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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 077 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 7 novembre 2017

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Français]

    Je souhaite la bienvenue à tous.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous commençons aujourd'hui notre étude sur les changements climatiques et problèmes de conservation de l'eau et des sols.
    Nous recevons aujourd'hui la Canadian Roundtable for Sustainable Crops, représentée par Mme Susie Miller, sa directrice exécutive.

[Traduction]

    Bienvenue, madame Miller.
    De CropLife Canada, nous avons Dennis Prouse, vice-président, Affaires gouvernementales.

[Français]

     Il est accompagné de M. Ian Affleck, directeur exécutif responsable de la biotechnologie végétale.
    Nous allons commencer par les présentations, qui peuvent durer jusqu'à 10 minutes chacune.

[Traduction]

    Madame Miller, vous avez la parole pour un maximum de 10 minutes. Merci.
    Monsieur le président, merci de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui.
    La Canadian Roundtable for Sustainable Crops a été constituée en 2013 dans le but précis d'être un moyen d'encourager proactivement la durabilité dans l'industrie céréalière au Canada.
    La CRSC, comme nous l'appelons, est constituée d'un vaste éventail de membres, notamment, des cultivateurs de céréales, des chaînes d'approvisionnement, des manutentionnaires de grain, des transformateurs d'aliments, des services alimentaires et des organismes de promotion de l'environnement et de la durabilité.
    À l'heure actuelle, nous avons 50 membres à l'échelle du Canada. Le gouvernement n'est pas représenté — nous ne lui permettons pas d'être membre, mais il est invité à participer à nos réunions et il contribue aux discussions du comité technique.
    La mission de la CRSC est à la base de notre travail, soit: créer de la valeur pour tous les membres du secteur céréalier du Canada en étant un forum national dont l'objectif est de faire avancer la durabilité de la production des céréales canadiennes, ainsi que de faire rapport et diffuser des communications sur le sujet.
    À cette fin, l'industrie céréalière canadienne, par le truchement de la CRSC, est l'élément moteur d'une initiative dont l'objet est de recueillir les renseignements existants, de mener des recherches initiales et de publier les données exhaustives nationales existantes concernant la durabilité de la production de céréales au Canada. Nous avons l'intention de publier ces renseignements en ligne, et de les tenir à jour dans la mesure du possible, permettant à toutes les parties intéressées de comprendre ce qu'est la production durable de céréales et de suivre son évolution.
    La raison pour laquelle il fallait lancer une telle initiative est claire. Il y a à l'échelle mondiale un grand nombre de normes de certification de la durabilité, dont certaines sont propres à une entreprise, mais elles portent toutes sur les mêmes questions.
    La CRSC a déterminé quelles sont les questions importantes dans les principales normes, afin de permettre à tout intervenant de trouver les renseignements dont il a besoin au sujet de la durabilité de notre production, et ce, quelle que soit la norme qu'il utilise.
    À notre avis, cela servira un double objectif. Tout d'abord, les clients des transformateurs d'aliments et des services alimentaires pourront décrire aux consommateurs, avec clarté et crédibilité, l'historique de la production durable de leurs produits céréaliers. Deuxièmement, les producteurs et les exportateurs de céréales canadiennes et d'oléagineux pourront plus facilement accéder aux économies ou aux clients qui exigent des renseignements de niveau élevé sur la durabilité dans le cadre de leurs règlements ou de leurs politiques d'acquisition.
    Pour ce faire, nous avons d'abord dialogué avec les membres, puis nous nous sommes tournés vers l'extérieur, vers les acheteurs, les clients et le public. Un tel dialogue est crucial s'il faut établir une démarche cohérente entre nos membres, dont plusieurs ont déjà des programmes d'amélioration de la durabilité. La CRSC leur offre la possibilité de coordonner et de mettre au point des démarches synergiques au niveau des diverses organisations et initiatives.
    Compte tenu du fait que la CRSC a des membres qui produisent des céréales de même que des membres qui achètent et consomment des produits céréaliers, elle contribue à expliquer les attentes des clients et des sociétés, ainsi que celles des organismes environnementaux. Cette compréhension des attentes des consommateurs et de la société nous a menés au deuxième point focal de notre travail, soit l'établissement de priorités de recherche et l'exécution de recherches visant à combler les lacunes de savoir.
    Pour que les renseignements répondent aux besoins des parties intéressées, ceux-ci doivent être fondés sur la science et être crédibles. Au cours des 12 derniers mois, la CRSC a investi dans la recherche sur l'empreinte carbonique du cycle de vie de 10 cultures dans les principales provinces productrices de céréales. Aussi, nous avons mené une étude des pratiques des producteurs qui se rapportent au critère de durabilité.
    L'action de recherche et de collecte de données crédibles et pertinentes n'est pas en soi valable sans un mécanisme servant à communiquer efficacement ces renseignements à ceux qui les veulent ou l'exigent. Pour ce faire, nous avons entrepris un important projet de construction de notre plateforme en ligne de mesure de la durabilité des céréales.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, cette plateforme fournira des données pertinentes et crédibles, fondées sur la science, sur la performance des producteurs céréaliers canadiens en matière de durabilité. Bien que la majeure partie des renseignements concerne la durabilité environnementale, nous offrons aussi des renseignements sur la responsabilité sociale — concernant les travailleurs dans la communauté —, ainsi que sur la viabilité économique de l'industrie, étant donné que ces trois aspects sont importants tant pour nos clients que pour les consommateurs. Nous en sommes présentement aux derniers stades du développement, et prévoyons inaugurer la plateforme au début de 2018.
(1535)
    Dans cette activité, nous avons recours à de nombreuses sources de données. Les travaux d'Agriculture et Agroalimentaire Canada et d'Environnement et Changement climatique Canada au niveau des indicateurs environnementaux constituent une source particulièrement importante.
    Par ailleurs, nous nous appuyons sur les résultats de nombreuses enquêtes de Statistique Canada, comme le recensement de l'agriculture, l'Enquête sur la gestion agroenvironnementale et l'Enquête sur l'utilisation de l'eau. Ces données d'enquête sont complétées par nos propres données, dont j'ai parlé plus tôt, ainsi que par celles produites par l'initiative canadienne FieldPrint, qui est une autre initiative en matière de durabilité entreprise par le secteur céréalier.
    J'aimerais aussi mentionner que nous avons pu entreprendre tout cela grâce à la contribution du gouvernement du Canada par le truchement des programmes d'Agriculture et Agroalimentaire Canada dans le cadre desquels le financement fourni a fait l'objet d'un financement correspondant par nos membres.
    Pour terminer, j'aimerais vous faire part des résultats de la recherche que nous avons menée en ce qui concerne ce qu'attendent les marchés et la société civile en matière de durabilité environnementale. Comme on pourrait s'en douter, ces secteurs s'attendent expressément à ce que les producteurs utilisent les produits agrochimiques, les engrais et le fumier de façon à ne pas nuire à la qualité de l'eau, et qu'ils maintiennent la productivité des sols. De plus, les marchés et la société civile ont aussi des attentes à l'endroit de l'industrie agricole en général pour ce qui est de la réduction des gaz à effet de serre, de la préservation et de l'amélioration de l'habitat faunique, de l'entretien des zones vulnérables, ainsi que de la pollution et de la gestion des déchets.
    Par ailleurs, ces groupes conviennent qu'on n'atteindra pas immédiatement le résultat idéal en matière de durabilité, mais qu'il y aura une amélioration continue dans le temps.
    Une fois de plus, merci de l'intérêt que vous avez manifesté.
    Merci beaucoup, madame Miller.
    Nous passons maintenant à CropLife.
    Je ne sais pas si vous voulez partager entre vous le temps qui vous est attribué, mais vous disposez de 10 minutes en tout.
    Merci, monsieur le président. Nous vous sommes reconnaissants de votre invitation aujourd'hui. Je suis accompagné de mon collègue, Ian Affleck, le directeur exécutif de la Biotechnologie végétale chez CropLife Canada.
    Bien que de nombreux aspects de la science des plantes aient évolué depuis la création de notre organisme en 1952, notre objectif principal demeure le même, soit fournir des outils aux agriculteurs pour les aider à être plus productifs et plus viables. Nos membres ont aussi mis au point des produits pour l'utilisation dans une vaste gamme de contextes non agricoles, y compris les espaces verts urbains, les services de santé publique et les corridors de transport.
    Personne n'a rien à apprendre aux agriculteurs canadiens au sujet de l'impact du changement climatique, parce qu'ils le vivent depuis un certain temps déjà. En tant qu'industrie, nous avons pour défi de trouver des moyens d'aider les agriculteurs canadiens à être plus productifs sur moins de terre et d'une façon bien plus durable que jamais. Heureusement, les agriculteurs canadiens comptent parmi les personnes qui s'adaptent le plus rapidement au monde à la nouvelle technologie. Nous parlerons aujourd'hui de ce que font les agriculteurs canadiens pour améliorer la durabilité et faire face au changement climatique, ainsi que de ce que nous pouvons faire encore plus à l'avenir.
    Vous nous entendrez souvent parler des technologies de notre industrie. La plupart des gens ne pensent pas à l'agriculture de cette façon, mais les pesticides qui protègent nos récoltes et la biotechnologie végétale qui crée des récoltes encore plus solides et en santé représentent une science de pointe qui améliore nos vies. En plus de protéger les récoltes, les pesticides et les cultures biotechniques ont un bilan impressionnant pour ce qui est de la façon dont ils aident à protéger l'environnement en aidant les agriculteurs à utiliser moins de superficies de terre pour cultiver davantage d'aliments, à préserver la biodiversité, à s'attaquer aux changements climatiques et à conserver les ressources naturelles.
    Grâce aux technologies des sciences végétales, les agriculteurs canadiens produisent davantage de récoltes sur les meilleures terres agricoles de notre pays, laissant de côté les terres marginales. Ainsi, 35 millions d'acres de forêt, d'herbes indigènes et de terres humides ne sont pas utilisées pour l'agriculture, protégeant ainsi la biodiversité en protégeant les habitats.
    Loin de nuire à la biodiversité, l'agriculture moderne est en fait un élément crucial de sa protection. Les cultures biotechniques et les pesticides aident les cultivateurs à mieux contrôler les phytoravageurs dans leurs champs. Avant que ces technologies n'existent, les cultivateurs devaient labourer leurs terres afin de se débarrasser des mauvaises herbes. Pour ceux qui ne connaissent pas le domaine, le labourage est la pratique de retourner la terre d'un champ pour en retirer les mauvaises herbes. C'est dur sur la terre étant donné que cela brise la matière organique et réduit la capacité du sol de conserver l'humidité. Le labourage était une grande raison pour laquelle les sales années trente ont été si dévastatrices. La terre étant fragilisée par le labourage, la couche arable précieuse s'envolait sous l'effet de la sécheresse et du vent.
    Les choses ont changé de par le fait que les cultivateurs utilisent une combinaison de pesticides et de biotechnologies. Pouvant appliquer des herbicides, ils n'ont plus à labourer leurs terres pour se débarrasser des mauvaises herbes. Par suite des percées de technologies agricoles, les cultivateurs peuvent aussi laisser le chaume se décomposer dans le champ, ce qui ajoute une matière organique dans la couche arable et améliore la consistance de la terre. Par conséquent, celle-ci est moins susceptible de s'éroder sous l'effet de l'eau et du vent.
    Une réduction de la superficie de terre utilisée, une réduction du labourage et la jachère d'été, ainsi que l'élimination des passages d'équipement, réduisent les émissions de gaz à effet de serre de l'ordre de 29 millions de tonnes par an au Canada. La diminution du nombre de passages d'équipement dans les champs réduit la consommation de diesel d'au plus 194 millions de litres par année au Canada seulement. Le succès de la biotechnologie depuis son introduction est important, et c'est un outil crucial dans la lutte contre le changement climatique.
    Cependant, nous nous efforçons constamment d'en faire encore plus pour donner aux cultivateurs accès à une technologie qui améliore le monde. Notre industrie continue de faire face à un défi, tant au Canada qu'ailleurs dans le monde, soit un système de réglementation qui est lent à accepter les nouvelles caractéristiques.
    En dépit de la croissance annuelle de l'adoption de cultures biotechniques, nous n'avons pas encore vu les nouvelles cultures annoncées. Quatre-vingts pour cent des cultures sont encore dans les quatre groupes principaux. Qui plus est, la croissance que nous nous attendions à voir au niveau des produits mis au point par le secteur public ne s'est pas concrétisée. Soixante-quinze pour cent des produits commercialisés viennent encore des gros concepteurs de technologies du secteur privé.
    Pourquoi donc ne voyons-nous pas de nouveaux produits et produits novateurs tant au niveau des nouvelles semences et des produits de protection des récoltes pour rehausser davantage le rendement de la durabilité? En réalité, le système de réglementation échoue face à l'objectif d'amener l'innovation chez les cultivateurs.
    Quant à la rapidité de la commercialisation, nous avons constaté que la partie qui prend le plus de temps dans la commercialisation d'une caractéristique biotechnique est en réalité hors du contrôle du concepteur. Les fonds et le temps consacrés à la réglementation de la science et à l'inscription ont augmenté de 50 % les 10 dernières années.
    Nous avons vu quelques nouvelles caractéristiques pour la consommation qui ont été approuvées au Canada. La pomme Arctic, produite par la société Okanagan Speciality Fruits, est une pomme qui ne brunit pas après avoir été tranchée. Elle devrait commencer à être disponible sur le marché l'an prochain, et le potentiel de réduction des déchets alimentaires est emballant. Il en va de même pour toutes les pommes de terre produites par J.R. Simplot, celles-ci étant protégées contre la meurtrissure et le brunissement.
    Et ce n'est que le début. De nouvelles caractéristiques se dessinent à l'horizon, et celles-ci renforceront la lutte contre les maladies, les insectes et les mauvaises herbes. D'autres caractéristiques sont destinées à améliorer la tolérance à la sécheresse et aux milieux salins, ainsi que l'efficacité d'utilisation de l'azote. Il y a les rendements de la génération suivante, l'efficacité réelle de l'équipement, les caractéristiques de l'éthanol et les avantages pour le consommateur, comme des huiles alimentaires saines et une amélioration de la nutrition. Les avantages d'une nutrition améliorée sont importants dans le monde en développement, où l'impact du changement climatique se fera sentir plus particulièrement.
(1540)
    Le système de réglementation restreint la capacité des concepteurs du secteur privé et du secteur public d'offrir de nouvelles caractéristiques et cultures aux agriculteurs. Les concepteurs du secteur privé peuvent assumer ce fardeau de temps et d'argent, mais les concepteurs du secteur public ont beaucoup de difficulté à faire faire à leurs produits tout le cheminement vers la commercialisation.
    Je signale que nous parlons de technologies dont le bilan de sécurité a été absolument sans tache depuis plus de 20 ans. Il y a un consensus dans le monde scientifique sur la sécurité des cultures biotechniques, et pas plus le Canada que n'importe quel autre organisme de réglementation n'a vu un cas de dommages documenté. Les cultures biotechniques ne constituent pas une préoccupation quant à la santé et à la sécurité des Canadiens, pas plus qu'elles ne constituent une préoccupation sur le plan de la réglementation.
    Pour terminer, monsieur le président, nous sommes très fiers du rôle de notre industrie dans l'établissement d'une agriculture canadienne plus productive et plus durable que jamais. L'agriculture moderne fait partie intégrante de la solution quant au changement climatique, tant au Canada qu'ailleurs dans le monde. Ces contributions seraient grandement augmentées si le Canada faisait un effort soutenu de réforme de son système de réglementation. Les agriculteurs canadiens sont de fervents enthousiastes prêts à s'adapter à la nouvelle technologie. Il serait logique de trouver un moyen plus rapide et plus efficace de leur transmettre cette technologie tout en faisant du Canada un centre mondial pour l'investissement et l'innovation dans l'agriculture moderne. Nous encourageons le gouvernement du Canada à contribuer à concrétiser cette vision.
    Merci, monsieur le président. Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous nous consacrez et sommes prêts à répondre aux questions du Comité.
(1545)
    Merci beaucoup, monsieur Prouse.

