:
Bonjour, madame la présidente, membres du Comité.
Merci de m'accorder l'honneur de m'adresser à vous ce matin et de vous faire part de mes observations concernant l'amélioration de la diversité des genres.
[Traduction]
Je suis associé du cabinet d'avocats Osler, Hoskin et Harcourt. Osler est un cabinet national spécialisé en droit des sociétés qui possède des bureaux à Calgary, Montréal, Toronto, Ottawa et Vancouver.
Nous sommes fiers du leadership dont nous avons fait preuve au chapitre de la diversité hommes-femmes à notre cabinet. Osler est en effet le premier grand cabinet en droit des sociétés du Canada à avoir nommé une femme comme associée. Et cette associée, Bertha Wilson, est devenue par la suite la première femme à avoir été nommée juge à la Cour suprême du Canada. De plus, il y a quelques années à peine, une autre femme associée de notre cabinet, Suzanne Côté, s'est jointe à la Cour suprême du Canada. Depuis près de 20 ans une femme occupe le poste de coassociée directrice de notre cabinet, et l'un de nos coprésidents est une femme.
Cela étant dit, nous devons en faire plus. Bien que 47 % de nos sociétaires soient des femmes, celles-ci ne comptent que pour 26 % de nos associés.
Je dirige le groupe de pratique en gouvernance d'entreprise d'Osler. À ce titre, je conseille notamment des administrateurs et des conseillers juridiques qui exercent en entreprise relativement aux fonctions et aux responsabilités des administrateurs, à l'interaction avec les parties prenantes ainsi qu'aux questions liées à la communication de l'information et à la gouvernance. Je m'intéresse depuis longtemps aux questions de gouvernance d'entreprise comme en témoigne mon engagement en tant que membre du comité sur la gouvernance de la Bourse de Toronto (également appelé le comité Dey), puis à titre de membre du Conseil sur la surveillance des risques et la gouvernance de l'Institut canadien des comptables agréés et, à l'heure actuelle, de membre de l'American College of Governance Counsel.
Je ne suis toutefois pas un spécialiste du domaine des arts. Je travaille surtout sur la gouvernance des sociétés cotées en bourse. Au cours des trois dernières années, j'ai dirigé l'examen annuel effectué par notre cabinet sur les pratiques de communication de l'information concernant la diversité par les sociétés canadiennes qui sont cotées en bourse. Des exemplaires de notre plus récent rapport ont été distribués aux membres du Comité plus tôt cette semaine.
Osler est fier de ce rapport qui constitue une référence dans le domaine. On y résume les progrès effectués pour hausser la représentation des femmes au sein des conseils de ces sociétés et dans les postes de haute direction. On y trouve aussi un sommaire des développements d'ordre juridique ou autre en matière de diversité qui touchent les sociétés cotées en bourse. De plus, il met en relief les pratiques exemplaires que ces sociétés ont adoptées pour accroître la diversité hommes-femmes.
Bien que notre travail porte essentiellement sur la diversité au sein des sociétés cotées en bourse, nous en avons tiré un certain nombre de leçons dont votre comité pourrait bénéficier. J'aimerais vous faire part aujourd'hui de cinq d'entre elles aujourd'hui.
Premièrement, il est essentiel de commencer par recueillir des données. Comme le dit l'adage: on ne peut gérer ce qu'on ne peut mesurer. Les chiffres sont un point de départ utile pour toute analyse. De plus, comme il est indiqué dans nos rapports, les résultats varient grandement d'une organisation à l'autre selon sa taille et son secteur d'activité. J'imagine qu'on observe des variations similaires entre les organisations du domaine des arts selon leur taille et leur emplacement géographique. Il importe de comprendre ces variations pour mieux évaluer le fardeau que représente l'adoption de différentes politiques pour les organisations selon leur situation.
L'une des façons de recueillir de l'information consiste à exiger que les organisations qui sollicitent du financement communiquent des données sur leur diversité et les mesures qu'elles prennent pour améliorer la représentation des femmes dans leurs rangs. Récemment, le conseil municipal de Toronto a demandé à son personnel de mettre sur pied un mécanisme permettant de recueillir de l'information sur la mixité au sein des conseils d'entités exerçant des activités dans cette ville. L'an dernier, le bureau responsable de l'inclusion des minorités et des femmes de la Securities Exchange Commission des États-Unis a publié un rapport sur l'évaluation de la diversité conçu pour aider les entités réglementées à faire des autoévaluations de leurs politiques et pratiques en la matière. Ce rapport leur sert de modèle quant à l'information qu'elles doivent soumettre à propos de leurs autoévaluations.
