Introduction
Le Recueil de décisions du Président Peter Milliken est le huitième d’une série de volumes qui visent à constituer une collection complète des décisions modernes les plus importantes des Présidents de la Chambre des communes. Les volumes antérieurs rassemblaient les décisions des Présidents Lucien Lamoureux (1966-1974), James Jerome (1974-1979), Jeanne Sauvé (1980-1984), Lloyd Francis (1984), John Bosley (1984-1986), John A. Fraser (1986-1994) et Gilbert Parent (1994-2001). Le présent volume contient 228 décisions, qui couvrent la période allant de 2001 à 2011, soit les années où le Président Milliken a assumé la présidence de la Chambre.
Le Président Milliken s’est fait élire au Parlement en 1988 et réélire en 1993, 1997, 2000, 2004, 2006 et 2008. Il s’est fait élire à la fonction de Président de la Chambre à la fin de janvier 2001, au début de la 37e législature. Il est le troisième Président à se faire élire par un scrutin secret auprès de ses pairs. Il a ensuite été réélu Président trois fois, ce qui constitue un record, au début des 38e (2004), 39e (2006) et 40e (2008) législatures. Soulignons qu’au cours des 39e et 40e législatures, il est devenu le deuxième Président à provenir des rangs d’un parti de l’opposition, le premier étant le Président Jerome. Le 12 octobre 2009, il est devenu le Président de la Chambre des communes affichant les plus longs états de service de notre histoire.
Les nombreuses décisions et autres interventions dont le Président Milliken a été l’auteur au cours de son mandat lui ont valu une réputation bien méritée de fin connaisseur en matière de procédure. Il était renommé pour ses interventions pleines d’un humour intelligent et pour la justesse de ses décisions.
Le Président Milliken a été témoin, au cours de son premier mandat, de grands changements à la procédure de la Chambre. Parmi ceux-ci, la nouvelle disposition accordant au Président un vaste pouvoir discrétionnaire pour choisir les motions d’amendement aux projets de loi à l’étape du rapport constitue sans aucun doute le changement le plus significatif. En outre, au cours des trois gouvernements minoritaires où il a occupé le fauteuil, le Président Milliken a dû exercer sa voix prépondérante pas moins de cinq fois, un nombre sans précédent, puisqu’au moment de son départ à la retraite en 2011, cela n’était arrivé que 15 fois en tout depuis la Confédération. C’est aussi au cours de cette longue période de gouvernements minoritaires, de 2004 à 2011, que ses connaissances approfondies en matière de procédure, nourries par un intérêt de toujours pour les traditions et les usages de la Chambre, se sont avérées si précieuses. Ainsi, il a pu naviguer avec habileté sur les eaux houleuses de la partisanerie, au milieu de conflits historiques qui ont éclaté entre le gouvernement et l’opposition, souvent sur des questions de privilège. Comme c’est le cas pour toutes ses décisions, le Président Milliken a centré ses efforts sur la protection des droits et privilèges de la Chambre et des députés.
Deux questions de privilège fondées de prime abord ont jeté un nouvel éclairage sur les droits collectifs de la Chambre : la première portant sur l’ordre de la Chambre de produire des documents relatifs à la détention de combattants par les Forces canadiennes en Afghanistan et la seconde, sur l’ordre du Comité permanent des finances de produire des documents relatifs aux estimations de coûts de diverses mesures stratégiques du gouvernement. Dans ce dernier cas, la Chambre a fini par adopter, le 25 mars 2011, une motion de censure à l’endroit du gouvernement, ce qui a abouti à la dissolution de la 40e législature.
Avant la tenue du vote, le dernier qu’il présiderait, le Président Milliken a reçu les louanges des députés, toutes allégeances confondues. Le leader du gouvernement à la Chambre d’alors (John Baird) a souligné la longue carrière du Président Milliken, prédisant qu’il passerait à l’histoire « comme l’un des meilleurs Présidents, sinon le meilleur, que notre Chambre des communes ait jamais eu[1] ». De son côté, le chef de l’Opposition officielle d’alors (Michael Ignatieff) a déclaré à son sujet : « Vous nous avez incités, parfois avec gentillesse, parfois avec fermeté, parfois avec grande conviction et émotion, à mieux comprendre et à respecter les règles qui encadrent les travaux de cette Chambre et la démocratie canadienne. Ne serait-ce que pour cela, le pays a une dette énorme envers vous[2]. » Les décisions publiées dans le présent recueil forment une partie de l’héritage d’une carrière remarquable qu’on continuera certainement de citer dans tous les documents traitant de l’histoire de la Chambre des communes.
