Recueil de décisions du Président Peter Milliken 2001 - 2011

Le processus législatif / Étapes

Étude en comité : motions d’instruction; conférant à un comité le pouvoir de scinder un projet de loi et imposant une échéance pour faire rapport à la Chambre de l’un des deux nouveaux projets de loi

Débats, p. 6357-6358

Contexte

Le 8 octobre 2009, James Bezan (Selkirk–Interlake) présente le deuxième rapport du Comité permanent de l’environnement et du développement durable, qui demande 30 jours de séance supplémentaires pour l’examen du projet de loi C-311, Loi sur la responsabilité en matière de changements climatiques[1]. Plus tard le même jour, Libby Davies (Vancouver-Est) propose une motion d’instruction portant que le Comité ait le pouvoir de scinder le projet de loi en deux, C-311A et C-311B, et l’obligation de faire rapport à la Chambre du projet de loi C-311A à une date précise[2]. Plus tard encore, Tom Lukiwski (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes) invoque le Règlement pour contester la recevabilité de la motion. Il soutient que la motion devrait être jugée irrecevable parce qu’elle prévoit une attribution de temps à l’étape du comité et qu’il ne s’agit donc plus d’une instruction facultative. En outre, prétend-il, la mention d’une échéance aurait pour effet d’annuler la disposition du Règlement s’appliquant déjà aux dates de présentation des projets de loi émanant des députés; de surcroît, la motion comprend deux propositions distinctes, qui devraient selon lui faire l’objet de deux motions distinctes[3]. Après avoir entendu d’autres députés[4], le Président prend la question en délibéré.

Résolution

Le Président rend sa décision le 29 octobre 2009. Selon l’expérience passée et les ouvrages de procédure, déclare-t-il, une motion conférant à un comité le pouvoir de scinder un projet de loi est considérée comme étant facultative. Par ailleurs, il soutient que l’échéance et les autres mesures d’ordre procédural énoncées dans la motion ne s’appliquent que si le Comité décide de scinder le projet de loi en toute connaissance de cause. En ce qui concerne le conflit potentiel avec les dispositions du Règlement régissant les affaires émanant des députés, le Président déclare que, étant donné que la Chambre peut imposer une échéance pour la présentation d’un rapport qui serait antérieure à celle que prévoit le Règlement, la Chambre pourrait aussi adopter une motion d’instruction qui fixerait une échéance pour la présentation du rapport. Enfin, conclut-il, il n’est pas convaincu que la motion comporte plus d’une proposition, puisque la partie portant sur l’échéance de présentation du rapport est subordonnée à la proposition principale, à savoir l’instruction facultative de scinder le projet de loi. Pour toutes ces raisons, le Président déclare la motion recevable.

Décision de la présidence

Le Président : Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur le rappel au Règlement soulevé le 8 octobre dernier par l’honorable secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes au sujet de la recevabilité de la motion d’instruction proposée ce jour-là par l’honorable députée de Vancouver-Est.

Je remercie l’honorable secrétaire parlementaire, l’honorable députée de Vancouver-Est et l’honorable député de Skeena–Bulkley Valley pour leurs interventions.

Le secrétaire parlementaire a fait valoir que la motion d’instruction, inscrite au Feuilleton sous le numéro 6 des Affaires émanant du gouvernement, est irrecevable parce qu’à son avis elle vise à allouer le temps consacré à l’étape de l’étude en comité du projet de loi et constitue ainsi une instruction qui n’est plus facultative.

Il a ajouté que le délai imposé par la motion d’instruction aurait pour effet d’annuler l’exigence du Règlement de faire rapport des projets de loi émanant des députés.

De plus, il a affirmé que la motion comportait deux propositions distinctes qui devraient faire l’objet de deux motions distinctes.

Lors de son intervention sur le rappel au Règlement soulevé par l’honorable secrétaire parlementaire, la députée de Vancouver-Est a souligné que le Comité demeurait libre de décider d’exercer le pouvoir que lui confère ainsi la Chambre, ce qui rendait la motion facultative.

Le député de Skeena–Bulkley Valley a fait remarquer, pour sa part, qu’il existait un précédent à la motion d’instruction, citant une motion ayant fait l’objet d’un débat le 30 mai 2005.

