[Enregistrement électronique]
Le mardi 19 novembre 1996
[Français]
La coprésidente (Mme Guarnieri): Je déclare la séance ouverte. Le Comité mixte permanent des langues officielles tient aujourd'hui sa première réunion dans le cadre de son étude de l'application de la Loi sur les langues officielles dans la région de la Capitale nationale.
Nous entendrons deux témoins, aujourd'hui: M. Marcel Beaudry, président de la Commission de la Capitale nationale, et M. Michael Nurse, sous-ministre adjoint de la Direction générale des biens immobiliers, Travaux publics et Services gouvernementaux. Je leur souhaite la bienvenue.
M. Beaudry, qui a déjà été maire de Hull, est président d'une commission avec un mandat unique. Je suis sûre qu'il a hâte de nous faire part de ses réussites. Avant de céder la parole aux témoins, je crois utile de souligner que tous les députés qui siègent à ce comité poursuivent le même but, qui est de promouvoir la dualité linguistique qui est au coeur de notre identité canadienne.
Le comité va s'efforcer de s'assurer que tous les Canadiens et Canadiennes se sentent chez eux et chez elles dans la région de la Capitale nationale. Une des raisons pour lesquelles nous vous avons invités, c'est que vous êtes les gardiens d'édifices qui appartiennent autant aux anglophones qu'aux francophones. Personne ne devrait se sentir exclu à cause de la langue.
Nous avons hâte d'entendre votre exposé, mais avant de commencer, j'ai deux petites questions que vous pourrez certainement inclure dans votre exposé.
Une des questions qui intéressent le comité concerne les baux signés par les locataires commerciaux des immeubles qui sont la propriété de la Commission de la Capitale nationale ou administrés par Travaux publics et Services gouvernementaux. Ces baux contiennent-ils des clauses exigeant que les services offerts au public, y compris l'affichage commercial, soient dans les deux langues officielles? Et si tel est le cas, quelles mesures sont prises lorsque le locataire ne respecte pas cette disposition de son bail?
Je vous laisse maintenant la parole.
M. Marcel Beaudry (président, Commission de la Capitale nationale): Merci, madame la présidente. Je suis heureux de pouvoir participer à cette séance du Comité des langues officielles.
Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Suzanne Gustafson, qui est vice-présidente intérimaire des ressources humaines, et de M. Luc Bégin qui est agent aux relations intergouvernementales.
La Commission de la Capitale nationale est une société de la Couronne qui existe depuis près de 100 ans. En fait, nous célébrerons notre centième anniversaire en 1999. Nous avons juridiction sur27 municipalités dans la grande région de la Capitale nationale.
Notre mandat est l'aménagement, la conservation et la programmation de la région de la Capitale nationale. Nous avons également le mandat de coordonner avec différents partenaires, fédéraux, municipaux et régionaux, toute cette région, pour faire en sorte qu'on puisse la mettre en valeur le plus possible et faire de cette région de la Capitale nationale une région représentative de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes. Le mandat de la Commission de la Capitale nationale peut se résumer en deux mots: faire la promotion de l'unité et de la fierté canadiennes à tous les Canadiens qui viennent ici et à tous les autres visiteurs des différents pays du monde.
[Traduction]
Le mandat que nous confère la Loi sur la capitale nationale stipule que nous avons la responsabilité d'organiser, de parrainer et d'encourager les activités et manifestations publiques dans la région de la capitale nationale qui enrichiront la mosaïque culturelle et sociale du Canada, et ce, compte tenu de la nature fédérale du Canada, du statut égal des deux langues officielles au Canada et du patrimoine du peuple canadien.
Conformément à la Loi sur les langues officielles, la CCN offre tous ses services et programmes dans les deux langues officielles. Pour ce qui est de l'offre active de ses services en anglais comme en français, la CCN a une réputation enviable. Toutes nos publications, nos informations, nos annonces publiques ainsi que tous nos documents de promotion et appels d'offre sont toujours dans les deux langues officielles.
[Français]
Toutes nos assemblées publiques sont tenues dans les deux langues officielles. À la Commission de la Capitale nationale, que ce soit en comité ou en assemblée du conseil d'administration, toutes nos discussions sont dans les deux langues officielles.
Tous les terrains et tous les sites d'activités de la Commission de la Capitale nationale sont pourvus de signalisation bilingue.
La CCN est en fait un chef de file dans la promotion des langues officielles. Nous avons toujours été considérés comme étant l'organisme par excellence qui fait cette promotion des deux langues officielles dans les services qu'elle donne au public en général.
On retrouve cela dans les activités artistiques dont nous avons la responsabilité, comme Bal de neige, la Fête du Canada, Cultures Canada et autres. Toutes ces activités artistiques comportent une représentation francophone et anglophone qui est équilibrée et équitable. L'Infocentre de la capitale, qui est situé au 14 de la rue Metcalfe, est aussi reconnu comme un organe très important dans la publicité et la promotion de la Capitale et de sa région, et comme un modèle de services dans les deux langues officielles.
[Traduction]
Bien sûr, la CCN, travaille en étroite collaboration avec ses nombreux partenaires du secteur touristique régional afin d'encourager l'utilisation des deux langues officielles dans les services aux visiteurs, par exemple l'Administration du tourisme et des congrès d'Ottawa,
[Français]
l'Association touristique de l'Outaouais.
[Traduction]
Au cours des trois dernières années, le Commissaire aux langues officielles n'a reçu qu'une seule plainte relative aux activités de la CCN. Cette plainte, qui remonte à 1995, concernait le Centre des visiteurs du Parc de la Gatineau à Chelsea, et la plainte avait trait au fait que les avis dans les toilettes du Parc de la Gatineau étaient en français seulement: «sortie» et «toilette». Dès que la plainte a été portée à notre attention, nous avons pris bien sûr les mesures voulues pour que les avis soient également en anglais.
[Français]
Les locataires de la Commission de la Capitale: Il est bien évident que la Commission de la Capitale a un portefeuille immobilier important. Nous gérons 750 immeubles dans cette région de la Capitale nationale qui vont des résidences privées, aux fermes, édifices patrimoniaux et édifices commerciaux, tels que ceux que l'on retrouve par exemple sur la rue Sussex.
Au cours des trois dernières années, quatre plaintes concernant des locataires de la CCN ont été adressées au commissaire des langues officielles.
À notre avis, cependant, on ne peut forcer nos locataires à afficher dans les deux langues officielles, et je me reporte particulièrement à l'article 25 de la Loi sur les langues officielles, qui stipule ceci:
[Traduction]
- Il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que les services offerts au public par des
tiers, pour leur compte
- on trouve des mots très importants dans cet article -
[Traduction]
- à ce qu'il puisse communiquer avec ceux-ci, dans l'une ou l'autre langues officielles dans le cas
où, offrant elles-mêmes les services, elles seraient tenues, au titre de la présente partie, à une
telle obligation.
Nous considérons donc que les locataires de ces immeubles, aux termes de la loi, n'ont pas l'obligation formelle de suivre les recommandations de l'article 25. Cependant, comme nous considérons que la Commission de la Capitale nationale joue un rôle de promotion de l'unité et de la fierté du Canada, nous avons, dans chacun de nos baux commerciaux, une clause incitative.
Si on lit cette clause, on peut considérer que les locataires sont obligés d'utiliser les deux langues officielles dans l'affichage, mais nous n'avons pas mis cette clause en pratique de façon officielle. Nous la considérons plutôt incitative et nous avons d'ailleurs obtenu des résultats positifs dans ce sens, puisqu'un bon nombre de nos locataires ont suivi cette recommandation que nous leur avons faite de publier ou de faire leur affichage dans les deux langues officielles.
Les quatre plaintes que nous avons eues concernant ces locataires, qui ont été déposées non pas auprès de la CCN mais auprès du commissaire, nous ont été communiquées par le commissaire. Nous avons, bien sûr, pris contact avec ces locataires, dont l'un était le restaurant The Mill, où il y avait une affiche uniquement en anglais à l'extérieur et où le menu était uniquement en anglais. On leur a demandé de se conformer à la Loi sur les langues officielles et ils ont accepté de bon gré. L'autre plainte concernait le restaurant Ritz sur le canal. Dans ce cas, on a également aujourd'hui des menus en français et en anglais. Les services, bien sûr, sont toujours dispensés dans les deux langues.
Il y a eu deux autres plaintes au Camp Fortune. L'ancien opérateur du Camp Fortune, qui est un locataire de la CCN, n'avait pas suivi les recommandations de la Loi sur les langues officielles. Nous avons demandé au nouvel opérateur, qui est en place depuis 1994, de se conformer à la loi et il l'a fait. On peut donc comprendre que c'est dans un esprit d'incitation, de tolérance et de compréhension que la Commission de la Capitale nationale ne force pas ses locataires à respecter cet article.