[Français]

     Nous allons maintenant commencer, du côté des conservateurs, par M. Luc Berthold.
    Vous disposez de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie beaucoup de vos témoignages. Ils étaient très instructifs.
    Nous amorçons cette étude avec une grande ouverture. Les changements climatiques, les effets sur la qualité des sols et l'accès à l'eau, et tout cela sont des sujets très vastes. Cet enjeu préoccupe beaucoup les producteurs de partout au Canada. Il devrait aussi préoccuper les consommateurs parce que, ultimement, tout ce qui se retrouve dans notre assiette provient de la terre, du moins la plus grande partie des aliments.
    Ma question est très simple. Chaque fois que je rencontre des groupes de producteurs, notamment des producteurs de grains de toutes les catégories, chacun parle d'une expansion de sa capacité de production au cours des prochaines années. Il est question de doubler la production au cours des 10 prochaines années. Il y a également des objectifs gouvernementaux d'augmentation assez notable des exportations.
    Quand on nous parle de ces objectifs, on ne parle pas des contraintes liées aux changements climatiques. Tout semble au beau fixe et on ne semble pas avoir de craintes quant à sa capacité de doubler la production, de livrer le produit et d'atteindre ces objectifs. J'aimerais vous entendre à ce sujet.
    On pourrait commencer par les représentants de CropLife Canada et entendre ensuite Mme Miller.

[Traduction]

    Il ne fait aucun doute que les buts fixés sont ambitieux. Nous les avons vus dans le budget 2017, et nous en entendons parler. Nous avons dit que nous avons besoin d'un système de réglementation qui soit suffisamment souple pour que les nouveaux outils atteignent les agriculteurs. Il n'y aura pas d'expansion sans un système de réglementation suffisamment réceptif.
    C'est ce sur quoi on revient, parce que ces organismes de réglementation tiennent entre leurs mains la clé des innovations. Celles-ci doivent passer par le système de réglementation. Nous appuyons ce système de réglementation. Le Canada a un système de réglementation fondé sur la science.

[Français]

    Si je comprends bien, vous craignez que ces objectifs ambitieux ne puissent pas être atteints si on n'apporte pas de changements à la façon de réglementer l'industrie.

[Traduction]

    Oui, c'est exact. Si nous voulons atteindre ces buts, il nous faut changer et transformer notre système de réglementation parce que ces buts sont exceptionnellement ambitieux. Il s'agit de tenter d'amener le Canada à être en deuxième position dans le monde par opposition à sa cinquième position actuelle. C'est un immense objectif, et nous en sommes très heureux, mais il faut absolument avoir une feuille de route pour y arriver.

[Français]

    Avez-vous un exemple précis de règlement à adopter? Si on devait à approuver un règlement et que cela pouvait se faire rapidement, lequel devrait-on choisir?

[Traduction]

    À vous la parole, Ian.

[Français]

[Traduction]

    Je crois qu'un bon exemple serait la biotechnologie végétale en particulier, et les nouveaux produits de la biotechnologie. Pour pousser le genre d'innovation dont nous avons besoin, le Canada doit faire en sorte que les agriculteurs disposent de ces outils le plus rapidement possible et en toute sécurité. En aucun cas devrions-nous compromettre la sécurité de notre système de réglementation, mais il nous faut avancer rapidement.
    Je crois que vous cherchez probablement une culture précise.
(1550)

[Français]

     J'aimerais que vous me disiez, en peu de temps parce que celui-ci est malheureusement limité, quel est le principal irritant en ce domaine.

[Traduction]

    Je dirais que c'est en deux aspects: temps et coûts. Il faut environ deux à trois ans pour qu'un produit soit approuvé au Canada présentement. Une grande partie de ce temps, le dossier est dans une file d'attente et personne ne le regarde, parfois pendant 12 mois. Si la procédure pouvait commencer plus rapidement, elle se terminerait plus rapidement.
    Le deuxième aspect concerne les exigences globales en matière de données, et les coûts. Cet aspect est très limitatif pour les petites entreprises en démarrage qui voudraient entrer dans ce domaine. Il leur est difficile de démarrer parce qu'elles ne peuvent assumer ces coûts réglementaires généraux alors que les grandes entreprises le peuvent.
    Si l'on veut voir de l'innovation dans un grand nombre de petits créneaux qui contribueront à l'atteinte de ce grand objectif, il faut contrôler ces coûts pour permettre l'entrée de ces petits participants. Okanagan est un excellent exemple de petits participants. Cette entreprise a dû trouver un capital important pour faire passer son produit par le processus de réglementation et le commercialiser.

[Français]

    Madame Miller, dans le même ordre d'idées, l'objectif de doubler les productions est-il contradictoire dans une perspective d'agriculture durable? Pensez-vous que nous pouvons y arriver?

[Traduction]

    En ce qui concerne la durabilité, les changements climatiques auront pour résultat de changer la signification de la durabilité et les attentes à cet égard. Du point de vue de l'agriculteur, il doit faire face aux conditions auxquelles il est confronté présentement. Ne sachant pas exactement quels seront les impacts, il se concentre sur les conditions actuelles, l'état actuel de la technologie, les marchés actuels et ce qu'il va faire cette année, l'année prochaine et dans cinq ans.

[Français]

    Ainsi, selon vos recherches et vos études, on peut difficilement prévoir quelle sera la situation dans 10 ans et dire si on pourra alors doubler la production.

[Traduction]

    En ce qui concerne la situation actuelle, les producteurs s'adaptent aux besoins du marché. Ce que nous tentons de faire, entre autres, c'est les renseigner exactement sur ce qui est requis.
    Par exemple, et mon collègue en a parlé, la pratique du labourage offre des avantages sur le plan environnemental, mais elle offre aussi des avantages sur le plan financier.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur Berthold.
    Monsieur Peschisolido, vous avez maintenant la parole pour six minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
    Vous avez tous parlé un peu du besoin d'augmenter la production — produire davantage avec moins de ressources —, mais aussi de la nécessité de le faire d'une façon durable, afin de limiter les retombées négatives au niveau de la terre, de l'eau et de l'environnement.
    Vous avez parlé de deux autres choses: les problèmes de financement ainsi que le régime de réglementation.
    Madame Miller, j'ai été fasciné par vos initiatives. Vous avez parlé de quelques initiatives et du fait que vous avez un programme de concordance des fonds.
    Sur quoi pensez-vous que le gouvernement devrait cibler le financement pour vous aider à atteindre vos buts?
    Je vous remercie de la question.
    Nous avons appris certaines choses au cours des quatre dernières années.
    Premièrement, il y a l'importance du dialogue. Il n'est pas évident que les gens se parlent ni que les différents organismes se parlent. Quand on tente de combler l'écart entre le marché et les producteurs, en incluant aussi la société civile et les groupes environnementaux — ce que nous tentons très fort de faire —, il faut bien du temps pour produire cette compréhension particulière.
    Le deuxième aspect est l'investissement en données. Il y a beaucoup d'investissements dans les données, on parle beaucoup des grandes données, des efforts visant à rendre les données ouvertes, mais tout cela n'est pas forcément sous une forme qui puisse servir à nos fins. Nous essayons de faire quelque chose de nouveau ici. Dans la foulée, nous espérons que cela éclairera ce genre de décisions.
    Madame Miller, parmi les participants à ce dialogue, il y en a qui nient les changements climatiques. Ils prétendent que ce n'est pas un problème, que nous ne devrions pas nous occuper des émissions croissantes de gaz à effet de serre.
    Estimez-vous que le changement climatique soit un problème et que nous devrions nous en occuper?
    Tout le monde qui vient à notre table, la Canadian Roundtable for Sustainable Crops, est déterminé d'une façon ou d'une autre à améliorer la durabilité environnementale. C'est une condition préalable à l'adhésion. Nous avons comme membres tous les producteurs de grain au Canada et, comme je l'ai dit, les manutentionnaires de grain, les détaillants, etc. Cette opinion n'a jamais été soulevée dans nos discussions.
(1555)
    Très bien.
    Vous avez parlé des intrants. Vous avez parlé du fumier par opposition à l'engrais artificiel. Pouvez-vous nous en dire davantage? Le type d'intrants que les agriculteurs utilisent importe-t-il en ce qui concerne la qualité de l'eau et les questions environnementales?
    Du point de vue des exigences du marché et des exigences en matière de durabilité, la source n'importe que dans la façon dont elle est utilisée. Par exemple, pour le fumier, l'accent est mis davantage sur l'entreposage, parce qu'il n'apparaît pas du jour au lendemain ni n'est utilisé du jour au lendemain, et il y a donc une période d'entreposage. Cependant, les principes sont les mêmes. Il faut utiliser la bonne quantité du bon produit, au bon moment et au bon endroit, ce que Fertilizer Canada préconise. C'est exactement ce que cet organisme demande. En dehors de la contamination fortuite éventuelle en cours d'entreposage, la question qui se présente au sujet des engrais, c'est qu'ils doivent être utilisés par la culture et ne pas se prêter à un écoulement dans l'eau.
    Bon.
    Monsieur Prouse, vous avez mentionné une chose qui, à mon avis, est cruciale. Vous m'excuserez, mais je vais paraphraser vos paroles. Vous aimeriez que le gouvernement aide à la concrétisation du rêve de meilleures récoltes. Pouvez-vous nous dire comment nous pourrions faire cela tant du côté du financement que du côté des règlements?
    Certainement.
    Mon collègue, Ian, en a parlé un peu en ce qui concerne la rapidité du processus d'approbation. À l'heure actuelle, celui-ci s'étend sur deux à trois années. Si nous voulons faire du Canada un chef de file en biotechnologie et en investissement, il faudrait arriver à ramener cette période à un an. Cela ne coûtera rien au gouvernement. C'est une simple question d'application de meilleurs principes et d'accélération du processus.
    Du côté du financement, il s'agit de veiller à ce que les organismes de réglementation soient adéquatement dotés de sorte qu'ils puissent traiter non seulement des exigences techniques, mais aussi d'un grand nombre des questions en jeu à l'heure actuelle sur le plan du commerce. Par exemple, l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire s'occupe non seulement des questions de santé et de sécurité, mais aussi de questions se rapportant à ce qu'on appelle les LMR, les limites maximales de résidus, qui ont un impact sur le commerce. Ces organismes de réglementation sont-ils dotés d'un personnel suffisant pour ce qui sera attendu d'eux? C'est à ce niveau que la question du financement se situe pour nous.
    Cependant, la réforme du système de réglementation — et mon collègue Ian pourrait vous en parler davantage — est une chose que nous poussons parce que nous voulons faire du Canada le centre de cet investissement en biotechnologie. Nous savons que la recherche se fera. Elle va se faire quelque part dans le monde. Nous aimerions que ce soit au Canada.
    Pouvez-vous nous parler de la pomme d'Okanagan?
    Bien sûr, mais allez-y, Ian.
    J'ajouterais aussi un point à la fin de cela.
    Nous avons un excellent capital intellectuel au Canada dans le domaine de la sélection végétale, avec des groupes comme le centre de développement des cultures à l'Université de la Saskatchewan. Ces groupes veulent accéder à ce créneau des caractéristiques modernes, mais ils ont peur du système de réglementation, des coûts et du fait qu'ils ne peuvent peut-être pas se le permettre. Il y a un équilibre entre le financement pour ces grands centres de sélection végétale que nous avons au Canada, avec les partenariats publics-privés, pour accélérer cela; cependant, ils savent qu'ils doivent passer par notre système de réglementation pour commercialiser leurs innovations. Voilà pourquoi ils n'essaient pas maintenant. C'est un excellent groupe à entendre si vous voulez parler de la sélection végétale.
    Pour la pomme d'Okanagan...
    Je vais devoir vous arrêter là.
    M. Ian Affleck: Je comprends.
    Le président: Le sujet reviendra peut-être avec un autre député.

