FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des pêches et des océans
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 13 avril 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bienvenue à la 57e réunion du Comité permanent des pêches et des océans. Nous poursuivons notre étude des zones de protection marines.
Nous accueillons quatre témoins aujourd'hui. Nous aurons une première ronde avec deux d'entre eux, puis nous suspendrons la réunion pendant quelques minutes, et nous passerons ensuite aux deux autres.
Pour la première ronde, nous accueillons Dan Laffoley, vice-président, milieu marin, de la Commission mondiale des aires protégées, qui représente l'Union internationale pour la conservation de la nature, et Daniel Pauly, chercheur principal pour Sea Around Us, à l'Université de la Colombie-Britannique.
Je souhaite la bienvenue à nos témoins. Vous aurez chacun 10 minutes pour présenter votre déclaration. Je vais essayer de m'en tenir à l'horaire prévu, parce que nous avons toujours beaucoup de sujets à aborder et qu'il est très important de respecter le déroulement de la réunion afin que nous puissions aborder le plus de choses possible. Après vos témoignages, les membres du Comité poseront des questions.
Sans plus attendre, et puisque le nom de M. Laffoley apparaît en premier, nous allons lui demander de prendre la parole pour 10 minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président, et bonjour à tous. Je suis très heureux de m'être joint à vous par vidéoconférence depuis le Royaume-Uni. Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invité et de me permettre de témoigner aujourd'hui.
Comme on vient de l'entendre, je m'appelle Dan Laffoley. Je suis vice-président, milieu marin, de la Commission mondiale des aires protégées de l'UICN. Je vais vous dire quelques mots sur l'UICN et la Commission mondiale. L'UICN, l'Union internationale pour la conservation de la nature est le réseau environnemental le plus étendu et le plus diversifié du monde. Elle est composée d'organisations gouvernementales et d'organisations de la société civile. Nous comptons environ 1 300 organisations membres, y compris beaucoup de gouvernements — le Canada est un membre —, et nous bénéficions des commentaires d'environ 16 000 éminents experts scientifiques.
Monsieur Laffoley, nous avons des problèmes techniques de notre côté. Pouvez-vous patienter une minute? Nos interprètes ne vous entendent pas. Nous avons arrêté le chronomètre, alors vous n'allez pas perdre de temps. Dans notre milieu, chaque seconde compte.
[Note de la rédaction: difficultés techniques]
Le vice-président (M. Robert Sopuck): On vient de m'informer que le son est très faible. L'interprète fera de son mieux, mais, si les choses ne s'arrangent pas, elle devra arrêter de fournir le service d'interprétation.
Je présume que nous avons le consentement unanime de poursuivre?
Des députés: D'accord.
Le vice-président (M. Robert Sopuck): Nous relançons le chronomètre.
Vous pouvez poursuivre votre exposé, M. Laffoley.
Merci, monsieur le président.
J'expliquais simplement la nature de l'UICN au sein du réseau mondial de conservation.
La Commission mondiale des aires protégées est le principal réseau mondial des professionnels des aires protégées. Elle crée et fournit des lignes directrices sur les aires protégées et offre un leadership en la matière.
Je suis responsable des aires marines protégées ou des enjeux liés aux AMP au sein de la Commission et je témoigne aujourd'hui au sujet des AMP au nom de la Commission. J'assume un rôle de leadership en matière d'AMP depuis plus de 30 ans au Royaume-Uni, en Europe et à l'échelle internationale.
Je crois opportun de commencer mon témoignage en expliquant ce en quoi consiste une aire marine protégée. Au sein de l'UICN, nous avons défini ce en quoi consiste une aire marine protégée. C'est un lieu géographique bien défini qui est reconnu, réservé et géré grâce à des moyens juridiques ou d'autres moyens efficaces afin d'assurer la conservation à long terme de la nature, des services écologiques connexes et des valeurs culturelles. C'est l'équivalent de la définition utilisée par la Convention sur la diversité biologique. La définition de l'UICN est reconnue et acceptée à l'échelle internationale.