Mais on a également une opinion juridique qui nous dit que les baux étant en place depuis un certain nombre d'années, si aucune mesure n'a été mise en place pour faire respecter une clause du bail, il y a un accord tacite selon lequel le propriétaire ne reconnaît pas l'obligation du locataire de se conformer à cette clause-là.
Aujourd'hui, on se retrouve théoriquement dans cette situation où on pourrait dire à un locataire qu'il y a une clause dans le bail qui dit qu'il doit publier dans les deux langues officielles. Quant aux services, comme je l'ai dit tantôt, je pense qu'ils sont donnés dans les deux langues officielles. Mais pour l'affichage, c'est une autre question. Je ne pense pas qu'une cour de justice retiendrait cela.
D'autre part, je suis convaincu que l'utilisation d'une méthode forte serait utile pour arriver au but de faire en sorte que les deux langues officielles soient bien reconnues dans la région, comme partout au Canada, puisque l'on veut que cela soit un élément constructif pour la promotion de l'unité et de la fierté canadiennes. Nous pensons cependant que les moyens que nous avons employés jusqu'à présent sont beaucoup plus positifs que des actions en justice, particulièrement dans le cas où la Commission de la Capitale nationale serait déboutée de son action, ce qui ferait assez mauvais effet et aurait un impact assez négatif sur l'ensemble des efforts faits dans le passé, et par la Commission et par les autres organismes gouvernementaux, pour la promotion de la Loi sur les langues officielles.
Nous avons publié un plan d'action qui n'est cependant pas encore officiel puisqu'il vient d'être envoyé au ministre,
[Traduction]
un plan d'action pour les minorités francophone et anglophone.
La CCN donne l'exemple dans la promotion de l'utilisation des deux langues officielles dans la région de la capitale nationale. Les mesures qu'elle prend pour la promotion des langues officielles du Canada dépassent de loin les frontières de la région de la capitale nationale. La CCN vient de déposer son plan d'action visant à encourager la croissance des minorités anglophone et francophone au Canada. Ce plan comprend un programme éducatif, un concours d'affiches, des guides didactiques, des programmes qui permettent aux Canadiens de se connaître, l'initiation de la famille à la capitale et l'ambassadeur de la capitale pour la jeunesse.
La Commission de la capitale nationale a un mandat pancanadien. Nous avons un programme d'initiation à la capitale pour la famille, par exemple, qui permet à 12 familles de chaque province et territoire de se rendre dans la région de la capitale nationale deux fois par an. Pendant leur séjour ici, elles logent avec des familles de la région de telle sorte qu'elles peuvent s'initier à la culture francophone ou anglophone, selon l'endroit d'où elles viennent. On les incite à visiter tous les sites que nous avons - les musées, la Chambre des communes, la résidence du gouverneur général et autres activités de ce genre.
Cela permet aux Canadiens d'apprendre à mieux se connaître. Ces familles font la connaissance du Canada et de la région de la capitale nationale. Nous voulons que la région de la capitale nationale soit un exemple de générosité, de tolérance et de compréhension pour tout le pays.
Je crois que cette région offre une chance unique au Canada: le fait qu'elle chevauche deux grandes provinces, ou les provinces qui sont le plus
[Français]
non pas populaires, mais populeuses. Je ne dirais pas «populaires» parce qu'il y des premiers ministres et des politiciens des autres provinces qui ne m'aimeraient pas beaucoup. Dans cette région, nous avons également une diversité de citoyens, qui sont au nombre d'approximativement un million, et on retrouve les deux cultures et les deux langues bien représentées, une économie bien intégrée, des programmes bien partagés et des gens qui, dans l'ensemble, savent se supporter les uns les autres et exprimer de la compassion et de la compréhension les uns pour les autres. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que cette région devienne une région exemplaire pour le reste du Canada. Il serait bon d'amener des familles, comme je le disais tantôt, ou d'utiliser
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l'ambassadeur de la capitale pour la jeunesse. Par exemple, 200 étudiants âgés entre 16 et 18 ans viennent ici chaque année. Ils suivent des cours et rencontrent des gens. Ils visitent certaines institutions du Canada. Puis ils retournent dans leurs régions pour répandre la bonne parole dans leurs écoles ou leur milieu. Je pense que c'est comme ça qu'on va bâtir notre pays, et la Commission de la capitale nationale prend une part très active à ces programmes.
[Français]
Nous faisons également la promotion de la région par la publicité. Lors de la dernière Fête du Canada, nous avions mis un encart à l'intérieur de 5 millions de journaux qui ont été distribués à travers tout le pays. Cet encart avait été préparé par la Commission de la Capitale nationale pour promouvoir, une fois de plus, les institutions qu'on retrouve ici dans la région. Je dois ajouter que cet encart a été payé à 80 p. 100 par des commanditaires. Naturellement, l'encart était dans les deux langues. On peut donc penser que ce genre de publicité démontre l'importance que la Commission accorde au fait que ce pays est un pays bilingue, un pays qui fait la promotion des deux langues officielles.
Nous avons également des émissions à la télévision, que ce soit pour la Fête du Canada ou pour Bal de Neige, que de nombreux radiodiffuseurs transmettent et que de nombreux téléspectateurs regardent à travers tout le Canada sur les réseaux nationaux. Pour la Fête du Canada, par exemple, environ 1,5 million d'auditeurs ont pu regarder les activités qui ont eu lieu.
L'audience fut encore plus nombreuse pour Bal de Neige, étant donné que cet événement a duré trois semaines.
Nous avons donc un public important qui est tout à fait conscient des efforts de la Commission pour faire la promotion des deux langues officielles.
En terminant, madame la présidente, j'aimerais dire que la Commission continuera à travailler à la promotion des langues officielles. Elle le fera dans un esprit de coopération, dans un esprit qui fera en sorte que nous tenterons de continuer à encourager ceux avec qui nous faisons affaire, particulièrement au niveau des baux commerciaux au sujet desquels vous m'avez posé une question au début, à offrir leurs services dans les deux langues sans nécessairement utiliser des moyens coercitifs. Je pense qu'il est préférable de continuer cette promotion de la même façon que dans le passé, pour faire en sorte que ceux qui appliqueront les règles et les articles de la Loi sur les langues officielles le fassent volontairement, avec enthousiasme et dans le but de faire la promotion de l'utilisation et de la reconnaissance des deux langues officielles.
Je pense que ce n'est pas à coups de marteau et à coups de déclarations fortes et spectaculaires que nous arriverons à faire accepter par tout le monde la Loi sur les langues officielles. C'est en continuant à travailler comme nous l'avons fait dans le passé que nous pourrons y parvenir et que nous aurons un meilleur pays dont tout le monde pourra jouir davantage.
Si ce comité prend une décision ou a des recommandations à nous faire pour améliorer nos actions passées, il est bien évident que la Commission sera toujours disposée à les prendre en considération et à les mettre en application. Nous sommes ici pour travailler ensemble, pour essayer d'améliorer la qualité de tous les organismes qui relèvent du gouvernement fédéral et faire en sorte que tous les Canadiens se sentent mieux chez eux et puissent continuer à faire la promotion du pays qui est le nôtre et qui, à mon point de vue, est le meilleur au monde.
Merci, madame.
[Traduction]
La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci, monsieur Beaudry. Votre intervention a été des plus utiles.
Monsieur Nurse, la parole est à vous.
[Français]
M. Michael Nurse (sous-ministre adjoint, Direction générale des biens immobiliers, ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Merci.
[Traduction]
Merci beaucoup. Madame la présidente, membres du comité, bonjour. Je m'appelle Michael Nurse, et je suis sous-ministre adjoint des services immobiliers à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Permettez-moi tout d'abord de vous dresser un tableau de la situation actuelle en ce qui a trait à l'affichage qu'on trouve à l'extérieur et à l'intérieur des propriétés commerciales que la direction générale des services immobiliers de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada loue à des détaillants.
Notre ministère est le gardien d'immeubles fédéraux évalués à quelque 6,8 milliards de dollars, qui servent en grande partie à loger les bureaux des fonctionnaires. Depuis le début des années 70, nous louons aussi des locaux commerciaux et des locaux à bureaux dans les grands centres urbains comme Ottawa, Montréal, Hull et Vancouver.
Dans la région de la capitale nationale, environ 29 000 mètres carrés de nos locaux sont loués à des commerces de détail, principalement, à Ottawa, au 240 Sparks et sur le côté nord de la rue Sparks, ainsi qu'à Hull, dans le complexe de la Place du Portage. Ces locations rapportent annuellement à l'État des recettes brutes de plus de 4 millions de dollars et elles ont une grande importance pour la vitalité et la viabilité économiques d'Ottawa-Hull.
[Français]
La politique régissant la signalisation pour les immeubles dont nous avons la garde est très claire. Dans tous les cas, la politique du Programme de coordination de l'image de marque du Conseil du Trésor doit être respectée. Il en est ainsi pour permettre au public de reconnaître clairement les activités fédérales et également pour favoriser l'égalité des deux langues officielles. Par conséquent, la signalisation dans tous les immeubles sous la garde des institutions fédérales doit accorder une importance égale au français et à l'anglais.
