atteignant l'âge d'être pêchées, il n'y a pas eu de bonne classe d'âge depuis le milieu ou la fin des années 1980, voilà le problème.
Si nous reprenons les indicateurs biologiques, pour la morue, nous constatons certaines améliorations. Voici le poids à l'âge. Dans le cas de la morue, on a atteint un point très faible, soit 2,5 livres ou 1,2 kilogrammes, en 1992, niveau qui s'est maintenu, toujours très bas en 1993. Il y a maintenant reprise, nous en avons des indices, mais nous sommes très loin de la situation à la fin des années 1970.
Si vous regardez l'état, la grosseur de la morue, particulièrement dans la zone 2J, c'est plus ou moins la même situation dans le nord du golfe du Saint-Laurent. On tombe à des niveaux très bas pour ensuite voir une reprise et atteindre un niveau considéré normal. Voici le poids selon l'âge pour la morue. C'est encourageant. On revient à la normale.
La longueur selon l'âge constitue une autre façon d'évaluer la situation d'une espèce. Dans le cas de la morue au large des côtes du Labrador, on constate un déclin continu au cours des années 1982 jusqu'à son point le plus bas en 1992 et 1993. Ensuite, il y a reprise. Les poissons ici sont très petits toutefois, parce qu'il n'y a pas beaucoup de poissons de six ans, âge que nous évaluons. Dans les échantillonnages, soit des relevés sentinelles ou des relevés scientifiques aux fins de recherches, il n'y a pas eu de poissons de cet âge et donc nous n'avons pas pu faire de prélèvements. Nous espérons que la situation va s'améliorer. Néanmoins, il est à noter que d'après les échantillonnages que nous avons pu faire, il y a amélioration. Voici le tableau pour le golfe du Saint-Laurent qui révèle que cette amélioration se retrouve ailleurs que dans la zone 2J.
Voici les taux de recrutement pour diverses espèces dans différentes zones. Ce n'est pas très encourageant. Les classes d'âge étaient en très mauvaise situation, dans les années 1990, dans la plupart des zones. Nous commençons à constater des améliorations dans certaines zones. Dans le cas de certaines espèces, la situation n'est pas claire et vous voudrez peut-être y regarder de plus près lorsque vous recevrez votre ensemble de tableaux. C'est très difficile et il faudrait beaucoup de temps pour entrer dans les détails maintenant.
Où en sommes-nous donc? Du côté positif, les conditions ambiantes s'améliorent, surtout à Terre-Neuve, bien que cela ne se soit pas encore produit dans le golfe. Toutefois, c'est encourageant. Le poisson, est de façon générale, en meilleur état. Il est plus gras et en meilleure santé bien que les stocks demeurent bas. Nous n'avons toujours pas le grand nombre de jeunes poissons qu'il faudrait pour permettre aux stocks de se reconstituer et pour vraiment permettre un rétablissement. Il y a très peu de signes d'abondance de très jeunes poissons où que ce soit, sauf pour l'aiglefin du plateau néo-écossais et quelques poissons plats, comme je l'ai mentionné précédemment.
Pour résumer, je vais vous citer une phrase du rapport sur l'état des stocks publié au mois de juin. J'ai donné copie de ce gros volume au président. C'est un livre merveilleux qui contient tous les rapports sur l'état des stocks.
M. Wells: Pouvons-nous en avoir chacun un exemplaire?
Mme Bruce: Certainement. On peut y lire: «Même si les déclins ont été arrêtés, le rétablissement des stocks de poisson de fond n'a que débuté partiellement».
Essentiellement, c'est là où nous en sommes sur le plan scientifique. Vous pouvez obtenir un exemplaire complet au secrétariat ou au bureau régional de Pêches et Océans, ou encore sur l'Internet. Vous avez accès à tous les rapports sur l'état des stocks à la page d'accueil de Pêches et Océans et vous pouvez en fait les télécharger.
