[Enregistrement électronique]
Le mercredi 5 février 1997
[Traduction]
Le coprésident (M. Milliken): La séance est ouverte. Nous sommes prêts à commencer.
Notre témoin cet après-midi est M. Howard Wilson, le conseiller en éthique.
Je suis enchanté de vous souhaiter la bienvenue. Je suis impatient d'entendre vos commentaires. Je crois, monsieur, que vous avez une déclaration préliminaire. Merci d'être venu. Nous serons ravis de vous écouter.
M. Howard Wilson (conseiller en éthique): Merci, monsieur le président. Je serai très bref. Je vous remercie de m'avoir invité encore une fois à me présenter devant votre comité mixte spécial.
J'ai eu l'occasion d'examiner l'ébauche de rapport sur un code de déontologie parlementaire présenté par la Direction générale de la recherche de la Bibliothèque du Parlement le 5 décembre 1996. Toutefois, avant de commenter certaines des mesures proposées, je voudrais rappeler la position que j'ai prise sur plusieurs questions quand je me suis présenté devant votre comité en septembre 1995.
Je voudrais d'abord réaffirmer que le code de déontologie proposé devrait s'appliquer à tous les membres du Sénat et de la Chambre des communes en ce qui concerne l'exercice de leurs fonctions en tant que sénateurs ou députés. Cependant, des règles supplémentaires déterminées par le premier ministre s'appliqueraient aux parlementaires qui deviennent membres du Cabinet ou secrétaires parlementaires.
[Français]
En 1995, j'ai fait valoir que le code parlementaire devait contenir une série de principes comme ceux que l'on trouve dans le Code fédéral régissant les conflits d'intérêts: la divulgation, dans une certaine mesure, des biens, des dettes et des activités extérieures du parlementaire, du conjoint et des enfants à charge; l'obligation de déclarer un intérêt personnel particulier lorsqu'il y a un conflit d'intérêts dans le cadre d'une question controversée (la personne devrait se retirer du débat et ne pas voter); des lignes directrices concernant les cadeaux et les déplacements parrainés; enfin, une mise à jour des règles sur les contrats avec le gouvernement fédéral.
[Traduction]
Je me suis particulièrement opposé à ce que le code parlementaire contienne des dispositions plus rigoureuses que celles qui s'appliquent aux ministres, par exemple, ne pas pouvoir transiger des valeurs cotées en bourse, ne pas pouvoir gérer une entreprise ni agir à titre d'administrateur ou pouvoir pratiquer une profession. J'ai remarqué que la loi de l'Ontario et le rapport de Lord Nolan au Royaume-Uni mettent l'accent sur le fait que les parlementaires doivent participer pleinement aux activités communautaires et avoir une vaste gamme d'intérêts continus à l'extérieur.
[Français]
L'ébauche de rapport porte sur la plupart de ces éléments de manière très satisfaisante. Toutefois, j'ai quelques remarques à faire sur la façon dont les principes sont formulés, sur la règle de déclaration d'un intérêt, sur la section de divulgation des intérêts privés et sur les contrats émis par le gouvernement fédéral. Cependant, ces commentaires pourraient être faits par écrit. Il n'est pas nécessaire que le comité y consacre du temps cet après-midi.
[Traduction]
Je crois que l'essentiel d'un code est la divulgation. Cela s'apparenterait à la pratique observée dans la plupart des provinces au Canada ainsi qu'au Royaume-Uni et en Australie. Le projet de rapport prévoit également la nomination d'un agent parlementaire, le jurisconsulte. Je suis d'accord avec cette mesure.
D'après mon expérience et mes discussions avec d'autres personnes au Canada et à l'étranger, le rôle le plus important du jurisconsulte consistera à offrir des conseils confidentiels à chaque parlementaire sur la façon dont le code devrait être interprété et sur la manière de résoudre les problèmes particuliers que ce parlementaire pourrait éprouver.
Je reçois fréquemment des appels de sénateurs et de députés qui cherchent des conseils. Ceux-ci adressent certainement aussi leurs demandes d'avis aux greffiers et légistes des Chambres. Cela ne peut que souligner l'importante contribution que le jurisconsulte apportera à cet égard. Je tiens à souligner l'importance de la disposition figurant dans la loi québécoise qui lie le jurisconsulte à tout avis qu'il ou elle donne à un parlementaire.
Je ne suis pas persuadé, toutefois, que cette personne devrait détenir les importants pouvoirs d'enquête mentionnés dans l'ébauche. À mon avis, ce n'est pas nécessaire. De plus, ces pouvoirs risquent même d'aller à l'encontre de la fonction beaucoup plus importante de conseiller que cette personne peut et doit assumer.
Je ne suis pas d'accord pour la simple raison qu'il y a eu très peu de cas, au cours de cette législature ou de la dernière, où des députés ou des sénateurs ont été accusés de comportements déplacés au sens du code. Une allégation d'activité criminelle n'entre pas dans la portée de votre code. Nous n'avons pas eu l'expérience au Canada du Royaume-Uni où certains députés ont supposément été rémunérés pour poser certaines questions à la Chambre ou ont agi en tant que lobbyistes rémunérés. Il n'y a pas eu de cas de ce genre chez nous. Par conséquent, je ne suis pas convaincu que ces pouvoirs d'enquête conférés au jurisconsulte soient nécessaires pour le moment.
Je recommande que ces pouvoirs particuliers d'enquête indépendante soient éliminés. Rien ne devrait empêcher le comité mixte d'ordonner au jurisconsulte de mener une enquête, mais j'estime qu'il y a grave difficulté si l'on confère ces pouvoirs indépendants à la personne concernée. À mon avis, les parlementaires hésiteraient alors à s'adresser au jurisconsulte pour recevoir des conseils confidentiels, ce qui est pourtant pour moi d'importance primordiale.
Je ne suis pas persuadé qu'il soit possible de jouer ces deux rôles en toute indépendance, de pouvoir mener une enquête en réponse à une plainte tout en offrant des conseils confidentiels et être considéré par les parlementaires confrontés à des dilemmes, ce qui vous arrive souvent, comme une source d'assistance. En revanche, s'il arrivait que votre comité estime qu'une plainte mérite d'être examinée et donne des instructions en conséquence au jurisconsulte, ce serait une autre affaire et peut-être la solution.
L'autre question que je voudrais signaler est la relation entre ce code et le Code du premier ministre régissant les conflits d'intérêts qui s'applique aux ministres, aux secrétaires d'État, aux secrétaires parlementaires et à d'autres membres du gouvernement. Je pense que le comité reconnaît que le premier ministre a besoin d'être libre d'établir des obligations plus particulières pour les parlementaires qui deviennent membres de l'exécutif. C'est le cas actuellement puisque les membres du Cabinet ne peuvent pas être administrateurs de compagnies, détenir des valeurs cotées en bourse ou pratiquer une profession - et, d'après moi, ces interdictions ne devraient pas viser tous les parlementaires en général. De fait, l'ébauche de rapport, section Application, stipule que rien dans le code parlementaire n'empêcherait le premier ministre d'établir des principes, règles ou obligations supplémentaires.
Il y aura sûrement des malentendus, étant donné qu'il y a deux codes. Où commence l'un et où finit l'autre? J'ai toujours prévu que le code parlementaire s'appliquerait aux parlementaires en tant que parlementaires. C'est-à-dire qu'il ne s'appliquerait pas aux parlementaires dans leur rôle de membres du gouvernement, soit ministres, secrétaires d'État et secrétaires parlementaires. Je recommanderais fortement que cela soit clairement indiqué dans la section sur l'application.
