[Enregistrement électronique]
Le mercredi 29 janvier 1997
[Traduction]
Le président: Nous rouvrons nos audiences au sujet du projet de réglementation sur les armes à feu. Le sous-comité est présent.
Nous voudrions tout d'abord souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous accueillons deux témoins ici à Ottawa, à savoir M. Alex Gazale, représentant régional de l'est de l'Ontario de l'Institut canadien pour la technologie du thbtre; M. Andrew Campbell, président de Location Cold Blue, est en route de Montréal et devrait donc se joindre à nous sous peu. Je voudrais également souhaiter la bienvenue, au nom du sous-comité, à M. Neil McLeod, de Six Angles Productions Inc., qui est à Vancouver et qui grâce à la vidéo-conférence pourra participer à notre débat.
Au cours des prochaines 75 minutes, nous allons parler de l'incidence des règlements sur l'industrie cinématographique. Je voudrais tout d'abord remercier tous ceux qui sont présents et ceux qui vont bientôt nous rejoindre. Nous espérons également que nous pourrons avoir un bon échange de vues.
Monsieur McLeod, est-ce que M. Tom Adair sera à Vancouver?
M. Neil McLeod (chef accessoiriste, Six Angles Productions Ltd.): Il paraît que les documents de Tom indiquaient 11 heures, et par conséquent il est encore dans son bureau; notre personnel ici essaie maintenant d'établir une liaison téléphonique avec lui.
Le président: Très bien. Nous allons donc commencer. Nous invitons les témoins à faire d'abord leurs exposés, et les membres du sous-comité pourront poser leurs questions par la suite.
Je voudrais commencer par l'exposé de M. Gazale, et ensuite, monsieur McLeod, nous vous demanderons de faire le vôtre. Monsieur Gazale.
M. Alex Gazale (représentant régional de l'est de l'Ontario, Institut canadien pour la technologie du thbtre): Merci, monsieur le président. Je voudrais tout d'abord faire une petite mise au point. Je représente l'industrie des arts de la scène ou des arts du spectacle, plutôt que l'industrie cinématographique et de la télévision. Je représente aujourd'hui l'Institut canadien pour la technologie du thbtre. Je suis actuellement directeur de la production au Centre national des arts.
Honorables membres du comité, je me présente devant vous aujourd'hui pour exposer le point de vue de l'Institut canadien pour la technologie du thbtre. Nous sommes un organisme composé exclusivement de bénévoles qui représentent les personnes qui travaillent dans les coulisses de l'industrie des arts du spectacle au Canada. Notre groupe est composé de directeurs, d'artisans et de techniciens travaillant dans de grandes et de petites entreprises et dans des établissements pédagogiques, ainsi que d'un grand nombre d'amateurs dévoués et de professionnels free-lance, soit un groupe diversifié dont les membres ont les mêmes préoccupations.
Malheureusement, le secteur des arts du spectacle au Canada est assez fragmenté. Il existe des organismes représentant les troupes de thbtre professionnelles et amateurs, les troupes de danse et les compagnies d'opéra, mais les besoins et aspirations de leurs membres sont à ce point dissemblables qu'ils travaillent tous de façon indépendante. Heureusement, les personnes qui travaillent dans les coulisses de ces différentes disciplines font front commun, et c'est la raison pour laquelle je me présente devant vous aujourd'hui.
Comme vous le savez, les arts du spectacle font partie intégrante du tissu social et de l'économie de ce pays. Ce secteur englobe non seulement les grands projets commerciaux et les productions à but non lucratif mais aussi le travail des membres dévoués de troupes de thbtre communautaires. D'après Statistique Canada, il y a eu plus de 38 698 représentations entre 1993-1994, auxquelles ont assisté 13 263 731 spectateurs. Des troupes d'arts d'interprétation ont dépensé plus de 386 millions de dollars au cours de cette période, par rapport à des recettes de 383 millions de dollars. En 1994-1995, 36 300 personnes travaillaient dans le secteur des arts du spectacle en Ontario.
Il ne faut pas confondre les arts du spectacle avec nos cousins de l'industrie du film et de la télévision. Bien que nous ayons un même objectif, soit présenter des spectacles, nos méthodes de travail et nos ressources sont fort différentes. Par exemple, la plupart des organismes artistiques engagent des artisans- accessoiristes à plein temps ou pour la saison. Dans le cas des troupes de thbtre communautaires, le travail est fait par des bénévoles, qui achètent et fabriquent tous les meubles, s'occupent de l'habillage du décor et des accessoires, ce qui comprend les armes.
La plupart des maisons de production cinématographique engagent des spécialistes pour chaque catégorie d'accessoires - habillage du décor, armes, etc. Le nombre d'armes utilisées pour un seul film d'action dépasse sans doute le nombre total d'armes utilisées dans les arts du spectacle dans toute une année.
À mon avis, les projets de règlement influeront sur notre secteur, notamment en raison des frais qui devront désormais être supportés pour l'obtention de permis, etc., et des nouvelles dispositions relatives aux répliques. Les troupes d'arts d'interprétation qui se servent d'armes dans leurs productions le font sans attirer l'attention du public là-dessus, étant donné qu'il s'agit de simples accessoires. Il n'en reste pas moins que ces armes doivent être gardées en lieu sûr et manipulées avec soin. La nécessité d'utiliser des armes va également dépendre des besoins de chaque production individuelle et de la vision artistique des metteurs en scène, dessinateurs et chorégraphes.
Rappelez-vous que les centaines de troupes d'arts d'interprétation qui existent actuellement ont des moyens financiers fort différents. Si certaines oeuvres ne pouvaient plus être exécutées sur scène simplement parce que les armes que requièrent le scénario ou l'action sur scène ne sont pas disponibles, pour des raisons de frais excessifs ou de restrictions réglementaires, les arts du spectacle au Canada s'en trouveraient appauvris, à mon avis. Par exemple, la décision de Nepean Players de monter une pièce policière doit être fondée sur des facteurs artistiques et financiers, et non sur la possibilité d'obtenir une réplique qui a l'air réaliste.
Aux termes du projet de loi C-68, une réplique correspond à tout objet qui n'est pas une arme à feu mais qui est conçu de façon à en avoir l'apparence exacte - ou à la reproduire le plus fidèlement possible - ou auquel on a voulu donner cette apparence, et qui est considéré comme un dispositif prohibé. Si nous recourons à de tels articles, c'est parce qu'ils sont plus sûrs que de vraies armes à feu tout en leur ressemblant suffisamment pour convaincre le public qu'il s'agit d'armes authentiques. Nous trouvons un peu ironique qu'ils soient considérés plus dangereux que des répliques capables de tirer à blanc, qui peuvent infliger des blessures.
Exiger que les entreprises et les individus qui recourent à ces dispositifs pour les fins prévues par la loi détiennent le même permis que ceux qui possèdent des armes prohibées nous semble excessif. La réglementation devrait donc prévoir que les troupes d'arts d'interprétation qui se servent exclusivement de répliques pour les fins des arts d'interprétation uniquement soient autorisées à le faire, sans que les individus qui sont responsables de ces articles soient tenus d'obtenir un permis de possession d'armes à feu prohibées.
En l'absence d'une telle disposition, un organisme ferait mieux d'acheter une vraie arme à feu, étant donné qu'il aurait un permis en bonne et due forme qui lui permette de le faire et que les vraies armes à feu sont plus faciles à obtenir que les répliques. Il va sans dire que telle n'est pas l'intention du projet de réglementation.
Nous ne comprenons pas très bien en quoi consiste l'activité commerciale d'un «fournisseur de productions thbtrales ou d'activités d'édition». Une organisation ou troupe d'arts d'interprétation qui possède, acquiert ou fabrique ses propres armes n'est pas un fournisseur mais un utilisateur. La réglementation ne semble aucunement tenir compte de cette pratique, qui est la plus répandue.
Comme on vous l'a déjà dit, il n'est pas fréquent de recourir aux services d'un fournisseur de décors ou d'accessoires externes, sauf peut-être dans les grands centres métropolitains dont le niveau d'activités du secteur des arts du spectacle est considérable. L'adjonction des mots «et utilisateur» après le terme «fournisseur» permettrait d'éliminer cette ambiguïté.
Aux termes du projet de réglementation, une entreprise qui voudrait fabriquer une réplique serait tenue de se procurer un permis de fabrication ou d'assemblage visant les dispositifs prohibés. La fabrication de répliques est loin d'être courante et ne se fait que sporadiquement. Encore une fois, nous cherchons à créer des effets réalistes et par conséquent, si une production l'exige, il peut nous arriver de fabriquer une arme, telle qu'une arme à feu en caoutchouc pour répondre à ce besoin. Des armes de ce genre peuvent ne pas être disponibles ou coûtent trop cher, et à ce moment-là, les accessoiristes les fabriquent. Il va sans dire que cette pratique est vouée à disparaître si un organisme artistique ou fournisseur d'accessoires va désormais devoir se procurer un permis relativement coûteux, au cas où il aurait besoin de fabriquer un tel article.
Encore une fois, je recommanderais que la réglementation prévoie la fabrication de répliques pour les fins des arts du spectacle et que le permis commercial prévu pour fournisseurs de productions thbtrales vise également cette activité-là.
Les dispositions visant le transport des répliques, telles qu'elles sont libellées dans le projet de réglementation, nous semblent excessives en ce qui concerne les répliques. Beaucoup d'organisations artistiques disposent d'un grand nombre d'installations qu'elles utilisent pour des activités différentes. Il arrive fréquemment qu'une réplique ou une arme soit transportée de la salle de répétition jusqu'au magasin des accessoires pour être peinte, et transportée à nouveau sur la scène pour une répétition qui a lieu le même jour. Si les installations en question se trouvent dans des bâtiments différents, nous serions tenus de prévenir le contrôleur des armes à feu de ces deux déplacements dans le courant d'une seule journée de travail, ce qui semble être une procédure excessivement bureaucratique. Le transport entre les différents bâtiments d'une même entreprise ne devrait pas être visé par cette réglementation.
Notre utilisation des armes dans les arts du spectacle n'a pas vraiment été remarquée jusqu'à présent et n'a surtout pas été réglementée. Nous appuyons toute initiative qui doit permettre de mettre de l'ordre dans nos activités, mais nous demandons simplement que notre situation particulière soit prise en compte. Il y a beaucoup plus de troupes de thbtre communautaires que d'organisations professionnelles au Canada. Pour les gens qui participent à ces productions communautaires, il s'agit d'un passe- temps qui leur procure du plaisir plutôt que des gains. Des droits de 50 $ pour l'obtention d'un permis nous semblent raisonnables, mais peuvent être trop élevés pour les petits groupes. Mais ce qui seraient vraiment excessif, ce serait d'exiger que ces personnes suivent un cours intensif sur l'utilisation des armes à feu prohibées simplement pour pouvoir utiliser une réplique. Il faut absolument trouver des solutions pratiques et peu coûteuses aux problèmes que nous avons décrits afin que les arts du spectacle puissent continuer de prospérer à tous les niveaux.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Gazale.
Monsieur McLeod, pourriez-vous nous faire votre exposé? Êtes- vous prêt?
M. McLeod: Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité. Je m'appelle Neil McLeod. Je travaille actuellement comme chef accessoiriste dans l'ouest du Canada et dans l'État de Washington, et je fournis des armes à feu à l'industrie cinématographique en Colombie-Britannique, en Alberta et dans l'État de Washington. Je suis actif dans ce secteur depuis environ 25 ans, et j'ai eu l'occasion de travailler à divers projets, tels que Legends of the Fall, dans lequel nous avons dû monter une scène de bataille de la Première Guerre mondiale avec 850 figurants qui se tiraient dessus dans la boue avec des mitrailleuses et divers autres types de dispositifs explosifs et d'armes à feu.
Donc, aussi rapidement que possible, je vais lire le mémoire que j'ai préparé pour le comité.
Honorables membres du comité, certains aspects de la Loi sur les armes à feu auront de très graves répercussions négatives sur l'industrie cinématographique et de la télévision en Colombie- Britannique et en Alberta. Nous exhortons le comité à atténuer les répercussions négatives de la Loi en proposant des modifications à la réglementation d'accompagnement de la Loi.
Dans l'ouest du Canada, comme dans l'industrie californienne, le chef accessoiriste pour chaque production est directement responsable des armes utilisées. Normalement, on n'a recours à une entreprise ou à un armurier indépendant et accrédité que si les armes dépassent l'expertise technique du chef accessoiriste ou le champ d'application de son permis, c'est-à-dire, les armes prohibées, les armes entièrement automatiques, et ce genre de chose.
Certains aspects des nouvelles restrictions auront une grave incidence sur nous. La création d'une nouvelle catégorie d'armes à feu et de dispositifs prohibés, à l'article 84 du chapitre 39, aux pages 70 et 71, signifie désormais, aux termes de la réglementation proposée, que tous les chefs accessoiristes de l'ouest du Canada - une quarantaine de personnes - devront se procurer un permis commercial qui coûte 1 250 $ par année pour continuer de faire leur métier. Les compagnies de production ont l'habitude de payer les chefs accessoiristes pour que ces derniers leur fournissent des armes à feu à titre d'accessoires. Le secteur de la production cinématographique va souffrir si les entreprises doivent désormais engager une entreprise accréditée, moyennant 300 $ par jour, pour superviser l'utilisation des pistolets de petit calibre, des armes de poing à canon court et des répliques.
Ces nouvelles armes prohibées - c'est-à-dire les pistolets de petit calibre, les armes à feu à canon court et les répliques - sont prohibées parce qu'on considère qu'elles sont faciles à cacher. Mais en réalité, elles ne sont pas plus dangereuses et ne posent pas plus de risque pour la sécurité publique que les armes de poing à canon long et de calibre élevé à autorisation restreinte. Le fait qu'on puisse plus facilement les cacher les rend justement plus intéressantes du point de vue de la progression de l'intrigue d'un film.
Cette restriction vise les revolvers de police munis d'un canon de quatre pouces. Pour vous dire la vérité, je ne sais pas si le choix d'un seuil de 105 millimètres avait vraiment cet objectif, ou si c'est le résultat d'une conversion métrique incorrecte et arbitraire. En modifiant cette disposition pour qu'elle vise les armes à feu munies de canon de 103 millimètres ou moins, les revolvers de police qui ont un canon de quatre pouces resteraient dans la classe des armes à autorisation restreinte. Une différence de 2 millimètres a le potentiel de créer pour nous un problème grave et coûteux.
Il semble qu'il doit y avoir une procédure par laquelle nous qui utilisons ces articles dans un environnement contrôlé sur une base quotidienne puissions être exclus de l'application des règlements rigoureux qui visent la société en général. Si nous sommes responsables de la sécurité des armes à autorisation restreinte, il semble normal que nous puissions continuer d'être responsables des armes à feu à canon court et de petit calibre qui sont des armes à autorisation restreinte uniquement parce qu'elles sont faciles à dissimuler.
La deuxième grande question que soulève cette réglementation est celle des répliques. Je comprends très bien que le Centre canadien des armes à feu est toujours aux prises avec les problèmes que pose l'interdiction des répliques pour l'industrie cinématographique et le secteur de la production thbtrale. Les règlements visant spécifiquement les répliques sont encore en voie d'élaboration, et nous sommes convaincus qu'il sera possible de trouver une solution pratique. Quelques données générales sur l'utilisation intensive que nous faisons de telles armes, et qui expliquent par conséquent notre opposition à la prohibition prévue - vous aideront peut-être à trouver une formule qui nous permette d'appliquer cette réglementation.
