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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 30 avril 1996

.0903

[Traduction]

Le président: À l'ordre s'il vous plaît.

Bonjour tout le monde et bienvenue tout particulièrement à un bon ami et à notre collègue, le ministre de la Santé. Nous espérons que votre déclaration sera la plus courte possible, afin de nous donner beaucoup de temps pour vous interroger.

L'hon. David Dingwall (ministre de la Santé): Merci, monsieur le président. Je suis venu aujourd'hui avec la sous-ministre de Santé Canada, Mme Jean.

[Français]

C'est avec plaisir que je me présente aujourd'hui devant votre comité pour vous parler du Budget des dépenses principal de mon ministère.

Les Canadiens et les Canadiennes veulent être sûrs et certains que le ministre de la Santé fera le nécessaire pour que notre régime public d'assurance-santé demeure solide et continue de répondre à leurs besoins, peu importe leur revenu ou leur lieu de résidence. Les Canadiens et les Canadiennes me répètent sans cesse, au cours de conversations ou dans la correspondance que je reçois, que l'assurance-santé est importante dans leur vie. L'assurance-santé est un symbole des richesses de notre pays, et les citoyens veulent la protéger, pour eux et pour les générations à venir.

.0905

[Traduction]

Monsieur le président, à titre de ministre de la Santé, je souhaiterais continuer à assurer un accès universel aux soins de santé en maintenant la Loi canadienne sur la santé. Comme je l'ai déjà déclaré, monsieur le président, je n'ai aucune objection à débattre des principes de la Loi canadienne sur la santé, mais ces principes ne sont tout simplement pas négociables. Ils ne sont pas négociables parce que les Canadiens et les Canadiennes ont déclaré à maintes reprises qu'ils appuient les principes de la Loi canadienne sur la santé. Le gouvernement fédéral a clairement la responsabilité d'énoncer et de défendre des mesures et, je crois, d'agir au nom de tous les Canadiens et Canadiennes.

Les Canadiens et les Canadiennes s'attendent à ce que mon ministère reste à la fine pointe des connaissances médicales sur les nouvelles maladies infectieuses. Ils veulent être sûrs que mon personnel et moi-même collaborons avec nos homologues des provinces et des territoires pour lancer des stratégies nationales de lutte contre la maladie, ce que nous avons fait par le passé et continuerons de faire à l'avenir.

Il faut souligner, monsieur le président, que dans plus de 600 établissements de santé au Canada, les Indiens et les Inuit inscrits comptent sur les services de santé communautaire fournis par Santé Canada. Des groupes particulièrement vulnérables tels que les enfants, les femmes et les aînés s'attendent à ce que leurs besoins en matière de santé soient comblés grâce à des programmes résultant de la collaboration des employés de mon ministère avec leurs homologues des provinces et des territoires.

[Français]

Enfin, les Canadiens et les Canadiennes veulent être sûrs que mon ministère collabore non seulement avec les provinces et les territoires, mais aussi avec des groupes non gouvernementaux des milieux de la santé et de la médecine, pour lutter à l'échelle régionale et communautaire contre des maladies comme le sida, le cancer du sein, les maladies cardiovasculaires et la tuberculose.

Vu toutes ces attentes, l'une de mes priorités en tant que ministre de la Santé est de préserver et d'améliorer l'assurance-santé.

[Traduction]

Monsieur le président, il ne faut pas confondre «coûts du système» et «financement du système». En ce qui concerne le financement, nous nous sommes engagés, dans le discours du Trône et le budget, à continuer de verser des contributions pécuniaires stables pour les programmes de santé au moyen du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux.

Dans son budget de mars dernier, le gouvernement a tenu sa promesse d'assurer aux provinces le versement de paiements en argent prévisibles, stables et continus, dans le cadre du Transfert canadien en matière de santé et de services sociaux, pour le financement de l'assurance-santé. Il s'agit-là d'un tour de force en cette époque de compressions financières. En garantissant une composante pécuniaire minimale de 11 milliards de dollars à l'intérieur du Transfert canadien, nous faisons en sorte que les principes de la Loi canadienne sur la santé soient appliqués partout au pays. La stabilisation des versements en argent dans le cadre du Transfert montre clairement que le gouvernement fédéral tient absolument à voir appliqués les cinq principes de la Loi canadienne sur la santé.

Monsieur le président, lorsque je dis que nous devons accroître la viabilité financière de l'assurance-santé, je parle de l'aspect dépenses. Notre système de santé ploie sous le poids des coûts financiers. Sous bien des aspects, il ne correspond plus à la réalité d'aujourd'hui. Nous savons par exemple que les soins à domicile sont souvent plus efficaces et plus bénéfiques que d'autres formes de soins. Il nous manque cependant l'infrastructure pour adopter vraiment la formule des soins à domicile, même s'ils sont plus appropriés. Nous devons trouver, monsieur le président, des moyens de réduire les dépenses dans l'ensemble du système de santé, tout en assurant une prestation innovatrice des soins de santé.

J'ai l'intention de travailler en partenariat avec les gouvernements des provinces et des territoires ainsi qu'avec les autres instances du monde de la santé pour assurer la préservation et l'amélioration de l'assurance-santé, de même que sa viabilité financière. Si nous réussissons dans cette entreprise, cela aura des incidences importantes pour l'amélioration de la qualité et de la viabilité financière des soins de santé au Canada.

Monsieur le président, avec votre permission, j'aimerais déposer les notes de mon allocution, qui pourraient être intégrées au compte rendu comme si je les avais lues, afin que nous puissions passer tout de suite aux questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre.

