Le programme quotidien / Affaires courantes ordinaires
Motions : article 56.1 du Règlement; mise aux voix de projets de loi émanant du gouvernement
Débats, p. 5973-5974
Contexte
Le 13 mai 2005, Jay Hill (Prince George–Peace River) invoque le Règlement au sujet d’une motion pour laquelle Tony Valeri (leader du gouvernement à la Chambre des communes) avait tenté en vain d’obtenir le consentement unanime plus tôt en journée et qu’il présente alors de nouveau en vertu de l’article 56.1 du Règlement. La motion portait que toutes les questions nécessaires pour terminer l’étude, à l’étape de la deuxième lecture, des projets de loi C-43, Loi d’exécution du budget de 2005, et C-48, Loi autorisant le ministre des Finances à faire certains versements, seraient mises aux voix sur-le-champ sans débat, amendement ni report, à la fin de la période des initiatives ministérielles le jeudi 19 mai 2005. M. Hill soutient que l’article 56.1 est inconstitutionnel, en ce qu’il autorise l’adoption d’une motion lorsque moins de 25 députés s’y opposent, plutôt qu’à la majorité des voix, comme le prescrit l’article 49 de la Loi constitutionnelle de 1867. Il soutient également que la motion ne peut être présentée en vertu de l’article 56.1 du Règlement et fait référence à une décision antérieure du Président, dans laquelle il exprimait son inquiétude quant à la portée plus large donnée à cet article pour décider de motions de fond. Mauril Bélanger (leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, ministre responsable des Langues officielles, ministre responsable de la Réforme démocratique et ministre associé de la Défense nationale) intervient aussi sur le rappel au Règlement[1].
Résolution
Le Président statue immédiatement. Il déclare que dans sa décision du 18 septembre 2001, il avait exprimé des réserves au sujet de l’utilisation de l’article 56.1 comme moyen de limiter la durée du débat et avait invité un comité à se pencher sur la question. Comme il n’a reçu aucune réponse du comité, le Président soutient qu’il ne peut déclarer la motion irrecevable, d’autant plus que, dans le cas présent, le temps attribué pour mettre aux voix les projets de loi est beaucoup plus généreux que ce que prévoit la clôture ou l’attribution de temps. En ce qui concerne la constitutionnalité de l’article 56.1, le Président affirme que la Chambre est maître de ses propres procédures et qu’elle peut décider de ses procédures internes comme elle l’entend, comme elle l’a fait lorsqu’une majorité de députés a choisi de déléguer des pouvoirs, à certaines fins, à un groupe de 25 députés ou plus. Par conséquent, il déclare la motion recevable.
Décision de la présidence
Le Président : J’ai examiné le recours au Règlement du député de Prince George–Peace River relativement à la motion présentée par le leader du gouvernement à la Chambre en conformité de l’article 56.1 du Règlement.
Je rappelle aux députés la teneur de l’article 56.1 du Règlement :
Dans le cas de toute motion pour affaire courante dont la présentation requiert le consentement unanime de la Chambre, un ministre de la Couronne peut, si ce consentement est refusé, demander au cours de l’étude des Affaires courantes ordinaires que le Président saisisse la Chambre de la question.
Pour l’application du présent article du Règlement, « motion pour affaire courante » s’entend de toute motion présentée dans le cadre de l’étude des Affaires courantes ordinaires qui peut être requise pour l’observation du décorum de la Chambre, pour le maintien de son autorité, pour l’administration de ses affaires, pour l’agencement de ses travaux, pour la détermination des pouvoirs de ses comités, pour l’exactitude de ses archives ou pour la fixation des jours où elle tient ses séances, ainsi que des heures où elle les ouvre ou les ajourne.
Dans ce contexte assez général, je signale que la motion présentée par le leader du gouvernement à la Chambre propose que le débat sur les deux projets de loi prenne fin jeudi prochain.
Comme l’a fait remarquer le député de Prince George–Peace River, j’ai déjà rendu une décision dans laquelle j’exprimais certaines réserves au sujet de l’utilisation de cet article du Règlement dans le but d’éviter l’attribution de temps, la clôture ou toute autre limitation de la durée d’un débat, et j’avais invité le comité compétent à faire connaître son point de vue. Je n’ai reçu aucune réponse depuis cette décision rendue en 2001, à laquelle le député faisait référence.
Aussi, dans les circonstances, ayant exprimé des réserves et n’ayant obtenu aucune réponse du comité de la Chambre sur cette question, sur laquelle la Chambre aurait pu se prononcer si elle avait partagé mon point de vue, je ne pense pas qu’il y ait lieu, de ma part, de déclarer irrecevable une motion qui semble conforme au Règlement, comme dans le cas précité où je n’avais pas déclaré la motion irrecevable. J’avais exprimé des réserves, mais j’avais néanmoins jugé la motion recevable. Je crois que, en l’absence de toute rétroaction, je ne puis que permettre que la motion à l’étude aille de l’avant, surtout que le temps attribué dans ce cas-ci est beaucoup plus généreux que ce ne serait le cas si on avait recours à la clôture ou à l’attribution de temps, compte tenu des durées minimales autorisées. Par conséquent, la motion semble recevable.
Bien sûr, il faut que je me penche sur l’autre argument portant sur l’article 49 de la Constitution. Ce Règlement est en vigueur depuis un certain temps. Il est appliqué à la Chambre depuis de nombreuses années. Bien que ce ne soit pas mon rôle d’interpréter la Constitution, je fais remarquer qu’elle dit que les questions soulevées à la Chambre des communes seront décidées à la majorité des voix, sauf celles de l’Orateur, etc.
J’estime qu’il s’agit de questions de substance. Il est très clair que l’application de l’article 56.1 du Règlement, qui permet à la Chambre de déterminer comment mener ses travaux quand il ne s’agit pas de questions de substance, comme l’adoption de lois, peut être faite de cette façon. L’adoption de projets de loi à la Chambre des communes, l’adoption de motions relatives à des projets de loi sont, il va sans dire, des questions qui exigent la majorité des voix. Rien dans cette disposition et aucun article de notre Règlement ne permet à un projet de loi d’être adopté à la Chambre des communes sans avoir reçu l’appui d’une majorité des voix, conformément à l’article 49 de la Loi constitutionnelle.
Bien qu’on pourrait présenter d’autres arguments à d’autres endroits, j’estime que la Chambre est maître de ses propres procédures. Elle a choisi d’adopter ce Règlement et de l’appliquer à ses travaux et le Règlement en question précise bien les limites de son application. J’estime que la motion répond à ces spécifications. Bien que la formulation de la Constitution semble aller à l’encontre de ceci, d’après moi, elle s’applique aux questions de substance tranchées à la Chambre et non à des questions de procédure interne, que la Chambre peut traiter comme elle l’entend. Elle l’a d’ailleurs déjà fait en adoptant ce Règlement à la majorité; c’est ainsi qu’il a été établi à l’origine.
Si une majorité des députés a choisi de déléguer des pouvoirs, à certaines fins, à un groupe de 25 députés ou plus, j’estime qu’elle en avait le droit. C’est pourquoi j’ai l’intention de saisir la Chambre de la motion.
Post-scriptum
Le Président met alors la motion aux voix. Comme plus de 25 députés se lèvent pour s’y opposer, la motion, conformément au paragraphe 56.1(3) du Règlement, est réputée retirée[2].
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[1] Débats, 13 mai 2005, p. 5972-5973.
[2] Journaux, 13 mai 2005, p. 749-750.