Le président: Il y a un an, je pense qu'on nous avait dit que les stocks dans le golfe semblaient assez bien se rétablir. On nous avait dit que c'était à Terre-Neuve où il faudrait de 8 à 14 ans avant d'arriver à un rétablissement appréciable des stocks. Vous venez de nous dire le contraire. Vous nous donnez de bonnes nouvelles pour Terre-Neuve mais de mauvaises nouvelles pour le golfe.
Mme Bruce: Je suppose que de bonnes nouvelles en ce qui concerne les conditions du milieu -
Le président: Je parle en termes relatifs.
Mme Bruce: - c'est en termes relatifs en ce qui concerne les conditions du milieu et l'état du poisson.
Puis-je poursuivre pour vous faire part de la nouvelle situation des stocks, après le rapport du mois de juin? Puis-je également vous faire part des renseignements qui ressortent du relevé sentinelle?
Le président: Oui.
Mme Bruce: Peut-être puis-je simplement résumer cette information le plus rapidement possible.
Dans le cas de la morue, les nouvelles données du relevé pour St-Pierre, la zone 3PS et les données du sondage 1996 révèlent que la biomasse au large continue à être faible. Les données des pêches sentinelles de 1995 permettent de croire qu'il y a un bon nombre de poissons le long des côtes.
On continue néanmoins à se préoccuper de l'absence de bons recrutements et de l'absence de poissons plus âgés. Il faudra tenir compte de ces facteurs lorsqu'on envisagera la réouverture de la pêche.
On a fondé la pêche à l'aiglefin et à la goberge sur un bon recrutement. Or, les derniers bons recrutements étaient au cours des années 1980. Il n'y a eu rien de tel ces dernières années. Je parle de la zone 3PS. Rien ne laisse prévoir d'augmentations importantes dans un avenir rapproché.
Dans le cas de la plie, la biomasse qui pourrait se reproduire est la plus faible de toute la série. Le recrutement a été mauvais pendant toutes les années 1990.
J'ai l'impression de toujours transmettre de mauvaises nouvelles. C'est horrible. Je n'y suis pourtant pour rien.
Dans le cas de la morue du plateau néo-écossais et de la baie de Fundy, la zone 4X, les stocks augmentent des faibles niveaux des années 1993 à 1995 grâce au recrutement de la classe d'âge de 1992 qui était très élevée. Toutefois, le recrutement après la classe d'âge de deux ans de 1990 semble assez mauvais, tout comme en 1993 et 1994. Donc nous avons atteint le point le plus élevé en 1992, mais maintenant il n'y a pas de relève.
En ce qui concerne la goberge du plateau néo-écossais, les stocks augmentent également grâce à la classe d'âge de 1989. Il s'agit de la deuxième plus importante classe de cette série qui remonte à 1974. La série a commencé en 1973 ou 1974.
Dans le nord du golfe, dans le cas de la morue, il y a une légère augmentation des stocks. C'est en grande partie dû à la croissance des classes d'âge de 1987 et 1988. Des classes d'âge moins fécondes suivent celles-là. C'est probablement ce dont on vous a parlé l'an dernier - les résultats des retombées des classes d'âge de 1987 et 1988 dans la zone du nord du golfe.
L'indice d'abondance du flétan noir accuse une augmentation d'environ 40 p. 100 entre 1995 et 1996. En 1996, les prises moyennes par filet étaient les plus élevées depuis 1990. Cela va de pair avec ce que nous disent les pêcheurs. Les données des relevés de recherche sont uniformes. Elles révèlent de bonnes prises en 1996. On constate également une augmentation du nombre de juvéniles ce qui ne s'était pas vraiment vu depuis le début des années 1990.
En ce qui concerne le sud du golfe, on vient tout juste de terminer le relevé. Nous effectuons actuellement les analyses et les évaluations. Les données seront disponibles plus tard ce mois-ci. Nous ne les avons pas encore.
