Je m’appelle Ariel Katz. J'enseigne le droit à l’Université de Toronto, où je suis titulaire de la Chaire d’innovation, commerce électronique. Je vous suis reconnaissant de l’occasion qui m’est donnée de comparaître devant vous aujourd’hui.
Au cours de ma déclaration, j’aimerais mettre l’accent sur certaines des façons dont les droits d’auteur contribuent ou nuisent peut-être à la capacité des artistes et des créateurs à être rémunérés pour leurs oeuvres.
La notion selon laquelle les droits d’auteur sont nécessaires pour permettre aux créateurs de bénéficier financièrement de leurs créations est enracinée profondément dans la pensée juridique actuelle et la façon dont les politiques sont élaborées depuis l’avènement des droits d’auteur, il y a quelque 310 ans de cela. Depuis l’adoption de la première loi sur le droit d’auteur, le Statute of Anne de 1709, presque toutes les réformes majeures des droits d’auteur sont fondées sur la notion et la promesse selon lesquelles les droits d’auteur apportent aux auteurs la garantie d'être rémunérés pour leurs oeuvres.
Pendant 300 ans, l’intérêt des auteurs a été la bannière que les éditeurs et les producteurs ont brandie en demandant des pouvoirs sans cesse plus grands en vue de contrôler légalement les oeuvres de création. Des auteurs et des créateurs bien-aimés comparaissaient devant des législateurs, décrivaient leurs difficultés financières et appuyaient les demandes des éditeurs qui cherchaient à obtenir des droits supplémentaires et des outils plus robustes pour les faire respecter.
Cette stratégie a été extrêmement fructueuse au cours des 300 dernières années. Elle s’est même accentuée pendant les dernières décennies. Il s’ensuit que les droits d’auteur ont été élargis dans presque toutes les directions. La question des droits d’auteur s’est élargie, de même que leurs conditions et leur portée géographique. Le nombre d’activités qui peuvent constituer des violations du droit d’auteur a augmenté, tout comme le nombre d’outils et de solutions d’application des droits d’auteur qui sont accessibles.
Cependant, la grande majorité des artistes et des créateurs semblent tirer très peu de revenus de leurs créations. Par exemple, samedi dernier, l’animateur de la CBC, Michael Enright, a cité une récente enquête menée par la Writers' Union qui a révélé que l’écrivain canadien moyen touchait des recettes annuelles d’environ 9 000 $ seulement et que ces recettes diminuaient rapidement. On attribue encore une fois cet état de choses au manque de robustesse des droits d’auteur et, pour y remédier, on semble proposer de « redonner aux droits d’auteur leur grandeur ».
Après s’être demandé pendant 300 ans si nous avions atteint notre objectif et avoir découvert que ce n’était pas le cas, il est peut-être temps de repenser à nos actions et de reconnaître que la faiblesse des droits d’auteur n’est pas nécessairement la source du problème et que leur renforcement ne réglera peut-être pas le problème. En fait, nous devrions même commencer à nous demander si l’élargissement permanent des droits d’auteur contribue au problème. C’est paradoxal, mais cela pourrait être le cas.
Comprenez-moi bien: les droits d’auteur sont un outil juridique très efficace pour collecter des allocations découlant de l’utilisation d’oeuvres de création. Plus les droits d’auteur deviennent robustes, généraux et étendus, plus la capacité d’obtenir des loyers auprès des utilisateurs de ces oeuvres s’accroît. En effet, les droits d’auteur enrichissent certaines sociétés — ou leurs actionnaires ou leurs cadres supérieurs — et un nombre relativement faible d’artistes vedettes. C’est la raison pour laquelle ces intervenants font un lobbying aussi intensif en vue de protéger les droits d’auteur et de les rehausser, et c’est la raison pour laquelle ils sont capables d’exercer des pressions plus fortes que pratiquement tous les autres participants à ce processus législatif.
Si nous n’avons pas pour objectif d’enrichir davantage les gens très riches, mais plutôt de faire en sorte que le créateur moyen soit rémunéré adéquatement, il serait peut-être temps de reconnaître que la stratégie visant à élargir les droits d’auteur a échoué spectaculairement.
Je vous fais remarquer entre parenthèses que, d’un point de vue économique, il vaut mieux penser au créateur marginal qu'au créateur moyen. Cela ne veut pas dire que la personne est marginale ou que son oeuvre est sans importance; j’entends par là une personne pour laquelle un changement serait bénéfique. Si nous modifions nos politiques, comment la personne en marge que nous souhaitons toucher sera-t-elle touchée? Je qualifie donc la personne de marginale. Je tenais simplement à préciser cela.
Si les droits d’auteur n’ont pas donné les résultats mentionnés dans leur objectif déclaré, pourquoi est-ce le cas? L’une des réponses possibles est que nous ne sommes pas encore arrivés à bon port, que les droits d’auteur ne sont pas encore suffisamment robustes. Nous devons sans cesse les renforcer et, tôt ou tard, nous atteindrons notre objectif. De façon abstraite ou théorique, cette réponse est plausible, mais, selon moi, il est peu probable que ce soit la bonne réponse.
