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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 11 décembre 1996

.1625

[Français]

Le président suppléant (M. Godfrey): Je souhaite la bienvenue à notre très distingué invité, Mohammed Fayek, secrétaire général de l'Organisation arabe des droits de l'homme. Bienvenue.

Je regrette que soyons un peu en retard. Si j'ai bien compris, nous avons une bonne demi-heure à partager avec vous. Avez-vous quelque chose à nous dire pour orienter les membres du comité quant à vos préoccupations, in whatever language you like sauf en arabe?

[Traduction]

M. Mohammed Fayek (secrétaire général, Organisation arabe des droits de l'homme): Merci beaucoup de m'accueillir parmi vous. Je ne sais pas si vous connaissez bien notre organisme, et j'aimerais vous en parler brièvement. C'est un organisme qui est présent dans tous les pays arabes et dont le siège social est situé au Caire.

Notre organisme non gouvernemental, qui a un statut consultatif auprès des Nations Unies, se consacre à la promotion et à la défense des droits de l'homme. C'est grâce à la collaboration entre notre organisme, l'Union des avocats arabes, et le Centre pour les droits de l'homme situé à Genève qu'a pu être établie l'Organisation arabe des droits de l'homme qui est basée en Tunisie. Cette organisation a reçu le premier prix de l'UNESCO en 1992.

Elle a mis sur pied des programmes de formation pour ceux qui veulent défendre activement la cause qu'elle représente. Elle a également organisé des conférences à l'intention des juges du monde arabe, des doyens de facultés de droit, etc. Par conséquent, c'est un organisme qui joue un rôle très important dans le monde arabe sur le plan de l'information.

Bien entendu, dans notre région du monde, il existe de trop nombreux problèmes. Ce sont des problèmes spécifiques, mais certains sont communs à tous les pays du tiers monde. Par exemple, nous avons des problèmes au niveau des concepts. Dans notre région du monde, il existe une mouvance contestable pour qui les droits de la personne et la religion sont contradictoires. Bien entendu, cela n'est pas vrai.

Nous n'acceptons pas cette façon de voir les choses, et nous avons certains programmes qui servent à démontrer qu'il n'en est pas ainsi. C'est un des domaines dont nous nous occupons actuellement, car nous estimons que nous devons nous battre sur différents fronts. Les organismes de défense des droits de la personne ne sont pas encore bien vus des gouvernements, et nous nous battons donc sur ce front là. L'autre, ce sont les concepts différents que nous défendons.

En outre, en ce qui a trait à la démocratie, elle est souvent bafouée dans notre région du monde, mais nous continuons à croire que faire respecter les droits de la personne, c'est le meilleur moyen d'ouvrir la voie à la démocratie. Treize pays arabes ont déjà signé des accords - les principaux actes reconnaissant les droits de la personne - et nous allons pouvoir utiliser cela comme point de départ pour faire avancer la démocratisation.

En bref, voilà donc quels sont nos buts et ce dont s'occupe notre organisme. Si vous voulez d'autres renseignements, je suis prêt à...

.1630

Le président suppléant (M. Godfrey): Merci beaucoup. En ce cas, ce que nous allons faire, c'est suivre la méthode socratique et essayer de mieux connaître votre organisme en vous posant des questions et par le biais de la discussion.

[Français]

Madame Debien, avez-vous des questions à poser sur l'organisation?

Mme Debien (Laval-Est): Bonjour, monsieur Fayek, et bienvenue à notre sous-comité.

Vous savez que nos débats s'insèrent principalement dans le cadre de l'exploitation du travail des enfants. Votre organisme se porte à la défense des droits de la personne. Serait-il possible que vous nous traciez un vrai portrait de la situation de l'exploitation du travail des enfants dans les pays que vous représentez? Étant donné que notre sous-comité a le mandat d'en discuter, j'aimerais avoir votre avis là-dessus.