Il existe une approche semblable au Royaume-Uni. Dans son troisième rapport en date de juillet dernier - Le Code de conduite et le Guide relatif aux règles sur la conduite des membres du gouvernement - le Comité des communes sur les normes et privilèges a déclaré:
- Les ministres de la Couronne qui sont aussi des députés sont soumis aux règles de
l'enregistrement, de la déclaration et de l'intervention de la même manière que tous les autres
membres du gouvernement. De plus, les ministres sont soumis à d'autres lignes directrices et
obligations émises par des premiers ministres successifs afin de faire en sorte qu'aucun conflit
ne survienne, ni ne semble survenir, entre leurs intérêts privés et leurs charges publiques... Ces
exigences ne sont pas mises en application par la Chambre des communes et dépassent donc la
portée de ce guide.
Monsieur le président, je m'en tiendrai là.
Le coprésident (M. Milliken): Merci beaucoup, monsieur Wilson.
Je crois qu'il y a des candidats pour poser des questions.
Monsieur Manning, bienvenue au comité. Je crois que vous remplacez un de vos députés aujourd'hui. Je crois aussi que vous voulez poser quelques questions et comme votre temps est limité, je me ferai un plaisir de vous donner le premier la parole.
M. Manning (Calgary-Sud-Ouest): Merci, monsieur le président. Je ne participe pas à beaucoup de réunions de comité. Je souhaite vous remercier de m'en donner l'occasion. Comme la majorité des députés, et comme vous, cette question m'intéresse vivement tout comme l'opinion de M. Wilson étant donné son expérience des codes de déontologie. Je suis certain que cette expérience et cette opinion aideront beaucoup le comité dans ses travaux.
Je serai aussi bref que possible mais les questions que je tiens à poser concernent plus directement la deuxième partie de votre exposé, à savoir les rapports entre ce code de déontologie pour les députés et les sénateurs et le code de déontologie pour les ministres. Il me semble important que ces deux codes soient compatibles ou, a contrario, qu'ils ne soient pas incompatibles. La plupart des ministres sont députés avant d'être ministres et ils apprennent donc à respecter les règles de déontologie comme députés avant de devenir ministres. Il ne faut pas non plus qu'il y ait de contradictions entre les deux codes.
La question vous a peut-être déjà été posée et je m'en excuse à l'avance, mais j'aimerais savoir si le guide de déontologie destiné aux ministres du Cabinet a été communiqué aux membres de ce comité pour qu'ils s'en inspirent ou pour le moins qu'ils vérifient sa compatibilité avec celui qu'ils ont l'intention de proposer.
M. Wilson: Oui, et je crois que le comité a en fait reçu des exemplaires du code de conflits d'intérêts de juin 1994.
M. Manning: D'accord. En fait, ma pensée va au-delà des simples conflits d'intérêts. Je remarque que cette ébauche concerne pour l'essentiel les règles de déontologie au niveau des rapports entre les intérêts privés et la charge publique des députés, à savoir les conflits d'intérêts. Je me demande si oui ou non le code ministériel dépasse ce niveau et aborde l'aspect plus public de notre rôle. Par exemple, comment un député ou un sénateur doit-il communiquer avec un tribunal indépendant ou un organisme quasi judiciaire - des lignes directrices relatives à notre rôle public, et non pas simplement les conflits potentiels avec nos intérêts privés? Y a-t-il d'autres règles ministérielles qui couvrent ce genre de situations, la déontologie au niveau de notre rôle public?
M. Wilson: Je vous répondrai, pour commencer, que le code sur les conflits d'intérêts de juin 1994 contient une série de principes qui sont tous connus de votre comité. Certains d'entre eux ont en fait été intégrés à votre ébauche de rapport et ils vont au-delà des simples questions de conflits d'intérêts. Par exemple, la première série couvrant les normes contraires à la déontologie dit:
- Le titulaire d'une charge publique agira avec honnêteté et selon les normes d'éthique les plus
élevées de façon à préserver et accroître la confiance du public dans l'intégrité, l'objectivité et
l'impartialité du gouvernement.
M. Manning: Vous dites qu'il y a des lignes directrices destinées aux ministres qui vont au-delà du simple conflit d'intérêts et qui fixent certaines règles de notre rôle public, comme par exemple, comment traiter des renseignements confidentiels qui peuvent venir à notre connaissance de par notre charge publique grâce à nos communications avec... Je pense tout particulièrement aux tribunaux quasi judiciaires. Y a-t-il des lignes directrices précises qui couvrent plus que le simple rôle privé, qui s'appliquent aux ministres et qui pourraient servir de modèle?
M. Wilson: Ce que je voulais dire, monsieur, c'est que les principes énoncés dans le code sur les conflits d'intérêts vont au-delà de la simple question des conflits d'intérêts, de la manière de les éviter, aussi importante que cela soit.
Vous avez parlé du serment d'office qui est une formalité importante pour tout membre du gouvernement - le serment qu'un ministre du Cabinet doit prêter, le serment qu'un fonctionnaire doit prêter, s'engageant à protéger la sécurité du pays.
Vous avez soulevé une autre question, à savoir celle des tribunaux quasi judiciaires. Les lignes directrices les concernant n'ont pas été publiées. Tout le monde est au courant.
Je pourrais peut-être revenir à une discussion qui a eu lieu dans cette même pièce en novembre, quand un des membres de votre parti a soulevé cette question au moment de l'examen de l'ébauche de code de déontologie pour les lobbyistes. J'avais dit deux semaines auparavant que le premier ministre, en réponse à cette question sur ces lignes directrices, avait déclaré à la Chambre des communes:
- ... en juin 1996 nous avons publié le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique
en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat. Nous avons adopté la Loi sur
l'enregistrement des lobbyistes. Il y a d'autres dispositions dans la loi pour guider tous les
titulaires de charge publique.
- ... il y a des échanges de communications au Conseil privé. Je ne les publie pas, mais ce n'est pas
très compliqué.
- J'ai dit aux ministres qu'ils doivent appliquer les normes les plus élevées possible en matière de
conflits d'intérêts.
Ce ne sont pas des règles qu'il faut appliquer d'une manière générale. Il ne faut pas qu'elles soient intégrées au code que le comité envisage de faire respecter par les députés ou les sénateurs, et tout particulièrement par les députés car elles pourraient fortement limiter leur liberté de mouvement dans la représentation des intérêts de leurs électeurs, responsabilité prioritaire.
Ces règles concernant les tribunaux quasi judiciaires reviennent à dire en fait, qu'à cause de la présomption de partialité que les ministres peuvent apporter dans leurs rapports avec le CRTC ou la Commission d'immigration et des réfugiés, il faut qu'ils puissent être moins à même de représenter les intérêts de leurs électeurs qu'un simple député. Par exemple, ces règles ne s'appliquent pas et ne se sont jamais appliquées aux secrétaires parlementaires.
En résumé, la règle de base a été exprimée par le premier ministre quand il a dit qu'il demandait à ses ministres de respecter les normes d'éthique les plus élevées possible. C'est la règle de base. Il y a d'autres règles dont j'informe les bureaux des ministres. Elles figurent dans un document public. En fait, je le donne à quiconque me le demande. Il énonce les principes que doivent respecter les ministres lorsqu'ils représentent leurs électeurs vis-à-vis des tribunaux quasi judiciaires.
M. Manning: Serait-il possible à ce comité d'avoir communication de toutes les lignes directrices déontologiques destinées aux ministres afin que le code que nous proposerons soit compatible?
M. Wilson: Je ne vois pas ce qui pourrait être ajouté à ce qu'a dit le premier ministre à la Chambre ou à ce que je viens de dire.
M. Manning: Très bien. Puis-je vous poser simplement une autre question? Je sais que j'abuse de votre temps.
Comme vous le savez, nous avons discuté à la Chambre de ce que certains d'entre nous considèrent comme un comportement contraire à l'éthique. Sans porter de jugement, j'aimerais que vous me disiez si d'après vous une certaine modification des lignes directrices destinées aux ministres aurait pu prévenir la perception - sans vouloir porter de jugement - d'interférence politique dans l'enquête sur la Somalie, la destruction de documents, le refus de déposition devant le juge Krever, l'apparence d'enquête politiquement motivée par le ministère de la Justice. Ce sont toutes des questions d'éthique concrètes et réelles qui posent à certains d'entre nous des problèmes.