En vertu du Programme de coordination de l'image de marque, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et les autres gardiens des immeubles fédéraux sont aussi chargés de préciser et de négocier les exigences en matière de signalisation pour les biens immobiliers qu'ils louent au secteur privé.
[Traduction]
Il n'en est pas ainsi pour la signalisation que les locataires installent dans les locaux qu'ils ont loués dans les immeubles fédéraux. Ni la Loi sur les langues officielles, ni le Programme de coordination de l'image de marque n'exigent que ces commerces de détail installent des affiches bilingues.
La Loi 86 de la province de Québec permet l'affichage dans plus d'une langue si le français demeure prédominant. Les municipalités des deux côtés de la rivière des Outaouais et la province de l'Ontario n'ont adopté aucun règlement sur l'affichage bilingue.
[Français]
La bail que Travaux publics et Services gouvernementaux Canada fait habituellement signer aux commerçants de détail ne prévoit pas d'obligations en matière d'affichage bilingue.
[Traduction]
En septembre, la Fédération des communautés francophone et acadienne du Canada a lancé une campagne ayant pour but d'encourager les détaillants d'Ottawa, surtout ceux de la rue Sparks, à afficher dans les deux langues. Il y a quelques problèmes de logistique avec une telle initiative.
Il serait difficile que TPSGC exerce un contrôle sur de telles affiches, qui changent d'une journée à l'autre ou de semaine en semaine. On peut également se demander s'il est bon qu'une organisation à vocation immobilière agisse en ce sens, puisqu'une telle démarche n'est pas conforme aux normes de l'industrie. Celle-ci pourrait être perçue par certains marchands comme de la surréglementation gouvernementale.
[Français]
N'oublions pas non plus que nous sommes une organisation nationale. La politique actuelle exige que nos programmes soient présentés de façon uniforme dans l'ensemble du Canada. Des modifications dans les exigences en matière d'affichage que nous imposerions à nos locataires d'Ottawa pourraient avoir des répercussions sur les commerçants au détail qui louent nos locaux ailleurs au pays.
[Traduction]
De plus, TPSGC n'est qu'un des locateurs fédéraux qui louent des locaux à des commerçants de détail. Tout changement dans les conditions énoncées dans les baux devrait être étroitement coordonné avec d'autres organismes fédéraux et avec le Conseil du Trésor.
Notre démarche a donc été d'encourager fortement les détaillants qui sont nos locataires à poser des affiches bilingues, mais nous ne leur avons rien imposé. Nous avons distribué à nos locataires du 240 Sparks et de la Place du Portage des affiches annonçant qu'ils offrent un service bilingue.
De plus, nous avons travaillé avec le conseil de gestion du mail de la rue Sparks afin que ces mêmes affiches soient mises à la disposition de tous les marchands de la rue Sparks. On s'attend à ce qu'environ 75 p. 100 des marchands participent.
En terminant, je voudrais préciser que Travaux publics et Services gouvernementaux Canada est conscient de l'équilibre délicat qui existe dans les collectivités comme celles de la région de la capitale nationale. TPSGC met tout en oeuvre pour réaliser ses engagements dans l'application des articles 41 et 42 de la Loi sur les langues officielles dans le but de fournir des services aux communautés de langue officielle en situation minoritaire. Les plus récents exemples des efforts du ministère comprennent des séminaires d'information aux fournisseurs dans les villes de Sudbury et Winnipeg et son implication lors du premier Mondial de l'entrepreneuriat jeunesse qui s'est tenu à Ottawa en septembre dernier.
De plus, le ministère travaille également en étroite collaboration avec la Fédération des communautés francophone et acadienne. Voilà pourquoi nous suivrons de près les travaux du comité, qui a reçu comme mandat général d'analyser la situation des deux côtés de la rivière. Vos recommandations sont attendues avec impatience. Merci beaucoup.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci, monsieur Nurse.
[Français]
Monsieur Marchand, vous avez la parole.
M. Marchand (Québec-Est): Merci pour les présentations.
Je suis particulièrement intéressé par ce que fait la Commission de la Capitale nationale. Dans votre présentation, vous avez dressé un portrait plutôt agréable de la situation de la Capitale nationale, mais vous savez que la FCFA a manifesté sur la rue Sparks, l'été dernier, contre le manque d'affichage en français à Ottawa. C'est bien connu, d'ailleurs. On en parle depuis des années. On peut même citer des articles de Michel Vastel et d'autres qui disent qu'Ottawa est loin d'être une ville bilingue, mais bien plutôt une ville unilingue anglaise.
C'est un peu la raison pour laquelle on veut que la Commission de la Capitale nationale en fasse un peu plus. De même, on vous a demandé un plan d'action pour l'application de la partie VII de la loi, pour aider justement à la promotion de la langue française. Mais votre plan d'action a été jugé inadéquat et même nul, aussi bien par la FCFA que par le commissaire aux langues officielles. En fait, vous n'aviez pas de plan d'action spécifique pour l'application de la partie VII.
La promotion du français par la Commission de la Capitale nationale est importante. Ça fait d'ailleurs partie de votre mission, du moins telle qu'elle est définie dans la charte. Mais je me demande aussi si vous aviez le temps de veiller à la promotion de la langue française dans la région de la Capitale nationale, parce que vous avez également un mandat et des pouvoirs assez larges dans le domaine des immeubles et des terrains de la Capitale nationale.
Vous avez mentionné d'ailleurs que vous gériez 750 immeubles, si je ne me trompe pas. Je suppose que, compte tenu de votre mandat, vous n'avez pas le temps de vous occuper du français ou des langues officielles autant que des immeubles et des terrains, et c'est peut-être une des raisons pour lesquelles le français est en souffrance à Ottawa. Qu'en pensez-vous?
M. Beaudry: C'est une question que vous me posez?
M. Marchand: Oui, c'est une question que je vous pose.
M. Beaudry: Tout d'abord, je vous remercie de votre compliment sur le fait que j'ai brossé un beau portrait de la Commission de la Capitale nationale. Mon mandat en tant que président est d'essayer de rendre la Commission de la Capitale nationale aussi attrayante que possible et de faire en sorte que cette commission joue son rôle et soit bien comprise par tous ceux qui résident non seulement dans la région mais partout au Canada.
Le plan d'action dont vous faites mention, remonte, je pense, à 1994. Depuis ce moment-là, nous avons déposé un autre plan d'action auprès de notre ministre, mais il n'est pas encore public, malheureusement, parce qu'il vient juste d'être déposé.
Nous n'avons pas encore eu le rapport du ministre. C'est le plan de 1996-1999. Je pense que ce plan d'action sera accueilli de façon très positive par le ministre. On y parle en particulier des questions que j'ai énumérées tantôt dans ma présentation, c'est-à-dire les différentes approches que l'on propose pour faire la promotion des deux langues officielles, non seulement ici, dans la région, mais partout au Canada.
Quand aux immeubles dont vous faites mention, il est exact que nous en avons 750. Parmi ceux-ci, il y a 125 ou 130 immeubles commerciaux. Dans bon nombre de ces immeubles qui ont des locataires, les services et l'affichage sont dans les deux langues officielles. Les services sont donnés dans les deux langues officielles dans la très grande majorité sinon dans la totalité de ces immeubles, mais je dois reconnaître que l'affichage, dans certains cas, ne se fait pas toujours dans les deux langues officielles.
Comme je l'ai mentionné tantôt, si une plainte était adressée au commissaire, nous communiquerions immédiatement avec le ou la locataire pour faire en sorte que des correctifs soient apportés. Nous avons reçu quatre plaintes au cours des trois dernières années concernant ces locataires de la Commission et nous avons communiqué avec eux pour que des correctifs soient apportés et que les deux langues officielles soient reconnues non seulement dans les services mais aussi dans l'affichage.
Je pense que cela démontre que la Commission se soucie de ce que les deux langues officielles soient reconnues et mises en application partout où il y a des édifices fédéraux qui sont en cause, même si, à mon avis et selon l'opinion de notre conseiller juridique, il n'y a pas d'obligation formelle, sauf dans le cas d'un mandataire de la Commission. C'est d'ailleurs ce que dit l'article25 de la loi.
Lorsqu'il s'agit d'un mandataire de la Commission qui agit pour la Commission, tout doit être fait dans les deux langues officielles. Je ne pense pas que la personne qui loue un local sur la rue Sussex et qui vend des robes de mariées puisse être considérée comme un mandataire de la Commission. Je ne pense pas que cette personne vende des robes de mariées pour le bénéfice de la Commission de la Capitale nationale. Elle vend des robes de mariées pour son bénéfice personnel et, en conséquence, elle n'est pas un mandataire.