Paul.

M. Szabo (Mississauga-Sud): Bienvenue, monsieur le ministre, et merci pour vos remarques.

Le gouvernement continue de déclarer aux Canadiens que les cinq principes de la Loi canadienne sur la santé - l'universalité, la transférabilité, l'intégralité, la gestion publique et l'accessibilité - continueront d'être défendus. Je me demande si vous pouvez nous parler du rôle des provinces dans la défense de ces principes ou de leur participation à la défense de ces principes.

.0910

Deuxième question, pouvez-vous décrire au comité la vision ou la stratégie de Santé Canada quant au partage des efforts entre la prévention et les soins? L'histoire de notre système de santé révèle une prépondérance des soins et des traitements, qui représentent environ 75 p. 100. À peine 25 p. 100 a été consacré à la prévention.

D'après le financement accordé dans des domaines comme le VIH et le sida et la stratégie anti-tabac - et, on peut l'espérer, les mises en garde sur les contenants de boissons alcooliques - nous avons des indications que la prévention constituera un aspect important de la stratégie visionnaire de Santé Canada et pour le système de santé à long terme du Canada.

M. Dingwall: Merci, cher collègue, pour ces deux importantes questions de fond.

En ce qui concerne la Loi canadienne sur la santé, nous avons les cinq principes et, j'ose affirmer que, si j'en juge par mes discussions avec les ministres provinciaux de la santé et la lecture des déclarations des premiers ministres, ces cinq principes de la Loi canadienne sur la santé sont largement acceptés.

Presque toutes, si ce n'est toutes les données des sondages démontrent assez clairement que la vaste majorité des Canadiens, dans toutes les provinces, toutes les régions et tous les territoires, appuient les cinq principes de la Loi canadienne sur la santé.

Comme je l'ai déclaré à mes homologues des provinces, si nous voulons améliorer le régime d'assurance-santé au pays, nous ne pouvons pas rester les bras croisés. Nous devons faire preuve d'imagination et d'ouverture d'esprit en ce qui concerne la Loi canadienne sur la santé.

Permettez-moi de vous donner un exemple. Il ne me paraît pas très logique de donner des médicaments à une personne hospitalisée en vertu de la Loi canadienne sur la santé mais de refuser de lui accorder une aide financière pour l'achat de ces médicaments si elle est à la maison et a besoin de ces médicaments. Quelque chose ne va pas, et je pense qu'il faut moderniser ce qui ne va pas. Quand je dis «modernisé», je ne veux pas dire abaisser les normes. Je pense que nous entrons dans le XXIe siècle en connaissant un peu les réalités qui nous attendent, en essayant de faire face à ce genre de problèmes.

Les gouvernements provinciaux ont été très favorables, au moins dans mes premières discussions, à la modernisation de ces aspects de la Loi canadienne sur la santé. Qu'est-ce que cela veut dire? Que le gouvernement du Canada doit écouter et tenter de comprendre ce que les provinces tentent de faire tout en maintenant les principes que nous croyons importants. Il faudra des discussions; il faudra des négociations; il faudra des justifications de leur part et des éclaircissements, si vous le voulez, de la nôtre. Je suis assez confiant que nous réussirons.

En ce qui concerne le maintien de ces principes, je pense que tout le monde sait comment faire. Nous l'avons fait par le passé et nous le faisons encore; et, si nécessaire, nous le ferons à l'avenir.

Quant à Santé Canada et son rôle, nous avons deux objectifs. Le premier se rapporte à l'assurance-santé - aux fins de l'argument, appelons cela les soins, si vous le voulez - et le second, à la santé de la population. Si nous voulons aller de l'avant de manière positive, la santé de la population doit compter autant que l'assurance-santé.

Les facteurs déterminants de la santé exercent une grande influence sur l'assurance-santé au pays et, en tant que ministère, nous travaillons de très près avec les gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi qu'avec les organisations nationales, régionales et provinciales pour déterminer ce que nous pourrions faire. Je pense que nous pouvons nous diriger dans cette voie.

.0915

Il faut non seulement affecter des fonds à ces tâches, qui sont bien réelles, mais aussi avoir un programme bien conçu, un objectif clair en tête et un plan d'action pour poursuivre cet objectif. Cela veut dire gérer les ressources un peu différemment.

Pour en revenir au premier point au sujet de la Loi canadienne sur la santé, mes homologues provinciaux, le ministre du Nouveau-Brunswick, le ministre de la Nouvelle-Écosse, le ministre de la Saskatchewan et, récemment, le ministre de l'Ontario, ont convenu que la modernisation de la Loi canadienne sur la santé est importante, importante pour que nous connaissions les réalités d'aujourd'hui et puissions apporter les changements nécessaires pour atteindre notre objectif.

Le président: Antoine.

[Français]

M. Dubé (Lévis): Je m'excuse, monsieur le ministre, d'avoir manqué le début de votre intervention. Cependant, je me suis rattrapé, car j'ai lu le texte en français.

[Traduction]

M. Dingwall: C'était un bijou de discours. J'ai eu droit à une ovation.

[Français]

M. Dubé: Je n'ose pas déployer autant d'enthousiasme. Je m'excuse de vous décevoir.

À la page 3 de votre texte, vous dites:

En garantissant une composante pécuniaire minimale de 11 milliards de dollars à l'intérieur du Transfert canadien, nous faisons en sorte que les principes de la Loi canadienne sur la santé soient appliqués partout au pays.