La définition d'une réplique - Alex en a parlé en détail, bien entendu - telle qu'elle figure à l'article 84 du chapitre 39, à la page 71, vise le genre d'articles que nous employons tous les jours pour donner l'illusion d'une vraie arme à feu. Nous utilisons de fausses armes à feu parce qu'utiliser une réplique qui ne tire pas est évidemment plus sûr, moins coûteux, et nous permet d'échapper aux contrôles rigoureux qui visent les vraies armes à feu. Les policiers en uniforme qu'on voit à l'écran ne portent de vraies armes à feu que lorsqu'ils doivent vraiment tirer. À tout autre moment, leur étui ne contient qu'une réplique.
Les cascades ne peuvent cependant être réalisées en l'absence de répliques sécuritaires de véritables accessoires. Les cascadeurs se servent presque toujours d'une réplique de caoutchouc ou de plastique pour tomber de cheval ou sauter d'une fenêtre, simuler un coup sur la tête, ou encore pendant les poursuites en voiture. Pour toutes les scènes d'action, si la cascade exige que l'acteur ou que le cascadeur soit frappé avec un objet, on en fait une copie en caoutchouc ou en plastique pour assurer la sécurité des participants. Il peut s'agir de répliques en caoutchouc de couteaux, qui doivent ressembler à de vrais couteaux, de répliques en caoutchouc de haches, de clés à tube, de poêles à frire, de cafetières, et même de livres.
Le déroulement fort complexe de certaines cascades exige nécessairement beaucoup d'entraînement et de nombreuses répétitions. Par conséquent, il arrive fréquemment qu'on donne des copies en caoutchouc ou des répliques d'armes à feu aux acteurs et cascadeurs pour qu'ils puissent s'en servir pendant les répétitions hors plateau. Utiliser une vraie arme à feu pour ce genre de travail serait irresponsable.
J'espère que la caméra va vous permettre de voir les répliques que j'ai apportées avec moi. N'ayez pas peur. Ces armes à feu sont en caoutchouc. Ce sont des copies moulées de vraies armes à feu, mais elles sont faites d'un caoutchouc suffisamment mou pour ne pas me faire mal si l'on s'en sert pour me donner un coup sur la tête. Si je tombais d'un cheval ou d'une voiture avec cette réplique dans mon étui, je ne me ferais pas mal.
Elles existent dans un grand nombre de formes et de tailles différentes. Celle-ci est un revolver de police typique en caoutchouc. Celle-ci est une version en caoutchouc d'un pistolet antique, qui n'est pas une arme prohibée étant donné qu'il s'agit d'une réplique d'une antiquité, et il en va de même pour cette petite arme en plastique. Ce que je vous montre maintenant, c'est un corps de lampe qui a la forme d'un colt à six coups. J'ai apporté ces quelques répliques à titre d'exemples, pour que nous soyons sûrs de bien comprendre la nature et l'objet des armes en caoutchouc.
Nous fabriquons nos propres répliques pour satisfaire les besoins d'un film d'action. À un moment donné dans le film, il faut tirer. Très souvent, ce genre de scène et un gros plan du chargement - c'est-à-dire du chargement de l'arme à feu - sont les seuls plans où on a besoin d'une vraie arme à feu. Nous nous servons de la véritable arme à feu pour faire un moule qui nous permet d'obtenir des répliques en caoutchouc de différends poids et de différents degrés de dureté. Pour les plans de mêlées ou de luttes, nous nous servons d'une copie en caoutchouc qui n'infligera pas de blessures si quelqu'un reçoit un coup accidentellement. Elle est suffisamment résistante pour ne pas se plier ou se déchirer pendant l'action. Elle flotte aussi, de sorte qu'on peut la récupérer si elle tombe dans l'eau. Par contre, pour les plans où l'arme tombe dans l'eau, elle doit nécessairement s'enfoncer dans l'eau, et certaines copies sont munies de poids spéciaux pour leur permettre justement de s'enfoncer.
Pour certaines cascades, on peut avoir besoin de 10 ou 15 copies différentes d'une arme particulière. Dans ces conditions-là, vous comprendrez qu'il serait ridicule de se servir d'armes à feu réelles.
La dépense qu'impliquent les services d'une entreprise autorisée à fournir ce genre de matériel et à surveiller son utilisation 15 heures par jour ferait monter les coûts de production de plusieurs milliers de dollars, alors que cet argent ne servirait qu'à payer une sorte de «baby-sitter», sans que la maison de production en retire des services ou quelque valeur que ce soit. Ainsi classer ce matériel dans la catégorie des armes prohibées et exiger l'obtention d'un permis qui coûte 1 250 $ par année pour le posséder va certainement nuire à notre industrie.
Il serait juste de dire que, dans l'industrie de la production cinématographique, nous utilisons un grand nombre d'armes à feu dans le cadre de notre travail beaucoup plus souvent que d'autres groupes d'utilisateurs au Canada. Il nous incombe par conséquent de nous assurer qu'elles sont gardées en lieu sûr et qu'elles ne tombent pas entre de mauvaises mains. Cependant, à condition que nous les utilisions dans un environnement contrôlé, que les contrôleurs des armes à feu sachent où elles se trouvent et que les conditions de transport, de manutention et de sécurité satisfassent ou dépassent les conditions du contrôleur, ces armes à feu ne peuvent poser la moindre menace à la sécurité du public.
Au risque de vous proposer la solution de facilité, il nous semble que la solution la plus pratique aux nombreux problèmes que crée la loi consisterait à créer une disposition qui autorise l'utilisation d'armes à feu, ou prévoit l'obtention d'un permis à cette fin, dans les conditions particulières de l'industrie cinématographique ou des productions thbtrales. La création d'un tel permis représenterait une solution de rechange acceptable pour tous les individus responsables qui doivent manipuler ces armes nouvellement prohibées, mais qui ne souhaitent pas établir une entreprise.
Au fil des ans dans l'ouest du pays, les chefs accessoiristes, les contrôleurs des armes à feu et la GRC ont collaboré pour créer un système raisonnable prévoyant une série de variations pour le permis de port. Vu les conditions très souples qu'il prévoit, il s'agit d'un permis qui vise uniquement l'industrie cinématographique. Les conditions à remplir concernent le lieu et le calendrier de production précis et le tirage de cartouches à blanc exclusivement. Si l'une quelconque des conditions prévues au permis n'est pas remplie, le permis est annulé, le titulaire du permis est en contravention de la Loi sur les armes à feu, et le permis peut donc être révoqué.
Nous recommandons fortement l'adoption de ce genre de formule, conjointement avec d'autres catégories de permis qui sont énumérées dans le projet de réglementation à l'article 9 des annexes I et II, à l'article 10 de l'annexe III, et à l'article 13 de l'annexe 14, aux pages 64 à 72.
Il est tout à fait possible qu'un accessoiriste ait besoin de trois ou quatre permis «temporaires» dans le courant d'une année.
Quelqu'un d'autre peut ne pas en avoir besoin du tout pendant toute une année mais peut en requérir deux ou trois l'année suivante, et ainsi de suite. Pour atténuer la charge administrative que représente un tel système, je propose que l'accessoiriste détienne un permis de possession et d'acquisition de type c), c'est-à-dire pour les armes à feu prohibées, conformément au libellé de la page 65.
Deuxièmement, il serait possible à ceux qui voudraient en faire la demande, d'obtenir un permis qui serait délivré uniquement aux représentants de l'industrie cinématographique, et serait valide pendant deux ans au coût de 160 $.
Ce permis autoriserait la cession temporaire à ces mêmes représentants - et non la possession - d'armes et de dispositifs prohibés, y compris les arbalètes, les armes entièrement automatiques et les instruments de destruction de masse. Ainsi ces individus pourraient posséder des objets qui, tout en étant prohibés, ne sont pas en soi plus dangereux et n'exigent pas plus de formation et de sécurité que les armes à feu à autorisation restreinte, qu'ils sont autorisés à manipuler et à posséder tous les jours.
Le permis susmentionné visant l'utilisation dans l'industrie cinématographique ne serait valide que s'il était accompagné d'un avis du contrôleur des armes à feu ou de son représentant indiquant que le titulaire de permis travaille vraiment, à ce moment particulier, pour l'industrie cinématographique. Par conséquent, si le titulaire était entre deux productions ou en vacances, etc., son permis ne serait pas valable et il ne pourrait à ce moment-là être cessionnaire d'armes ou de dispositifs prohibés. L'individu serait tenu d'obtenir une preuve écrite de son statut d'actif de son employeur et de la fournir au contrôleur des armes à feu.
Je vous exhorte à recommander l'inclusion d'un article dans la réglementation qui offrirait ce genre de flexibilité à l'industrie. Il s'agirait d'offrir une solution de rechange à un individu qui serait tenu autrement de s'inscrire en tant qu'entreprise, de payer des droits annuels élevés correspondant à 1 250 $, et d'utiliser des systèmes d'entreposage et de sécurité fort sophistiqués et coûteux pour manipuler des objets qui ne sont pas plus dangereux que ceux qu'il manipulerait normalement moyennant un permis qui coûte 80 $ et qui est valide pendant cinq ans.
J'ai d'autres préoccupations également, que je n'ai pas le temps de vous expliquer en détail maintenant. Elles sont exposées dans mon document, dont vous pourrez tous obtenir une copie, et je vais donc en rester là. Merci infiniment.
Le président: Merci beaucoup, monsieur McLeod.
Avant d'ouvrir la période des questions, nous allons donner la parole à un autre témoin de Vancouver, M. Adair, si je ne m'abuse, dont on vient de me signaler la présence. Il va faire son exposé depuis son bureau, à Vancouver.
M. Tom Adair (représentant commercial, Techniciens de la production de longs métrages en studio): Oui.
Le président: Monsieur Adair.
M. Adair: Oui, je vous reçois parfaitement.
Le président: Très bien. Nous sommes très heureux de vous accueillir parmi nous. Je tiens à vous remercier de votre persévérance et d'avoir accepté de faire votre exposé. Êtes-vous prêt à commencer?
M. Adair: Oui.
Le président: Veuillez donc commencer. Nous sommes prêts et nous avons hâte de vous entendre.
M. Adair: Merci beaucoup.
Je vous ai fait parvenir mon mémoire et je voudrais simplement faire quelques remarques au sujet de ce dernier.
À la première page de ce mémoire, j'essaie de vous donner un aperçu général de notre secteur d'activité, afin que vous puissiez comprendre l'important effet d'entraînement que pourrait avoir cette réglementation. Dans notre secteur d'activité général au Canada - et notamment en Colombie-Britannique, étant donné le grand nombre de productions américaines qui y sont tournées - les armes à feu visées par la réglementation actuellement en place sont utilisées dans 75 % de nos productions.
La réglementation influe non seulement sur la partie de la production où l'on utilise des armes à feu, mais sur la production dans son ensemble, puisqu'elles sont essentielles à l'oeuvre qu'on essaie de créer. Même si l'on peut penser qu'il s'agit d'une infime partie de la production dans son ensemble, l'équivalent serait une voiture dont les roues seraient privées d'écrous. Si les roues tombent, la voiture ne peut pas rouler. Voilà la raison pour laquelle cette réglementation nous préoccupe tant.
Quant à nos principales préoccupations, je commence par aborder la question du pouvoir réglementaire à la page 2 de mon mémoire, car à cet égard, nous cherchons à obtenir un ensemble de lignes directrices. Si les politiques et procédures visant l'industrie cinématographique et télévisuelle sont élaborées en collaboration avec les représentants de cette industrie-là et du secteur des productions thbtrales dans tout le Canada - et le Centre canadien des armes à feu a déjà indiqué qu'il envisage de prendre une telle orientation, nous aimerions qu'elles soient bien définies. Nous craignons que s'il existe des règlements différents dans toutes les régions du pays, la capacité de l'industrie de la production cinématographique de tourner des films dans plusieurs provinces serait peut-être moindre, et en l'absence d'un ensemble de politiques et de procédures bien définies, les contrôleurs des armes à feu s'appuieront sur les règlements pour appliquer la loi, et nous ne saurions plus quoi faire. Je pense que la loi confère aux autorités le pouvoir d'élaborer de tels règlements, mais ceux-ci n'ont pas encore été assez bien définis pour nous permettre de savoir comment ils s'appliqueront.
En ce qui concerne nos préoccupations au sujet des règlements, à l'article 11, page 30, on précise les conditions à remplir quand on transporte une arme prohibée d'un endroit à l'autre - notamment, qu'il faut en informer le contrôleur des armes à feu; mais il n'est pas inhabituel de filmer une émission dans un grand nombre de localités ou de décors différents, de sorte qu'énormément d'information sont échangée constamment entre ces différentes localités. Quand il s'agit de productions multiples, ça crée des bouchons par rapport à la procédure de communication. Si je vous en parle, c'est parce que les procédures que prévoit le projet de réglementation, telles qu'elles ont été décrites, seraient très peu pratiques pour notre industrie.
En ce qui concerne l'octroi des permis, nous nous inquiétons de ce qu'il existe un seul permis qui concerne essentiellement le haut de gamme des armes à feu prohibées et utilisées dans l'industrie mais qui englobe tant d'autres dispositifs et armes qu'il n'est pas pratique pour nous; il nous faut donc toute une série de permis qui nous permettent de tenir compte d'autres facteurs.
Comme le disait Neil McLeod, cela nous permettra peut-être de régler le problème de l'arme à feu prohibée à canon court qui est classé dans cette catégorie parce qu'elle est facile à dissimuler. Mais il y a une chose qui distingue notre secteur d'autres utilisateurs, à savoir que bon nombre de ces armes à feu sont louées. Elle n'appartienne pas aux individus qui les utilisent; on les loue à partir d'un bureau d'entreposage central. Et la personne qui en serait responsable détiendrait le permis industriel - celui qui coûte cher. Mais la principale utilité des gens qui fournissent ces armes à feu aux compagnies de production n'est pas de fournir ce genre de matériel et ils n'ont pas tellement envie de le faire non plus. Ils n'ont pas le droit de posséder et d'utiliser ces armes à feu à titre individuel.
Il serait peut-être possible, comme le suggère Neil, de permettre à ces individus de se procurer un permis industriel pour faible utilisation, réglant ainsi ce problème, et de créer une autre forme de permis pour les répliques; voilà notre autre grande préoccupation car, étant donné le libellé actuel de la loi et les définitions qu'on y retrouve, les répliques seront jugées plus dangereuses, à mon sens, que d'autres dispositifs.
Nous cherchons donc un ensemble de politiques et procédures qui nous permettent de nous conformer aux règlements; en même temps, nous ne savons pas pour le moment en quoi ils consistent et nous avons très peur de règlements mal définis qui ne nous permettront pas d'offrir des services adéquats aux compagnies qui en ont besoin dans les délais très serrés qui nous sont impartis.
Ce que nous craignons le plus, c'est la possibilité qu'un agent de la paix qui ignore que ces autres possibilités ont été prévues, décide d'arrêter quelqu'un qui travaille dans l'industrie cinématographique et que la production soit interrompue parce que cet individu ne peut pas se procurer les armes à feu prohibées qu'il doit envoyer, ou encore lorsqu'elles sont commandées aux États-Unis, elles ne peuvent passer la frontière, parce qu'un douanier ne dispose pas de politiques et de procédures bien définies qu'il peut appliquer et qui vont nous permettre de faire notre travail.