La procédure et les usages de la Chambre des communes précise à la page 641 que, et je cite :

Les motions d’instruction relatives aux projets de loi ne sont pas impératives mais facultatives. Il appartient en effet au comité de décider s’il exercera ou non les pouvoirs que lui confère la Chambre. […] 
Une fois qu’un projet de loi a été renvoyé à un comité, la Chambre peut donner une instruction à ce comité au moyen d’une motion l’habilitant à faire ce qu’il ne pourrait pas faire autrement, comme, par exemple, examiner une partie d’un projet de loi et en faire rapport séparément, examiner certaines questions en particulier, diviser une mesure en plusieurs projets de loi, regrouper plusieurs projets de loi en un seul, élargir ou rétrécir la portée ou l’application d’un projet de loi.

Dans le cas soulevé par le secrétaire parlementaire, la présidence doit décider si la motion d’instruction dans son état actuel est facultative ou impérative.

La première partie de la motion, la partie principale, vise à donner au Comité le pouvoir de scinder le projet de loi, un pouvoir que les ouvrages de procédure et l’expérience passée considèrent comme facultatif. Je ne vois rien dans la motion d’instruction qui ordonne au Comité de prendre une mesure particulière concernant le projet de loi C-311. Le délai et les autres mesures d’ordre procédural qu’elle comporte ne s’appliquent que si le Comité décide de créer le projet de loi C-311A en toute connaissance de cause.

Selon mon interprétation de la motion, le Comité demeure libre de choisir de faire rapport du projet de loi C-311 comme il le ferait pour tout autre projet de loi d’initiative parlementaire.

Les députés savent que le Règlement prévoit qu’un projet de loi d’initiative parlementaire doit faire l’objet d’un rapport à la Chambre dans un délai de 60 jours de séance ou, avec l’approbation de la Chambre, après une prolongation de 30 jours de séance. Dans le cas contraire, le projet de loi est réputé avoir fait l’objet d’un rapport sans amendement.

Dans le cas qui nous occupe, on a soutenu que le délai prévu dans la motion d’instruction va à l’encontre du paragraphe 97.1(1) du Règlement, rendant ainsi la motion irrecevable.

Toutefois, de l’avis de la présidence, il ne serait pas absurde d’envisager un scénario où la Chambre, pour une raison quelconque, souhaiterait qu’un comité fasse rapport d’un projet de loi avant l’expiration du délai prévu à ce paragraphe.

Par conséquent, je ne vois rien dans le Règlement, ou dans les ouvrages de procédure, qui empêcherait la Chambre d’adopter une motion d’instruction qui fixerait un délai pour la présentation du rapport.

L’exemple cité par l’honorable député de Skeena–Bulkley Valley est particulièrement instructif à ce sujet. La motion d’instruction ayant fait l’objet d’un débat à la Chambre le 30 mai 2005 — Journaux, p. 800 — était en partie rédigée ainsi, et je cite : « que le projet de loi C-43A fasse l’objet d’un rapport à la Chambre au plus tard deux jours de séance après l’adoption de la présente motion ». Elle prévoyait un délai fort semblable à celui mentionné dans la motion d’instruction présentée par l’honorable députée de Vancouver-Est.

De l’avis de la présidence, comme dans l’exemple de 2005, la mention d’un délai dans la motion d’instruction relative au projet de loi C-311 ne porte pas atteinte au pouvoir discrétionnaire du Comité de décider de scinder le projet de loi ou de l’amender.

Enfin, l’argument du secrétaire parlementaire selon lequel la motion comporte plus d’une proposition et devrait être divisée en deux motions distinctes ne convainc pas la présidence. La lecture attentive de la motion révèle que la partie portant sur le délai de présentation du rapport est subordonnée à la proposition principale, à savoir l’instruction facultative de scinder le projet de loi.

Par conséquent, pour toutes ces raisons, la présidence estime que la motion est recevable.

Je remercie les honorables députés qui ont exprimé leur point de vue sur ce sujet.

Certains sites Web de tiers peuvent ne pas être compatibles avec les technologies d’assistance. Si vous avez besoin d’aide pour consulter les documents qu’ils contiennent, veuillez communiquer avec accessible@parl.gc.ca.

[1] Deuxième rapport du Comité permanent de l’environnement et du développement durable, présenté à la Chambre le 8 octobre 2009 (Journaux, p. 891) et adopté le 21 octobre 2009 (Journaux, p. 930-932).

[2] Journaux, 8 octobre 2009, p. 892.

[3] Débats, 8 octobre 2009, p. 5727.

[4] Débats, 8 octobre 2009, p. 5727-5730.

Pour des questions au sujet de la procédure parlementaire, communiquez avec la Direction des recherches pour le Bureau

Haut de la page