Ayant siégé au Comité permanent du développement des ressources humaines, je comprends bien le principe du Transfert social canadien; c'est-à-dire qu'on a retranché des fonds destinés à la santé, à l'aide sociale et à l'enseignement postsecondaire.

En examinant le budget de l'an dernier, je constate que le budget prévu pour la santé était de 8 553 690 000 $, et vous parlez de 11 milliards de dollars. J'aimerais que vous m'expliquiez comment vous pouvez dire que vous garantissez un montant de 11 milliards de dollars, alors que l'an passé, le budget était de 8,553,690 milliards de dollars. Pourtant, dans le budget, on dit que le budget affecté à la santé subira une diminution de 5,2 p. 100. J'essaie de comprendre.

[Traduction]

M. Dingwall: Je remercie le membre du comité de cette question.

En ce qui concerne le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, qui a été annoncé dans le budget de l'an dernier - les détails ont été fournis dans ce budget - le gouvernement du Canada a réagi en fonction de ses contraintes financières mais aussi, ce qui est tout aussi important, en fonction des exigences imposées au gouvernement national à l'égard de la cohérence du financement accordé par le gouvernement national aux programmes sociaux, dont la santé constitue un élément et un élément important.

À cet égard, lorsque j'ai rencontré les ministres de la santé peu après ma nomination, ils m'ont indiqué qu'ils voulaient deux choses. Ils voulaient d'abord une contribution pécuniaire minimale pour les programmes sociaux et ensuite une certaine cohérence. Le gouvernement du Canada est allé beaucoup plus loin que cela. Nous leur avons donné non seulement la cohérence - 25,1 milliards de dollars pour les trois programmes - mais aussi une contribution pécuniaire minimale de 11 milliards de dollars.

Au cours de mes discussions, je pense que le cycle demandé était de trois ans. Nous avons assuré la cohérence durant cinq ans. Nous avons prévu une indexation pour les trois dernières années. Donc, en réalité, le versement en espèces et les transferts d'impôt représenteront plus de 25,1 milliards de dollars pour les trois dernières années du cycle de cinq ans.

Une partie de cette somme sera administrée, si vous le voulez, par les provinces, qui détermineront leurs secteurs prioritaires. Nous croyons, et elles croient... En tous cas, elles ne m'ont pas indiqué - il y a eu une conférence des ministres tout juste la semaine dernière - que les montants prévus par le Transfert social ne leur permettent pas de combler leurs besoins dans les domaines de la santé, des services sociaux et de l'enseignement postsecondaire.

.0920

[Français]

M. Dubé: On a vu que certaines provinces, notamment la Colombie-Britannique, avaient eu des difficultés face aux cinq principes énoncés par le gouvernement. Où en est la situation actuellement quant au non-respect, par certaines provinces, de l'application de ces cinq principes?

La situation s'est-elle complètement rétablie ou le fédéral va-t-il retirer à certaines provinces des fonds qui, normalement, devaient leur être donnés?

[Traduction]

M. Dingwall: Là encore, c'est une importante question de fond.

Nous avons retiré des fonds destinés à la province de l'Alberta à cause de ce que nous croyons être une infraction importante à la Loi canadienne sur la santé. Mais ce genre d'examen est constant. Ces décisions ne se prennent pas unilatéralement, comme certains d'entre vous aiment le croire. C'est un effort collectif. De fait, le gouvernement du Canada collabore d'assez près avec les gouvernements provinciaux lorsqu'il y a des allégations d'infraction à la Loi canadienne sur la santé. On ne reçoit pas une allégation le vendredi qui est chiffrée le lundi suivant. Il y a de nombreuses discussions. Il y a un échange de documents avec la province. C'est elle qui donne une approximation de la valeur monétaire de l'infraction à la Loi canadienne sur la santé.

Certaines provinces n'observent pas toutes les dispositions de la Loi à la lettre. Je ne pense pas que ce soit grave pour le moment. Mais lorsque ces questions sont soulevées, nous en discutons, nous les informons de nos intentions et nous tentons ensuite de régler le différend sans médiatiser l'affaire. Normalement, nous réussissons assez bien, parce que, dans l'ensemble, les Canadiens appuient les principes et leur application.

Mais je suppose que la vraie question en ce qui concerne l'Alberta touchait au non-respect de la Loi canadienne sur la santé.

Le président: Grant.

M. Hill (Macleod): Merci d'être venu, monsieur le ministre.

Vous avez indiqué que l'Alberta est pénalisée en vertu des dispositions relatives aux cliniques semi-privées. Vous avez oublié de mentionner que la Nouvelle-Écosse est pénalisée elle aussi - tout comme Terre-Neuve et le Manitoba.

Au cours de la dernière série de questions que j'ai posées au ministre précédent, j'ai demandé pourquoi l'Ontario et le Québec n'étaient pas pénalisés. J'ai porté à l'attention du public le fait qu'il y a des cliniques semi-privées dans ces provinces et qu'aucune pénalité n'est imposée. Ainsi, la clinique Morgentaler, qui se trouve à deux pas de la Chambre des communes, exige des frais d'établissements des femmes d'autres provinces qui font appel à ses services. La clinique Magee, qui traite les traumatismes neuromusculaires, exige des frais d'établissements, tout comme l'International Prostate Centre. La clinique de fécondation in vitro pour les bébés-éprouvettes en Ontario exige de tels frais.