À mon avis, ce serait très avantageux pour notre industrie que nous disposions des mêmes politiques et procédures d'un bout à l'autre du pays.
Donc, il faut plusieurs types de permis pour nous permettre de régler ces problèmes.
Voilà donc pour mon exposé. J'explique toutes ces questions en détail dans mon mémoire, mais je me tiens évidemment à votre disposition pour répondre à vos questions.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Adair. Vos commentaires sont très utiles.
Nous allons maintenant ouvrir la période des questions. Les membres du sous-comité pourront interroger les trois témoins, s'ils le désirent. Je donne d'abord la parole à M. de Savoye.
[Français]
M. de Savoye (Portneuf): Messieurs Adair, Gazale et McLeod, j'ai écouté attentivement vos présentations. Elles nous révèlent un peu les secrets de votre métier. Ces révélations vont peut-être nous ôter quelque peu le plaisir du mystère qui entourait vos façons de faire. D'autre part, je crois qu'il est nécessaire de souligner que nos sociétés déplorent de plus en plus la violence dont on est témoins dans les films que l'on peut voir au cinéma ou à la télévision.
Je comprends votre préoccupation et je suis convaincu que vous constatez, tout comme les membres de ce sous-comité, que l'objet de ces projets de réglementation n'était pas et n'est pas d'empêcher des entreprises et des industries légitimes d'arriver correctement aux fins qu'elles poursuivent.
J'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt des recommandations formulées par M. McLeod, qui concernent plus particulièrement l'industrie du cinéma; peut-être pourraient-elles s'appliquer tout aussi bien au thbtre. Afin de voir si ces recommandations de M. McLeod peuvent être universelles, j'aimerais demander à M. Gazale si ce qu'il a entendu de la part des représentants de l'industrie du film pourrait satisfaire aux besoins du thbtre ou s'il y a des différences dont on devrait tenir compte.
M. Gazale: La différence la plus importante entre le cinéma et le thbtre se situe au niveau de l'utilisation des armes à feu. Au thbtre, l'arme à feu doit être sur le plateau pendant plusieurs heures, pendant toute la durée de la pièce. Au cinéma, elle n'y est que pour quelques secondes ou quelques minutes, après quoi elle peut être reprise en main. C'est pourquoi nous nous servons très fréquemment de répliques pour éviter les dangers.
De plus, les compagnies de thbtre disposent de moyens bien moindres que ceux des compagnies de cinéma. Dans la plupart des cas, comme je l'ai dit dans notre présentation, dans les petites troupes de thbtre, un individu est responsable des accessoires, mais il doit aussi s'occuper de diverses autres choses. Au cinéma, c'est une compagnie qui fournit ces accessoires et qui les remet à un des membres de l'équipe. C'est pourquoi nous pensons qu'une compagnie de thbtre ou une compagnie fournissant des accessoires pourrait être régie par cette réglementation, mais que les individus, surtout ceux qui manipulent des répliques, ne devraient pas y être assujettis.
Quand il s'agit de vraies armes à feu, il est absolument nécessaire que tous les individus aient les permis nécessaires et soient responsables sur place. On se sert de répliques pour ne pas avoir d'articles dangereux dans nos salles et en coulisses. Nous n'estimons pas nécessaire d'exiger les mêmes permis pour les répliques que pour des armes à feu très dangereuses.
M. de Savoye: Je vous remercie de ces précisions, monsieur Gazale.
Monsieur McLeod, vous nous avez expliqué plus tôt que dans votre industrie, vous pourriez avoir besoin de plusieurs types de répliques pour des fins particulières lors du tournage d'un seul film. On comprendra que si ces répliques tombaient entre de mauvaises mains, on pourrait en faire un mauvais usage. Quelles précautions prenez-vous pour éviter que ces répliques ne tombent entre de mauvaises mains et qu'on en fasse un mauvais usage? Entre autres et plus particulièrement, que faites-vous de ces répliques après le tournage?
[Traduction]
M. McLeod: Comme c'est le cas pour tout objet potentiellement dangereux, les répliques ne sont visibles aux autres membres de l'équipe et aux acteurs qu'au moment où on les prépare pour le tournage, pendant le tournage et pendant quelque temps après.
Quand il est clair que nous n'avons plus besoin d'un article particulier, dans certains cas, nous le remettons dans un tiroir fermé qui se trouve à l'intérieur d'une boîte à outils ordinaire, bien que ce soit une grande boîte à outils sur roulettes. Peu de temps après, on remettrait l'article dans notre gros camion d'accessoires - dans certains cas, c'est un camion de 40 pieds de long - qui se trouve toujours sur le plateau de chaque projet. Ce camion contient une chambre forte qui est vissée au cadre du camion à plusieurs endroits. On garde tout ce matériel dans la chambre forte à l'intérieur du camion fermé à clé. Dans la plupart des cas, s'il s'agit d'un objet potentiellement dangereux - comme les armes entièrement automatiques, par exemple - quelqu'un reste toujours à l'extérieur du camion et personne ne peut pénétrer dans le camion à moins d'être membre du service des accessoires - même pas le producteur de l'émission.
Mais pour faire une petite mise au point concernant la réponse d'Alex, dans le document que je vous ai présenté, je défends en réalité les individus. Moi je suis une entreprise; dans ce sens-là, je suis une entreprise accréditée. Mais je veux défendre tous les autres chefs accessoiristes qui estiment faire ce travail en tant qu'individus et qui auraient besoin d'une catégorie spéciale de permis industriel. Je voulais que ceci soit clair.
[Français]
M. de Savoye: Monsieur McLeod, vous nous avez expliqué les précautions qui sont prises, et qui m'apparaissent fort complètes, pour protéger tant les répliques que les armes à feu elles-mêmes. Est-ce que ces précautions ou mesures font partie de normes dans votre industrie ou si les pratiques de certains membres de votre industrie sont moins rigoureuses?
[Traduction]
M. McLeod: Les normes que nous appliquons comprennent, d'une part, nos propres normes, qui sont appliquées par le service des accessoires, qui comprend tous ceux qui travaillent pour ce service. Quand je parle du service des accessoires, je fais référence, en l'occurrence, aux membres de la section locale 891 de l'Alliance internationale des employés de la scène et des projectionnistes des États-Unis et du Canada (IATSE) qui desservent l'industrie cinématographique à Vancouver. Chaque membre du service des accessoires qui est membre de la section locale du syndicat reçoit une copie d'un ensemble de lignes directrices et de procédures, que nous appliquons à tout moment pour assurer une certaine uniformité dans toute l'industrie.
En plus de nos propres pratiques et lignes directrices, nous suivons, bien entendu, toutes les recommandations du contrôleur des armes à feu. Nous demandons l'approbation de nos installations de sécurité par le contrôleur chaque fois que nous présentons une demande de permis. Si nous comptons tourner dans certains quartiers d'une ville où des précautions supplémentaires seraient justifiées, il peut faire des recommandations en matière d'entreposage et de sécurité. À ce moment-là, nous devons suivre ses recommandations étant donné que le permis est assorti de cette condition-là, comme je l'expliquais dans mon document.
[Français]
M. de Savoye: Monsieur McLeod, j'ai cru comprendre lors de votre de votre présentation que vous travailliez également dans l'État de Washington. Est-ce que les lois américaines, au palier fédéral ou à celui de l'État, ont quelque impact sur vos opérations? Quelles sont les lois qui vous touchent aux États-Unis?
[Traduction]
M. McLeod: Bien que les lois soient un peu différentes en ce qui concerne l'obtention de ces objets, les mesures de sécurité prévues varient tout autant aux États-Unis qu'au Canada. Dans certains cas, on fait appel au bon sens des utilisateurs et à leur désir de protéger la sécurité de notre société, alors que dans d'autres, les autorités fédérales, des États et des municipalités ont adopté des recommandations précises visant ce genre d'objets. Il existe très peu de différence entre les recommandations en matière de sécurité et d'acquisition des différentes armes à feu de l'État de Washington, de la Colombie-Britannique et de l'Alberta. Elles sont peut-être plus rigoureuses dans l'État de Washington qu'elles ne le sont actuellement en Colombie-Britannique et en Alberta.
M. de Savoye: Y a-t-il des frais de licence dans l'État de Washington? Dans l'affirmative, pourriez-vous nous dire à combien ils se montent?
M. McLeod: Mon permis pour l'État de Washington est en réalité un permis d'armes à feu délivré par les autorités fédérales américaines, qui coûte 100 $ par année.
[Français]
M. de Savoye: Merci beaucoup.
[Traduction]
Le président: Monsieur Ramsay.
M. Ramsay (Crowfoot): Merci, monsieur le président. Je voudrais remercier les témoins de l'industrie de leur présence aujourd'hui.
Dans quelle mesure l'utilisation des armes à feu dans votre industrie représente-t-elle une menace pour la sécurité de la société? J'aimerais que nos trois témoins me répondent, et nous pourrions peut-être commencer par celui qui se trouve dans notre salle de comité.
M. Gazale: Vous voulez dire l'idée de monter des pièces qui nécessite l'utilisation d'armes à feu, ou le fait d'utiliser ces armes à feu sur la scène?
M. Ramsay: J'aimerais tout d'abord que vous nous disiez depuis combien de temps vous travaillez dans ce domaine. Deuxièmement, d'après votre expérience professionnelle, l'utilisation des armes à feu dans cette industrie a-t-elle représenté jusqu'à présent une menace pour la sécurité de la société?
M. Gazale: Je travaille dans ce domaine depuis environ 22 ans, ayant gravi les échelons depuis l'époque où j'ai commencé dans un tout petit thbtre de Montréal jusqu'à mon poste actuel, au Centre national des arts. D'après ma propre expérience professionnelle, le recours aux armes à feu a toujours été très sporadique. D'après mon souvenir, nous avons utilisé les armes à feu sur la scène peut-être une douzaine de fois en tout. Dans tous les cas sauf un, il s'agissait de répliques ou d'armes à feu qui avaient été converties pour tirer à blanc. Dans un seul cas, nous avons utilisé une vraie arme à feu pendant une très courte période, comme cela coûtait moins cher de la louer à un armurier-accessoiriste à Montréal que d'acheter une réplique.
M. Ramsay: Pourriez-vous décrire aux membres du comité quelle serait selon vous l'incidence économique de ces règlements s'ils étaient adoptés sans modification.
M. Gazale: Dans le cas des institutions plus importantes qui s'en servent dans différents contextes, comme nous, étant donné que nous ne savons pas plus d'un an ou quelques mois à l'avance quels spectacles nous allons monter, nous serions obligés d'avoir des permis valides pendant assez longtemps. Par contre, je suppose que l'incidence sur les grandes organisations professionnelles ne serait pas si importante. Quant aux groupes amateurs et communautaires, l'impact pourrait très bien être considérable. Certaines organisations dépensent plusieurs centaines de dollars pour toute une production. Donc, pour maintenir un permis qui coûte 400 $ - car tels sont les droits prévus pour le projet de réglementation pour l'acquisition - année après année, au cas où l'on ait besoin d'une arme à feu pour une certaine production pourrait représenter une charge trop lourde pour ces genres de groupes.
M. Ramsay: Monsieur McLeod, pourriez-vous également répondre à la question? Dites-nous depuis combien de temps vous travaillez dans l'industrie et la mesure dans laquelle l'utilisation des armes à feu dans ce secteur a représenté une menace pour la sécurité de la société.
M. McLeod: Je travaille dans l'industrie du spectacle depuis plus de 25 ans - j'ai commencé ma carrière dans le secteur des productions thbtrales avant de me lancer, il y a une quinzaine d'années, dans l'industrie cinématographique. J'ai manipulé des armes à feu à différents moments pendant toute cette période. Je n'ai jamais été témoin d'un incident ou d'une situation potentiellement dangereuse qui aurait pu représenter une menace pour la société dans quelque projet que ce soit auquel j'ai participé.
En règle générale, nous sommes des gens relativement discrets en ce qui concerne ce matériel. Nous n'en parlons pas beaucoup avec d'autres membres de la communauté. Les gens ne savent pas où se trouvent nos installations d'entreposage. Nous ne publions pas nos adresses personnelles dans les documents, ni des listes et des numéros de téléphone et ce genre de choses. Nous évitons à dessein de faire connaître au public la nature de nos activités et l'usage que nous faisons de ces objets.
Je répète, donc, que je ne suis au courant d'aucun incident ou situation qui aurait pu représenter une menace pour la sécurité du public, en raison de la négligence d'une compagnie cinématographique; je ne sais pas si cela répond à votre question. Si vous voulez que je sois plus précis, je peux le faire.
M. Ramsay: Non, cela répond à ma question.
Avez-vous cherché à évaluer l'incidence économique du projet de loi C-68 et des règlements d'accompagnement sur votre industrie, en ce qui vous concerne?
M. McLeod: Personnellement, je n'ai pas essayé d'en faire une évaluation complète. J'ai évalué le coût de la proposition selon lequel les armes à feu à petit calibre et à canon court seraient désormais des armes à feu prohibées, coût qu'il serait possible d'éviter à mon avis si le règlement était changé.
Dans le mémoire que j'ai présenté au comité sénatorial, j'ai indiqué le coût d'un pistolet de calibre .32, ce qu'on pourrait considérer comme une version légèrement plus grande du «Saturday night special». C'est une arme à feu qui s'utilise beaucoup dans l'armée, pour la protection personnelle, etc. C'est le genre d'arme qui est fréquemment utilisé dans la société en général et qui est donc utile comme accessoire dans l'industrie cinématographique. On peut en acheter une pour environ 100 $. Une entreprise qui en possède pourrait décider de les louer à une compagnie de production cinématographique moyennant 50 $ pour la première semaine et des tarifs qui seraient négociés par les deux parties pour de plus longues périodes.
En vertu de la nouvelle réglementation, ces armes seront désormais considérées comme des armes à feu prohibées, à moins que l'entreprise accréditée envoie quelqu'un qui accompagnera l'arme à feu jusqu'au plateau tous les jours où on en aura besoin. Si c'est l'acteur ou l'actrice principal qui on a besoin, l'arme doit être disponible - du moins dans le camion des accessoires - tous les jours où cet acteur va travailler. Cela voudra donc dire que l'escorte devra être rémunérée chaque jour où l'acteur travaille. À ce moment-là, le coût de location peut facilement passer de 50 $ ou 100 $ à 400 $ par jour, si une personne accréditée doit être sur place pour surveiller. À mon avis, c'est une charge financière qui atteint un niveau inacceptable.
M. Ramsay: Ce que je voudrais savoir, c'est si l'incidence économique de cette réglementation est à ce point grave que certains membres de votre industrie pourraient être incités à s'établir aux États-Unis ou à l'étranger. Pensez-vous qu'elle soit grave à ce point-là?
M. McLeod: Oui, absolument. Par le passé, l'industrie dans cette région a toujours eu tendance à suivre davantage le modèle de l'industrie américaine de la côte ouest que celui de l'est des États-Unis ou du Canada central. La tradition a toujours voulu que le chef accessoiriste se procure les permis exigés par les autorités, dans une localité ou une autre, pour pouvoir fournir ce genre de matériel. Si nous changeons les règles du jeu de sorte que chaque chef accessoiriste va maintenant devoir se procurer un permis très coûteux pour fournir ce service, on lui impose à ce moment-là un fardeau injustifié, fardeau qui va certainement forcer certaines personnes à changer de métier. Il n'y a aucun doute à ce sujet.