Deuxièmement, il est difficile d'établir une mesure d'évaluation appropriée de la représentation des femmes dans les postes de haute direction aux échelons inférieurs à celui du conseil d'administration. Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières exigent qu'une société et toutes ses filiales importantes publient le nombre de postes de la haute direction de leur organisation qui sont occupés par des femmes. Cependant, le nombre de membres de la haute direction varie considérablement d'une société ouverte à l'autre. Certaines en comptent une poignée seulement alors que d'autres en ont plus de 211, ce qui rend les comparaisons très difficiles. Il vaudrait peut-être mieux déterminer la proportion de femmes parmi les 10 employés les mieux rémunérés d’une organisation.
Troisièmement, il est important de fournir des outils concrets pour engager une discussion significative au sujet de la diversité au sein des conseils. Avec l'appui de l'Institut des administrateurs de sociétés, j'ai créé un modèle de politique sur la diversité au sein des conseils. Ce modèle gratuit, personnalisable et téléchargeable peut être utilisé par n'importe quelle organisation pour générer rapidement une telle politique. Le but était de susciter des discussions au sein des conseils au sujet de l'importance d'accroître la diversité hommes-femmes. Nous avons constaté l'an dernier une amélioration du taux d'adoption de politiques sur la diversité, 47 % des sociétés ayant indiqué qu'elles avaient adopté une telle politique écrite. Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières ont noté que les sociétés qui avaient adopté une politique écrite sur la diversité au sein de leur conseil étaient plus susceptibles de recruter des femmes pour des postes d'administrateur.
Quatrièmement, bien que les ouvrages universitaires prônant une plus grande diversité des genres soient utiles, il est important que les organismes qui financent des activités artistiques réclament haut et fort la diversité hommes-femmes. Dans notre deuxième rapport annuel, nous avons noté une absence d'amélioration des résultats d'une année à l'autre. Cependant, les investisseurs institutionnels ont commencé à la fin de 2016 et au début de 2017 à manifester publiquement un intérêt pour la diversité, ce qui a eu une incidence sur les sociétés et entraîné une diminution importante du nombre de conseils composés exclusivement d'hommes et une augmentation du pourcentage global de sièges occupés par des femmes. Les conseils dans le milieu des arts sont plus susceptibles de prendre des mesures positives pour améliorer la représentation des femmes au sein de leur organisation si leurs sources de financement font publiquement la promotion du changement.
Cinquièmement, il y a lieu de mieux faire connaître les pratiques exemplaires permettant de hausser la représentation des femmes au sein de la haute direction des organisations. Dans notre rapport, nous avons fait mention de pratiques exemplaires comme l'amélioration des critères de recrutement pour trouver des candidats potentiels; la mise en place de programmes de formation sur les pratiques exemplaires et l'identification des préjugés inconscients; le recours à des programmes de réseautage, tant à l'interne qu'à l'externe, pour fournir du soutien et partager des idées; l'établissement de comités sur la diversité et l'inclusion; la mise en place de pratiques en milieu de travail conçues pour maintenir en poste les femmes à fort potentiel; et le suivi continu des progrès réalisés par les femmes dans les rôles de leadership au sein de l'organisation.
Permettez-moi de formuler un dernier commentaire. L'amélioration de la diversité hommes-femmes dans les rôles de leadership est un objectif louable, mais il faut également améliorer d'autres aspects de la diversité. Par exemple, en octobre dernier, Statistique Canada a indiqué que les minorités visibles représentent 22,3 % de la population canadienne. Pourtant, selon des données publiées en 2016 par le Conseil canadien pour la diversité administrative, seulement 4,5 % des administrateurs des 500 sociétés les plus importantes selon le classement du Financial Post proviennent de minorités visibles. J'ose espérer que les leçons tirées des travaux sur la diversité hommes-femmes auront des applications plus larges.
Je vous remercie.
:
Merci de me donner l'occasion de vous faire part de mon point de vue sur ces questions. Je félicite le comité permanent d'avoir pris l'initiative d'étudier les enjeux liés à la parité hommes-femmes dans les organisations artistiques et culturelles.