Songez, par exemple, aux récentes conclusions de l’enquête menée par la Writers' Union. Access Copyright et la Writers' Union citent ces chiffres ou des chiffres semblables pour étayer leurs demandes visant, par exemple, à empêcher les établissements d’enseignement de s’appuyer sur les dispositions en matière d’utilisation équitable, ainsi que leurs tentatives de rendre obligatoires pour ces établissements les tarifs approuvés par la Commission du droit d’auteur. Ils pourraient essentiellement imposer ces coûts aux établissements d’enseignement, même si la Cour suprême a jugé que les utilisateurs n’étaient pas tenus de payer les tarifs de ce genre.
Supposons que notre objectif consiste à permettre à des écrivains professionnels de tirer leur subsistance de leurs écrits. Selon Statistique Canada, le revenu médian des ménages s’élève à environ 70 000 $ par année. Il va de soi que le revenu de 9 000 $ révélé par l’enquête est beaucoup trop faible. Quelles mesures faudrait-il que nous prenions relativement aux droits d’auteur si nous souhaitions quadrupler cette somme de 9 000 $, afin qu’elle atteigne la moitié du revenu médian des ménages? Les écrivains pourraient alors tirer des droits d’auteur non pas le revenu médian, mais plutôt la moitié de ce revenu. Et pour ce faire, il faudrait que nous quadruplions le montant de 9 000 $.
Supposons que nous soutenions la proposition d’Access Copyright, que l’utilisation équitable à des fins éducatives soit abolie et que des tarifs obligatoires soient imposés aux établissements d’enseignement, etc. Nous n’avons pas besoin de passer du temps à calculer exactement ces tarifs pour nous rendre compte que, si nous souhaitons que les droits d’auteur accroissent substantiellement les revenus de ces auteurs, il faudrait que nous imposions aux établissements d’enseignement ce qui constituerait effectivement une taxe sur l’éducation, une taxe qui les mènerait rapidement à la faillite. Si c’est notre objectif, si c’est l’outil que nous souhaitons utiliser…
En outre, même si cette approche était viable, le recours au mécanisme des droits d’auteur n’accroîtrait pas seulement la rémunération des auteurs à faible revenu qui peuvent nous tenir à coeur, il accroîtrait simultanément de façon radicale la rémunération de ceux qui gagnent déjà beaucoup d’argent. Voilà comment fonctionnent les droits d’auteur. Vous n’en bénéficiez pas en fonction de votre revenu, vous en bénéficiez en fonction des oeuvres que vous possédez. Plus vous possédez d’oeuvres, plus vous gagnez d’argent et plus vous avez tendance à toucher des revenus supplémentaires.
Voilà une vérité simple et dérangeante: l’utilisation des droits d’auteur pour améliorer les revenus des créateurs moyens ou marginaux enrichirait simultanément les intervenants déjà riches. Bien entendu, il faudrait que l’argent vienne de quelque part. Il faudrait que quelqu’un verse cet argent. Il pourrait être recueilli auprès des étudiants ou des contribuables, ou découler d’autres dépenses qui ne seraient plus engagées. Il faudrait qu’il provienne de fonds affectés à d’autres ressources. Cela fait ressortir le fait que l’utilisation des droits d’auteur pour améliorer les revenus des créateurs marginaux nécessiterait un transfert massif d’argent du public à des personnes déjà extrêmement riches, et que seulement une petite part de cet argent serait versée aux personnes qui peuvent nous tenir vraiment à coeur.
Je tente de vous expliquer cela très brièvement. Je vous encourage vraiment à lire le chapitre 2 d’un nouveau livre publié par le professeur Glynn Lunney, intitulé Copyright's Excess. Il fait valoir cet argument et l’explique beaucoup mieux que moi.
Je sais que M. Lunney serait aussi heureux de comparaître devant vous. Il est professeur de droit aux États-Unis, et il serait ravi de témoigner devant vous afin de discuter de son nouveau livre.
Pourquoi les droits d’auteur sont-ils un tel échec pour la plupart des créateurs? Pourquoi la grande richesse qu’ils apportent à certains éditeurs, certains producteurs et certaines entreprises médiatiques ne retombe-t-elle pas sur les créateurs, même si ce sont les premiers propriétaires et les prétendus bénéficiaires des droits d’auteur?
La réponse, c’est que, même si l’élargissement des droits d’auteur accroît la capacité des vendeurs de contenu de tirer des loyers du public, la part de ces loyers que reçoivent les auteurs ne dépend pas de la robustesse des droits d’auteur. Elle dépend plutôt de la structure concurrentielle de l’industrie et du pouvoir de négociation relatif des créateurs par rapport aux producteurs.
J’ai presque terminé.
Malheureusement, il y a des raisons inhérentes pour lesquelles la plupart des créateurs bénéficient très peu de leurs écrits et cela continuera probablement, en dépit de l'existence des droits d’auteur.
Il est également possible que l’élargissement des droits d’auteur aggrave cette situation. Permettez-moi de vous expliquer très brièvement la raison pour laquelle c’est le cas. Espérons que nous aurons plus de temps pour en discuter plus tard.