Si les coûts sont répercutés, mettons, sur la compagnie de production, en décrétant que l'entreprise accréditée doit être sur place chaque fois que ces dispositifs prohibés sont utilisés sur le plateau - et bien sûr, on parle de couteaux à ouverture automatique, de chargeurs à grande capacité et de couteaux papillon, etc. - la compagnie de production devra payer un minimum de 300 $ par jour pour chaque jour de tournage pendant lequel ces articles doivent être sur place. Et le jour où ils n'ont pas besoin d'être sur place, quelqu'un va évidemment devoir supporter le coût des déplacements entre le plateau et l'installation du fournisseur. Ce coût de 300 $ par jour, dans le cadre d'une production qui dure 8, 10, 12 ou même 14 semaines, pourrait finir par représenter une somme considérable.
Quand des ententes de tournage sont négociées par des compagnies de production avec les autorités de la province ou de la ville où elles comptent tourner leur film, tous ces facteurs sont pris en considération. Le coût du tournage en Colombie-Britannique ou en Alberta va nécessairement être comparé au coût du tournage dans l'État de Washington ou d'Oregon pour le même projet. Ces chiffres seront analysés et la décision sera prise en fonction de cette analyse.
Le président: Monsieur Ramsay, nous aimerions connaître l'opinion de M. Adair.
M. Ramsay: Oui.
Monsieur Adair, pourriez-vous répondre à la question? D'après votre expérience de l'industrie, auriez-vous eu la moindre indication que l'utilisation des armes à feu dans ce secteur représente une menace pour la sécurité du public? Et pourriez-vous nous dire ensuite quelle pourrait être l'incidence économique, négative ou autre, de cette réglementation sur votre industrie?
M. Adair: Je ne suis pas au courant du moindre incident pendant lequel la sécurité du public aurait été en péril, étant donné que l'environnement est rigoureusement contrôlé ici. Le matériel visé par la loi fait déjà l'objet de contrôle.
Je travaille dans l'industrie depuis environ 1980, année où j'ai travaillé sur mon premier film. J'agis à titre d'agent commercial pour le syndicat, et par conséquent, je sais que les compagnies de production sont très sensibles au facteur coût. Une bonne proportion des 600 millions de dollars de productions qui ont été réalisées ici à Vancouver concernait des productions qu'on appelle «films de la semaine». Ce genre de production représente sans doute 40 p. 100 de la somme globale, c'est-à-dire 250 millions de dollars de dépenses de production directes.
Or, dans 75 p. 100 de ces productions, on aurait besoin à un moment donné d'une arme à feu qui serait visée par la loi. Si les frais rattachés à l'acquisition de tout le matériel dont les réalisateurs ont besoin - le transport à l'étranger, le dédouanement, ou l'acquisition au niveau local - augmentent de façon importante, ils vont évidemment aller ailleurs.
En tant que produits, les productions qu'on appelle «films de la semaine» sont financées à partir des droits de licence. Leurs droits de licence sont fixes. Ils n'ont pas changé depuis environ huit ans. Ils ont même baissé. Nous devons donc concurrencer Pittsburgh, l'État de Washington, et la Californie. Dans le cadre d'un budget de production fixe de 1,5 million de dollars pour un film de la semaine, une différence de 20 000 $ va inciter la compagnie de production à tourner ailleurs.
Les productions à plus grande échelle - c'est-à-dire les longs métrages et les téléromans - qui ont des budgets plus importants peuvent plus facilement absorber ce coût, mais le problème, c'est que nous devons établir nos coûts en parallèle avec ceux qui existent à Los Angeles, New York et d'autres régions des États-Unis, étant donné que 80 p. 100 de nos productions viennent des États-Unis.
Dans bon nombre de cas, le problème n'est pas tellement un problème de coût - même si le coût peut jouer un rôle déterminant pour ce qui est du budget de production global; pour les compagnies concernées, il s'agit de savoir dans quelle mesure elles risquent de perdre une journée de production en raison d'un problème particulier. Si la procédure pour obtenir un permis ou acquérir une arme à feu dont elles ont besoin est particulièrement problématique, elles pourraient ne pas être en mesure de respecter leur calendrier de production.
Pour un film de la semaine, on prévoit des coûts de l'ordre de 60 000 $ à 80 000 $ par jour, et jusqu'à 250 000 $ par jour pour les longs métrages. Si la compagnie perd une journée de production, cela détruit complètement son budget. Par conséquent, s'il y a le moindre risque, elle va tourner ailleurs. Elle veut avoir une garantie - et nous devons être en mesure de leur fournir cette garantie - qu'il n'y a aucun risque à cet égard. Il faut qu'on puisse leur indiquer un coût ferme pour le tournage sur place, avec des politiques et procédures en bonne et due forme qu'il nous est possible de suivre.
M. Ramsay: Merci, monsieur Adair.
Le président: Nous accueillons maintenant M. Andrew Campbell, président de Locations Cold Blue.
Monsieur Campbell, notre autre témoin ici à Ottawa est M. Alex Gazale. Je crois que vous avez déjà fait connaissance.
Et par vidéo-conférence, nous recevons également les témoignages de M. Tom Adair à Vancouver, que nous ne pouvons pas voir, mais qui voit très bien comment se présente la situation dans ce secteur. Nous venons d'ailleurs d'entendre sa réponse. Par contre, nous voyons à l'écran M. Neil McLeod.
Nous avons donc quatre témoins. Les autres ont déjà fait leurs exposés, et nous vous invitons maintenant à faire le vôtre.
Pour la gouverne des membres du sous-comité, de M. Ramsay et de M. de Savoye, vous n'aviez pas entendu leurs exposés au moment de poser vos premières questions, mais nous allons faire un deuxième tour pour vous permettre d'en poser d'autres.
Nous invitons maintenant M. Campbell à faire son exposé.
M. Andrew Campbell (président, Locations Cold Blue): Merci, monsieur le président, membres du comité, mesdames et messieurs.
Mon exposé se compose essentiellement de deux volets. Le premier traite d'un certain nombre de questions précises au sujet du projet de réglementation. Le deuxième concerne ce que mes collègues de Vancouver et moi-même devons certainement considérer comme l'aspect le plus important de cette réglementation, du point de vue de son incidence sur notre industrie, et c'est, bien entendu, l'utilisation des répliques dans le cadre des productions cinématographiques, télévisuelles et thbtrales.
Depuis janvier 1991, mon entreprise travaille de très près avec le gouvernement fédéral pour créer un ensemble complet et juste de mesures législatives visant la possession et l'utilisation d'armes à feu et d'armes connexes au Canada. Même si nous avons réalisé de grands progrès pour ce qui est d'améliorer les articles du Code criminel qui traitent des armes à feu, il y a également eu un certain recul en raison du climat politique orageux qui caractérise le débat sur le contrôle des armes à feu, du point de vue non seulement de la réaction du public mais de ses conséquences politiques.
Au moment de l'adoption du projet de loi C-17, le gouvernement de l'époque reconnaissait l'importance pour notre économie de l'industrie canadienne du spectacle, et a donc légalisé l'activité professionnelle qui consiste à fournir des armes à feu et d'autres armes pour des productions cinématographiques, télévisuelles et thbtrales.
Nous sommes un petit groupe, si vous ne comptez que les titulaires de permis industriels à l'heure actuelle, mais nous traitons également avec des fournisseurs d'armes à feu, des armuriers cinématographiques, et les innombrables accessoiristes, qui dans bien des cas sont également capables de manipuler des armes à feu, grâce aux cours de sécurité qui sont prévus pour les titulaires d'AAAF et aux cours spécialisés qu'ils ont suivis sur la manipulation des armes à feu sur un plateau de prise de vues.
Bien que nous soyons de tout petits maillons de la chaîne, nous jouons un rôle très important, car sans nous, bon nombre des films qui sont tournés au Canada et qui amènent des investissements importants au Canada ne se réaliseraient pas. Les compagnies de production se dirigeraient tout de suite vers les États qui reconnaissent le droit au travail, tels que la Caroline du Nord, ou resteraient en Californie ou dans d'autres régions pour tourner leurs films.
Le secteur de la production cinématographique a connu une véritable explosion au cours des cinq ou six dernières années. Là où l'expansion de ce secteur a été la plus visible c'est dans la région de Vancouver. C'est dans cette localité qu'on tourne de nombreuses émissions de télévision très populaires, de même que des films. Toronto a toujours été un centre de production non seulement cinématographique mais également télévisuelle et thbtrale. De même, au cours des trois dernières années, Montréal est devenu un important centre de production cinématographique. Nous avons sur place la Société Radio-Canada, qui produit des émissions distractives, de même que la CBC, l'Office national du film, et une multitude de producteurs de films indépendants dont le Québec peut être fier à juste titre.
Ils se servent tous d'armes à feu à différents degrés. Même une histoire d'amour requiert par moment la présence d'un policier, et le policier doit forcément avoir une arme dans son étui. Mais le problème des répliques, que je vais aborder un peu plus tard, touche même l'arme qui se trouve dans l'étui, car nous y mettrions normalement une réplique et non une vraie arme à feu.
Bien que l'adoption du projet de loi C-68 ait donné lieu à l'élaboration d'un ensemble complet de règlements créant une nouvelle formule législative pour le contrôle des armes à feu et des autres armes, nous avons encore du chemin à faire si nous voulons transformer l'article 3 du Code criminel en loi sur les armes à feu. Nous ne profitons pas toujours des progrès - ou du moins ce que je considérerais comme des progrès - réalisés dans le projet de loi C-17, du moins en ce qui concerne les répliques.
Je voudrais me référer directement à diverses pages du projet de réglementation. En général, en tant qu'entreprise, nous avons le droit, aux termes de l'actuel Code criminel, de posséder des armes à feu prohibées, des armes à feu à autorisation restreinte et diverses autres armes pour leur utilisation exclusive dans le cadre de productions cinématographiques, télévisuelles et thbtrales. Mais même si nous sommes considérés comme des entreprises sur ce plan-là, nous ne sommes pas considérés comme des entreprises selon la définition d'entreprise qu'on retrouve au début du projet de loi C-68, qui ne reconnaît pas l'activité qui consiste à louer une arme à feu. Selon l'article 84, le terme «cession» vise la vente, la fourniture, l'échange, le don, le prêt, l'envoi, la location, le transport, l'expédition, la distribution ou la livraison. Mais le terme «cession» ne figure pas encore dans la définition d'entreprise qu'on retrouve dans le projet de loi C-68. Je voulais simplement attirer votre attention là-dessus.
C'est peut-être déjà couvert, mais je mène mes activités commerciales au Québec depuis une dizaine d'années, et on m'a toujours donné à entendre que mon entreprise n'était pas légitime du simple fait qu'on ne faisait nullement mention dans le Code criminel de «location». Pendant de nombreuses années, je devais me contenter d'acheter ou de vendre des armes à autorisation restreinte.
À la page 10, d'après les numéros inscrits à la main, du projet de réglementation se trouve l'alinéa 23(1)a), et je me rappelle que quand nous en avons discuté avec le ministère de la Justice, lors des consultations de groupes concernés par les armes à feu, le contenu de cet alinéa, qui précise que l'entreprise ne peut, dans la publicité sur les armes à feu ou autres armes, décrire ou promouvoir la violence, suscitait beaucoup de débat.
À l'époque, nous avons discuté du fait que nous n'étions pas nécessairement en mesure d'imposer des principes déontologiques aux personnes à qui nous louons des armes à feu. C'est peut-être triste à dire, mais le fait est que bon nombre de ces films contiennent un élément de violence, que ce soit par la simple suggestion d'actes violents ou par la représentation de scènes où les gens se tirent dessus.
On nous a fait comprendre à l'époque que l'objet de cet article n'était pas de limiter de quelque façon que ce soit les images qui pourraient être utilisées dans le cadre d'une production cinématographique, télévisuelle ou de divertissement, mais plutôt de contrôler l'utilisation des armes à feu dans un contexte potentiellement violent dans nos publicités. Je vous fais simplement remarquer que le sens dans le texte de cet article est beaucoup moins clair que les explications qu'on nous a fournies à l'époque.
Je vous renvoie maintenant à la page 11, et plus précisément les sous-alinéas (i) et (ii) de l'alinéa 23(1)d), qui concernent la tenue d'un inventaire des armes prohibées, des armes à autorisation restreinte, des dispositifs prohibés et des munitions prohibées, et des éléments ou pièces conçus pour être utilisés dans une arme automatique.
Nous n'avons pas vraiment de plainte à formuler à cet égard, mais nous souhaitons tout de même que la nouvelle réglementation prévoie un mécanisme pour la réglementation de ces éléments et pièces, car il est clair pour le moment que la SAEAF - c'est-à- dire la section des armes à feu de la GRC - n'est aucunement en mesure, que ce soit avec ses ordinateurs ou par la procédure prévue dans C-305, d'enregistrer ou d'établir des dossiers sur les chargeurs à grande capacité ou les différents éléments et pièces d'une arme prohibée.
Nous nous retrouvons en quelque sorte dans une zone grise, parce qu'on pourrait se faire arrêter si on possédait de tels éléments ou pièces, alors qu'il n'est pas possible de les faire enregistrer par une autorité officielle. Nous devons les enregistrer dans nos propres livres, mais il n'est pas possible de le faire reconnaître officiellement - mettons par la GRC.
Si nous insistons là-dessus, c'est parce que les dispositifs prohibés, tels que les répliques, vont être visés par ce système d'enregistrement, alors que les répliques ne portent pas de numéro de série en général. Si elles en ont, les numéros sont imprimés sur le plastique et à ce moment-là, ça ne pose pas de problème. Mais généralement, elles n'ont pas de véritable numéro de série, de sorte que l'enregistrement des dispositifs prohibés risque de poser problème.
Aux pages 11 et 50, le paragraphe 23(3) prévoit que le contrôleur provincial des armes à feu assortit le permis de la condition fixant la limite maximale des stocks d'armes prohibées. Je présume que l'objet de cet article est de protéger le public en ne permettant pas à une entreprise d'accéder à suffisamment d'armes pour équiper une petite armée. Mais telle est justement la fonction de l'armurier cinématographique.
Comme nous ne pouvons jamais savoir pour quel genre de film nous aurons à fournir des armes dans les mois qui suivent, nous avons l'habitude d'augmenter nos stocks chaque fois que nous en avons l'occasion. Je crois comprendre que le CPAF pourra conclure un accord avec les titulaires de permis industriels, mais il reste que le fait d'établir une limite maximale pour nos stocks dans la réglementation pourrait gravement compromettre nos activités.
Dans certains cas, je pourrais posséder des armes à feu que requiert une autre entreprise de location ou titulaire d'un permis pour des armes prohibées. Même si je peux posséder un type d'armes particulier - mettons des armes de la Seconde Guerre mondiale - cette personne-là peut avoir des stocks d'armes plus modernes, et aux termes de la nouvelle loi, nous pourrions faire un échange. On peut penser qu'un groupe en particulier possède davantage un type d'armes, mais cela peut correspondre à une stratégie de spécialisation des titulaires de permis industriels. Je recommanderais par conséquent que cette limite maximale soit éliminée.
