Les comités / Rapports
Rapport adopté lors d’une réunion tenue au Restaurant parlementaire; recevabilité sur le plan de la procédure
Débats, p. 6773-6775
Contexte
Le 29 mai 2003, tout de suite après le dépôt à la Chambre du troisième rapport du Comité permanent des transports sur son étude du Budget principal des dépenses de 2003-2004, Don Boudria (ministre d’État et leader du gouvernement à la Chambre des communes) invoque le Règlement pour contester la recevabilité du rapport. Il affirme que pour leurs réunions, les comités sont tenus d’offrir des services d’interprétation simultanée, de prévoir l’enregistrement des délibérations, d’y donner accès au public et de donner avis de la réunion. Il soutient qu’étant donné que le Comité a tenu sa réunion au Restaurant parlementaire (où il a adopté son troisième rapport), il n’avait pas respecté ces exigences, ce qui rendait le rapport irrecevable[1]. Le président du Comité, Joe Comuzzi (Thunder Bay–Superior Nord) déclare que la réunion se voulait la suite de la séance de la veille, suspendue faute de quorum, et que la décision de poursuivre la réunion le lendemain a été prise alors qu’il y avait encore quorum. Il ajoute qu’il n’y avait pas d’autres salles libres; qu’il y avait quorum; qu’on avait enregistré les délibérations; qu’il y avait des services d’interprétation et que le greffier du Comité était présent. Il fait valoir que le Comité s’est efforcé de respecter l’échéance pour le dépôt du rapport sur le Budget principal des dépenses, comme prescrit par le Règlement. Enfin, il souligne qu’aucun des membres du Comité assistant à la réunion n’a fait d’objections[2]. Après avoir entendu d’autres députés, le Vice-président (Bob Kilger) prend l’affaire en délibéré[3].
Résolution
Le Vice-président rend sa décision le 3 juin 2003. Il déclare que le Comité a pris les dispositions nécessaires pour offrir des services d’interprétation et que puisque la réunion s’est tenue à huis clos, il n’était pas nécessaire d’enregistrer les délibérations aux fins de transcription et de publication. Par ailleurs, il juge la question de l’avis sans importance. Il se dit toutefois préoccupé par la suspension des délibérations jusqu’au lendemain pour absence de quorum, faisant remarquer que dans un tel cas, la Chambre doit s’ajourner sur-le-champ. Il précise que bien qu’une telle obligation ne s’applique pas aux comités, il ne considère pas la décision du Comité comme un précédent. Faisant référence à l’habituelle réticence des Présidents à intervenir dans les travaux des comités et au fait qu’aucun des membres du Comité n’a posé d’objections, le Vice-président rappelle néanmoins aux députés que la liberté conférée aux comités de la Chambre s’accompagne de la responsabilité de veiller à l’observation des règles et procédures. Il conclut que le rapport a été adopté dans le respect des règles et usages de la Chambre et qu’il est donc recevable.
Décision de la présidence
Le Vice-président : Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur le rappel au Règlement soulevé le 29 mai 2003 par l’honorable leader du gouvernement à la Chambre au sujet de la recevabilité du troisième rapport du Comité permanent des transports présenté plus tôt ce jour-là.
Je tiens à remercier l’honorable leader du gouvernement à la Chambre d’avoir porté cette question à l’attention de la Chambre, ainsi que les honorables députés de Thunder Bay–Superior-Nord, New Westminster–Coquitlam–Burnaby, Saanich–Gulf Islands, Argenteuil–Papineau–Mirabel, Acadie–Bathurst, Beauport–Montmorency–Côte-de-Beaupré–Île-d’Orléans, Kootenay–Boundary–Okanagan et Ottawa-Ouest–Nepean pour leurs commentaires.
En contestant la recevabilité du troisième rapport du Comité permanent des transports, le leader du gouvernement à la Chambre a attiré l’attention de la présidence sur quatre points. Le premier point mentionné est qu’il est obligatoire, pour la tenue d’une réunion conforme d’un comité, d’offrir des services d’interprétation simultanée.