À votre avis, pourrait-on ou devrait-on modifier certaines des règles applicables aux ministres et, en corollaire, les règles applicables aux députés et aux sénateurs, qui préviendraient ce genre d'incident - s'il y en a - ou préviendraient même la perception que de tels incidents puissent arriver?
M. Wilson: Monsieur Manning, je crois que ce sont des questions politiques, questions abordées différemment par les partis d'opposition et le parti ministériel. C'est l'essence même de notre régime démocratique. C'est tout ce que je peux vous répondre.
M. Manning: Mais est-ce que la dimension éthique... disons que le juge Krever faisant remonter son enquête à 1984 réclame certains documents du Cabinet permettant de déterminer si le gouvernement d'alors avait été averti de la possibilité de contamination du sang. Y a-t-il quelque chose dans ces lignes directrices qui soit porteur d'une obligation éthique ou morale? Il ne s'agit pas de politiques ici; il s'agit d'essayer de déterminer les responsabilités.
Recommanderiez-vous certains changements à ces lignes directrices afin d'éviter ou de réduire les risques de réponses, disons, évasives dans ce domaine? Une des pires choses quand on adopte un code d'éthique est de le faire avec fanfare et toute la couverture médiatique possible en expliquant que l'on va se comporter de façon exemplaire pour ensuite s'apercevoir que cela ne change rien dans la pratique.
Je ne voudrais pas vous mettre sur la sellette, mais avec votre expérience, pouvez-vous nous dire s'il y a dans ce qui existe actuellement des problèmes dont le comité devrait tenir compte afin de les éviter dans les lignes directrices destinées aux députés ou aux sénateurs?
M. Wilson: Je fais une observation générale que j'ai déjà faite devant le comité il y a un an, en septembre 1995. Je pensais que le comité devrait s'efforcer d'adopter certaines mesures modestes qui permettraient au grand public d'avoir davantage confiance dans l'intégrité de cette institution.
Je pensais que les députés, comme les ministres, risquaient d'être victimes d'accusations sans fondement. Ce code sur les conflits d'intérêts ne vise pas à régler tous les problèmes politiques possibles et imaginables, mais bien à essayer de faire quelque chose contre les allégations injustes formulées contre un individu - à savoir qu'il ne défend pas l'intérêt public mais un intérêt privé.
Je crois que ce code permet de faire cela, et de le faire bien. Il a à mon avis permis à des gens de tous les milieux de comprendre qu'ils peuvent être membres de cette Chambre des communes, s'ils se font élire et si leur parti remporte la victoire, qu'ils ont la possibilité d'entrer au Conseil des ministres sans toutefois perdre tout ce qu'ils avaient avant. Autrement dit, il n'est pas nécessaire d'être sans le sou pour éviter les critiques concernant la poursuite d'intérêts personnels.
Il serait à mon avis très malsain que des groupes entiers de Canadiens ne puissent aspirer à entrer au Conseil des ministres.
C'est là l'objet de ce code. C'est un plus modeste... Je ne pense pas que vous vouliez aller plus loin pour commencer. Je ne pense pas que l'on puisse aller plus loin.
M. Manning: J'aurais une dernière question, monsieur le président.
Une chose qui m'a frappé lorsque je suis arrivé à Ottawa de l'Alberta, c'est qu'en Alberta, le dernier arrivé à l'Assemblée législative sait qu'il faut faire attention quand on communique avec l'organe principal de réglementation de l'énergie, qui s'appelait autrefois l'Energy Resources Conservation Board. On sait presque instinctivement qu'il n'y a que deux façons de communiquer avec un organisme de réglementation quasi judiciaire, du moins si l'on est membre de la majorité. On le fait soit par décret du conseil, soit en témoignant publiquement devant ce conseil afin d'être tenu de répondre éventuellement à des questions. Cette notion presque instinctive de la façon de procéder a permis d'éviter la corruption du système politique albertain. Dans pratiquement tous les États d'Amérique du Nord qui ont connu un boom pétrolier, il y a eu de la corruption parce qu'il y a eu des ingérences politiques dans le système de réglementation ou parce que le secteur privé s'est lui aussi ingéré dans le système. Cela ne s'est pas produit en Alberta parce que tout le monde comprend comment cela marche.
Une chose que je trouve curieuse ici, c'est que même les ministres ne semblent pas sentir cela instinctivement; ils ne semblent pas comprendre la façon de communiquer avec les tribunaux quasi judiciaires, notamment les organismes indépendants, c'est par décret du conseil, même par décrets du conseil successifs; ou alors en témoignant publiquement devant cet organisme quasi judiciaire, avec contre-interrogatoire du gouvernement.
Si l'on voulait atteindre ce niveau d'éthique au Parlement à Ottawa, pourrait-on à votre avis le faire? Faut-il de meilleures lignes directrices pour cela? Est-ce une question d'information? Je crois qu'en Ontario les députés provinciaux et l'assemblée législative savent bien comment l'on communique avec la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, c'est presque instinctif. Or, à Ottawa, cela ne semble pas le cas. J'aimerais savoir si, à votre avis, dans ce cas, des lignes directrices, ou autre chose, seraient nécessaires pour que les gens comprennent comment ça marche.
M. Wilson: Vous me corrigerez si je me trompe, mais j'ai l'impression que nous avons à peu près la même façon de faire ici que dans les provinces. En fait, cela va même plus loin. Nous avons imposé une restriction aux ministres. Pourquoi? Parce qu'il arrivait souvent que ce soit les ministres qui, par la loi, ordonnent à l'un des tribunaux quasi judiciaires d'examiner une ligne de conduite.
Le Conseil des ministres a pouvoir de nomination. C'est lui qui fixe les salaires. Néanmoins, cela signifie que lorsqu'un ministre ne peut le faire - et ils comprennent très bien quelles sont les limites, ne vous y trompez pas - leurs électeurs seront moins bien représentés que par un simple député. Je ne pense pas que l'on puisse prétendre qu'un simple député, de la majorité ou de l'opposition, devrait être empêché de représenter les intérêts d'un électeur avec toute la vigueur possible devant le CRTC ou la Commission de l'immigration et du statut de réfugié ou encore devant tout autre organisme quasi judiciaire.
Je crois, toutefois, que s'il se trouve que cette personne a des intérêts privés qu'elle n'a pas déclarés de la façon prescrite et qu'elle défendait donc plutôt ses intérêts privés que ceux d'un électeur, cela peut poser un problème. C'est la raison pour laquelle il est bien que ces intérêts soient divulgués parce que, au moins, chacun sait ce qu'il en est.
J'estime que le système fédéral se défend très bien. Le seul cas récent auquel je puis penser c'est quand un ministre de l'Agriculture au Nouveau-Brunswick avait représenté quelqu'un devant la Commission des accidents du travail du Nouveau-Brunswick. Il y a eu l'appel et les tribunaux ont déclaré que le seul fait que le ministre ait été présent pouvait être considéré comme un conflit d'intérêts. Je crois que les autres provinces en conviendraient. Mais étendre ce principe à un simple député me semblerait dangereux.
M. Manning: Merci, monsieur le président.
Si je dois sortir avant la fin de la réunion, monsieur le président et monsieur Wilson, ce n'est pas par manque d'intérêt pour le sujet dont vous discutez, mais parce que j'ai une autre obligation qui m'obligera à m'absenter du moins temporairement.
Le coprésident (M. Milliken): Certainement et revenez si vous le pouvez.
M. Kilger (Stormont - Dundas): J'aimerais poser une question complémentaire à celle de M. Manning parce que les chefs de parti ont des obligations. Les députés sont occupés et les chefs encore plus occupés, or ce sujet nous intéresse tous beaucoup. Pendant que M. Wilson est là, j'aimerais revenir à la question initiale de M. Manning.
