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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 083 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 7 décembre 2017

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Merci beaucoup.
    Nous continuons aujourd'hui notre étude, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 20 juin 2017. Le Comité reprend son étude sur les femmes autochtones dans les systèmes juridiques et correctionnels fédéraux.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre premier groupe de témoins d'aujourd'hui: Mme Vicki Chartrand, de l'Université Bishop, professeure agrégée au département de sociologie; et par vidéoconférence depuis Kahnawake au Québec, Véronique Picard, coordonnatrice de la justice pour Femmes autochtones du Québec Inc.
    Nous allons commencer la période de questions de sept minutes d'aujourd'hui. Vicki, vous avez sept minutes.
    Allez-y.
    Avant de commencer, j'aimerais prendre le temps d'exprimer ma reconnaissance aux gardiens ancestraux du territoire non cédé du peuple Anishinabe. C'est un honneur et un privilège pour moi d'être ici.
    Je tiens aussi à remercier les membres du Comité permanent du temps et de l'énergie qu'ils consacrent à cette étude extrêmement importante.
    Comme cela a déjà été mentionné, je suis Vicki Chartrand. Je suis présentement professeure agrégée à l'Université Bishop de Sherbrooke, au Québec. Auparavant, j'étais la directrice administrative d'un foyer de transition pour femmes dans la région intérieure nord de la Colombie-Britannique. J'ai également travaillé au bureau national des sociétés Elizabeth Fry, et avant cela, j'ai travaillé au secteur bénévole du bureau de libération conditionnelle du Service correctionnel du Canada.
    Vous savez peut-être qu'en 2016, le magazine Macleans a publié un article intitulé « Canada's prisons are the new residential schools », selon lequel les prisons canadiennes sont les nouveaux pensionnats. L'article s'appuie sur un très grand nombre d'études traitant de la façon dont le système de justice pénale au Canada défavorise les Autochtones, et ce, à tous les niveaux: les vérifications policières, les arrestations, le rejet des demandes de mise en liberté sous caution, le maintien en incarcération, les erreurs judiciaires dans la détermination de la peine, la disparité des peines et, bien sûr, le taux élevé d'incarcérations. De nombreuses études ont révélé que cela se produisait aussi dans d'autres régions coloniales comme les États-Unis, l'Australie et la Nouvelle-Zélande.
    Il est clair qu'il s'agit d'un problème systémique qui sévit dans les pays coloniaux comme le Canada. Même si une prison n'est pas un pensionnat en soi, il faut garder à l'esprit qu'elle est issue de la même logique moderne sur la mise en isolement et la réhabilitation des personnes. Je doute que ce soit par coïncidence que le système carcéral et les organismes de protection de la jeunesse ont commencé sournoisement à s'infiltrer dans la vie des Autochtones au cours des années 1950 et 1960, au moment même où on commençait à mettre un terme aux politiques d'assimilation. À dire vrai, avant les années 1960, la proportion d'Autochtones en milieu carcéral n'était que de 1 ou 2 %. Depuis les années 1960, cette proportion ne cesse d'augmenter chaque année.
    Vous le savez probablement déjà, les femmes autochtones représentent 2 % de la population générale, mais entre 36 et 39 % de la population carcérale sous responsabilité fédérale. Cette réalité est ancrée dans notre passé colonial: les femmes autochtones sont plus souvent traduites en justice, puis emprisonnées pour ce qu'on appelle des « délits de survie » liés à la pauvreté, à un manque d'éducation et de possibilités d'emploi, à la toxicomanie, à des problèmes de santé mentale et à de la violence sexuelle, de la violence physique et des traumatismes dont elles ont été victimes dans le passé. Il est important que le Comité se penche dans son étude sur la façon dont le système carcéral reflète et renforce souvent la répression, la maltraitance et la violence que vivent les femmes autochtones depuis le début de la colonisation.
    J'ai visité des établissements carcéraux dans tout le Canada et en Australie. J'ai aussi visité une prison au Cambodge. L'autoritarisme, le déséquilibre marqué entre les pouvoirs, la violence, la restriction imposée aux mouvements et aux activités, l'isolement, l'absence de liberté d'association et l'imposition de demandes frivoles et arbitraires sont des caractéristiques des prisons qui s'appliquent aussi énormément au colonialisme.
    Les femmes autochtones se retrouvent dans les profondeurs du système carcéral, où elles continuent de subir les pratiques les plus sévères en matière de restrictions pénales. Je parle de classements au niveau de sécurité maximale, de mise en isolement, de transfèrements involontaires, de contraintes physiques, de fouilles à nu, d'isolement cellulaire, de recours à la force, de cellules nues, d'accusations d'infraction disciplinaire, de manque de soins médicaux et de taux élevés de mutilation et de suicide. Lorsqu'une personne se retrouve au plus profond du système pénal — et je ne dis pas cela pour être macabre —, elle n'en ressort généralement pas en vie.
    Les femmes en établissement carcéral ont généralement des stratégies d'adaptation ou compensatoires, comme des crises de colère, la consommation de substances ou la mutilation. Ces comportements sont souvent une réaction à l'environnement carcéral et sont exacerbés par leurs antécédents de maltraitance, de violence et de traumatismes. Lorsque les femmes résistent à l'ordre établi dans les établissements ou sont incapables de s'y adapter, cela est souvent perçu comme du non-respect, une menace pour la sécurité à laquelle on doit opposer une forte répression. En conséquence, les femmes restent incarcérées encore plus longtemps.
    Je vais vous donner deux exemples qui sont apparus dans les médias. Je suis sûr que vous en avez entendu parler.
    Kinew James est décédée d'une crise cardiaque en établissement parce qu'on l'a ignorée une fois de trop après qu'elle a appuyé sur le bouton d'urgence de sa cellule. Au départ, Kinew James purgeait une peine de six ans pour homicide, mais sa peine a été prolongée à 15 ans en raison de la douzaine d'autres accusations qui ont été portées contre elles pendant son incarcération.
    Une autre personne qui a capté l'attention médiatique était Renee Acoby. Sa peine a été prolongée de 21 ans pendant son incarcération. Elle a passé plus de la moitié de son temps en isolement avant de finalement être désignée comme délinquante dangereuse, ce qui fait, au bout du compte, qu'elle restera en prison toute sa vie. Ces exemples sont d'une très grande pertinence en ce qui concerne les femmes autochtones. Leur résistance à la domination ou à la violence font partie de leurs mécanismes de survie dans leur collectivité ou dans leur réserve, peu importe duquel il s'agit.
    Depuis la Commission Brown en 1848, la répression systématique et la brutalité dans les établissements carcéraux continuent d'être un sujet d'intérêt.
(1105)
    Cela fait depuis les années 1960 que nous essayons de trouver des façons de réduire le taux d'incarcération des Autochtones au Canada. Nous avons essayé de renforcer l'intervention pénale, ce qui n'a manifestement pas fonctionné. Ce serait une erreur de continuer à croire que les établissements carcéraux font partie de la solution, qu'ils pourraient aider à réduire la proportion d'Autochtones en incarcération alors qu'il s'agit en réalité d'une partie intrinsèque du problème.
    Il y a des solutions que j'aimerais vous exposer. Elles reflètent le travail considérable que d'autres ont déjà fait dans ce domaine.
    Premièrement, les stratégies de première ligne dirigées par des Autochtones ont davantage d'effets à long terme. Il y a un projet de loi qui a été déposé, le projet de loi C-262, qui prévoit la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Je tiens à féliciter le gouvernement au pouvoir de soutenir ce projet de loi, qui s'aligne sur des recommandations de la Commission de vérité et de réconciliation.
    Nous devons nous assurer de respecter les droits fondamentaux des Autochtones. Je parle de normes nationales de base, comme l'accès à de l'eau potable, à l'électricité, à des emplois, à l'éducation, à des services sociaux, à des soins de santé, etc.
    Deuxièmement, nous devons réduire au minimum et atténuer les impacts néfastes des établissements carcéraux, par exemple l'élimination de la mise en isolement, du moins pour les femmes. D'après ce que j'en sais, l'Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry a lancé un projet pilote sur l'utilisation de mesures de sécurité dynamiques pour remplacer les mesures restrictives, par exemple le recours à la force. Cela pourrait aussi être réalisé grâce à une surveillance externe et indépendante et par l'obligation faite aux personnes compétentes de rendre des comptes. Cela peut se faire par contrôle judiciaire, comme cela est décrit dans le rapport Arbour ou, dans l'intérim, par l'intermédiaire d'un comité de surveillance parlementaire, comme l'a décrit la sénatrice Kim Pate.
    Finalement, nous avons besoin de stratégies de désincarcération et d'options pour que les délinquantes puissent purger leur peine dans la collectivité. La loi offre déjà différents recours: dans la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, les accords convenus en vertu de l'article 29 permettent aux personnes atteintes de problèmes de santé mentale de purger leur peine dans la collectivité. Les accords conclus en vertu des articles 81 et 84 permettent aux détenus autochtones et non autochtones de purger leur peine et d'obtenir une libération conditionnelle dans la collectivité.
    Évidemment, la mise en oeuvre de ces solutions suppose d'y investir les ressources nécessaires. Nous devons renforcer les forces et les capacités propres aux collectivités autochtones — je pourrais vous parler de cela en détail — et faire preuve de créativité dans nos choix.
    Je veux insister sur le fait que les prisons ne font pas disparaître nos problèmes; elles ne font que faire disparaître les gens.
    Je vous remercie énormément de votre attention.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant écouter, pour les sept minutes suivantes, l'exposé de Véronique Picard, de Femmes autochtones du Québec Inc.
    Vous avez sept minutes.

[Français]

     Je remercie le Comité d'avoir invité l'organisation de même que Mme Chartrand de son discours éloquent sur la situation.
    Comme certains d'entre vous le savent peut-être, Femmes autochtones du Québec inc. est un organisme à but non lucratif qui vise à défendre les intérêts des femmes autochtones et à améliorer leurs conditions de vie partout sur le territoire québécois, qu'elles vivent en milieu urbain ou en communauté. Nous le faisons de différentes façons, notamment par la promotion de la non-violence, d'une bonne santé considérée selon une approche holistique et d'une justice accessible et équitable.
    De cette façon, nous sommes appelées à travailler non seulement auprès des femmes issues de diverses nations présentes sur le territoire du Québec, mais aussi auprès d'organisations sur le terrain et d'autres plus grandes, ainsi qu'auprès d'institutions publiques fédérales et provinciales et de représentants gouvernementaux. Notre mission est d'agir en tant que porte-voix de ces femmes auprès des institutions qui ont un effet sur leur vie dans le but de donner la parole à ces femmes qui vivent de l'injustice.
    La croissance fulgurante du nombre de détenues autochtones est un enjeu majeur pour nous puisqu'il touche plusieurs femmes autochtones et inuites au Québec ainsi que leur famille et leur communauté. Les problèmes n'atteignent pas qu'une seule personne.
    D'abord, il est important de comprendre dans quel contexte la judiciarisation et l'incarcération des femmes autochtones a évolué au fil du temps et que la surreprésentation des femmes autochtones dans le système de justice et le système correctionnel répond nécessairement à un cycle intergénérationnel de prise en charge et d'institutionnalisation chez les autochtones. Pour la plupart, il s'agit là d'une continuité dans une histoire de vie commune teintée de traumas et de difficultés, qui tire incidemment son origine de politiques et pratiques coloniales.
    Notre première recommandation en tant qu'organisation qui émane de ce contexte est d'offrir de la formation et des activités de sensibilisation sur l'histoire et les enjeux propres aux peuples autochtones. Cela doit être offert de façon systématique, automatique et obligatoire à l'ensemble des acteurs du milieu de la justice, soit les premiers contacts, les policiers, les avocats, les agents correctionnels, les juges, les agents de programme au sein des institutions, les agents de probation et les différents intervenants dans les maisons de transition. Cela englobe non seulement les enjeux d'hier, mais aussi les enjeux d'aujourd'hui.
    Nous croyons qu'en étant sensibilisés et informés quant à l'histoire et aux enjeux propres aux peuples autochtones, les différents acteurs du système qui travaillent auprès de cette population autochtone judiciarisée pourront améliorer leurs pratiques. Ils contribueront également au changement et à la modification de politiques internes affectant la vie et l'expérience des femmes autochtones au sein des établissements carcéraux.
    À titre indicatif, un commentaire sur cette recommandation avait été apporté par le Bureau de l'enquêteur correctionnel dans son rapport annuel de 2016-2017. Il y était énoncé que Service correctionnel Canada, ou SCC, ne donnait pas de directives ni de formation à ses employés sur la façon dont les antécédents sociaux des autochtones doivent être pris en compte dans les décisions qui sont prises.
    La deuxième recommandation vise à réduire la marginalisation des femmes autochtones dans les prisons, notamment les pénitenciers. Les femmes autochtones sont marginalisées en partie à cause de leur contexte particulier sur les plans sociohistorique et socioéconomique. Cette marginalisation se traduit trop souvent par une augmentation des facteurs de risque, qui sont établis selon les principes d'évaluation du risque. Ces facteurs de risque se manifestent sous la forme de cotes de sécurité plus élevées, par exemple moyenne ou maximale.
    La marginalisation des femmes autochtones et les réalités qui leur sont propres sont considérées comme étant des risques puisque les facteurs de risque sont évalués de façon objective, indépendamment du contexte sociohistorique et socioéconomique de la personne. Les réalités qui touchent à un niveau supérieur les femmes autochtones, comme les traumas intergénérationnels, l'alcoolisme, la violence, les abus, le niveau d'éducation plus faible, la précarité ou la pauvreté, sont nécessairement liées à un niveau de risque plus élevé. Ainsi, les femmes autochtones sont davantage susceptibles d'obtenir une cote de sécurité plus élevée, comme les statistiques disponibles à cet égard le montrent bien.
(1110)
     Nous croyons absolument que ces étiquettes sont un frein à la guérison, à la réadaptation et à la réinsertion de ces femmes. Les pavillons de ressourcement pour les détenues autochtones prévus à l'article 81, qui n'acceptent que des femmes autochtones qui ont une cote de sécurité minimale alors qu'elles représentent une plus faible proportion, en sont un exemple très flagrant.
    Les femmes autochtones qui ont des cotes de sécurité plus élevées et qui ont nécessairement des besoins plus complexes ou plus élevés n'ont pas accès à ce genre de programme. Il est contre-productif d'isoler ces femmes et de ne pas leur offrir le soutien nécessaire. Il faut soit faciliter l'accès à ce type de programme des femmes qui ont des cotes de sécurité plus élevées, soit évaluer le risque des femmes en tenant compte du contexte et des réalités particulières des femmes issues des Premières Nations ou des femmes inuites. Ces ressources sont disponibles. On peut argumenter de leur qualité, mais elles doivent être exploitées à leur plein potentiel.
    La dernière recommandation consiste en la mise en place de services et de ressources culturellement sensibles et pertinents à l'extérieur des institutions carcérales. Les services et les ressources doivent être permanents et disponibles de façon régulière, ce qui n'est pas le cas, du moins au Québec.
    Dans le cas où une libération conditionnelle est octroyée, les maisons de transition sont très peu adaptées pour répondre aux besoins des femmes issues des Premières Nations ou des femmes inuites. En fait, très peu de ressources financières et humaines sont allouées à ces maisons. À titre d'exemple, on pourrait parler de l'embauche d'intervenantes autochtones, mais surtout de la formation complète des intervenants, qu'ils soient autochtones ou non, sur les enjeux autochtones.
    Plus encore, il est important de considérer le fait que plusieurs femmes autochtones ne...
(1115)