En ce qui concerne le relevé de pêche sentinelle, il semblerait que les stocks de morue le long des côtes aient augmenté, de 1995 à 1996, sauf dans les divisions du nord, soit 3K et 2J. La ligne de démarcation semble être Notre-Dame. Les stocks au large des côtes semblent se rétablir beaucoup plus lentement que les stocks le long des côtes. Ainsi, il semblerait que les augmentations se trouvent dans la région du sud des zones côtières.
L'état général de la morue, toutefois, va de bon à excellent, d'après les rapports des zones de pêche sentinelle.
Les pêcheurs qui ont effectué cette pêche sentinelle nous mettent en garde contre la tentation d'associer ces résultats à un renouvellement des stocks. Il faut être prudent. Ils nous signalent que la pêche sentinelle se produit dans des conditions idéales, dans les meilleures zones de pêches et sans concurrence. Il faut être très prudent dans l'utilisation dans ces résultats.
Voilà donc un tout petit résumé. S'il y a des questions, monsieur le président...
Le président: Bien. Je vais devoir partir, Kathryn, mais le vice-président prendra la relève. Détendez-vous, prenez votre temps, nous poserons autant de questions que possible. Merci beaucoup.
Le vice-président (M. Wells): Monsieur Bernier.
[Français]
M. Bernier: Madame Bruce, j'ai plusieurs questions. Je ne peux m'empêcher de noter que dans votre rapport de ce matin, vous nous dites que le déclin semble être arrêté. Vous nous avez aussi démontré quels étaient, selon vous et votre équipe, les facteurs nécessaires pour qu'on dise qu'on pourra reprendre la pêche. On parle de l'état de la biomasse.
Je ne suis pas un scientifique. Je ne peux donc pas contredire ce qui se passe là. Cependant, je comprends que plusieurs facteurs ont contribué à la chute des différents stocks que l'on pêchait et que chacun reprend un peu de vitalité selon son rythme.
On ne peut prédire l'avenir. Lors d'une séance antérieure, on nous avait donné une image de la pêche à la morue dans différentes zones. On prédisait un retour à la pêche dans 10 ou 14 ans dans la région de Terre-Neuve et dans 5 ou 7 ans dans le golfe. Je n'ai malheureusement pas ces documents, mais les gens nous questionneront là-dessus.
À la lumière de ce que vous nous avez dit aujourd'hui, il faudrait peut-être remettre la main sur ce document, parce qu'il nous manque des données au sujet du golfe et que les pressions vont se faire d'autant plus fortes en ce qui a trait à votre gestion et à celle de M. Robichaud. Bientôt, les pêcheurs frapperont à la porte et il faudra répondre à leurs questions.
[Traduction]
Mme Bruce: Oui, monsieur le président. Je sais que le CCRH a reçu ou recevra toutes les données scientifiques ainsi que les données de la pêche sentinelle. Il consulte également les pêcheurs pour obtenir des renseignements directement d'eux. Le CCRH fera des recommandations au sujet de la pêche au poisson de fond pour 1997.
Je crois que ces renseignements ou les recommandations du CCRH seront rendus publics le 22 octobre. C'est la date qu'on m'a donnée. Cela comprendra les données scientifiques de Pêches et Océans. Les recommandations du CCRH tiendront compte de nos données.
Je tiens de nouveau à insister sur le fait que même si on voit que le fléchissement des stocks a cessé et si on a quelques indices d'une amélioration de la situation, si on me demandait d'évaluer sur une échelle de A à Z l'ampleur de cette amélioration, A étant le tout début d'une reprise, je dirais que nous en sommes à B.
Cela peut vous aider à situer le contexte. J'espère que c'est utile.