J'estime qu'entre les deux codes, celui qui concerne les parlementaires et celui qui concerne les ministres, il doit exister un certain équilibre. Je dirais que les questions soulevées dans le contexte de l'enquête Krever et de l'enquête sur la Somalie - comme l'a dit M. Wilson, si je ne m'abuse - étaient plutôt d'ordre politique. M. Manning a parlé d'éthique, mais je crois qu'il faut reconnaître qu'il y a des questions d'éthique et des questions de politique. Comment réaliser cet équilibre?
M. Wilson voudrait-il nous dire si, à essayer de tout prévoir de façon parfaite, d'atteindre des objectifs idéaux, on ne risque pas de pécher par excès. Si au lieu d'encourager les députés à presser les gouvernements d'instituer des enquêtes sur des questions importantes comme celles du sang ou de la Somalie, on ne risquerait pas de les dissuader. Autrement dit, en imposant des peines trop sévères, on n'obtient pas de condamnation.
Je me demande s'il n'existe pas en fait un bon équilibre entre les deux codes dans le régime parlementaire canadien. Je comprends très bien qu'on veuille améliorer les choses, mais je ne peux m'empêcher de redouter un peu cette recherche de la perfection, car le mieux est l'ennemi du bien, et il se pourrait qu'en fait nous découragions ou nous rendions plus difficiles les enquêtes du genre de celles que nous avons actuellement ou que nous pouvions faire autrefois.
Monsieur Wilson, je ne sais pas si vous voulez nous parler de cet équilibre d'après votre expérience passée ou les précédents, car j'ignore s'il y en a.
M. Wilson: Je ne pense pas pouvoir me prononcer adéquatement sur la question des enquêtes. Je vous dirai cependant que j'éviterais - et j'incite le comité le faire aussi - d'essayer de pousser trop loin cette première tentative de code parlementaire. Je ne pense pas que l'on puisse justifier d'aller trop loin.
Je pense que l'on peut préconiser certaines règles visant une divulgation publique des intérêts des députés. On peut préconiser des règles sur les cadeaux, plus ou moins suivant les modalités décrites ici. En outre, on peut concevoir certaines règles concernant les déplacements parrainés, comme on le fait ici. À mon avis, cela marquerait un progrès important. Ainsi, on reprendrait ce qui se fait dans d'autres pays dont l'organisation gouvernementale se compare à la nôtre, ce qui se fait aussi dans certaines provinces. Aller encore plus loin... je pense que c'est avec l'expérience que l'on saura si c'est nécessaire.
Le coprésident (M. Milliken): Avez-vous terminé?
M. Kilger: Oui.
Le coprésident (M. Milliken): Madame Tremblay.
[Français]
Mme Tremblay (Rimouski - Témiscouata): Monsieur Wilson, quand j'ai pris connaissance du code et que je l'ai lu en détail, je me suis demandé pourquoi il fallait aller si loin dans la déclaration des intérêts personnels. C'est probablement parce que je ne possède rien.
Je suis capable de comprendre pour ce qui est des intérêts personnels très immédiats, mais on va jusqu'au conjoint, aux enfants et aux femmes des enfants et on en est rendu à déclarer les tableaux qu'on a sur les murs, la voiture qu'on possède et la voiture de notre fils. Je me demande qui va vouloir faire de la politique et pourquoi il est nécessaire d'aller aussi loin. Pourquoi demande-t-on à un parlementaire d'aller aussi loin que quelqu'un qui fait faillite ou qui est poursuivi pour trafic de drogues?
On part de rien et on met la marche très haute. Cela va amener des gens à embaucher, non pas un bon fiscaliste, parce que cela n'aiderait pas beaucoup, mais peut-être un bon «éthicologue» pour essayer de voir comment il pourrait bien répondre à cela et ne pas y répondre en même temps, tout en étant correct ou pas correct.
Qu'est-ce que cela pourrait nous donner? J'ai l'impression, en y réfléchissant bien, que cela peut presque encourager la perversité plutôt que l'honnêteté.
Je suis un peu effrayée par le fait qu'il n'existe rien actuellement et qu'on en veuille tellement. C'est tellement loin. Il me semble que la marche est haute. Je me demande pourquoi il faut aller aussi loin.
M. Wilson: À mon avis, les propositions ici représentent le minimum et aussi le maximum. S'il y avait un problème dans les allégations de conflits d'intérêts...
L'expérience dans des provinces comme l'Ontario, la Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan et quelques autres démontre que des allégations ont été faites contre des députés lors d'un débat en Chambre ou devant un comité sans que les intérêts publics soient mis en cause, mais plutôt les intérêts privés, les intérêts personnels.
Dans les provinces qui ont une telle mesure, de même qu'en Australie et au Royaume-Uni, le débat est plus élevé.
[Traduction]
À mon avis, c'est le seul objectif. C'est ce que nous exigeons des ministres, mais il faut dire aussi qu'après avoir demandé une telle déclaration de la part des ministres, nous leur interdisons toute une gamme de choses. Pourquoi? Parce que selon nous elles constituent un conflit direct. Ce n'est pas ce que l'on propose ici. On propose une divulgation confidentielle, et ensuite une divulgation publique partielle.
C'est le comité qui en a décidé ainsi. Ailleurs, cela a donné de bons résultats: au Royaume-Uni depuis le début des années 70, en Australie depuis les années 80 et maintenant dans la majorité de nos provinces.
[Français]
Mme Tremblay: Monsieur Wilson, cela n'empêche pas la population en général, dans le monde entier, de considérer la politique comme l'emploi le plus pourri. Les politiciens sont les gens pour qui ils ont le moins de respect.
M. Wilson: Certaines allégations étaient, bien sûr, non fondées.
Mme Tremblay: Le code d'éthique en lui-même n'est pas une garantie que les gens vont se comporter avec éthique. Cela existe depuis le XVIIe siècle en Angleterre, depuis le XVIIIe à tel autre endroit et depuis le XIXe un peu partout, mais cela ne change rien. On n'est pas moins bons ici parce qu'on n'a pas de code d'éthique.
Quand quelqu'un dit qu'il n'a rien, vous êtes obligé de prendre sa parole. Dans le code d'éthique, vous n'avez aucun moyen à votre disposition pour aller vérifier si vraiment la personne n'a rien. Par exemple, pour ce qui est des biens exclus, pourquoi est-il dans l'intérêt public qu'on sache cela? Personnellement, je voudrais comprendre en quoi c'est important. Je comprends que si quelqu'un possède une compagnie de câblodistribution, il ne peut siéger au Comité permanent du patrimoine canadien pour expliquer la câblodistribution. Il me semble que cela va de soi. Donnez-moi donc un exemple concret où quelqu'un pourrait déclarer quelque chose et que cela pourrait être utile à son action parlementaire, quelque chose dont il pourrait se servir.
M. Wilson: Je vais vous donner un exemple. Le comité s'est réuni avec les commissaires provinciaux. Ils ont eu des expériences que je n'ai pas eues. Mes responsabilités concernent les ministres et les secrétaires parlementaires, et non les députés.
Mme Tremblay: Si on demande cela des députés, je me demande ce que vous demandez de plus aux ministres.
M. Wilson: J'ai demandé aux ministres tous les renseignements sur les sujets que vous trouvez ici.
Mme Tremblay: Tous ces renseignements plus d'autres?
M. Wilson: Plus d'autres.
Mme Tremblay: Vous savez tout ce que les ministres ont accroché sur leurs murs? Combien ils ont de cadres accrochés sur leurs murs? Qui sont les auteurs des peintures accrochées à leurs murs? Toutes les collections de disques qu'ils ont chez eux? Vous savez tout cela?
M. Wilson: Oui.
Mme Tremblay: J'aimerais bien voir cela. Je suis sceptique. Il n'y a personne qui puisse faire un inventaire semblable. Qu'est-ce que cela donne?