[Traduction]

    Cela fait presque sept minutes et demie. J'aimerais vous permettre de continuer, mais, d'un autre côté, j'espère que vous pourrez présenter le reste de votre exposé en réponse à nos questions. Si vous avez des commentaires complémentaires ou si vous voulez nous envoyer le reste de votre exposé, nous pourrions les ajouter au compte rendu également.
    Nous allons maintenant commencer la période de questions. Chaque député dispose de sept minutes au premier tour.
    Nous allons commencer par Emmanuella Lambropoulos. Vous avez sept minutes.

[Français]

    Madame Picard, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
    J'aimerais obtenir un peu plus d'information relativement au système carcéral. Selon vous, quelles sont les barrières existantes, particulièrement en ce qui a trait aux femmes autochtones?
    Une fois que les femmes autochtones entrent dans le système pénal, de quelle façon sont-elles traitées différemment?
    Premièrement, je pense que les femmes et les victimes autochtones sont traitées différemment parce que l'on ne tient pas compte de leurs conditions de vie ou de leur expérience de vie. Leur histoire fait en sorte qu'elles sont victimes de discrimination. Elles ne reçoivent pas nécessairement les services adéquats et disponibles. La prison et le système de justice sont un peu comme un pansement que l'on applique sans vraiment traiter les problèmes que l'on doit voir de façon très holistique. Ils forment un tout qui découle d'années et d'années de colonisation et de discrimination. Ces facteurs ou ces conditions ne sont pas considérés comme un tout.
    Par exemple, lorsqu'un crime est commis, on le voit comme un crime qui est commis et non pas nécessairement comme la partie d'un tout. Quand ces femmes entrent dans le système carcéral, elles n'ont pas forcément accès aux services nécessaires. D'ailleurs, elles n'y ont pas accès lorsqu'elles sortent de prison. C'est le point que je soulève. Il y a très peu de ressources disponibles pour elles, que ce soit en communauté ou en milieu urbain. C'est la situation au Québec, en tout cas. Elles se retrouvent souvent à la dérive. On se demande à quel endroit on devrait référer ces femmes qui ont besoin de services. Nous, nous parlons de guérison. Vous, vous parlez de réadaptation et de réinsertion sociale. Nous parlons de guérison parce qu'il s'agit d'un processus qui vient de loin et qui est nécessaire à la réinsertion sociale.
    Selon moi, le plus grand frein est l'absence de ressources ou le manque de ressources adéquates disponibles, tant en milieu urbain qu'en milieu communautaire. Il y a très peu d'intervenants, et ils sont débordés. Il y a un manque de ressources, de services et évidemment de financement pour les communautés et pour les milieux urbains.
     D'accord.
    Pouvez-vous nous dire s'il y a des pavillons de ressourcement au Québec?
    Il y en a un, mais il est destiné aux hommes.
    Il n'y en a pas pour les femmes.
    Non.
    Pouvez-vous me dire quel pourcentage représentent les femmes autochtones dans les prisons du Québec?
    Je ne dispose pas de ces statistiques.
    Sans m'indiquer le pourcentage, pourriez-vous me dire si ce nombre est assez élevé?
    Comme nous travaillons avec des membres qui proviennent de l'ensemble des nations présentes au Québec, nous savons que cet enjeu touche nos femmes. Elles abordent ces questions directement. En travaillant avec les intervenants qui travaillent davantage au niveau de la communauté, nous voyons que les services nécessaires ne sont pas offerts à ces femmes.
    D'accord, je vous remercie.

[Traduction]

    Ma prochaine question s'adresse à madame Chartrand.
    Vous avez mentionné qu'un grand nombre de problèmes découlent du manque de ressources dans les régions à forte population autochtone, par exemple, dans les réserves. Vous avez dit qu'il serait possible d'améliorer la situation en aidant les collectivités autochtones à se renforcer.
    Je me demandais si vous pouviez nous donner des exemples de ce que nous pourrions faire pour réduire la proportion de femmes qui sont incarcérées.
(1120)
    Bien sûr.
    Entre autres, nous devons avoir recours à des solutions créatives. Ce n'est pas en suivant le mandat du système correctionnel quant à l'évaluation du risque et la gestion des détenus à risque que nous allons trouver un moyen de mettre ces personnes en liberté dans la collectivité. Laissez-moi vous donner un exemple.
    Le foyer de transition pour femmes auquel j'ai travaillé était un foyer de transition pour les femmes victimes de maltraitance. Il s'agissait souvent de femmes autochtones défavorisées. À dire vrai, un grand nombre de ces femmes avaient récemment obtenu leur mise en liberté d'un établissement carcéral.
    Les personnes pauvres ne peuvent pas se payer un endroit convenable où vivre. Souvent, les femmes n'avaient d'autre choix que de vivre dans ce qu'on appelait des « crack shacks » — des cabanes à crack — et vous pouvez vous imaginer, vu le nom, ce que cela supposait. Bien sûr, lorsque vous travaillez aux libérations conditionnelles vous devez aller dans la collectivité pour évaluer les conditions, pour voir si les détenues vont être mises en liberté dans un environnement propice à leur réhabilitation. Mais elles n'en ont pas les moyens. Elles n'ont pas les moyens de vivre ailleurs que dans un environnement où les conditions ne sont pas favorables à leur libération conditionnelle.
    Une solution créative, dans ce genre de cas, serait un foyer de transition. Nous n'avions pas de ressources, alors, pour ainsi dire, nous devions en assumer la responsabilité. S'il vous était possible de financer ce genre de ressources... Les détenues vont demeurer dans ce genre d'environnement, mais nous pourrions leur offrir un plan de secours, et si jamais il leur arrive quelque chose, elles seraient accueillies dans notre foyer — pendant une certaine période — jusqu'à ce qu'on puisse trouver une autre solution.
    Nous devons trouver des solutions créatives qui émanent des collectivités, du travail sur le terrain. Laissez-moi vous donner un autre exemple.
    Présentement, je travaille sur un projet lié aux femmes autochtones disparues et assassinées. Je ne sais pas si vous avez entendu parler de Gladys Radek, mais elle a parcouru le Canada à cinq reprises pour sensibiliser la population et braquer les projecteurs sur ce problème. Les collectivités déploient depuis des années des efforts à ce chapitre, mais de notre côté, nous commençons tout juste.
    Le système de justice pénale a fermé les yeux pendant beaucoup trop longtemps, et c'est pourquoi d'autres ont tenté d'enquêter sur les femmes autochtones disparues et assassinées. Il y a deux étés, nous avons sillonné le Canada pour discuter du travail formidable qui a été fait. Nous avons interviewé des personnes comme Bernadette Smith, la fondatrice de l'organisation Drag the Red. Je ne sais pas si vous la connaissez.
    Ce que cet organisme a fait... Les services policiers ont refusé d'effectuer des recherches dans la rivière Rouge après la découverte du corps de Tina Fontaine. La police a déclaré que ce serait une perte de temps et d'argent, et c'est pourquoi Drag the Red a été lancée, pour fouiller la rivière Rouge. Les recherches se sont avérées peu fructueuses, seulement quelques dents ont été découvertes, mais cela a aussi eu une autre conséquence. En plus de reprendre l'une des fonctions des services policiers, l'organisme a aussi resserré les liens unissant la collectivité. C'est exactement le genre de choses que l'on veut voir dans les collectivités autochtones: une initiative dirigée par des gens autochtones.
    J'ai encore beaucoup d'autres exemples à donner, et, bien sûr, je vais entreprendre d'autres études sur le sujet afin de pouvoir fournir d'autres exemples des capacités des collectivités.
    Excellent.
    Merci beaucoup.
    Continuons. Martin Shields a la parole pour les sept prochaines minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être ici pour nous faire part du trésor de connaissances qu'elles ont.
    Madame Chartrand, vous avez mentionné la façon dont la situation a évolué depuis les années 1960 jusqu'à aujourd'hui. Je sais que c'est beaucoup de temps, mais pourriez-vous nous donner succinctement une idée de ce qui a changé, depuis les années 1960 jusqu'à aujourd'hui, relativement à la proportion de détenues?
    C'est intéressant. J'ai dû lire, pour une autre partie de mon étude, des rapports de prison publiés depuis 1837 et après. Les rapports annuels étaient publiés chaque année. Selon les rapports de 1837 jusque dans les années 1960, on ne voulait pas des Autochtones dans les prisons, du moins, pas dans les établissements fédéraux. Les prisons locales provinciales étaient construites dans les réserves — c'était une mesure de contrôle —, mais les établissements fédéraux étaient réservés aux colons blancs.
    Au cours des années 1960, on a arrêté de fournir des statistiques sur la race. La façon dont le contrôle social était effectué a subi des transformations importantes et profondes. Certaines choses comme l'aversion au risque et les facteurs de risque ont commencé à être élaborées au cours des années 1960. Il n'y avait pas autant d'insistance sur la nationalité. Il semble que l'intérêt était davantage orienté vers l'efficacité des systèmes.
    Bien entendu, c'est au cours de cette période que nous sommes entrés dans l'ère des droits de la personne. C'est aussi à cette époque qu'ont commencé, comme je l'ai dit, l'affaiblissement et le recul des politiques relatives aux Indiens et des politiques d'assimilation. Par la suite, les services d'aide sociale à l'enfance ont commencé à s'occuper davantage de cas d'enfants autochtones. On peut dire que les prisons ont été utilisées comme nouveau mécanisme pour poursuivre le contrôle social exercé sur la population autochtone.
(1125)
    D'autres témoins ont abordé la question du personnel autochtone. Vous êtes-vous penchés là-dessus?
    Que voulez-vous dire?
    Je parle de la dotation en personnel dans le système ayant la responsabilité des femmes autochtones.
    C'est important, selon moi, tout comme je crois qu'il est important que la culture soit présente dans les établissements carcéraux. Je crois que c'est ce genre de choses qui permet d'atténuer au moins une partie des impacts.
    La réalité, d'après ce que j'ai vu, c'est qu'il existe une culture carcérale. Quiconque a déjà arpenté les couloirs d'une prison connaît cette culture. Vous devez éviter de sortir du rang et être solidaire des autres membres du personnel. C'est quelque chose de très important.
    Vous pouvez engager les meilleures personnes au monde pour travailler dans ce genre d'établissement, mais leur travail reste de surveiller d'autres personnes. Leur travail est de les garder emprisonnées. C'est peut-être un peu extrême, mais je trouve que c'est comparable à... Prenons l'esclavage, par exemple. Même les esclavagistes les plus gentils, qui prennent le plus grand soin de leurs esclaves, représentent une institution qui est en elle-même problématique. Même si vous engagez les personnes les plus gentilles au monde, l'institution elle-même va fomenter beaucoup d'hostilité.
    Ce que je comprends de votre réponse, c'est que vous dites qu'on ne peut pas régler ce problème en embauchant des femmes autochtones dans les établissements, à cause du mécanisme de contrôle que vous venez de décrire.
    Si c'était la seule solution, je dirais oui, mais je crois qu'il faudrait surtout regarder les possibilités dans la collectivité.
    Donc, avec la participation des Autochtones eux-mêmes, pouvez-vous nous donner votre conception du modèle?
    Avec les Autochtones...?
    Vous parlez de solutions à l'extérieur des établissements carcéraux. Comment pouvons-nous mobiliser les femmes autochtones de façon à régler les problèmes que ces personnes éprouvent?
    À ce chapitre, vous pouvez prendre exemple sur tout le travail extraordinaire accompli par Mme Picard. Il s'agit d'interventions relatives aux accords conclus en vertu de l'article 81 ou 84, et grâce auxquels une partie des ressources sont déjà en place pour faciliter... pour recevoir et héberger les femmes autochtones.
    De votre point de vue, ce n'est pas votre champ d'expertise. Vous avez mené beaucoup d'études — vous avez mené des études dans les établissements —, mais je voulais savoir si vous aviez des exemples davantage du côté de la prévention.
    Vous voulez dire, pour les femmes qui sont incarcérées?
    Oui.
    Ce qui conviendrait serait d'adopter des stratégies de première ligne pour les ressources fondamentales. Quand nous nous sommes rendus dans les collectivités, soit il n'y avait pas d'eau courante, soit il n'y avait pas de nourriture. Comment peut-on s'attendre à ce que les gens s'épanouissent quand ils ne peuvent même pas répondre à leurs besoins fondamentaux?
    Cela revient donc, d'une certaine façon, à déployer des efforts du côté des déterminants sociaux de la santé de façon préalable afin de prévenir leur incarcération.
    Oui. Il y a trois volets. En premier, il y a les déterminants sociaux. Ensuite, il faut atténuer les problèmes. En troisième, il y a les options dans la collectivité, comme ce que fait Mme Picard.
    Oui, d'accord.
    Allons voir du côté du Québec.
    Vous avez évoqué l'idée de recourir à du personnel autochtone. C'est le terme que vous avez utilisé. Où croyez-vous que cela peut se faire? Vous avez dit que ce serait une chose à faire.