[Français]
M. Bernier: Madame Bruce, vous me semblez plutôt optimiste. Sur une échelle de A à Z, vous dites que vous accordez la cote B pour des cieux plus cléments. J'aimerais pouvoir transposer cet optimisme en une augmentation des stocks de morue. C'est ce genre de réponse que j'aimerais entendre. On pense que cela va bien aller, mais on ne peut encore fixer une date.
[Traduction]
Le vice-président (M. Wells): Il faut clarifier les choses; je pense que M. Bernier a pris votre B pour ce qu'il était à l'école, c'est-à-dire assez bien. Vous pourriez peut-être nous donner une échelle de 1 à 26, pour dire où nous sommes.
Mme Bruce: A, c'est en fait le pire, le fond du baril; Z, ce qu'il y a de mieux. Je suis désolée. Merci d'avoir élucidé la question.
Le vice-président (M. Wells): J'ai trouvé cela plutôt déprimant. Je ne comprenais pas que vous, vous y voyiez matière à encouragement.
M. Bernier: À cause de l'école.
Le vice-président (M. Wells): Ah oui, il faudra changer cette analogie.
Mme Bruce: Oui, on pourrait commencer par Z en allant jusqu'à A.
Le vice-président (M. Wells): Monsieur Bernier, avez-vous d'autres questions?
M. Bernier: Non. J'en suis au A.
Le vice-président (M. Wells): Madame Ablonczy.
Mme Ablonczy (Calgary-Nord): Merci, monsieur le président.
J'aimerais d'abord vous remercier de votre exposé. On dit qu'une image vaut mille mots et pour nous, qui entendons tant de verbiage, c'est agréable de voir cette présentation. Je vous en félicite. Je sais que la préparation de ces transparents exige beaucoup de travail. Il nous ont été très utiles.
J'ai un peu examiné la situation des populations de phoques dans les Provinces atlantiques. J'aimerais savoir quelle est à votre avis l'incidence de la population de phoques sur la pêche, quels sont les faits à ce sujet, et ce que vous recommanderiez, dans une situation idéale, pour gérer ce facteur pour le plus grand avantage de l'industrie de la pêche. Je sais que c'est une question difficile, mais elle est très étroitement reliée à ce dont nous parlons aujourd'hui.
Mme Bruce: Dans mon exposé, j'ai signalé que nous avions évalué la population de phoques du Groënland, en 1994, et celle des phoques gris, en 1993. Nous avons également évalué leur consommation de poisson, en examinant le contenu de l'estomac des phoques pour déterminer quelle classe d'âge de poisson on y trouvait.
Les études de la consommation de poissons sont bien différentes des études portant sur l'incidence sur les stocks. Pour déterminer l'incidence que cette consommation aurait sur la population de poissons, il faut considérer de nombreux facteurs: la relation entre le prédateur et ses proies, tous les équilibres...
Mme Ablonczy: L'âge du poisson...
Mme Bruce: L'âge du poisson consommé, ainsi de suite. Nous savons que c'est un facteur important.
Dans les années 1980, une étude a été réalisée par le CIEM, le Conseil international pour l'exploration de la mer. Elle portait sur les interactions entre le phoque du Groenland, le caplan et la morue. On voulait justement examiner l'incidence de la consommation. Les résultats n'ont pas été concluants, à cause de la dynamique, des interrelations et des changements dans les diverses populations.
C'est une question à laquelle il est très difficile de répondre. Nous sommes toutefois en train de mener une étude sur la mortalité chez la morue, pour déterminer quels sont les divers facteurs de mortalité chez la morue et les différencier. Cette étude est en cours. Nous n'avons encore aucun résultat, mais je m'attends à ce qu'il y en ait et je serai ravie de vous dire quand nous les recevrons. Ce sera sans doute...
Mme Ablonczy: Une fois que vous aurez les résultats, il y aura des recommandations.
Mme Bruce: Nous essaierons de voir s'il y a suffisamment de données pour examiner la question de l'incidence, mais pour l'instant c'est impossible. Nous n'avons que des chiffres sur la consommation.