Ce n'est pas la même chose pour la compagnie Minto, par exemple, qui a pris en charge, depuis le 1er juin, l'administration des 700 ou 750 immeubles dont nous étions responsables auparavant et qui est considérée comme mandataire puisqu'elle travaille pour nous. Cette compagnie doit produire des enseignes et faire sa publicité dans les deux langues officielles, ce qu'elle fait d'ailleurs lorsqu'il s'agit d'immeubles qui nous appartiennent.
Donc, c'est obligatoire dans le cas du mandataire, alors que ce ne l'est pas dans le cas du locataire qui n'est pas mandataire, mais nous faisons quand même des efforts pour essayer de les pousser à se conformer à la loi et faire comprendre au reste du pays qu'il peut y avoir tolérance, compréhension, effort et enthousiasme dans l'action.
M. Marchand: En tant que propriétaire important de la région, est-ce que...
M. Beaudry: En tant que Commission de la Capitale nationale?
M. Marchand: Je sais que vous possédez personnellement environ 60 compagnies.
M. Beaudry: J'aimerais bien être impliqué dans 60 compagnies, mais je ne le suis pas. De toute façon, je ne pense pas représenter ici la personne de Marcel Beaudry, actionnaire des compagnies où je possède peut-être des immeubles. Mais je dois vous dire que, dans mes immeubles, on utilise les deux langues officielles.
M. Marchand: Vous dites que vous n'êtes pas impliqué dans 60 compagnies?
M. Beaudry: Pas dans 60. Dans plusieurs, mais pas dans 60. Je ne suis impliqué personnellement dans aucune compagnie. Si vous voulez voir exactement ce qui se passe, j'ai transféré toutes mes actions à mon épouse depuis que le commissaire m'a dit que ce serait plus simple.
Je peux vous dire qu'actuellement, je suis impliqué dans la compagnie de mon épouse qui est aussi la mienne puisque je suis marié avec elle.
M. Marchand: Est-ce que je dois comprendre que vous nous avez dit tout cela pour que nous sachions que vous n'avez pas de conflit d'intérêts avec la Commission de la Capitale nationale?
M. Beaudry: Est-ce que vous me parlez de conflit d'intérêts?
M. Marchand: Je crois que tout va ensemble.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Où voulez-vous en venir avec vos questions?
M. Marchand: Je vais aller au fait. Je sais que M. Beaudry est propriétaire de plusieurs immeubles et de nombreux terrains et qu'il n'a peut-être pas le temps de s'occuper de problèmes comme celui de l'application de la Loi sur les langues officielles.
M. Beaudry: Je vais vous dire, monsieur Marchand, que je m'occupe entièrement de la Commission de la Capitale nationale. Je ne siège à aucun conseil d'administration d'aucune de ces compagnies-là, je ne suis ni directeur ni actionnaire d'aucune de ces compagnies-là et je consacre tout mon temps à la Commission de la Capitale nationale.
M. Marchand: Ce n'est pas vrai, monsieur Beaudry, parce que vous êtes nommé dans60 compagnies.
M. Beaudry: De quand date votre document?
M. Marchand: Ce n'est pas la date qui compte.
M. Beaudry: Mais c'est important. Si vous me parlez de 1988, 1989, 1990 et 1991, ce n'est pas la même chose, parce que je suis arrivé à la Commission de la Capitale nationale en 1992. Si vous me parlez de compagnies dans lesquelles j'ai été impliqué au cours des 40 dernières années, je vous dirai que votre liste n'est pas complète si vous n'avez que 60 compagnies. Vous devriez aller voir plus loin et vous allez peut-être en trouver plus.
Mais cela ne veut pas dire que c'étaient toutes des compagnies qui fonctionnaient ou qui ne fonctionnaient pas. Il faut voir les choses depuis 1992 et il faut prendre les déclarations que j'ai faites auprès du conseiller en éthique. Il faut savoir qu'aujourd'hui, je n'ai pas d'actions, je ne suis pas président et je ne suis ni actionnaire ni directeur d'aucune compagnie. C'est mon épouse qui a tout, et je consacre tout mon temps, à 100 p. 100, à la Commission de la Capitale nationale.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Marchand, vous allez maintenant attendre votre tour. Je voudrais dire que je trouve plus intéressantes les idées de M. Beaudry pour faire avancer la cause des langues officielles.
Sénatrice Losier-Cool, vous avez la parole.
La sénatrice Losier-Cool (Tracadie): Monsieur Beaudry, j'ai beaucoup apprécié votre présentation. Au mois d'octobre dernier, j'ai assisté, avec le groupe Canada-France, à une présentation de la Commission de la Capitale nationale et je dois dire que nos collègues de la France ont beaucoup aimé ce que la Commission a présenté.
Je suis l'une de ces personnes qui croient que la meilleure façon de promouvoir la langue française, c'est de la parler et de la bien parler. Alors, arrêtons de parler de la défendre et commençons par bien la parler.
Seriez-vous en mesure de nous dire le pourcentage de personnel francophone directement lié à la Commission, embauché par la Commission?
M. Beaudry: Je pense que nous sommes plus de 50 p. 100, mais c'est sous toutes réserves, parce que vous savez comme moi qu'on est en train de revoir tous les programmes et tous les organismes. Il y a un an, nous avions 905 employés, et aujourd'hui, nous en avons à peu près 630.
Sans être certain que mes pourcentages soient encore bons, je peux dire qu'il y a un an, si je ne me trompe, 52 p. 100 de nos employés étaient francophones. Je peux aussi vous dire que chez nous - la vice-présidente pourra me corriger au besoin - , sans doute au moins 90 p. 100 des employés sont complètement bilingues.
La sénatrice Losier-Cool: Complètement bilingues?
M. Beaudry: Oui.
La sénatrice Losier-Cool: Et des francophones?
M. Beaudry: Qui s'expriment dans les deux langues.
La sénatrice Losier-Cool: Je vous remercie. Merci, madame la coprésidente.
[Traduction]
La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Allmand.
M. Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Merci, madame la présidente.
J'aimerais tout d'abord demander à M. Beaudry s'il aurait l'obligeance de remettre au comité une copie du bail qui contient ces dispositions incitatives.
M. Beaudry: Oui.
M. Allmand: Alors s'il y a plus qu'une seule disposition incitative, pourriez-vous nous remettre les baux qui contiennent ces diverses dispositions incitatives pour que nous puissions en étudier le libellé?
M. Beaudry: Oui.
M. Allmand: J'aimerais que M. Nurse nous dise pourquoi le ministère des Travaux publics, ou peu importe comment il s'appelle maintenant, n'a pas dans son bail de dispositions incitatives semblables à celles de la Commission de la capitale nationale.
Vous êtes tous deux des organismes ou ministères fédéraux. Vous louez tous les deux à des locataires du secteur privé. Pourquoi n'avez-vous pas les mêmes dispositions incitatives dans vos baux?
M. Nurse: Je précise qu'il s'agit de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.
Il y a plusieurs raisons à cela. Premièrement, notre portefeuille est plus diversifié à l'échelle nationale. Nous nous sommes interrogés sur l'ampleur de l'effet qu'aurait une disposition semblable à celle qui est mentionnée dans le bail de la Commission de la capitale nationale. Cependant, nous consultons nos collègues de la Justice et du Conseil du Trésor pour déterminer l'effet que cela aurait. C'est pourquoi il nous tarde de recevoir les recommandations de votre comité.
Donc nous examinons la situation, nous nous interrogeons sur les conséquences que cela aurait de notre point de vue, sur les conséquences que cela aurait sur nous et les autres gardiens d'immeubles fédéraux; et nous voulons savoir ce qu'en pensent la Justice et le Conseil du Trésor. Nous examinons la situation.
M. Allmand: J'ai lu tous les articles de la Loi sur les langues officielles et les autres règlements et statuts, et d'après ce que je peux voir, et j'ignore si c'est bon ou mauvais, il n'y a pas d'article dans la loi aujourd'hui qui permettrait à la CCN ou au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux de contraindre l'entreprise privée à afficher dans les deux langues officielles dans la Région de la capitale nationale, à moins qu'elle n'offre des services pour le compte du gouvernement au sens de l'article 25 de la Loi sur les langues officielles que citait M. Beaudry. Ce qu'on veut faire ici, je pense...
Par exemple, on offre des services postaux dans certaines pharmacies. J'imagine que dans ces cas-là, on serait obligé de fournir... On offre des services fédéraux, même s'il s'agit d'une entreprise privée. Il y a des librairies qui sont tenues par contrat de vendre des ouvrages de l'État depuis que le gouvernement a fermé sa librairie fédérale il y a quelques années.