[Traduction]

M. Fayek: Nous accordons effectivement beaucoup d'importance à cette question; malheureusement, je n'ai pas apporté de statistiques, car je ne m'attendais pas à ce que nous parlions de cela. Si je l'avais su avant de partir, j'aurai pu prendre mes dispositions.

Il existe un problème particulièrement grave dans notre pays, c'est le cas de ceux que l'on appelle les enfants des rues, les enfants laissés à la rue. Ils vivent dans les rues, c'est là qu'ils couchent, et cet état de chose est dû à la pauvreté.

Le travail des enfants ne pose pas un gros problème dans notre pays, pas comme en Inde, par exemple, mais il est étroitement lié à la pauvreté. Il se pose surtout dans les régions rurales et dans des familles où l'on veut que les enfants acquièrent certaines compétences professionnelles, et deviennent mécaniciens, par exemple, ou autre. Les enfants sont confiés à des personnes qui sont censées les former de façon à ce qu'ils deviennent mécaniciens, peintres ou quelque chose comme cela. Les enfants ne sont pas bien traités du tout, mais ils considèrent que c'est comme une école qui leur permet d'acquérir certaines compétences.

[Français]

Mme Debien: Quand on parle du travail des enfants, on accepte et on comprend très bien que le travail de certains enfants puisse parfois être de l'apprentissage. Ce n'est pas à ce niveau-là que nous nous situons. Nous nous préoccupons plutôt de l'exploitation du travail des enfants dans des conditions misérables, où ils ont à porter des poids, à souffrir de la chaleur et sont empêchés d'aller à l'école. C'est de cette partie du travail des enfants que nous parlons. Nous parlons, par exemple, du travail sexuel, des enfants qui sont obligés de faire de la prostitution. C'est de cette partie de l'exploitation du travail des enfants qu'on parle et non pas d'une forme d'apprentissage au travail qu'on trouve dans certains pays.

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[Traduction]

M. Fayek: Cela touche en partie ceux qui travaillent comme domestiques, les jeunes enfants engagés comme serviteurs. Peut-être est-ce là le problème le plus grave. La question des abus sexuels ne se pose pas dans notre pays et l'on n'impose pas de lourds travaux aux enfants. Le phénomène le plus important est sans doute celui des enfants qui travaillent à titre de domestiques. On les enlève à leur famille et ils travaillent comme...

D'ailleurs, cela ne fait même pas partie des problèmes très graves. Je parle principalement de l'Egypte. Bien sûr, dans les pays du Golfe, la population indigène n'a pas à se préoccuper de ce problème. Il se pose uniquement dans les pays pauvres, comme l'Égypte. Au Soudan, il existe aussi des difficultés sur ce plan. Ce n'est pas un problème grave, comme en Inde ou dans d'autres pays.

[Français]

Mme Debien: Vous venez de parler du Soudan. On sait que le Soudan est en guerre civile depuis longtemps. Dans certains pays d'Afrique, au Liberia par exemple, on se sert des enfants comme soldats. C'est aussi une forme d'exploitation du travail des enfants. Je pense que le Soudan est un excellent exemple.

[Traduction]

M. Fayek: Au Soudan, le problème se pose, car on prend de jeunes enfants pour leur donner une certaine formation, une formation islamique, et les préparer à des missions spéciales, notamment dans le sud. Ce problème existe au Soudan. À part cela, je ne pense pas que le phénomène soit très répandu.

Nous avons fait des études sur la situation des enfants. Quand je rentrerai, je vous en enverrai copie.

[Français]

Mme Debien: Merci.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Godfrey): Monsieur Martin.

M. Martin (Esquimalt - Juan de Fuca): Merci, monsieur le président.

Merci encore, monsieur Fayek, d'être venu nous rendre visite aujourd'hui.