Mme Ablonczy: C'est intéressant.
J'ai une autre question, s'il me reste du temps, monsieur le président. Dans un certain sens, certains députés, dont je suis, examinent cette question en profane, bien entendu, puisque nous ne nous occupons pas activement de pêche. J'aimerais savoir ce que vous avez observé, avoir des faits. Si vous aviez une ou deux recommandations générales sur la façon de redonner sa viabilité et son dynamisme à notre pêche, je sais que les Canadiens, surtout ceux des provinces Atlantiques, s'y intéresseraient beaucoup.
Dans un monde idéal, si vous étiez la dirigeante suprême et que vous vouliez redonner sa viabilité à la pêche, quelles sont les deux ou trois plus importantes recommandations que vous feriez?
Mme Bruce: Bien entendu, ce n'est pas chose facile pour un scientifique analytique. M. Robichaud serait peut-être mieux placé que moi pour cela, puisqu'il tient compte de toutes les questions de gestion et de toutes les interrelations entourant les stocks de poissons.
M. Robichaud: Monsieur le président, je vais répondre à la question.
Pour tout secteur de la pêche, pour toute espèce, l'un des éléments primordiaux, et qui doit le rester, c'est la conservation: il faut une industrie des pêches durable, afin que d'autres générations puissent en profiter. Il nous faut tirer la leçon des expériences passées et nous adapter, pour l'avenir. Si vous le permettez, je vais d'ailleurs vous dire quelles mesures nous avons prises au cas où le CCRH faisait des recommandations au ministre et des suggestions qu'on pourrait mettre en oeuvre dans le secteur des pêches.
Il faut agir autrement et...
Mme Ablonczy: Ça, c'est clair.
M. Robichaud: ... penser à la conservation.
Je vais laisser au comité un court document que nous avons utilisé. Déjà, nous avons commencé à travailler en étroite collaboration avec le CCRH. Nous avons participé à diverses consultations, au cours de l'été, où nous avons présenté ce que nous appelons nos critères de gestion pour la réouverture des pêches. On y prend en compte diverses mesures qui vont changer notre façon de gérer les pêches. La conservation est primordiale.
Vient ensuite une pêche plus autonome et plus viable. Ainsi, selon le secteur, une partie intéressée pourrait ne plus dépendre d'une seule espèce, mais exploiter divers types de pêche, si elle le veut. Cela signifie aussi qu'il y aura moins d'exploitants pour une ressource à quantité limitée. C'est ce que nous voulons dire lorsque nous parlons d'une pêche viable et autonome.
Voilà deux exemples de principes auxquels nous devons donner de l'importance. Ce ne sont pas les seuls, mais vous avez demandé qu'on vous en présente un ou deux.
Mme Ablonczy: Vous nous donnerez davantage de détails sur ces recommandations dans un...
M. Robichaud: Cela, ce n'est que pour le poisson de fond. Je laisserai ce document au greffier, qui pourra en faire des copies et vous les distribuer. C'est un document datant de juillet. Nous avons fait une consultation. Nous avons parlé aux intéressés, aux représentants provinciaux, etc. C'est ce que nous avons mis sur la table.
Kathryn a mentionné que le 22 octobre, le ministre va examiner le rapport du CCRH. Le personnel de chaque région tiendra des discussions sur ce genre de questions, sur chaque secteur - comme le golfe, Scotia-Fundy et Terre-Neuve.
Mme Ablonczy: Bien. Je pense que ce sera bien utile. Je l'apprécie. Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. Wells): Monsieur Culbert.
M. Culbert: Merci, monsieur le président.
C'était certainement un exposé très édifiant. Je devrais me compter heureux d'avoir beaucoup de pêcheurs dans la zone 4X, du moins pour ce qui est de l'aiglefin.
J'aimerais revenir sur quelques petites questions. J'imagine que ça intéresse tout le monde, puisque nous sommes tous dans le même bateau, que nous le voulions ou non. Tout est interrelié.