Monsieur Beaudry, est-ce que la distinction n'est pas là, plus ou moins? À l'article 25, il est dit que si l'on loue à une entreprise privée qui offre des services fédéraux, par exemple des timbres ou d'autres services postaux ou qui vend des publications gouvernementales ou peu importe, cette entreprise est obligée de se conformer à l'article 25 de la Loi sur les langues officielles; mais si cette entreprise vend des robes de mariée, comme vous disiez, on ne peut pas vraiment l'y contraindre. Mais on peut ajouter au bail une disposition incitative. Est-ce exact?
M. Beaudry: C'est notre interprétation.
Je pense toutefois que c'est un peu plus que ça, monsieur Allmand. À mon avis, ce que l'article dit, c'est que chaque institution fédérale a l'obligation de s'assurer que «lorsque les services sont offerts»... Ces services ne veulent pas nécessairement dire que l'entreprise est votre locataire ou qu'elle les loue à votre organisation. Il peut s'agir de services comme ceux de Minto Developments, ou Minto Realty, qui fournit aujourd'hui des services à la Commission de la capitale nationale et qui a la responsabilité contractuelle de l'administration de notre portefeuille immobilier. Même si cette entreprise n'est pas notre locataire, elle nous fournit des services, et elle doit s'assurer de les fournir dans les deux langues officielles. Je pense que l'article va jusque-là.
Mais si en plus, l'entreprise est notre locataire, qu'elle occupe un immeuble qu'elle loue à nous, alors bien sûr, à ce moment-là, si elle fournit des services au nom de la commission de la capitale nationale - ou au nom d'une institution fédérale, comme vous l'avez dit plus tôt - je pense qu'elle a l'obligation de respecter la loi, parce que l'article 25 existe. Mais ça dépend du locataire.
M. Allmand: Oui. L'article 26 est plus précis puisqu'il dit que s'il s'agit d'activités de tiers exercées en matière de santé ou de sécurité du public, ces activités doivent également être bilingues dans la région de la capitale nationale. Donc j'imagine que dans les restaurants, même s'il s'agit d'une entreprise privée, l'affichage relatif au tabac - tout ce qui concerne la santé, étant donné que ça dit santé et sécurité du public - devrait être bilingue.
M. Beaudry: En l'occurrence ce serait peut-être à une institution fédérale - une institution réglementante à intervenir. Si l'on réglemente, alors je pense qu'il faut utiliser les deux langues officielles pour s'assurer que tout ce qui concerne la santé ou la sécurité du public est bien compris.
M. Allmand: L'article qui vous concerne le plus, j'imagine, est l'article 43 de la partie VII, surtout l'alinéa f). Cet alinéa dit que le gouvernement du Canada, par l'entremise du ministre et du ministère, prendra les mesures voulues pour:
- favoriser la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais dans la
société canadienne et, notamment toute mesure
Je n'ai pas lu votre disposition incitative, mais il me semble qu'elle rejoint l'alinéa 43f). J'en aurai une meilleure idée lorsque je l'aurai lue. Mais si j'en crois cet article, même si vous ne pouvez pas contraindre le milieu des affaires - en général qui se compose de locateurs ou que sais-je - vous avez l'obligation d'encourager la prestation des services dans les deux langues officielles et de favoriser la reconnaissance et l'utilisation de ces langues.
Avez-vous lu l'alinéa 43f)? Notre comité a étudié les plans - les plans d'action, commeM. Marchand le disait - en vertu de la partie VII.
[Français]
M. Beaudry: C'est exactement le sens que j'ai donné, monsieur Allmand, à mon exposé de tout à l'heure. Bien que la clause contenue dans notre bail stipule que les locataires doivent publier et afficher dans les deux langues officielles - on ne dit pas «peuvent» mais «doivent» - , nous considérons quand même cette clause comme incitative plutôt que coercitive parce que, même s'il est évident qu'on pourrait poursuivre en justice et demander l'annulation du bail, nous ne croyons pas que la cour retiendrait nos arguments. Toutefois, en incluant une clause ainsi rédigée, nous pensons créer un incitatif vis-à-vis du locataire pour qu'il la respecte. C'est dans le cadre de l'article 43.
C'est l'interprétation que nous en donnons. Ces baux sont en vigueur depuis un certain nombre d'années, cette formule a été utilisée à long terme et les résultats obtenus, dans un très grand nombre de cas, démontrent que les locataires se sont pliés volontairement à l'obligation d'utiliser les deux langues, d'afficher dans les deux langues et de promouvoir leur commerce dans les deux langues. Nous croyons que c'est une façon raisonnable d'atteindre notre but. Nous préférons ne pas employer des méthodes plus draconiennes.
[Traduction]
M. Allmand: Madame la présidente, ma dernière question s'adresse aux deux témoins. J'aimerais savoir s'ils appliquent uniformément les dispositions de la loi sur les langues officielles dans leurs services, leurs baux, leur travail, dans toute la région de la capitale nationale. Autrement dit, est-ce que vous l'appliquez de la même façon dans les municipalités ontariennes et québécoises? Je crois savoir que vous avez trois municipalités du côté québécois et plusieurs autres du côté...
M. Beaudry: Nous en avons 11 du côté québécois et 13 du côté ontarien. La même politique s'applique aux deux rives. La seule exception ici - c'est que l'affichage de la CCN est bilingue partout. Vous pouvez voir ces affiches dans les parcs, sur la promenade et partout. C'est dans les deux langues officielles.
Il y a une exception. Du côté québécois, on a en fait reçu une plainte,
[Français]
concernant une affiche routière annonçant la Capitale nationale. Parce que l'affiche se trouvait le long d'une route du Québec et parce que le ministère des Transports du Québec stipule qu'il faut que ce soit uniquement en français, nous n'avons pas voulu déclarer une guerre de mots et nous avons toléré que cette affiche soit uniquement en français. C'est, cependant, la seule exception en ce qui a trait aux enseignes routières. Partout ailleurs, elles sont dans les deux langues.
[Traduction]
M. Allmand: J'aimerais que M. Nurse réponde à la même question.
M. Nurse: Notre approche est très semblable. Comme l'a dit M. Beaudry, nous avons au ministère une approche d'encouragement. Nous travaillons avec diverses associations. Nos services sont très semblables des deux côtés. Nos méthodes sont très semblables.
M. Allmand: Merci.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci, monsieur Nurse.
[Français]
Sénateur Beaudoin.
Le sénateur Beaudoin (Rigaud): Maître Beaudry, je pense que vous avez déjà répondu en bonne partie à la question que je voulais vous poser. Évidemment, en droit, il y a une différence fondamentale entre une disposition incitative et une disposition impérative. On a même déjà eu une cause très célèbre à la Cour suprême là-dessus.
Mais ici, il s'agit d'une institution fédérale, une véritable institution, et vous considérez évidemment l'article 25 comme étant impératif, si j'ai bien compris. Cependant, s'il s'agit d'un tiers qui ne poursuit pas un objectif qui est celui de la Commission elle-même, par exemple un tiers du domaine commercial, à ce moment-là, vous décidez - et probablement que vous avez raison - de procéder par la voie incitative. Évidemment, si la question était amenée devant les tribunaux, ceux-ci interpréteraient l'article 25. Comme l'article 25 semble faire une certaine distinction entre les deux, vous pensez que le procès ferait plus de mal que de bien peut-être. Est-ce que j'interprète bien votre politique là-dessus?
M. Beaudry: Je pense que vous interprétez bien ce que j'ai voulu faire valoir. Quand on lit l'article, monsieur le sénateur, c'est la seule conclusion à laquelle on peut en venir. Pour ce qui est du mandataire, je pense que c'est clair. Je ne pense pas qu'un commerçant qui exploite un commerce pour son compte est un mandataire de la Commission. Celui qui opère pour servir les intérêts de la Commission devient un mandataire de la Commission, mais pas celui qui opère pour son compte, par exemple un restaurant qui opère à son compte, qui nous paie un loyer, qui vend sa nourriture et fait ses profits ou ses pertes. Cela n'a rien à voir avec la Commission. Il n'opère pas pour la Commission et, en conséquence, il n'est pas mandataire de la Commission. Il opère pour son propre compte.
Or, l'article 25 se lit comme suit:
25. Il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que, tant au Canada qu'à l'étranger, les services offerts au public par des tiers pour leur compte le soient,...
Le sénateur Beaudoin: Leur compte à eux.
M. Beaudry: Exactement.
- ...et à ce qu'il puisse communiquer avec ceux-ci, dans l'une ou l'autre des langues officielles...
[Traduction]
- par des tiers, pour leur compte.
on its behalf de l'institution fédérale. Alors, j'interprète cela comme s'appliquant aux cas où un tiers agit comme mandataire pour nous. Quand il n'agit pas en tant que mandataire pour nous, je ne pense pas qu'on puisse, aux termes de la Loi sur les langues officielles, le forcer à agir dans les deux langues. Mais nous avons quand même ces mesures incitatives afin de les pousser à travailler dans les deux langues, parce qu'il s'agit d'un édifice fédéral.
Le sénateur Beaudoin: Avez-vous une opinion juridique là-dessus?