Je veux bien qu'on fasse des choses utiles. On va créer un emploi pour quelqu'un qu'on va payer je ne sais combien, on va lui donner un bureau et on sera 301 à aller à son bureau pour faire la liste des choses qu'on possède. Quand on va les vendre, il faudra aller le lui dire. Quand on va en acheter d'autres, il faudra le lui dire. On va aller au marché aux puces et il faudra aller lui dire qu'on a trouvé une peinture et que c'est absolument extraordinaire. On va passer notre temps à aller là pour enlever, donner, etc..
Fondamentalement, va-t-on au coeur du problème? C'est ce que je veux savoir. Je veux un code d'éthique, bien sûr, et notre parti en veut un, mais un code qui soit réaliste et efficace, qui aille au coeur du problème. Il ne s'agit pas remplir de la paperasse pour remplir de la paperasse.
Le coprésident (M. Milliken): Madame Tremblay, nous pourrons tenir cette discussion plus tard. Le témoin est ici et nous devons lui poser des questions. Ne faites pas de discours, s'il vous plaît.
Mme Tremblay: Cela ne me convainc pas.
Le coprésident (M. Milliken): Nous pourrons tenir des discours lors de la prochaine réunion et nous serons enchantés d'écouter ce que vous aurez à dire.
Mme Tremblay: Je veux dire que cela ne me convainc pas. C'est un spécialiste quand même. Il est responsable du code d'éthique.
Le coprésident (M. Milliken): Posez-lui des questions.
Mme Tremblay: Cela, c'est une grosse question. Cela nous permet-il d'aller au coeur du problème, oui ou non?
Le coprésident (M. Milliken): Madame Catterall, vous avez aussi des questions?
[Traduction]
Mme Catterall (Ottawa-Ouest): Ma question est un peu dans la même veine à vrai dire. Je suis de tradition judéo-chrétienne, et j'ai plutôt l'impression qu'il était probablement beaucoup plus facile de se soumettre aux règles de l'Ancien Testament qu'à celles du Nouveau Testament.
Des voix: Oh, oh!
Mme Catterall: L'Ancien Testament est très précis: ne pas faire ceci, ne pas faire cela. Du jour au lendemain, il y a eu une révolution et soudainement on dit: «Aimez-vous les uns les autres». Qu'est-ce que cela veut dire? Dans telle ou telle situation, qu'est-ce que cela veut dire? Dans le cas d'une personne en particulier, qu'est-ce que cela veut dire? Il me semble que depuis le départ, nous faisons face au même genre de dilemme.
Selon moi, l'essentiel ici est que les députés adoptent une approche déontologique lorsqu'ils assument leurs responsabilités, mais il faudrait qu'en même temps, il y ait assez d'éléments de l'Ancien Testament pour que par inadvertance ils ne s'aventurent pas à faire des choses qui pourraient donner l'impression qu'ils se servent de leur charge publique pour obtenir des gains personnels. C'est l'un des principes essentiels ici.
D'après votre expérience, cette ébauche de rapport permet-elle d'en arriver à un équilibre relativement juste? Ce code permettra-t-il aux députés de réfléchir aux conséquences éthiques de leurs décisions et d'agir en conséquence? Existe-t-il un bon équilibre entre cet aspect et les interdictions?
Je reprends ici l'argument soulevé par Mme Tremblay car il me semble que si nous précisons trop les règles, on aura tendance à dire: «Je n'ai qu'à respecter ces règles qui me garantissent un comportement éthique dans l'exercice de ma charge».
M. Wilson: Effectivement, ce danger existe. Aux États-Unis, la pratique est telle - et cela fait partie d'une tradition - que tout est exprimé dans la législation; en procédant ainsi, les choses sont décrites très en détail. Les Américains prétendent que cela permet d'accroître la confiance du public en ceux et celles qui assument des charges publiques, qu'il s'agisse des législateurs ou des membres de l'exécutif.
Malheureusement, l'existence de toutes ces règles a donné l'impression aux gens que ceux qui assument une charge publique ne peuvent pas distinguer entre ce qui est bien et ce qui est mal.
Quand j'ai comparu pour la première fois, j'ai tenté de vous dire qu'une mesure plutôt modeste pourrait être utile mais que ce sont les principes qui sont importants. Ainsi, on pourrait établir certains principes dont découleraient quelques règles modestes. Il a été question d'une divulgation quelconque. Je me suis dit qu'elle mettrait fin aux allégations voulant que ceux qui assument une charge publique le font dans leur intérêt personnel. Dans les provinces, c'est ce qui s'est passé.
C'est la seule chose que je puisse vous dire.
On a parlé des cadeaux. À la Chambre, il a été question des voyages. J'avais préconisé quelque chose de modeste concernant les voyages et les cadeaux. Je pense que ce que l'on propose ici est tout à fait adéquat - une déclaration publique pour tout ce qui dépasse 250 $, ou une somme que l'on fixerait.
Quant à moi, je n'irais pas plus loin.
Mme Catterall: Ce que vous venez de dire confirme tout simplement mes inquiétudes, mais ce n'est pas une critique que je vous adresse.
On dirait que nous essayons d'établir un code de déontologie qui protégera notre image publique plutôt que d'améliorer notre conduite et c'est cela qui m'inquiète. Serait-il utile de départager les deux? Serait-il bon que le document principal établisse les principes d'une conduite éthique? Dans un autre document, on fixerait des règles précises auxquelles seraient soumis les députés, ce qui constituerait ni plus ni moins une liste d'exemples descriptifs de certains - mais seulement certains - dilemmes éthiques qui pourraient se poser aux députés. J'essaie ici de mettre davantage l'accent sur l'aspect déontologique que sur le respect des règles.
M. Wilson: Si vous décidez de préparer un document, je pense qu'il conviendrait tout à fait qu'il soit axé sur ces principes, ce qui ne vous empêcherait pas ensuite d'établir certaines règles modestes qui en découleraient.
Il existe déjà toute une gamme de règles particulières sous une forme quelconque. Je ne les connais pas à fond, mais je pense que quelqu'un a posé la question quant à savoir quelles règles s'appliquent aux députés actuellement. Elles sont éparpillées et pour les trouver il faut aller à diverses sources.
J'ai donc parlé de principes, de règles modestes. Les règles sur les marchés du gouvernement fédéral qui se trouvent dans la Loi du Parlement du Canada m'inquiètent car je les trouve trop limitatives. Elles remontent à une époque révolue et il faudrait les améliorer.
Le comité se demande s'il serait opportun de nommer un fonctionnaire du Parlement qui pourrait donner des conseils, voire faire enquête en cas d'allégations. Spontanément, je vous dirais que disposer de quelqu'un qui donnerait des conseils à ceux et celles qui feraient face à un véritable dilemme serait très positif. Je pense que bien des députés font face à de véritables dilemmes et qu'ils aimeraient bien s'en ouvrir à quelqu'un. Il se peut qu'ils connaissent déjà la bonne réponse, mais ils souhaiteraient quand même une petite vérification. D'après les conversations que j'ai eues, j'ai constaté que parfois on a tendance à appliquer des normes qui sont beaucoup trop strictes.
Je vous ai dit tout à l'heure que je ne pense pas que cette personne devrait de son propre chef décider de procéder à une enquête. Si des allégations graves sont formulées et si le comité le souhaite, alors, soit. Il n'y a selon moi pas de problème toutefois mais je m'inquiète cependant. Il me semble que si l'on éprouve le besoin de demander à quelqu'un de l'extérieur de faire enquête, c'est que collectivement, les membres du comité reconnaissent qu'il existe un problème dans les deux Chambres, chose que je n'avais pas constatée moi-même.
Mme Catterall: Merci.
Le coprésident (M. Milliken): Monsieur, vous avez parlé tout à l'heure d'une lettre que vous alliez déposer. Allez-vous le faire aujourd'hui? Allez-vous nous l'envoyer plus tard?
