Recueil de décisions du Président John Fraser 1986 - 1994
Le processus décisionnel / Votes
Vote par appel nominal : députés accusés de voter deux fois; utilisation de tactiques dilatoires
Débats, p. 8187-8188
Contexte
Le 24 janvier 1990, suivant la tenue du vote par appel nominal sur la motion portant première lecture et impression du projet de loi C‑281 au sujet de l’anniversaire de la Grande Charte, M. Jim Hawkes (Calgary-Ouest) invoque le Règlement pour s’opposer au fait que M. Les Benjamin (Regina—Lumsden) se soit levé à l’appel des « pou » ainsi qu’à l’appel des « contre ». M. Benjamin admet alors avoir amorcé le geste de se lever, à l’appel des « pour », mais ne s’est pas incliné devant la présidence comme le veut la coutume. D’autres députés interviennent à ce su jet[1].
Plus tard au cours de la séance, M. Hawkes invoque à nouveau le Règlement pour s’opposer au fait que M. Howard McCurdy (Windsor—Sainte-Claire) ait voté deux fois sur la motion portant introduction d’un projet de loi touchant l’habitation. Le président suppléant (l’hon. Steven Paproski) ayant demandé à M. McCurdy de préciser s’il était en faveur ou contre le projet de loi, celui-ci déclare avoir voté contre le projet de loi. D’autres députés interviennent également à cet égard[2].
Le 25 janvier 1990, M. Hawkes soulève une question de privilège au sujet des deux députés accusés d’avoir voté deux fois durant un vote par appel nominal. Il soutient qu’il n’y a de plus sérieux outrage au Parlement et manifeste son intention de porter une accusation de sorte que la Chambre, ou l’un de ses comités, puisse enquêter sur le comportement des députés visés. M. Nelson Riis (Kamloops) fait valoir qu’à la lecture du compte rendu officiel, il ne subsiste aucun doute quant à la façon dont les votes ont été consignés. M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona) opine pour sa part qu’il s’agit de diffamation à l’endroit des députés qui ont eu recours à de simples tactiques dilatoires. D’autres députés participent également à la discussion[3]. Le Président prend la question en délibéré.
Le 26 janvier 1990, M. McCurdy soulève une question de privilège pour s’excuser pour tout malentendu que ses actions, pourtant non intentionnelles, auraient pu causer le 24 janvier précédent[4]. Le 12 février 1990, le Président rend la décision qui est reproduite intégralement ci-dessous.
Décision de la présidence
M. le Président : Je fais maintenant part à la Chambre d’une décision concernant une question de privilège soulevée le mercredi 24 janvier dernier par le député de Calgary-Ouest et qui avait trait, les députés s’en souviendront, à plusieurs votes par appel nominal tenus ce jour-là. En bref, il alléguait que certains députés avaient voté deux fois.
Le député de Calgary-Ouest a soulevé la question de privilège en alléguant que, contrairement aux règles et aux pratiques de la Chambre, deux députés avaient voté deux fois lors du même vote. Les députés mis en cause ont démenti cette accusation, d’abord mercredi, quand la question a été soulevée la première fois, puis de nouveau jeudi.
L’affaire a fait l’objet d’une bonne discussion jeudi dernier et je remercie tous les députés qui ont fait des interventions.
Vendredi, le député de Windsor—Sainte-Claire a présenté ses excuses à la Chambre pour tout malentendu non intentionnel dont les gestes qu’il a posés pendant les votes auraient pu être la cause. Ces excuses ont pour effet de clore le débat sur la question de privilège.
En tant que Président, je tiens cependant à faire quelques observations au sujet des événements qui se sont déroulés. Il est admis que lorsque la Chambre étudie un élément de la politique gouvernementale qui est hautement litigieux, les députés de l’opposition vont essayer de recourir à tous les moyens à leur disposition pour retarder les délibérations. Comme nous l’avons vu au cours des années, c’est avec une ingéniosité considérable que l’opposition trouve des moyens de retarder les travaux du gouvernement. Ces tactiques dilatoires sont évidemment une manifestation importante de la nature antagoniste de cet endroit et elles sont un instrument légitime à la disposition de l’opposition. Je dois quand même signaler que ce genre de tactiques de l’opposition doit s’inscrire clairement dans le cadre des règles et pratiques de la Chambre et je demanderais à tous les députés de ne pas l’oublier.
Les tactiques dilatoires ne doivent jamais porter atteinte à l’autorité ou à la dignité de la Chambre. Il peut arriver que, dans le feu de l’action, les députés fassent une entorse aux règles normales de politesse, mais nous devons à chaque instant nous efforcer de respecter nos pratiques. La présidence négligerait ses obligations vis-à-vis de tous les députés et de notre institution si elle tolérait une érosion de ce respect, sous quelque forme que ce soit.
J’exhorte donc les députés de tous les partis à bien surveiller leur comportement, particulièrement dans le feu d’un débat teinté d’esprit partisan, afin de conserver à la Chambre où nous avons été appelés à servir, la dignité de rigueur ainsi que le respect qui lui est dû.
Je remercie les députés qui sont intervenus dans cette affaire.
Post-scriptum
À la suite des modifications apportées au Règlement en mai 1991, les motions demandant la permission de présenter un projet de loi et portant première lecture et impression d’un projet de loi sont réputées adoptées, sans débat ni amendement ni mise aux voix.
F0412-f
34-2
1990-02-12
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[1] Débats, 24 janvier 1990, p. 7438-7440.