[Français]

     Je ne parlerais pas de recourir à du personnel autochtone. Pour ce qui est des ressources externes, j'ai bien aimé ce qu'a dit madame, à savoir que cela pourrait être pris en charge par la communauté. Cependant, il faut les éléments nécessaires. Il faut que la communauté soit capable d'assumer ce genre de prise en charge, de ressources et de soutien, mais il faut également qu'elle ait les ressources nécessaires pour le faire. Il s'agit donc de ressources humaines et financières. En outre, il faut du logement, ce dont certaines communautés sont totalement dépourvues.
    Il faut aussi qu'il n'y ait pas d'autres priorités, c'est-à-dire de besoins essentiels comme le logement. À plusieurs égards, la communauté peut être impliquée. Je pense ici aux pavillons de ressourcement. On peut adopter la même formule, mais en communauté, avec des services appropriés et culturellement sensibles. On peut penser ici aux cercles de partage, par exemple.
(1130)

[Traduction]

    Mais pour en revenir à ma question, je veux savoir « qui ».
    C'était peut-être à cause de l'interprète, mais j'ai écrit que vous aviez parlé du « personnel autochtone ». Mais peut-être était-ce une erreur de l'interprète, et non ce que vous avez dit.
    J'aimerais savoir « qui ». Qui sont les éléments essentiels de...?
    Vous avez abordé d'excellentes idées, mais il semble que mon temps soit écoulé.
    C'est bien le cas, mais peut-être pourrons-nous y revenir plus tard.
    La parole va maintenant à Sheila Malcolmson pour les sept prochaines minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à nos deux témoins.
    J'espère que vous serez en mesure de nous brosser un portrait de la situation qui remonte encore plus tôt, en ce qui concerne les facteurs initiaux qui font que les femmes autochtones ont des démêlés avec le système judiciaire et se retrouvent incarcérées. J'aimerais aussi savoir quels sont les dommages collatéraux pour la famille élargie. Cela peut-il avoir pour effet de perpétuer les interactions avec le système judiciaire et le système pénal?
    Je suis députée de Colombie-Britannique. Il s'y est produit des histoires horribles, encore et encore, de traumatismes et de violence sexuelle concernant exclusivement les femmes qui vivent dans la pauvreté en Colombie-Britannique. Beaucoup d'entre elles sont des femmes autochtones qui sont vulnérables; l'injustice économique dont elles sont victimes les place dans une situation dangereuse. Les traumatismes qu'elles subissent peuvent les pousser à la toxicomanie, ce qui peut empirer leurs démêlés avec le système de justice pénale.
    Pouvez-vous nous parler davantage de l'histoire et de ce cycle de la violence ainsi que de l'effet que cela peut avoir sur les prochaines générations?
    Je pose ma question aux deux témoins, Vicki Chartrand de l'Université Bishop et Véronique Picard, de Femmes autochtones du Québec.

[Français]

    C'était une longue question, que je ne suis pas certaine d'avoir parfaitement comprise.
    Pour ce qui est de mettre fin au cycle de la violence, je crois qu'on en revient toujours aux ressources et au soutien. De plus en plus, nous parlons aux femmes, dans nos communautés, et les incitons à briser le silence qui entoure ce cycle de violence, qui découle d'un passé de violence. La première étape consiste à en parler, et c'est ce que nous faisons de plus en plus. Or l'absence de services disponibles, que ce soit dans les communautés, à l'extérieur de ces dernières ou en milieu urbain, demeure un problème. Beaucoup de nos femmes se retrouvent à Montréal et ont accès à très peu de ressources. Je crois que le problème, au départ, repose sur le peu de ressources et de financement alloués. Il y a beaucoup d'autres difficultés et cela fait en sorte qu'on met de côté ce grand problème, qui englobe bien des choses et qu'il faut voir d'un point de vue holistique. Selon moi, c'est avant tout à cela qu'il faut s'attaquer.
    On parlait plus tôt des communautés et des personnes à qui l'on pouvait s'adresser. Je pense qu'il est important de communiquer avec les communautés. Certaines d'entre elles sont tout à fait en mesure d'offrir ce genre de ressources et d'encadrement. D'autres en seraient tout à fait capables, mais, dans le cas de certains services, manquent de ressources humaines et financières. En milieu urbain, la situation est exactement la même. En outre, comme les femmes y sont très isolées, elles risquent davantage de subir certaines formes de violence. Même lorsque ces femmes en sont victimes, les policiers, notamment, peuvent faire preuve de beaucoup de discrimination à leur endroit. Par conséquent, une certaine méfiance se développe.
    Pour ma part, je crois que tout tourne autour des services et des ressources auxquels les femmes autochtones peuvent accéder, qu'elles soient en communauté ou en milieu urbain.

[Traduction]

    Merci.
    Peut-être pourrais-je préciser ma question un peu plus. Nous sommes encore au début de notre étude. J'aimerais que vous nous donniez une idée de ce cycle de la violence, afin que nous puissions trouver des façons de le briser. Donnez-nous simplement une image. Comment les femmes entrent-elles dans ce système, et en sortent-elles grandies?
(1135)
    J'ai une amie en Colombie-Britannique avec qui j'ai parlé. Elle est Carrier-Sekani. Sa soeur est en prison pour meurtre actuellement. Je vais vous raconter l'histoire.
    L'histoire commence avec leur père qui les maltraitait. Elles vivaient dans une famille où il y avait beaucoup de mauvais traitements. La mère buvait beaucoup. Elle a le cancer maintenant, alors elles risquent de perdre leur mère. Sa soeur boit aussi, et son conjoint est aussi violent envers elle. À un moment donné, on lui enlève la garde de ses deux enfants, ce qui exacerbe son alcoolisme. Une nuit, alors qu'ils sont sortis boire et peut-être prendre de la drogue, une dispute éclate. Ce qui devait arriver arriva... Elle avait un couteau de poche avec elle et elle... pardon, elle avait une connaissance avec elle, et son conjoint a été poignardé. Elle s'est fait arrêter. Elle n'a pas voulu parler à un avocat, parce qu'elle ne voulait pas avoir à penser à tout cela, à revivre cette soirée. Elle n'a donc pas pu se défendre en disant que c'était de l'autodéfense, qu'elle avait été provoquée ou quelque chose du genre. Elle va passer le reste de sa vie en prison. Le juge va la condamner à perpétuité. Tout cela s'est passé très vite, mais c'est très commun.
    Ces gens pourraient vous parler des interventions policières excessives qui se font dans les collectivités autochtones, et du manque de sensibilité. Il n'y a pas de fin. Ce serait peut-être une bonne expérience pour vous d'aller passer une journée « dans la peau de », d'aller dans les collectivités ou même d'aller dans les prisons, juste pour parler aux gens et prendre conscience de ce qu'ils ont vécu. Ce serait une expérience précieuse.
    J'ai essayé de visiter certains établissements carcéraux, mais on m'a refusé l'accès. Cependant, les établissements carcéraux doivent admettre les juges et les parlementaires, alors je vous encouragerais énormément à aller visiter une prison, en particulier une prison à sécurité maximale. Allez voir comment c'est; c'est intense.
    L'une ou l'autre d'entre vous pourrait-elle aborder le sujet de la responsabilité fédérale? Il arrive qu'il s'agisse d'établissements provinciaux, mais puisqu'il s'agit de femmes autochtones, les établissements fédéraux ont-ils un rôle spécial à jouer?
    Répondez très brièvement...
    C'est le cas, en vertu de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Je ne me rappelle plus de quel article il s'agit; peut-être l'article 33. Effectivement, les établissements fédéraux doivent fournir des interventions adaptées à la culture des Autochtones.
    Merci beaucoup.
    La parole va maintenant à Eva Nassif pour les sept prochaines minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie beaucoup de vos témoignages.
    Avez-vous travaillé avec des femmes autochtones ou pouvez-vous nous citer des témoignages de personnes qui ont travaillé avec elles après leur sortie de prison?
    En fait, quand il est question d'expériences de vie ou d'histoires de vie commune, que ce soit au sujet d'incarcération ou de problèmes avec la justice, dans le cas de plusieurs femmes autochtones, cela ne se rend pas jusqu'à l'incarcération. Cela dit, oui, nous en parlons.
    Les femmes qui ont fait partie de ce système, en tant que coupables ou présumées coupables ou en tant que victimes, nous contactent. Effectivement, nous avons de l'expérience avec ces femmes. De plus, nous avons beaucoup de contacts avec des organisations qui travaillent davantage sur le terrain, c'est-à-dire directement avec les femmes en situation d'itinérance, par exemple, ou avec des femmes qui sont prises dans ce système de justice.
    Pourriez-vous nous parler brièvement des types de services, d'ordre général ou culturel, qui existent pour ces femmes, afin de favoriser leur intégration à la suite de leur sortie de prison?
     Je dirais qu'il n'y a pas de services continus. Certains services et programmes existent, notamment à Montréal, mais ils ne sont pas réguliers ou permanents. Ils sont mis sur pied, mais, faute de financement ou de ressources, ils disparaissent assez rapidement. La présence régulière et permanente de programmes ou de services est ce qui fait défaut. Certaines organisations travaillent auprès des populations autochtones judiciarisées, notamment à Montréal, mais elles disposent de très peu de ressources humaines et financières pour accomplir leur travail. Par conséquent, les services sont offerts de façon sporadique. Il arrive donc que ces femmes reçoivent un service, mais que celui-ci soit interrompu deux mois plus tard. Le manque de permanence et de régularité est absolument un frein. C'est un obstacle important.
(1140)
    Vous avez mentionné à plusieurs reprises le manque de services, mais j'aimerais également que vous nous donniez un aperçu de ce que représente le système carcéral pour les femmes qui ont témoigné devant vous.
    Vous voulez savoir ce que le système carcéral représente pour ces femmes?
    Oui.
    À bien des égards, il s'agit d'une expérience négative. Elles se sentent très démunies, surtout lorsqu'elles sortent de prison. Le sentiment de honte est très présent chez elles. Certaines décident de ne pas réintégrer leur communauté. En effet, comme on le sait, ce sont de petites communautés où tout le monde se connaît et se parle. Elles se retrouvent donc en ville dans une situation précaire. Comme elles sont plutôt vulnérables, elles risquent de retomber assez rapidement dans un engrenage judiciaire.
    Par contre, à d'autres égards, on nous a dit que certaines femmes se sentaient plus à l'aise lorsqu'elles étaient incarcérées en raison du manque de ressources qu'elles avaient connu lorsqu'elles étaient hors de la prison.
    Il y a donc deux réalités, mais elles sont toutes deux très négatives. Elles sont liées au manque de services et de ressources qui existe à l'extérieur du système carcéral.
    Vous avez parlé d'un manque de services, de financement et de ressources. Nous savons que le gouvernement pourrait faire quelque chose à cet égard.
    Selon vous, quel rôle le gouvernement fédéral pourrait-il jouer afin de faciliter l'accès de ces femmes autochtones aux services judiciaires?
    En premier lieu, il faut être à l'écoute de ces femmes et prendre conscience de leurs besoins. Mme Chartrand a bien exprimé la chose lorsqu'elle a dit qu'il fallait avant tout discuter directement avec des femmes autochtones qui ont eu affaire au système de justice, des femmes qui ont été incarcérées, des femmes qui le sont encore et des femmes qui s'en sont sorties. J'entends par là qu'elles se sont sorties de ce cercle vicieux.
    Vous pouvez bien écouter les propos d'experts, de spécialistes ou d'organisations comme la nôtre qui travaillent directement avec ces femmes, mais ils ne seront jamais aussi poignants que ceux de ces femmes, qui pourront vous parler de leurs besoins communautaires, personnels, et ainsi de suite.
    Madame Chartrand, vous avez parlé d'un projet de recherche qui portait « sur les liens historiques entre les logiques pénale et coloniale pour comprendre l’incarcération des Autochtones au Canada ».
    Pourriez-vous nous dire ce que vous entendez par « logiques pénale et coloniale »?

[Traduction]

    Oui, c'est une bonne question.
    « Pénal » veut dire « punitif » et « colonial » renvoie à l'exploitation par les Européens des Autochtones de certains pays comme le Canada, la Nouvelle-Zélande et l'Australie au cours de l'histoire. Cela veut dire que les colons sont venus coloniser une région, s'y sont installés, et ont cherché à éliminer les cultures, les systèmes et la gouvernance qui y existaient déjà. Voilà ce que je veux dire par logique pénale et coloniale. Il y a des parallèles entre les deux en ce qui a trait à l'assimilation, la rééducation et la réhabilitation.