Je vais vous parler un peu de mon parcours. Je dirige une firme de gestion des investissements à Toronto et je travaille bénévolement au sein de différents conseils d'administration d'organisations des secteurs des services sociaux et des arts depuis les années 1990. Je fais partie du conseil de la Soulpepper Theatre Company depuis 2011. J'ai été élue présidente en novembre dernier et j'occupe officiellement mes nouvelles fonctions depuis février.
J'ai pu joindre les rangs de ces différents conseils sans me heurter à aucun obstacle. Il faut toutefois dire que je suis présidente d'un organisme de bienfaisance dont les dons atteignent des sommes considérables en Ontario, surtout au bénéfice d'organisations du milieu artistique. Je fais donc partie des gens que ces organisations souhaitent mobiliser. D'autres ne profitent pas nécessairement de telles possibilités.
Je considère que les problèmes d'inclusion sont encore plus marqués au sein des grandes entreprises. Je pense que le secteur des arts et de la culture a une longueur d'avance en matière de diversité hommes-femmes. Pour les conseils du milieu des arts tout particulièrement, je ne crois pas que la diversité hommes-femmes soit le principal problème. C'est davantage un enjeu lié à la diversité de manière générale, surtout des points de vue économique et ethnique.
Les bénévoles sont presque par définition des gens privilégiés qui ont du temps et de l'argent à leur disposition. C'est donc vers eux que l'on se tourne en priorité lorsque de nouveaux membres doivent être nommés au sein d'un conseil d'administration. À mes yeux, la diversité des expériences et des points de vue devrait primer pour n'importe quel conseil d'administration, que ce soit dans le domaine des arts ou dans le monde des affaires. Bien que l'intégration de femmes à un conseil où les hommes sont plus nombreux puisse contribuer à une plus grande diversité, si toutes ces femmes proviennent du même milieu socioéconomique, le conseil ne bénéficiera pas pour autant d'une perspective plus large.
Je ne crois pas pour ma part aux quotas. Je pense qu'il s'agit de mesures paternalistes pouvant devenir des gestes purement symboliques, ce qui m'apparaît pire que l'absence de représentation. Ce n'est pas parce qu'on coche les cases d'un formulaire que l'on peut se targuer d'être davantage inclusif. Les quotas peuvent créer du ressentiment chez les hommes et semer le doute dans l'esprit des femmes qui peuvent penser avoir été nommées au sein du conseil uniquement en raison de leur sexe. Les questions incluses dans les demandes de financement peuvent permettre aux bailleurs de fonds du secteur des arts et de la culture d'indiquer l'importance qu'ils accordent à la diversité.
Je crois également qu'il faut encourager davantage les femmes à présenter leur candidature. La parité hommes-femmes et l'équité salariale au sein des entreprises contribueraient grandement à mettre les femmes sur le même pied que les hommes du point de vue financier. En outre, des mesures comme des services de garde d'enfants abordables pourraient réduire les contraintes de temps. Ces deux éléments sont essentiels, car les gens ont besoin de temps et d'argent pour se porter volontaires en vue de faire partie d'un conseil d'administration. Je suis persuadée que le Parti libéral a passé, à l'aube de la campagne de 2015, beaucoup de temps à encourager ces mêmes femmes qui font maintenant partie de son cabinet paritaire. Nous avons peut-être des enseignements à tirer de cette expérience.
J'ajouterais qu'il convient de prendre des mesures semblables pour assurer une plus grande diversité ethnique au sein des conseils d'administration de même que parmi la clientèle et les auditoires du milieu des arts. Un mentor peut grandement faciliter l'acclimatation des nouveaux membres à la culture d'une organisation et de son conseil d'administration.
Quant au leadership dans le domaine des arts, il semble bien qu'il commence à se manifester de lui-même. Tous les comités de recrutement sont à la recherche de candidates.
Chaque discipline artistique a ses particularités qui lui sont propres. Les organisations du secteur des arts de la scène ont toujours accueilli des femmes dans des rôles de leadership et à titre de bénévoles au sein de conseils de petite et de moyenne taille. À titre d'exemple, Soulpepper cherche actuellement à recruter un directeur général ou une directrice générale. Il y a cinq femmes parmi les 12 candidats figurant sur notre liste préliminaire.