[Français]

     Madame Brosseau, vous disposez de six minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    En général, quand on entreprend des études, nous entendons des fonctionnaires. Je suis si heureuse de vous avoir, vous, ici pour briser la glace et lancer cette étude importante. Je crois que c'est la première fois que nous entreprenons une étude des changements climatiques, des sols et de la durabilité, et je suis fort aise que nous le fassions finalement.
    Je n'ai qu'une question pour vous, monsieur Prouse.
    Nous parlions du processus d'approbation. Combien de temps faut-il aux États-Unis pour que les choses soient approuvées, comparativement au Canada?
    Le système américain est essentiellement semblable au nôtre. C'est un système fondé sur la science — et Ian pourrait vous en parler. Il a tendance à être un peu plus rapide aux États-Unis à l'heure actuelle. La façon dont les choses vont évoluer n'est pas très claire pour l'instant, parce qu'aux États-Unis, ils se demandent maintenant s'ils vont réglementer, et comment, certaines des nouvelles technologies qui s'annoncent, y compris ce qui est appelé la technologie CRISPR.
    Ian, si vous pouvez expliquer cela en 30 secondes, ce serait extraordinaire.
    Eh bien, je dirais que la technologie CRISPR est... La sélection végétale conventionnelle existe depuis 10 000 ans. La méthode moderne dont nous parlons et que nous réglementons à l'heure actuelle existe depuis 50 à 60 ans. La technologie CRISPR, qui est nouvelle, plus rapide et plus précise, sera utilisée les 40 prochaines années. Avec elle, il est plus facile de générer les données nécessaires pour la réglementation. Ce nouveau domaine est donc prometteur. Il est aussi beaucoup plus accessible pour les petites entreprises parce que le coût de l'innovation baisse. On pourrait vraiment arriver à un marché de l'innovation bien plus diversifié.
    Pour revenir à la comparaison entre les États-Unis et le Canada, en moyenne, les choses vont plus vite aux États-Unis, mais pas tant que cela. Là où il faut 18 mois chez eux, il en faut 24 chez nous. Ils ont bien quelques mécanismes intéressants qui font que si vous proposez quelque chose qui ressemble beaucoup à quelque chose d'autre, ils font le lien et vous donnent très vite l'autorisation, en quatre à six mois, pour des produits très semblables. En revanche, leur système peut être très procédurier, ce qui le ralentit. Il est possible de poursuivre les organismes publics en question, avec pour résultat de se retrouver bloqué pendant 12 ans. Heureusement, le Canada s'appuie sur les données scientifiques et n'a pas ce problème.
    Le plus intéressant, c'est ce qu'ils proposent de faire à l'avenir. Voilà 20 ans que nous réglementons ces produits et nous n'avons jamais, ni personne d'autre au monde, rencontré de problème. Allons-nous mettre autant d'obstacles réglementaires pour la prochaine génération de produits, alors que nous pouvons tirer les enseignements des 20 dernières années et moderniser notre approche? Le Canada a l'occasion, en l'espèce, de travailler en collaboration avec les États-Unis, pas seulement pour faire ce que nous faisons, mais pour les influencer de sorte qu'ils arrivent à une décision qui corresponde aux données scientifiques qui nous semblent appropriées ici, au Canada.
(1600)
    Sur son site Web, Agriculture et Agroalimentaire Canada parle beaucoup des conséquences des changements climatiques. Il parle des possibilités et des défis qui se présentent à nous. Nous avons connu certaines années des sécheresses épouvantables, et puis, nous avons eu des inondations.
    Nous avons eu de graves inondations dans ma circonscription. Dans certains cas, à cause des retards de croissance, les agriculteurs ont enregistré de fortes baisses de rendement. Pouvez-vous nous expliquer comment les choses ont évolué — les variétés de semences — et ce que peuvent faire les agriculteurs pour être certains de disposer des outils voulus pour faire face aux changements climatiques et s'y adapter à l'avenir? Pouvez-vous nous dire ce qu'il faut pour affronter et combattre les changements climatiques?
    Je dirai tout d'abord que le sujet me passionne.
    La biotechnologie n'est pas la solution miracle en matière de protection des cultures. Elle fait juste partie de la boîte à outils des agriculteurs. Ils doivent utiliser les outils de toutes les méthodes de production qu'ils peuvent trouver pour savoir ce qui marche sur leur exploitation, mais certaines technologies existantes ou à venir permettront sans doute de sauver des cultures inondées pendant quelques jours qui, une fois sorties de l'eau, pousseront quand même.
    Des laboratoires travaillent là-dessus. On y pense, mais malheureusement, si l'idée est commercialisée par des entreprises, elles voudront que ça leur rapporte. Les recherches nécessaires pour respecter la réglementation représentent le principal coût. Si cet obstacle est élevé, il faudra plus de temps pour mettre les produits sur le marché parce que la demande ne sera pas si importante tant que la situation climatique ne s'aggrave pas. Moins l'obstacle est élevé, plus vite les produits sont commercialisés et plus on aura de petits acteurs qui proposeront plus de produits particuliers à mettre dans la boîte à outils des agriculteurs. C'est un des principaux éléments.
    Au sujet de la pomme, par exemple, nous n'avons pas au Canada de normes de service en ce qui concerne les approbations de produits issus de la biotechnologie. On n'a aucune idée du temps que cela demandera. Quand on explique à son investisseur en capital-risque qu'on a une innovation fantastique, mais qu'on ne sait pas si on pourra la commercialiser, il devient difficile pour lui de continuer de signer des chèques pour maintenir à flot un projet dont l'aboutissement reste hypothétique.
    Des normes de service élémentaires pour rendre le processus plus rigoureux aideraient à prévoir s'il est possible de mettre sur le marché ces nouveaux produits qui tolèrent l'eau, la sécheresse ou le sel. Nous avons déjà sur le marché du maïs résistant à la sécheresse, mais on peut faire plus.
    Oui, et très rapidement, c'est ce maïs résistant à la sécheresse qui a permis aux États-Unis d'avoir une récolte il y a deux étés, quand ils ont été confrontés à une terrible sécheresse. Ils ont obtenu un rendement plus ou moins équivalent à celui des années 1990, qui n'était pas fameux, mais il y a 50 ans, ce genre de sécheresse aurait détruit les cultures. On n'aurait pas récolté de maïs du tout. Or, ils ont eu une récolte. Comment? Grâce à la phytotechnie moderne qui leur a permis d'avoir un semblant de récolte même dans des conditions climatiques aussi difficiles.
    Ai-je le temps de poser une question à Mme Miller?
    Vous avez cinq secondes.
    Pouvez-vous en dire un peu plus sur les indicateurs de développement durable que nous avons au Canada et nous préciser s'ils correspondent aux indicateurs internationaux?
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Ruth Ellen Brosseau: Bien dit, n'est-ce pas?
    Pourrait-elle répondre?
(1605)
    Peut-être que quelqu'un d'autre reprendra la question.
    Monsieur Drouin, vous avez six minutes.
    Nous collaborons au Comité, donc si elle souhaite...
    Souhaitez-vous que je réponde?
    Oui, poursuivez.
    Nous en avons 12 catégories et elles correspondent aux critères internationaux et à ce qu'on qualifie généralement de durabilité. Ainsi, la responsabilité sociale comprend la sécurité des travailleurs, mais aussi la sécurité des producteurs, les relations du travail, les conditions de travail, comme le salaire minimum, les avantages sociaux, etc., et les relations avec la collectivité.
    En ce qui concerne l'environnement, la gestion agrochimique ou des pesticides font partie des indicateurs. Il y a la gestion des éléments nutritifs. Nous en avons déjà parlé. Il y a la qualité des sols et la productivité; la qualité de l'eau et la quantité d'eau, en particulier par rapport à ce qu'on fait pour les protéger; ainsi que l'utilisation des terres et la gestion de la biodiversité. On insiste beaucoup sur le fait de ne pas convertir des terres forestières ou sensibles en surfaces cultivées. Il y a les émissions de gaz à effet de serre, la qualité de l'air, la gestion des déchets et la pollution, et puis la viabilité financière.
    Nous recueillons des données sur tous ces indicateurs. Pour ce qui est du rendement, nous n'en sommes pas encore là. Nous avons des choses intéressantes à dire et des améliorations à apporter. La plateforme servira à publier les données et donnera un point de départ pour avancer.
    Je vous remercie.
    Monsieur Affleck, je suis curieux au sujet de ce qu'on pense aux États-Unis. Vous avez mentionné la méthode CRISPR, que je connais, mais d'un point de vue médical. Je sais qu'elle représente la prochaine révolution dans l'édition des gènes. J'aimerais savoir quel délai CropLife jugerait acceptable pour la mise en place d'une réglementation. À l'heure actuelle, il est de deux ans. Devrions-nous essayer de le ramener à un an ou de le raccourcir autant que possible? Je sais qu'avec la méthode CRISPR, les technologies s'accélèrent. Le but est donc, évidemment, de raccourcir ce cycle. J'aimerais savoir quel devrait être l'objectif du gouvernement du Canada.
    Comme l'a expliqué Dennis tout à l'heure, nous estimons qu'un délai de réponse de 12 mois est facilement tenable, étant donné qu'à notre connaissance, il se passe 12 mois sur les 24 avant qu'on ouvre même les dossiers. Si on peut réduire ou résorber l'arriéré, on arrive déjà à un examen de 12 mois. En fait, le dossier reste 12 mois dans une pile.
    Je dois reconnaître que les organismes de réglementation s'intéressent à ce qui se fait aux États-Unis, où il y a le programme dit de transfert. Si on propose quelque chose qui ressemble beaucoup à quelque chose d'autre, la décision peut être encore plus rapide parce qu'on connaît le produit proposé. Les organismes de réglementation réfléchissent à l'adoption de ce type de pratique, mais elle aiderait seulement à mettre sur le marché des choses très semblables à ce qui s'y trouve déjà. Dans le cas qui nous occupe, c'est-à-dire la commercialisation de produits nouveaux et uniques, le programme de transfert n'aiderait en rien. Il faut se débarrasser du temps mort au début et s'occuper tout de suite des dossiers.
    Il existe aussi des possibilités dans l'examen même où Santé Canada, l'ACIA et les deux ministères effectuent tous un examen de toxicologie. Pourraient-ils en faire un seul et collaborer? Y a-t-il là des économies à réaliser? Il s'agit d'un projet de plus grande envergure, mais qui mérite d'être étudié. Ce premier morceau devrait être facile à traiter. Enfin, dire facile, c'est aller un peu vite en besogne. Soyons justes et disons faisable.
    J'ajouterais, très vite, que c'est aujourd'hui que le département de l'Agriculture des États-Unis a annoncé qu'il écarte la série de propositions précédente sur la réglementation de ces technologies. Il n'y donnera pas suite. Il reprend tout du départ. De toute évidence, c'est quelque chose que le Canada va devoir suivre de très près parce qu'où se livre la concurrence internationale autour des investissements? Manifestement, beaucoup là-bas.
    Oui. Nous devons, évidemment, mettre en place une réglementation similaire à celle des États-Unis, si nous voulons faire jeu égal.
    Nos entreprises membres vous diront que la bataille de l'investissement se joue à l'interne. Lorsqu'on a affaire à une société multinationale qui décide où investir, ses différents secteurs doivent défendre leur espace, si je puis dire. C'est pourquoi il est extrêmement important pour le Canada d'être compétitif et de savoir où il se situe sur le plan de la réglementation par rapport au reste du monde. Nous devons nous battre pour avoir notre part de ces investissements.
(1610)
    J'aimerais savoir... Je vais vous dire ce que je vois dans ma circonscription à propos de l'incertitude que créent les changements climatiques. Je suppose qu'il est trop tôt pour dire que c'est à cause des changements climatiques, mais je laisserai les scientifiques répondre à cette question. Ils se sont prononcés très clairement à ce sujet. L'an dernier, ma circonscription a été frappée par une sécheresse. Cette année, ce sont les pluies. Quelle position votre industrie adopte-t-elle pour aider les agriculteurs à planter les bonnes semences ou à cultiver les variétés adaptées cette année-là? Il devient de plus en plus difficile de prévoir le temps qu'il va faire.
    C'est pourquoi nous disons que les agriculteurs sont maintenant aux prises avec les effets des changements climatiques. Ce n'est pas un résumé. À bien des égards, comme vous l'avez vu, ils y sont confrontés aujourd'hui. On peut jouer sur les mots et l'appeler comme on veut, mais telle est la réalité en ce moment même. Ce qui renvoie à la recherche sur les semences. Combien de variétés pouvons-nous proposer aux agriculteurs d'acheter? Combien d'options pouvons-nous leur donner? Telle est la bataille et, comme Ian le soulignait plus tôt, il n'y a pas de baguette magique et nous devons faire attention à ne pas laisser croire qu'il existe une panacée technologique qui réglera tout.
    Nous pensons qu'il existe plus d'outils à mettre à la disposition des agriculteurs face à cette situation.
    Je vous remercie, monsieur Prouse.
    Monsieur Longfield, vous disposez de six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie tous les témoins de leur présence. Vous allez voir qu'il y a un lien logique dans nos conversations au Comité.
    Au sujet de la discussion sur les changements climatiques et les réponses à y apporter, je vais revenir aux sols, et je pense à l'agriculture de précision et à la surveillance précise des sols. L'un de vous pourrait-il parler de l'utilisation de données, de l'utilisation de ce que nous mesurons dans les sols pour essayer de faire en sorte de commencer là où il faut pour augmenter la productivité?
    Je demanderai à l'agriculteur de parler en premier.
    J'ai grandi dans une exploitation qui produisait des pommes de terre, à l'Île-du-Prince-Édouard, et j'ai vu l'évolution. Quand j'étais jeune, nous avions le premier type de cartographie GPS de nos champs, par carrés d'un demi-kilomètre. Aujourd'hui, on en est au point d'appliquer de la chaux là où l'épandeur de chaux change la quantité épandue quand le tracteur remonte le champ. C'est vraiment incroyable. Ce type de cartographie décolle et on commence à voir des agriculteurs utiliser des drones pour surveiller différentes maladies dans différents coins de l'exploitation. Peut-être qu'il leur suffit de pulvériser du produit dans une partie du champ seulement parce que le problème est localisé.
    Réunir et conserver ces données pour les utiliser maintenant et dans des applications futures dont nous n'avons même pas encore idée... Mais en y repensant, si on n'avait pas cartographié l'exploitation, on ne verrait pas ses tendances. Je pense que le groupe de Susie et les données qu'il collecte en feront partie. L'agriculture de précision occupera une place essentielle dans chaque élément entre les semences qu'on utilise dans une partie des champs... peut-être qu'on changera de variétés par la suite d'un endroit à l'autre d'un champ parce qu'on sait qu'un coin est différent de l'autre. Ce ne sera pas aussi simple qu'une seule variété sur 100 acres. Vous allez voir que les choses vont commencer à changer.
    Dans le même ordre d'idées, je ne peux pas vous donner les chiffres exacts pour l'instant, mais c'est quelque chose que suivent l'Enquête sur la gestion agroenvironnementale et le recensement de l'agriculture par rapport au type de technologie, qu'il s'agisse d'agriculture de précision, de GPS ou d'autre chose. Nous l'avons également inclus dans notre enquête. C'est très certainement en augmentation. Par exemple, la possibilité d'appliquer des engrais à dose variable fait qu'on en utilise plus et qu'on a, en quelque sorte, réduit l'empreinte environnementale globale. Nous saurons en janvier, à sa publication, de combien nous avons progressé.
    Très bien. M. Drouin et moi-même étions à la foire agricole en plein air et nous sommes allés voir les différents stands où on parlait de la technologie des drones par opposition à l'utilisation d'un véhicule, de la détection physique par opposition à la détection par drone, afin d'entendre les arguments de part et d'autre.
    La science est-elle arrivée à un point où nous avons une approche tricyclique intégrée, le carbone, l'azote et l'eau constituant une sorte de base de données qui nous permet de savoir ce que nous devons faire? Peut-on parler de conditions pédologiques optimales qu'on essaie de maintenir ou est-ce différent d'une exploitation à l'autre?
(1615)
    Pour autant que je sache, il me semble que c'est différent d'une exploitation et d'un champ à l'autre, mais c'est essentiellement ce qu'essaient de faire tous les agriculteurs sur leurs terres. Cette capacité de suivre et de déterminer des tendances et de réunir des données qu'on ne pouvait pas obtenir avant les aidera à trouver cet équilibre.
    Je vais revenir à une des questions posées plus tôt sur la volonté d'augmenter considérablement notre production agricole. Comme l'a dit Susie, nous voulons le faire tout en montrant une tendance à la diminution de l'impact environnemental. Je pense que les agriculteurs le comprennent bien. Ils essaient de faire les deux, et ils comptent faire les deux, c'est-à-dire augmenter la production et réduire les intrants et leur impact environnemental.
    C'est cet équilibre précisément qu'ils doivent trouver. Puis ajouter les technologies des semences qui utilisent mieux l'azote de sorte qu'ils n'ont pas besoin d'en utiliser autant parce que l'équilibre — je le vois en ensemençant le champ — change en fonction de la variété. De quels nutriments cette variété a-t-elle besoin par rapport à telle autre?
    D'accord, mais en détectant en remontant le champ, on voit ce qui réagit et ce qui ne réagit pas à ce qu'on sème ou qu'on épand.
    Je me rappelle avoir parlé avec un agriculteur plus âgé qui disait ne pas y croire. Il ne croyait pas qu'il ne devrait pas retourner dans son champ deux fois par mois. Il ne croyait pas qu'il allait obtenir des résultats, mais il a pris le risque et a décidé d'essayer.
    Il y a une question de confiance des agriculteurs. Est-ce que c'est juste une personne ou est-ce que c'est quelque chose que, dans notre étude...
    Je ne crois pas que les agriculteurs aient confiance en quoi que ce soit. Je crois qu'il faut qu'ils essaient.
    Mon père a toujours été comme cela. Il disait, « Ça m'a l'air bien beau, je vais en semer quelques rangs en alternance et je vais voir ce que ça donne dans mon exploitation ». Cependant, il faut d'abord avoir ces données pour les convaincre de faire l'essai parce que l'essai représente un risque pour eux. Ils mettent de l'argent sur la table pour le faire, ils veulent donc voir la preuve. Ils veulent essayer le produit dans leur exploitation, mais une fois qu'ils l'adoptent, l'année suivante, c'est à 100 %. Je l'ai vu pour bien des choses dans notre exploitation.
    Je me rappelle que je m'efforçais de garder les cultivateurs dans les rangées. Dès que mon père a compris que l'ordinateur pouvait faire un meilleur travail que moi, nous en avons eu sur tous les tracteurs.
    Parfait.
    En ce qui concerne la politique gouvernementale, il y a un document sur la gestion des risques. Il y a l'introduction de nouvelles technologies et on essaie d'inciter les agriculteurs à les utiliser parce qu'elles les aideront.
    Où en est-on à ce sujet? Est-ce que c'est prévu dans notre cadre stratégique actuel ou est-ce que c'est une question que nous devons examiner?
    Je vais devoir vous interrompre. Votre temps de parole est écoulé. Peut-être aurez-vous une occasion...
    Monsieur Barlow, vous disposez de six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    C'est intéressant d'entendre ces histoires au sujet de l'innovation et de la gérance de l'environnement par nos agriculteurs. Nos agriculteurs et nos éleveurs sont parmi les personnes les plus soucieuses de l'environnement dans le pays. Il me semble que nul d'entre nous dirait le contraire. Ils vivent de la terre. C'est leur moyen de subsistance.
    Il s'agit là de quelque chose de très important dans le cadre de cette discussion: le fait que nos agriculteurs et nos éleveurs agissent ainsi depuis des générations. Ils adoptent la technologie et l'innovation et ils font tout leur possible pour protéger leurs terres et faire en sorte qu'elles soient productives.
    Dans une étude précédente, nous avons eu un témoin qui avait des serres en Colombie-Britannique et, comme la taxe sur le carbone lui coûtait 50 000 $ par an, elle a fermé ses serres.
    Maintenant que l'Alberta a adopté la taxe sur le carbone, j'ai des agriculteurs et des éleveurs dans ma circonscription à qui elle coûte en plus de 50 000 à 125 000 $ par an. On dirait donc que nos agriculteurs, nos éleveurs et nos serriculteurs ont fait toutes ces choses pour avoir la plus petite empreinte carbone possible avant même que ce débat soit en vogue et que, pourtant, ils se retrouvent punis d'avoir fait tout ce qu'il fallait.
    Quant aux changements climatiques, je suis d'accord avec mon collègue, M. Drouin, nous ne sommes pas là aujourd'hui pour discuter de leur réalité ou pas, mais je tiens à dire, monsieur Drouin, que nous devrions tous avoir vos agriculteurs qui peuvent prédire le temps qu'il va faire. C'est impressionnant qu'ils en aient été capables avant maintenant.
    Non, ils ne le pouvaient pas.
    Alors que le gouvernement fédéral va de l'avant avec son projet de taxe sur le carbone, est-ce que vos membres — et les vôtres aussi, Susie — parlent de demander une exemption pour l'agriculture en raison des choses et des activités que vous faites, qu'il s'agisse des semences Roundup Ready, de cultures sans labour ou de la technologie mise en place pour réduire la consommation d'eau? Y a-t-il des discussions de ce type?
    Peut-être que c'est un message à transmettre lorsqu'il est question de mettre en place une taxe fédérale sur le carbone.
(1620)
    Il me semble que les groupes de producteurs seraient mieux placés pour en parler. Nous ne les représentons pas. Comme le groupe de Susie, tous ceux avec qui nous travaillons sont attachés à la durabilité, qui est notre but de manière générale. Les groupes de producteurs qui représentent ces agriculteurs seraient probablement mieux placés pour répondre aux questions plus particulières sur la compétitivité. Je ne crois pas qu'ils voudraient que je parle en leur nom.
    D'accord, je comprends.
    Susie.
    Il n'en est pas question. Encore une fois, ce n'est pas le genre de tribune où on a ce genre de discussions, mais nous savons que le rapport sur le cycle du carbone que nous avons préparé et qui sera publié en janvier sera utile dans tout type de discussion de politique. C'est notre contribution.
    Je vous en remercie et c'est un message que nous transmettrons peut-être — vous en avez parlé —, qu'il ne s'agit pas seulement du coût, mais du fait que cette taxe les empêche d'être concurrentiels à l'échelle internationale par rapport à nos partenaires commerciaux qui n'ont pas ces coûts. Il me semble que nous devons en tenir compte.
    Vous avez également parlé un peu du processus réglementaire. Je veux en parler aussi.
    Dennis et Ian, vous disiez qu'il faut deux à trois ans pour obtenir une approbation au Canada, mais il me semble que c'est seulement une étape parce que les producteurs de canola nous ont également expliqué qu'ils voudraient commercialiser certaines variétés, mais que la Chine ne leur donne pas le feu vert. Je ne sais pas si tout le monde le sait, mais s'ils n'ont pas le consentement unanime de tous nos partenaires commerciaux, ils ne pourront rien faire. Certains obstacles non tarifaires au commerce ont également une incidence en l'espèce. Peut-être pourriez-vous parler de la perspective mondiale par rapport à certains de ces obstacles réglementaires?
    Certainement. Je peux commencer et Ian pourra, j'en suis sûr, compléter si j'oublie quelque chose.
    Vous avez raison. Si la Chine, qui est le plus gros marché pour le canola, n'approuve pas un commerce, cela veut dire qu'un agriculteur canadien ne peut pas cultiver et ne peut pas profiter des technologies. Quand je raconte cette histoire, les gens sont très choqués, mais ce serait vrai sur bon nombre de marchés. Elle montre pourquoi, lorsque le Canada négocie des accords commerciaux internationaux, la question des obstacles non tarifaires au commerce est tout à fait essentielle pour l'agriculture. On constate en général dans le monde qu'à mesure que les droits de douane baissent, les obstacles non tarifaires tendent à se renforcer.
    Je ne dis rien que les gouvernements, précédent et actuel, ne comprennent pas très bien, et les équipes de négociation le comprennent aussi, mais nous devons continuer de le souligner parce que cela nuit à la compétitivité des agriculteurs canadiens.
    Si, lors de discussions avec nos principaux partenaires commerciaux, nous ne pouvons pas nous-mêmes faire état de procédures efficaces fondées sur de solides données scientifiques, nous ne pourrons guère leur reprocher de ne pas aller assez vite, car, à leur tour, ils pointeront les insuffisances de nos normes de service. Ils diront que nous affirmons que cela sera fait dans les deux ans, mais qu'on ne peut même pas citer la règle qui prévoit de dire qu'il en sera effectivement ainsi.
    J'ajoute qu'on ne peut pas déposer une demande auprès des autorités chinoises avant d'obtenir l'homologation des services canadiens. Or, s'il faut deux ou trois ans avant d'obtenir le feu vert des autorités canadiennes, et qu'après cela l'approbation des Chinois prend encore quatre ou cinq ans à obtenir, si l'on pouvait recevoir en un an le feu vert des autorités canadiennes, eh bien cela écourterait d'un an ou deux le processus de validation. Si nous pouvions faire état, dans le cadre des négociations commerciales, multilatérales ou bilatérales, d'un système plus simple et plus efficace, nous pourrions dire à nos partenaires « Nous vous demandons effectivement d'améliorer vos procédures, et voici comment s'y prendre ». Il nous est difficile sans cela de critiquer le système en vigueur chez les autres. Une telle simplification des procédures nous donnerait un avantage supplémentaire lors des négociations.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur Barlow.
    Nous allons maintenant entendre M. Breton pour une durée de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous d'être ici aujourd'hui.
    Certains spécialistes mentionnent que les changements climatiques pourraient avoir des aspects positifs, par exemple le prolongement de la saison agricole et la diminution des coûts dans certains secteurs, comme celui de la nourriture pour les animaux. Que pensez-vous des affirmations selon lesquelles cela pourrait aussi être une occasion à saisir? Les changements climatiques présentent beaucoup d'effets négatifs, on le sait: des pluies abondantes, des eaux diluviennes ou des sécheresses, à certains moments. Cependant, il y aurait peut-être aussi des aspects positifs, et je voudrais entendre le point de vue de chacun là-dessus.
(1625)