[Français]

     Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à notre deuxième période de questions, de cinq minutes. Nous commençons avec Rachael Harder.
    Merci énormément d'avoir pris le temps d'être parmi nous aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Je crois que la plupart de mes questions vont s'adresser à vous deux. Si vous le permettez, je vais toutefois adresser ma première question à Véronique.
    Vous parlez de ressources communautaires et du fait que les femmes autochtones ont besoin de pouvoir accéder à ces ressources une fois qu'elles sortent du système carcéral, afin de favoriser leur réhabilitation et qu'elles réussissent leur réinsertion sociale.
    Avez-vous été témoins de cas où l'utilisation d'une obligation communautaire a bien fonctionné? Je veux dire, existe-t-il une collectivité où le gouvernement a donné de l'argent à une organisation pour mettre en oeuvre un programme pour aider ces femmes qui sortent du système carcéral et où les organismes qui lancent ces programmes — en général, ce sont des organismes sans but lucratif qui s'en occupent — devraient rendre des comptes au sujet des résultats? En d'autres mots, combien de femmes qui participent au programme finissent par être réincarcérées en comparaison des autres anciennes détenues? Cela permettrait peut-être aussi d'étudier d'autres facteurs du même coup.
    Essentiellement, l'idée serait d'utiliser une obligation communautaire pour aider ces femmes à prendre un nouveau départ dans la société canadienne. Je me demande si vous avez déjà été témoin d'endroits où cela fonctionne, si vous avez des exemples à nous donner ou si vous pouviez nous dire si vous croyez que ce modèle pourrait fonctionner.
(1145)

[Français]

    Je connais plusieurs histoires de réinsertion. Je dois dire que je préfère le mot « guérison », même si le mot « réinsertion » cadre mieux dans ce système. Nous, nous parlons toujours de guérison. Comme il s'agit d'un processus, c'est difficilement mesurable.
     Des activités bénéfiques, comme un cercle de partage sont offertes par le Centre d'amitié autochtone de Montréal, par exemple. Je crois que les lacunes résident dans le manque de permanence de ces services. Ces services devraient aussi être dirigés spécifiquement vers la population qui a été incarcérée, par exemple vers les femmes incarcérées. Certains services existants sont très bien pour les femmes en général et pourraient intégrer des services plus adaptés sur le plan culturel.
    L'exemple de la maison de transition de la Société Elizabeth Fry peut être pertinent, sauf qu'il existe une lacune relativement au manque de services culturellement adaptés pour les femmes autochtones qui étaient incarcérées. Des services existent, mais elles ne sont pas toujours pertinentes pour les femmes autochtones. Vont-elles sentir qu'elles font partie de quelque chose? Vont-elles sentir qu'on ne les juge pas?
    Nous pensons toujours dans un esprit de guérison et non pas dans un esprit de réinsertion. La réinsertion, cela peut avoir plusieurs sens selon les personnes. Même si c'est difficilement mesurable, si la personne amorce un processus de guérison ou si elle se dit qu'elle a complété son processus de guérison, c'est un succès.

[Traduction]

    Merci.
    Par respect, j'aimerais que Vicki puisse aussi répondre à la question.
    D'après vous, ou d'après vos recherches, croyez-vous que c'est quelque chose qui devrait ou qui pourrait être fait?
    Je me ferai l'écho de ce que Mme Picard disait; pour l'instant, à ce que je sache, il n'y a qu'un seul établissement visé à l'article 81 pour les femmes — un pavillon de ressourcement pour femmes —, et il se trouve en Alberta. Il y a ensuite un pavillon de ressourcement dirigé par le SCC, et il se trouve en Saskatchewan.
    Pour en revenir à la notion de résultat, c'est vraiment différent d'une personne à une autre, et nous devons accepter la personne comme elle est lorsqu'elle se présente. Nous avons certaines exigences, à la maison de transition... nous voulons que les gens, s'ils le désirent, puissent suivre un cours, trouver un emploi, cessent de consommer ou s'engagent à suivre une formation en gestion du risque ou sur les méfaits de la toxicomanie, et ainsi de suite. Toutefois, nous les rencontrons tous les jours et nous leur disons: « Bonjour, comment ça va aujourd'hui? »
    Si les délinquantes devaient revenir chez nous 100 fois, parce qu'elles avaient récidivé, peu importe, je leur dirais bonjour les 100 fois. Je les accueille lorsqu'elles reviennent pour obtenir des services, et je les accepte telles qu'elles sont à ce moment-là. Le fait de savoir qu'elles doivent réussir leur réinsertion sociale et que, si elles récidivent, elles seront accusées de non-respect et retourneront en prison, semble les prédisposer à échouer. Vous faites en sorte qu'elles échouent.
(1150)
    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant poursuivre avec Marc Serré, pour cinq minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos deux témoins de leur travail et de leur passion. Évidemment, il reste encore beaucoup de chemin à faire.
    Ma première question s'adresse à Mme Picard.
    Sur son site Web, l'organisation que vous représentez indique qu'elle dénonce la Loi sur les Indiens, parce que cette dernière est injuste. Avez-vous des recommandations précises à proposer pour améliorer la Loi sur les Indiens, surtout en ce qui concerne le volet particulier de la justice?
    Je tiens à dire que je suis entièrement d'accord sur votre position.
    Pour ce qui est de la Loi sur les Indiens, nous avons toujours été très catégoriques relativement à son utilité en tant qu'outil d'assimilation. De plus, les femmes souffrent davantage de discrimination.
    Nous avons soumis plusieurs recommandations d'amendements, quand il y en a, et de modifications qui devraient être apportées à l'article 6, par exemple. C'est surtout cet article qui nous touche de façon particulière.
    À notre avis, le débat entourant la Loi sur les Indiens est très large. Toutefois, nous avons toujours dit que la discrimination basée sur le sexe, c'est aussi de la discrimination. Nous ne tenons pas vraiment compte de fait que des femmes auraient perdu leur statut et qu'elles n'auraient donc plus accès à ce genre de services. À nos yeux, une femme qui dit être une Autochtone est une Autochtone, mais elle ne l'est pas aux yeux d'une telle loi.
    Par contre, elle n'a pas nécessairement accès aux services et aux ressources de sa communauté si elle a des besoins en matière de justice, de santé, de dénonciations ou de consultations, par exemple.
    Je ne sais pas dans quel sens vous demandiez quelles modifications on devrait apporter à la Loi sur les Indiens, mais...
    C'est très bien. Vous avez abordé les éléments sur lesquels nous devons nous pencher.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Chartrand.

[Traduction]

    Vous avez fait référence entre autres publications au rapport Corston publié en 2007 au Royaume-Uni, qui s'intéressait au système carcéral et examinait une approche axée sur les femmes en proposant quelques recommandations et pistes de réflexion.
    Pensez-vous que nous devrions mettre en oeuvre ici l'une ou l'autre des recommandations qui ont été adoptées au Royaume-Uni et quelques-unes des stratégies proposées pour les femmes autochtones dans le système correctionnel du Canada?
    Oui, en effet, il faudrait mettre en oeuvre les recommandations relatives aux stratégies de désincarcération. Ce serait surtout celles-là. Loin de moi l'idée d'affirmer que je suis une experte du rapport Corston — je m'intéresse davantage à ce qui se fait au Canada —, mais il faudrait mettre l'accent sur la désincarcération.
    Seriez-vous en mesure de nous faire parvenir un peu plus tard quelques recommandations inspirées de celles du rapport Corston?
    Oui, bien sûr.
    Merci.
    La prochaine question s'adresse aux deux témoins.
    Dans le budget de 2017 — j'aimerais tout simplement que vous me disiez si cette mesure a été bénéfique —, nous avons versé 65 millions de dollars à Sécurité publique pour les collectivités autochtones dans le système de justice. Nous avons aussi versé 50 millions de dollars au Service correctionnel pour la santé mentale. Avez-vous vu les bénéfices de ce budget? Avez-vous des commentaires à faire au sujet des investissements qui viennent d'être consentis dans le budget de 2017?
    Je m'excuse, pourriez-vous rapidement répéter ces chiffres?
    C'était une somme de 65 millions de dollars pour Sécurité publique, pour les collectivités autochtones dans le système de justice, et une somme de 50 millions de dollars pour le Service correctionnel au chapitre de la Santé mentale. Ce sont les chiffres globaux.
    D'accord.
    Selon ce que j'en sais, le Service correctionnel a mis sur pied de nouveaux programmes dans le domaine de la santé mentale. Il a aussi reporté une partie de ce financement.
    J'ai écouté ce qu'ont dit les responsables du Bureau de l'enquêteur correctionnel. Ils ont dit qu'ils comptaient 700 places pour des prisonniers ayant besoin de soins psychiatriques et qu'ils ont utilisé les deux tiers de ces places pour des prisonniers qui avaient besoin de soins intermédiaires. Je sais qu'ils avaient besoin de ces 700 places et qu'en fait, ils en avaient besoin de plus. Il me semble qu'ils ne répondent pas de manière efficace aux besoins en santé mentale des gens, sans parler du fait que le système carcéral en soi crée de nombreux problèmes de santé mentale.
    Je sais que les intervenants de Sécurité publique se sont beaucoup investis dans un grand nombre de stratégies de première ligne et qu'ils ont collaboré avec les collectivités. Je sais qu'ils participent à ce qu'on appelle les plans de sécurité, avec les collectivités, qui visent tout simplement à mettre en place certaines mesures auxquelles les gens peuvent recourir pour rester en sécurité.
    Une partie du problème, à ce chapitre, c'est que...
    Je m'excuse, je dois conclure. D'accord.
(1155)
    Si vous avez des commentaires supplémentaires à présenter, vous pouvez toujours nous faire parvenir un document. Les questions étaient excellentes, et c'est pourquoi je vous dis un grand merci.
    Nous passons maintenant à Rachael Harder, pour la dernière série de questions de cinq minutes.
    Merci beaucoup.
    C'est à vous que je vais poser ma première question, madame Chartrand. Vous pourriez peut-être parler un peu de la situation des femmes autochtones. Nous savons bien sûr que la plupart d'entre elles ont été des victimes de crimes avant d'en commettre elles-mêmes.
    J'aimerais savoir ce qu'il serait possible de faire, à votre avis, pour que le processus de guérison se poursuive jusqu'au bout, pour que nous puissions nous assurer que ces femmes sont bien prises en charge et qu'elles poursuivent le processus de guérison, avant même d'aboutir dans un pénitencier ou une prison.
    Puis-je demander à Mme Picard de répondre?
    Bien sûr.
    Patricia Monture, aujourd'hui décédée, avait dit: « Redonnez-moi mon peuple. » Je crois qu'il est très important de comprendre que les Autochtones guérissent au sein de leurs collectivités.
    Bien sûr.

[Français]

     C'est une question importante.
    Commettre des crimes peut faire partie du processus de guérison. Tout tourne autour de l'histoire. Tout à l'heure, nous avons parlé du cycle de la violence. Cela part des pensionnats autochtones et des traumatismes intergénérationnels. Nous reproduisons ce que nous avons subi. À mon avis, il va s'écouler plusieurs années avant de s'en sortir.
    La première chose à faire, c'est d'en parler et de briser le silence. De plus, il faut que les institutions offrent les ressources et les services nécessaires dans les communautés pour répondre à ce bris de silence, pour répondre aux personnes qui veulent entamer ce processus de guérison. Je ne dirais pas qu'il s'agit d'un changement culturel, parce que cela ne fait pas partie de la culture, toutefois, un changement de mentalité doit avoir lieu au sein même des communautés.
    C'est difficile de dire ce qu'il faudrait faire pour prévenir le crime. Je pense qu'il faut s'en tenir à la base. Par exemple, dans certaines communautés, il y a des problèmes de logement. Ainsi, plusieurs personnes sont entassées dans le même logement, parce qu'il y en a très peu. Ce genre de situation peut certainement entraîner plus de crimes. Il y a plus de personnes et ce sont des situations de précarité. Dans certaines communautés, les éléments qui sont à la base même des conditions de vie minimales nécessaires à l'épanouissement d'une population ne sont pas présents. Je pense que cela commence là. Sur le plan des ressources, il y a encore des lacunes.

[Traduction]

    Merci.
    Je vais laisser mon collègue poser une question.
    Je crois que vous nous avez ramenés à ce que je disais un peu plus tôt. À mon avis, le nom qui sera le plus important, à partir de maintenant, c'est « qui », parce que, quand nous nous tournons vers quelqu'un d'autre pour dire « nous avons besoin de ressources » ou vers quelqu'un d'autre encore pour lui demander de « résoudre le problème », c'est là que nous avons des problèmes. Il faut que quelqu'un décide qui sera ce « qui », et c'est ici qu'il vous faudra définir ce « qui ».
    Je vous ai posé la question, et nous n'avons plus de temps, mais qui est ce « qui »? Le but est peut-être éloigné, mais qui a la plus grande importance dans la solution de ce problème?