Il y a toutefois un aspect qui est plus problématique pour ce qui est des postes de direction dans le milieu artistique, et plus particulièrement du rôle de directeur artistique. Je crois que ce problème découle de la structure même du secteur au Canada. Des milliers de petites organisations sont éparpillées un peu partout au pays alors qu'il y en a seulement une poignée de grande taille et très peu également de taille moyenne. Il devient donc difficile pour les gens d'acquérir l'expérience nécessaire pour passer d'une petite organisation à la gérance d'une autre de plus grande taille.
Il n'est pas rare que des gens doivent partir à l'étranger pour acquérir cette expérience. On apprend aussi que de nombreux conseils d'administration du secteur des arts doivent engager des non-Canadiens faute d'avoir pu trouver un Canadien possédant les compétences dont ils avaient besoin. Tous les comités de recrutement souhaitent voir des femmes figurer sur leur liste des candidats retenus en sélection finale, mais il y a peu de femmes qui possèdent l'expérience pertinente au Canada, car il n'y a pas tellement d'organisations pouvant leur permettre de l'acquérir.
Notre compagnie théâtrale n'a jamais eu de difficulté à recruter des femmes au sein de son conseil d'administration, mais nous aurions besoin d'une plus grande diversité ethnique et de points de vue plus jeunes. Il semble que les membres du conseil vieillissent tous au diapason.
De nombreux conseils d'administration du secteur des arts s'attendent à ce que ceux qui joignent leurs rangs deviennent également des donataires importants, ce qui peut constituer un obstacle. Les projections de Soulpepper quant aux sommes pouvant être recueillies de cette manière sont plutôt réduites, et nous sommes même prêts à renoncer à ces attentes dans le cas d'un candidat ne pouvant se permettre une donation lorsqu'il constituerait un excellent ajout à notre conseil.
Les femmes comptent actuellement pour 36 % des membres du conseil de notre compagnie théâtrale, mais elles occupent 57 % des postes de direction. Outre moi-même dans le rôle de présidente, il y a une des deux coprésidentes, la présidente du comité chargé de la gouvernance et des nominations et l'une des deux coprésidentes du comité des ressources humaines.
Le comité chargé de la gouvernance et des nominations a inscrit la diversité et l'inclusion parmi ses objectifs prioritaires et s'est engagé à atteindre la parité hommes-femmes sur le conseil d'ici 2020. Notre comité des ressources humaines travaille avec KPMG aux fins d'une évaluation de la diversité et de l'inclusion au sein de l'organisation. À l'heure actuelle, les femmes comptent pour 63 % du personnel de direction.
Il ne fait aucun doute que la tendance est favorable au sein de notre organisation. En 2017, Soulpepper a octroyé des contrats à 350 artistes dont 47 % étaient des femmes. Au cours des 10 dernières années, la proportion de femmes s'est située entre 45 % et 50 %. Si l'on considère toutefois les artistes féminines dans des rôles de leadership, notamment à titre de metteures en scène ou d'auteures, la proportion est plus faible. Il y a encore du travail à faire, mais nous sommes sur la bonne voie. En 2011, seulement 13 % de nos spectacles étaient mis en scène par une femme. Dans la programmation annoncée jusqu'à maintenant pour 2018, ce qui nous mène jusqu'en octobre prochain, 58 % des spectacles sont mis en scène par une femme, y compris les trois présentement à l'affiche. En 2011, seulement 25 % de nos artistes en résidence étaient des femmes, alors que cette proportion atteint 45 % en 2018.
C'est peut-être en nous tournant vers l'avenir que nous saurons mieux régler la question de la diversité hommes-femmes et de la diversité en général. Nous avons ainsi mis sur pied l'académie Soulpepper, un programme rémunéré de formation théâtrale en résidence. Ce programme contribue dans une large mesure au développement de la prochaine génération de leaders. Au cours des 10 dernières années, 53 artistes sont passés par cette académie pour accéder à d'intéressantes carrières dans des rôles d'influence. Les femmes comptaient pour 54 % de ces acteurs, producteurs, concepteurs, metteurs en scène et dramaturges. Pas moins de 75 % des membres de notre plus récente cohorte étaient des femmes.
Nous avons quelques suggestions à vous faire.
Il faut d'abord que nous poursuivions tous ensemble nos efforts pour sensibiliser les gens à l'importance que revêt le secteur des arts et de la culture. Il faut leur expliquer la contribution de ce secteur à notre économie, notamment via les nombreux emplois créés et les importantes retombées, de telle sorte que tous comprennent bien qu'il est primordial de continuer à l'appuyer.