[Traduction]

    Pour ce qui est des avantages qui pourraient découler du changement climatique, tout va dépendre de la capacité d'adaptation des producteurs. Il y aura, en effet, à la fois des avantages et des inconvénients. Ainsi, le climat peut se réchauffer, mais cela risque d'augmenter le nombre d'insectes nuisibles, ce qui exigera de plus fortes quantités d'insecticides, ou entraînera de plus fortes pertes de récoltes.
    Tout dépend donc des capacités d'adaptation des producteurs. Or, on constate déjà un effort sensible d'ajustement. C'est ainsi qu'il y a 25 ans on ne voyait pas pousser, dans l'Ouest du Canada, dans les provinces des Prairies, des pois, des haricots, ou des lentilles. Or cette région est désormais le plus gros exportateur de lentilles rouges du monde. Ce résultat n'est pas uniquement dû à la technologie, mais aussi à l'innovation.
    Tout cela présente, dans l'optique des efforts que nous menons dans le cadre de la Canadian Roundtable for Sustainable Crops, des avantages, certes, mais aussi des inconvénients. C'est ainsi que l'on constate une baisse de nos ressources hydriques et qu'il faudra donc accorder davantage d'importance à la conservation de l'eau. Si nous devons augmenter l'emploi d'insecticides en raison d'une augmentation du nombre d'insectes nuisibles — et je dis bien « si » — eh bien, là encore, nous devrons renforcer nos efforts de gestion. Tout cela va donc dépendre de nos capacités d'adaptation. Le changement climatique peut entraîner un certain nombre d'avantages, mais il peut aussi avoir des impacts négatifs. Il se peut même que cela entraîne simplement un changement de situation.
    À la conférence, j'ai rencontré un producteur de quinoa du Manitoba. Cela m'a surpris, mais c'est une plante qui y est effectivement cultivée.
    Pour revenir à ce que disait Susie, il va y avoir un mélange de conditions favorables et défavorables. Or, comment aider les agriculteurs à gérer tout cela? Lors de la conversation que nous avons eue avant le début de la séance, j'ai dit à Mme Brosseau qu'il s'agit d'une situation complexe et très nuancée qui ne peut guère être décrite en 140 caractères. C'est d'ailleurs toute la difficulté. Cela dit, il ne fait aucun doute qu'au Canada les zones de culture s'agrandissent, ce qui veut dire que notre pays a le grand avantage de pouvoir accroître sa production et contribuer à l'alimentation du monde au cours des décennies à venir. Sur ce point, les spécialistes sont unanimes.
    La question a été très bien exposée. Il s'agit donc essentiellement du délai de traitement des dossiers, et donc du temps qu'il faut avant qu'un agriculteur puisse mettre en marché une nouvelle variété de plante. Il faut de sept à neuf ans pour introduire une variété obtenue par des moyens conventionnels. Le délai est de 10 à 15 ans pour une variété issue de la biotechnologie. Or, si le changement climatique s'accélère, nous allons avoir du mal à soutenir le rythme. Une réglementation plus efficace permettrait de réduire le nombre de données exigées, et le délai peut être ramené à neuf ans lorsqu'il s'agit de techniques qui ont fait la preuve de leur innocuité. Les CRISPR permettent de réduire les essais en laboratoire, de ramener le délai à sept ans, de réagir donc beaucoup plus vite au changement climatique, de mieux profiter des avantages, et de mieux faire face aux inconvénients.

[Français]

     Je vais terminer sur une affirmation que vous avez faite aussi.
    Ce n'est pas un enjeu canadien, c'est un enjeu mondial. Je pense que si les producteurs, les transformateurs et le gouvernement travaillent en collaboration, les producteurs canadiens pourront relever un défi intéressant au chapitre de l'exportation et être des leaders de la production adaptée aux changements climatiques.
    Je vous remercie de vos témoignages d'aujourd'hui.
    Je vous remercie, monsieur Breton.
    Si vous me le permettez, je vais faire un commentaire aussi.
    On peut faire beaucoup de choses par rapport aux changements climatiques grâce à la technologie. Il faut aussi réaliser que ce problème est réel. Chez nous, la forêt acadienne fournit du bois aux scieries. Cependant, si les choses continuent ainsi, dans 20, 40 ou 50 ans, cette forêt disparaîtra de notre région, ainsi que les bleuets et les choses qui y poussent.
    Je suis d'accord qu'il y a la technologie, mais il faut être conscient que d'autres mesures sont nécessaires.