M. Beaudry: Je n'ai pas d'opinion écrite, mais c'est l'opinion qui nous a été donnée.
Le sénateur Beaudoin: Votre opinion s'appuie sur le libellé du français et de l'anglais en même temps, ce qui est évidemment une bonne chose, en ce sens que les deux versions ont également force de loi en cour de justice. Je suis tout à fait d'accord que si c'est un agent de la Couronne et s'il est stipulé quelque part que c'est un agent, à ce moment-là, c'est comme si c'était la Couronne fédérale elle-même qui agissait.
M. Beaudry: Exactement.
Le sénateur Beaudoin: Si ce n'est pas dit, évidemment, c'est moins clair et moins sûr, sauf peut-être dans le cas d'un bureau de poste. C'est alors autre chose parce que c'est une matière entièrement fédérale. Mais si c'est une matière qui n'est pas fédérale, qui peut être du commerce local, etc., c'est autre chose.
M. Beaudry: C'est ça.
Le sénateur Beaudoin: Vous dites qu'en pareil cas, vous pouvez ajouter une clause dans votre bail, mais qu'il est entendu que la clause sera considérée comme purement incitative et non pas comme impérative.
M. Beaudry: Ce que j'ai dit tout à l'heure, c'est que lorsque je suis arrivé à la Commission, les baux existaient déjà.
Le sénateur Beaudoin: Ils étaient déjà là.
M. Beaudry: Et la clause contenue dans ces baux n'avait jamais été mise en application. On n'avait jamais poursuivi devant les tribunaux les locataires qui n'agissaient pas pour le compte de la Commission pour les forcer à respecter la clause.
L'interprétation qui nous a été donnée, c'est que lorsqu'une clause contenue dans un bail n'est pas appliquée, il y a alors acceptation tacite de la part du propriétaire qu'il ne désire pas la mettre en application. On nous a dit, d'une part, que si nous nous adressions aux tribunaux, ils en viendraient à la conclusion qu'il y a eu acceptation tacite de notre part de ne pas forcer le locataire à respecter cette clause.
D'autre part, on n'est pas convaincus que cette clause, aux termes de la Charte, permettrait de forcer un individu à opérer dans les deux langues, ici au Canada, où la loi n'impose pas l'obligation d'opérer dans les deux langues.
Le sénateur Beaudoin: Il y a aussi le fait que le territoire couvert par la Capitale nationale s'étend du côté québécois et du côté ontarien.
M. Beaudry: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Et les lois d'application générale au Québec ne sont pas celles de l'Ontario, en ce qui a trait aux langues officielles. Je parle des lois provinciales.
Évidemment, vous faites reposer votre argumentation sur la Loi fédérale sur les langues officielles, étant entendu que cette loi vise des institutions fédérales comme telles et non pas les tiers.
M. Beaudry: Et également sur les deux chartes. Il y a la Charte fédérale des droits et libertés et la Charte québécoise des droits et libertés. Ces deux chartes peuvent être utilisées, comme vous le savez, devant les tribunaux quand quelqu'un enfreint les droits d'un individu. Je pense qu'un locataire a des droits lorsqu'il paie son loyer.
Il est certain que les tribunaux, du moins théoriquement, auraient pu dire oui si la clause avait été mise en application dès le début et qu'on l'avait interprétée comme étant sine qua non; c'est-à-dire que si elle n'avait pas appliquée, on aurait pu résilier le bail. Mais cela ne s'est pas fait dans le temps et parce que cela ne s'est pas fait, on pense que l'approbation tacite de ce qui a prévalu au cours des années ferait en sorte qu'aujourd'hui, les tribunaux n'accepteraient pas qu'on annule le bail pour cette raison.
Le sénateur Beaudoin: Cela répond à ma question.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Marchand.
M. Marchand: Je veux mettre de côté l'argumentation strictement juridique. Je ne suis malheureusement pas avocat, mais j'aimerais parler de la question de l'image. Monsieur Beaudry, vous disiez plus tôt qu'il était très important que la Commission de la Capitale nationale renvoie une image qui soit un exemple pour le Canada. On sait bien qu'Ottawa, si elle sert d'exemple au Canada, donne celui de la capitale d'un pays unilingue anglais, parce qu'à Ottawa, c'est unilingue anglais.
Mais il me semble que le président de la Commission de la Capitale nationale doit aussi donner l'exemple, n'est-ce pas? Si le président de la Commission de la Capitale nationale avait beaucoup de conflits d'intérêt, il me semble que cela remettrait en question l'efficacité et le bon fonctionnement de la Commission de la Capitale nationale.
M. Beaudry: Alors, vous vous inquiétez de mon image personnelle, monsieur Marchand, si je comprends bien.
M. Marchand: Monsieur Beaudry, corrigez-moi sur ce point qui me cause quelque difficulté. Quand quelqu'un couche avec une femme qui est propriétaire de 60 commerces, totalisant presque2 p. 100 des territoires et des immeubles de la région d'Ottawa, ou qui a des intérêts dans ces propriétés, je ne peux pas...
M. Beaudry: Je pense que vous exagérez un peu là.
M. Marchand: ...éviter de conclure qu'il y a beaucoup de conflits d'intérêts.
M. Beaudry: Je ne sais pas, monsieur Marchand, où vous avez pris vos chiffres. Je pense que vous exagérez quelque peu, parce que 2 p. 100 des territoires de la région de la Capitale nationale, c'est quand même assez volumineux.
M. Marchand: Non, de la Communauté urbaine de l'Outaouais.
M. Beaudry: Même 2 p. 100 de la Communauté urbaine de l'Outaouais, ce serait encore très volumineux.
M. Marchand: C'est volumineux, oui.
M. Beaudry: Et puis ce n'est pas 2 p. 100. et je ne suis pas propriétaire à 100 p. 100 de chacune de ces sociétés. Enfin, il n'y en a pas 60, comme je vous l'ai dit.
Quant à moi, je ne m'inquiète pas du tout de mon image parce que depuis quatre ans que je suis à la Commission de la Capitale nationale, je n'ai jamais été en conflit d'intérêts.
Je ne m'inquiète pas du tout de mon image. Je suis à la Commission de la capitale nationale depuis quatre ans et je n'ai jamais été en conflit d'intérêts. Le seul cas qui aurait possiblement pu être interprété comme étant un conflit d'intérêts était celui du pont Champlain. J'ai choisi de me retirer des délibérations et de la décision qui a été prise à ce sujet.
J'ai consulté le conseiller en éthique afin d'obtenir son opinion et j'ai fait exactement ce qu'il m'a recommandé de faire. Il affirmait lui aussi que je n'étais pas en conflit, bien que certaines personnes puissent possiblement y voir apparence de conflit. Il m'a donc recommandé de me retirer et c'est ce que j'ai fait. Un problème de conflit d'intérêts ne m'inquiète pas du tout. Je ne sais pas si cela vous inquiète beaucoup, mais personnellement, cela ne m'inquiète pas du tout.
M. Marchand: Oui, cela m'inquiète beaucoup effectivement. Vous savez, une personne comme vous qui a réalisé beaucoup de profits...
M. Beaudry: Vous ne le savez pas. J'ai fait beaucoup de transactions, mais vous ne savez pas si j'ai fait beaucoup de profits.
M. Marchand: Madame la présidente, je pense que c'est une question reliée à la crédibilité du président de la Commission de la Capitale nationale. Si effectivement la Commission de la Capitale nationale ne fait pas son travail de façon adéquate, que ce soit dans l'application de la Loi sur les langues officielles ou à un autre chapitre, je pense que c'est quand même très important.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Marchand, si M. Beaudry veut vous répondre, je vous laisse la parole, mais...
M. Beaudry: Il n'a pas à ce jour été démontré, à mon humble opinion, qu'on ne faisait pas notre travail. Si vous vous promenez dans la région de la Capitale nationale et que vous regardez toutes les activités que met sur pied la Commission de la capitale nationale, tous les programmes qu'elle met de l'avant - 75 sont actuellement en marche - , tout ce qu'elle fait au point de vue de la publicité dans les journaux et toutes les enseignes qu'elle affiche, vous constaterez que tout ce qu'elle fait est toujours bilingue. Nous offrons toujours nos services en anglais et en français dans tout ce qu'on touche.
On ne nous a jamais adressé quelque reproche, à l'exception de la plainte que je mentionnais plus tôt au sujet des enseignes des toilettes dans le Parc de la Gatineau. La population de la région doit donc penser qu'on fait bien les choses. Si vous vous inquiétez beaucoup de ce qu'on fait dans la région de la Capitale nationale, je m'inquiète beaucoup de l'interprétation que vous donnez à la réalité qui règne dans la région de la Capitale nationale.
M. Marchand: La réalité, monsieur Beaudry, c'est qu'à Ottawa, les francophones critiquent très sévèrement le gouvernement dans leur propre capitale du Canada et la qualifient de capitale anglophone. Il n'y a personne, il me semble, d'intelligence raisonnable qui puisse nier le fait qu'Ottawa est une ville anglaise.