Il serait également bon de pouvoir dispenser davantage de programmes de formation et d'éducation pour contourner les problèmes liés à la structure de l'industrie au pays.
Il serait en outre très utile de pouvoir offrir des bourses permettant à des gens d'aller étudier et acquérir de l'expérience à l'étranger, car les dirigeants du secteur des arts sont recrutés sur un marché planétaire où l'on tient compte de l'endroit où ils ont été formés.
Il serait aussi bénéfique de pouvoir compter sur un soutien financier suffisant pour des projets d'une plus grande diversité. Il arrive que certaines organisations du secteur des arts soient réticentes à prendre un risque financier à l'égard d'un projet ne correspondant pas vraiment à ce qu'elles mettent généralement à l'affiche, mais il demeure nécessaire de présenter des oeuvres en provenance de diverses communautés afin d'inciter leurs membres à se rapprocher de l'organisation et même à joindre les rangs de son conseil d'administration.
J'aurais seulement quelques réflexions en terminant.
Les exigences prévues dans le projet de loi pour les sociétés à but lucratif pourraient s'appliquer également aux organismes à but non lucratif de manière à assurer une certaine transparence quant à l'intégration des femmes et à la rémunération.
Enfin, il serait bon que la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif puisse être modifiée de façon à autoriser les conseils d'administration à verser des honoraires modestes à leurs membres, ce qui permettrait aux gens des groupes marginalisés d'y avoir plus facilement accès.
Je vous remercie.
Je m'appelle Scott Garvie et je suis président du conseil d'administration de la Canadian Media Producers Association (CMPA). Je suis accompagné aujourd'hui de Marguerite Pigott, notre vice-présidente, Initiatives stratégiques et communautaires.
La CMPA regroupe plus de 400 entreprises membres de tout le pays qui produisent et exportent des films, des émissions de télévision et du contenu interactif sur les médias numériques, le tout étant diffusé dans différentes régions du monde via une variété de plateformes. Parmi les exemples récents du travail de nos membres, notons The Breadwinner, un long métrage en nomination pour un Oscar, l'adaptation du roman Alias Grace de Margaret Atwood diffusée sur Netflix et CBC, et mes propres séries Murdoch Mysteries et Frankie Drake sur CBC.
Notre association exerce son leadership en intervenant activement auprès des autres membres de l'industrie pour veiller à ce que des mesures proactives soient prises en faveur de la parité hommes-femmes devant et derrière la caméra, s'assurer que le respect règne sur les lieux de travail et mener en temps utile d'autres importantes initiatives. Nous nous réjouissons de voir votre comité se pencher sur la question de la parité entre les sexes et de la diversité dans la direction des institutions culturelles canadiennes de même qu'au sein des conseils d'administration de ces institutions.
Avant de laisser Marguerite vous exposer quelques-unes de nos recommandations, j'aimerais vous parler brièvement des mesures prises par notre association, toujours à l'initiative de ses membres, pour composer avec ces enjeux au sein de notre conseil élu. Ces mesures s'articulent autour de trois grands piliers: la reconnaissance, l'action et les possibilités.
Premièrement, nous reconnaissons que la question de l'équilibre hommes-femmes peut être problématique au sein du conseil de notre propre organisation. Nous avons examiné la composition de notre conseil d'administration au fil des ans pour constater que les femmes comptaient en moyenne pour environ 32 % des membres dans la période de huit années précédant notre dernière élection. Comme nous voulions accroître ce pourcentage, nous avons modifié le processus d'élection des membres du conseil en y intégrant l'obligation de se donner pour objectif d'assurer dorénavant une plus grande diversité et un meilleur équilibre entre les sexes. Ce principe directeur pour notre gouvernance à venir a été approuvé unanimement par notre conseil.
Pour ce qui est deuxièmement des actions à mener, nous avons voulu nous montrer proactifs et initier le changement tout en nous engageant dans le processus à plus long terme d'examen de notre réglementation. En premier lieu, il fallait voir au renouvellement de notre conseil. Nous avons demandé à des membres de longue date de bien vouloir renoncer à se porter à nouveau candidats de telle sorte qu'un plus grand nombre de sièges deviennent disponibles. Ainsi, compte tenu du résultat des élections qui ont suivi, notre conseil compte maintenant environ 40 % de nouveaux membres par rapport aux 24 qui siégeaient au moment de la dernière élection. Nous avons en outre communiqué avec chacune de nos 400 entreprises membres pour solliciter leur participation à notre conseil d'administration et à nos comités. Comme nos règlements exigent une représentation régionale, nous avons aussi encouragé chaque région à viser une parité parfaite entre hommes et femmes pour les nominations en vue de la prochaine élection.