Avant que vous n'entriez dans la pièce, nous discutions et nous nous demandions où, en tant que pays, nous devrions investir pour obtenir les meilleurs résultats. Étant donné que nous sommes dans la même situation que la plupart des pays, et que les fonds que nous réservons à l'aide officielle au développement deviennent de plus en plus rares, nous devons faire de la realpolitik et déterminer où il est préférable que nous investissions notre argent. Nous nous occupons de la question du travail des enfants; selon votre expérience et à votre avis, que pouvons-nous financer pour obtenir les meilleurs résultats, qu'est-ce qui assurera le meilleur rendement à notre investissement? Est-ce le micro-crédit qui sert à accorder des prêts modestes aux plus démunis, ou devons- nous plutôt envisager des programmes de plus grande envergure? Devons-nous cibler l'éducation? Les soins de santé?

M. Fayek: L'éducation est peut-être l'un des facteurs les plus importants. En outre, nous voulons appuyer la création d'une société civile, parce que dans la plupart des pays arabes, qui depuis longtemps connaissent le système du parti unique et qui essaient maintenant de... la société civile est une notion à laquelle on n'est pas habitué. Les autorités considèrent que ce qui est non gouvernemental... est contre le gouvernement. Pour survivre, la société civile a besoin d'un réel appui. De plus, la formation... à condition que cette formation soit ciblée sur des domaines qui font progresser la société civile et l'éducation.

M. Martin: Avez-vous trouvé que les micro-prêts étaient une forme utile de l'aide officielle au développement?

M. Fayek: Bien sûr, le développement est très important, car plus vous développez...

M. Martin: Je parle plus précisément du microcrédit, des microprêts comme ceux qu'accorde la Grameen Bank. Est-ce qu'à votre avis, ce serait une façon très utile et très efficace de dépenser notre argent?

M. Fayek: Voulez-vous dire en termes d'investissement?

M. Martin: Comme la Grameen Bank, qui accorde de petits prêts remboursables aux particuliers.

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M. Fayek: Oui, bien sûr. Cela va de pair avec la privatisation et de fait, c'est un moyen de faciliter la création de petites entreprises privées indépendantes.

M. Martin: Ai-je le temps de poser une autre question?

Le président suppléant (M. Godfrey): Bien sûr.

M. Martin: Merci.

Ce qui se passe à l'heure actuelle en Cisjordanie et dans la bande de Gaza est très préoccupant pour beaucoup d'entre nous, ici, au Canada.

M. Fayek: Oui, Je pense que le processus de paix est maintenant très menacé, car les Palestiniens qui ont accepté l'accord d'Oslo sur la bande de Gaza sont très déçus que la situation se détériore. Aucun progrès n'a été réalisé dans cette région. On a passé tout ce temps à vendre l'idée de la paix à ces gens-là, et ils en arrivent maintenant à la conclusion que cela ne les aide en rien et que la paix commence à faire problème.

Alors je suis inquiet... et cela ne se limite pas à la bande de Gaza. La situation a un retentissement dans d'autres pays arabes, même en Egypte. C'est l'Egypte qui a lancé ce processus de paix à Camp David. Tout ce qui a été fait depuis est maintenant vraiment menacé parce que la population, à cause de la nouvelle politique qui a cours, rejette maintenant ce processus. C'est en partie parce que dans la bande de Gaza, les gens souffrent de la fermeture des frontières et que le chômage a sur eux de terribles répercussions. Économiquement parlant, ils sont en difficulté. Même Yasser Arafat, Je crois, ne sera pas capable de contrôler les futures conséquences d'une situation qui dure déjà depuis longtemps. Je pense que la région peut exploser d'un moment à l'autre.

M. Martin: Que pouvons-nous faire? Que peut faire le Canada?

M. Fayek: Je pense si l'opinion internationale se mobilise, s'il y a des pressions... c'est de cette façon que vous pouvez faire quelque chose. Ainsi, des pressions s'exerceront sur les gouvernements, y compris celui des États-unis. À mon avis, les États-Unis ont une responsabilité spéciale à assumer en ce qui a trait à ce processus de paix.