Il est clair que l'article 13, à la page 22, a pour objet d'empêcher que les lois fédérales priment sur celles des administrations provinciales et municipales. Mais étant donné que l'industrie du spectacle a l'habitude de tourner dans des décors naturels ou de filmer des situations ou des scènes qui seraient illégales normalement, cet article a le potentiel de porter gravement préjudice à notre industrie. Si les lois locales priment sur les lois fédérales, ces lois locales pourraient éventuellement détruire notre industrie.
Je sais que c'est justement ce genre de problèmes qu'on rencontre à Vancouver et à Montréal. Il y a des problèmes à cause des règlements sur le bruit. Ces restrictions locales vont forcément limiter nos activités si nous devons tourner une scène le soir où des armes sont employées, par exemple. On a l'impression que cet article ouvre la porte à une bataille entre les administrations locales et les autorités fédérales. Puisque notre industrie relève de la compétence fédérale, cette disposition risque de créer plus de problèmes qu'elle en élimine.
Je voudrais vous référer maintenant à l'article 11 qui se trouve à la page 29, et qui concerne le transport des armes à feu prohibées dans un véhicule. Aux termes de cet article, s'il s'agit d'une arme automatique dont le verrou ou la glissière peut être enlevé, ces dispositifs doivent justement être enlevés et transportés dans un véhicule distinct.
Il existe certains types d'armes à feu dont il n'est pas facile d'enlever rapidement et efficacement certains éléments ou pièces. Le terme «démontage sommaire» désigne justement la possibilité, pour un soldat en campagne, de nettoyer facilement son arme. Mais les mécanismes qui se trouvent à l'intérieur de certains fusils peuvent être endommagés si on les ouvre. Je recommanderais par conséquent d'ajouter après «peuvent être enlevés», le mot «facilement». Il ne s'agit pas de donner une porte de sortie aux gens, mais il faut tout de même comprendre que le fait d'enlever ces pièces de certaines armes va créer d'énormes problèmes. Je pourrais citer l'exemple du fusil entièrement automatique Ruger. Son système de rochet pourrait très bien se détraquer et nous pourrions avoir à passer des heures à le remettre en place.
Quand j'en ai parlé au départ avec M. Michael Zigayer, de la Section de la politique législative, en 1991, il me disait que les armes entièrement automatiques qui seraient visées seraient celles dont on peut retirer le verrou ou la glissière, de manière à rendre l'arme inopérante. Mais d'autres méthodes sont déjà prévues par la loi - c'est-à-dire, des systèmes de câbles ou de verrous qui permettent de rendre l'arme inopérante sans détruire les pièces internes.
L'alinéa 11(3)c), qui se trouve à la page 31, prévoit une exemption des règlements sur le transport des armes à feu prohibées pour toute arme qui «a été convertie pour ne tirer que des cartouches à blanc». À ma connaissance, il n'existe pas de règlement officiel qui précise la procédure à suivre pour transformer une arme à feu à autorisation restreinte ou prohibée en arme ne tirant que des cartouches à blanc, ni pour faire vérifier cette procédure par l'autorité judiciaire.
En 1991, j'ai présenté une proposition au comité concernant une série de mécanismes qui permettrait de transformer en permanence les armes à feu entièrement automatiques en armes ne pouvant tirer que des cartouches à blanc. On n'a jamais donné suite à ma proposition. Bien qu'il existe un guide sur la neutralisation, que je sache, il n'existe absolument aucun document qui m'apprendrait à transformer une arme entièrement automatique en une arme ne pouvant tirer que des cartouches à blanc. Nous voilà donc devant toute une série de règlements qui sont fondés sur de faux critères en ce qui concerne la conversion d'une arme automatique en arme qui ne peut tirer que des cartouches à blanc.
L'alinéa 7(1)d), à la page 43, précise que l'entreprise qui importe des marchandises prohibées doit fournir les nom et adresse des «escales» au Canada. Je pense que cela vise essentiellement les transporteurs, mais en tant qu'importateurs attitrés, il est possible que nous ne sachions pas où vont se faire ces escales.
Cela pourrait créer une situation où un avion qui transporte une arme à feu prohibée au Canada fasse une escale entre Vancouver et Montréal en raison de problèmes techniques ou autres, qu'il atterrisse dans une autre province, ou peut-être même dans un autre État, et que nous ne soyons pas au courant de tout cela - c'est-à- dire des localités où ils ont fait escale. Par contre, la loi exigera désormais que nous préparions un manifeste indiquant les différents points d'escale, que nous, n'étant pas transporteurs, pouvons très bien ignorer.
Je recommanderais par conséquent que nous ajoutions les mots «lorsqu'ils sont connus» après «les nom et adresse», de telle sorte que si nous devons communiquer des renseignements au CPAS, nous pouvons lui communiquer les derniers renseignements dont nous disposons, sans être tenus légalement responsables, s'il y a un changement dont nous ne sommes pas au courant.
À la page 45 - et je vous signale ce détail pour que ce soit consigné au procès-verbal - le projet de règlement concernant les marchandises confisquées prévoit que ces marchandises seront remises à la Gendarmerie royale par les agents des douanes pour leur usage, ce qui semble ouvrir la porte à la possibilité d'abus. Nous devons présumer que les articles que nous importons au Canada ont déjà été approuvés. Avec l'avènement des nouvelles machines à mémoire fixe et du système qui va permettre aux douaniers d'approuver un envoi destiné à l'importation ou à l'exportation, il serait tout à fait légal - nous en avons discuté justement pendant la réunion avec le groupe d'utilisateurs et nous avons dit qu'à notre avis, c'était de bien mauvais augure - de remettre ces marchandises à la GRC dans un délai raisonnable pour son «usage». Je vous signale ce détail pour que tout cela soit consigné au procès-verbal.
Le deuxième volet de mon mémoire ne s'applique pas vraiment aujourd'hui, malheureusement, mais je voudrais tout de même en parler brièvement devant le comité, et après, j'aurai fini. Cela concerne, encore une fois, la question des répliques ou des fausses armes à feu qui sont considérées comme des «dispositifs prohibés». Cet état de choses pose d'énormes problèmes pour nous. J'ai des producteurs, et même des accessoiristes, qui m'appellent fréquemment pour se renseigner sur les dispositions législatives actuellement en vigueur.
D'après les dernières informations que j'ai obtenues, l'application de cette disposition serait reportée à plus tard en attendant qu'on trouve une solution. Si je peux me permettre de vous parler carrément, ni moi ni aucun de mes collègues, que je sache, n'a été consulté à ce sujet, alors qu'on aurait pu éviter bon nombre de problèmes si les autorités avaient jugé bon de nous consulter - nous qui devons utiliser ces répliques - plus tôt. Puisque la loi a déjà été adoptée, nous devons maintenant trouver le moyen de régler un problème qui n'aurait jamais dû se poser au départ.
En ce qui me concerne, les répliques représentent la possibilité de louer de tels objets à des accessoiristes, ou à des gens qui n'auraient pas normalement besoin d'une arme à feu. Je pars donc du principe que je peux louer une réplique à un accessoiriste, un directeur de thbtre, un étudiant cinéaste, une compagnie de production télévisuelle, c'est-à-dire à des professionnels et des amateurs, étant donné que ces armes ne sont pas de véritables armes à feu et ne sont donc pas réglementées à l'heure actuelle. Si je pars du principe que ces gens-là ont besoin d'utiliser une arme à feu, je vais m'arranger pour leur fournir une réplique pendant toute la durée du tournage, et je n'irai sur place qu'au moment où l'on doit réellement tirer avec l'arme à feu, ou encore quand il faut la manipuler en gros plan, etc.
Les répliques constituent un élément important de mon activité commerciale, et je sais qu'il en va de même pour mes homologues à Vancouver, à Toronto et partout ailleurs. Les troupes de thbtre n'utilisent pratiquement que cela.
Un monsieur du service des accessoires de l'Université Concordia à Montréal m'a téléphoné la semaine dernière, parce qu'il avait besoin de photos d'une certaine arme à feu. Il montait une pièce sur la crise de l'IRA en Irlande et devait faire une copie d'un certain type d'arme à feu utilisé par l'armée britannique. Comme il n'en existe pas de copie actuellement, il est venu prendre des photos pour qu'il puisse en faire une réplique en bois. Aux termes du règlement qui va entrer en vigueur à un moment donné - j'espère que ce sera beaucoup plus tard, peut-être même à la fin de l'année - cet acte consisterait à créer une arme prohibée, et si je ne m'abuse, cette personne serait donc passible d'une peine d'emprisonnement de cinq ans.
Dans mon mémoire, j'ai énuméré 11 types différents de fausses armes à feu et d'armes neutralisées, qui ont toutes été conçues ou sont utilisées pour remplacer de vraies armes à feu dans le cadre de productions thbtrales ou cinématographiques. Elles permettent d'éviter d'utiliser de vraies armes à feu. Elles permettent également de prévenir le vol ou du moins de dissuader quelqu'un qui envisage de voler quelque chose. Elles sont également utilisées, dans le cas des répliques en caoutchouc, pour les cascades - pour protéger les acteurs ou les cascadeurs. Or, sur le plan juridique, ces armes en caoutchouc seront désormais sur un pied d'égalité avec les armes à chargeur à grande capacité.
Des armes qui étaient considérées au départ comme constituant une menace - par exemple, il existe toute une série de répliques japonaises qu'on ne peut guère distinguer des armes originales - ne sont pas visées par la loi, parce qu'elles tirent des projectiles en plastique de 6 millimètres.
Je sais que vous allez probablement aborder la question plus tard, pendant l'analyse de ces règlements. Mais je sais que cette question revêt une importance critique pour mes collègues et moi- même. C'est la différence entre une loi relativement anodine et une loi qui va constituer une source d'embarras, si nous nous voyons obligés de dire à un producteur qu'il doit désormais payer les services d'un professionnel qualifié qui restera sur le plateau pour manipuler une arme en caoutchouc qui reste dans un étui 12 heures par jour.
Encore une fois, c'est une question que nous allons vouloir aborder en détail avec vous. Je voulais être sûr d'en parler dans ce mémoire pour que vous puissiez en tenir compte avant le dépôt des prochains règlements.
Je vous remercie infiniment de m'avoir accordé ce temps de parole.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Campbell.
Êtes-vous encore là, monsieur McLeod?
M. McLeod: Oui, je suis là.
Le président: Monsieur Adair, êtes-vous encore là?
M. Adair: Oui.
Le président: Formidable. Merci beaucoup.
Nous allons maintenant redonner la parole aux membres du sous- comité pour qu'ils vous posent des questions. Je crois que c'est votre tour, monsieur Kirkby.
M. Kirkby (Prince Albert - Churchill River): J'adresse ma première question à M. Gazale. Vous avez exprimé des préoccupations au sujet des catégories de droits pour l'utilisation des armes à feu, par rapport à la fourniture de ces dernières. Les troupes de thbtre qui possèdent leurs propres armes à feu peuvent se procurer un permis commercial de la catégorie 18 moyennant des droits de 50 $. Est-ce que cela répond à votre préoccupation?
M. Gazale: Oui, sauf que bon nombre de mes collègues qui visitent le site Web se demandent, en voyant le terme «fournisseur» si ce terme exclut les propriétaires. On y parle de «fournisseur» plutôt que de «utilisateur».
M. Kirkby: Oui, mais on précise que les troupes de thbtre qui possèdent leurs propres stocks peuvent se procurer un permis en payant des droits de 50 $.
De plus, si une troupe de thbtre qui a des armes à feu ou des dispositifs prohibés, tels que des répliques, a besoin d'un permis commercial qui l'autorise à posséder des objets prohibés conformément au paragraphe 21c) des règlements, qui décrit les fins visées, l'employé n'a qu'à se procurer un permis individuel qui va lui permettre d'utiliser des armes à feu à autorisation restreinte. Est-ce que cela vous aide?
M. Gazale: Oui, cela nous aide. Mais le problème qui se pose en ce qui concerne les répliques, qui correspondent essentiellement à des armes en caoutchouc ou à des matraques, c'est qu'il semble tout à fait superflu d'exiger un permis, surtout si on ne peut pas tirer avec l'arme en question et si l'entreprise elle-même est titulaire d'un permis.
M. Kirkby: J'adresse ma question à M. Adair et à M. McLeod. Pensez-vous qu'il serait possible de prévoir l'octroi de permis autres que ceux prévus dans la loi - c'est-à-dire des permis individuels ou commerciaux - par voie réglementaire, ou serait-il nécessaire de modifier la loi? S'agit-il simplement de modifier le barème des droits prévus dans la réglementation? Comment cela pourrait-il se faire, d'après vous?
M. McLeod: Il me semble que les contrôleurs des armes à feu seraient plus à même de répondre à ces questions, étant donné leur expérience du domaine.
Par contre, mon opinion sur la question de procédure serait qu'il s'agirait d'un permis autorisant le titulaire à posséder temporairement des dispositifs prohibés. Autrement dit, vous ne seriez pas autorisé à les posséder; vous ne pourriez les posséder que provisoirement. Ils appartiendraient à quelqu'un d'autre, mais le propriétaire pourrait vous le céder si vous déteniez un permis industriel conditionnel vous autorisant à utiliser ces dispositifs dans le cadre de vos activités thbtrales ou cinématographiques. J'ai recommandé que les droits soient de 160 $ pour un permis de deux ans.
Ce permis ne serait valable que si vous travailliez activement sur un projet cinématographique ou dans l'industrie cinématographique. Autrement dit, le permis serait assorti d'une clause précisant la période de validité. Voilà mon idée.
Si j'ai fait cette suggestion, c'était en partie pour réduire le nombre de demandes de permis dans notre région, car comme je vous le disais tout à l'heure, 40 ou 50 personnes pourraient demander un certain type de permis pour des objets qui sont maintenant prohibés. Cela ne viserait pas les armes entièrement automatiques et les instruments de destruction de masse. Dans ce cas-là, la notion de permis provisoire ne s'appliquerait pas.
M. Kirkby: J'adresse la question suivante à tous les témoins: combien de fois avez-vous été consultés jusqu'à présent par le Centre canadien des armes à feu sur tous ces différents règlements?
M. Gazale: Personnellement, j'ai été consulté quatre fois, et il y a également eu des consultations nationales auxquelles ont participé plusieurs autres membres du CITT précédemment.
M. Campbell: Le nombre est à peu près le même dans mon cas.
M. McLeod: Je pense que j'ai participé trois fois à une table ronde sur la question. Il semble que notre participation a été un peu tardive.
M. Adair: J'ai participé trois fois à des rencontres directes avec d'autres membres de l'industrie. J'étais en vacances la quatrième fois où on m'a lancé une invitation. Il y a également eu des conversations individuelles avec différentes personnes depuis.
Sur la question des répliques, qui est notre principale préoccupation, nous avons commencé par envoyer une lettre aux députés de la Chambre des communes mais on n'a pas donné suite à nos doléances à l'époque. La loi est rédigée de telle sorte qu'il est impossible de la modifier, et les règlements ne peuvent non plus être rédigés de façon à nous exclure. Je comprends tout cela, et c'est justement la source du grave problème que nous connaissons actuellement. Je pense que nous en sommes tous conscients.