Même si les créateurs sont les premiers propriétaires des droits d’auteur, la plupart d’entre eux ne sont pas vraiment en mesure de commercialiser leurs oeuvres sur le marché. Ils ont besoin de conclure des contrats avec des producteurs ou d’autres types d’intermédiaires qui ont les connaissances, les capitaux et les aptitudes nécessaires pour tirer parti des économies d’échelle.
Ils sont donc forcés de conclure ces contrats qui déterminent principalement leur rémunération, une rémunération qui dépend de leur pouvoir de négociation relatif.
Pour des raisons que les économistes ne comprennent pas entièrement, les industries créatives ont tendance à être très concentrées. En même temps, le marché des talents créateurs a tendance à être extrêmement concurrentiel.
Au risque de me mettre à dos les députés du Parti conservateur et dans l’espoir de séduire les députés du NPD, permettez-moi d’emprunter à Karl Marx son concept d’armée de réserve de travailleurs.
Nous disposons donc d’une armée de réserve d’ouvriers créateurs. L’offre de talents créateurs est abondante. Les créateurs aiment créer et s’empressent de le faire et, comme ils rivalisent entre eux sur le marché et que les intervenants avec lesquels ils doivent conclure des contrats sont beaucoup moins nombreux, leur rapport de force avec les grands producteurs est essentiellement inférieur. Les créateurs sont souvent forcés de céder leurs droits d’auteur aux producteurs ou d’accepter des conditions d’exploitation de la part des éditeurs.
De plus, une asymétrie de l’information aggrave la situation.
Je vois que je suis…
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Oui. Merci, madame la présidente.
Bonjour à tous. Je vous remercie de nous avoir invités.
Je m'appelle Matt Williams et je suis le vice-président de House of Anansi Press et Groundwood Books, à Toronto. Nous sommes une maison d'édition indépendante, et nous publions des livres pour les lecteurs de tous âges.
Anansi a maintenant plus de 50 ans, ce qui est un âge vénérable pour une maison d'édition canadienne. Depuis nos débuts, nous sommes reconnus pour la publication des nouveaux auteurs canadiens et pour l'aide que nous leur offrons en vue d'établir, de bâtir et de maintenir leur carrière. Nous publions de la poésie, des nouvelles, des romans, du théâtre et des essais, et nous portons une attention particulière au travail des auteurs autochtones et francophones du Canada, dont nous publions les oeuvres traduites. Nous publions la romancière Monia Mazigh, qui est ici aujourd'hui. Comme vous l'avez dit, nous allons partager notre temps de parole.
Chez Anansi et Groundwood, nous travaillons avec quelque 500 auteurs, illustrateurs et traducteurs. La rémunération des auteurs est au coeur de notre organisation et de nos activités.
Notre modèle est le suivant: nous versons des avances de redevances aux auteurs pour financer leur travail, et nous versons des redevances courantes sur les ventes. Nous vendons le travail des auteurs dans divers marchés — les librairies, les bibliothèques, les écoles primaires et secondaires, et les établissements d'enseignement postsecondaire — et nous les exportons. Nous publions les livres selon divers formats: imprimé, audio et numérique. Sur chaque vente, nous versons une part des revenus aux auteurs sous la forme de redevances.
Depuis les changements apportés à la Loi sur le droit d'auteur en 2012 et l'adoption des lignes directrices sur l'utilisation équitable par les éducateurs canadiens, nous avons constaté une baisse constante des revenus provenant des sources éducatives. De 2013 à aujourd'hui, la baisse des revenus a atteint près de 200 000 $, ce qui représente une baisse d'environ 100 000 $ des redevances versées aux auteurs. Au cours de la même période, nos revenus provenant de sources éducatives à l'extérieur du Canada se sont maintenus. Nous n'avons constaté aucune diminution des redevances versées aux auteurs dans ce domaine.
Nous sommes entièrement numériques. Nous rédigeons et vendons des livres électroniques et des livres audio. Ce sont des produits numériques distincts, chacun associé à un prix de détail et à un marché défini, et nous versons des redevances à nos auteurs sur toutes ces ventes. Toutefois, la vente au format numérique dans les salles de classe du Canada ne vise pas nécessairement à vendre des produits distincts associés à un prix: nous vendons les parties d'un livre ou des oeuvres artistiques indépendantes. Nous autorisons le contenu.
Avant, les établissements d'enseignement payaient pour pouvoir utiliser un poème, une nouvelle ou l'extrait d'un livre par l'entremise d'un système de licences collectives, qui représentait un modèle efficace pour la gestion du paiement pour l'utilisation, mais ce système a maintenant été remplacé en grande partie par les lignes directrices sur l'utilisation équitable des éducateurs, qui ont retiré l'obligation de paiement. Nos écrits sont toujours enseignés dans les classes du pays, mais les paiements ne sont plus au rendez-vous.
Une bonne partie des documents remis aux étudiants, surtout dans les établissements postsecondaires, sont au format numérique... par exemple des extraits numérisés distribués dans l'ensemble du système de gestion de l'enseignement d'une université. Je tiens à souligner que cela nous convient tout à fait. Nous signons des contrats avec nos auteurs en vue d'une vaste publication de leurs oeuvres et d'atteindre le plus grand nombre de lecteurs possible. Les enseignements et les étudiants canadiens ont une grande valeur pour nous. Notre objectif est de voir notre contenu utilisé pendant de nombreuses années — voire des générations — dans les salles de classe.