En deuxième lieu, il a indiqué que des dispositions doivent être prises pour permettre l’enregistrement des délibérations du Comité afin qu’il y en ait un compte rendu permanent, comparable aux Débats de la Chambre des Communes.
En troisième lieu, il a rappelé que les réunions d’un comité sont habituellement ouvertes au public et aux représentants des médias qui ont aussi droit aux services d’interprétation simultanée.
En dernier lieu, le leader du gouvernement à la Chambre a signalé qu’aucun avis n’avait été donné de la réunion que le Comité des transports a tenue le 29 mai.
Le leader du gouvernement à la Chambre s’est dit préoccupé du fait que le Comité des transports n’avait pas tenu compte de ces quatre règles lorsqu’il s’est réuni dans une pièce du Restaurant parlementaire, plutôt que dans une salle de comité entièrement équipée. Il a soutenu qu’en raison du non-respect de ces quatre règles, le rapport du Comité doit être considéré comme n’ayant pas été adopté à une réunion régulièrement tenue et qu’en conséquence le Président doit le juger irrecevable.
En réponse à cette intervention, le président du Comité des transports, le député de Thunder Bay–Superior-Nord, a précisé que, lors de sa réunion du 28 mai 2003, le Comité avait décidé de poursuivre ses délibérations le matin du 29 mai. Lorsqu’il y a eu perte du quorum, le Comité s’est vu dans l’impossibilité de prendre des décisions sur le Budget des dépenses à l’étude et le président a alors suspendu la séance jusqu’au lendemain.
Le président du Comité a expliqué que le Comité s’était réuni dans une pièce du Restaurant parlementaire pour la seule raison qu’aucune salle de comité régulière n’était disponible à 8 heures le 29 mai et que le Comité faisait tout son possible pour respecter la date limite prévue pour faire rapport du Budget principal des dépenses, selon le paragraphe 81(4) du Règlement.
Les honorables députés se rappelleront que la partie introductive du paragraphe 81 du Règlement prévoit que :
Au cours de chaque session, le budget principal des dépenses du prochain exercice financier, à l’égard de chaque ministère du gouvernement, est réputé renvoyé au comité permanent au plus tard le 1 mars de l’exercice financier en cours. Chaque comité en question étudie ce budget et en fait rapport ou est réputé en avoir fait rapport à la Chambre au plus tard le 31 mai de l’exercice financier en cours […]
Cette année, le 29 mai était le dernier jour de séance avant la date limite du 31 mai à laquelle les comités pouvaient faire rapport des budgets des dépenses.
Le député de Thunder Bay–Superior-Nord a précisé qu’un enregistrement avait été fait des délibérations de cette réunion et qu’un interprète de la Direction de la traduction parlementaire et de l’interprétation y était présent. Il a ajouté qu’il y avait quorum et que le greffier du Comité était présent pour veiller à ce que les décisions du Comité soient correctement consignées au procès-verbal de la réunion.
Chose encore plus importante, il a signalé qu’aucun des membres présents à la réunion n’avait soulevé d’objections à propos des arrangements pris par le Comité.
J’ai examiné le Procès-verbal de la réunion no 30 du Comité des transports, qui est le seul document accessible à la présidence puisque la réunion était à huis clos, et ce Procès-verbal confirme les affirmations du président du Comité.
J’aimerais maintenant faire des commentaires sur les quatre points soulevés par le leader du gouvernement à la Chambre dans le présent cas.
En premier lieu, il y a la question de l’interprétation simultanée. Tout comme les députés qui ont présenté des commentaires à cet égard, j’aimerais moi aussi souligner l’obligation que nous avons de respecter le droit des députés d’utiliser la langue officielle de leur choix. Les députés présents à la réunion du Comité ont confirmé que des arrangements spéciaux avaient été pris pour le service d’interprétation et qu’ils les ont jugés satisfaisants.