M. Beaudry: Je ne suis peut-être pas doté d'une intelligence raisonnable, mais je vous dirai qu'Ottawa n'est pas une ville anglaise, mais une ville bilingue, tout comme Hull l'est aussi. Hull n'est pas une ville française. À mon avis, la région de la Capitale nationale, selon le niveau d'intelligence qui m'est donné, est une région absolument bilingue, où on peut s'exprimer et se faire servir à peu près partout dans les deux langues officielles. C'est pourquoi je suis très fier d'être Canadien et très fier de pouvoir travailler dans cette région.
M. Marchand: Ce n'est pas vrai, monsieur Beaudry. La FCFA du Canada a manifesté l'été dernier justement pour souligner le manque de respect de la langue française à Ottawa et le manque de services en français. Je vous invite à vous rendre sur la rue Sparks dont tous les édifices du côté nord appartiennent au ministère des Travaux publics. Vous gérez des édifices dans la capitale et dans un grand nombre d'eux, les services n'existent pas en français. Il me semble que c'est une question de bonne gérance. À la lumière de mes connaissances des transactions immobilières, j'ai beaucoup de difficulté à accepter le fait que vous ne vous retrouvez pas souvent dans des situations de conflit d'intérêts.
M. Beaudry: C'est parce que je m'arrange pour ne pas l'être, monsieur Marchand. Je pourrais l'être facilement, mais je m'arrange pour ne pas l'être.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Vos cinq minutes sont écoulées. J'inviterais M. Beaudry à vous répondre s'il le désire. On peut faire des discours, mais je pense que ce qui nous intéresse, ce sont des suggestions pour faire avancer la cause.
M. Marchand: C'est ce que je fais.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Beaudry, je vous laisse le dernier mot.
M. Beaudry: Monsieur Marchand, je ne dis pas qu'il n'y a pas de place pour des améliorations. Dans tous les cas, on peut toujours être meilleur. La Commission de la Capitale nationale n'est pas parfaite; elle commet des erreurs. On peut s'améliorer beaucoup. Je pense que la région de la Capitale nationale aurait intérêt à s'améliorer davantage du point de vue des langues officielles. On continue à travailler en ce sens, comme d'ailleurs tous les gouvernements des autres provinces qui auraient également avantage à promouvoir davantage les deux langues officielles.
Nous sommes encore au Canada et, en autant que je sache, je viens d'entendre le gouvernement du Québec, par la voix de Mme Beaudoin, nous faire une déclaration qui n'était pas très forte au niveau du bilinguisme canadien. Si je comprends bien, c'est ce qui sera soulevé au prochain congrès du Parti québécois.
Je comprends qu'on ne fait pas le procès du gouvernement du Québec, ni de Mme Beaudoin, ni du Parti Québécois, mais si on veut promouvoir les deux langues dans le pays dans lequel nous vivons, et en autant que je sache le Québec en fait partie, il ne faudrait pas toujours mettre en cause seulement une partie du problème. Il faudrait attribuer le blâme là où il doit être attribué.
Cela relève également de la province de Québec et des autres provinces, qui ne font pas suffisamment, dans bien des cas, la promotion des deux langues officielles. Je suis d'accord avec vous qu'on doit travailler en ce sens et qu'on devrait continuer à le faire pour que l'endroit soit encore plus bilingue et mieux reconnu.
[Traduction]
La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci. M. McTeague, vous avez cinq minutes.
[Français]
M. McTeague (Ontario): Je ne crois pas avoir besoin de cinq minutes, madame la présidente. Je suis un anglophone, mais que je ne suis pas d'Ottawa. Je suis de la belle région de Toronto. J'aurais quelques questions à poser, surtout à M. Nurse, concernant les problèmes de logistique qu'il a décrits dans son énoncé de tout à l'heure, concernant toute initiative qui forcerait les détaillants du secteur privé à afficher dans les deux langues. Quels sont ces problèmes de logistique selon vous?
[Traduction]
M. Nurse: C'est un peu comme ce dont nous parlions il y a quelques minutes, et notre approche n'est pas tellement différente de celle dont parlait M. Beaudry. Nous utilisons des baux négociés par un tiers pour les encourager à participer. Nous leur donnons toutes les chances possibles.
L'observation à laquelle je faisais allusion est que, par exemple, si l'on souhaitait s'assurer que toutes les affiches à l'intérieur d'une entreprise, d'un local loué, sont bilingues, il nous faudrait alors faire une inspection à tout moment de la journée ou de la soirée pour nous en assurer. Nous disions tout simplement que si nous devions faire respecter l'affichage bilingue, nous nous retrouverions alors dans une situation où il nous faudrait davantage de monde pour faire tout le travail. Enfin de compte, je ne pense pas que ce soit ce que nous recherchions.
D'un autre côté, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, comme beaucoup d'autres organismes fédéraux, a travaillé sans relâche avec d'autres organismes afin de promouvoir le bilinguisme et faire en sorte que les choses bougent.
Voilà donc l'approche que nous tentons d'adopter. Dans mes commentaires, je faisais allusion aux problèmes auxquels nous devrions faire face s'il nous fallait rentrer dans les locaux d'une entreprise pour faire une inspection.
[Français]
M. McTeague: Tout à l'heure, vous avez fait allusion aux quatre plaintes qui ont été portées dans la région de la Capitale nationale. Est-ce que, selon vous, il y a d'autres exemples en dehors de la région de Hull-Ottawa, dans des immeubles fédéraux de régions bilingues comme Sudbury ou du Nouveau-Brunswick dont vous êtes au courant? Êtes-vous au courant de plaintes similaires?
[Traduction]
M. Nurse: Lorsque j'ai appris que j'allais comparaître devant votre comité, j'ai demandé à mes employés s'ils avaient reçu des plaintes, soit par l'intermédiaire du Commissaire aux langues officielles ou directement chez nous, car nous devrions alors nous en préoccuper. Honnêtement, je dois dire que nous n'avons reçu aucune plainte dans ces domaines. Nous n'avons reçu officiellement aucune plainte d'après nos dossiers.
J'ai demandé qu'on le vérifie à quelques reprises. Je voulais m'en assurer. Chaque fois on m'a répondu que nous n'avions reçu aucune plainte. Si nous en avions reçues, nous aurions certainement fait un suivi. Honnêtement, je dois dire que c'est l'information que j'ai obtenue.
M. McTeague: Très bien.
Ma dernière question concerne les incitations. Envisageriez-vous la possibilité d'accorder une incitation financière à une entreprise du secteur privé qui occupe des immeubles fédéraux? Avez-vous songé à une telle possibilité?
M. Nurse: Nous efforçons d'examiner toutes les possibilités. C'est pourquoi nous attendons avec impatience les recommandations de votre comité. La question des incitations financières est l'une des possibilités que nous tentons d'examiner. Il s'agit de savoir combien, où, et quelle serait la démarche à adopter. C'est pourquoi nous sommes impatients de connaître les recommandations que fera votre comité. Par ailleurs, nous devons consulter certains autres ministères avec lesquels nous travaillons et le Conseil du Trésor quant aux avantages d'une telle possibilité.
Franchement, à l'heure actuelle, nous efforçons de faire progresser le bilinguisme et lorsqu'il s'offre une occasion que nous jugeons raisonnable, nous agissons. Actuellement, nous examinons un certain nombre d'options et je pense que ce que fait votre comité nous aidera considérablement.
M. McTeague: Vous m'avez beaucoup aidé. Merci.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci. Monsieur Allmand.
M. Allmand: Après avoir suivi le débat de cet après-midi, je suis convaincu que nous devrions obtenir le plus tôt possible un avis juridique ou consulter les conseillers juridiques du ministère de la Justice pour savoir si le gouvernement fédéral pourrait insister auprès des locataires qui occupent les immeubles fédéraux pour qu'ils respectent les dispositions de la Loi sur les langues officielles.
Je dis cela car, de façon générale, il est possible d'inclure dans un bail certaines conditions et, si le locataire accepte ces conditions... Par exemple, il est souvent précisé dans un bail qu'on ne peut avoir d'animaux dans son appartement. À un moment donné, lorsque je louais un bureau à Montréal, il était précisé dans mon bail que je ne pouvais pas apposer d'affiches à l'extérieur.
En d'autres termes, ce n'est pas inhabituel. Selon les règles générales de droit - mon collègue, un ancien doyen de droit me reprendre si je me trompe - on peut inclure des conditions dans un bail, sauf si elles vont à l'encontre de l'ordre public et des bonnes moeurs.