J'ai beaucoup de mal à comprendre pourquoi il y a une vision un peu sélective. Les frais d'établissements en Ontario sont peut-être un peu cachés, mais pouvez-vous m'expliquer pourquoi on ne ferme pas ces cliniques?

M. Dingwall: Premièrement, monsieur Hill, il n'y a pas de vision sélective. En réalité, comme l'indique mon sous-ministre, un grand nombre de ces questions, dont j'entends parler pour la première fois dans certains cas - et que je vous remercie de porter à mon attention - font l'objet de discussions avec les provinces visées. Vous avez raison d'affirmer que le Manitoba contrevient gravement à la Loi, d'un montant de 6 000 $. À Terre-Neuve, c'est plus grave; l'infraction est évaluée à 8 000 $. Dans le cas de la Nouvelle-Écosse, je n'ai pas les chiffres sous les yeux, mais il y a d'autres provinces en infraction, et nous retenons aussi des fonds qui leur sont destinés.

.0925

Je ne veux pas que vous soyez confus au sujet du processus qui aboutit à l'établissement des montants, que ce soit 6 000 $ ou 600 000 $. C'est un processus assez long. Comme je l'ai indiqué, on ne reçoit pas une allégation le vendredi et une évaluation le lundi. Il y a un échange d'information. Il y a des rencontres entre divers fonctionnaires. On clarifie les positions...

M. Hill: Je ne me soucie pas vraiment du processus. Ma question était qu'il semble y avoir...

M. Dingwall: Monsieur le président, avec votre permission, le membre du comité a fait une affirmation erronée dans son préambule. Il fait une affirmation erronée parce qu'il ne comprend pas le processus. Il me semble important que les membres comprennent qu'il y a ici un important processus pour appliquer les principes de la Loi canadienne sur la santé.

M. Hill: J'ai affirmé et j'ai tenté d'être très précis qu'il y a des amendes depuis deux ans, qu'il y a eu des consultations permanentes et que, selon moi, un grand nombre de cliniques échappent aux sanctions dans d'autres régions du pays. Voilà la question à laquelle on n'a pas répondu, à mon avis.

M. Dingwall: Nous allons nous en occuper.

M. Hill: C'est la réponse qu'on m'a donnée l'an dernier, «nous nous en occupons». Je ne crois pas que ce soit une réponse acceptable.

Vous avez indiqué que la contribution pécuniaire minimale de 11 milliards de dollars sera atteinte en 1999. Il y aura entre temps une réduction importante du financement aux provinces. Je me souviens très clairement qu'on a fait des promesses très très importantes au sujet des services de santé durant la campagne électorale. La baisse des versements en espèces est de 4,3 milliards de dollars en deux ans. Je ne vois là aucune raison de me réjouir. Qu'en pensez-vous?

M. Dingwall: Premièrement, monsieur Hill, on pourrait disputailler longuement et être très agressif au sein de ce comité et lancer des chiffres assez dévastateurs quant à la position de votre parti sur toute la question des programmes de santé et des programmes sociaux. Mais soyons impartiaux, puisque nous sommes entre collègues.

La situation financière du gouvernement du Canada, après que les Libéraux en ont pris la direction en octobre 1993, était très très sérieuse, c'est le moins qu'on puisse dire. Tous les ministères du gouvernement du Canada, dont Santé Canada, depuis Travaux publics jusqu'au Développement des ressources humaines, en passant par Industrie Canada, etc., se sont engagés dans ce que nous avons appelé une évaluation verticale des programmes afin de déterminer où nous pouvions réduire les dépenses pour atteindre nos objectifs budgétaires.

Le ministre Martin, et c'est à son honneur, a informé les gouvernements provinciaux au sujet des paiements de transfert et de la façon dont ils seraient financés à court et à long terme. Il n'y a eu aucune surprise, vraiment aucune. Les premiers ministres des provinces ont indiqué au premier ministre du Canada que, s'il devait y avoir des réductions, si les paiements de transfert étaient réduits, il fallait les prévenir à l'avance et assurer une certaine cohérence du cadre financier. Le ministre Martin a donné un préavis dans les budgets précédents. Nous nous sommes engagés dans un processus de consultation très sain avec les provinces.

Dans le budget actuel, nous avons pu régler cet aspect, à mon avis. Le gouvernement du Canada a fourni les recettes nécessaires. Il a accordé, sur une période de cinq ans, plus de 25,1 milliards de dollars par année. Il s'agissait d'une contribution pécuniaire minimale et d'un transfert. Jusqu'ici, au cours des rencontres privées et publiques avec les ministres de la santé, je ne me souviens pas que l'un d'eux se soit opposé à cette somme. Ils comprennent notre situation financière et savent que ce que nous avons donné en tant que gouvernement national est assez généreux compte tenu de la conjoncture économique.

Je pense que nous avons clairement rempli notre engagement de fournir les fonds nécessaires pour financer les programmes sociaux, et tout particulièrement les services de santé, dans notre pays.

M. Hill: J'aurais une dernière question, avec votre permission, monsieur le président.

Le président: Nous y reviendrons au deuxième tour.

John.

.0930

M. Murphy (Annapolis Valley - Hants): Bienvenue, monsieur le ministre et à vous aussi, madame la sous-ministre.

Comme vous le savez, Paul Szabo, mon collègue au sein de notre comité, a déposé un projet de loi d'initiative parlementaire sur l'étiquetage des boissons alcooliques. Ce projet de loi est étudié actuellement par l'un de nos sous-comités. Nous commençons à entendre des témoins. Il y aura notamment les brasseurs.