[Français]

    Je crois que, à la base, il s'agit toujours des communautés.
    Ce sont les communautés qui ont cette responsabilité, cependant, il y a une relation entre la réconciliation et des choses comme cela. Selon moi, il faut faire la part des choses. Cela vient des communautés, mais je pense que certains problèmes des communautés requièrent obligatoirement des ressources, qu'elles soient financières ou autres. À certains égards, plusieurs communautés travaillent fort pour améliorer les services et les conditions de vie de leur population, mais il y a très peu d'intervenants. Ceux-ci sont donc débordés, parce que les communautés ne possèdent pas les ressources nécessaires pour en engager plusieurs. Sur le plan des services, il n'y en a pas beaucoup. Je pense que la responsabilité est difficile à évaluer. Je dirais que la communauté doit...
(1200)

[Traduction]

    Nous allons devoir conclure. Merci beaucoup.
    Je tiens à remercier vivement les deux témoins, Mmes Vicki Chartrand et Véronique Picard, de leur participation.
    Nous allons prendre une pause d'environ deux minutes pendant que les nouveaux témoins arrivent. La séance est suspendue pour deux minutes.
    Merci.
(1200)

(1200)
    Nous reprenons notre étude. Je demanderais à tout le monde de bien vouloir s'asseoir.
    Nous recevons trois nouveaux témoins. Nous accueillons Jonathan Rudin, des Aboriginal Legal Services of Toronto, Melanie Omeniho, du Ralliement national des Métis, et Felice Yuen, de l'Université Concordia.
    Pour commencer, vous aurez chacun sept minutes pour faire une déclaration préliminaire. Nous commençons par Jonathan, pour sept minutes.
    Merci. Merci au Comité de m'avoir invité à comparaître.
    Je travaille en effet pour les Aboriginal Legal Services, mais j'aimerais vous dire son nom en ojibwa. Nous avons demandé un nom à l'aînée Jackie Lavalley. Nous lui avons donné du tabac et nous lui avons demandé de nous donner un nom. Le nom que nous avons reçu, c'est Gaa Kina Gwai Wabaama Debwewin, un nom que les traducteurs ne peuvent pas traduire. Il signifie en fait: « tous ceux qui recherchent la vérité ».
    Ce nom ne signifie donc pas, évidemment que nous possédons la vérité; il signifie que, dans tous les aspects de notre travail, nous nous efforçons d'aider les gens à découvrir la vérité. Il s'agit parfois des personnes avec qui nous travaillons, d'autres fois, des tribunaux devant lesquels nous comparaissons, et j'espère que les exposés que nous allons vous présenter aujourd'hui et les discussions qui s'ensuivront vous aideront dans votre quête.
    J'aimerais présenter trois points. Le premier point dont je veux parler concerne le rôle du Parlement au moment de trouver une solution à la surreprésentation des femmes autochtones au sein de la population carcérale.
    Avant de penser à ce que font la Commission des libérations conditionnelles ou le SCC, nous devons penser au fait qu'il existe encore des sentences minimales obligatoires qui empêchent les juges d'infliger aux femmes autochtones les peines qu'ils voudraient leur infliger. Certaines dispositions empêchent encore les juges de recourir à des peines avec sursis, lesquelles évitent l'incarcération aux femmes.
    Nous sommes en plein milieu d'une contestation de la Charte liée au cas d'une femme autochtone accusée d'avoir importé de la drogue au Canada. Elle fait face à une sentence minimale de deux ans. Malheureusement, bien que le gouvernement actuel ait promis de modifier le Code criminel, aucun changement n'a encore été apporté. Sans notre intervention et l'intervention de son avocat, cette dame purgerait actuellement une peine de ressort fédéral. Le Parlement peut prendre des mesures immédiates. C'est ce que nous recommandons, car il est grand temps de le faire.
    Il n'y a pas seulement les peines minimales obligatoires. Il y a aussi les restrictions qui accompagnent les peines avec sursis. Une étude réalisée par Ryan Newell fait l'objet d'un article intitulé « Making Matters Worse ». L'article a paru dans le Osgoode Hall Law Journal. Je peux vous envoyer les renseignements relatifs à ce site.
    L'auteur fait état de la recherche effectuée par une universitaire qui s'intéressait à la façon dont les tribunaux s'appuyaient sur les arrêts Gladue et Ipeelee au moment de déterminer la peine à infliger aux femmes autochtones. L'universitaire a relevé 31 cas de femmes autochtones qui avaient reçu une peine avec sursis. Après l'adoption de la Loi sur la sécurité des rues et des communautés, en 2012, 29 des femmes de ce groupe n'auraient pas eu droit à une peine avec sursis, ce qui veut dire qu'elles auraient probablement toutes abouti en prison.
    La première chose que nous implorons votre comité de recommander ou encore de faire, c'est d'amener le gouvernement actuel à adopter la loi qu'il avait promis d'adopter pour redonner aux juges leur pouvoir discrétionnaire de façon qu'ils puissent déterminer une peine sans avoir à se charger du fardeau des peines minimales obligatoires et des restrictions relatives aux peines avec sursis.
    Mon deuxième point a trait aux programmes destinés aux femmes autochtones. Je sais que vous avez entendu des témoins du Service correctionnel du Canada et qu'ils ont parlé du programme des Sentiers autochtones en disant que des aînées étaient disponibles pour aider les femmes autochtones désirant utiliser ce service.
    Ce sont de bonnes initiatives, mais le problème des initiatives du SCC, c'est qu'elles ne sont offertes qu'aux délinquantes autochtones prêtes à participer aux programmes traditionnels. Certaines des délinquantes autochtones emprisonnées ne sont pas intéressées par les programmes traditionnels. Certaines délinquantes autochtones qui respectent la tradition ne veulent pas participer au programme offert dans leur établissement parce que les aînées de leur établissement ne respectent pas leurs pratiques traditionnelles. C'est comme si ces femmes n'étaient pas des Autochtones, puisqu'aucun service ne leur est offert.
    Il faut que des programmes soient élaborés en fonction du besoin de toutes les femmes autochtones, non pas seulement les femmes autochtones qui correspondent au stéréotype entretenu par le SCC sur ce que doivent être les femmes autochtones.
    Nous offrons notre appui à une initiative de Toronto qui s'appelle « Thunder Woman Healing Lodge »; et il s'agit d'un pavillon de ressourcement. Son objectif, c'est de réunir dans un même pavillon de ressourcement pour femmes autochtones de Toronto les délinquantes visées par les articles 81 et 84, puisqu'il n'existe aucune autre option de ce type, en Ontario. Le programme sera offert à toutes les délinquantes autochtones et saura répondre à tous leurs besoins. Nous ne pouvons pas nous contenter de dire à une Autochtone qu'elle aura droit à un service parce qu'elle correspond à l'idée que l'on se fait d'une femme autochtone et que d'autres n'y auront pas droit parce qu'elles n'y correspondent pas.
(1205)
    La troisième chose que je voulais dire a trait à la Commission des libérations conditionnelles du Canada. Je sais que vous avez reçu des témoins de la Commission des libérations conditionnelles du Canada et qu'ils vous ont parlé des audiences de libération conditionnelle qui se déroulaient avec le soutien des aînés. C'est bien beau d'offrir le soutien des aînés pendant une audience de libération conditionnelle au sens où le déroulement de cette audience sera peut-être mieux adapté à la culture, mais cela ne règle pas le problème touchant l'information qu'ont en main les commissaires à propos de la délinquante qui comparaît devant eux. Le problème auquel nous sommes aujourd'hui confrontés, c'est que lorsqu'une délinquante autochtone demande une libération conditionnelle, la Commission des libérations conditionnelles n'a accès qu'à l'information recueillie essentiellement par le SCC et par le personnel du SCC, et c'est la seule information qui existe à leur sujet.
    La Commission des libérations conditionnelles et le SCC ne se sont pas attaqués adéquatement, entre autres, au problème touchant la manière de présenter des rapports Gladue. Notre organisme présente ces rapports depuis au moins 2001. Comment pouvons-nous communiquer cette information à la Commission des libérations conditionnelles de façon que cette dernière ait accès à une autre source d'information, à un autre point de vue sur la situation des délinquantes autochtones qui comparaissent devant elle?
    C'était ma déclaration préliminaire. Merci.
(1210)
    Merci beaucoup.
    Nous donnons maintenant la parole à Melanie, pour sept minutes.
    Bonjour. Je remercie moi aussi le Comité de nous avoir invités à venir témoigner ici aujourd'hui. J'aimerais dire pour commencer que rien ne devait être fait sans nous. C'est une de mes expressions favorites, étant donné que les Métis sont souvent laissés pour compte.
    Plusieurs exposés ont déjà été présentés, et l'un de mes préférés porte sur l'exposition Un peuple dans l'ombre, où vous avez pu voir les illustrations et toutes sortes d'images de la nation métisse, qui existe depuis maintenant des décennies; personne ne veut vraiment parler de notre situation, et nous ne figurons jamais à l'ordre du jour, nous ne sommes jamais invités à la table, jamais. C'est pourquoi j'apprécie le fait que vous ayez décidé de nous inviter à participer.
    J'aimerais en apprendre davantage, par exemple sur ce que votre comité et d'autres envisagez de faire au sujet des femmes autochtones incarcérées. Il y aura beaucoup à dire pendant les discussions quant aux enjeux qui les affectent et qui les touchent, mais je vais parler uniquement des enjeux qui concernent les Métis.
    Vous devez savoir qui nous sommes et d'où nous venons pour comprendre qu'une bonne partie des programmes et des activités offerts en milieu correctionnel et par d'autres moyens nous mettent souvent de côté. Nous voulons nous assurer que, dans le cadre de ce genre de travail, quand les gens élaborent des processus pour aller de l'avant avec des politiques et une mobilisation, les Métis ne sont pas vus comme un groupe autochtone. Nous sommes tous distincts et différents les uns des autres, et il faut faire place aux Métis. Un de vos précédents témoins disait justement que ça ne convient pas à tout le monde. Nous devons nous assurer de donner aux femmes métisses l'occasion de participer lorsqu'il est question de trouver des solutions au problème de leur incarcération.
    J'aimerais vous parler entre autres des rapports Gladue et des membres de notre nation qui ont des démêlés avec les systèmes de justice. Nous savons à quel point c'est lourd pour ces personnes. Et dans de nombreux cas, aucun rapport Gladue n'est présenté à leur sujet.
    Le système d'aide juridique est surchargé étant donné le type de clients auquel il a affaire. Les avocats considèrent qu'un rapport Gladue est un fardeau de plus pour leurs clients, et ils vont même jusqu'à décourager les gens qui doivent comparaître devant le tribunal d'en demander un rapport. Ils leur disent que cela ne fera que prolonger la durée de leur incarcération dans l'un des divers établissements de détention provisoire.
    L'objectif même des rapports Gladue, c'est d'exposer les facteurs qui font que les personnes visées ont abouti là où elles ont abouti. Il sert non pas à présenter des excuses, mais plutôt à amener les établissements correctionnels à trouver une issue et à sortir les délinquantes de ce pétrin pour qu'elles ne deviennent pas des récidivistes ou encore, si ce sont des récidivistes, à chercher des lieux où elles pourront avoir accès à d'autres solutions et, ainsi, sortir du système.
    Assez souvent, pour un grand nombre de nos clientes, le chemin aboutit à un établissement correctionnel parce qu'il n'y a pas dans la collectivité de soutien pour les personnes qui ont des problèmes de santé mentale. Elles s'y retrouvent parce qu'elles ont des problèmes de toxicomanie.
    La toxicomanie est un problème de santé. Le système correctionnel ne sera jamais une solution pour ceux qui ont un problème de toxicomanie ou de santé mentale. On ne trouve ni programme ni soutien, dans les établissements correctionnels, qui pourraient constituer une solution, et c'est pourquoi nous devons trouver une autre façon d'intervenir auprès des femmes autochtones de notre nation qui se retrouvent dans ces systèmes.
    Les rapports Gladue sont très importants s'ils sont établis de la façon prévue. Comme la Cour suprême l'a souligné, les rapports Gladue doivent soumettre aux juges des suggestions quant aux programmes dont la personne en question a besoin, lorsqu'elle se retrouvera en établissement. Il peut s'agir d'un programme de justice réparatrice autant que d'un programme de justice corrective. Je crois qu'il est important pour nous, les femmes autochtones et les femmes métisses, de nous assurer dès aujourd'hui que ces facteurs sont pris en considération.
(1215)
    Je sais qu'il faut régler certaines choses dans les établissements correctionnels et les tribunaux étant donné tout le temps qu'il faut pour que les choses se passent. De nos jours, les accusées sont de plus en plus nombreuses à plaider coupables avant même de recevoir leur verdict, parce que c'est plus facile pour elles de retourner à la maison auprès de leurs enfants que de se concentrer sur la préparation de leur défense.
    Parfois, les femmes, et en particulier les jeunes femmes, qui se retrouvent dans ces établissements font l'expérience d'un système qui va changer leur vie et qui les traumatisera. J'encourage vivement le Comité à commencer à s'intéresser aux enjeux auxquels les femmes métisses font face.
    Il ne s'est pas fait beaucoup de recherches sur les femmes métisses en tant que telles, je tenais à le dire. La plupart des recherches, des travaux, des informations que nous avons pu consulter, en particulier en vue de notre comparution d'aujourd'hui, reflètent davantage une approche pan-autochtone, et cette approche n'est pas efficace dans notre cas. Elle ne tient pas compte de notre identité. Elle n'aide pas les femmes avec qui nous essayons de travailler à régler les problèmes auxquels elles sont confrontées entre les murs de ces établissements.
    Nous aimerions savoir de quelle façon les programmes sont évalués. Nous avons lu les documents d'information qui nous ont été communiqués en vue de notre comparution. Certains programmes... j'imagine que si j'avais à élaborer des programmes, j'aimerais qu'ils soient mis en valeur. Qui examine ces programmes? Qui s'assure de leur efficacité?
    Comme je l'ai déjà dit, nous devons permettre aux femmes autochtones de participer à ces travaux, si nous voulons être certains qu'elles en tireront des avantages.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous donnons maintenant la parole à Mme Yuen, pour sept minutes.