Le présent recueil a donc pour but de présenter, dans une forme structurée, les points saillants de l’héritage exceptionnel que laisse le Président Milliken en matière de procédure, cela comprend un bref compte rendu du contexte procédural ou politique entourant la question soulevée, lui-même suivi d’un résumé de la résolution de la question. Figure ensuite le verbatim complet de la décision du Président Milliken ou de l’un de ses confrères, accompagné selon le cas de renvois dans des notes de bas de page. Dans un chapitre donné, chaque décision est surmontée d’un titre descriptif faisant allusion à la question de procédure à l’étude; dans certains cas, un post-scriptum explique le résultat ou l’action faisant suite à la décision. Les décisions sont regroupées en dix chapitres qui commencent tous par une courte introduction. À l’exception de deux chapitres, les décisions sont présentées dans l’ordre où elles ont été rendues; leur enchaînement dépend du regroupement de sujets apparentés. Pour les deux autres chapitres, leur enchaînement est strictement chronologique.
Il existe plusieurs façons de retrouver une décision particulière. Vous trouverez ainsi à la fin du volume à la fois une liste chronologique de toutes les décisions et un index analytique détaillé. De plus, on encourage les lecteurs à consulter l’introduction de chaque chapitre, ainsi qu’à consulter les titres descriptifs figurant au début de chaque décision pour déterminer si le sujet de la décision ou encore un aspect particulier de cette question les intéresse suffisamment pour lire l’ensemble de la décision. Enfin, il faut se souvenir que ce volume, comme les précédents, constitue une sélection des décisions clés. En tout, le Président Milliken et ses adjoints ont été appelés à rendre quelque 900 décisions durant la période visée par ce volume.
De nombreuses personnes ont contribué à la réalisation du présent ouvrage. J’aimerais souligner le rôle qu’ont joué le sous-greffier Marc Bosc et la greffière adjointe Bev Isles qui ont dirigé l’équipe du projet avec énergie et élégance. Je tiens à les féliciter ainsi que leur équipe et à les remercier de leur professionnalisme et de leurs efforts inlassables. Je voudrais souligner tout particulièrement la contribution de nombreux greffiers à la procédure, notamment de la Direction des recherches pour le Bureau, qui, sous la gouverne du greffier principal adjoint, ont procédé à la sélection initiale et à la compilation des décisions et entrepris la révision, la vérification et la mise en forme du contenu de cet ouvrage. Je me dois aussi de mentionner tout spécialement le soutien du Service de traduction, ainsi que des Publications parlementaires et de l’équipe des publications (avec son greffier principal adjoint).
Ce fut pour moi un privilège et un plaisir de travailler en collaboration étroite avec Monsieur le Président Milliken, tout d’abord comme sous-greffière, puis comme Greffière, de 2005 jusqu’à sa retraite. Il possédait une connaissance encyclopédique de la procédure parlementaire et a fait preuve d’un dévouement indéfectible à l’égard de l’institution du Parlement. Mais il n’était pas un théoricien utopiste : Peter Milliken voyait dans le Président un serviteur de la Chambre. Élu pour présider les délibérations de la Chambre, il savait ne pouvoir y arriver que s’il jouissait de la confiance des députés et de la confiance de la Chambre dans la justesse de ses décisions. Et surtout, Monsieur le Président Milliken reconnaissait que les circonstances particulières des parlements minoritaires l’exposaient à des défis auxquels la plupart de ses prédécesseurs n’avaient jamais été confrontés. Il a notamment dû affronter les défis qui ont surgi lorsque, frustrés de ne pas pouvoir trouver de solutions à des problèmes politiques, les députés essayaient de transformer ces problèmes en des questions de procédure. Monsieur le Président Milliken a fait face à ces situations avec un réalisme lucide en rendant, lorsque c’était nécessaire, des décisions qui cherchaient à faire la part des choses entre la politique et la procédure, en confinant chacune à son domaine — dans le but toujours de protéger la primauté du Parlement.
Ottawa, 2013
Audrey O’Brien
Greffière de la Chambre des communes
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