Je me demandais quelle est votre position au sujet de ce projet de loi. Pensez-vous que les mises en garde soient un moyen efficace de réduire le nombre de personnes qui boivent de manière irresponsable? J'aimerais entendre vos commentaires.

M. Dingwall: Premièrement, en ce qui concerne l'alcoolisme au Canada, cela m'inquiète beaucoup, notamment pour des raisons personnelles. Une grande partie de ma famille, mon père et deux de mes oncles ont vu l'alcoolisme raccourcir considérablement leur vie.

J'ai déclaré à Paul en privé et je pense l'avoir aussi affirmé publiquement, que je peux appuyer le principe du projet de loi. Mais à titre de ministre de la Santé, je dois aussi poser une deuxième question: est-ce le moyen le plus efficace? Jusqu'ici, je pense qu'il n'a pas été démontré positivement que c'est le meilleur moyen de réduire les abus en ce qui concerne la consommation d'alcool. Le principe en est un que nous devons appuyer, mais compte tenu de l'information dont nous disposons, je ne pense pas que ce soit le moyen le plus efficace.

C'est coûteux. Ce serait très coûteux pour Santé Canada, cela représenterait plus de 10 millions de dollars, je crois. Je ne sais pas quels seraient les coûts pour l'industrie.

Je pense qu'il est possible d'accepter le principe et de trouver d'autres moyens de faire passer le message, que ce soit par des exigences imposées à l'industrie pour qu'elle change certaines de ses pratiques de commercialisation ou la façon dont elle informe le consommateur au sujet des effets possibles.

Je dois avouer cependant qu'au fil des années j'ai été très impressionné par l'Association des brasseurs du Canada. Cela n'a pas commencé sous mon mandat, cela remonte à beaucoup plus loin. Je pense que la publicité responsable de cette industrie au sujet de la consommation d'alcool a été assez efficace dans toutes les régions du pays, et j'aimerais qu'on réfléchisse davantage aux moyens d'appliquer le principe que mon collègue a eu raison de porter à notre attention.

M. Volpe (Eglinton - Lawrence): Bienvenue, monsieur le ministre.

Vous avez employé le terme «moderniser» trois fois durant votre exposé et dans vos réponses, ce matin. Je pense que cela traduit la pensée de votre homologue ontarien, le ministre de la Santé Jim Wilson, qui a déclaré lui aussi à la presse qu'il croit que le système de santé du Canada doit être modernisé.

Je crois qu'on le répète à plusieurs reprises dans le document sur les perspectives rédigé par votre ministère et j'aimerais faire une citation en préambule à ma question. On lit dans ce document que la complexité des problèmes de santé «augmente... et quelquefois aussi leur fréquence à cause des changements démographiques qui se produisent au Canada, et à cause de la mondialisation et des technologies nouvelles».

Dans votre exposé et dans vos réponses à certaines questions, monsieur le ministre, vous avez fait des renvois précis, ainsi que des allusions, à une tension créatrice entre la volonté de protéger les principes de la Loi canadienne sur la santé et le désir et la nécessité d'entreprendre cette modernisation. Je me demande s'il est possible de maintenir cet équilibre délicat entre les deux, de rendre productive la tension créatrice tout en maintenant les principes sans les négocier, comme vous l'avez affirmé, je crois, ici et même à la Chambre.

Premièrement, est-il possible de protéger, de permettre le débat, sans négocier? Dans l'affirmative, donnez à notre comité une indication de la façon d'y parvenir.

.0935

M. Dingwall: Beaucoup de Canadiens sont effrayés quand on leur dit qu'on veut moderniser la Loi canadienne sur la santé. Ils pensent qu'on veut se débarrasser des médecins et des hôpitaux du pays, qu'on veut éroder le système de santé du pays. Ce n'est certainement pas mon intention, et je dois croire sur parole les déclarations et les engagements de mes collègues provinciaux, qu'ils soient en Alberta, en Ontario ou au Nouveau-Brunswick.

Il me semble tout simplement qu'à mesure que nous délaissons en masse les soins en établissement pour nous diriger vers des cliniques communautaires, vers des soins à domicile - ce qui m'inquiète un peu et je serais disposé à expliquer mes craintes au comité - nous devons moderniser la loi. Je suis convaincu que bien des lacunes pourraient être corrigées, ou changées, sans menacer les principes d'aucune façon, en fournissant des soins de santé mieux adaptés au pays.

L'un des exemples que j'ai donnés est celui des médicaments. L'autre est celui du mode de paiement des médecins au pays. Tous les gouvernements provinciaux se penchent sur cette question.

Je ne pense pas que nous devrions faire l'autruche et affirmer que quelqu'un pourrait interpréter nos actes comme une infraction à ceci ou à cela. Je pense que nous devrions avoir l'esprit ouvert. Je pense que nous devrions être créatifs. Je pense que nous devrions nous asseoir avec nos gouvernements provinciaux pour trouver les meilleurs moyens d'offrir le produit du point de vue de l'assurance-santé et du point de vue de la santé de la population.

Franchement, lorsque nous avons parlé de l'approvisionnement en sang la semaine dernière, nous avons aussi parlé d'une foule d'autres sujets. Sur bien des aspects, les provinces sont d'accord pour procéder de cette façon.