Ils ne font rien à l'heure actuelle pour aplanir les difficultés. Ils font preuve de partialité. Même les récentes nominations annoncées par la nouvelle administration ne promettent pas un véritable changement.

De mon point de vue, ce que font les pays européens est très utile, notamment ce que fait la France. C'est un très bon exemple à suivre.

M. Martin: Merci beaucoup.

Le président suppléant (M. Godfrey): J'aimerais en savoir un peu plus sur votre organisation. Tout d'abord, comme vous l'avez dit dans votre déclaration préliminaire, ce n'est pas le genre d'organisme qui est toujours vu d'un bon oeil dans tous les pays arabes, si je vous ai bien compris; alors, comment assurez-vous le financement de votre organisme et quelle est son envergure? Deuxièmement, quelles sont vos priorités? Quel est le sujet qui est en tête de la liste de vos préoccupations et quel est celui qui arrive en second?

M. Fayek: Premièrement, en ce qui concerne notre financement, nous dépendons totalement des abonnements de nos membres. Nous dépendons des abonnements des pays où nous comptons des membres et des dons que nous versent les particuliers. Naturellement, comme le stipule notre constitution, nous n'acceptons aucun fonds des gouvernements arabes, étant donné que c'est précisément dans ces pays que nous intervenons. Théoriquement, nous pouvons recevoir de l'aide d'organismes qui ont le même... mais jusqu'ici, nous avons décidé de n'accepter aucune aide extérieure; autrement, nous pourrions être accusés de nous faire l'écho de concepts étrangers venus de l'extérieur. Nous avons décidé que les fonds seraient totalement arabes. Par conséquent, jusqu'ici, depuis que notre organisme a été créé, nous ne...

Le président suppléant (M. Godfrey): Depuis quand votre organisme existe-t-il?

M. Fayek: Depuis 1983. Nous n'acceptons aucun don de l'extérieur, ni d'aucun organisme - juste ceux des particuliers - sauf les dons du Centre pour les droits de l'homme des Nations Unies et ceux de l'UNESCO. Parfois, nous mettons sur pied des conférences ou des programmes conjointement avec ces organismes, mais pour ce qui est de recevoir une aide ou quoi que ce soit dans ce domaine... Bref, voilà ce qui en est à ce sujet. En ce qui concerne votre question sur nos priorités, étant donné que nous sommes représentés dans tout le monde arabe et que nous nous consacrons à la promotion et à la défense dans tous... notre mandat reprend les objectifs définis par les Nations Unies dans leur ensemble. Par conséquent, nos juristes essaient d'élucider le concept qui, pour nous, pose un véritable problème, qui représente un problème sérieux.

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Nous essayons de fixer des priorités différentes dans chaque pays. Par exemple, dans les pays du Golfe, nous nous concentrons sur les réformes constitutionnelles et sur les conventions relatives aux droits de la personne.

J'ai été invité à donner une conférence sur les droits de l'homme au Qatar, par exemple, ce qui n'a rien d'habituel. Le 24 décembre, je vais faire la même chose dans les Émirats arabes unis. Nous leur demandons de signer l'accord, c'est une priorité dans les pays du Golfe.

Dans des pays comme l'Égypte, par exemple, nous cherchons avant tout à faire dissoudre les tribunaux militaires et à mettre fin à la torture. Nous demandons depuis longtemps que l'on applique la loi d'urgence, etc.

En Arabie saoudite, c'est différent. Le concept des droits de la personne n'est pas reconnu du tout. Lorsque les femmes demandent que l'on respecte leurs droits, elles commencent par réclamer celui de pouvoir conduire une voiture. Notre organisme représente un mouvement d'envergure, et nos activités varient donc d'un pays à l'autre.