Je voulais faire un commentaire sur le barème des droits au sujet duquel vous avez interrogé M. McLeod, parce que nous cherchons un modèle qui serait semblable à celui qui existe actuellement. La loi elle-même ne permet pas aux particuliers de se procurer un permis qui leur offre les mêmes possibilités qu'un permis commercial... Il faut se procurer un permis commercial pour pouvoir manipuler des armes à feu prohibées, alors que la grande majorité des armes que nous traitons dans notre secteur font justement partie de cette catégorie-là.
Il y a toujours la possibilité que les gens fondent une entreprise à propriété individuelle, c'est-à-dire une entreprise de faible envergure. Mais payer 1 250 $ par année pour un permis - et c'est bien cela qui est prévu dans la partie qui traite des permis, ce qui vous donne évidemment une grande marge de manoeuvre - constitue une dépense que la plupart des gens ne sont pas prêts à accepter. Ils veulent simplement être en mesure de manipuler les armes à feu prohibées, mais non les armes entièrement automatiques et les autres armes dont Neil a parlé tout à l'heure.
Il faut peut-être deux paragraphes: un premier paragraphe qui traite des répliques, et un autre qui traite des armes à feu prohibées cédées par un titulaire de permis industriel.
M. Kirkby: Quelles sont les exigences de la loi actuelle en ce qui concerne les armes prohibées et à autorisation restreinte? Faut-il que quelqu'un supervise? En quoi le projet de loi C-68 change-t-il la situation actuelle? J'adresse ma question à M. Adair ou à M. McLeod.
M. Adair: Comme Neil McLeod utilise toutes ces armes sur les plateaux, il vaudrait mieux que ce soit lui qui réponde.
M. McLeod: Il faut un superviseur accrédité, autorisé et qualifié sur le plan technique pour ce qu'on appelle actuellement les armes prohibées. Mais pour vous dire la vérité, je ne peux pas vraiment vous dire qu'une telle supervision est prévue pour des objets tels que les couteaux papillon et les couteaux à ouverture automatique, mais elle est certainement exigée pour les armes entièrement automatiques et les chargeurs à grande capacité. Donc, pour les objets qui font maintenant partie de la catégorie des armes prohibées, la réponse est oui, la présence d'un expert technique accrédité est exigée pour superviser l'utilisation de ce genre de matériel.
Notre plus grande préoccupation, c'est que nous créons maintenant une nouvelle catégorie de dispositifs prohibés qui, de par leur nature, ne sont pas plus dangereux et ne représentent pas une plus grande menace pour la sécurité du public que les armes à autorisation restreinte. C'est là que le bas blesse en ce moment.
M. Kirkby: Dans la plupart des films où l'on utilise des répliques, n'est-il pas également nécessaire d'utiliser de vraies armes à feu pendant le tournage, de sorte que la présence d'un superviseur soit nécessaire?
M. McLeod: Oui, bien sûr. Si la vraie arme à feu dont on avait besoin était une arme entièrement automatique, il faudrait qu'une personne accréditée - c'est-à-dire un titulaire de permis industriel autorisé à posséder, à transporter des armes prohibées - soit sur place.
M. Kirkby: Donc, dans la plupart des cas où on a besoin de répliques pour un film, on a également besoin de vraies armes à feu, et par conséquent, les coûts de tournage ne seraient pas plus élevés, n'est-ce pas?
M. McLeod: C'est la création de cette catégorie qui fait augmenter les coûts de production d'un film. Le fait que les petites armes de poing simples seront désormais considérées comme des armes à feu prohibées signifie qu'elles seront retirées de la catégorie des armes à autorisation restreinte. Tant qu'elles font partie de cette dernière catégorie, on n'a pas besoin de faire venir un expert qui est titulaire d'un permis industriel, ni la compagnie qui les possède, pour les manipuler.
Bon nombre d'accessoiristes possèdent leurs propres armes à feu dont un bon nombre font justement partie de cette catégorie, et notamment les revolvers de policiers. Beaucoup d'accessoiristes possèdent des revolvers de policiers, parce qu'ils ne coûtent pas cher et qu'ils s'en servent tout le temps. Ensuite, on doit tenir ses propres stocks de répliques, qui correspondent à toutes les vraies armes à feu. Mais ce n'est pas le fait qu'on utilise une combinaison de vraies armes à feu et de répliques qui pose problème; c'est surtout le fait que certaines véritables armes à feu très courantes dans notre industrie seront désormais considérées comme des armes à feu prohibées alors qu'elles ne représentent pas une menace plus importante pour la sécurité de la société en général.
Je trouve ironique qu'on puisse posséder une arme de poing massive de huit pouces de calibre .44 Magnum, mais qu'il soit interdit de posséder un pistolet de calibre .22. C'est un grand mystère pour nous dans notre secteur d'activité. Pour la société en général, je peux très bien comprendre, comme mes collègues très certainement, qu'on fasse une telle distinction, mais dans notre secteur d'activité, cela nous laisse un peu perplexe.
Le président: Monsieur Campbell, vous voulez intervenir?
M. Campbell: Oui, bien sûr.
Je dois dire que dans la province de Québec, nous avons un régime un peu différent et beaucoup plus rigoureux. Nous n'avons pas le droit de louer des armes à autorisation restreinte ou prohibée à une tierce partie. Autrement dit, toute arme à autorisation restreinte et prohibée que possède mon entreprise ne peut être sortie que par le propriétaire de l'arme en question. Aux termes de la loi, nous n'avons pas le pouvoir de louer à quiconque une arme à autorisation restreinte, étant donné que le terme «location» ne figure nulle part dans le Code criminel à l'heure actuelle.
Dans certaines autres provinces, notamment à Toronto et à Vancouver, les autorités ont décidé d'appliquer la loi de façon plus libérale, mais le Québec est très strict de ce côté-là. J'ai toujours été obligé de respecter cette condition-là.
Évidemment, c'est mieux pour mon entreprise, mais en même temps, c'est moi qui contrôle la situation chaque fois qu'une arme est tirée à blanc ou qu'une vraie arme à feu est déchargée sur un plateau; ainsi je peux contrôler une situation potentiellement dangereuse, car tel est justement mon domaine de spécialisation, alors que d'autres peuvent ne pas posséder cette expertise. Au Québec, notre situation est unique, mais aux termes stricts de la loi, elle ne devrait pas nécessairement l'être.
Si, par exemple, mon entreprise transporte une arme à autorisation restreinte sur un plateau un jour, cette arme à autorisation restreinte doit normalement correspondre à quelque chose qu'on utilise sur le plateau depuis cinq semaines, c'est-à- dire une arme qui reste dans l'étui du personnage principal jusqu'au moment où ce dernier le sort de son étui, au dernier moment, et tire sur le méchant une fois ou deux.
La compagnie de production n'a pas le droit de garder une véritable arme à feu sur le plateau, à la différence de ce qui est permis à Vancouver ou à Toronto. On se sert donc d'une réplique. Cette réplique est une arme à feu inopérante, ou si rien d'autre n'est disponible, il pourrait s'agir d'une réplique qui ne tire que des cartouches à blanc, et qui serait remplacée par une vraie arme à feu le jour où le personnage principal doit s'en servir. Mais ce n'est qu'au Québec que nous faisons une telle distinction, en ce qui concerne l'application de la loi.
Donc, aucune vraie arme à feu ne peut sortir de l'entreprise sans qu'un représentant qualifié l'accompagne.
M. Kirkby: Monsieur Adair, quel serait le budget moyen d'un film prévoyant l'utilisation d'armes à feu et dans le cadre duquel on pourrait faire appel à vos services?
M. Adair: Vous parlez de films qui sont tournés pour la télévision?
M. Kirkby: Ou pour le cinéma. M. McLeod ou M. Adair peut répondre...
M. Adair: Pour les productions télévisuelles qu'on appelle «films de la semaine» qui sont tournées au Canada, les budgets varient généralement entre 1,5 million de dollars CAN et 2,5 millions de dollars CAN, selon la chaîne qui les présente. Ils peuvent être présentés par l'une des grandes chaînes américaines - c'est-à-dire ABC, CBS, ou NBC. Là je vous parle des «films de la semaine» qui passent à la télévision.
Ensuite, il y a ce qu'on appelle les mini-séries. Si elles durent deux heures, c'est à peu près le même montant. Si elles durent quatre heures, on double cette somme-là, et si elles durent six heures, on la triple. Ce sont évidemment des estimations.
Quant aux longs métrages qui ont été tournés ici, tels que Jumanji avec Robin Williams, et Timecop, avec Jean-Claude Van Damme, le budget global de ces productions était de l'ordre de 40 à 60 millions de dollars. De ce montant, les producteurs de Timecop auraient probablement dépensé 10 millions de dollars dans la province, par rapport à une quinzaine de millions de dollars pour Jumanji.
Il existe une vaste gamme de produits sur le marché. La série X-Files, qui est tournée ici, a un budget d'environ 2 millions de dollars US par semaine. Et des armes à feu sont utilisées dans le cadre de cette production.
M. Kirkby: Donc, même si on part du principe que cela pourrait coûter 300 $ par jour de plus, ce n'est vraiment pas une grosse somme par rapport au budget global de ce genre de productions cinématographiques. Je suppose que les fluctuations du dollar canadien, comparativement au dollar américain, auraient sans doute une incidence beaucoup plus marquée, n'est-ce pas?
M. Adair: La valeur du dollar canadien, par rapport au dollar américain, est certainement le facteur qui incite le plus les compagnies à tourner ici au Canada. La compétitivité des diverses compagnies, relativement aux productions dites «films de la semaine», qui représentent 40 p. 100 du marché, dépend d'infimes différences de budgétisation pour des productions de ce genre. À raison de 300 $ par jour, pour un calendrier de tournage de 20 ou de 22 jours pour un film de la semaine, on atteint un montant qui serait jugé suffisamment important pour les inciter à tourner leur film ailleurs.
M. Kirkby: Je voudrais faire un dernier petit commentaire.
Le président: D'accord, mais rapidement. Nous devons passer au prochain intervenant.
M. Kirkby: Mettons que le budget établi pour ce genre de production soit de 2 millions de dollars. Le mois dernier, le dollar canadien est passé de 73¢ à 75¢. Cela représente une différence d'environ 40 000 $. C'est une somme beaucoup plus importante que les quelques centaines de dollars dont il est question ici; donc, pourquoi ces quelques centaines de dollars sont si importants, alors que les 40 000 $ ne le sont pas?
M. Adair: Eh bien, quant à l'impact des fluctuations du dollar, je peux vous dire que ces compagnies achètent souvent d'avance des devises pour se protéger. Toute entreprise d'import- export essaie d'en tenir compte.
Les postes au-dessus de la ligne correspondent aux coûts de leur budget modèle, qu'ils appliquent à cinq ou six zones de production différentes en Amérique du Nord. Quand un facteur quelconque influe sur le budget modèle dans une zone particulière, la compagnie peut tout simplement décider de tourner dans une autre zone, car nous sommes tous en compétition.
L'autre problème qui peut faire fuir les compagnies de production, qui redoutent les risques, c'est lorsque quelqu'un qui travaille dans l'industrie des productions cinématographiques et télévisuelles entend une rumeur, comme le disait Andrew tout à l'heure en parlant des répliques; à ce moment-là, elles commencent à s'inquiéter, et leur aversion pour le risque est suffisante pour les inciter à tourner leurs films ailleurs. Disons que même si elles ne savent pas si la rumeur est fondée, c'est un autre facteur qui peut les inciter à ne pas venir.
Les producteurs américains, qui donnent énormément de travail aux Canadiens, préféreraient, pour des raisons culturelles, tourner leurs films là-bas, plutôt qu'ici.
Le président: Monsieur Campbell.
M. Campbell: Je suis entièrement d'accord, surtout que beaucoup d'États, en plus de la Caroline du Nord, reconnaissent le droit au travail non syndiqué.
Dans nos provinces respectives et même chez Téléfilm, les producteurs font la promotion du Canada. Nous faisons la promotion de certaines localités ou provinces, auprès des producteurs du monde entier en insistant sur la qualité élevée de notre personnel technique et autres.
Le Québec participe à de nombreuses coproductions avec l'Australie, la France et l'Angleterre. Nous venons de terminer un film intitulé Day of the Jackal, dont le budget se montait à 128 millions de dollars US, et mettant en vedette Bruce Willis et Richard Gere. Environ 12 millions de dollars ont été dépensé au Canada. Mais comme nos lois favorisent actuellement le transport des armes prohibées, ils ont pu transporter une mitrailleuse de calibre .50, mesurant sept pieds, entre les États-Unis, Londres, et le Canada avant de la renvoyer aux États-Unis, avec relativement peu de problèmes. S'ils ont pu le faire sans trop de difficultés, c'est parce que les lois sont conçues de façon à faciliter le transport de ces armes prohibées d'un pays à l'autre par des titulaires de permis industriel accrédités.
Cela dit, ils n'ont pas réussi, dans mon cas, à faire venir au Canada les armes de poing à autorisation restreinte, étant donné que la loi actuelle, selon l'interprétation des autorités québécoises, ne m'autorise pas à louer ces armes à feu à ces mêmes stars. Par conséquent, j'ai dû utiliser mes propres armes de poing pour la production qui a été filmée ici, et il a fallu qu'ils trouvent des armes identiques dans deux autres pays. Ce sont les termes de notre loi qui l'exigent.
Mais ce qui compte, finalement, c'est que les producteurs vendent un ensemble d'éléments pour la production qui comprend certains lieux de tournage. Je ne puis trop insister sur le fait que même si nous travaillons souvent dans le cadre de films à gros budget - et le Québec n'est pas différent des autres provinces à cet égard - beaucoup de films à faible budget, mettons de l'ordre de 600 000 $ sont également tournés ici, et la majorité des gens qui s'adressent à mon entreprise pour louer différents articles ont de très faibles budgets: il s'agit souvent de gens qui tournent leur premier film, d'étudiants cinéastes, de gens qui montent une production thbtrale, qui font de la publicité imprimée ou encore une mise en page photographique. Par exemple, une compagnie s'est adressée à moi pour louer une ou deux répliques de mitraillettes Thompson, afin que leurs acteurs puissent s'habiller comme Al Capone pour le lancement d'une nouvelle ligne de produits pharmaceutiques. Donc, ces articles peuvent servir à différents usages.
Et il ne faut pas oublier que dans certains cas, ce n'est pas forcément une question d'argent, ou de savoir si le cours du dollar nous avantage ou non. Dans notre secteur d'activité, nous traitons avec un grand nombre de clients potentiels, dont certains n'ont pas nécessairement des budgets suffisamment importants pour engager quelqu'un comme moi, ou un de mes adjoints, afin que nous gardions une arme à feu en caoutchouc toute la journée sur un plateau, même si cette dernière ne présente aucun risque pour la sécurité du public, si ce n'est la possibilité de menacer quelqu'un.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Campbell.
Monsieur de Savoye, c'est votre deuxième tour.
[Français]
M. de Savoye: J'aimerais revenir sur la question de la consultation. J'ai cru comprendre qu'on avait consulté nos témoins d'aujourd'hui trois ou quatre fois. Est-ce que les résultats de ces consultations transparaissent dans la réglementation qui nous a été présentée?
M. Gazale: Oui, on en a tenu compte dans certains cas, surtout du côté du film et non pas du côté du thbtre. On en a tenu compte dans le cas des grands garçons, mais non dans celui des petits.