M. Wilson: J'ai commencé à coucher sur papier certains de mes arguments. Je vais vous l'envoyer.
Le coprésident (M. Milliken): Merci.
Le coprésident, le sénateur Oliver, veut poser une question.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Puis-je poser une question complémentaire à celle de Mme Catterall?
Au tout début, vous avez dit qu'il faudrait retirer au jurisconsulte le pouvoir de procéder à des enquêtes. Nous ne pouvons toutefois pas le laisser démuni en quelque sorte, sans aucun pouvoir. Vous avez pris connaissance de l'ébauche sur laquelle nous travaillons et qui s'inspire de l'expérience britannique et du code en vigueur en Grande-Bretagne. Vous avez dit que nous devrions nous intéresser au modèle de Westminster, mais ce modèle prévoit le pouvoir de faire enquête. Que voulez-vous que nous fassions? Pourquoi renoncez-vous à une notion qui vous plaît à priori?
M. Wilson: Tout d'abord, il faut dire que les Australiens ont aussi une règle de divulgation. Cependant, il n'est pas prévu là-bas que les deux Chambres nomment quelqu'un pour procéder à des enquêtes. Il existe un fonctionnaire responsable et là-bas toute enquête est menée par le comité lui-même.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Mais dites-nous ce qui ne va pas dans le modèle britannique alors?
M. Wilson: Je ne pense pas que cette situation s'applique ici. Tout d'abord, en Grande-Bretagne, il y a eu le cas où certains députés acceptaient d'être rémunérés pour poser des questions à la Chambre des communes. Deuxièmement, cela a forcé le premier ministre britannique de constituer le Comité Nowlan. Ce comité a découvert que certains députés étaient en fait payés par des lobbyistes. Ici, ce genre de choses ne s'est jamais produit. En fait, à l'idée même, la plupart des gens seraient outrés.
Effectivement, le fonctionnaire britannique détient des pouvoirs indépendants d'enquête. Mais leur contexte, à mon avis, est différent du nôtre.
Dans la note que j'envisage d'envoyer au comité, je voulais suggérer que l'on envisage de remanier légèrement les règles proposées auxquelles le jurisconsulte sera assujetti. Plutôt que de lui confier un rôle d'enquêteur indépendant, on pourrait dire, si le comité était d'accord:
- ...à la demande du comité mixte, examiner les plaintes au sujet de la conduite des parlementaires
et lui faire rapport.
- Je pense que si plainte il y a, on devrait en saisir les deux coprésidents, et non pas un organisme
indépendant.
Le coprésident (M. Milliken): Monsieur Shepherd.
M. Shepherd (Durham): Je reconnais ne pas avoir lu ce document en entier mais j'en retiens une chose, la question de la divulgation publique. Vous avez étudié ce qui se faisait ailleurs. Avez-vous pu constater que ces renseignements avaient fait l'objet d'un usage illégal? Quand je parle d'«usage illégal», je parle d'usage à des fins politiques.
Permettez-moi de vous donner un exemple. Supposons que nous étudiions en comité toute la question des banques et que je constate que chez les membres réformistes, nombreux sont ceux qui avaient des actions dans les banques à charte. J'en conclus d'office, pour des raisons politiques, qu'ils étaient de mèche avec les banques. Y a-t-il quelque chose qui m'empêche de me servir de cette information? Voyez-vous là un inconvénient à la divulgation?
M. Wilson: Je pense que c'est la raison pour laquelle dans certaines provinces et certains pays on a choisi la divulgation publique. C'est vrai pour la Grande-Bretagne et pour l'Australie. Personne n'indique de valeur. En fait, on révèle à quels conseils d'administration on siège et si l'on possède beaucoup d'actions. Les choses se passent ainsi en Ontario, en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, en Nouvelle-Écosse, et je pense à Terre-Neuve et dans les deux territoires. J'ai peut-être oublié une province.
Si l'on a exigé cette divulgation, c'était pour contrer ce genre d'allégation, à savoir que les députés participaient aux travaux d'un comité parce que cela servait leur intérêt personnel. Ainsi, il y a désormais une forme de déclaration publique. On ne connaît pas l'étendue de ce qu'ils possèdent. On sait tout simplement qu'ils possèdent quelque chose. Quand ces intérêts sont véritablement en jeu, dans ces provinces-là, on demande aux personnes concernées de s'abstenir de participer au débat.
Si l'on juge que le fait est sans importance, alors, il n'est pas nécessaire de divulguer quoi que ce soit. Il me semble que cela donne le choix. À l'étranger, et dans certaines provinces, on a constaté que cette façon de procéder était utile.
M. Shepherd: Ma question porte surtout sur l'ampleur. Quelqu'un qui détiendrait un intérêt majoritaire ou posséderait un bloc d'actions de la Banque de Commerce Impériale ne serait pas du tout dans la même situation que M. Epp, à qui sa grand-mère aurait légué par testament une centaine d'actions de la même banque.
M. Wilson: Je vois. Si j'ai bien compris, le comité propose qu'il n'y ait pas de divulgation publique des actions dont la valeur est inférieure à 10 000 $ par exemple. Ainsi, tous les fonds mutuels seraient exclus. On pourrait fixer le montant à 50 000 $ plutôt que 10 000 $ suivant ce que le comité jugerait convenable. Autrement dit, tout ce qui serait inférieur à la somme fixée ne ferait pas partie de la divulgation.
M. Shepherd: Et cela par personne.
M. Wilson: C'est cela. Je n'ai pas d'opinion très arrêtée là-dessus.
Le coprésident (M. Milliken): Monsieur Harb, un rappel au Règlement.
M. Harb (Ottawa-Centre): Je tiens à remercier M. Wilson qui nous a fait un excellent exposé.
Monsieur le président, le Parti réformiste et nous-mêmes, les deux côtés donc, discutons de ce rapport que je croyais confidentiel, mais je constate que les délibérations du comité sont retransmises. Cela veut-il dire que le rapport fait partie du domaine public ou cela signifie-t-il que nous avons... Je voulais connaître votre sentiment car j'avais l'impression que ce rapport n'était pas encore public.
Le coprésident (M. Milliken): Il est vrai que l'ébauche du rapport n'a pas été rendue publique mais nous avons choisi d'inviter le conseiller en éthique et le commissaire à la protection de la vie privée pour répondre aux questions des membres du comité. Bien entendu, dans leur réponse, il est forcé qu'ils fassent allusion à l'ébauche.
Le commissaire à la protection de la vie privée n'a pas encore vu l'ébauche de rapport. Le conseiller en éthique, lui, oui. Je pense que les membres du comité étaient d'accord, quand ils ont décidé d'inviter ces deux témoins-là, pour dire qu'il serait intéressant de connaître leur opinion, surtout...
M. Harb: M. Wilson et le commissaire à la protection de la vie privée ont-ils reçu des exemplaires du rapport?
Le coprésident (M. Milliken): Monsieur Wilson, oui.
M. Wilson: C'est cela.
Le coprésident (M. Milliken): Je ne pense pas que le commissaire à la protection de la vie privée ait vu le rapport.
M. Harb: Serait-il possible de le lui envoyer?
Le coprésident (M. Milliken): Il a déjà comparu. Il nous a donné son opinion.
M. Harb: Je vois.
Le coprésident (M. Milliken): Étant donné ce qu'il a dit quand il est venu, je ne pense pas qu'il lui serait utile, à ce moment-ci, de recevoir le rapport. Il nous a dit que le Parlement pouvait faire ce qu'il voulait car quant à lui, il faudrait une modification à la Loi sur la protection des renseignements personnels, si l'on voulait lui donner compétence en la matière. Pour l'instant il n'a aucun pouvoir. Nous sommes donc libres de faire à notre guise. Il nous a donné une liste de principes que les membres du comité trouveront utile de connaître.