Nous avons eu un nombre sans précédent de candidates lors de la dernière élection, mais nous n'étions tout de même pas certains que cela soit suffisant pour susciter un changement significatif au chapitre de la diversité et de la parité. Nous avons pris une mesure supplémentaire en soumettant seulement 18 de nos 24 sièges au processus électoral, les autres devant faire l'objet d'une nomination. Il nous devient ainsi possible d'équilibrer au besoin la composition de notre conseil. Nous avons soumis cette proposition à l'ensemble de nos membres, et je suis fier de pouvoir vous dire qu'elle a été approuvée à l'unanimité. Cinq des 18 sièges soumis au processus électoral sont maintenant occupés par une femme. Si on ajoute les cinq femmes nommées aux sept sièges désignés à cette fin, notre conseil compte maintenant 10 femmes et 13 hommes, soit une proportion de 43 %.
Le troisième pilier est celui des possibilités. Nous avons essayé d'encourager les femmes à participer davantage aux activités des comités et à y être plus présentes dans les postes de direction. Notre association compte un total de 19 comités. Les nominations à la présidence et à la coprésidence de ces comités ont été faites dans un souci de parité hommes-femmes. En outre, chacun de ces nouveaux responsables a été chargé de voir à ce que la composition de son comité fasse en sorte que de nouvelles voix et de nouveaux points de vue puissent s'exprimer dans la structure de direction de la CMPA.
En acquérant ainsi de l'expertise et de l'expérience au sein de ces comités, les nouveaux membres peuvent devenir des candidats potentiels pour un poste au conseil d'administration. Grâce à leur participation au travail de ces comités et au leadership qu'ils y exercent, ces nouveaux venus verront tout naturellement leur statut se bonifier au sein de l'association. Il s'agit de leur offrir la formation et les possibilités nécessaires en vue d'accroître la parité et la diversité dans toute l'organisation pour que cela devienne, comme il se doit, la nouvelle norme.
J'ai une dernière observation avant de laisser la parole à Marguerite. Les arguments irréfutables ne manquent pas pour illustrer l'importance d'en arriver à la parité entre les sexes au sein des postes de direction de nos institutions culturelles. Il y a une de ces raisons qui me tient particulièrement à coeur. Il est primordial de bien montrer à nos jeunes ce qu'il deviendra possible de réaliser à l'avenir. Dans notre industrie, nous voulons que tous comprennent bien que la diversité et la parité sont des caractéristiques fondamentales, que les gens soient devant la caméra ou derrière, ou encore à la table du conseil pour orienter le développement du contenu créatif.
Nos jeunes voient cette égalité représentée quand ils regardent qui fait quoi dans l'espace culturel canadien. Voici un exemple que j'ai personnellement vécu la semaine dernière: ma fille de 12 ans a eu la chance de venir à Ottawa lors d'une sortie scolaire, puis elle est revenue à la maison absolument ravie d'avoir visité la Cour suprême du Canada. La première question qu'elle m'a posée était si j'avais rencontré l'ancienne juge en chef Beverley McLachlin puisqu'elle avait un très bon travail. Sa deuxième question visait à savoir comment elle pourrait faire ce travail quand elle serait grande.
:
Nous avons encore beaucoup de pain sur la planche pour atteindre la parité entre les sexes, mais nous avons réalisé de véritables progrès et avons une marche à suivre claire pour remplir cet objectif. Nous avons appris quelques éléments déterminants en cours de route.
Tout d'abord, il faut mobiliser l'ensemble des dirigeants. Pour relever des défis de longue date tels que la parité entre les sexes, les organisations doivent maintenir le cap avec crédibilité et détermination. Cela nécessite la participation concrète de toute la direction.
Deuxièmement, le recrutement est essentiel. Discuter directement avec les membres pour les inciter à se présenter, et énoncer clairement les objectifs en matière de parité hommes-femmes et de diversité sont des mesures fondamentales qu'il faut prendre en permanence.