    Je remercie les membres du Comité de mener cette très importante étude et de m'avoir invitée à y participer.
    Mes recommandations s'arriment sur deux grands points: la fragilité des programmes et services destinés aux Autochtones offerts dans les établissements correctionnels pour femmes et les besoins en soutien et services destinés aux femmes autochtones à l'extérieur des prisons.
    L'intention du SCC de fournir des services appropriés aux délinquantes autochtones est fragile, parce que ces services sont conçus pour s'insérer dans le cadre existant, un cadre qui reflète les approches occidentales en matière de réinsertion sociale. Même si le SCC a apporté de nombreux changements pour soutenir les femmes autochtones, ces dernières sont déjà devenues, ou risquent de devenir, comme elles le disent elles-mêmes, blanchies.
    Par exemple, pendant que j'effectuais ma recherche à l'établissement Grand Valley, j'ai été témoin des relations et des liens très étroits qui unissent les femmes et leur conseillère spirituelle. Les détenues l'appelaient leur « grand-mère ». Juste avant la fin de ma recherche, cette conseillère spirituelle m'a dit être préoccupée, parce que le SCC lui avait demandé de rédiger des évaluations des détenues. À ce moment-là, il s'agissait d'une simple demande, non pas d'une obligation, mais le processus a été un peu plus légitimé en 2016 et présenté comme un aspect essentiel des interventions efficaces et adaptées à la culture offertes aux Autochtones.
    Une grand-mère ne prend pas de notes, et elle ne rapporte pas ce que vous dites et faites aux autorités. Comme les femmes m'ont dit: « Grand-mère nous aime et prend soin de nous »; et c'est ce qui faisait la différence, à leurs yeux. J'ai eu l'occasion de revoir à deux ou trois occasions, depuis cette étude, quelques-unes des femmes que j'avais rencontrées à l'Établissement Grand Valley, et elles m'ont dit que ce n'était plus comme avant. Oui, il y a davantage de conseillères spirituelles aujourd'hui, et il y a aussi plus de programmes, mais les relations ont perdu en qualité. C'est pourquoi je recommande au SCC de se demander comment il pourrait changer ses politiques ou prévoir des exceptions à ces politiques pour les adapter à la culture et au mode de vie des Autochtones.
    Par exemple, je recommanderais de suivre des principes similaires aux principes énoncés dans l'arrêt Gladue au moment de déterminer la cote de sécurité des délinquantes. À l'heure actuelle, de nombreuses délinquantes autochtones n'ont pas accès aux soutiens et services existants, parce qu'elles ont été classées aux niveaux de sécurité moyenne et maximale. Si l'on avait tenu compte des antécédents des femmes, de leur colonisation et des traumatismes qu'elles ont vécus, lorsque l'on a établi leur cote de sécurité, elles seraient plus nombreuses à avoir accès aux différents programmes et services, par exemple les pavillons de ressourcement.
    Ma deuxième recommandation serait de verser un financement égal aux pavillons de ressourcement gérés par les collectivités — ils reçoivent actuellement 60 ¢ pour chaque dollar reçu par les pavillons de ressourcement gérés par le SCC — et aussi de créer de nouveaux pavillons de ressourcement en milieu urbain. Je vous renvoie au rapport annuel de l'enquêteur correctionnel, où vous trouverez une justification de cette recommandation, et en particulier à la partie qui porte sur l'article 81.
    Ma troisième recommandation serait de créer les possibilités de guérison intergénérationnelle. Les traumatismes liés à la colonisation et les chemins menant à l'incarcération sont pour de nombreuses femmes autochtones un héritage qui remonte à plusieurs générations. Même si les enfants sont autorisés à rester dans les prisons fédérales — les enfants de quatre ans et moins peuvent y vivre à temps plein, et ceux de 6 ans et moins peuvent y vivre à temps partiel —, je crois qu'il serait logique de permettre non seulement aux femmes de guérir, mais de le permettre aux générations qui les précèdent et à ceux qui les suivent.
    Ma quatrième recommandation concerne la formation et l'éducation du personnel du SCC et des organismes communautaires ordinaires, qui joueront ou jouent déjà un rôle dans les mesures de soutien offertes aux femmes autochtones. Comme nous le savons déjà, le Canadien moyen n'est pas suffisamment renseigné au sujet des cultures autochtones et de la colonisation des peuples autochtones. Un bon point de départ serait l'exercice des couvertures, organisé par Kairos. La GRC s'en est déjà servie, de même que le Service de police de Montréal, et les deux organismes estiment que c'est jusqu'ici une expérience positive.
    Ma dernière recommandation, qui me ramène à mon premier point, serait de travailler en partenariat avec des organisations autochtones et de leur demander d'offrir des programmes et services destinés aux femmes. Cela nous permettrait peut-être de dépasser l'approche pan-autochtone sur laquelle certains témoins ont déjà attiré votre attention.
    Cette recommandation est aussi conforme à mon second point: le besoin d'offrir des soutiens et des services aux femmes autochtones à l'extérieur des prisons.
    Le fait est que, même si les soutiens et programmes destinés aux Autochtones offerts dans les prisons fédérales ont besoin d'être améliorés, ils restent meilleurs que ce à quoi de nombreuses femmes autochtones ont accès dans la collectivité. J'ai entendu de nombreuses anecdotes touchant des femmes qui manquent aux conditions de leur libération conditionnelle ou récidivent dans le but de retourner en prison. « C'est bon de revenir chez soi, dans sa famille », disent-elles en parlant de leurs soeurs, membres de la sororité autochtone, « juste à temps pour Noël. »
    C'est qu'il faut savoir que certaines femmes voient leur culture présentée sous un jour favorable pour la première fois, lorsqu'elles se retrouvent en prison, et que, une fois remises en liberté, elles ne savent pas où trouver un appui pour continuer à vivre cette expérience. Les lacunes des soutiens et services offerts aux femmes remises en liberté sont déjà connues. Mais elles sont pires dans le cas des femmes autochtones.
(1220)
    Mes recommandations comprennent la création de maisons de transition, ou du moins d'unités dans les maisons de transition existantes, où seraient offerts des services et programmes adaptés à la culture et destinés aux femmes autochtones. Je répète que cela doit se faire en collaboration avec les organisations autochtones qui existent déjà. Je crois que les programmes destinés aux détenues autochtones devraient comprendre un service de liaison avec la collectivité qui assurerait en quelque sorte une continuité pour les femmes remises en liberté.
    Je vous renvoie ici à un programme hébergé par l'association Community Justice Initiatives, appelé « Stride », qui est offert à l'Établissement Grand Valley. Il convient de souligner que les femmes autochtones ne sont pas très nombreuses à participer à ce programme, mais ce programme cherche des façons de communiquer et collaborer avec des organisations autochtones ou avec des membres des collectivités autochtones afin de pouvoir joindre les femmes autochtones.
    C'est un problème courant de nombreux organismes ordinaires. Je sais que les intervenants de la Société Elizabeth Fry eux aussi cherchent partout les moyens d'aider et de soutenir les femmes autochtones. L'étude que mène votre comité constitue un pas important dans la bonne direction, parce qu'elle ouvre la voie à la collaboration et, au bout du compte, favorise la création d'un réseau de soutien des femmes autochtones plus solide.
    La surreprésentation des femmes autochtones n'est pas la responsabilité du seul SCC; c'est notre responsabilité à tous.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons commencer notre première ronde de questions, pour sept minutes, avec Sean Fraser.
    Merci beaucoup. J'ai une série de questions. J'ai vraiment aimé les témoignages. Si nous pouvions garder les réponses courtes pour arriver à passer à travers toutes les questions, je vous en serais sincèrement reconnaissant.
    Je vais commencer par notre invité des Aboriginal Legal Services.
    En ce qui a trait à la question des restrictions touchant les peines minimales obligatoires et les peines d'emprisonnement avec sursis, j'accepte totalement les données probantes que vous avez fournies. Je ne sais pas comment nous pouvons penser que, sans détenir aucun fait ni aucun élément de preuve, nous sommes mieux placés à Ottawa pour décider d'une peine qu'un juge qui connaît les faits et les éléments de preuve dans une affaire particulière. Les rapports Gladue sont en quelque sorte responsables de cette conception. Il n'y a pas d'accès équitable aux rapports Gladue parce que, dans différentes régions du pays, dans différentes collectivités, ils ne sont tout simplement pas faits, pour quelque raison que ce soit.
    Comment pouvons-nous, à l'échelon fédéral, encourager l'utilisation de ces rapports, de sorte que les tribunaux soient au courant des antécédents sociaux des Autochtones que les témoins de notre dernière réunion ont largement décrits comme étant très positifs au chapitre des résultats?
(1225)
    Certainement, vous avez raison de dire que les rapports Gladue ne sont pas accessibles à tous. Pour parler franchement, ils ne sont pas du tout accessibles au Manitoba et en Saskatchewan. Un des problèmes, c'est que le gouvernement fédéral ne veut pas participer au financement des rapports Gladue. Même si, dans ses programmes de justice autochtone, il participe grandement à bien des égards, il n'a pas abordé la question des rapports Gladue.
    En Ontario, nous avons 14 auteurs de rapports Gladue qui rédigeront probablement 400 ou 500 rapports Gladue cette année, et presque tous nos fonds proviennent d'Aide juridique Ontario et du ministère du Procureur général de l'Ontario.
    Je pense que si le gouvernement fédéral était préparé à fournir des fonds selon une formule de partage des coûts, cela encouragerait d'autres provinces à se lancer dans le processus, en plus de permettre une meilleure utilisation de ces fonds dans des endroits comme l'Ontario et l'Alberta, où les provinces assument tous les coûts.
    S'il devait y avoir un certain genre de programme pilote pour évaluer les résultats d'un tel investissement, quel serait le meilleur moyen de le présenter? S'agit-il juste d'une proposition haute en couleur pour les organisations qui le font?
    Le gouvernement fédéral conclut déjà des ententes de partage des coûts avec des organisations autochtones qui fournissent des services dans les domaines de la justice réparatrice, et nous avons du financement pour ces services. La division de la justice pour les Autochtones au ministère de la Justice provincial ou le ministère fédéral de la Justice entretient des relations dans toutes sortes de domaines. Ce ne serait pas difficile de les élargir. Ce ne serait pas un problème.
    Pour rester sur la question des rapports Gladue, vous avez dit à quel point il serait important de donner accès aux renseignements contenus dans ces rapports dans le cadre du processus de libération conditionnelle. Quel changement devrions-nous apporter pour permettre cet accès?
    Il y a deux problèmes. Le premier, c'est de savoir si cela serait financé, parce que, actuellement, nos fonds servent à fournir des rapports Gladue aux tribunaux, et ils ne visent pas la libération conditionnelle.
    Le deuxième problème tient à la façon d'obtenir les renseignements sur le travail qu'une personne a fait dans le système carcéral. D'où ces renseignements vont-ils provenir? Comment une personne externe au SCC sera-t-elle en mesure d'interroger les personnes nécessaires pour obtenir ces renseignements?
    Je ne crois pas que ce soit une question insurmontable. Assurément, nous serions heureux de participer aux discussions portant sur la façon d'en assurer le fonctionnement, mais nous n'avons pas tenu ce genre de discussions.
    Dans les cas où un rapport Gladue a été fait, y a-t-il une raison pour laquelle on ne peut pas simplement le fournir à la Commission des libérations conditionnelles? Le travail est déjà fait.
    Certainement, on pourrait. La difficulté, c'est que la personne, si elle est dans le système fédéral, passera au moins deux, trois, quatre, cinq, six ou sept ans dans l'établissement. Ce qui devient si important au moment du processus de libération conditionnelle, c'est ce que la personne a fait lorsqu'elle était à l'intérieur de l'établissement et aussi ce que sont ses plans lorsqu'elle sera mise en liberté. On n'aura pas défini cette évolution dans le rapport Gladue, si on présumait au départ que la personne s'en allait au pénitencier.
    Je pense que Mme Yuen a également fait valoir que cela vous met sur une voie différente. Je suis sûr que vous auriez changé après avoir passé cinq ou sept ans dans un établissement. Vous seriez à la sortie une personne différente de celle que vous étiez à l'arrivée.
    Je pense que Mme Yuen et vous pourriez aborder ou avez abordé cette question. Nous avons entendu parler des résultats exceptionnels que les pavillons de ressourcement peuvent produire pour une personne, en ce qui concerne l'abaissement des taux de récidive et la réadaptation.
    Un commentaire que nous avons entendu durant notre dernière réunion, c'était qu'il n'y a pas une population assez grande de délinquantes autochtones, dans certaines régions, pour justifier la présence d'un tout nouveau pavillon de ressourcement. Comment pouvons-nous élargir les services offerts, si ce n'est au moyen d'un pavillon des Services correctionnels, pour fournir l'accès universel à ce genre de programme, si nous savons qu'il fonctionne? La réponse réside-t-elle dans le financement des programmes communautaires?
    Je pense certainement que les partenariats et la collaboration avec la collectivité locale sont importants. Cela pourrait aider à contourner certains des... Je pense qu'en ce qui concerne la grande prison, les gros chiffres, le fait de travailler ensemble ne fonctionne pas. Ce qui fonctionnerait, ce serait des services personnalisés, offerts à plus petite échelle, et ces organisations communautaires auraient les connaissances nécessaires pour créer les mesures de soutien et les services voulus.
(1230)
    L'autre élément, cependant, c'est qu'un des enjeux — et je pense que l'un des derniers intervenants en a parlé — tient à la classification des femmes autochtones. Elles sont surclassifiées lorsqu'elles se retrouvent dans des établissements à sécurité maximale. Les femmes autochtones représentent 42 % des femmes qui sont classifiées dans un établissement à sécurité maximale. La difficulté avec les pavillons de ressourcement, c'est que vous ne pouvez y entrer à moins d'avoir une classification de sécurité minimale. Ce n'est pas qu'il n'y a pas de gens. C'est qu'il n'y en a pas qui sont admissibles, parce qu'ils ne peuvent réussir à faire baisser leur classification jusqu'à un niveau de sécurité minimale avant l'approche de la fin de leur peine.