L'autre partie de notre entente avec les auteurs vise à leur verser des redevances et à les aider à gagner leur vie, et c'est là que les changements de 2012 nous nuisent. L'effondrement du modèle des licences collectives après 2012 a éliminé ce que nous appelons la « partie payante » provenant du marché canadien des licences éducatives. Nous n'avons plus de mécanisme par l'entremise duquel l'utilisation et la réutilisation des documents selon une forme conviviale pour la classe moderne — et je pense particulièrement à la forme numérique — génèrent des redevances pour les gens qui ont créé ces documents. Si nous convenons que le contenu canadien a une valeur, alors nous devrions soutenir un modèle qui permet non seulement aux utilisateurs, mais aussi aux créateurs de profiter de cette valeur.
Nous avons fait trois recommandations au Comité dans notre mémoire. Pour des raisons de temps, je vais réitérer la première recommandation seulement: que le Comité travaille avec le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie en vue de clarifier les dispositions sur l'utilisation équitable afin de rétablir notre capacité de rendement sur l'utilisation continue de notre travail. Nous croyons qu'un retour vers un système de licences collectives nous permettrait d'atteindre cet objectif.
Je vous remercie de m'avoir écouté.
Je vous remercie de m'avoir invitée à témoigner devant vous.
Je m'appelle Monia Mazigh. Dans mon ancienne vie, j'étais professeure de finances; aujourd'hui, je suis une auteure canadienne. J'ai publié mon premier livre en 2008 et j'ai publié deux romans depuis. J'écris en français et je fais partie des quelques auteurs canadiens qui ont la chance d'être publiés en français et en anglais. Ma maison d'édition anglaise est House of Anansi et je suis très heureuse d'être publiée par des gens aussi dévoués. Leur confiance en moi et leur grand appui m'ont été essentiels en vue de bâtir et de perfectionner ma carrière d'auteure.
Aujourd'hui, je suis auteure à temps plein. Je rédige des chroniques, des blogues et des livres. J'ai été invitée à plusieurs salons du livre partout au Québec et à bon nombre de festivals littéraires, en plus d'autres événements au Canada. J'ai aussi participé aux salons du livre de Genève, en Suisse, et de Paris, en France. L'été dernier, j'ai passé trois mois en résidence à la Historic Joy Kogawa House, où j'ai travaillé à mon troisième roman.
Lorsque j'ai entrepris ma carrière d'auteure, j'ai gardé mon autre emploi, à temps partiel surtout, afin de pouvoir écrire tout en profitant d'une certaine sécurité financière en recevant un chèque de paie à la fin du mois. Toutefois, il y a trois ans, j'ai pris la décision radicale de consacrer tout mon temps à l'écriture. Cette décision avait un coût: la perte de mon revenu. En plus de cela, avec la baisse des redevances, le petit chèque de quelques centaines de dollars que je recevais est aujourd'hui quasi non existant.
Je ne peux pas dire avec certitude que la baisse de mes revenus est directement liée aux changements de 2012 à la Loi sur le droit d'auteur et à l'adoption des lignes directrices sur l'utilisation équitable; je crois néanmoins que ce lien est fort probable.
Aujourd'hui, si ce n'était de la subvention que je reçois du Conseil des arts — que mes amis auteurs appellent l'aide sociale des auteurs — et du chèque que je reçois en vertu du Programme du droit de prêt public, mes revenus d'auteur seraient un bruit blanc, comme on le décrivait dans les modèles financiers: tous les facteurs qui ne peuvent pas être prédits et qui sont en grande partie négligeables.
C'est ma passion pour l'éducation qui m'a amenée à l'écriture. Je crois toujours que les livres, les poèmes et les romans sont des outils qui peuvent aider les étudiants à compléter et à améliorer leur éducation. Lorsque j'ai écrit mon premier roman, Miroirs et mirages, sur les femmes musulmanes du Canada, il comportait un volet éducatif imposant. J'ai correspondu avec des élèves de 12e année d'une école secondaire d'immersion française de Vancouver qui devaient lire mon roman et rédiger leur travail final en français à son sujet. C'est toute une réussite pour un auteur de voir son roman être lu et faire l'objet de discussions et de réflexions de la part d'étudiants. Ce serait encore mieux si, à la fin de l'année, cette réussite donnait lieu à des redevances supplémentaires versées par les établissements d'enseignement à ma maison d'édition, et donc à moi.
Malheureusement, avec les modifications apportées à la loi, on nous refuse ces redevances. Notre travail de création est utilisé gratuitement. Dans l'intervalle, les auteurs canadiens voient les trous dans leurs revenus se faire de plus en plus grands, alors que la situation devrait être inverse.
Les auteurs canadiens sont nos ambassadeurs à l'étranger. En 2017, je me suis jointe à une délégation d'auteurs canadiens en visite au Sénégal, en Afrique de l'Ouest. Nous sommes allés dans les écoles pour parler aux jeunes. Nous avons organisé des tables rondes avec des auteurs sénégalais. Nous leur avons parlé de notre travail de création, qui leur a permis de s'imaginer notre pays, notre peuple et la couleur de notre ciel. Mais comment pouvons-nous poursuivre ce travail de création si nous ne recevons pas notre dû par l'entremise des redevances?