En deuxième lieu, il y a la question de l’enregistrement des délibérations. Il n’y a pas de doute que le Comité a choisi de se réunir dans une pièce où les services habituels ne pouvaient être fournis et que l’enregistrement des délibérations aux fins de transcription et de publication n’était pas disponible. Néanmoins, il faut reconnaître que, de l’avis des membres présents à la réunion du Comité, la pièce utilisée suffisait à leurs besoins puisqu’il s’agissait d’une réunion à huis clos, qu’une transcription n’était pas requise et que la publication n’était pas prévue.
Quant au quatrième point soulevé, l’absence d’avis, encore ici puisque la réunion était à huis clos, ni le public ni les médias ni les autres députés n’avaient le droit d’assister à la réunion et par conséquent la question de l’avis est sans importance en ce qui les concerne.
Par contre, je suis quelque peu préoccupé par la notion de la suspension des délibérations jusqu’au lendemain. Comme les députés le savent, si l’absence de quorum est signalée au Président et que le quorum ne peut être établi, la Chambre doit ajourner sur-le-champ. Bien qu’on puisse soutenir qu’une telle obligation ne s’applique pas aux comités, je n’oserais pas considérer les actions peu orthodoxes du Comité des transports dans le présent cas comme un précédent dans la pratique des comités.
Le président du Comité a expliqué les circonstances entourant sa décision de suspendre la réunion mercredi soir, n’ayant plus quorum pour adopter un rapport, et de se rencontrer le plus tôt possible jeudi matin afin d’être en mesure de faire rapport sur le budget des dépenses dans le délai prévu par le Règlement. Je suis tenu d’accepter l’explication du député.
Toutefois, il demeure que, tout comme mes prédécesseurs, je suis très réticent à intervenir dans les travaux des comités. Je crois utile de rappeler aux honorables députés la liberté que la Chambre accorde aux comités. Selon l’ouvrage La procédure et les usages de la Chambre des communes, à la page 804 :
[…] les comités sont tenus de se conformer à la procédure prévue par le Règlement ainsi qu’à tout ordre sessionnel ou ordre spécial que la Chambre leur a donné. Par ailleurs, les comités ont toute liberté pour organiser leurs travaux. En ce sens, on dit que les comités sont « maîtres de leurs délibérations ».
Dans le cas qui nous occupe, diverses questions auraient pu être posées au sujet des actions du Comité des transports, notamment en ce qui concerne la suspension des travaux du Comité jusqu’au lendemain ou encore la tenue d’une réunion sans les services habituels ou sans un avis. Mais il demeure que, comme l’a affirmé le président du Comité, aucune de ces questions n’a été soulevée au sein du Comité même. De plus, aucun des députés qui ont présenté des commentaires sur le rappel au Règlement du leader du gouvernement à la Chambre n’a soulevé de telles questions.
Comme le savent les députés, toutes les questions de procédure qui se rapportent aux dispositions prises par un comité pour ses réunions ou la conduite de ses travaux devraient être soulevées devant le comité lui-même.
J’ai dit que la Chambre accorde une grande liberté aux comités. Toutefois, bien que les comités aient le droit de mener leurs travaux d’une manière qui facilite leurs délibérations, ils ont en même temps la responsabilité de veiller à l’observation des règles et procédures nécessaires et au respect des droits des députés et du public canadien. C’est devant le Comité que doivent être soulevées les questions concernant ces points en vue d’une décision.
Comme je l’ai déjà mentionné, ces questions n’ont pas été soulevées dans le présent cas et aucune preuve n’a été présentée pour démontrer que le Comité permanent des transports aurait outrepassé son pouvoir de mener ses travaux d’une façon que ses membres jugent appropriée.
Par conséquent, après avoir examiné le Procès-verbal de la réunion du Comité des transports et le contenu du troisième rapport lui-même, je conclus que ce rapport a été adopté par le Comité dans le respect de nos règles et usages, qu’il a été valablement déposé devant la Chambre et que celle-ci en est maintenant dûment saisie.
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[1] Débats, 29 mai 2003, p. 6643-6644, Journaux, p. 825-826.
[2] Comité permanent des transports, Procès-verbal, 28 mai 2003, séance no 30.