Les membres du comité voudront sans doute demander à M. Wilson s'il a entendu le témoignage du commissaire à la protection de la vie privée, l'autre jour. Est-il au courant des principes qu'il préconise? On voudra sans doute demander aussi à M. Wilson si, à son avis, l'ébauche de code répond à ces principes. Bien entendu, tout cela dans la mesure où il souhaite exprimer son opinion là-dessus.
M. Wilson: Je peux vous la donner. On m'a rapporté ce que le commissaire à la protection de la vie privée avait dit.
Le caractère confidentiel de ces renseignements est absolument essentiel. De tels systèmes ne sauraient fonctionner si la personne a des raisons de croire que le public ou quelqu'un d'autre - peut-être quelqu'un de son propre parti - pourra avoir accès à ces renseignements. Il faut insister énormément sur la protection des renseignements.
Le travail de votre jurisconsulte ne donnera rien à moins que les députés puissent en toute confiance avoir recours à ses services. Les députés doivent être convaincus de la discrétion absolue du jurisconsulte, de ce que les renseignements seront protégés et détruits plus tard, lorsqu'ils ne seront plus nécessaires. C'est de cette façon que je procède lorsque des renseignements me sont transmis.
Le coprésident (M. Milliken): Le commissaire à la protection de la vie privée a fait valoir hier, dans son témoignage, que nos règles doivent comporter une disposition spéciale afin que les renseignements soient détruits après une période déterminée. Il a également indiqué que dans ce cas, le caractère confidentiel des renseignements était absolument essentiel.
Sénateur Bosa.
Le sénateur Bosa (York - Caboto): Permettez-moi de poser une question supplémentaire. Que se passe-t-il si l'information est contestée?
Le coprésident (le sénateur Oliver): Les renseignements seraient conservés pendant un certain temps avant d'être détruits. Il pourrait s'agir d'une période de six mois ou de deux ans.
Le coprésident (M. Milliken): Vous parlez de renseignements qui seraient contestés quant à leur exactitude?
Le sénateur Bosa: Supposons que je connaisse les règles et que je sois au courant de certaines affaires privées d'un député. Je communique avec le jurisconsulte pour lui faire part des renseignements que je possède et lui demander si, à son avis, le député respecte les règles.
Le coprésident (M. Milliken): Dans un tel cas, je suppose, le jurisconsulte fera rapport au comité de ce qu'il a reçu une plainte, des allégations selon lesquelles un député aurait enfreint les règles en ne divulguant pas certains renseignements - c'est du moins ce que je comprends de ce que vous dites - des renseignements qui auraient dû être rendus publics, et que, par conséquent, il y a là une erreur à corriger. Le jurisconsulte demandera au comité s'il convient ou non de procéder à une enquête, de convoquer le député devant le comité ou de prendre toute autre mesure qui s'impose pour régler le problème.
C'est ce type de démarche qui est le but du système. Si vous estimez qu'il y a un problème, vous pouvez communiquer les renseignements. Cela fait partie de la raison d'être du système.
Le sénateur Bosa: Oui, mais ces renseignements demeurent confidentiels. Comment pouvez-vous vérifier cela?
Le coprésident (M. Milliken): Eh bien, il ne pourra peut-être pas le vérifier pour vous. Il pourra simplement signaler qu'il a reçu une plainte, transmettre la plainte au comité et décider si la plainte est valide. Vous ne recevrez peut-être jamais de réponse. Si vous avez raison et que le renseignement doit être rendu public, vous vous en rendrez compte assez rapidement puisqu'il figurera dans la déclaration publique.
Monsieur Epp.
M. Epp (Elk Island): Merci.
Je tiens à remercier mes collègues du comité de leur gentillesse à notre égard. Je suis très content que M. Manning assiste à notre réunion. Il s'intéresse sincèrement à ce sujet.
En fait, si vous permettez un petit préambule, j'ai joint les rangs du Parti réformiste en 1988 en partie à cause de ce nom de Manning. Ernest Manning a été premier ministre de l'Alberta pendant 25 ans - je crois bien que c'était pendant 25 ans - et a conservé pendant tout ce temps une réputation immaculée. Nous pouvons tous en tirer des leçons, nous parlementaires. Et ce n'était pas parce qu'il appliquait une vaste série de règles.
N'oublions pas que 99 p. 100 d'entre nous agiront honnêtement, comme l'a dit Marlene, qu'il y ait ou non des règles. Les règles devraient être établies pour rappeler à l'ordre les rares personnes qui ne sont pas d'une honnêteté absolue.
Je vous remercie d'avoir permis à notre chef d'assister à notre réunion d'aujourd'hui.
Permettez-moi de poser deux questions à M. Wilson. Après avoir lu l'ébauche de code que nous proposons, croyez-vous que ce document contient bien les principes et les usages des règles actuelles applicables aux députés et aux sénateurs, en application du Règlement de la Chambre des communes, de la Loi sur le Parlement du Canada ou d'autres lois?
M. Wilson: Monsieur Epp, je ne suis pas un expert pour ce qui est de toutes les règles qui s'appliquent à vous. Je constate néanmoins que, dans l'ébauche que j'ai consultée, on essaie de tenir compte de toutes les questions relatives aux cadeaux et aux voyages. Les règles sur la divulgation seraient tout à fait nouvelles. On y trouve également la majeure partie des questions relatives aux contrats et j'ai quelques propositions à vous faire pour améliorer la rédaction de cet aspect du code.
Même si je ne suis pas expert dans ce domaine, j'ai été surpris de voir à quel point ce document est complet. Autrement dit, si quelqu'un veut savoir quelles règles s'appliquent aux députés et aux sénateurs, il lui suffirait de consulter ce document. Le code pourrait même être un outil très utile pour le public.
M. Epp: D'accord.
Ma deuxième question porte sur le jurisconsulte et son indépendance. Je ne veux pas vous entraîner dans les aspects politiques de cette question, mais nous savons tous, comme je l'ai d'ailleurs fait remarquer dans notre parti, que vous rendez compte de vos activités au premier ministre.
J'ai affirmé publiquement - je puis aussi bien vous le dire maintenant puisque vous en entendrez parler de toute façon - qu'à mon avis, le conseiller en éthique a les mains liées, que sa crédibilité auprès du public est compromise puisqu'il ne peut pas, comme le vérificateur général, faire rapport directement au Parlement et donc plus directement à la population canadienne.
Je sais que le premier ministre a maintenant deux conseillers en éthique. Il y a M. Sharp et vous-même qui, je suppose... collaborez-vous l'un avec l'autre ou êtes-vous plutôt deux conseillers indépendants que le premier ministre peut consulter sur les questions d'éthique?
Comment réagit le premier ministre, lorsque vous faites enquête sur des actes que vous déclarez répréhensibles? Même si votre enquête révèle qu'il n'y a pas eu de méfait, la confiance des Canadiens à l'égard du Parlement est tout de même érodée parce que même si vous déclarez innocente la personne qui a fait l'objet de l'enquête, il n'en subsiste pas moins un doute dans l'esprit des Canadiens puisque vous travaillez de très près avec le premier ministre et qu'ils mettront en doute votre indépendance.
À mon avis, il faudrait que le jurisconsulte soit beaucoup plus indépendant que vous. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Nous encouragez-vous dans cette voie?
M. Wilson: Je ne peux pas répondre à cette question par oui ou non, puisqu'il faut bien comprendre la différence entre mes fonctions et les responsabilités que doit assumer un premier ministre dans notre régime gouvernemental, par rapport à ce qui est proposé ici.
Permettez-moi de discuter d'abord de cet aspect. Je crois qu'il était justifié que quelqu'un soit nommé par les deux Chambres du Parlement pour assumer la plupart des fonctions qui sont proposées. Je croyais que la fonction la plus importante de cette personne serait de conseiller les députés et les sénateurs lorsqu'ils se trouvent aux prises avec des problèmes ou avec des dilemmes. Et cela se produit fréquemment. Je suis d'accord avec l'idée que le jurisconsulte doive respecter le caractère confidentiel des renseignements à la demande de la personne qui le consulte.