Pour commencer, je vais vous dire que j'accorde une grande confiance à ceux que j'appelle les «historiens des pêches». Il s'agit des gens qui sont dans ce secteur depuis nombre d'années. Ils me disent, par exemple: «Ce n'est pas un phénomène nouveau. Je me rappelle qu'en 1928, la morue a disparu pendant 8, 10 ou 14 ans». Peu importe le nombre d'années. Ils ne savaient pas exactement pourquoi, c'était à cause de l'alimentation des morues ou d'un changement de température. Ce n'est donc pas un nouveau phénomène causé par certaines activités, bien qu'elles aient certainement une incidence.
Tout d'abord, j'aimerais savoir ce que vous pensez des effets de la pêche des flottes étrangères. D'après vous, la surpêche des flottes étrangères était l'une des causes du fléchissement des stocks. Où en sommes-nous avec cette question? Nous savons que nous avons mis en oeuvre toute sorte de contrôles, des QIT et des TPA et toute sorte d'autres quotas; nous avons fermé la pêche de certaines espèces dans nos régions. Mais qu'arrive-t-il avec les flottes étrangères.
M. Bruce: Dave Bevan, qui s'est occupé de l'OPANO, pourrait peut-être vous répondre.
M. Bevan: Vous vous souvenez sans doute qu'un accord entre le Canada et les États-Unis a été conclu après les discussions de mars 1995, lequel a donné lieu à une série de mesures de contrôle supplémentaires. Celles-ci ont été acceptées par l'OPANO en 1995 et se sont traduites par un projet pilote actuellement en cours, jusqu'à la fin de 1997. Nous verrons ce qui se produira lors des discussions de l'an prochain pour décider de l'après-1997.
Parmi ces contrôles supplémentaires, il y a une observation à 100 p. 100 des bateaux de pêche et des peines supplémentaires pour les navires qui ne se conforment pas aux règles, c'est-à-dire les navires qui ont commis ce qu'on appelle des infractions majeures. Ces navires doivent alors revenir au pays dont ils portent le pavillon pour des inspections supplémentaires. C'est un processus transparent. Il a eu pour effet une baisse marquée du nombre de bateaux de pêche au poisson de fond dans la zone réglementée par l'OPANO. Il y en avait auparavant plus de 50 et maintenant, il y en a de 10 à 15, selon les circonstances.
Nous avons donc vu un effet important. C'est le cas du turbot qui les a intéressés en dernier. En fait, d'après le Conseil des sciences, la situation du turbot est raisonnablement bonne, il n'y a pas de fléchissement; il y a même une augmentation des stocks. Ce genre de résultat prouve que les flottes étrangères et hauturières respectent les nouvelles règles et que celles-ci sont efficaces.
M. Culbert: Mais ce n'est pas en soit un poisson dont la valeur est élevée. À moins que l'on considère le volume; il faut un important volume.
M. Bevan: C'est le volume actuel qui compte. Il eut été bon que ces règles aient été adoptées et respectées il y a des années; nous avons dû attendre en 1995 pour leur adoption. Je pense qu'elles ont efficacement réduit la tricherie aux règles de l'OPANO.
M. Culbert: Quelques questions rapides au sujet de l'application des règles. Je sais qu'en réponse à M. Johnston, vous avez parlé du contrôle des quotas, de la façon de le faire. Nous savons tous que c'est là le défi et qu'il continue d'être difficile à relever. Nous avons tous entendu des histoires de rejets sélectifs.
J'ai quelques questions au sujet de vos données scientifiques. Lorsqu'il y a des prises accidentelles qui sont en tout ou en partie rejetées à la mer, pouvez-vous me donner une idée du pourcentage de poissons qui survit? D'après certains pêcheurs, ils meurent tous. Mais par ailleurs, les scientifiques me disent que parfois, ils survivent tous. Est-ce moitié-moitié, à votre avis? Que vous ont appris vos recherches?