Troisièmement, il faut perfectionner les talents. Il ne suffit pas de recruter. Il est essentiel de constituer un bassin de talents à partir duquel on pourra éventuellement recruter.
De plus, votre comité permanent a posé des questions qui vont au-delà de notre expérience unique. Par exemple, pourquoi ne demande-t-on pas aux femmes de se joindre aux conseils d’administration ou de remplir un rôle de haute direction artistique, et que pouvons-nous faire pour remédier à la situation?
Une étude réalisée en janvier 2017, qui a été commandée par la Canadian Media Producers Association, ou CMPA, et rédigée par Catherine Tait, désormais présidente de CBC/Radio-Canada, répond à ces questions. Dans « Femmes et leadership: Étude sur la parité de genre et la diversité dans l’industrie médiatique canadienne », les répondantes ont dressé la liste des obstacles à l'avancement qu'elles rencontrent, dans cet ordre décroissant: la disparité salariale, le manque de reconnaissance des réalisations, la difficulté à financer des projets à plus gros budget, les possibilités d'avancement limitées, et l'impossibilité à dépasser l'échelon de cadre intermédiaire. La liste est encore longue, mais c'étaient les principaux obstacles.
Lorsqu'on leur a demandé ce qui les avait aidées à surmonter ces obstacles, les répondantes ont dit, par ordre décroissant: le travail acharné et le talent, l'appui d'un patron ou d'un mentor professionnel, les politiques et programmes sur la diversité et le genre, et les programmes de mentorat parrainés par l'industrie. Les résultats montrent que lorsqu'elles recherchent une solution, les femmes commencent par se regarder dans le miroir. Même si c'est essentiel, il est clair que ce n'est pas suffisant. Les politiques, les programmes et le mentorat ciblé sont également essentiels aux changements sur le terrain.
Par conséquent, nous recommandons l'élaboration de programmes qui lèvent les obstacles à l'avancement des femmes, et qui mettent l'accent sur le mentorat, le parrainage et le perfectionnement des cadres. Nous recommandons en outre de la formation à l'intention des membres des conseils d'administration et des équipes de direction sur les préjugés inconscients et les pratiques d'inclusion fondées sur le genre et la diversité. De plus, même si les quotas demeurent un outil stratégique possible pour atteindre la parité, les cibles et les incitatifs sont un point de départ fort privilégié, et les cibles en particulier ont commencé à entraîner des changements dans des organisations comme Téléfilm et CBC/Radio-Canada.
D'après l'examen approfondi de la documentation internationale réalisé dans le cadre de l'étude, nous savons également qu'une plus grande divulgation d'information sur le genre et la diversité par les bailleurs de fonds publics, les sociétés ouvertes et les radiodiffuseurs réglementés contribue à corriger le déséquilibre. Nous recommandons donc au ministère du Patrimoine canadien de commander des analyses sur le genre et la diversité à propos des organismes du portefeuille et de leurs secteurs respectifs.
Dans l’industrie de la production de contenu sur écran, la parité hommes-femmes ne se limite pas à la justice économique. Il s'agit également de la façon dont nous percevons notre monde et dont nous nous voyons les uns les autres. L'inégalité créative et économique causée par le déséquilibre entre les sexes a une incidence sur les histoires qui sont racontées et sur la façon dont les femmes y sont représentées. Dans un rapport de 2016 dirigé par J. Walter Thompson et le Geena Davis Institute on Gender in Media, les organisations notent que le manque de personnages féminins forts au cinéma et à la télévision a des effets à long terme sur la société et le progrès des femmes. Elles ajoutent que la recherche démontre que les modèles féminins au cinéma et à la télévision incitent grandement les femmes à améliorer leur vie.
Les répercussions sociales considérables des images que nous voyons sur nos écrans renforcent le travail de votre comité sur l'avancement des femmes dans des postes décisionnels clés de l'industrie de la production et des institutions qui l'entourent.
Nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de contribuer à votre examen de la parité hommes-femmes dans les conseils d'administration et dans les hauts rôles créatifs des institutions culturelles. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
J'étais fort intrigué par les propos de tous les témoins. Je veux donner suite à une question que Mme Morgan a soulevée, et qui se rapporte à l'intervention de M. MacDougall, lorsqu'elle a cité des chiffres sur le besoin de diversité sur plusieurs plans. Elle a parlé du nombre de minorités visibles dans la population, mais pas dans les conseils d'administration du secteur artistique.