[Traduction]

    Je tiens à remercier nos intervenants d'aujourd'hui. Nous avons eu des échanges très fructueux, qui sont d'ailleurs appelés à se poursuivre.
    Monsieur Affleck, monsieur Prouse et madame Miller, je vous remercie.
    Nous allons maintenant suspendre quelques instants la séance en attendant nos prochains témoins.
(1625)

(1630)
    Nous allons maintenant entamer la seconde partie de la séance.
    Je commence par souhaiter la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins.
    Nous accueillons le Conseil canadien de l'horticulture, en la personne de Rebecca Lee, sa directrice générale. Soyez la bienvenue. Elle est accompagnée de Jan VanderHout, membre du Comité de l'environnement.
    Nous accueillons également le Conseil canadien de conservation des sols, représenté par M. Alan Kruszel, son président.
    Nous avons aussi le plaisir d'accueillir les représentants de USC Canada, M. Martin Settle, son directeur général, et Geneviève Grossenbacher, chargée de programmes.
    Nous allons donner la parole en premier au Conseil canadien de l'horticulture. Vous avez 10 minutes.
(1635)
    Je vous remercie de l'occasion qui nous est donnée de vous entretenir des incidences du changement climatique sur le secteur canadien de l'horticulture.
    Le Conseil canadien de l'horticulture, ou CCH, est une association nationale qui représente les cultivateurs de fruits et de légumes qui, dans plus de 27 500 exploitations agricoles, cultivent pas moins de 120 variétés différentes. Cela fait 6 milliards de dollars de recettes monétaires agricoles. Depuis presque 100 ans, le CCH oeuvre sur les grandes questions touchant le secteur canadien de l'horticulture, défendant les intérêts de nos cultivateurs qui fournissent à la population du Canada des aliments sains issus d'une agriculture durable.
    Le secteur horticole est entièrement d'accord avec l'objectif que le gouvernement fédéral s'est fixé dans le cadre du budget 2017, et qui prévoit de porter à 75 milliards de dollars nos exportations agroalimentaires d'ici 2025. Les producteurs se retrouvent, cependant, face à de nombreuses difficultés, y compris à des problèmes écologiques, et la concurrence de pays qui appliquent une réglementation moins exigeante, ou une réglementation qui ne repose pas sur des données scientifiques. Le gouvernement fédéral peut les aider à résoudre ces difficultés en reconnaissant, dans le cadre de sa politique nationale de gestion du carbone, divers carburants agricoles, et en accordant son appui à de nouveaux efforts de recherche et d'innovation dans le secteur horticole.
    Les producteurs canadiens ont tout intérêt à adopter des modes de cultures durables et de bonnes pratiques en matière de gérance environnementale. Il n'est pas rare que les cultivateurs investissent dans des programmes et des nouvelles techniques permettant d'atténuer les risques qui se présentent au niveau de l'environnement. C'est ainsi, par exemple, que les serriculteurs ont trouvé de nouveaux moyens de recycler le carbone qu'ils produisent et de le transformer en CO2 de qualité alimentaire pour nourrir les cultures. Or, cette innovation, qui est durable sur le plan de l'environnement, n'est au Canada, pas reconnue, ce qui fait que les diverses provinces calculent différemment le prix de ce carbone.
    Ces politiques de tarification augmentent les coûts des producteurs, et s'ajoutant aux coûts des infrastructures à forte intensité de capital nécessaires à la construction des serres, exposent l'ensemble du secteur aux fuites de carbone, et porte certaines entreprises soucieuses de leur compétitivité à développer leurs opérations dans des pays qui, tels que les États-Unis et le Mexique, ne tarifent pas le carbone. Le marché des fruits et des légumes est un marché mondial et il est difficile de répercuter sur le consommateur l'augmentation des coûts de production. Cela affecte le prix des aliments produits au Canada, et entraîne un impact sur notre compétitivité.
    Les cultivateurs de fruits et de légumes sont acquis à des modes de production respectueuse de l'environnement, mais il leur faut, pour rester compétitifs, des tarifs énergétiques et un régime fiscal modérés.
    Le CCH souhaite voir le gouvernement fédéral ajouter le gaz naturel et le gaz propane à la liste de carburants agricoles non soumis à la tarification du carbone, car les gaz d'échappement produits par l'utilisation de ces carburants sont en partie recyclés par les serres, et transformés en CO2 de qualité alimentaire qui contribue à la croissance végétale. Cette exonération permettrait de réduire les disparités régionales dues aux différences au niveau des politiques de tarification du carbone, et contribuerait à la nouvelle politique alimentaire du Canada en rendant la nourriture plus abordable, en améliorant la santé et la sécurité alimentaires, en protégeant nos sols, notre eau et notre air, et en permettant de cultiver des aliments de qualité.
    Le CCH continue à défendre les intérêts des cultivateurs auprès de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, dans le cadre de sa procédure de réévaluation des produits phytosanitaires et par ses efforts en vue d'améliorer les politiques qui fondent les décisions réglementaires de l'ARLA.
    Le CCH continue également à prôner l'harmonisation des divers volets du système de réglementation des produits phytosanitaires, y compris les teneurs maximales en résidus et les examens internationaux conjoints. C'est dans cette optique, que nous continuons à soutenir le programme de pesticides à usage limité du Centre de la lutte antiparasitaire, et de ses efforts en vue de réduire les risques liés à l'emploi de pesticides.
    La santé des végétaux, la biosécurité, et la mise à jour constante des modes d'évaluation des risques liés à l'emploi des pesticides sont des éléments essentiels de l'accès au marché et contribuent notablement à la protection de l'environnement. C'est pourquoi, en matière de protection des cultures, le CCH développe et préconise des politiques et des programmes de gestion favorisant l'accès au marché ainsi que la viabilité économique et la compétitivité des producteurs canadiens de fruits et de légumes afin de continuer à fournir au consommateur canadien des aliments sains.
    J'ajoute que le changement climatique et le développement du commerce international ont introduit dans notre secteur horticole de nouveaux insectes nuisibles. Les organismes de réglementation doivent accroître leurs moyens de lutte contre ces nouveaux parasites envahissants et ces nouvelles maladies qui frappent nos cultures. Ces défis prennent de plus en plus d'importance et coûtent de plus en plus cher à gérer alors même que nous nous attachons à réduire notre empreinte carbone et à nourrir une population mondiale qui ne cesse d'augmenter.
    Le CCH invite le gouvernement fédéral à accorder les crédits nécessaires au bon fonctionnement de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, et du Centre de la lutte antiparasitaire, afin d'assurer à nos cultivateurs l'accès aux moyens de protection des cultures et aux services d'inspection nécessaires. Si l'on n'augmente pas leurs budgets de fonctionnement, ces organismes ne pourront pas réagir assez vite aux parasites envahissants et aux maladies qui frappent les végétaux. Cela risquerait alors de compromettre la bonne santé de ce secteur de la vie économique nationale, et risquerait de contrarier les objectifs que nous nous sommes fixés en matière d'exportations.
    Je voudrais maintenant vous dire quelques mots sur certains des autres domaines dans lesquels le CCH continue à défendre le développement sûr et durable de nos cultures.
    Le CCH voudrait voir le gouvernement soutenir davantage les recherches en augmentant les crédits du Partenariat canadien pour l'agriculture. Lors des consultations sur le nouveau cadre politique fédéral en matière agricole, nous avons détaillé les crédits qu'il nous faudrait pour améliorer la viabilité environnementale de notre secteur. Nous jugeons cela possible si l'on harmonise les programmes du Partenariat canadien pour l'agriculture et du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques.
    L'accès à l'eau et aux techniques d'irrigation avancées revêt une importance critique pour les cultivateurs de fruits et de légumes s'ils veulent s'adapter à des conditions climatiques plus dures et à des conditions météorologiques extrêmes plus fréquentes. Il faudra, pour assurer à l'agriculture un approvisionnement fiable en eau salubre, que le gouvernement mette en place des politiques adaptées et contribue à la construction des indispensables infrastructures. Le CCH recommande que les équipements nécessaires à un bon approvisionnement en eau agricole soient financés au moyen de prêts bon marché qui seraient accordés par la nouvelle Banque de l'infrastructure du Canada.
    Le CCH invite également le gouvernement à soutenir l'innovation dans le secteur horticole. C'est ainsi, par exemple, que les producteurs de fruits de verger ont constitué un dossier qui prône un certain nombre de mesures favorisant l'innovation et le développement du secteur de la pomme, et permettant d'accroître nos exportations agroalimentaires.
    Nous invitons le gouvernement à travailler de concert avec les départements concernés, et les acteurs du secteur horticole afin de mettre en commun les ressources et le savoir-faire, et d'adopter, en matière de changement climatique et de protection de l'environnement, des politiques équilibrées qui n'auront pas de conséquences imprévues pour nos agriculteurs, pour les habitants du Canada, et pour l'approvisionnement alimentaire mondial.
    Je vous remercie de votre attention, et c'est très volontiers que nous répondrons à vos questions.
(1640)
    Merci, madame Lee.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Alan Kruszel, au nom du Conseil canadien de conservation des sols.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs membres du Comité, je tiens à vous remercier de cette occasion de prendre la parole devant vous. Nous sommes heureux de pouvoir ainsi participer à votre étude sur les sols, car c'est un sujet auquel nous nous intéressons particulièrement.
    Je m'appelle Alan Kruszel et je suis président de l'excellente association qu'est le Conseil canadien de conservation des sols. J'exploite une ferme située à environ une heure et demie au sud-est d'Ottawa, près de Cornwall, où je pratique une agriculture de rente.
    Je voudrais vous dire quelques mots au sujet du Conseil. Nous sommes, au Canada, la seule organisation nationale qui se consacre aux soins du sol. Nous lançons en ce domaine des initiatives, nous diffusons les connaissances, facilitons les communications, prônons l'adoption de bonnes politiques et collaborons avec tous ceux qui s'intéressent aux sols. Nous sommes, au Canada, le visage et la voix de la conservation des sols.
    Permettez-moi maintenant de vous parler très rapidement de certaines des choses que nous avons faites au cours de ces dernières années.
    Nous avons été, en 2014, coorganisateurs du sixième Congrès mondial de l'agriculture de conservation, qui a réuni plus de 400 intervenants en provenance de 100 pays différents pour parler d'agriculture de conservation et de ce qui pourrait être fait afin d'améliorer la situation dans les diverses régions du monde.
    Nous avons également organisé, avec nos collègues de la CRSC, l'organisme piloté par Susie, des réunions de personnes acquises à la conservation. Nous nous sommes entretenus avec des groupements agricoles et des groupements environnementaux tels que le World Wildlife Fund et Ducks Unlimited afin de voir si nous ne pouvions pas aligner nos conceptions du paysage agricole canadien. Nous sommes très fiers d'avoir pu publier à cet égard une déclaration commune.
    Nous avons organisé des sommets sur les sols. Le plus récent a eu lieu au mois d'août dans la circonscription de Lloyd. Plus de 180 personnes ont participé à cette réunion consacrée aux coûts et aux conséquences de la dégradation des sols au Canada.
    Nous avons lancé un projet drôle baptisé « soil your undies ». J'en reparlerai un peu plus tard. Il s'agit, en fait, d'un test scientifique qui consiste à enfouir des sous-vêtements en coton dans la terre. On les récupère quelques mois plus tard pour constater l'état de décomposition. Si le coton est dans un état avancé de décomposition, on peut tenir pour acquis que le sol abrite une saine activité biologique. C'est très amusant.

[Français]

    En français, on dit « salissez vos bobettes ».

[Traduction]