Je tiens aussi à déclarer publiquement que, trop souvent, ceux d'entre nous qui sont dans une tour d'ivoire aiment bien lancer des flèches aux gouvernements provinciaux, mais beaucoup de ces gouvernements ont déployé des efforts considérables pour moderniser leurs systèmes de santé dans leur province. Oui, des établissements ont été fermés. Oui, des établissements ont fusionné. Mais je ne pense pas que nous aurions raison d'affirmer que la qualité des soins a diminué. Je pense que toutes ces mesures ont été prises afin d'améliorer la qualité des soins dans les diverses provinces. Je n'ai aucun scrupule à m'engager dans ce genre de débat et ce genre de discussion avec les provinces.

D'un autre côté, si certains veulent profiter de la situation pour écarter le gouvernement fédéral du débat, pour abaisser les normes, je ne pense pas que je serais d'accord. Mais si le débat vise à moderniser le système, à l'améliorer, je pense qu'il y a beaucoup de bonne volonté et que nous pourrions réaliser des progrès sur certaines de ces questions.

Le président: Il nous reste environ 20 minutes. Le ministre a un autre engagement à 10 h. J'aimerais donner la parole, dans l'ordre, à Andy, Antoine et Grant.

M. Scott (Fredericton - York - Sunbury): Merci beaucoup, monsieur le président.

Au sujet de la modernisation - vous avez évoqué, par exemple, la prestation des services - je me réjouis de la création, annoncée dans le budget, du Fonds pour la recherche en services de santé. Je pense que nous en avions besoin depuis longtemps. Cela définit également le rôle du gouvernement fédéral dans ce débat qui s'engage au pays. Je sais que les provinces en arrachent. Il s'agit de définir la place du gouvernement fédéral dans tout cela.

Deuxièmement, dans notre quête d'une approche préventive - et je pense que les deux sont complémentaires - quel est le rôle du gouvernement fédéral, pas nécessairement sur les grands enjeux comme, par exemple, le tabac, la sécession ou n'importe quelle autre stratégie nationale en place, mais en ce qui concerne la coordination des diverses mesures prises par les provinces pour régler ce problème, cette grande question nationale qui est de savoir si les services doivent être fournis par les provinces ou par quelqu'un d'autre?

.0940

Enfin, et simplement pour clarifier la situation, le gouvernement fédéral s'est-il déjà engagé par le passé à verser une composante pécuniaire minimale des transferts? Je pense que nous comprenons tous que, depuis le début, à mesure que les recettes en points d'impôt ont augmenté, la composante pécuniaire a diminué. Au bout du compte, lorsque la portion fiscale a atteint le plafond... On peut supposer que, jusqu'à ce qu'un gouvernement prenne l'engagement qu'il y aura des mouvements de fonds, la composante pécuniaire disparaîtrait. A-t-on jamais pris des engagements en ce sens?

M. Dingwall: Merci, cher collègue.

En ce qui concerne la contribution pécuniaire minimale, d'après mon étude des relations fédérales-provinciales, en particulier sous le régime du financement des programmes établis et du financement par blocs, qui a été proposé il y a de nombreuses années, il n'y a jamais eu d'engagement à l'égard d'un minimum. D'ailleurs, dans le système existant, avant le budget, les points d'impôt auraient nettement augmenté et la composante pécuniaire aurait nettement diminué. Nous sommes parvenus à fournir une composante pécuniaire minimale et un transfert d'impôt et ce sera évidemment le transfert d'impôt qui croîtra.

Donc, la réponse à cette question est non, il n'y a jamais eu d'engagement.

En ce qui concerne les provinces, la santé de la population et la promotion de la santé, nous voulons que nos interventions dans ce domaine soient assez stratégiques et complètes. Nous ne voulons pas de chevauchements, ni de doubles emplois. Nous voulons nous assurer d'offrir le programme de la meilleure façon possible. Bien souvent, le gouvernement n'est pas le mieux placé pour ce faire. Ce peut être un tiers. Ce peut être le palier municipal. Ce peut être un organisme. Ce peut être un organisme national, un organisme sans but lucratif, une ONG, qui est alors en mesure, grâce à du financement fédéral et provincial, de trouver d'autres sources de financement afin de régler un problème qui lui tient beaucoup à coeur.

Par le passé, nous avons collaboré de très près avec les ONG. Au moment où je vous parle, nous collaborons très étroitement avec nos homologues provinciaux à propos de divers programmes. J'ai averti mes fonctionnaires que je ne veux pas de chevauchements ni de doubles emplois, et ils ont compris ce message. Je ne suis ministre que depuis trois mois, alors nous devrons attendre pour voir les résultats.

Le président: Antoine.

[Français]

M. Dubé: Je vais vous faire une demande, mais je ne veux pas une réponse dès ce matin parce que ce serait peut-être un peu long.

Étant donné la mise en oeuvre du Transfert social canadien à compter du 1er avril dernier, je serais très intéressé, au nom de l'Opposition officielle, à obtenir plus de détails sur l'application des cinq principes de base. Il doit certainement y avoir des règlements de base.

Je vais quitter ce champ parce que nous pourrions en parler longtemps. Dans le journal de ce matin, j'ai lu quelque chose qui me tient à coeur. Aux États-Unis, le président Clinton parle beaucoup d'une lutte féroce contre les effets de la consommation de drogues. Aux États-Unis, on établissait les coûts de santé reliés à la consommation de drogues à 47 milliards de dollars.

Je sais que, l'année dernière, il y avait un projet, qui est d'ailleurs en suspens, ayant trait à tous les aspects des drogues. Le projet de loi reviendra devant nous lorsque le Sénat aura terminé son étude. Donc, on en reparlera en temps et lieu.