L'histoire est remplie d'auteurs classiques célèbres qui sont morts dans la pauvreté, méprisés et abandonnés par la société, mais qui plus tard ont été reconnus et adulés pour leur génie, leur créativité et leur mérite artistique. Pourquoi voulons-nous perpétuer ces tragédies humaines?
La créativité est une valeur ajoutée à un pays. Elle fait partie de notre richesse commune. Il faut la chérir, la partager et la reconnaître. Le gouvernement du Canada devrait protéger les utilisateurs et les auteurs de cette créativité.
Je suis fortement en faveur d'un réexamen de la Loi sur le droit d'auteur de 2012 afin de permettre aux auteurs de recevoir des redevances sur les livres utilisés par les établissements d'enseignement canadiens.
Merci.
:
Hier, j'ai témoigné devant le Comité de l'industrie et c'était l'objet de mon témoignage.
Je crains que beaucoup de fausses informations aient circulé et j'aimerais beaucoup passer plus de temps avec Matt et Monia, peut-être plus tard, parce que je crois — sans vouloir être condescendant — qu'ils sont victimes de mésinformation.
En ce qui a trait à l'éducation supérieure, la réalité est que les universités n'utilisent que très peu d'oeuvres littéraires canadiennes dans leurs programmes. En fait, j'ai apporté ce livre publié par Anansi et écrit par Nick Mount, un professeur d'anglais et un historien de la littérature canadienne à l'Université de Toronto. Il souligne que dans la plupart des facultés d'anglais de la plupart des universités, vous pouvez obtenir un baccalauréat sans avoir lu un seul auteur canadien.
En gros, les universités canadiennes n'enseignent pas la littérature canadienne. Des Canadiens enseignent peut-être dans les facultés d'anglais, et Nick Mount est professeur... mon fils suit son cours. Il donne une liste de livres et les étudiants les achètent. Ce sont 400 étudiants par année qui s'inscrivent à son cours; les auteurs des livres recommandés vendent donc 400 copies. M. Mount m'a dit que l'un de ces auteurs lui avait dit que son cours avait permis une réédition de son livre.
En fait, les professeurs adorent cela. Lorsque le contenu est offert, nous ne voyons aucun problème à demander aux étudiants de l'acheter, s'il n'est pas trop cher. La raison pour laquelle les professeurs préparent leurs propres trousses et créent leur propre méthode d'enseignement, c'est que nous ne sommes pas payés pour le faire. C'est un travail difficile et nous ne sommes pas payés directement pour le faire. Si nous avions accès à des documents pédagogiques de qualité, nous les utiliserions volontiers. L'une des raisons pour lesquelles les grands éditeurs d'ouvrages pédagogiques font autant d'argent est que ce ne sont pas les professeurs qui les recommandent qui doivent les payer. C'est pourquoi le prix des manuels a augmenté de manière importante au cours des 40 dernières années. Nous sommes paresseux. Si le livre existe déjà, nous allons le recommander.
La deuxième fausse information, à mon avis, a trait à la façon dont Access Copyright distribuait son argent. Je crois qu'une grande partie des fonds que ne reçoivent plus Matt et Monia n'a pas trait à l'utilisation de leurs oeuvres, mais bien au fait qu'Access Copyright perçoit toutes les sommes, sans tout avoir dans son répertoire. Il recueille toutes les sommes et les distribue aux détenteurs des droits, mais il garde une partie de l'argent qu'il distribue parmi ses membres. Il y a divers noms associés à cela... le système de remboursement pour l'auteur, le répertoire et une partie pour l'éditeur. C'est le montant d'argent qu'Access Copyright versait à ses membres, mais selon la définition, ces fonds ne visent pas l'utilisation des oeuvres de ces membres, mais bien l'utilisation des oeuvres d'autres titulaires de droits d'auteur, qui ne sont pas membres d'Access Copyright.
Je crois que c'est en grande partie ce qui se passe aujourd'hui.
:
Madame la présidente et distingués membres du Comité, je vous remercie de cette invitation.
M'accompagnent aujourd'hui M. Jean-Stéphen Piché, sous-ministre adjoint,
[Traduction]
et Andrew Francis, dirigeant principal des finances.
C'est un réel privilège d'être ministre du Patrimoine canadien et du Multiculturalisme. Depuis ma nomination, j'ai rencontré un grand nombre de Canadiens engagés, d'entrepreneurs créatifs, d'artistes et de leaders dynamiques. Leur passion et leur énergie sont une grande source d'inspiration pour moi.
J'aimerais commencer par souligner les progrès que nous avons accomplis ces derniers mois.
[Français]
En tant que ministre, mon mandat est clair: renforcer et promouvoir nos industries culturelles et créatives, célébrer la diversité du Canada et favoriser l'inclusion.
Mon ministère travaille très fort pour que notre vision d'un Canada créatif devienne réalité. Nous investissons dans le talent de nos créateurs, y compris celui des peuples autochtones et des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Nous renforçons également le réseau de radiodiffusion publique, c'est-à-dire CBC/Radio-Canada.