    Il me reste probablement moins d'une minute. Je remercie nos invitées du Conseil national des femmes métisses. Une très grande partie de votre témoignage s'applique non seulement aux Métisses, mais aux femmes autochtones de façon générale.
    Vous avez mentionné l'importance de la consultation auprès des personnes, celles qui ont vécu des expériences, qui sont incarcérées. C'est, pour nous, difficile de faire venir ici une personne incarcérée, bien sûr. Y aurait-il quelqu'un qui pourrait nous fournir des renseignements, une ressource, de sorte que nous puissions comprendre l'expérience vécue et la façon dont cette étude pourrait influencer de telles personnes?
    Je sais qu'il y a des organisations communautaires autochtones qui travaillent avec des femmes autochtones, comme les Native Counselling Services, et je crois que Mme Patti LaBoucane a en réalité déjà comparu devant le Comité. Je suis sûre que si vous leur tendiez la main... ils travaillent au quotidien avec des personnes pour s'assurer que vous seriez en mesure de... Je comprends que nous ne puissions pas faire sortir des personnes des prisons pour les amener ici, mais des personnes qui ont déjà quitté ces établissements nous permettraient assurément de mieux comprendre la situation.
    Merci à vous trois.
    Je n'ai plus de questions.
    Nous allons maintenant passer à Martin Shields, pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie le groupe de témoins et j'apprécie les connaissances que vous apportez. J'ai juste besoin de quelques précisions.
    Monsieur, vous avez dit que le programme ne s'applique pas à tous, puis vous avez parlé d'un programme destiné à l'ensemble des Autochtones, à Toronto; je suis un peu confus.
    Permettez-moi d'essayer de clarifier mes propos. Ma préoccupation, c'était que les programmes autochtones du SCC ne sont accessibles qu'aux femmes autochtones qui souhaitent participer au programme des Sentiers autochtones, qui est essentiellement le programme d'orientation culturelle.
    Ce que j'ai dit, c'est qu'il y a un programme auquel nous contribuons qui n'a pas encore été financé par le SCC. C'est une tentative pour intégrer des places réservées expressément à la libération conditionnelle et aussi un pavillon de ressourcement dans la région de Toronto. Le programme n'est pas encore financé, mais les organisateurs du programme, à qui j'ai parlé avant de venir ici, ont dit clairement qu'il serait ouvert à toutes les femmes autochtones.
    Nous prenons les femmes autochtones comme elles sont et travaillons avec elles pour connaître leurs besoins et leur fournir les ressources nécessaires. Nous n'avons pas besoin qu'elles nous disent si elles veulent nécessairement suivre le chemin traditionnel ou emprunter une autre voie.
    Vous avez dit que les programmes existent, mais ils ne conviennent pas à tout le monde. Est-ce bien cela?
    C'est exact.
    Vous être très clair à ce sujet. C'est parce qu'il y a quelques différences dans le grand pays qu'est le nôtre, sur le plan géographique. Pensez-vous qu'au sein d'un programme, on peut fournir assez de voies s'adressant à la diversité des personnes qui suivent le programme?
    On doit mettre l'accent sur les besoins des femmes individuelles, mais aussi reconnaître qu'elles sont autochtones. Les femmes autochtones, comme vous l'avez entendu dire — on en a parlé ici et vous l'avez entendu de la bouche des témoins précédents — ont en commun de nombreux problèmes. La raison pour laquelle elles sont traduites en justice et envoyées en prison, c'est qu'elles ont en commun un certain nombre d'expériences. On peut élaborer des programmes pour tenir compte de ces expériences, bien que les façons dont les personnes s'occupent ensuite de certaines de ces expériences pourraient varier.
    Cependant, vous pouvez assurément fournir un programme destiné à l'ensemble des femmes autochtones pour parler des répercussions de la violence ou des pensionnats. On ne devrait pas attendre qu'une personne dise: « Je veux suivre ce programme des Sentiers autochtones ». Les gens devraient avoir accès à ces types de programmes ailleurs.
    Je vous remercie de ces précisions.
    Maintenant, s'agit-il de quelque chose qui en est à ses balbutiements ou bien qui fonctionne depuis un certain temps?
    Le programme des Sentiers autochtones existe au SCC depuis un certain temps.
    Non, je veux dire celui dont vous parlez.
    Il n'est pas encore financé. La capacité du SCC de faire de la sensibilisation et de travailler en réalité avec des collectivités pour mettre sur pied des programmes... Sa feuille de route n'est pas excellente. Mme Yuen a parlé du problème de financement. Le SCC essaie de s'améliorer, mais nous devrons voir s'il y arrive.
    Il pourrait arriver que quelqu'un finance ce programme, puis il y aurait une évaluation, et ensuite peut-être une reproduction du programme, s'il se révèle positif.
(1235)
    Oui.
    Vous espérez, cependant, qu'il fonctionnera.
    Je n'ai aucun doute qu'il fonctionnera, mais la question est de savoir s'il sera jamais financé.
    Pouvons-nous le reproduire?
    Oui. Ce n'est pas sorcier. Ce n'est pas nouveau.
    Très bien. Merci.
    Madame Yuen, vous avez mentionné certaines choses particulières concernant « qui » est en cours, et j'ai probablement, avec un groupe de témoins précédent, posé à quelques reprises des questions au sujet de ce « qui ». Je pense que vous avez commencé à cerner « qui » était important, au moment de faire des choses, à l'intérieur comme à l'extérieur.
    Une des choses que j'ai jugées très intéressantes, c'est ce que vous avez dit au sujet de l'élément intergénérationnel. Pourriez-vous en parler davantage, nous parler de son importance?
    Oui. J'ai fait quelques recherches auprès des femmes autochtones en général, pas seulement auprès de celles qui ont été incarcérées, et j'ai examiné ce que la guérison signifiait pour elles. On revient toujours aux relations intergénérationnelles... mon fils, ma fille, mais aussi ma grand-mère, ma mère.
    Lorsqu'elles prennent part à une cérémonie, elles disent des choses comme: « Ma mère et ma grand-mère n'ont jamais été en mesure de faire cela. Je le fais pour elles. Je le fais pour mon fils. » C'est si interrelié que vous ne pouvez créer une séparation et vous concentrer seulement sur la femme — la personne — pour assurer la guérison. Je veux dire que cela doit englober sept générations avant et sept générations après. Lorsque nous essayons d'apporter du soutien, si vous voulez le définir ainsi, comme la réhabilitation ou la guérison, si vous examinez cela selon leur point de vue, n'est-il pas logique, dans ce cas-là, de créer des programmes qui englobent plusieurs générations?
    Lorsque vous parlez de l'aspect « générationnel », selon mon expérience, cela élargit en quelque sorte la façon dont on le perçoit souvent. Ce peut être un nombre de membres de la famille, d'une certaine façon, des liens qui ne sont pas juste directement linéaires. En avez-vous fait l'expérience?
    Je suis désolée, pourriez-vous préciser ce que vous entendez par de « nombreuses générations » contrairement à la linéarité?
    Par « linéarité », je veux dire la grand-mère, la fille de, le fils de, mais cela s'élargit si on tient compte de la famille comme elles la voient.
    Oui, absolument. On doit intégrer cette façon de penser: ce n'est pas seulement la famille nucléaire, mais le collectif plus grand, et je ne sais certainement pas — et je ne suis pas la personne à qui le demander — ce que cela supposerait concrètement. Je pense que, puisque les traumatismes ont été vécus au fil des générations, pour y réagir, la guérison doit également en tenir compte.
    En un sens, c'est très vaste, si nous pouvons aborder cette question.
    Oui.
    Puisque vous avez écouté l'autre témoin et ce qu'il a décrit, à votre avis, cela s'inscrirait-il dans une solution que vous avez envisagée?
    Parlez-vous du programme, faute d'un meilleur mot, à Toronto?
    Exact.
    Oui, je pense que c'est un bon début. Le problème, c'est que nous ne faisons que commencer. Nous ne sommes qu'à la veille — à la naissance — d'essayer de comprendre la colonisation et de décider où nous allons à partir d'ici. Nous en sommes arrivés à cette approche panautochtone. Comment pouvons-nous la préciser? Si nous devons commencer par adopter cette approche « inclusive, pour tout le monde », qu'arrive-t-il ensuite?
    Il faut bien commencer quelque part, et je pense que c'est un bon début. On pourrait commencer par faire participer d'autres pays particuliers, puis les mobiliser pour qu'ils aillent au-delà de ce genre d'étape « universelle » où nous sommes en ce moment.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Sheila Malcolmson, pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les trois témoins.
    De nouveau, si on parle des peines minimales obligatoires, voici un scénario que j'ai entendu: le fait d'enlever aux juges la capacité d'utiliser le pouvoir discrétionnaire dans la détermination d'une peine a été un réel problème, et il est très décevant que le gouvernement n'ait en réalité pas corrigé cette politique du gouvernement précédent. Voici comment on m'a décrit la chose.
    Une femme — dans le cas présent, une femme autochtone — se retrouve de façon accidentelle à être complice d'un crime. Son petit ami utilise sa voiture pour s'enfuir, et l'adresse sur l'immatriculation est celle de sa maison. Il pourrait s'agir de quelque chose d'aussi éloigné. Elle n'a pas un très bon accès au système de justice, les moyens de se défendre ni une bonne représentation. De toute façon, dans le passé, le juge aurait pu dire: « Je vois que vous êtes ici dans une impasse. Je vais vous autoriser à purger votre peine en prison les fins de semaine, moment où vous pouvez demander à une grand-mère ou à quelqu'un de s'occuper des enfants. » Si la règle absolue est que vous devez purger votre peine à partir du jour un et la terminer à la troisième année ou peu importe, cette femme peut perdre ses enfants, et ces enfants peuvent être mis dans un foyer d'accueil ou être séparés de leur famille, puis surgissent les traumatismes intergénérationnels que Mme Yuen a décrits.
    Le crime pourrait-il être si simple et si petit, mais ensuite avoir des dommages collatéraux, lorsque les peines minimales obligatoires sont le cadre en fonction duquel les femmes sont condamnées?
(1240)
    Oui, c'est assurément le cas. Dans certains cas, selon la façon dont les personnes sont poursuivies et peu importe leur participation réelle, si elles sont coupables dans les faits, elles recevront la peine minimale obligatoire. Si la peine minimale obligatoire est de un, de deux ou de trois ans, c'est ce qu'elles vont obtenir.
    L'autre chose qui crée un obstacle, c'est que la peine minimale obligatoire empêche l'imposition d'une peine d'emprisonnement avec sursis. De façon générale, si vous obtenez une peine de fin de semaine, celle-ci ne peut dépasser 90 jours. Si le tribunal estimait que 90 jours n'étaient pas suffisants et que 4, 5 ou 6 mois... vous pouvez purger une peine d'emprisonnement avec sursis, dans la collectivité, qui est assortie d'une détention à domicile et d'autres sanctions difficiles, mais cela n'est pas offert si les peines d'emprisonnement avec sursis ne l'autorisent pas.
    Ce qui se passe ensuite, c'est que la personne va en prison, et, si elle n'a personne pour s'occuper de ses enfants, vous avez tout à fait raison, elle va les perdre.
    Ce sont des répercussions permanentes pour la prochaine génération.
    Certainement, oui. Même si la personne reprend ses enfants, ceux-ci auront été retirés de leur famille. Je peux vous dire, ayant lu des milliers de rapports Gladue que nous produisons, que l'expérience d'avoir été séparé de votre famille et placé en foyer d'accueil — particulièrement lorsqu'un enfant est âgé, parce qu'il ne va pas aller dans une maison, mais va souvent être déplacé d'un endroit à l'autre — est incroyablement dommageable.
    Madame Yuen, ce dommage que décrit M. Rudin est-il quelque chose sur quoi vous vous êtes penchée dans le cadre de votre recherche?
    C'est certainement quelque chose que j'ai entendu dire par des femmes à qui j'ai parlé. Elles parlent d'être placées dans un foyer d'accueil ou du fait qu'une personne de la famille soit incarcérée et de la façon dont cela les a touchées, et de la prophétie qui s'exauce: « Quand j'étais plus jeune, j'ai dit que cela n'allait pas m'arriver à moi, mais me voici. »
    Je rêve ici, mais ne serait-il pas incroyable si l'enfant pouvait aller... ou si la mère pouvait rester à la maison avec son enfant, ou si ce doit être la prison, si l'enfant pouvait aller en prison avec la mère et y rester après l'âge de quatre ou sept ans?
    Madame Melanie Omeniho, du Conseil national des femmes métisses, vous avez parlé du fait que les rapports Gladue ne s'appliquent pas aux Métis ou ne sont pas accessibles. Pouvez-vous nous dire s'il y a des listes d'attente? Selon votre expérience, si celles-ci sont une option, comment peut-on y accéder?
    Pour commencer, la plupart du temps, les avocats de la défense ne renseignent pas les femmes métisses sur l'objectif d'un rapport Gladue ni sur les avantages qu'il pourrait leur apporter. On ne les encourage pas à participer au processus qui consiste à demander un rapport Gladue, et, si elles n'en demandent pas, il n'y en aura pas.
    Même dans certains cas où je suis allée en cour pour défendre les droits d'une personne et où j'ai conseillé à l'avocat de la défense de l'aide juridique d'obtenir un rapport Gladue, il ne le fait pas. En fait, au moment de formuler des recommandations sur la détermination de la peine, celui-ci dit au juge que les facteurs énoncés dans l'arrêt Gladue ont été pris en considération. Ce n'est pas l'objectif d'un rapport Gladue.
    Ce qui explique cela en partie, c'est que les structures réelles au sein de ce système sont très sollicitées. C'est la question du financement des rapports Gladue. Qui finance cela, avec quelles ressources, et combien y a-t-il d'auteurs de rapports Gladue, si on tient compte du nombre de personnes autochtones qui sont incarcérées ou condamnées? Cela devient un enjeu vraiment important.
    Si une personne ne ressemble pas visiblement à un Autochtone, l'avocat essaiera de s'en sortir sans préparer aucun rapport Gladue ni faire participer la personne à ce processus. J'ai même vu des cas où la Société Elizabeth Fry mène des évaluations sur des gens et dit: « C'est comme un rapport Gladue, et c'est tout ce dont ils ont besoin. »