Vous n'en avez pas parlé dans votre intervention, à moins que j'aie lu trop vite. Avez-vous un programme ou une stratégie qui pourrait s'harmoniser avec celle des États-Unis et qui verrait, au moins sur le plan de la prévention et de l'information, à informer les jeunes sur les conséquences de la drogue pour eux et pour leur santé? Cela impliquerait des coûts additionnels pour l'ensemble des Canadiens.

.0945

[Traduction]

M. Dingwall: En ce qui concerne le Transfert social et certains détails, nous serons ravis de vous fournir cette information, à vous et à votre attaché de recherche.

Deuxièmement, en ce qui concerne les drogues, je pense qu'il y a deux éléments, surtout quand il est question d'utilisation. Il y a, d'une part, les drogues illicites et, d'autre part, la consommation de médicaments au pays.

Dans le cas des drogues illicites, nous offrons divers programmes, avec divers groupes et dans plusieurs provinces, sur la toxicomanie, sur les moyens de réduire certaines de ces activités, en essayant de changer le comportement, si vous voulez, en travaillant avec les gouvernements provinciaux et, comme je l'ai indiqué, les organisations sans but lucratif, pour essayer de régler ce problème.

Il y a aussi un grand rôle pour la GRC et le Solliciteur général, qui se chargent de l'application de la loi et tentent de déterminer exactement d'où vient la drogue pour pouvoir l'empêcher d'entrer.

Un autre aspect de la question, qui me préoccupe gravement, est celui du prix et de l'utilisation des médicaments au Canada. Je ne veux pas vous accabler avec ce problème, mais il est important de souligner que le coût des médicaments représente l'un des coûts les plus importants pour le système de santé du Canada. Ce n'est pas une affirmation du ministre de la Santé du Canada, mais plutôt des ministres de la santé des provinces, qui ont demandé mon appui et mon aide pour essayer de réduire ce coût.

Un moyen consiste à agir sur les prix - par les médicaments génériques plutôt que les médicaments de marque - mais on peut aussi agir sur l'utilisation des médicaments. Je ne prescris pas les médicaments. Vous non plus. Les médicaments sont prescrits par les médecins du pays, et nous devons travailler avec l'Association médicale canadienne et les provinces pour essayer de régler certains de ces problèmes très importants.

On me dit que dans certaines provinces, la consommation de médicaments d'ordonnance est en hausse d'environ 15 p. 100. Vous pouvez imaginer les coûts que cela représente et, si ces chiffres sont exacts, l'incidence sur divers groupes spéciaux, comme les personnes âgées, les jeunes ou les Autochtones. Nous sommes donc très préoccupés.

Nous en avons discuté la semaine dernière avec les ministres de la santé et nous échangerons de l'information sur les prix, l'utilisation, les pratiques de marketing et l'élimination de médicaments dont le consommateur n'a plus besoin.

Nous agirons donc dans ces quatre domaines et nous espérons pouvoir proposer ensuite des moyens d'alléger les coûts et de réduire la consommation.

[Français]

M. Dubé: A-t-on une évaluation des coûts santé qui y sont reliés? Je m'intéresse particulièrement aux drogues illicites. A-t-on fait, à l'échelle canadienne, une évaluation des coûts de santé semblable à celle qui a été publiée ce matin pour les États-Unis?

[Traduction]

M. Dingwall: Je n'ai pas les chiffres devant les yeux, mais je peux certainement vous les trouver.

Les coûts varient. Il s'agit d'une approximation. Je ne parierais pas ma chemise, mais ils représentent une portion importante des coûts de notre système de santé.

La GRC possède de l'information très détaillée sur le coût pour la société, en général, de la consommation de drogues illicites et les effets sur notre société dans divers secteurs.

Nous essaierons de vous fournir cette information.

M. Hill: Le ministre a indiqué qu'il aimerait comparer la position des partis sur l'assurance-santé, comme si j'allais faire piètre figure dans cette comparaison, alors permettez-moi de déclarer officiellement ce qui suit au comité.

En éliminant le gaspillage dans d'autres domaines, le Parti réformiste est capable, dans le cadre de notre Transfert canadien en matière de santé et de services sociaux, de réduire les soins de santé de 1,5 milliard de dollars en trois ans. Je souligne, avec tout le respect que je vous dois - et je tiens à le déclarer publiquement - que le gouvernement libéral les a réduits de 4,3 milliards de dollars en deux ans. Le ministre aurait donc peut-être intérêt à faire attention quand il indique que cette comparaison ne serait peut-être pas avantageuse pour le Parti réformiste.

.0950

En ce qui concerne l'approvisionnement en sang, il y a eu une énorme controverse au sujet de la Commission Krever. Un grand nombre d'observateurs au Canada estiment que la Commission Krever a été muselée par les poursuites juridiques. J'ai entendu à maintes reprises - pas de la bouche du ministre de la Santé habituellement, mais plutôt de son collègue le ministre de la Justice - qu'il s'agit simplement d'une interprétation juridique relativement étroite et que la Commission Krever déposera bientôt son rapport. Je ne suis vraiment pas d'accord. Je crois que ce qui arrive va entraîner le démantèlement de la Commission Krever.

J'entends aussi, et très souvent, que le Canada est aussi bien approvisionné en sang que n'importe quel autre pays au monde. D'un point de vue objectif, je ne suis pas d'accord. J'aimerais que nous nous penchions sur le cas de la Belgique, pour voir ce qui est arrivé dans ce pays, en même temps que se déroulaient les travaux de la Commission Krever.