M. de Savoye: Du côté du film, du côté des grands garçons, qu'est-ce que vous en dites?
M. Campbell: Pour notre part, nous estimons que les consultations ont été fructueuses, bien que nous nous entendions tous pour dire qu'elles ont été tenues trop tard puisqu'elles sont nécessaires avant l'adoption d'un projet de loi. Dans le cadre de l'étude du projet de loi C-17, on m'a demandé de participer, à titre de représentant des armuriers canadiens, à plusieurs jours de consultations avec la tcriminal law policy section du ministère de la Justice. On m'a demandé ce dont nous avions besoin pour notre travail. Il y a un problème, car on utilise maintenant le temps pour faire des réparations.
M. de Savoye: Si je vous comprends bien, messieurs Campbell et Gazale, les consultations qui ont eu lieu ont réglé certaines choses, mais on se retrouve aujourd'hui pour réparer ce qui n'aurait jamais dû être brisé en premier lieu.
Monsieur le président, le rôle de notre comité est d'écouter les témoins et de prendre note des irritants que contient la réglementation proposée. Nous sommes ici depuis quelques jours, et encore cet après-midi, nous sommes devant une situation où il ne s'agit plus d'irritants, mais du saignement d'industries qui voient leurs façons de fonctionner remises en cause par cette réglementation.
Un bon vieux principe américain dit: «keep it simple». J'ai l'impression que malgré les objectifs louables, désirables et souhaitables du projet de loi pour lequel j'ai voté, on est peut-être en train de créer un tel nombre d'effets pervers - et je ne parle pas que de votre industrie mais aussi d'autres industries qui ont fait des représentations - que les bienfaits de la réglementation pourraient s'en trouver affectés. Nous n'en sommes pas encore aujourd'hui au moment de formuler des recommandations, mais j'aimerais que lorsque nous le ferons, nous demandions au ministère de la Justice de refaire ses devoirs en termes de consultation et de simplification.
Je constate que nous avons une réglementation qui tente de couvrir de grands ensembles et de mettre tout le monde dans le même moule. C'est vraiment la quadrature du cercle; ça ne fonctionnera pas.
Il faudra trouver des façons simples de permettre aux industries et à ces entrepreneurs, qui ont un sens des responsabilités, un savoir-faire et une expertise - sans lesquels ils ne seraient plus en affaires - dans le contrôle d'armes à feu, de munitions ou de répliques de continuer à faire des affaires sans être embêtés par la loi, afin que cette dernière puisse avoir son plein effet.
Je me rends compte aujourd'hui que depuis trois jours, on parle bien plus souvent de choses qui n'ont rien à voir avec les objectifs de la loi, soit la sécurité du public et la baisse de la violence attribuable aux armes à feu, ce pourquoi je me suis battu. Or, je suis ici depuis trois jours, et ce n'est pas vraiment de cela qu'on parle parce que ces projets de réglementation ont toutes sortes d'effets collatéraux néfastes.
Monsieur le président, c'est ce que je voulais vous dire et dire aux témoins et à mes collègues du comité. Si cette loi doit avoir le succès qu'on lui souhaite, il faudra qu'elle soit largement simplifiée.
Est-ce que vous voudriez, messieurs les témoins, ajouter quelque chose à mes propos?
[Traduction]
Le président: Si je peux répondre à M. de Savoye, je voudrais préciser que bien entendu, nous ne sommes pas habilités à traiter la loi proprement dite, mais pour ce qui est de la réglementation, nous pouvons faire au ministre de la Justice toutes les recommandations qui nous semblent appropriées.
Nous allons clore nos audiences jeudi prochain. Nos derniers témoins seront les fonctionnaires du ministère de la Justice. Nous pouvons leur faire des recommandations, et leur poser toutes les questions qui nous semblent pertinentes. J'espère que cette rencontre avec les fonctionnaires du ministre durera aussi longtemps que les membres du comité estimeront que les réponses qu'on leur donne sont satisfaisantes et utiles. Donc, nous n'avons pas encore fini d'interroger les responsables du ministère. Après avoir entendu tous nos témoins, nous allons prévoir une période pour formuler notre réponse au ministre.
Donc, je pense que la procédure que nous suivons en comité répond aux attentes de tous les membres. Que nous soyons d'accord ou non, ça, c'est une autre histoire. Mais de toute façon, nous avons jusqu'au 21 février 1997 pour déposer notre rapport.
M. de Savoye: Je désire préciser, pour votre gouverne et celle de mes collègues, qu'il importe maintenant de formuler des recommandations très précises à soumettre à l'examen du ministère qui auront pour résultat de simplifier les règlements, règlements qui ne permettent pas de réaliser les objectifs que nous visions en adoptant cette loi. Ces règlements ont des effets négatifs très importants, comme on vient de nous l'expliquer, et nous devons absolument en tenir compte. Autrement, nos efforts seront totalement improductifs et ne déboucheront pas sur la mise en application de cette loi que nous appuyons tous.
Le président: Nous avons certainement la possibilité de faire de telles recommandations.
M. de Savoye: Merci, monsieur le président.
Le président: Je n'ai pas l'intention de compter cela dans votre temps de parole, monsieur de Savoye. Il vous reste un peu de temps.
M. de Savoye: Je n'ai pas vraiment d'autres questions à poser.
[Français]
Je n'ai pas d'autres questions. Je pense que les témoins et les mémoires qu'ils ont présentés nous ont donné matière à réflexion. Je conclus toutefois que ce qu'on est en train de faire, c'est ce qu'en anglais vous appelez du patchwork. Je déplore cette approche. C'est pourquoi je souhaite que par sa réglementation, le ministère simplifie les choses et évite qu'on ait à boucher des trous, alors qu'il ne devrait pas y avoir ce genre de problèmes au premier chef. Merci.
Le président: Merci, monsieur de Savoye. Je vous remercie aussi pour vos remarques au sujet des conclusions et objectifs du comité. Je voudrais maintenant céder la parole à M. Maloney.
[Traduction]
M. Maloney (Erie): Merci, monsieur le président. Je voudrais adresser une question à M. Adair ou à M. McLeod.
Les remarques de M. Campbell concernant le régime plus rigoureux du Québec m'ont beaucoup intéressé. Il reste que la situation là-bas n'a pas fait fuir l'industrie cinématographique. Vu cette réalité, pourquoi estimez-vous que le projet de loi C-65 et les règlements d'accompagnement vont causer un exode de producteurs qui iraient normalement tourner leurs films en Colombie-Britannique et en Alberta?
Le président: Monsieur McLeod.
M. McLeod: Je vais répondre en premier.
Quand nous parlions tout à l'heure des films à gros budget, c'est-à-dire les films d'aventure qui coûtent 40 millions de dollars, ou les films qui mettent en vedette des gens comme Jean- Claude Van Damme, il est évident que les producteurs d'un projet de cette envergure ne vont pas aller ailleurs tout simplement à cause d'une somme relativement faible qu'ils vont devoir engager à cause d'une loi adoptée par le pays dans lequel ils tournent leurs films. C'est dans le cas des projets de plus petite envergure, qui ont des budgets beaucoup plus serrés, que ces coûts supplémentaires seront évalués avec beaucoup plus de sérieux.
Quant à l'effet global des changements que prévoit le projet de loi C-68 sur les séries télévisuelles à petit budget, les «films de la semaine» et les longs métrages à budget limité... disons que les coûts supplémentaires qu'entraîneront ces changements influeront de façon considérable sur leurs budgets. Les sociétés de production vont nécessairement en tenir compte, de même que de tous les autres facteurs et coûts importants, et tous ces éléments, surtout si elles ont des doutes quant à notre capacité de mener à bien ce projet en leur fournissant des armes à feu - ou toute autre chose - dont elles ont besoin - influeront nécessairement sur la décision de choisir un lieu de tournage ou un autre.
Il est peu probable qu'il y ait un tollé ou qu'on entende parler dans les médias de gens qui tournent leurs films au Texas parce que les armes en caoutchouc coûtent trop cher en Colombie- Britannique. Il est évident que ce genre de choses ne va jamais se produire. Ce serait ridicule, d'ailleurs.
C'est simplement que les difficultés qui se poseront pour assurer le mouvement des marchandises entre différents pays et entre fournisseurs de ce genre de matériel... Permettre à d'autres personnes d'utiliser ces articles sur un plateau représentait une tradition qui va maintenant changer. Cela va nécessairement perturber non seulement le secteur des productions à faible budget, mais celui des productions à gros budgets, même si ce dernier peut plus facilement s'accommoder de changements aussi importants.
Le président: Monsieur Adair, voulez-vous intervenir?
M. Adair: Je pense que Neil a très bien décrit la situation. On tourne des films à plus gros budget au Canada en raison des décors naturels qu'on trouve ici et des économies qui peuvent être réalisées du côté des postes budgétaires les plus importants. Dans l'ensemble, ça ne va pas influer sur leurs budgets. Ils sont en mesure d'absorber ces coûts. Le problème, c'est que ces productions-là représentent un petit pourcentage de notre chiffre d'affaires.
L'an dernier, une quarantaine de «films de la semaine» ont été tournés ici. Nous avons également travaillé sur 15 ou 18 séries télévisées. Ce sont ces productions qui représentent la majeure partie de notre chiffre d'affaires, et elles ont des budgets beaucoup plus serrés.
En ce qui concerne le facteur coût, les règlements sont actuellement formulés de telle sorte que cela va non seulement coûter plus cher à l'entreprise, mais lui attirer de plus gros ennuis. Si l'entreprise doit dépenser plus, et ne peut pas se permettre de dépasser son budget d'un million de dollars en supportant des coûts supplémentaires que lui imposent les nouveaux règlements sur les armes à feu, elle aura seulement son million de dollars pour la production, et tout le reste ira au réalisateur et au producteur. Elle ne va certainement pas sortir cet argent de sa poche.
Cet argent-là va devoir sortir de la poche d'une seule personne... c'est-à-dire celle qui travaille au Canada ou qui est fournisseur au Canada. Il faudra redistribuer cet argent si nous voulons continuer d'attirer ces productions vers le Canada. Il y a les droits à payer pour les permis et les coûts qu'entraînent les nouveaux règlements, et tout cela doit sortir de ce même budget d'un million de dollars. Ils ne vont pas trouver tout d'un coup des fonds supplémentaires pour supporter les dépenses qu'entraîne la nouvelle réglementation.
Le président: Monsieur Campbell.
M. Campbell: Il faut que je clarifie quelque chose que vous avez soulevé dans vos remarques. Le fait est que les producteurs qui viennent au Québec n'ont pas peur de venir parce qu'ils ne savent pas qu'ils devraient avoir peur. Je m'explique: Mon entreprise est unique dans toute la province du Québec, et même sur toute la côte est. Nous avons une structure qui est différente de celle des syndicats d'IATSE à Toronto et à Vancouver. Je pense qu'il y a peut-être quatre accessoiristes, sur 30 ou 40 qui travaillent au Québec, qui possèdent des AAAF. Les autres se contentent de s'assurer que la cigarette est toujours coupée à la bonne longueur pour chaque prise de vue. C'est ça leur travail. Ils veulent savoir où se trouvent la tasse et la soucoupe sur la table, et s'assurer que tout est placé au bon endroit. Ils ont toujours travaillé dans le cadre d'un système qui n'a pas été mis en place par moi, mais par mes prédécesseurs.
Le problème, c'est qu'étant donné qu'ils n'ont pas d'AAS, ils dépendent de moi pour leur fournir des armes à feu quand ils en ont besoin sur un plateau. Encore une fois, à Vancouver, par exemple, ils ont le droit d'avoir un accessoiriste sur le plateau pour manier les armes à autorisation restreinte. En fait, ils peuvent même tirer ou du moins ils pouvaient le faire par le passé - se procurer un permis de port pour une production qui dure un certain temps, et utiliser ces armes à feu dans le cadre de cette production seulement. Au Québec, cette possibilité n'existe pas.
Les productions qui sont tournées au Québec choisissent cette province en raison des décors naturels, des avantages budgétaires ou de l'ensemble de conditions que le producteur a négociées. Il incombe à mon entreprise de s'assurer qu'ils peuvent le faire de façon économique.
Si je menais mes activités dans les mêmes conditions que celles qui existent pour les productions à Vancouver, il est évident que les productions coûteraient plus cher au Québec, et à ce moment-là, on pourrait effectivement se demander si cet état de choses risquait de faire fuir les entreprises. Mais pour le moment, j'ai réussi à structurer mon entreprise de façon à pouvoir fournir des répliques à faible coût pour la durée du tournage d'une production. C'est uniquement au moment où ils doivent tourner des scènes avec des armes à feu ou faire de gros plans que je vais sur place. Je suis donc en mesure d'offrir une solution économique aux responsables de la production.
Louer de vraies armes à feu serait peut-être une autre possibilité, mais je n'ai pas le droit de le faire. C'est simplement qu'il existe une structure différente dans les deux provinces, et que je ne mène pas mes activités commerciales de la même façon que les responsables des deux autres compagnies qui sont titulaires de permis industriels à Vancouver. Il ne s'agit pas vraiment de savoir si on va faire fuir les entreprises de production ou non.
Je peux même vous citer des exemples d'entreprises qui sont venues chez nous et qui ont eu peur à cause de l'application des derniers règlements d'accompagnement du projet de loi C-17, règlements qui m'ont obligé d'interrompre deux tournages - une production américaine, dans un cas, et une coproduction franco- québécoise dans l'autre. J'ai dû interrompre le tournage pendant deux semaines parce que je ne possédais pas les bons permis. J'avais accès à des armes entièrement automatiques ne tirant que des cartouches à blanc fournies par quelqu'un de Vancouver, mais il me manquait les chargeurs à grande capacité, qui ne m'étaient tout simplement pas disponibles pendant cette période en octobre. J'ai dû donc faire interrompre le tournage pendant deux semaines, ce qui a coûté beaucoup d'argent au producteur, et m'a attiré de grands ennuis pendant quelque temps.
Nous avons également perdu trois productions au profit de Vancouver à la même époque, étant donné que les conditions là-bas n'étaient pas les mêmes qu'au Québec et qu'ils pouvaient organiser leur travail de façon différente. Donc, il nous est arrivé de perdre des contrats, mais il reste que mon entreprise au Québec est structurée de manière à atteindre un haut niveau de rendement.
M. Maloney: Peut-être pourrais-je adresser une autre question à M. Campbell, sur une question différente, à savoir l'article 13.
À la page 2, renvoi numéro 4, de votre mémoire, vous faites état de vos préoccupations concernant le tournage des films dans différentes localités. Si j'interprète bien l'article 13, ce dernier s'appliquerait à un particulier. Mais vous, vous êtes une entreprise. Avez-vous toujours les mêmes préoccupations? Est-ce que j'aurais mal compris?
M. Campbell: C'est vrai que j'étais inquiet en constatant qu'il n'y aurait pas d'exemptions pour les industries qui fournissent des armes à feu. C'est de cela que je parlais. Vous avez peut-être raison. Encore une fois, je n'ai pas analysé à fond chacun des articles. J'avais cru comprendre que cette disposition viserait tout le monde. C'est peut-être couvert dans un autre article, mais si tel est le cas, je ne l'ai pas trouvé. Je voulais donc soulever la question au cas où mon interprétation serait la bonne.
M. Maloney: Si je ne m'abuse, l'article 13 commence ainsi «Le particulier ne peut charger...». Peut-être pourrions-nous demander des éclaircissements aux représentants du ministère de la Justice avant que vous ne partiez.