    J'ai une question rapide pour n'importe lequel des trois témoins. La semaine dernière, nous avons entendu quelqu'un du Service correctionnel du Canada dire: « Notre approche de travail avec les femmes autochtones est holistique et axée sur les femmes. Elle est conçue pour répondre à leurs besoins particuliers et contribuer à leur réinsertion sociale en toute sécurité et en temps opportun. » Cela a-t-il été votre expérience?
(1245)
    Non.
    C'est une réponse simple.
    Les autres témoins ont-ils quelque chose à dire?
    Non.
    Je vais rendre ça unanime.
    Tous les trois disent non.
    Merci beaucoup de votre travail. Nous allons nous en inspirer grandement dans notre rapport écrit.
    Merci, madame la présidente.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant continuer avec Bernadette Jordan.
    Merci, madame la présidente. Je vais céder mon temps à Terry Duguid, et je prendrai ses cinq minutes, s'il reste du temps.
    Merci, madame Jordan.
    Merci, madame la présidente.
    Je souhaite la bienvenue à nos invités spéciaux aujourd'hui. Votre excellent témoignage sera très utile lorsque nous tracerons la voie à suivre, donc je vous remercie grandement.
    Mes quelques premières questions s'adressent à Mme Omeniho. Je représente une collectivité métisse assez importante, et, comme vous le savez, le Manitoba comprend la plus grande collectivité métisse du pays. En fait, je représente une partie de la circonscription de Provencher de Louis Riel. On ne l'appelle plus ainsi — c'est Winnipeg-Sud — mais c'est la collectivité historique de Saint-Norbert.
    Je suis au courant de l'excellent travail que vous faites, et particulièrement de celui d'Infinity Women, au Manitoba.
    Avez-vous un chiffre ou une proportion pour la population carcérale qui est métisse? Avez-vous un chiffre indirect pour les personnes autochtones qui se trouvent dans notre système pénal? Quelle proportion serait métisse?
    En ce moment, je devrais vous dire que n'importe qui d'entre nous ne pourrait que deviner le chiffre. En réalité, c'est une des questions que je voulais soulever plus tôt. Lorsque les femmes sont incarcérées, et non seulement dans le cadre du processus de détermination de la peine, à quelle fréquence les gens posent-ils la question, de sorte qu'elles puissent s'identifier?
    Je pense que cela fait partie du problème, même dans le cadre de l'approche panautochtone. Les gens doivent commencer à se demander qui sont ces personnes lorsqu'elles arrivent dans un établissement correctionnel. On doit leur poser la question: « Êtes-vous Autochtone et comment vous identifiez-vous? » C'est la seule façon dont le système pourra vraiment le savoir: en en faisant le suivi.
    Il n'y a pas de statistiques ni de recherches propres aux Métis.
    Vous avez déjà répondu à ma question complémentaire, qui allait porter sur ce point précis, donc merci beaucoup.
    Connaissez-vous des mesures de soutien adaptées à la culture, dans le système carcéral et dans le cadre de la transition à l'extérieur de ce système, qui sont destinées tout particulièrement aux Métis?
    Quelques programmes que je connais ont été menés au sein de certains des établissements. Par exemple, j'ai rencontré quelques groupes, comme les Native Counselling Services — j'ai rencontré M. Benson — pour en parler. Un programme comme celui des couvertures, qui a été mentionné plus tôt, n'est pas destiné aux Métis. Cela devient problématique, parce qu'il est, dans les faits, axé sur les Premières Nations.
    Il n'y en a donc pas beaucoup. Ce n'est pas que le programme des couvertures n'est pas bon ou que nous ne l'aimons pas, mais si on apportait quelques modifications même à la façon dont il est mis en oeuvre, cela profiterait aux Métis aussi bien qu'aux Premières Nations. Le travail doit être fait, cependant, auprès des aînés et des gardiens du savoir métis pour aider à faire ces choses.
    Pour ce qui est des programmes au moment de la sortie des établissements, je n'en connais pas, pour être honnête avec vous.
    Je n'en connais pas non plus.
    Juste pour nos députés, nous avons un gouvernement métis au Manitoba. Y  a-t-il un gouvernement métis au Canada également?
    Nous avons le Ralliement national des Métis, qui est l'organe représentatif national.
    Nous avons un conseil national, mais nous avons en réalité un gouvernement métis.
    Oui.
    Je ne crois pas qu'il y ait eu des interactions entre les systèmes correctionnels fédéral ou provincial et ce gouvernement. Seriez-vous d'accord pour dire que ce serait une bonne idée que les deux gouvernements — ou franchement, les trois gouvernements — s'assoient et conçoivent quelque chose qui s'adresse tout particulièrement à une très grande proportion de notre collectivité? On parle de quelque chose comme 100 000 personnes. C'est 10 % de notre population au Manitoba, donc c'est extrêmement significatif.
(1250)
    Nous sommes la plus grande collectivité autochtone en Amérique du Nord, pour mettre les choses en perspective pour ce qui est du nombre de Métis.
    Lorsque vous parlez des établissements et du nombre, par exemple, de femmes autochtones qui sont incarcérées qui pourraient être Métisses, nous soupçonnons que le chiffre est probablement proche de 50 %. Je sais que c'était le cas lorsque nous nous sommes occupés de statistiques sur la protection des enfants: près de 50 % des enfants autochtones qui reçoivent des soins sont en réalité Métis. Lorsque vous additionnez les chiffres pour voir à quel point les Métis forment un grand groupe... ce n'est pas que je veux que 50 % des femmes incarcérées soient Métisses, mais il y a une bonne chance que cela soit probablement un indicateur.
    Cette question pourrait être posée à n'importe lequel de nos invités aujourd'hui, et vous venez de mentionner le système de protection de l'enfance. De nouveau, je connais très bien la crise qui touche la protection de l'enfance dans ma province d'origine. Notre ministre des Services autochtones convoque une réunion nationale pour que nous voyions ce que nous pouvons faire en tant que gouvernement fédéral pour ce qui est de coordonner et de seulement améliorer cette situation très difficile partout au pays.
    Un député a désigné notre système de protection de l'enfance comme une voie ultrarapide vers l'itinérance et une voie ultrarapide vers le système correctionnel. Lorsque nos enfants ont 18 ans, après avoir été dans 10, 12 ou 30 familles d'accueil, ils se retrouvent souvent à la rue. Il n'y a pas de soutien.
    Cela rejoint la question de Mme Malcolmson sur la prévention. Y a-t-il quelque chose que nous pouvons faire à cet égard dans vos collectivités? Les Métis ont des services à l'enfance et des services familiaux. Auriez-vous quelques recommandations à ce chapitre pour ce qui est de s'attaquer à la racine du problème?
    Selon mon point de vue, la guérison doit commencer par nos enfants, mais c'est intergénérationnel. Nos familles ne sont pas nucléaires. Nos familles sont composées de tantes, d'oncles, de cousins, de grand-mères et de tout le monde, mais la guérison doit commencer avec nos enfants.
    La protection de l'enfance vise seulement la prochaine génération des enfants qui vont commencer à faire partie de l'histoire des pensionnats. Nous devons cesser de faire cela au moyen d'un certain mécanisme. Je sais qu'il n'y a pas de solution toute faite, mais nous devons commencer à établir la guérison et à ramener les liens dans nos collectivités.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant revenir à Martin Shields, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Passons aux Métis, en ce sens que vous avez parlé du caractère invisible. Ce que je lis et vois en partie, c'est que l'identification est un problème dans notre pays. Aimeriez-vous expliquer comment nous pouvons aborder ce problème?
    Les gens doivent commencer à poser des questions. Je vais être franche. Je défends les intérêts des gens depuis plus de 30 ans. Lorsqu'il s'agit de même aborder l'enjeu de l'itinérance, les gens ne veulent pas poser la question, et je lutte contre cet enjeu depuis de nombreuses années. Ils disent que c'est parce que c'est raciste. Eh bien, si je vous demande si vous êtes Italien, avez-vous l'impression que cette question sous-tend une certaine motivation raciale?
    Je pourrais m'opposer si vous disiez que je suis Italien.
    Non, mais je veux dire, j'utilise seulement cela...
    Je savais que j'obtiendrais une réaction de sa part.
    Mais c'est vrai. Pourquoi ne pouvez-vous pas poser la question? Pourquoi les gens ne peuvent-ils pas s'identifier? Cela nous amènerait à comprendre les différences et le caractère distinctif de chacune de nos collectivités.
    N'y a-t-il pas un enjeu plus grand, à l'échelle du pays, en ce qui concerne la reconnaissance comme un groupe défini?
    Vous allez me demander de devenir très politique ici, mais...
    Nous sommes un groupe de politiciens, donc...
    Tout ce que je sais, c'est que je suis une Métisse du Nord-Ouest et que je fais partie de la Constitution canadienne comme membre d'une des populations autochtones du pays. Je n'ai plus à défendre cela, parce que c'est qui je suis. Je suis déjà allée dans tous les tribunaux, et je ne dis pas « je » comme dans moi, mais « je » comme dans la nation métisse. Nous avons déjà fait cela.
    À ce stade, il nous revient de travailler pour dire qui nous sommes et ce que nous sommes, et de collaborer avec d'autres gouvernements dans un processus de pays à pays pour nous assurer que les droits des Métis sont reconnus, estimés et respectés, et que, en tant que pays, nous continuons de grandir de façon saine. C'est ma déclaration politique.
(1255)
    C'est bon. Merci. Nous vous en savons gré.
    Je suis allé dans une prison pour hommes qui comptait un pavillon de ressourcement. Le problème que la prison avait à ce chapitre, c'est qu'il était encombré de prisonniers blancs. Ceux-ci s'y trouvaient, et cela a créé de réels problèmes, parce qu'ils sont très populaires.
    Je suis récemment allé au centre KwIkwèxwelhp, près d'Abbotsford. Ils sont populaires. Les pavillons de ressourcement autochtones, du point de vue du SCC, ne se limitent pas aux personnes autochtones. Tout le monde qui souhaite y aller peut participer. Le problème, c'est qu'ils ne pouvaient pas obtenir suffisamment de détenus autochtones. Je pense qu'il y avait de 10 à 20 % de non-Autochtones, et c'est parce que les hommes non autochtones étaient en mesure de passer plus rapidement à des niveaux de sécurité minimale que les hommes autochtones.
    Ma question concerne les pavillons de ressourcement. Pour qu'on n'en arrive pas à ce que vous dites et à ce que j'ai vu, comment pouvons-nous les reproduire à plus grande échelle partout au pays? Comment pouvons-nous y arriver?
    Je pense que les collectivités ont des réponses, qu'elles soient situées dans des régions urbaines ou sur des réserves. Je pense que l'argument de Mme Yuen est très important. Bon nombre de personnes qui vont en prison ne connaissent aucunement leur identité autochtone, mis à part le vague sentiment qu'elles sont Autochtones. De façon tragique, comme une personne dans les derniers groupes d'intervenants l'a mentionné, certaines personnes ne commencent à connaître leur identité qu'une fois en prison. Puis, lorsqu'elles sortent, vous espérez qu'elles en apprendront davantage et poursuivront le cheminement nécessaire pour en apprendre davantage au sujet de leur culture.
    Nous exerçons nos activités à Toronto, et il y a des centaines de programmes de justice réparatrice pour les Autochtones partout au pays. Les responsables de ces programmes savent comment travailler avec les Autochtones. Ce ne sont pas des connaissances qui n'existent pas. Il s'agit simplement de prendre des connaissances existantes et de permettre qu'on les applique à des personnes lorsqu'elles sortent de prison.
    Bernadette, il vous reste deux minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos témoins d'être ici aujourd'hui.
    Madame Omeniho, nous avons entendu un représentant du ministère de la Justice dire la semaine dernière que les femmes sont moins susceptibles de s'identifier, et, par conséquent, qu'il est plus difficile pour elles d'accéder à certains des programmes qui leur sont offerts. Pourtant, une des choses dont vous parlez, c'est de nous assurer de nous identifier.
    Voyez-vous une façon qui nous permettrait d'aller de l'avant pour nous assurer que les Autochtones obtiennent les services de soutien auxquels ils sont admissibles?
    Une chose que je dirais, particulièrement dans le système correctionnel, c'est que si les gens comprenaient leurs responsabilités et leurs droits en tant que personnes au sein du système, elles se sentiraient beaucoup plus à l'aise de s'identifier. Si le fait de m'identifier en tant que personne autochtone dans un établissement va me mettre dans l'unité d'un gang, je ne veux pas être là non plus. Je vais dire: « Non, je ne suis pas Autochtone ». Si on leur permettait de comprendre que nous pourrions commencer à nous intéresser à certains des types de programmes plus réparateurs pour les aider à se réintégrer dans la collectivité, à se sortir des crises qui les accablent et à régler leurs problèmes, je pense que vous contribueriez grandement à ce que les gens puissent dire: « Oui, je suis cette personne ».
    Je suis aussi d'accord pour dire que de nombreuses personnes n'abordent même pas la question de leur identité culturelle jusqu'à ce qu'on leur en parle de façon plus positive. Malheureusement, parfois, le système correctionnel peut être ainsi.
    Par rapport à ce que vous avez dit, que vous ne vous identifieriez pas si cela voulait dire que vous alliez faire partie d'une unité de gang, est-ce quelque chose qui est prévalent? Est-ce qu'on établit des profils?
    Je crois comprendre qu'on le fait, mais y a-t-il des données probantes qui soutiennent cela? Où pourrions-nous en trouver?
    Je ne suis pas certaine de savoir où vous pourriez trouver les données probantes, mais je sais que des études ont été effectuées, même sur l'établissement de profils au moyen de fichiers, par exemple, ce qui se produit en ce moment dans nos collectivités. Je ne crois pas que vous deviez chercher très loin pour trouver beaucoup de ces données probantes.
(1300)
    Merci.
    Excellent. J'ai adoré les témoins aujourd'hui.
    J'aimerais vraiment remercier Jonathan Rudin, Melanie Omeniho et Mme Felice Yuen d'être venus aujourd'hui.
    En guise de rappel, jeudi, pour une heure, nous recevrons la West Coast Prison Justice Society, le Prisoners' Legal Services et aussi le West Coast Women's Legal Education and Action Fund.
    Notre deuxième groupe de témoins comprendra la Nation des Siksikas; Lois Frank, enseignante en études autochtones américaines et en justice criminelle, Université de Lethbridge ainsi que l'Association du Barreau autochtone.
    Merci. La séance est levée.
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