De plus, comme vous le savez, nous avons commencé à examiner, en juin dernier, la Loi sur la radiodiffusion et la Loi sur les télécommunications. Il est absolument nécessaire de moderniser ces lois afin que le système fonctionne pour tout le monde, et je dis bien pour tout le monde: les artistes, les entreprises, les consommateurs et les diffuseurs.
Mon collègue et moi-même examinons actuellement la Loi sur le droit d'auteur. Il y a énormément de travail qui se fait ici là-dessus. Votre comité étudie les modèles de rémunération pour les artistes et les industries créatives.
L'objectif de tout cela est triple: soutenir le contenu culturel canadien, rémunérer nos artistes de manière juste et en temps opportun, et garantir aux Canadiens un meilleur accès à du contenu créatif.
Cela m'amène à l'objet de la rencontre d'aujourd'hui, à savoir le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2018-2019 ainsi que les dépenses de Patrimoine canadien et de cinq organismes du portefeuille.
[Traduction]
Commençons par les dépenses du ministère.
Comme vous le savez, Patrimoine canadien demande 32,4 millions de dollars supplémentaires. Cette somme comprend 25,5 millions de dollars en subventions et en contributions et 6,9 millions de dollars en fonctionnement. Cela ferait au total 1,4 milliard de dollars en autorisations pour le ministère. Ces fonds nous permettront de continuer nos travaux dans plusieurs domaines. Nous pourrons, entre autres, renforcer les langues officielles, soutenir le contenu canadien et le journalisme local, promouvoir le multiculturalisme de même que maintenir l'administration de la paye.
Nous progressons aussi dans la réalisation de Canada créatif, une vision ancrée dans notre diversité et axée sur le talent de nos créateurs. C'est une vision qui prend en compte l'importante contribution du secteur créatif à la croissance économique et à la prospérité de notre pays. Nous investissons dans nos artistes et dans leurs créations. Nous investissons dans les espaces culturels et les pôles de créativité pour contribuer à l'épanouissement de la nouvelle génération d'artistes et d'innovateurs. Nous favorisons la découverte et la distribution du contenu canadien ici et à l'étranger. Nous nous efforçons aussi de donner plus de place dans le monde numérique à des histoires qui reflètent la diversité des voix et des cultures au Canada.
Dans cette optique, nous avons lancé en début d'année la Stratégie d'exportation créative du Canada.
[Français]
Comme vous l'avez sûrement vu, nous allons investir 125 millions de dollars sur cinq ans pour aider nos créateurs à toucher un public beaucoup plus large et à accéder à de nouveaux créneaux commerciaux et à de nouveaux marchés. De ce montant, 17,2 millions de dollars sont prévus dans le Budget supplémentaire des dépenses (A).
De plus, nous avons annoncé des mesures à l'appui du journalisme local, dont 50 millions de dollars dans le budget de 2018 pour aider nos journaux à passer au numérique et pour donner aux communautés peu desservies un accès aux actualités locales. Il y a plusieurs communautés qui n'ont plus accès à de l'information locale.
On se rappellera aussi que l'énoncé économique présenté le 21 novembre dernier comprend plusieurs nouvelles mesures à l'appui du journalisme, notamment celles visant à encourager des modèles d'affaires sans but lucratif et à offrir des crédits d'impôt pour renforcer les médias canadiens.
Nous avons réussi à maintenir l'exemption culturelle dans le nouvel Accord Canada—États-Unis—Mexique. Cette clause est neutre vis-à-vis des technologies et porte sur tous les segments de nos industries culturelles. C'est un gain important et extrêmement positif pour le Canada et ses créateurs.
[Traduction]
Je suis également fier des progrès réalisés par mon ministère à l'égard de la réconciliation. Dans le budget de 2017, nous avons alloué 89,9 millions de dollars sur trois ans aux langues et aux cultures autochtones et nous avons renforcé notre appui à l'Initiative des langues autochtones. Par ailleurs, nous déposerons très bientôt le projet de loi sur les langues autochtones afin de préserver, de protéger et de revitaliser les langues des Premières Nations, des Inuits et des Métis. C'est très important de souligner cette mesure législative. Ce projet de loi, élaboré avec nos partenaires, reflète le dialogue approfondi entretenu avec des gardiens du savoir, des linguistes et des locuteurs.
Mon ministère fait aussi des gestes concrets pour inciter les Canadiens à s'ouvrir à la diversité et à l'inclusion. En particulier, nous nous attaquons à l'enjeu du racisme systémique à l'endroit des Noirs canadiens, ainsi que des peuples autochtones. Dans cette optique, le budget de 2018 augmente de 23 millions de dollars le financement accordé au Programme du multiculturalisme du ministère, ainsi qu'aux consultations menées à la grandeur du pays sur une nouvelle approche nationale de lutte contre le racisme.
[Français]
Nous travaillons très activement là-dessus. J'ai eu l'occasion de me rendre dans plusieurs régions partout au pays, et nous continuons à le faire.
Je vais maintenant parler des fonds supplémentaires mis à la disposition des organismes du portefeuille du ministère du Patrimoine canadien dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2018-2019.
Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes va recevoir 99 196 $ pour l'aider à s'attaquer au problème que pose le système de rémunération. L'Office national du film va recevoir exactement la même somme à cet effet.
