Privilège parlementaire / Droits des députés

Liberté de parole : convention relative aux affaires en instance; question inscrite au Feuilleton laissée sans réponse parce que l’affaire est devant les tribunaux

Débats, p. 14137–14138

Contexte

Le 11 mai 2015, Charlie Angus (Timmins—Baie James) soulève une question de privilège relativement à la question écrite Q-1129. M. Angus estime que le gouvernement, en répondant qu’il ne peut y répondre parce que la cour est saisie de l’affaire, retient de l’information dont le député a besoin pour exercer ses fonctions parlementaires. Peter Van Loan (leader du gouvernement à la Chambre des communes) fait valoir qu’il ne revient pas au Président de se pencher sur les réponses du gouvernement et soutient que la réponse ne fait que reprendre le principe qui sous-tend la convention relative aux affaires en instance, puisque les tribunaux sont saisis de l’affaire. Après l’intervention d’un autre député sur la question, le Vice-président (Joe Comartin) prend la question en délibéré[1].

Résolution

Le Président rend sa décision le 26 mai 2015. Il confirme le rôle limité que joue le Président pour ce qui est de statuer sur les réponses données aux questions écrites, y compris aux questions pour lesquelles les députés invoquent la convention relative aux affaires en instance. Par conséquent, il ne peut conclure qu’il y a eu de prime abord atteinte au privilège.

Décision de la présidence

Le Président : Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la question de privilège soulevée le 11 mai 2015 par le député de Timmins—Baie James au sujet de la réponse du gouvernement à la question écrite Q-1129 qui avait été déposée à la Chambre le 8 mai 2015. Je remercie l’honorable député d’avoir soulevé cette question, ainsi que l’honorable leader du gouvernement à la Chambre et le leader de l’Opposition officielle à la Chambre pour leurs interventions.

Lorsqu’il a soulevé la question, le député de Timmins—Baie James a expliqué que le gouvernement avait répondu ce qui suit à la question écrite Q-1129, qui portait sur la façon dont le gouvernement vérifie si les personnes nommées au Sénat satisfont aux exigences constitutionnelles en matière de résidence, et je cite : « [...] le gouvernement n’émet pas de commentaires concernant les affaires dont la cour est saisie ». Le député de Timmins—Baie James a dit qu’il s’agissait d’une réponse insuffisante et tout à fait incorrecte, car la question, à l’heure actuelle, ne relève pas des tribunaux. Il a donc fait valoir que le caractère trompeur de la réponse constitue de prime abord une atteinte à ses privilèges.

Le leader du gouvernement à la Chambre a rétorqué que la réponse ne faisait que reprendre, en d’autres termes, la convention relative aux affaires en instance. Il a soutenu qu’il s’agissait d’une réponse tout à fait valable, puisque la question touchait une affaire dont les tribunaux sont bel et bien saisis à l’heure actuelle dans le cadre d’une poursuite pénale. En outre, il a souligné que la présidence ne peut se pencher sur les réponses aux questions et que d’autres possibilités s’offrent au député s’il n’est pas satisfait de la réponse.

Les députés estiment qu’il est très important que les réponses à leurs questions écrites leur permettent d’obtenir des renseignements complets et exacts; cette pratique permet notamment aux députés de s’acquitter des obligations qui leur incombent en qualité de parlementaires. Il n’est donc pas vraiment surprenant que la présidence ait si souvent été appelée à statuer sur pareille question de privilège.

Lorsque des députés estiment que le contenu ou la qualité des réponses aux questions écrites laisse à désirer, la présidence est immanquablement appelée à trancher l’affaire. Chaque fois, la présidence s’est efforcée de rappeler aux députés les limites claires et bien établies du rôle du Président à cet égard. Il est écrit, à la page 522 de La procédure et les usages de la Chambre des communes, deuxième édition : « Aucune disposition du Règlement ne permet au Président de contrôler les réponses que le gouvernement donne aux questions. » Les conventions parlementaires n’accordent pas non plus ce pouvoir à la présidence.

Le Président Milliken l’a d’ailleurs confirmé le 8 février 2005, à la page 3234 des Débats de la Chambre des communes :

Toute contestation de l’exactitude ou du caractère approprié de cette réponse est un sujet de débat. Ce n’est pas là une question que le Président a le pouvoir de trancher.

Voici ce qu’on peut lire aux pages 522 et 523 de l’ouvrage d’O’Brien et Bosc :

S’il est arrivé à plusieurs reprises que des députés soulèvent une question de privilège à la Chambre concernant l’exactitude des renseignements fournis en réponse à des questions écrites, dans aucun cas on a jugé qu’il y avait de prime abord atteinte au privilège.

Le fait que la convention relative aux affaires en instance soit invoquée dans la réponse à la question du député ne modifie et ne renforce en rien les pouvoirs de la présidence, qui ne peut aucunement se prononcer sur l’exactitude ou le caractère valable de la réponse, et ce, même si cette dernière est interprétée comme un refus de répondre.

Il est écrit, à la page 522 de La procédure et les usages à la Chambre des communes, [deuxième édition] :

Aucune disposition du Règlement ne permet au Président de contrôler les réponses que le gouvernement donne aux questions.

Sur le fondement de ces précédents et des renseignements présentés, je ne peux conclure que le député a été gêné dans l’exercice de ses fonctions parlementaires. Je ne peux donc pas conclure qu’il y a eu, de prime abord, atteinte aux privilèges.

Je remercie les honorables députés de leur attention.

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[1] Débats, 11 mai 2015, p. 13724–13727.