Recueil de décisions du Président Peter Milliken 2001 - 2011

La Chambre et ses députés / Divers

Motion du gouvernement portant reprise des travaux de la session précédente : division de questions complexes

Débats, p. 299-300

Contexte

Le 3 octobre 2002, Carol Skelton (Saskatoon–Rosetown–Biggar) invoque le Règlement au sujet d’une motion inscrite au Feuilleton (motion no 2 du gouvernement) au nom de Don Boudria (ministre d’État et leader du gouvernement à la Chambre des communes). La motion vise à reprendre les travaux au stade où ils en étaient à la première session de la 37e législature. Mme Skelton soutient que la motion comporte quatre éléments séparés et distincts pouvant chacun faire l’objet d’une motion et que cela empêche les députés d’en discuter et de se prononcer de façon intelligente et responsable. Citant La procédure et les usages de la Chambre des communes (éd. 2000) ainsi que des décisions antérieures de la présidence, elle souligne que le Président a le pouvoir de diviser les motions complexes. Après avoir entendu d’autres députés, le Président déclare qu’il ne souhaite pas s’attarder aux motifs de la motion, mais qu’il s’inquiète davantage des aspects de procédure de la motion et qu’il veut déterminer si elle respecte l’usage et le Règlement de la Chambre. Il prend l’affaire en délibéré[1].

Résolution

Le Président rend sa décision le 4 octobre 2002. Il déclare que les questions concernant la reprise des travaux de la première session seront débattues ensemble, mais qu’elles feront l’objet de deux votes distincts. Le premier portera sur la reprise des témoignages recueillis par les comités permanents et spéciaux ainsi que sur le rétablissement des projets de loi du gouvernement. Le second portera sur la reconstitution du Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou de médicaments, sa composition, ses pouvoirs et la date à laquelle il doit présenter son rapport. En ce qui concerne la question d’autoriser le Comité permanent des finances à se déplacer pour les consultations prébudgétaires prévues à l’article 83.1 du Règlement, le Président affirme que cela ne relève pas de la reprise des travaux en suspens, mais qu’il s’agit plutôt d’une proposition d’ordre sessionnel à l’égard des travaux d’un comité permanent, et ajoute qu’il suivra l’usage consistant à étudier les motions relatives aux déplacements au cas par cas. Il conclut que la motion portant sur les déplacements sera donc traitée à part et qu’elle fera l’objet d’un débat et d’un vote distincts[2].

Décision de la présidence

Le Président : Avant que nous ne passions à l’« Ordre du jour », je veux dire à la Chambre que je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur le rappel au Règlement soulevé ce matin par la députée de Saskatoon–Rosetown–Biggar concernant la motion no 2 inscrite au Feuilleton au nom du ministre d’État et leader du gouvernement à la Chambre, qui porte sur la reprise des travaux de la première session de la 37e législature.

Je remercie la députée de Saskatoon–Rosetown–Biggar d’avoir soulevé cette question, le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre, le député de Fraser Valley, le député de Lakeland et le député de Prince George–Bulkley Valley pour leurs commentaires, ainsi que le député de Pictou-Antigonish-Guysborough pour son intervention à ce sujet.

En soulevant cette question, la députée de Saskatoon–Rosetown–Biggar a fait valoir que la motion visant la reprise des travaux comprend quatre parties bien distinctes. Elle s’oppose à ce que la Chambre ne tienne qu’un seul débat et un seul vote pour décider de quatre questions, et elle a demandé au Président de diviser la motion afin de permettre la prise d’une décision distincte sur chaque question.

Le leader du gouvernement à la Chambre a fait remarquer que la motion était de nature englobante en ce sens qu’elle visait à permettre la reprise, pendant cette session, de divers travaux au stade où ils étaient rendus à la fin de la session précédente.

L’honorable députée de Saskatoon–Rosetown–Biggar a cité le passage suivant de Marleau et Montpetit, à la page 478 :

Lorsqu’on présente à la Chambre une motion complexe (par exemple, une motion contenant deux parties ou davantage, chacune pouvant constituer une motion distincte), le Président a le pouvoir de la modifier et, partant, de faciliter le processus décisionnel de la Chambre.

On peut lire aux lignes suivantes du même ouvrage qu’un député peut s’opposer à une motion contenant deux propositions distinctes ou davantage, et demander que la motion soit divisée et que chaque proposition fasse l’objet d’un débat et d’un vote. Toutefois, la décision finale revient à la présidence, qui doit assurer la tenue d’un débat discipliné sur la question devant la Chambre.