Madame Morgan, vous avez dit une chose qui concorde avec bon nombre des défis que nous rencontrons en politique lorsque nous essayons d'encourager les gens à se présenter pour que le Parlement ressemble davantage au Canada. Parfois, c'est le choc de devoir collecter des fonds et dépenser de l'argent de ses poches qui pose problème. Nous sommes au courant de la racialisation de la pauvreté, et nous savons que certaines personnes qui sont ici depuis longtemps, ou qui ne rencontrent pas certaines difficultés peuvent accumuler plus de richesse.
Vous avez indiqué qu'à Soulpepper, la politique habituelle du conseil d'administration veut que tout nouveau membre du conseil fasse un don à l'organisation ou recueille des fonds à cette fin. Vous avez également dit dans votre témoignage que Soulpepper admettra cependant une exception s'il souhaite attirer un candidat méritant; il renoncera alors à ces exigences générales.
Ma question comporte essentiellement deux volets. Premièrement, pensez-vous que la politique de Soulpepper constitue la norme dans le secteur des arts et de la culture, comme au Musée royal de l’Ontario et au Musée des beaux-arts de l'Ontario, pour ainsi dire? En deuxième lieu, pensez-vous que votre volonté à explorer cette exception est anormale, ou est-ce aussi une chose qui peut être faite dans d'autres institutions de votre acabit?
Je sais que c'est un peu injuste puisque je vous demande de parler du secteur en général. Cependant, je vous invite à le faire parce que je trouve ce point très important.
:
Merci, madame la présidente.
Merci à chacun des témoins d'être avec nous ce matin.
J'aimerais commencer par un bref tour de table où vous seriez invités à répondre dans l'ordre dans lequel vous avez fait vos présentations au début.
Vous êtes devant le Comité permanent du patrimoine canadien, lequel est assez représentatif de la Chambre des communes. Nous sommes une douzaine de membres autour de la table, dont quatre femmes, ce qui fait à peu près 33 % de femmes. Par conséquent, nous n'atteignons même pas la zone de parité.
Selon vous, est-ce que le Parlement est crédible relativement à cette question quand il ne dispose pas lui-même d'une politique pour atteindre la parité? Nous n'avons même pas de politique officielle pour garantir qu'au moment d'une élection, le nombre de candidats et de candidates respecte lui-même la parité, ce qui nous permettrait de faire élire un plus grand nombre de femmes.
Si vous trouvez que la question pose un trop grand risque de confrontation, je la tourne d'une autre façon. Est-ce que cela aiderait chacun des organismes que vous représentez de voir le gouvernement fédéral mettre en place des mesures pour assurer la parité à la Chambre des communes?
Monsieur MacDougall, avez-vous un commentaire?
:
Merci, madame la présidente.
Merci à tous les témoins pour leurs excellents exposés.
Madame Morgan, c'était en fait à Davenport, la circonscription que je représente dans l'ouest du centre-ville de Toronto. J'organise des séances stratégiques sur les arts deux ou trois fois par année, et c'est une discussion que j'ai eue lors de la dernière séance concernant Soulpepper et la situation qui s'est installée à la fin de l'année dernière qui m'a poussée à déposer une motion pour que nous entreprenions l'étude actuelle. Soulpepper a été une des sources d'inspiration de notre étude, et je trouve cela positif.
Un fait important qui a été mis au jour, c'est que le nombre de directrices artistiques est faible; vous l'avez souligné justement dans votre exposé. J'aimerais m'arrêter là-dessus un instant pour voir si vous avez des recommandations précises relativement à ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour aider à cet égard.
Mme Pigott nous a dit que les femmes recevaient moins de fonds pour la programmation que les hommes; nous savons donc que cela fait partie du problème. Nous avons aussi appris qu'il y a une poignée d'organismes minuscules et quelques très grands organismes; c'est donc très difficile de renforcer les capacités. Comment pouvons-nous aider à les renforcer?
J'aimerais prendre un instant pour voir s'il y a quelque chose que nous pouvons faire pour aider à renforcer les capacités ou pour apporter de l'aide sur le plan des postes de cadres supérieurs dans le secteur des arts et de la culture. Avez-vous des recommandations précises, au-delà de veiller à ce qu'il y ait du financement adéquat, en particulier pour les pièces de théâtre ou les projets artistiques dirigés par des femmes?