Je voudrais ajouter que dans le cadre du programme d'équité en matière d'emploi qui existe depuis plusieurs années au gouvernement, nous avons un programme de respect de l'obligation contractuelle lorsque des services sont fournis par un sous-traitant. En d'autres termes, si nous voulons acheter des crayons ou des services de nettoyage de sous-traitants, nous insistons pour qu'ils respectent les principes de l'équité en matière d'emploi, qu'ils embauchent suffisamment de représentants de groupes cibles comme les minorités visibles, les femmes, les Autochtones et les handicapés. C'est ce qu'on appelle le respect de l'obligation contractuelle.
Il pourrait y avoir un autre type d'obligation contractuelle: si une personne veut louer à bail un immeuble du gouvernement fédéral, elle doit respecter les règles de la Loi sur les langues officielles.
Je recommande donc vivement au comité qu'avant d'aller beaucoup plus loin, il invite les hauts fonctionnaires du ministère de la Justice pour nous conseiller et nous dire si nous pouvons aller au-delà des clauses incitatives.
Je félicite la CCN d'être allée si loin; peut-être pourrions-nous aller encore plus loin, mais peut-être pas. Il faudrait nous en assurer, car comme je l'ai dit, il est courant d'inclure des conditions dans un bail pourvu qu'elles n'aillent pas à l'encontre de l'ordre public et des bonnes moeurs.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Je pense que c'est une intervention utile, car j'étais moi-même plutôt intriguée par l'observation suivante que vous faites à la page 2: «celle-ci pourrait être perçue par certains marchants comme de la sur-réglementation gouvernementale». À mon avis, cela ne constituerait pas une intrusion dans la propriété privée puisque ces immeubles sont payés à la fois par des contribuables anglophones et francophones.
Par exemple, lorsque vous parlez de faire observer la loi et lorsque vous dites que faire appliquer la loi pourrait poser certains problèmes de logistique... Ne serait-il pas possible, avant de renouveler le bail, de s'assurer que le locataire respecte la loi? Est-ce que vous avez fait des études approfondies de cette question?
M. Nurse: Il y a certaines conditions qu'il faut respecter dans un bail, mais elles ne concernent pas nécessairement l'affichage. Lorsque des conditions doivent être respectées, nous nous assurons qu'elles le sont, et si elles ne le sont pas au point où nous ne sommes pas satisfaits, alors le renouvellement du bail peut être remis en question.
Tout ce que nous disons, c'est que dans nos baux à l'heure actuelle, nous encourageons les locataires à offrir leurs services dans les deux langues officielles dans la mesure du possible, mais nous sommes silencieux quant à la question de l'affichage. C'est ainsi que nos baux sont rédigés à l'heure actuelle.
Donc, comme vous l'avez dit, nous faisons respecter les conditions contenues dans notre bail, mais puisqu'il ne mentionne pas l'affichage, nous ne prenons aucune mesure à cet égard.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Beaudry.
[Français]
M. Beaudry: Madame la présidente, je ne voudrais pas que mes propos soient mal interprétés. Je trouve la suggestion du député Allmand certainement très judicieuse.
Comme je l'ai dit, nous avons une clause demandant d'afficher et d'opérer dans les deux langues. Théoriquement, lorsqu'il y a un contrat entre deux parties - à moins que ce soit contre l'ordre public - , on peut imposer ce contrat et le mettre en application. J'ai aussi dit que lorsqu'on ne met pas une clause en application durant une certaine période de temps, cela peut être interprété et, selon l'opinion que nous avons eue, ce serait interprété par un tribunal comme une renonciation tacite à l'obligation créée au départ.
En conséquence, l'annulation du bail dans ce contexte ne serait probablement pas accordée par les tribunaux. Même si aujourd'hui on voulait l'appliquer, on pourrait accuser possiblement de discrimination ceux qui appliqueraient la clause alors que les tiers ont un droit acquis, vu qu'on ne l'avait pas appliquée antérieurement.
Nous pensons donc que cela ferait plus de tort que de bien. C'est la raison pour laquelle nous considérons que l'interprétation qu'on doit donner à cette clause est une interprétation incitative plutôt que coercitive. J'aimerais que ce soit clair.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Marchand, vous avez une brève question.
M. Marchand: Entre juristes et avocats, je suis dans un état de confusion totale. Quand je lis le bail des Travaux Publics, dont j'ai ici le formulaire, et que la Commission de la Capitale nationale doit utiliser, je ne vois pas de caractère incitatif, mais bien un caractère coercitif au texte français. Quand on dit au point 12 de l'article 4...
[Traduction]
M. Allmand: Les routes de la Commission de la capitale nationale relèvent des Travaux publics, monsieur Marchand. S'agit-il d'un bail des Travaux publics?
M. Marchand: On dit:
- Le locataire doit:
- ...
- e) conserver sur les lieux cédés à bail un personnel qualifié qui puisse offrir le meilleur service
possible à la population et ce, dans les deux langues officielles du Canada
- À mon avis, le mot «doit» est coercitif.
- f) les inscriptions sur tous les panneaux d'affichage doivent être rédigés dans les deux langues
officielles du Canada.
- Pour moi, c'est très clair. En d'autres termes, s'il n'y a pas suffisamment de services en français
et pas suffisamment d'affiches en français du côté nord de la rue Sparks, c'est parce qu'il y a
quelqu'un aux Travaux publics et quelqu'un à la Commission de la capitale nationale qui ne sait
pas comment lire les baux ou qui ne sait pas comment les appliquer. C'est très clair.
M. Marchand: En voulez-vous un exemplaire?
M. Nurse: ...à moins qu'il ne s'agisse d'affiches dans les immeubles fédéraux dans le but de diriger les gens vers ces services et ces sociétés. Je n'en sais pas plus. Il faudra que je me renseigne. Je crois que la seule obligation qui est faite à notre ministère est de s'assurer que les panneaux indicateurs voulus sont bilingues dans les immeubles fédéraux. Je ne pense pas que le tiers qui loue nos locaux ait cette obligation.
J'espère ne pas vous induire en erreur, mais c'est la façon dont je comprends les choses.
M. Marchand: Écoutez, le gouvernement fédéral est propriétaire de tous les immeubles situés sur le côté nord de la rue Sparks ainsi que de nombreux autres immeubles à Ottawa, avenue Sussex, par exemple. D'après ce bail, un commerce comme Four Corners Canada serait tenu d'offrir des services dans les deux langues officielles puisqu'il est dit «doit» prévoir des affiches dans les deux langues officielles. Voilà ce qui figure dans le bail. Le gouvernement fédéral devrait donc encourager ses locataires à offrir des services dans les deux langues ou au moins veiller à ce que la loi soit respectée, en particulier à Ottawa, la capitale.
M. Nurse: Nous encourageons certainement les commerces à offrir des services bilingues. J'essaie de voir si je comprends bien la version française du bail. Selon vous, une obligation est faite à ces commerces de prévoir des affiches bilingues, mais il faudra que je m'en assure. Je crois que ce qui est dit dans le bail a trait à l'obligation qui nous est faite de voir à ce que l'affichage soit bilingue dans les immeubles fédéraux. Je ne pense pas que la même obligation soit faite aux tiers.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Je vous remercie, monsieur Nurse. De toute évidence, il faudra étudier plus à fond la question.
[Français]
Monsieur Beaudoin.
Le sénateur Beaudoin: Ma première réaction est plutôt de dire oui à la suggestion deM. Allmand. Si un texte législatif prête à confusion, pourquoi ne pas obtenir une opinion juridique d'une autorité reconnue? Mais comme nous ne sommes pas obligés de faire rapport cet après-midi - je ne pense pas qu'on va faire rapport aujourd'hui - , j'aimerais y penser une semaine ou deux et revenir sur le problème. Il se pose certainement une question juridique, à savoir si oui ou non la clause est impérative au lieu d'être incitative.
En deuxième lieu, est-il avantageux pour les institutions fédérales d'obtenir cette opinion immédiatement ou après le rapport? Oui, en principe. Maintenant, à la lumière des témoignages à venir, on pourra toujours se décider à la fin.
La coprésidente (Mme Guarnieri): Je pense que nous allons terminer sur cette note de sagesse. Notre temps est écoulé. Je vous remercie tous.
[Traduction]
C'était très utile.
Monsieur Allmand.
M. Allmand: J'ai demandé à M. Beaudry de remettre au greffier un exemplaire du bail de la commission et, compte tenu de ce que M. Marchand vient de dire, j'aimerais maintenant que Travaux Publics fasse de même. Le greffier peut-il ensuite veiller à distribuer ces documents aux membres du comité pour que nous puissions en prendre connaissance? Je veux jeter un coup d'oeil à ces dispositions.
La coprésidente (Mme Guarnieri): J'aimerais remercier nos invités d'avoir contribué à nos travaux. Leur témoignage a suscité beaucoup d'intérêt parmi les membres du comité. Je les remercie aussi de leur patience.
[Français]
M. Beaudry: Ce fut un plaisir, madame la présidente. Merci.
La coprésidente (Mme Guarnieri): La séance est levée.