    Mais il faut, d'abord, les retirer.
    Des voix: Oh, oh!
    Effectivement.
    Hélas, mesdames et messieurs, la conservation des sols n'est jamais chose acquise. Nous avons, au Canada, fait de grands progrès en ce domaine, et nous ne sommes plus du tout à ces sales années trente. Mais si nous avons fait de gros progrès, il nous reste énormément à faire.
    Je voudrais, aujourd'hui, m'en tenir à deux sujets — le travail du sol et les pertes de matière organique. Ce sont les deux grandes questions que je voudrais évoquer aujourd'hui, car elles continuent à nous poser de graves problèmes. Je précise que lorsque je parle de « matière organique », il s'agit essentiellement de carbone. Le problème est en effet que nos sols sont en train de perdre leur teneur en carbone. À cet égard, nos sols agricoles continuent de s'appauvrir.
    L'ouest du Canada a, sur ce plan, pris de l'avance sur l'est du pays. Je félicite nos collègues de l'ouest qui ont fait du bon travail, même s'il reste beaucoup à faire. Le Conseil a récemment constaté que dans l'ouest du Canada on travaille un peu plus le sol que ce n'était le cas auparavant. On voit en effet assez souvent utiliser en Alberta et en Saskatchewan des cultivateurs verticaux, là où l'on pratiquait naguère le semis direct sans beaucoup remuer la terre. C'est à nos yeux assez préoccupant.
    Le passage à des cultures sans travail de la terre — c'est-à-dire l'ensemencement sans travail du sol — reste cependant extrêmement rare dans l'est du Canada. D'après ce que nous avons pu voir, environ un tiers des terres cultivées sont ensemencées sans labourage. Nous tenons ces résultats du recensement, mais le chiffre est beaucoup plus faible en ce qui concerne les surfaces qui n'ont jamais auparavant été labourées.
    Ceux d'entre vous qui habitent en zone urbaine sont aussi au courant d'un autre problème que nous souhaitons porter à votre attention. En effet, l'expansion urbaine est en train de soustraire à l'agriculture des terres productives. C'est un grave problème qui se profile et nous allons devoir le résoudre.
    Pour les organismes qui peuplent le sol, le labourage apparaît comme un tremblement de terre, un ouragan, une tornade et un feu de forêt tout en même temps. Pour les microorganismes qui peuplent les sols, c'est un véritable désastre. Le labourage ne fait pas de bien aux sols.
    Rattan Lal, de la Ohio State University, est un des grands spécialistes du carbone. Selon lui, depuis les débuts de l'agriculture moderne, nos sols ont perdu de 50 à 70 % du carbone qu'ils contenaient à l'origine. Cette énorme quantité de carbone s'est évaporée dans les airs, essentiellement en raison du labourage.
    La FAO, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, estime que l'érosion des sols nous fait perdre, chaque année, 0,3 % des récoltes. Ce chiffre peut ne pas paraître important, mais cela représente, à l'échelle mondiale, la production annuelle d'environ 4,5 millions d'hectares. Or, c'est comme si, chaque année, l'érosion des sols faisait perdre au Canada presque 10 % de ses terres cultivées. C'est une proportion énorme.
    Dans notre propre exploitation, nous évitons tant que possible le labourage, et nous favorisons la culture sans travail sous couvert végétal. Il s'agit de maintenir aussi longtemps que possible la couverture des sols et nous plantons des cultures de couverture afin de retenir le sol et nourrir les organismes qui l'habitent. C'est une pratique que nous encourageons dans toutes les régions qui s'y prêtent.
    Il reste manifestement beaucoup à faire pour étendre les surfaces cultivées sans labourage. C'est une pratique qui, dans une situation de changement climatique, comporte bien des avantages. En effet, l'ensemencement exige alors moins de carburant. Le carbone reste capté dans la terre au lieu de partir dans les airs. Il n'y a que des avantages.
    Cela présente en outre l'occasion d'améliorer nos connaissances quant aux conséquences et aux coûts de la dégradation des sols. Nous ne savons en effet pas très bien ce que la dégradation des sols nous coûte ici au Canada. D'après les calculs effectués par David Lobb, de l'Université du Manitoba, la dégradation des sols coûterait chaque année environ 3 milliards de dollars à l'économie canadienne. Il est donc clair qu'il reste beaucoup à faire pour maintenir la santé de nos sols.
    Les besoins en matière de recherches sont en constante évolution. Il nous faut en outre multiplier les efforts afin de combler l'écart entre les chercheurs et les producteurs appelés à mettre en oeuvre les résultats de ces recherches. Agriculture Canada assure bien moins qu'avant la diffusion des nouvelles connaissances. De formidables recherches sont actuellement menées dans les centres de recherche installés un peu partout au Canada, mais les agriculteurs n'en ont pas assez rapidement connaissance. J'habite moi-même à une heure et demie du centre d'Ottawa, mais j'entends très peu parler de ce qui s'y fait. Nous allons devoir améliorer les communications entre les chercheurs et les agriculteurs.
(1645)
    Il nous faut diffuser les nouvelles connaissances auprès des producteurs, et organiser à leur intention des démonstrations sur place. Les agriculteurs adopteront les nouvelles techniques si on leur en démontre l'utilité, surtout si on peut les mettre en contact avec des agriculteurs qui en ont eux-mêmes fait l'expérience. Il est essentiel de transmettre ces connaissances à des fermiers qui serviront alors de référence, car c'est le meilleur moyen de persuader les autres.
    Nous constatons hélas que des connaissances qui seraient pourtant très utiles restent dans des dossiers sans jamais être communiquées à ceux à qui elles pourraient servir. Les producteurs veulent adopter de bonnes pratiques, mais le changement n'intervient que lentement, et la plupart des agriculteurs ne savent pas le mal que les pratiques habituelles et le labourage traditionnel font aux sols.
    Je voudrais maintenant vous présenter quelques recommandations très simples.
    La première serait de faire de la santé des sols un des principaux volets du Partenariat canadien pour l'agriculture. Le nouveau Cultivons l'avenir 3, je ne sais pas très bien si c'est effectivement le nom qui lui sera donné, est prévu pour avril 2018. Ce serait l'occasion d'assurer que, dans le cadre de ce vaste effort de consultation, la santé et la conservation des sols occupent pleinement la place qui leur revient.
    La seconde recommandation serait de collaborer avec l'ensemble des acteurs du secteur afin de développer une stratégie nationale à long terme de conservation des sols et d'amélioration de la santé du terroir. L'Ontario a récemment lancé sa stratégie de conservation des sols et nous devrions encourager le gouvernement fédéral à agir dans le même sens.
    La troisième recommandation serait de financer une étude nationale sur les conséquences et les coûts de la dégradation des sols au Canada, en mettant l'accent sur les incidences que cela peut avoir sur les émissions de gaz à effet de serre. Il s'agirait en outre, d'approfondir nos connaissances et de diffuser plus largement ce que l'on apprendra en organisant des démonstrations et en faisant connaître plus largement les dernières pratiques de gestion exemplaires. Agriculture Canada et d'autres établissements de recherche améliorent continuellement les pratiques de gestion, et les producteurs devraient en être tenus au courant. Il faut donc augmenter les crédits affectés aux efforts de pédagogie afin que ces nouvelles connaissances puissent être communiquées aux producteurs.
    Je voudrais vous quitter en citant Mme Maya Angelou, une poétesse américaine. Traduit en français, cela donne « Faites de votre mieux, au mieux de vos connaissances, mais quand vous en saurez plus, faites mieux encore. » Ces mots s'appliquent particulièrement à l'agriculture. Les fermiers font tout ce qu'ils peuvent pour agir dans le bon sens. Si on leur démontre l'avantage de nouvelles méthodes, ils les adopteront.
    Je vous remercie.
(1650)
    Merci.
    Vous nous excuserez, mais nous ne pouvons distribuer que des documents rédigés dans les deux langues. Nous allons donc le faire traduire avant de le remettre aux membres du Comité.
    Nous avions également prévu que M. Tim Nerbas, de Saskatoon — sur proposition, je pense, de M. Longfield...
    C'est nous, monsieur le président, qui avions prévu son intervention.
    Il devait participer à cette séance par vidéoconférence, mais il y a eu, à Saskatoon, des problèmes techniques.
    Bon, je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer la parole aux représentants de USC Canada.
    Vous avez 10 minutes, que vous pouvez vous répartir comme bon vous semble.
    Je vous remercie infiniment.
    Chers membres du Comité, parlementaires, membres du personnel et invités, nous tenons à vous remercier de l'occasion qui nous est donnée de venir vous parler de la biodiversité en tant que stratégie clé de la résistance au climat et de pratique exemplaire de gestion visant la gérance de nos sols et de nos ressources hydriques. Je tiens tout particulièrement à en parler dans l'optique des travaux que nous réalisons à USC Canada.
    Je me félicite d'être ici avec Geneviève Grossenbacher, gestionnaire de programmes pour les politiques et les campagnes d'USC Canada, qui pratique elle-même l'agriculture écologique juste au nord d'Ottawa.
    USC Canada est un exemple de réussite à la canadienne. Sans doute avez-vous entendu parler de nous. USC Canada a été fondé par Lotta Hitschmanova du Comité du Service Unitaire du Canada en 1945. Nous avons inspiré des générations de Canadiens pour qu'ils contribuent aux problèmes d'intérêt mondial. Nos travaux sur la biodiversité de l'agriculture à l'étranger sont partiellement financés par Affaires mondiales Canada depuis le début des années 1990. Nos travaux avec les agriculteurs canadiens sont nettement plus récents. Ils ont été entrepris en 2011 et sont financés par la Fondation W. Gardield Weston et par les dons de citoyens canadiens.
    La raison primordiale de notre présence ici est de demander au gouvernement du Canada de financer des programmes qui préservent et améliorent la biodiversité agricole à la ferme. Cette biodiversité est notre ressource la plus précieuse, et constitue la meilleure police d'assurance pour gérer l'incertitude et les risques que présentent les changements climatiques.
    Je suis comptable de formation. Dans les domaines des finances et des investissements, on nous conseille toujours de maintenir des portefeuilles diversifiés. Les portefeuilles diversifiés réduisent les risques, et ils finissent par aboutir à la réussite durable la plus uniforme. Le même principe vaut pour l'agriculture. La biodiversité assure tout simplement la résistance.
    Telle est en fait la nature de la génétique. Les semences sont de minuscules paquets de possibilités. Elles contiennent certains traits qui sont visibles, alors que d'autres, comme la capacité à survivre à la sécheresse ou la résistance face aux ravageurs ou aux maladies, n'émergent que quand une plante est victime de stress. Plus il y a de biodiversité dans notre approvisionnement en graines, plus il y a de chances que nos cultures possèdent les traits dont elles ont besoin pour un vaste éventail de conditions. Mais la biodiversité n'est pas un phénomène statique. La sélection des meilleures semences, leur sauvegarde et leur replantation l'année suivante assurent l'évolution et l'adaptation de ces cultures au fur et à mesure que les conditions changent dans leur environnement. Plus les semenciers ont accès à la diversité, plus leurs semences auront des traits diversifiés, et mieux la chaîne alimentaire du Canada pourra s'adapter aux stress climatiques.
    Un vaste éventail de phytogénétique garantit que les cultures produisent de bonnes récoltes, même dans des conditions ardues, mais la biodiversité en soi ne suffit pas. Si nous réfléchissons à nos méthodes agricoles, nous devons faire attention à la santé de l'écologie des sols et des systèmes hydriques qui sont littéralement les racines de l'agriculture.
    De plus en plus de données probantes démontrent que l'intégration des pratiques de la biodiversité dans les systèmes agricoles écologiques procure des bienfaits significatifs pour la santé de l'eau et des sols. Le rapport de l'IAASTD — si vous ignorez le sens de ce sigle, vous pourrez demander à Gen de vous l'expliquer plus tard — de 2008 a été l'un des premiers grands examens de la documentation scientifique à en arriver à cette conclusion. Plus récemment, le Groupe d'experts international sur les systèmes alimentaires durables, IPES-Food, a publié un rapport intitulé De l'uniformité à la diversité, qui mentionne de nombreuses études qui militent en faveur des exploitations de toutes les échelles pour qu'elles emploient des techniques écologiques biodiversifiées. Parmi les avantages d'une telle démarche, mentionnons: un fort potentiel de piégeage du carbone; une diversité et une quantité accrues d'organismes microbiotiques utiles dans le sol; l'amélioration de l'absorption et de la rétention de l'eau; la réduction des ruissellements et de la contamination des eaux de surface et des eaux souterraines; et la diversité accrue des espèces de végétaux, d'insectes et d'oiseaux dans les écosystèmes environnants.
    Les auteurs du rapport d'IPES-Food décrivent une chaîne de réaction positive vertueuse créée dans l'agriculture écologique biodiversifiée et qui aboutit à l'amélioration constante de la fertilité des sols, de la productivité et de la santé des écosystèmes, tout en offrant des avantages accessoires aux collectivités en aval. Ces améliorations et ces avantages contribuent tous à appuyer la résistance adaptative de l'industrie alimentaire, des agriculteurs et des communautés rurales tandis que nous entrons dans cette nouvelle ère de changements climatiques.
(1655)
    Nous vivons un moment exceptionnel. Hier, la conférence des parties 23 s'est ouverte, en nous rappelant les engagements climatiques importants que le Canada a pris dans le cadre de l'Accord de Paris sur le climat. Le lancement du nouveau partenariat agricole canadien et l'établissement d'une politique alimentaire pour le Canada offrent l'occasion au Canada de lancer des programmes qui promeuvent l'innovation agricole afin de lutter contre les changements climatiques. Nous devons en profiter pour appuyer la biodiversité à la ferme.
    Le programme canadien d'USC Canada, l'Initiative de la famille Bauta sur la sécurité des semences au Canada, est un modèle de la façon dont les agriculteurs canadiens peuvent collaborer pour s'adapter aux incidences des changements climatiques. Grâce à la sélection végétale participative, les agriculteurs conçoivent de nouvelles variétés de semences qui sont adaptées aux conditions locales et qui se comportent fort bien dans des conditions de faible rendement. Cette façon peu coûteuse d'aborder l'innovation génétique est susceptible d'avoir de profondes répercussions. Par exemple, en partenariat avec l'Université du Manitoba au cours des cinq dernières années, les agriculteurs inscrits à ce programme ont mis au point des variétés de blé sélectionnées pour leur hétérogénéité et leur rendement dans des conditions de faible rendement qui, lorsqu'on les teste par rapport à des variétés classiques, font preuve d'une plus grande vigueur précoce, d'une meilleure résistance aux maladies, et d'une plus grande concentration de micronutriments, tout en ayant des rendements concurrentiels les années de sécheresse et d'inondation.
    Pour tirer parti des avantages de l'agriculture biodiversifiée, les recherches et les investissements ne peuvent pas porter uniquement sur les traits uniques de variétés limitées de quelques cultures seulement. L'innovation et l'adaptation doivent survenir dans l'ensemble des cultures utilisées en agriculture. La sélection génétique participative, qui remet le leadership de la diversification des cultures entre les mains des agriculteurs, garantit que l'étendue des travaux de sélection englobe un bien plus grand nombre de variétés et permet aux innovations de s'adapter au contexte local particulier. Les 184 agriculteurs qui participent au programme de sélection végétale participative ont adapté plus de 400 variétés différentes aux conditions de croissance locales, depuis l'île de Vancouver jusqu'à Cap-Breton et Terre-Neuve, sans oublier l'extrême-nord de l'Alberta. Le processus est réplicable et évolutif, et il ne demande pas de ressources financières considérables. Il peut néanmoins avoir de profondes conséquences en maintenant la diversité en vie et en l'adaptant à de nouvelles conditions, en plus de créer une nouvelle diversité grâce à des partenariats novateurs entre agriculteurs et chercheurs.
    USC Canada collabore avec les agriculteurs dans des environnements particuliers du monde entier depuis plus de 30 ans. Nous savons que bon nombre des difficultés des pratiques agricoles, comme l'érosion et la dégradation des sols, les niveaux élevés de consommation d'eau, la contamination, la baisse d'efficacité des intrants, et même la vulnérabilité financière, tous ces éléments peuvent être atténués sous réserve que l'on adhère à la biodiversité et que l'on appuie les pratiques écologiques. À cette fin, le gouvernement du Canada doit appuyer les programmes qui préservent et renforcent la biodiversité agricole à la ferme et, surtout, investir dans des systèmes d'acquisition et de transmission du savoir, comme la sélection végétale participative, pour poursuivre l'expansion des pratiques exemplaires agricoles et pour concevoir de nouvelles variétés de cultures résistantes au climat.
    Cela fait de nombreuses années qu'USC Canada innove sur le terrain avec les agriculteurs et les chercheurs. Notre expérience confirme les constatations d'experts selon lesquelles la biodiversité et les pratiques écologiques sont indispensables à l'alimentation des communautés d'aujourd'hui, et à la protection des sols et des ressources hydriques dont nous avons besoin pour nourrir les générations futures. Nous formons l'espoir que vos constatations contribueront à créer un environnement politique qui appuie nos travaux et ceux d'autres experts dans notre secteur, afin de faire du Canada un chef de file mondial des recherches à la ferme sur la sécurité alimentaire et l'adaptation aux changements climatiques.
    Je vous remercie infiniment.
(1700)
    Merci, monsieur Settle.
    Nous allons maintenant passer aux questions, pendant six minutes.

[Français]

     M. Berthold va partager son temps de parole avec Mme Boucher.
    Effectivement, monsieur le président. Je vous remercie.
     Monsieur Kruszel, ma question s'adresse à vous. J'ai beaucoup aimé votre exposé.
    Selon le Conseil canadien de conservation des sols, en ce moment, l'activité humaine cause beaucoup plus de dommages aux sols que les changements climatiques.
    Est-ce que l'activité humaine cause des problèmes? Oui. Est-ce qu'il y a des solutions? Certainement.
    Les principaux dommages aux sols sont-ils causés par les humains qui cultivent le sol ou viennent-il des changements climatiques auxquels on fait face? Les effets des changements climatiques sur les sols sont l'une des questions que nous traitons ici. De votre côté, vous avez beaucoup parlé des effets de l'activité humaine sur les sols.
    Oui.
    Beaucoup de fermiers utilisent encore des méthodes traditionnelles de labour des sols. Pourquoi continuent-ils à les utiliser? C'est une bonne question. C'est probablement parce qu'ils ont des besoins de production qui ne pourraient pas être comblés autrement.
    En tant que président du Conseil canadien de conservation des sols, considérez-vous que c'est l'activité humaine qui a le plus d'effets négatifs sur les sols, et non les changements climatiques?
     C'est l'activité humaine. La destruction de la matière organique dans nos sols, c'est le plus important. Si nous sommes capables de récupérer la matière organique et d'enrichir nos sols avec le carbone contenu dans l'air, cela atténuera les effets des changements climatiques.
    Avez-vous fait des études sur les changements climatiques?
    Non, pas encore.
    Ce n'est pas encore une priorité pour le Conseil canadien de conservation des sols.
    Effectivement. Nous essayons de promouvoir le semis direct pour mieux faire face aux changements climatiques. Si nous pouvons mettre plus de matières organiques, les rendements seront plus stables. S'il y a trop d'eau, l'eau pourra s'écouler plus vite. Nous pourrons avoir des rendements même en cas de sécheresse. Il faut vraiment promouvoir la santé des sols pour nous aider à faire face aux changements climatiques.
    Votre organisation n'a donc fait aucune étude.
    C'est cela.
    Je vais revenir à vous, madame Lee.
    Vous avez parlé de la taxe sur le carbone. Vous demandez une exemption pour l'utilisation du gaz naturel et du gaz propane. Particulièrement dans votre industrie, toute augmentation des coûts ou toute forme de taxe peut avoir des conséquences vraiment désastreuses.
    En effet.
    Je vais demander à mon collègue de vous répondre au sujet de l'utilisation du gaz naturel et du gaz propane.