Téléfilm Canada va recevoir un financement de 1 million de dollars dans le cadre de la Stratégie d'exportation créative du Canada.
Le Conseil des arts du Canada, pour sa part, recevra un transfert de 127 000 $ du ministère du Patrimoine canadien. Ces fonds vont servir à soutenir des projets de théâtre francophone et à assurer la participation du Canada aux réunions de la Commission internationale du théâtre francophone.
Le Centre national des arts recevra quant à lui un transfert de 150 000 $ du ministère du Patrimoine canadien pour soutenir la rencontre biennale Zones théâtrales qui aura lieu en 2019. Il s'agit d'une plateforme importante pour promouvoir le théâtre professionnel dans les communautés francophones du Canada.
Ensemble, ces organismes sont essentiels à l'enrichissement de la vie culturelle, linguistique, citoyenne et économique des Canadiens.
Je tiens aussi à souligner les efforts que nous faisons pour que les nominations par le gouverneur en conseil soient transparentes et variées. D'ailleurs, vous avez pu le constater au cours de la dernière année. Depuis octobre 2016, 126 personnes de partout au pays ont été nommées au sein du portefeuille du Patrimoine canadien. Elles représentent la diversité des Canadiens et sont de milieux, de langues, de cultures et de genres différents.
Cela met fin à mon intervention. Je serai heureux de travailler avec vous et avec l'ensemble des collègues ici, autour de la table, à l'avancement de nos priorités.
Je vous remercie de votre attention. Je suis maintenant disponible pour répondre à vos questions.
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Autrement dit, on est contraint par une date limite. Si vous me dites qu'il n'est pas possible de prendre des mesures intermédiaires en attendant, on devra attendre la date limite de 2020.
Je me souviens des propos de Douglas Barrett, qui a été président de l'ancienne mouture du Fonds des médias du Canada. Ce dernier avait dit au Globe and Mail, je crois, qu'ultimement ce comité d'experts présenterait des recommandations en janvier 2020.
Tout le monde ici cogne à des portes pour se faire élire. Manifestement, vous avez dit aux gens que cela allait avoir lieu après votre réélection, en leur demandant de ne pas dire un mot là-dessus et de ne pas trop chialer, sinon ce seraient les conservateurs qui se feraient élire. Je trouve cela très cynique. Disons que je passe par-dessus cela. Le milieu de la culture espérera pour le mieux à la prochaine élection, pauvre de vous!
Le rapport sera donc déposé en janvier 2020. MM. Piché et Francis vont peut-être travailler à un texte de loi, que nous allons recevoir à la fin de la session, ou peut-être même à l'automne. Selon les meilleurs calculs, cela nous mène en 2022-2023 avant qu'il y ait des changements concrets.
Comme je vous l'ai dit l'autre jour à la Chambre, si cela n'avait pas été de cette aide aux médias, en 2023, le National Post, Postmedia et l'Ottawa Citizen auraient déjà fermé leurs portes, tout simplement. Vous avez appliqué un bon diachylon, ce qui est très approprié, et c'est tant mieux. Par contre, il n'y aura rien d'autre entretemps. Amazon Prime et Hulu s'en viennent. Netflix continue à bénéficier de l'accord minable qui a été conclu.
Est-ce vrai que rien ne se produira avant 2022?
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Merci, madame la présidente. Bonjour à tous. Bonjour, monsieur le ministre.
En premier lieu, monsieur le ministre, je tiens à vous féliciter de votre nomination à titre de ministre du Patrimoine et du Multiculturalisme. Je souhaite aussi vous féliciter de votre passion et de votre transparence concernant votre prise en charge des dossiers et vos réponses aux questions. C'est rafraîchissant à voir. Je vous en félicite donc.
Je représente la circonscription de Saint John—Rothesay, dans le sud du Nouveau-Brunswick. C'est une circonscription intéressante. Premièrement, nous avons la première ville constituée au Canada. Son histoire est incroyable. C'est une ville fondée par des loyalistes. La ville et la région ont une abondance de monuments historiques qui ont une importance nationale. Avant ces trois dernières années, l'intérêt n'était pas au rendez-vous, et il y avait un manque de ressources et de moyens pour présenter des demandes de fonds pour ces monuments.
Je suis ravi de mentionner que dans ma circonscription j'ai une tour Martello; il n'en reste que quelques-unes en Amérique du Nord. J'ai le fort Howe, qui a une importance nationale. J'ai aussi le fort La Tour, l'ancien cimetière loyaliste, le théâtre Impérial et le marché de Saint John. Ce sont tous des monuments historiques qui ont une importance nationale.
Je suis enchanté de dire que le gouvernement a accordé du financement pour restaurer le marché de la ville et construire la tour Martello et le fort La Tour, qui est un magnifique monument qui a une importance nationale. Nous avons aussi réussi à obtenir du financement de Patrimoine canadien pour contribuer à la restauration du Théâtre Impérial, qui est l'un des premiers théâtres de style vaudeville en Amérique du Nord.