Si vous me permettez, monsieur le président, je voudrais poser une autre question à M. McLeod.
En réponse à une question que vous a posée mon collègue sur la possibilité que votre entreprise ou que vos accessoires constituent une menace pour la sécurité du public, vous avez répondu que non, n'est-ce pas?
M. McLeod: Non, je n'aurais jamais répondu par la négative ou affirmé que ces objets ne posent aucun problème ou n'influent aucunement sur la sécurité du public. Il est évident que du moment où de tels objets existent et sont disponibles, et sont transportés d'un point à un autre, la possibilité que la sécurité du public soit compromise existe. Ce que j'essayais de vous faire comprendre, si j'ai bien compris votre question, c'est que nous faisons l'impossible pour éliminer tout risque à la sécurité du public. Par contre, certains articles que nous avons le droit d'utiliser et de posséder et qui sont classés dans la catégorie des armes à autorisation restreinte présentent un risque potentiel tout aussi important pour la sécurité du public que d'autres objets qui seront désormais des dispositifs ou armes à feu prohibés, quand les nouveaux règlements seront en vigueur. L'ironie de la situation nous laisse perplexes.
Mais pour répondre à votre question concernant la sécurité du public, il est évident que les vraies armes à feu sont des armes dangereuses, mais nous, dans notre secteur d'activité, pratiquons l'autosurveillance. Je pense que nous surveillons mieux ce matériel que n'importe quelle autre industrie ou groupe d'utilisateurs, sur une base régulière. On pourrait peut-être demander l'avis des CAF à ce sujet. Mais je ne suis pas au courant de quelque pratique que ce soit dans notre secteur d'activité qui pourrait présenter un risque pour la sécurité du public, à part le fait - et c'est l'évidence même - que les armes à feu sont des objets dangereux et exigent qu'on prenne des précautions particulières pour assurer la protection du public.
Le président: Merci beaucoup, monsieur McLeod.
Et notre dernier intervenant sera M. Ramsay.
M. Ramsay: Oui, je voudrais poursuivre la discussion lancée par M. Adair. J'accepte son explication; elle me semble tout à fait logique. Mais là nous parlons essentiellement du danger potentiel que présentent les armes à feu. Nous examinons une loi et des règlements d'accompagnement qui n'auront pas pour résultat de retirer ces objets de la société. Nous nous demandons simplement si ce projet de loi va réglementer le maniement de ces objets de manière à contribuer et à favoriser la sécurité du public.
Donc, en fin de compte, à condition que vous ne deveniez pas fou furieux, monsieur Adair, et que vous ne permettiez pas que ces armes à feu tombent entre les mains de fous furieux ou de gens irrationnels qui voudraient perpétrer des actes de violence à l'égard d'eux-mêmes, de membres de leur famille ou d'autres personnes, on peut dire que vous ne présentez pas de risque pour la société.
Il est clair que si vous gardez votre arme à feu dans une armoire fermant à clé, cette dernière ne peut aucunement présenter un danger. Elle ne présente un danger que lorsqu'elle tombe entre les mains de gens qui ont perdu la raison et qui veulent s'en servir pour faire du mal à quelqu'un. Voilà le genre de choses qu'on veut prévenir avec ce projet de loi.
Le fait est que nous avons reçu des témoignages, au sujet de ces règlements et du projet de loi lui-même, qui indiquent que les musées, les groupes qui montent des reconstitutions historiques, les clubs de tir, les groupes de chasse, les entreprises de sécurité qui emploient des véhicules blindés, y compris la Brinks et Loomis, les fabricants d'armes à feu, au nombre de deux au Canada, les guides et les fournisseurs d'équipement de chasse et de pêche, l'industrie cinématographique, et les arts du spectacle se servent d'armes à feu, mais dans des conditions rigoureusement contrôlées. L'utilisation contrôlée de ces armes à feu ne présente aucun danger pour la société, et il convient de préciser que la raison d'être de ce projet de loi n'est pas le danger potentiel que représentent ces différentes industries pour la sécurité du public.
Donc, votre industrie est régie par ce projet de loi, et nous cherchons par conséquent à déterminer l'incidence négative des règlements d'accompagnement. Voilà notre motivation essentielle. Je ne suis pas en faveur du projet de loi pour les raisons que je viens d'évoquer et pour d'autres raisons également.
Je voudrais néanmoins vous poser une question, et je vous demanderais de réagir. En fait, c'est surtout une constatation. Si vos consultations avec les fonctionnaires du ministère de la Justice n'ont rien donné ou presque rien donné jusqu'à présent - et je suppose que si elles avaient donné quelque chose, vous ne vous retrouveriez pas devant nous aujourd'hui - j'aurais des raisons de douter que les recommandations que nous pourrions faire au ministère de la Justice, et qui ne feraient que répéter les préoccupations que vous lui avez déjà exprimées - en vain, semble- t-il - puissent changer de quelque façon que ce soit la situation.
Dans cette tribune, vous êtes déjà plus loin de la véritable source de pouvoir décisionnel en ce qui concerne les règlements dont nous sommes saisis. Vous avez fait état de vos préoccupations et de vos doléances aux décideurs du ministère, et maintenant vous vous présentez devant nous. Nous sommes les derniers à pouvoir faire des recommandations, mais étant donné que vous les avez déjà faites vous-mêmes, sans doute de façon aussi précise et éloquente que vous l'avez fait aujourd'hui, il y a peu d'espoir, à mon avis, que nos recommandations aient plus d'influence que vous-mêmes, en chair et en os, avez pu avoir sur les fonctionnaires du ministère.
J'espère que je me trompe et que ces recommandations vont néanmoins se faire, parce que j'ai l'impression que tous les membres du comité, quelles que soient leurs allégeances politiques, reconnaissent la nécessité de prévoir des exclusions et de modifier certains règlements, ou peut-être la loi elle-même, pour que des tiers, c'est-à-dire vous-mêmes et toutes les autres industries qui sont visées par ces mesures du simple fait d'utiliser des armes à feu dans leur secteur d'activité, même si elles se conforment à des règlements fort stricts... À mon avis, c'est injuste. Toute cette situation est inadmissible, à mon avis.
Dans la mesure où ces nouvelles dispositions risquent de compromettre la stabilité et la viabilité économiques de certains de ces groupes... On nous a dit ce matin que les guides et les fournisseurs d'équipement de chasse et de pêche génèrent environ 2 milliards de dollars au Canada - ou du moins, les activités de chasse au Canada génèrent cette somme - et que la loi et les règlements d'accompagnement pourraient fort bien influer de façon très négative sur ce secteur.
Les groupes qui montent des reconstitutions historiques nous ont dit hier que si ces règlements sont adoptés... Une personne au moins nous a dit que son groupe disparaîtrait. Il n'a pas dit que c'était une possibilité; il a dit que c'était sûr.
Donc, je suis très inquiet de voir le traitement qu'on réserve à ce que j'appellerais les tiers, alors que la façon dont vous avez toujours manié les armes à feu jusqu'à présent ne justifie aucunement que vous fassiez l'objet de ce genre de réglementation. Je vois difficilement comment l'enregistrement des carabines et des fusils va permettre de réduire l'usage de ces armes par des criminels, car si je possède une arme à feu et que je devienne dingue un jour, la loi ne va pas m'empêcher d'aller faire une petite visite à Gordon Kirkby.
Je ne sais pas vous voulez réagir ou non. Ces projets de réglementation me perturbent beaucoup, et plus nous entendons parler des préoccupations des uns et des autres et des effets négatifs de ces règlements sur des industries tout à fait innocentes qui ne posent aucun danger pour la sécurité du public, plus je m'inquiète.
Le président: Il faut simplement espérer que M. Ramsay ne devienne jamais fou furieux. Il y a des gens au Canada qui diront que c'est déjà arrivé à certains députés, mais il vaut peut-être mieux éviter cette discussion.
Je voudrais permettre à M. Campbell de dire un dernier mot avant que je ne lève la séance.
M. Campbell: Je vais essayer d'être bref.
Je vais essayer de rester apolitique en vous expliquant ma compréhension de la situation. Lorsque le projet de loi C-80 est arrivé sur la scène publique, beaucoup de groupes représentant mon secteur d'activité et de gens comme moi-même ont exprimé leur point de vue au tout début du processus. Pour cette raison-là, bon nombre de groupes ont pu ensuite participer à ce processus. J'ai eu la chance de pouvoir y prendre part. En fait, certaines de mes propositions ont été incorporées, presque textuellement, dans la nouvelle loi. Je suis donc très heureux d'avoir pu participer aux discussions.
Quand la nouvelle loi est entrée en vigueur, j'avais l'impression - et je ne sais pas si les autres sont du même avis ou non - qu'elle avait été adoptée en vitesse. Nous voilà maintenant obligés de combler les lacunes qui résultent d'un processus d'examen trop rapide. Pour être juste, je dois dire que j'ai remercié le ciel quand j'ai trouvé Carolyn Saint-Denis au sein du ministère de la Justice, car j'avais enfin trouvé quelqu'un qui pouvait me donner des réponses. Dans ce sens-là, elle et les membres de son groupe ont essayé de tirer le maximum de mesures législatives qui ont déjà force de loi. Mais il y a beaucoup de rattrapage à faire. Il nous faut soit refondre la loi, soit la rafistoler, parce qu'il s'agit essentiellement d'un ensemble de mesures disparates.
Si les résumés des mesures présentées sont exacts, et l'idée consiste à refondre et à simplifier l'article 3 du Code criminel, c'est peut-être le résultat qu'on va obtenir. Mais je sais pertinemment que dans notre industrie, et dans d'autres également, comme vous avez pu le constater vous-mêmes, ces mesures créeront plus de problèmes qu'elles n'en régleront.
L'industrie du spectacle travaille un peu en vase clos. Nous faisons des choses qui seraient considérées illégales ou immorales dans d'autres contextes. Mais telle est la nature des téléthbtres modernes, du récit moderne. Parfois mon travail consiste à dissuader un réalisateur qui voudrait opter pour une solution plus violente ou utiliser un certain type d'arme à feu, mais c'est ainsi que j'ai structuré mon entreprise.
Ce qui compte, c'est que, quelle que soit l'intention de la loi - et on part du principe que l'intention est toujours de maintenir l'ordre public - j'espère que nous n'allons jamais présenter de danger pour l'ordre public, comme vous l'avez dit.
Les armes à feu sont de simples outils dans notre secteur d'activité, de même qu'un outilleur-ajusteur se sert de certains outils pour fabriquer différents objets. Il nous faut trouver un moyen... Comme le public a l'impression que nos outils sont dangereux, on a voulu que cette loi s'applique à nous; mais nous allons avoir de graves ennuis si les mesures visant les répliques entrent en vigueur. Nous allons avoir des ennuis avec les producteurs et le public, et ceux qui ont adopté cette loi s'en repentiront.
Le président: Merci, monsieur Campbell.
Monsieur Gazale, avez-vous un bref commentaire à faire?
M. Gazale: À mon avis, il faut se rappeler que les arts du spectacle devant un public sont très différents des films, en ce sens que l'utilisation des armes est vraiment très sporadique. Elle est normalement fonction des besoins d'une production individuelle.
Mais pour réagir à ce que disait M. Ramsay tout à l'heure, je peux affirmer qu'au moins quatre des 12 pièces que nous avons montées avaient un message d'antiviolence. L'arme qu'on a utilisée était simplement un moyen d'arriver à nos fins, c'est-à-dire de promouvoir la lutte contre la violence ou contre les armes. Et n'oublions pas le grand nombre de personnes qui sont amateurs.
Le président: Merci.
Monsieur McLeod, voulez-vous faire quelques dernières remarques avant que nous ne levions la séance?
M. McLeod: Oui, merci beaucoup.
Je voulais faire une observation au sujet du processus de consultation. Pendant tout ce processus, j'ai toujours eu le sentiment que les gens qui y participaient, le Centre canadien des armes à feu, etc., travaillaient très fort et s'efforçaient vraiment de régler tous ces problèmes. Cependant, le reproche que je ferais, personnellement, c'est que cette loi a été examinée et adoptée trop vite, et que le gouvernement a poussé les gens trop fort pour la faire adopter le plus vite possible.
En fait, quand je lis le texte, je constate que, de par sa formulation, la loi elle-même est punitive. J'ai l'impression que...
Le président: Excusez-moi de vous interrompre, mais nous ne traitons aujourd'hui que des règlements, monsieur McLeod. Nous n'avons pas le pouvoir d'examiner la loi.
M. McLeod: Oui, je le sais. Je voulais simplement vous faire remarquer que les responsables du Centre canadien des armes à feu ont travaillé très fort pour trouver des solutions, mais le problème fondamental est en réalité le libellé de la loi. Nous allons travailler pendant longtemps avant de trouver une solution au problème du libellé de la loi.
Le président: Merci.
Monsieur Adair.
M. Adair: Je suis tout à fait d'accord avec ce qu'ont dit Andrew, Alex et Neil. Des changements importants ont été introduits dans le cadre des règlements grâce aux consultations. Mais les règlements sont tellement vastes, et notre secteur d'activité est visé par tellement d'aspects différents de la réglementation - on a un peu l'impression que dès qu'on règle un problème, il y en a deux autres qui surgissent. Étant donné l'interconnexion de tous ces règlements, même s'il n'y a pas de problème dans une section, il y a en un dans l'autre. C'est la raison pour laquelle je félicite les responsables du ministère de la Justice qui ont travaillé avec nous et qui ont reconnu la nature de notre problème.
Malheureusement, nous n'avons pas suffisamment protesté au moment où la loi a été déposée. Nous n'y voyions pas de menaces, et nous avons eu tort. Nous avons présenté nos doléances. Mais on n'y a pas donné suite. Maintenant nous essayons de rafistoler une loi boiteuse. J'espère qu'on y arrivera et je suis très reconnaissant d'avoir pu participer au processus. Les conseils dont nous avons pu bénéficier pendant ce processus sont le résultat de l'excellent travail des gens du Centre canadien des armes à feu, qui ont bien voulu collaborer avec nous.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Adair.
Nous avons déjà eu un peu de chance, en ce sens que le témoin qui devait vous suivre ne pourra pas comparaître cet après-midi. Par conséquent, nous avons pu dépasser de loin le temps prévu pour notre discussion et approfondir les différents éléments de la réglementation qui touchent le secteur thbtral et l'industrie cinématographique. Je peux vous assurer que nous tiendrons compte de vos commentaires. Notre discussion avec vous a été très utile et intéressante.
Comme l'a dit M. de Savoye au début de la réunion, nous tenons à vous remercier d'avoir partagé vos secrets avec nous. Ceux d'entre nous qui sommes fans de la série X-Files vont regarder attentivement, monsieur McLeod, pour voir si les armes à feu flottent lors du prochain épisode. Je pense que nous sommes tous amateurs de thbtre et de films dans cette salle, et nous avons donc beaucoup apprécié vos témoignages. Nous sommes conscients du fait que vous avez consacré beaucoup de temps à notre éducation. Merci beaucoup pour votre temps et votre attention.
Membres du comité, demain nous recevrons deux témoins. Nous ouvrirons la séance à 9 heures et nous devrions pouvoir finir à 11 h 30. Malheureusement, je ne pourrai assister à la réunion, et par conséquent, M. Maloney présidera à ma place.
La séance est levée jusqu'à demain matin.