[Traduction]

    Il est important de reconnaître que la serriculture est un volet important de l'agriculture. Pour produire les cultures sous serre que nous cultivons, nous devons brûler des combustibles fossiles. Nous ne pouvons pas nous en passer dans ce type de production alimentaire.
    Nous sommes également sérieusement compromis dans notre compétitivité en raison des coûts supplémentaires de la tarification du carbone — plafonnement et échange ou taxe sur le carbone — qui est un problème non négligeable. Nous ne demandons pas à être exonérés de la taxe sur le carbone. Nous sollicitons seulement une exonération sur le carburant que nous consommons pour cultiver nos récoltes. À l'instar du carburant diesel qui est exonéré pour la production agricole en plein air, dans le domaine de la serriculture, nous aimerions être exonérés des coûts de la tarification du carbone sur le gaz naturel, le propane ou le mazout.

[Français]

    Une telle exemption inciterait les propriétaires de serres à utiliser du gaz propane et du gaz naturel plutôt que du diésel.
(1705)

[Traduction]

    Cela serait indéniablement le cas si l'on était en mesure d'utiliser le gaz naturel pour faire fonctionner d'autres équipements. Une partie de cela a uniquement pour but de reconnaître les travaux que nous avons déjà réalisés. Cela englobe l'installation de chaudières à haute efficacité, de chaudières à condensation et de toiles thermiques dans les serres pour retenir la chaleur que nous y mettons. Nous nous livrons également à des vérifications énergétiques et à ce même genre de chose.
    L'énergie est l'un des coûts les plus importants pour les serriculteurs. Nous cherchons des moyens d'économiser sur ce coût. Le coût du carburant est précisément l'incitatif pour y arriver.

[Français]

    Je vais laisser ma collègue Mme Boucher poser la dernière question.
    Je vous remercie tous. C'est très intéressant.
     J'aurais plusieurs questions à poser, mais je vais m'adresser au Conseil canadien de l'horticulture.
    Pouvez-vous m'expliquer pourquoi l'harmonisation des politiques de tarification du carbone du Canada avec celles des autres pays est si importante pour la vitalité du secteur agricole au Canada?

[Traduction]

    Pour autant que je sache, aucun des pays qui sont nos rivaux n'a quoi que ce soit qui ressemble à la tarification du carbone. Les pays qui sont nos concurrents, comme les États-Unis d'Amérique, le Mexique et les pays d'Amérique du Sud, n'ont rien qui ressemble à la tarification du carbone.
    Merci, monsieur VanderHout.
    Merci, madame Boucher.
    Monsieur Longfield, vous avez six minutes.
    Merci.
    J'aimerais poursuivre sur cette voie un peu plus loin pour ce qui est de la tarification du carbone et me pencher sur la nouvelle norme de propreté des carburants et l'occasion d'utiliser des biocarburants, de l'éthanol dans le diesel et le gaz, du gaz naturel renouvelable et d'autres options énergétiques. Je me demande si quelqu'un peut formuler des commentaires à ce sujet, très brièvement.
    Les biocarburants: une fois...
    Pourriez-vous répéter votre question. Vous avez des biocarburants et...
    Je voulais me pencher sur l'utilisation des biocarburants, la nouvelle norme de propreté des carburants que le Canada élabore en ce moment afin de réduire notre empreinte carbone.
    Je vais changer l'ordre, en raison du temps.
    À propos de la gestion du carbone, un élément que j'ai constaté à la conférence de Guelph concerne les observations formulées au sujet de la tarification du carbone pour gérer le carbone et le cycle du carbone.
    Monsieur Kruszel, à cette conférence, il y avait un représentant des États-Unis et d'autres représentants de l'ensemble du Canada. Ces derniers ont parlé de l'importance de la tarification du carbone pour ce qui est de gérer le cycle du carbone. Avez-vous des commentaires à ce sujet?
    Incontestablement, la tarification du carbone favorise les changements dans le paysage agricole, en particulier, si vous pouvez adopter une sorte de système de crédits compensatoires ou un dispositif où les agriculteurs reçoivent un paiement pour piéger le carbone.
    Très bien.
    Notre seule inquiétude est que, dès que cela se produit, qu'est-ce qui les incite à le maintenir là?
    C'est très juste.
    Nous avons constaté qu'à l'occasion, avec d'autres systèmes, pas forcément le carbone, quelqu'un touche un paiement pour avoir fait quelque chose, c'est extraordinaire, et cela dure pendant deux ans, mais dès que le paiement disparaît, on en revient à la situation qui prévalait au préalable.
    L'habitude se perd.
    Il doit bien y avoir un moyen de maintenir cela, soit par un paiement ou quelque chose d'autre, pour nous assurer que le changement reste en place, et que le carbone est sécurisé.
    Sur le plan de la durabilité du programme, il faut avoir un cycle pour le cycle du carbone également afin d'en assurer la pérennité.
    C'est très juste.
    Madame Grossenbacher, nous avons discuté avant la séance du rôle des femmes. Votre organisation a vraiment fait oeuvre de pionnier en habilitant les femmes dans les pays en développement, et nous avons également parlé des conséquences que cela a eues non seulement sur l'agriculture, mais également sur la façon d'aborder la durabilité.
    Pourriez-vous nous parler du rôle des femmes dans le cadre de ce débat?
    C'est une excellente question, et je suis fort heureuse que vous l'ayez soulevée.
    Nous travaillons avec les femmes du secteur de l'agriculture dans le monde entier et au Canada. De fait, nous avons constaté que les femmes contribuent de manière incroyable à la sauvegarde de la biodiversité. Elles jouent un rôle tout à fait inestimable en agriculture. Elles constituent la majeure partie des effectifs agricoles à l'étranger. Au Canada, nous avons parfois tendance à l'oublier, mais dans la réalité... Je suis très engagée envers un grand nombre de nouveaux agriculteurs. Dans ce segment de la population, les nouveaux agriculteurs qui débutent — et qui pratiquent les formes plus durables de l'agriculture, sont avant tout des femmes.
    Les femmes jouent un rôle considérable dans notre alimentation et elles continueront de nous alimenter à l'avenir, j'en suis convaincue. Pour en revenir un peu à la diversité au Canada, elles ont joué un rôle clé dans la préservation des anciennes variétés et l'amélioration des variétés qui poussent bien dans leur communauté.
    Martin, peut-être voudriez-vous développer ce sujet. Les femmes jouent un rôle absolument essentiel, et aujourd'hui, malheureusement, les programmes ne sont pas toujours conçus pour reconnaître leurs précieuses contributions.
(1710)
    Et tandis que vous dites cela, je pense aux femmes autochtones, aux femmes des Premières Nations et au rôle qu'elles jouent dans la protection de l'eau et dans la promotion de la protection de l'eau. USC Canada pénètre-t-il également dans les communautés autochtones? Cela peut-il faire partie de notre étude?
    Nous faisons preuve d'une grande circonspection dans notre façon d'aborder les communautés autochtones. Nous ne sommes pas à proprement parler une organisation autochtone et pour être sûr que nous jouons un rôle approprié dans la réconciliation, nous voulons tout faire pour nous assurer que le leadership dans les communautés autochtones vient des Autochtones proprement dits. Cela étant, il y a un grand nombre de personnes dans la population autochtone qui sont dirigeants de leurs communautés en ce qui concerne l'agriculture durable, la reconquête de certaines traditions qui se sont perdues au fil des ans, et même le rétablissement de certaines des cultures traditionnelles historiques qui y poussent.
    Nous militons indéniablement pour continuer à explorer et à resserrer notre relation avec les agriculteurs autochtones, tout en admettant que nous ne serons jamais les dirigeants. Nous espérons aussi que le gouvernement peut être un chef de file dans le processus de réconciliation.
    Nous nous concentrons vraiment sur l'approche de nation à nation en tant que gouvernement.
    Je m'adresse à nouveau à M. Kruszel.
    À propos de la biodiversité de la couverture végétale et de la tentative de gérer la couche supérieure de carbone, d'accroître le carbone ou de remettre dans le sol le carbone que nous avons perdu au cours des années, pourriez-vous nous parler de la diversité de la couverture végétale comme élément important de notre stratégie d'avenir?
    Incontestablement. La diversité de la couverture végétale revêt manifestement une grande importance. Nous promouvons avec force la rotation des cultures. En Ontario, dont je suis originaire, la rotation des cultures n'a rien d'un phénomène anormal. Nous cultivons beaucoup de maïs, de soja, de maïs, de soja. Il ne s'agit pas de rotation des cultures. Nous aimerions nettement plus constater la rotation de trois ou quatre cultures. Dans mon exploitation agricole, nous avons une rotation de trois cultures et nous plantons ensuite des semences qui ne font normalement pas partie de la rotation. Nous avons dans notre système de cultures multi-espèces, du sarrasin, des pois, toutes sortes de cultures que nous ne plantons normalement pas comme culture principale, mais qui sont uniquement là pour fournir une certaine biomasse qui peut retourner dans le sol.
    Merci, monsieur Longfield.
    Merci, monsieur Kruszel.

[Français]

     Madame Brosseau, vous avez six minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leurs exposés et des échanges que nous avons eus jusqu'ici.
    À mon avis, ce qui revêt vraiment de l'importance, c'est la recherche et l'innovation. Nous savons qu'en 2016, le ministère canadien de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a investi 649,5 millions de dollars dans les recherches agricoles, ce qui est excellent, mais on peut déplorer qu'à peine 1,6 million de dollars soient allés à l'agriculture biologique, qui représente 0,25 % du budget de R-D.
    Or, nous savons que nos partenaires commerciaux investissent beaucoup dans la recherche et l'innovation. Je me demandais s'il serait possible d'obtenir certaines remarques sur le besoin d'investir dans la recherche et l'innovation.
    À nouveau, cette question me passionne, et je vous en remercie.
    À vrai dire, il y a un tel déséquilibre dans la recherche et le développement qu'il faut absolument y remédier, car une bonne partie des merveilleuses innovations qui nous poussent à adopter des pratiques plus durables nous viennent de l'agriculture écologique, partiellement par le biais de l'agriculture biologique. Or, lorsque nous investissons à peine un quart de 1 % dans la R-D sur l'agriculture biologique, d'autant plus que nous savons que le secteur biologique au Canada connaît un taux de croissance incroyable... Il représente aujourd'hui à peine 2,7 % du marché, mais il augmente rapidement, et tout ce qui est issu des recherches sur l'agriculture biologique peut s'appliquer à tous les agriculteurs. De nombreuses pratiques exemplaires portant sur la diversité dans la rotation des cultures proviennent de l'agriculture biologique.
    À nouveau, pour en revenir aux semences, le même déséquilibre existe dans ce secteur. Il n'y a pratiquement pas d'investissement dans la sélection végétale des semences. Toute l'attention est dirigée vers le génie génétique ou la biotechnologie végétale. Il faut que cela se fasse, même si le secteur de la sélection végétale biologique présente d'étonnantes possibilités. Nous avons obtenu d'excellents résultats au Canada qui prouvent que les semences mises au point pour avoir de bonnes performances sans intrants se comportent fort bien les années de sécheresse et les années d'inondation lorsqu'on les compare aux cultivars classiques. Cela est fort bien pour les agriculteurs biologiques, mais l'on pourrait également fournir ces semences aux agriculteurs classiques pour contribuer à réduire la quantité de pesticides ou d'engrais qu'ils utilisent, les engrais étant une importante source d'émissions de gaz à effet de serre en agriculture.
    Tout cela pour dire que je pense que nous devons investir au Canada. L'investissement le plus important dont je me souvienne au Canada est un investissement de 22 millions de dollars engagé l'an dernier dans les grains dans les Prairies. Nous aimerions voir un tel investissement, pas forcément de la même ampleur, dans l'agriculture biologique, la sélection des semences.
(1715)
    J'ai vu beaucoup de gens hocher la tête.
    J'ignore s'il est possible d'obtenir d'autres remarques sur le besoin d'investir dans la recherche et l'innovation.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous qu'il faut à tout prix investir constamment dans la recherche et l'innovation. Je souscris également à l'idée d'accorder plus d'importance à l'agriculteur biologique, car il existe là un recoupement colossal des possibilités qui s'offrent aux agriculteurs commerciaux d'appliquer ces technologies.
    Dans notre exploitation, nous faisons beaucoup de travaux sur les contrôles biologiques, comme les insectes utiles et les pesticides biologiques homologués pour la lutte contre les champignons, sans que cela ait la moindre conséquence sur notre population d'insectes utiles. Davantage de recherches dans ce secteur nous aideront à assurer un avenir plus durable.
    Avez-vous d'autres commentaires, monsieur Alan Kruszel?
    Sans aucun doute. Tout ce qui contribue à accroître le financement de la recherche et de l'innovation en agriculture est, à notre avis, un indéniable atout. Il y a des tonnes de possibilités. Ce que nous constatons malheureusement, comme je l'ai mentionné dans mon exposé, c'est qu'un important volume de recherches sont réalisées sans jamais atteindre la population agricole. C'est un problème majeur. Si nous consacrons 650 millions de dollars, ce serait formidable que tout cet argent atteigne la population agricole pour que tout le monde sache qu'il est là.
    Il y a autre chose que nous aimerions voir. Bien entendu, la recherche et l'innovation sont excellentes, mais avec beaucoup de nos programmes, comme l'ancien programme Cultivons l'avenir, les innovateurs à la ferme prennent sans cesse des risques, sans qu'aucun programme les dédommage de ces risques.
    Les programmes sont intrinsèquement conçus pour prendre les idées des innovateurs et contribuer à en faire profiter le reste de la population agricole grâce à des incitatifs. Les tout premiers innovateurs n'obtiennent pas le moindre incitatif à faire toutes ces choses, et c'est une situation qu'il faut à tout prix modifier. Ils prennent des risques colossaux en tentant de nouvelles choses de leur propre chef. Il pourrait falloir engager des milliers, voire des millions de dollars d'investissements pour essayer quelque chose qui peut ne pas donner de résultats. Il devrait vraiment y avoir une sorte d'aide financière pour les aider à atténuer leurs risques.
    Juste pour esquisser un portrait, les États-Unis ont récemment annoncé un investissement de 56 millions de dollars dans la recherche et l'innovation pour l'agriculture biologique. J'ose espérer que les oreilles du gouvernement sont grandes ouvertes et qu'il écoute, car nous allons avoir ce nouveau cadre bientôt à nos portes.
    Voilà une autre question que j'aimerais poser, si nous pouvons en revenir à USC. Il s'agit de la façon dont le modèle de sélection végétale participative fonctionne et de l'importance qu'il y a à y faire participer les agriculteurs. Le gouvernement a-t-il actuellement des programmes qui mettent l'accent sur la fertilité des sols, sur la propreté... et sur le renforcement de la biodiversité?
    À nouveau, voilà deux excellentes questions.
    À propos des 56 millions de dollars, je tiens à ajouter quelque chose. Dans le premier exposé, celui de M. Drouin, je pense qu'il a déclaré que nous devions uniformiser les règles du jeu. Je pense que la même chose vaut pour ce type de chose. Les États-Unis et l'Europe investissent fortement dans l'agriculture biologique, et le Canada, à mon avis, peut lui aussi montrer l'exemple.
    Pour ce qui est de la sélection végétale, c'est la même chose qui se passe. Le Royaume-Uni et l'Union européenne ont tous deux conçu des programmes qui sont fondés sur les programmes du Canada. Dans le cas de l'UE, elle a investi dans deux programmes — l'un d'une valeur de 3,5 millions de dollars et l'autre, d'une valeur de 7 millions de dollars — consacrés à la sélection végétale biologique participative. Ne serait-il pas extraordinaire d'avoir quelque chose de semblable au Canada?
    Pour en revenir à ce que vous disiez tout juste sur la transmission du savoir, nous partageons entièrement votre idée selon laquelle les agriculteurs doivent s'investir dans la transmission du savoir. Nous avons besoin d'agents de vulgarisation, mais également de recherches qui tiennent compte des agriculteurs. C'est là que l'élément participatif revêt une telle importance.
    La sélection végétale participative gravite autour des agriculteurs. Les agriculteurs sont au milieu, au coeur des travaux. Ils contribuent à établir les objectifs du programme. Ils contribuent à décider de ce qui donne des résultats concluants, de ce qui n'en donne pas et des critères qu'ils veulent voir instaurés, pour qu'en définitive, ils disposent d'un produit qu'ils veulent, qui fonctionne dans leur exploitation et qui s'adapte chaque année aux conditions locales de croissance. Il s'agit vraiment de quelque chose dans laquelle nous devrions investir. Avec tous les travaux que nous faisons au Canada, le pays a créé un modèle vraiment réussi dont d'autres pays cherchent à s'inspirer...
(1720)
    Merci, madame Grossenbacher. Nous avons légèrement dépassé le temps qui nous était imparti. J'en suis désolé.