La question de la division d’une motion complexe a déjà fait surface à quelques reprises à la Chambre. Le 15 juin 1964, le Président Macnaughton a statué sur la demande visant à diviser une motion du gouvernement concernant un nouveau drapeau canadien. Au terme d’un savant examen des précédents de la tradition parlementaire britannique et canadienne, le Président a déclaré en ces termes :

Je dois conclure que le projet de résolution dont la Chambre est saisie renferme deux propositions et que, puisqu’on s’est fortement opposé à ce que ces deux propositions soient examinées ensemble, mon devoir est de les diviser ainsi qu’il suit :

Cette citation est tirée des Journaux du lundi 15 juin 1964, à la page 431.

Le 10 avril 1991, le Président Fraser a pris une orientation quelque peu différente lorsqu’il a rendu sa décision sur une demande de division d’une motion du gouvernement traitant de modifications à apporter au Règlement de la Chambre. Au lieu d’intervenir pour diviser la motion, il a décidé qu’un seul débat serait tenu sur la motion et que celle-ci serait divisée en trois parties aux fins du vote.

Les recherches sur la pratique au Canada révèlent qu’il y a très peu de cas où un Président est intervenu pour diviser une motion. À mon avis, cela démontre que le Président doit faire preuve d’une grande prudence avant d’intervenir dans les délibérations de la Chambre tel qu’il lui est demandé dans le cas présent.

Après un examen minutieux des précédents et des arguments pour et contre, je suis porté à croire que le point no 2 des Affaires émanant du gouvernement présente en effet une situation dans laquelle la présidence serait justifiée d’intervenir.

Étant donné la nature complexe de la motion no 2, j’ai décidé que les questions relatives à la reprise, au cours de la deuxième session, des travaux de la Chambre amorcés pendant la première session feront l’objet d’un même débat, mais seront soumises à deux votes distincts.

Plus particulièrement, il y aura un vote sur le dépôt sur le Bureau de tous les témoignages recueillis par les comités permanents et spéciaux ainsi que la proposition de rétablissement des projets de loi du gouvernement, puis un autre vote sur les questions concernant la reconstitution du Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou de médicaments, sa composition, ses pouvoirs et la date à laquelle il doit présenter son rapport.

En dernier lieu, il y a la question d’autoriser le Comité permanent des finances à se déplacer pour les consultations prébudgétaires prévues à l’article 83.1 du Règlement. La présidence estime que cette motion ne relève pas, à strictement parler, de la reprise des travaux en suspens. Il s’agit plutôt d’une motion portant étude d’un ordre sessionnel qui concerne les travaux d’un comité permanent dont la composition et l’organisation restent à être déterminées. Notre pratique habituelle consiste à adopter les motions relatives aux déplacements au cas par cas. Je crois qu’il faudrait suivre cette pratique dans ce cas. Par conséquent, cette motion sera traitée de façon autonome et fera l’objet d’un débat et d’un vote distincts.

J’espère que la présente décision permettra à la Chambre de débattre d’une façon ordonnée les questions soulevées initialement dans la motion no 2, de proposer les modifications jugées souhaitables et de prendre des décisions qui tiennent compte des différents points de vue des députés à cet égard.

Je remercie tous les honorables députés de leur attention et de leur aide en cette matière.

Mme Carol Skelton (Saskatoon–Rosetown–Biggar, Alliance canadienne) : Monsieur le Président, je vous suis reconnaissante de tout votre travail. Étant donné que nous sommes saisis d’une nouvelle proposition, ne faut-il pas prévoir un préavis de 48 heures pour nous donner le temps de rédiger nos amendements à la motion?

Le Président : Tout ce que j’ai fait, c’est scinder la motion. Les députés avaient toute liberté de proposer des amendements. J’ai divisé la motion en deux. Comme la députée le constatera, ma décision aura comme conséquence concrète de retrancher le dernier paragraphe de la motion. Tout le reste est toujours là, mais nous pourrons tenir deux votes différents, comme je l’ai expliqué. Lorsque la question sera mise aux voix, à la fin du débat, il y aura deux votes au lieu d’un seul. C’est une aubaine.

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[1] Débats, 3 octobre 2002, p. 208-210.

[2] Journaux, 4 octobre 2002, p. 23.

Pour des questions au sujet de la procédure parlementaire, communiquez avec la Direction des recherches pour le Bureau

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