À l'heure actuelle, nous essayons de définir la conception... et c'est pour nous la priorité des priorités, parce que nous cherchons à prouver que l'Islam n'est pas contre les droits de la personne. Au contraire, c'est comme si c'était un cercle plus grand et plus large dans lequel peut s'inscrire un autre cercle plus petit. C'est ce que tous les pays ont convenu; c'est l'objectif défini par les Nations Unies.

Le président suppléant (M. Godfrey): Je ne comprends pas vraiment. Vous avez utilisé le mot «conception».

M. Fayek: Concept.

Le président suppléant (M. Godfrey): Concept; toute l'idée des droits de la personne.

M. Fayek: Oui, c'est toute l'idée des droits de la personne.

Le président suppléant (M. Godfrey): Je voudrais vous poser une question générale, qui ne sera peut-être pas formulée comme il se doit; bref, pouvez-vous nous dire si votre tâche est encore plus difficile dans les pays où la shari'a est appliquée strictement? Avez-vous plus de mal à faire valoir ces idées?

M. Fayek: Bien sûr, c'est plus difficile. Laissez-moi vous dire une chose. Les pays qui prétendent être des pays islamiques se trompent en fait complètement. Ce sont les pays où les droits de la personne sont le plus violés, mais l'Islam, ce n'est pas cela.

Les deux piliers de l'Islam sont la justice et l'égalité. Dans ces pays, on commence par couper la main du voleur, etc. pour préserver l'Islam en tant que tel. Nous refusons de dire que l'Islam, c'est cela. Nous avons une autre conception de l'Islam.

Dans la plupart des pays où l'on applique la shari'a, il y a un système à parti unique ou du moins, on n'accepte pas le système pluraliste. Aucun dialogue n'est possible. Bien entendu, cela entraîne des problèmes, mais nous croyons que ce n'est pas la bonne façon de pratiquer l'Islam. C'est la raison pour laquelle nous nous trouvons confrontés à un problème très sérieux.

Le président suppléant (M. Godfrey): Concrètement parlant, est-ce que vous évaluez les pays? Essayez-vous de leur donner une cote?

M. Fayek: Non, nous ne leur donnons pas vraiment de cote, mais nous publions des rapports annuels sur la situation des droits de la personne. Ces rapports couvrent toutes sortes de domaines que nous jugeons préoccupants, depuis la législation jusqu'aux violations des droits de l'homme. Nous consignons tout cela dans les rapports, et même si nous ne rangeons par les pays par catégories, en lisant ces documents, vous pourriez très facilement le faire vous-même.

Le président suppléant(M. Godfrey): Est-ce que vous notez les progrès accomplis sur une base annuelle?

M. Fayek: Oui, naturellement. Habituellement, on constate très peu de progrès, mais nous le notons pour ne pas être accusés d'être contre.

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Un des problèmes que nous pose toute la question du concept, c'est la façon dont les gouvernements envisagent nos activités. Ils ont toujours tendance à nous ranger dans l'opposition, même si nous essayons toujours d'expliquer qu'il n'en est pas ainsi. Nous sommes contre la violation des droits de la personne et pour leur respect. Nous ne sommes à la solde d'aucun gouvernement, et nous ne nous opposons à aucun d'entre eux, même pas à celui du Soudan qui applique la shari'a.

Je me suis moi-même rendu dans ce pays où j'ai rencontré Al-Bashir avec qui j'ai longuement parlé. Nous avons essayé toutes sortes de choses mais au bout du compte, c'est ce concept qui a posé beaucoup de problèmes. Dans ce pays, on n'accepte pas l'idée qu'il existe des droits. C'est ce qui fait problème. Même dans les pays qui ont signé l'accord, quand on en vient à la question des droits de la personne et que nous demandons de visiter une prison, par exemple, on ne nous y autorise jamais. Alors, nous envoyons des avocats pour défendre les accusés, c'est notre façon d'aider ceux qui sont en prison.

Nous avons beaucoup de difficultés.