[Français]

     Madame Nassif, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leurs présentations. Chaque témoin nous a vraiment aidés à mieux comprendre son domaine.
    Monsieur Kruszel, vous avez parlé de la recherche. Quel type de recherche suggérez-vous? Qui est le mieux placé pour faire ces recherches sur la conservation des sols?
    Si vous me le permettez, je vais répondre en anglais, car c'est un peu plus facile pour moi.

[Traduction]

    Mme Eva Nassif: D'accord, pas de problème.
    M. Alan Kruszel: À quel type de recherche pensons-nous? Certes, nous devons faire des recherches sur la santé des sols. Certaines recherches se font déjà à ce sujet, mais il pourrait y en avoir beaucoup plus.
    J'ai mentionné que nous aimerions beaucoup connaître les coûts et les conséquences de la dégradation des sols. Nous avons parlé de la perte de 3 milliards de dollars par an attribuable à la dégradation des sols. Or il s'agit seulement des coûts d'exploitation agricole. Je n'ai pas la moindre iodée de ce qu'il en coûte d'assainir le ruisseau de tout le sol qui s'y est déposé, ou de draguer à nouveau la voie maritime pour en extraire le sol qui s'y est déposé.
    Pour tous ces éléments, nous avons vraiment besoin de chiffres précis. Nous savons fort bien qu'il s'agira de dizaines de milliards de dollars. Or c'est un problème que nous devons régler. Si nous arrivons à injecter cet argent dans des programmes pour y remédier, nous pourrons essayer d'accroître l'agriculture sans labour et d'inciter les agriculteurs à penser davantage à préserver les sols, à mettre plus de carbone dans le sol et à améliorer la santé des sols.
    L'amélioration de la santé des sols contribue de manière extraordinaire à l'amélioration de la biodiversité, à la propreté de l'air et à la propreté de l'eau. On en revient toujours au sol. Si nous parvenons à injecter de l'argent dans la recherche sur la santé des sols, et à résoudre les coûts et les conséquences de la dégradation des sols, nous aurons accompli un travail remarquable.

[Français]

    Je m'adresserai maintenant à M. Settle.
    Pouvez-vous nous énoncer les effets négatifs des changements climatiques sur la qualité des sols au Canada? Est-ce possible d'y remédier, selon vous?

[Traduction]

    Je cède la parole à Gen, car elle possède beaucoup plus d'expérience pratique que moi, mais je pense qu'il ne faut pas perdre de vue...

[Français]

    Est-ce parce qu'elle est une femme?
    Des voix: Ha, ha!
    Mme Eva Nassif: C'est ce que vous avez dit tout à l'heure. Je ne le dis pas parce que je suis une femme, mais je suis féministe.
     Je vous écoute, madame Grossenbacher.
    Il y a plusieurs répercussions sur les changements climatiques. D'ailleurs, de bonnes études ont été publiées sur le sujet, dont « De l'uniformité à la diversité », du IPES-Food. J'en ai en main quelques copies, et je pourrai vous les laisser.
    Les changements climatiques ont assurément beaucoup de répercussions sur les biotes du sol et les micro-organismes dans le sol, d'où l'importance de protéger encore plus ces derniers. Il existe plusieurs façons de les protéger, mais nous pensons sincèrement que la meilleure pratique serait d'augmenter la diversité.
    Plus tôt, nous avons aussi parlé du carbone dans le sol. Il y a différents types de carbone. Quand on parle de travail du sol, on parle du carbone de surface, qui est important, mais ce qui est encore plus important, c'est le carbone sous la surface, c'est-à-dire celui que l'on retrouve plus creux. Comment aller y stocker le carbone? C'est en utilisant des plantes qui offrent de grands systèmes racinaires, des plantes perennial. En français, je crois que ce sont...
     Ce sont des plantes vivaces.
    Oui, c'est exact. Merci. Il s'agit d'utiliser des plantes vivaces. Il y a beaucoup de recherches intéressantes à ce sujet. Il est vraiment crucial qu'il y ait une diversité de plantes. En effet, les plantes fournissent chacune des sucres différents au sol et interagissent de façon différente, d'où l'importance de la biodiversité. Le changement climatique a un impact direct sur les biotes dans le sol et la perte de biodiversité. Bref, il est important d'investir dans la diversité.
    Ma question porte aussi sur le changement climatique. M. VanderHout pourrait peut-être y répondre.
    Une des priorités du nouveau Partenariat canadien pour l'agriculture consistera à aider l'industrie à améliorer la résilience et la productivité par la recherche et l'innovation. Il appuiera également en priorité la réduction des émissions de gaz à effet de serre ainsi que l'adaptation au changement climatique.
    Quel potentiel voyez-vous dans ces activités prioritaires pour ce qui est de renforcer la résilience dans le secteur de l'agriculture?

[Traduction]

    Je crois que vous parlez de la façon dont nous pouvons améliorer nos performances environnementales, notre empreinte carbone dans le secteur de la serriculture. Je pense qu'il existe des possibilités futures à cet égard. En tant que producteur, je suis d'avis que la meilleure façon d'améliorer les performances environnementales, en particulier l'empreinte carbone, consiste à contrôler le taux d'humidité. Beaucoup d'énergie est consacrée à la gestion de l'humidité. Malheureusement, cette technologie fait à peine son apparition. Lorsque nous parlons d'innovation au Canada, il pourrait s'agir d'un secteur où nous pourrions être des chefs de file à l'échelle internationale dans le contrôle du taux d'humidité, la réduction de l'humidité en particulier dans les serres.
(1725)

[Français]

    Monsieur Kruszel, quelles sont les principales préoccupations de votre secteur en ce qui concerne l'amélioration de la résilience et l'adaptation au changement climatique?
    Vous voulez savoir quelles sont mes priorités?
    Oui.
    Augmenter la santé de nos sols nous aiderait énormément à accroître leur résilience et leur productivité. Il s'agit de voir s'il est possible de promouvoir davantage le semis direct, une technique qui consiste à planter sans labourer et sans travailler le sol.
    Merci, monsieur Kruszel.
    Monsieur Poissant, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins. Il est toujours intéressant de parler d'agriculture. Pour ma part, j'ai été agriculteur pendant plus de 40 ans.
    Un producteur est un gardien de la terre, c'est certain, et le plus important pour lui est de transférer une entreprise économiquement viable, dont les sols sont de qualité. Beaucoup de technologies sont maintenant utilisées sur les fermes. En outre, on note une résistance accrue aux herbicides et aux pesticides.
    À l'heure actuelle, y a-t-il une méthode qui permet de déterminer si une dégradation des sols a eu lieu au cours des 20 dernières années?
    Vous voulez savoir s'il y a moyen de déterminer si nos sols se sont dégradés depuis 20 ans?
    Selon nous, il faudrait mesurer la matière organique dans le sol. On parle ici de stabilité structurale. Dans un sol, il y a de petits morceaux.
    Il faut voir s'ils se dissolvent immédiatement lorsqu'on les met dans l'eau ou s'ils restent intacts. S'ils demeurent intacts, cela indique une vraie stabilité, ce qui est très bien. Toutefois, si le sol a été beaucoup travaillé et manque de matière organique, les morceaux se dissolvent immédiatement dans l'eau et deviennent de la boue. Bref, oui, il est possible de mesurer cela.
     Par contre, peut-on évaluer aujourd'hui à quel point un sol a pu se dégrader au cours des 10 ou 20 dernières années?
     La plupart des producteurs prélèvent des échantillons de sol et font une analyse de la matière organique. Chez nous, j'ai constaté que la matière organique a augmenté de 1 % dans nos champs depuis que nous avons commencé à pratiquer le semis direct. C'est tout de même incroyable. Normalement, on souhaite qu'il y ait une augmentation de 0,1 % ou de 0,2 % en deux ou trois ans, mais j'ai observé chez nous une augmentation de 1 % en 10 ans.
    Je sais combien il peut être important d'effectuer une rotation des cultures, mais également une rotation du travail des sols. Vous êtes-vous déjà penché sur cette question?
     Notre conseil essaie vraiment de minimiser le labour et le travail du sol. Si on pouvait trouver un système de semis direct pour toutes les cultures, ce serait formidable, mais je n'en ai pas encore trouvé pour les pommes de terre. Le semis direct ne fonctionne pas pour les pommes de terre. Cela demeure difficile pour les légumes, par exemple pour les carottes.
    Il y a des façons d'enrichir le sol pour minimiser les dommages de tout ce travail du sol. On plante des plantes de couverture après la récolte de pommes de terre. Cela se fait déjà au Nouveau-Brunswick, à l'Île-du-Prince-Édouard et partout. On essaie de couvrir le sol avec quelque chose de vivant après la récolte. Cela nous aide à rebâtir nos sols.
    Pour rebâtir les sols, on peut faire des rotations de quatre à cinq cultures, comme on l'a dit tantôt. Ce serait l'idéal.
    Il y a de moins en moins de cheptels d'animaux qui, avec le fumier qu'ils produisent, aident à garder les sols en santé en y ajoutant de la matière organique.
    On entend de plus en plus parler des boues des villes. Qu'en pensez-vous?
(1730)
    Le Conseil n'est pas contre les boues des villes qui sont utilisées sur les terres. Selon les analyses des scientifiques, c'est bon pour la terre. Cela ajoute des nutriments ou de la matière organique aux terres.
    Bien sûr, il faut bien gérer ces boues. En Ontario, par exemple, il y a des règlements sur la quantité de tonnes, de litres ou de mètres cubes de boues qu'on peut déverser à proximité des zones de retrait, des cours d'eau et des puits, et ainsi de suite. Si c'est bien fait, on n'y voit pas de problème.
    En terminant, croyez-vous que le gouvernement devrait prendre des mesures pour inciter les agriculteurs à faire la rotation des cultures ou du travail des sols?
    Ce serait une très bonne idée, parce qu'il faut démontrer aux gens que c'est faisable.
    Chez nous, nous n'avons que trois ou quatre cultures, mais nous faisons des rotations. Nous plantons des plantes de couverture pour essayer de compenser cela. Je n'ai pas encore trouvé un marché pour du foin. Cela ne fonctionne pas. Je n'ai pas la machinerie nécessaire et je n'ai pas le goût d'investir dans cela. Je ne suis pas bon dans ce domaine. Cela pourrit dans le champ. Je vais donc m'en tenir à mes grandes cultures.
    Si on pouvait trouver une façon de promouvoir la plantation de plantes de couverture dans les grandes cultures, cela pourrait vraiment nous aider.
    Je vais faire un commentaire final et mettre mon grain de sel, si je puis dire.
    En tant que producteur agricole et producteur en serre bio, j'aimerais revenir sur ce que Mme Grossenbacher a dit au sujet de la recherche de variétés.
    Selon mon expérience, qui commence à être longue, il y a des variétés que de grosses compagnies qui se sont amalgamées ont retiré du marché. Ces variétés avaient quand même des caractéristiques particulières, surtout sur le plan du goût, et elles étaient adaptées aux conditions de mon exploitation. Or c'est rendu que, chaque année, il faut demander une exemption parce qu'il n'y a pas de variété bio qui serait acceptable.
    Je suis entièrement d'accord qu'il faut investir dans les variétés. Il ne faut pas les perdre au profit d'une grosse entreprise qui les contrôlera, qui les retirera du marché et qui les remplacera par les siennes.
    C'était mon commentaire final.
    Je remercie tout le monde.

[Traduction]

    Pour mes collègues, j'aimerais rapidement déposer une motion dont j'aimerais que nous discutions jeudi, si cela est possible.
    Bien sûr, déposez-la. Merci.
    La séance est levée.
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