Mme Bruce: Je ne peux pas vous donner de réponse catégorique pour quelque stock que ce soit. Cela varie, d'un poisson à l'autre, et selon l'âge. C'est une question très complexe. Tout dépend aussi de l'époque de l'année et des conditions marines lorsque le poisson est rejeté. Nous n'avons pas vraiment beaucoup de données sur les taux de survie.
Nous avons essayé de réduire au minimum les rejets parce que nous ne voulons pas que les poissons soient gaspillés. Nous voulons conserver les stocks.
M. Culbert: J'ai une dernière question. Au sujet de l'application, qu'allons-nous faire de ce que j'appelle le délestage? Autrement dit, vous avez un quota pour la pêche à la ligne ou la pêche aux lignes de fond, par exemple...on me dit que des chalutiers ou des gros navires en cèdent une partie aux navires de pêche à la ligne ou de pêche aux lignes de fond. Honnêtement, je pense qu'ils se sabotent eux-mêmes. C'est pourtant des histoires qu'on m'a racontées. Il reste que leur quota est ensuite rapidement épuisé, ce qui ne donne pas aux pêcheurs traditionnels à la ligne ou aux lignes de fond la possibilité de profiter pleinement de leur quota.
M. Bevan: C'est difficile à contrôler. Nous avons de la surveillance aérienne et maintenant, la capacité de prendre des photos de nuit. Si nous voyons ce genre de choses, nous pouvons prendre des mesures contre les navires impliqués.
Mais comme vous le disiez, il nous faut dans une bonne mesure nous fier à la pression des pairs, parce que si des gens font cela fréquemment, cela réduit les chances pour toute la flotte. Nous espérons que les pairs nous aideront dans nos démarches d'application de manière à mettre un frein à ce processus qui nuit tant aux petits navires.
M. Culbert: J'ai une petite question, monsieur le président. Dans ma région, c'est ainsi que les choses se passent, à ce qu'on me dit... Je ne prétendrai pas être un expert. C'est une industrie que j'apprends à connaître et je profite beaucoup des conseils des experts qui y travaillent depuis très longtemps. On me dit que lorsqu'une infraction est constatée, on en avise le navire de patrouille. Comme il est facile de nos jours d'avoir accès aux moyens de communication, dès que le navire de patrouille quitte le quai, tout le monde le sait. Alors si un délit est en train de se commettre, les bateaux se dispersent avant même qu'arrive la patrouille. Comment relever le défi?
M. Bevan: C'est pourquoi nous avons recours à des moyens de surveillance aérienne. Il n'est pas nécessaire de prendre le pêcheur et le bateau. Nous pouvons prendre des photographies et les utiliser comme preuve en cour. Je le répète, nous avons depuis cette année la possibilité de prendre des photographies nocturnes. Nous prenons, de nuit, des photos claires qui permettent de reconnaître un navire, et peut-être même ceux qui s'y trouvent, même s'ils croisent à 200 noeuds. C'est une technologie vraiment surprenante. Nous pouvons utiliser ces documents en cour pour prouver certaines de ces infractions.
M. Culbert: Est-ce actuellement disponible dans toutes les régions?
M. Bevan: C'est disponible maintenant dans toutes les régions de l'Atlantique, mais pas encore en Colombie-Britannique.
Le vice-président (M. Wells): Merci beaucoup. S'il n'y a pas d'autres questions, je vais remercier les témoins d'être venus. Nous allons sans doute nous revoir plus tard.
Notre prochaine séance aura lieu mardi, à 9 heures. Nous accueillerons les fonctionnaires du ministère de la Justice pour discuter de la décision de la Cour suprême du Canada au sujet des pêches autochtones. Et nous espérons jeudi discuter de LSPA; nous sommes encore en négociation.
La séance est levée.