Nous avons connu des problèmes au Soudan à cause de l'application de la shari'a. Par exemple, je crois - et je ne suis pas le seul, même les musulmans convaincus le croient aussi - que la shari'a ne stipule pas la forme que doit prendre le gouvernement. Quand on invoque la shari'a, c'est tout simplement que le Coran rejette les régimes dictatoriaux. C'est tout. Il faut qu'il y ait consultation. Si l'on va plus loin, c'est encore mieux.

Le président suppléant (M. Godfrey): Deux autres questions. Tout d'abord, travaillez-vous avec des organismes de l'extérieur, des organisations non gouvernementales?

M. Fayek: Bien sûr.

Le président suppléant (M. Godfrey): Je pense à Amnistie internationale.

M. Fayek: Oui, nous entretenons des relations étroites avec Amnistie internationale.

Le président suppléant (M. Godfrey): Y a-t-il d'autres organismes avec lesquels vous collaborez?

M. Fayek: J'ai des contacts personnels avec Pierre Sané. Nous nous rencontrons de temps en temps et dans certains cas, nous prenons des dispositions communes.

Nous travaillons en collaboration avec Human Rights Watch. Nous avons des relations très étroites avec tous ces organismes.

Le président suppléant (M. Godfrey): J'ai une deuxième question qui s'adresse en fait à notre propre gouvernement. Y a-t- il des initiatives multilatérales ou bilatérales que nous pouvons prendre pour intervenir auprès de ces divers pays? Comment pouvons- nous collaborer avec vous de façon à ce que l'on ne puisse pas vous accuser d'avoir été corrompus par notre système de valeurs occidental?

M. Fayek: Nous sommes évidemment tout à fait prêts à collaborer avec les Canadiens - vous, en particulier, étant donné que l'on ne va pas vous accuser de partialité en matière de droits de la personne, ni d'utiliser cette cause pour des raisons politiques. Personne ne vous a jamais accusés de cela. Certains pays nous apportent une aide précieuse pour faire valoir les droits de la personne, mais en même temps, ils nous causent beaucoup d'ennuis car on les accuse d'avoir deux poids deux mesures ou d'être sélectifs; c'est notamment le cas des États-Unis. Leur attitude vis-à-vis les Palestiniens... J'ai expliqué à Son Excellence qu'Israël est le premier et le seul pays du monde où la torture est permise, et nous n'entendons pas beaucoup de pays condamner de tels actes. C'est très important.

Les Canadiens peuvent faire beaucoup. Il faut que vous soyez plus présents dans notre région du monde. Vos activités ne sont soumises à aucune restriction, à aucune réserve, notamment vos activités humanitaires. Vous êtes qualifiés en ce domaine - non seulement vous êtes qualifiés, mais on a besoin de vous et l'on s'attend à ce que vous interveniez.

Le président suppléant (M. Godfrey): Nous avons notre propre Centre international des droits de la personne qui est situé à Montréal. Avez-vous quelques...

M. Fayek: Je dois rencontrer les responsables demain à 10 heures.

Le président suppléant (M. Godfrey): Excellent.

Ce comité jouit d'un privilège, celui d'apprendre, et au cours des instants très utiles que nous avons pu passer avec vous, nous avons énormément appris. Je suis persuadé que je m'exprime au nom de tous mes collègues en vous remerciant d'être venu et de lutter ainsi pour faire respecter les droits de la personne, ce qui est un combat universel. Nous vous admirons et nous sommes de votre côté. Si nous pouvons vous être utiles de quelque façon que ce soit, n'hésitez surtout pas à communiquer avec nous. Merci d'avoir accepté d'être des nôtres.

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M. Fayek: Merci beaucoup.

Pour conclure, j'aimerais dire qu'à mon avis, l'Organisation canado-arabe des droits de la personne, qui est basée à Montréal, fait un excellent travail et pourrait être utile pour maintenir un lien entre nous. Merci beaucoup.

Le président suppléant (M. Godfrey): Merci.

La séance est levée.

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