La liste est longue. Une grande partie de mon mandat et de ce qui me passionne dans ma circonscription consiste à obtenir du financement pour ces monuments historiques qui ont une importance nationale. Je suis enchanté de dire que le gouvernement a investi considérablement dans Patrimoine canadien et que ces investissements ont été immensément utiles dans ma circonscription.
L'autre élément de ma circonscription a trait à l'immigration, et ma circonscription devient de plus en plus diversifiée. Nous célébrons de plus en plus chaque mois des événements et des célébrations multiculturelles dans Saint John—Rothesay. Des intervenants de ma circonscription, comme l'Association multiculturelle de Saint John, par l'entremise de Mohamed Bagha, et le Centre de nouveaux arrivants de Saint John, ont présenté des demandes et ils ont reçu des fonds de Patrimoine canadien. Cela a permis une transformation pour eux et la circonscription en ce qui concerne la promotion du multiculturalisme dans Saint John—Rothesay. Cela n'avait pas vraiment été le cas avant ces trois dernières années.
Monsieur le ministre, l'une de vos priorités est de diriger des travaux à l'échelle du gouvernement pour renforcer l'avantage multiculturel du Canada. Pour ce faire, vous comptez adopter un programme du multiculturalisme revitalisé et mettre sur pied de nouvelles initiatives pour célébrer la diversité et encourager une meilleure inclusion.
Pouvez-vous faire le point sur le sujet?
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C'est une très bonne question. Comme je le mentionnais plus tôt, c'est vraiment au coeur de mes priorités. À court terme, c'est une grande priorité non seulement pour moi, mais également pour le , pour le gouvernement et, j'en suis certain, pour chacun d'entre nous.
Comme on l'a dit tantôt, les langues autochtones se perdent à une vitesse vertigineuse. Beaucoup trop de ces langues ont été perdues. Nous savons tous que cela a été causé en grande partie par d'anciens gouvernements, au cours de l'histoire, qui ont voulu carrément effacer ces langues par l'entremise de différents programmes, par exemple en arrachant les enfants à leur famille et en les empêchant de parler leur langue et de préserver leur culture dans les écoles résidentielles. On a mis en place tout un système pour que ces langues disparaissent.
Beaucoup d'efforts ont été faits pour effacer ces langues, et nous devons maintenant mettre autant d'efforts, sinon plus, pour les promouvoir, les protéger et leur permettre de rayonner. Pourquoi devons-nous faire cela, monsieur Boissonnault? C'est parce que la langue représente qui nous sommes. Regardez ce que nous faisons maintenant: nous échangeons et nous communiquons, et c'est la langue qui nous permet de le faire. En parlant notre langue, nous transmettons notre culture, notre façon de voir les choses et notre histoire.
Vous savez, quand ma famille est arrivée au Canada, je parlais juste espagnol. Mon père m'a dit que, puisque nous étions des réfugiés politiques, nous serions ici pour un bon bout de temps, et cela a été le cas. J'avais 8 ans, je parlais juste espagnol et je ne disais pas un mot de français ou d'anglais.
Mon père est un amoureux du français; il jouait du Molière. Il me disait d'apprendre le français, d'apprendre également l'anglais si je le voulais, mais de préserver l'espagnol et ainsi préserver qui j'étais. Aujourd'hui, c'est un grand avantage de pouvoir parler ces trois langues. J'apprends l'italien, d'ailleurs, et si j'avais plus de temps, ce serait ma quatrième langue.
En bref, monsieur Boissonnault, c'est une priorité absolue du gouvernement. Nous avons mis des programmes sur pied pour financer certains projets. C'est bien, mais ce n'est pas assez. Il faut un projet de loi robuste, et c'est ce qu'on va avoir sous peu.
Pour la gouverne de M. Boissonnault, l'histoire du secteur d'Amber Valley, au nord d'Edmonton, est sans doute une page importante de l'histoire des Noirs. Je ne sais pas si M. Boissonnault est au courant de ce récit, mais il fait partie de cette histoire.
J'ai rencontré le conservateur en chef plusieurs fois. À la Cité parlementaire, l'un des problèmes que nous avons, c'est qu'à l'intérieur de l'édifice du Centre, la responsabilité du patrimoine appartient au conservateur en chef. À l'extérieur, la responsabilité appartient à d'autres. Les pièces historiques de l'édifice de l'Est relèvent de quelqu'un d'autre.
Seriez-vous disposé, comme vous le disiez, à faire ce qu'il faut pour regrouper toutes ces responsabilités éparses et ainsi nous permettre de jouir des attributs patrimoniaux de la Colline d'une façon qui ne serait pas cloisonnée? Ils ne peuvent pas se parler entre eux ou faire quoi que ce soit à propos de l'extérieur ou de l'intérieur des différents édifices.
Tout cela a directement à voir avec notre patrimoine en 2019 — les pièces restaurées de l'édifice de l'Est, les statues à l'extérieur de l'édifice, le suffrage dans de nombreuses régions du pays. Cela occupe une partie importante du terrain à l'extérieur.
Est-ce que vous pourriez faire quelque chose pour coordonner cette partie de notre patrimoine, qui est maintenant cloisonnée? Je rappelle que le conservateur en chef à l'intérieur de l'édifice du Centre ne peut rien faire pour le patrimoine situé à l'extérieur de notre édifice.