En Belgique, on a refusé immédiatement les donneurs à haut risque. Lorsque des épreuves de dépistage ont été commercialisées sur le marché international, la Belgique les a adoptées tout de suite. Le Canada n'a pris aucune de ces mesures.

En Belgique, les vieilles réserves de sang, qui n'avaient pas subi de traitement thermique, ont été détruites immédiatement. Elles ne sont pas restées sur le marché. Le Canada n'a pas pris cette mesure.

En Belgique, on est passé immédiatement des produits sanguins fractionnés aux cryoprécipités. Le Canada n'a pas pris cette mesure.

Résultat : en Belgique, 6,5 p. 100 des hémophiles sont devenus séropositifs. Au Canada, 44p. 100 le sont devenus.

Si nous ne nous enlevons pas de la tête cette idée stupide que notre approvisionnement en sang est le meilleur au monde, nous ne réglerons jamais ce problème.

Je veux deux choses du ministre. Je veux qu'il me dise clairement s'il fera tout ce qui est humainement possible, en tant que ministre de la Santé, pour s'assurer que la Commission Krever dépose son rapport - un rapport complet et indépendant - et je veux qu'il fasse tout ce qu'il peut pour s'assurer que notre approvisionnement en sang est aussi sûr que possible.

M. Dingwall: Monsieur le président, simplement pour que je puisse répondre au fond de sa deuxième question et que le comité le sache, vu qu'il a indiqué les chiffres pour son parti, je pense qu'il faut préciser que le chef du troisième parti a déclaré en septembre 1993 que le Parti réformiste appuyait les tickets modérateurs et les franchises et qu'il éliminerait l'universalité. Il a aussi déclaré, en octobre 1993, que le Parti réformiste s'oppose aux soins de santé privés et aux tickets modérateurs.

Le député de Macleod a cependant déclaré à la Chambre, le 17 octobre 1995 que l'assurance-santé est mauvaise pour tout le monde. Puis, le 23 novembre, il a changé d'idée et déclaré que l'assurance-santé est importante pour tous les Canadiens.

Je pense que le député de Macleod veut que les Canadiens voient en son parti le défenseur des programmes sociaux. Mais le 5 mars dernier, monsieur le président, on a demandé carrément au chef du troisième parti, du Parti réformiste, s'il appuyait ou non son critique en matière de santé. La réponse du chef du Parti réformiste, son chef, a été non. Il a déclaré que le Parti réformiste réduirait le déficit en diminuant les transferts. C'était le 5 mars 1996.

En ce qui concerne l'approvisionnement en sang, je veux indiquer clairement, parce que c'est une question importante, et je pense que le Dr Hill, du fait qu'il a soulevé la question, croit aussi qu'elle est importante, que le ministre de la Justice a une obligation fiduciaire à titre de ministre de la Justice de s'assurer que les personnes susceptibles d'être citées à la commission ont la possibilité de témoigner pour présenter leur point de vue. C'est un principe fondamental du droit canadien. C'est un principe que doit respecter le ministre de la Justice. Il ne peut pas se soustraire à cette responsabilité.

.0955

Qu'arriverait-il s'il agissait autrement? Je suppose que si le rapport de la Commission Krever était déposé et devenait public, les embarras juridiques dureraient des mois. Je ne crois pas que c'est ce que vous voulez. Je ne crois pas que c'est ce que veulent les Canadiens et ce n'est certainement pas ce que je veux.

En ce qui concerne la Commission Krever, je ne peux pas en faire une affaire personnelle, parce que ce n'est pas bien, mais c'est mon parti, lorsqu'il était dans l'opposition, qui a blâmé Benoît Bouchard, à titre de ministre de la Santé... pour qu'il demande une enquête. En tant que leader de l'Opposition à la Chambre, c'est moi qui ai demandé, au nom de mon parti, qu'on crée la Commission Krever. Je ne crois pas qu'un autre député à la Chambre des communes ait plus hâte que moi ou soit plus intéressé que moi de lire le rapport final du juge Krever sur le système d'approvisionnement en sang du Canada. Le plus tôt sera le mieux, et j'espère ne pas devoir attendre trop longtemps.

En ce qui concerne la sécurité de notre système - et je ne veux pas jouer sur les mots - je crois, et les gouvernements provinciaux croient aussi que nous avons un système d'approvisionnement en sang sans danger au Canada. Mais je pense que nous avons tous, moi-même à titre de ministre de la Santé ainsi que les ministres de la santé des provinces, l'obligation de nous assurer qu'il est le plus sûr au monde. Voilà pourquoi nous nous sommes rencontrés la semaine dernière, pourquoi nous avons mis de côté la partisanerie et pourquoi nous nous sommes attaqués au problème. Nous avons demandé à nos fonctionnaires de nous proposer des moyens de régler certains problèmes administratifs, afin que les problèmes qui sont survenus par le passé ne se répètent jamais plus.

Mais je suis très déterminé - et j'espère que cela répond à votre question - à obtenir le rapport Krever. Je suis très déterminé à essayer de rendre notre système le plus sûr au monde, et je travaille en ce sens. Je veux travailler avec mes homologues provinciaux, et nous ne ménagerons aucun effort pour faire avancer ce dossier.

Le président: Merci beaucoup. Notre temps est écoulé. Au nom du comité, je veux remercier le ministre

[Français]

et également notre amie, madame Jean. Merci de votre aide, madame.

[Traduction]

Nous ferons une pause d'environ deux minutes avant de poursuivre à huis clos.

[Les travaux se poursuivent à huis clos.]

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