Cette disposition existe au Québec, où elle s'est révélée précieuse. Au Québec, le jurisconsulte est l'ancien juge en chef de la province, Claude Bisson. Ses fonctions sont un peu différentes de celles proposées ici, mais lorsque les gens ont des problèmes, ils peuvent avoir recours à lui - lorsque par exemple une société qu'ils possèdent s'engage dans certaines activités et qu'ils veulent savoir comment cela influe sur leur travail de députés, etc.. Le jurisconsulte peut rendre pour eux une décision et leur donner des conseils. Ces conseils sont importants.
C'est ce que font également les commissaires des provinces. Ils ont en outre d'autres tâches. Dans leur rapport annuel, ils maquillent les renseignements confidentiels et l'identité des personnes de façon à pouvoir prendre une décision générale quant à la façon dont les députés doivent régler tel ou tel problème. C'est extrêmement important. Le jurisconsulte ou le commissaire devraient donc avoir à rendre des comptes au Parlement.
Abstraction faite de tout cela, à moins que l'on ne décide de passer totalement outre au modèle de Westminster, c'est au premier ministre d'assumer la responsabilité de son gouvernement. C'est ce qui se fait partout ailleurs, y compris en Grande-Bretagne, en Australie et également, je crois, en Nouvelle-Zélande. C'est également le cas au Québec. Au Québec, le jurisconsulte ne s'occupe pas des ministres du Cabinet provincial. Ces derniers relèvent exclusivement du premier ministre du Québec.
C'est extrêmement important, puisque, contrairement aux États-Unis, nous n'avons pas d'une part les pouvoirs législatifs et d'autre part les pouvoirs exécutifs. La Chambre des communes comprend à la fois les pouvoirs exécutifs et législatifs. Dans notre régime, c'est le premier ministre qui doit rendre des comptes sur ce que le gouvernement a fait dans un domaine particulier. Il en est de même au Royaume-Uni et en Australie.
Pour s'acquitter de cette responsabilité, le premier ministre m'a demandé de l'aider sur la question de l'éthique en me confiant l'administration du code régissant les conflits d'intérêts. Lorsque j'ai été nommé à ce poste, il a dit qu'il me consulterait à l'occasion pour vérifier les allégations qui pourraient être faites contre les membres de son gouvernement. Mais tout cela se passe entre le premier ministre et moi, puisque c'est lui qui prend la décision finale.
Je ne me suis donc jamais senti coupable... et je n'ai jamais estimé non plus que je n'avais pas suffisamment de pouvoir pour faire mon travail. Au contraire.
M. Epp: Je veux bien, tant que le premier ministre est prêt à agir sur vos recommandations. Mais franchement, monsieur Wilson, on a malheureusement dit à plusieurs reprises que vous faites partie de l'équipe chargée de limiter les dégâts. J'estime que c'est malheureux, car cela empêche votre bureau d'atteindre l'objectif prévu, c'est-à-dire assurer aux Canadiens que vous faites des enquêtes indépendantes et qu'ils peuvent vous faire pleinement confiance.
Vous avez dit ne pas avoir d'exemples concrets de problèmes au sein du gouvernement canadien. Et pourtant les Canadiens n'ont qu'une très faible confiance en leurs députés et en leurs sénateurs. Cela vient probablement de ce que des actes douteux ont déjà été commis. Par exemple, croyez-vous que le code que nous proposons permettrait de révéler qu'un député ou un sénateur reçoit des «honoraires de consultation» de quelqu'un, sans que l'on sache pourquoi? Le code que nous proposons permettrait-il de corriger de tels cas?
M. Wilson: Si j'ai bien compris, monsieur Epp, ce serait le cas, puisque le député serait tenu de déclarer ses revenus ou les contrats qu'il signe avec des entreprises. Cela réglerait donc ce problème.
Lorsque j'ai dit qu'à mon avis il n'y avait pas de problèmes importants... Je ne suis pas au courant d'un grand nombre de problèmes. Bien sûr, des allégations d'actes criminels ont été faites contre certains députés du gouvernement actuel et du gouvernement précédent, mais nous avons des tribunaux pour régler ces cas. On n'a jamais prétendu substituer ce code au Code criminel, par exemple.
M. Epp: Il le complète. Merci.
Le coprésident (M. Milliken): Avez-vous d'autres questions? Sénateur?
Le sénateur Bosa: Vous avez dit que les tribunaux s'occupent de choses qui ne sont pas... Avez-vous mentionné les tribunaux?
M. Wilson: J'ai dit que les tribunaux traitent des affaires relevant du Code criminel, mais qu'à mon avis c'est au Parlement de traiter les questions qui se situent dans cette zone grise. Ces questions-là ne sont pas aussi tranchées; ce sont des questions de jugement. C'est pourquoi un jurisconsulte peut être utile, et pourquoi votre comité doit en assumer la responsabilité.
Le sénateur Bosa: Merci.
Le coprésident (M. Milliken): Avez-vous d'autres questions?
Monsieur Wilson, je vous remercie au nom des membres du comité d'être venu nous faire part de vos opinions. Pour nous, votre avis est très important et très utile, puisque nous arrivons à la fin de nos délibérations. Nous devons terminer nos travaux en mars, et j'ai bon espoir de respecter la date limite cette fois-ci, puisque nous l'avons ratée déjà à quelques reprises.
Cela conclut nos travaux d'aujourd'hui. Je tiens à informer les membres du comité...
[Français]
Mme Tremblay: Habituellement, c'est trois élèves au maximum.
Le coprésident (M. Milliken): Oui, c'est trop.
Le ministre de la Défense nationale a indiqué que nous devions compléter notre travail bientôt. Donc, la prochaine réunion aura probablement lieu le mardi 18 février.
Mme Tremblay: Je ne peux jamais siéger le matin.
Le coprésident (M. Milliken): Le mardi?
Mme Tremblay: Le matin.
Le coprésident (M. Milliken): Très bien. Peut-être que nous pourrions siéger l'après-midi du 18 février.
Mme Tremblay: Ce sera le discours du Budget.
Le coprésident (M. Milliken): Oui, mais le Budget sera à 16 h 30. Nous pourrons peut-être siéger pendant une heure ce jour-là ainsi que mercredi après-midi pour continuer notre travail sur l'ébauche de notre rapport.
Mme Tremblay: Pourrait-on s'entendre tout de suite?
Le coprésident (M. Milliken): Oui, si nous pouvons avoir une salle le 18. Ce sera peut-être problématique à cause du Budget.
[Traduction]
La cogreffière (Mme Savage): Aucune salle ne sera disponible à l'édifice du Centre.
Le coprésident (M. Milliken): Aucune?
La cogreffière (Mme Savage): Aucune. Il n'y en aura pas non plus à l'édifice de l'Ouest, ou très peu.
Le coprésident (M. Milliken): Y aurait-il des salles disponibles au Sénat? N'avons-nous pas réservé une salle au Sénat pour le 18?
La cogreffière (Mme Savage): Cela pose un problème d'enregistrement et de transmission de...
Le coprésident (M. Milliken): Tant pis. Nous verrons ce que nous pouvons faire.
M. Epp: Monsieur le président, il nous sera très difficile d'être présents le mercredi 18.
Le coprésident (M. Milliken): Nous verrons ce que nous pouvons faire. Il faut que nous nous réunissions le mercredi et le jeudi; je ne serai pas là le jeudi.
M. Epp: Le mercredi et le jeudi me conviendraient davantage.
Le coprésident (M. Milliken): C'est ce que nous ferons. Nous nous réunirons le mardi, le mercredi et le jeudi. Il faut que nous terminions notre rapport.
Merci beaucoup. La séance est levée.