Je tiens à souligner que la définition d'aire protégée est la même sur terre qu'en mer, et les attentes en matière de conservation sont elles aussi les mêmes. Pour dire les choses simplement, une aire marine protégée est une zone maritime consacrée spécialement à la protection et au maintien de la biodiversité et des ressources naturelles et culturelles connexes. Ces zones sont gérées grâce à des moyens juridiques ou d'autres moyens efficaces.
Les aires marines protégées présentent une diversité de formes et de tailles et, au sein de l'UICN, dans le cadre de nos lignes directrices, nous en reconnaissons cinq types, qui vont des zones protégées de façon stricte jusqu'aux zones à utilisations multiples où les activités sont réalisées selon les principes d'une utilisation durable.
Pour ce qui de la gouvernance — la façon dont les zones protégées sont gérées —, nous en reconnaissons quatre types. Les zones peuvent être gérées par des gouvernements, des collectivités autochtones ou locales ou le secteur privé ou faire l'objet d'une gestion mixte.
Le caractère commun à tous les types d'aires protégées, c'est qu'elles sont gérées dans le but d'assurer la conservation à long terme de la nature. En outre, lorsqu'il y a un conflit, la nature est toujours la première priorité.
Quels sont les avantages des aires marines protégées? Les avantages sont les suivants: la conservation de la biodiversité et des écosystèmes; un soutien pour renverser les déclins mondiaux ou locaux des populations de poissons et leur productivité grâce à la protection des habitats essentiels de reproduction, d'alevinage et d'alimentation; la promotion du tourisme maritime et l'élargissement des options économiques locales; la prestation d'occasions liées à la sensibilisation, la formation, le patrimoine et la culture; et l'élargissement des avantages généraux en tant que site de référence en ce qui concerne le statut de l'environnement marin.
Pour ce qui est précisément de la conservation, les zones marines protégées permettent de faire beaucoup de choses, du maintien et du rétablissement de la structure des écosystèmes et de leur fonctionnalité à la protection et au maintien de l'abondance des principales espèces dans les collectivités en passant par la protection des habitats contre les dommages physiques causés par la pêche, le maintien de l'intégrité génétique, des fonctions écologiques et de la résilience et la capacité d'agir comme une assurance pour atténuer tout effet néfaste, surtout dans les zones adjacentes.
Bref, les aires marines protégées sont des outils clés pour assurer la conservation de la nature qui ont fait leurs preuves. On peut s'en servir comme écosystème de référence afin de comprendre l'impact des activités, et elles peuvent être intégrées dans le cadre des activités de gestion des pêches afin de protéger des lieux clés et des zones de frayage. Si nous devons connaître le réel potentiel d'un environnement marin et savoir de quelle façon les zones touchées peuvent être comparées à ce qu'on pourrait appeler une zone « naturelle », alors les aires marines de protection sont au centre d'une telle approche.
Nous avons besoin d'aires marines protégées parce que les systèmes de gestion actuels ne fonctionnent pas. Ces systèmes n'arrivent pas à maintenir la productivité, la biodiversité biologique et les écosystèmes. À l'échelle mondiale, les prises de poissons sont constamment en déclin, et les aires marines protégées sont reconnues à l'échelle mondiale comme étant l'un des seuls outils pouvant aider à protéger les habitats importants et des échantillons représentatifs de vie marine et aider aussi à rétablir la productivité des océans.
En ce qui a trait au progrès réalisé relativement aux aires maritimes protégées, le Canada, de pair avec la plupart des autres pays, s'est engagé de façon claire à respecter les cibles internationales pour l'environnement en 2010 en vertu de la Convention sur la diversité biologique. L'une des cibles concerne précisément les aires marines protégées. C'est la cible 11. Il est dit que, d'ici 2020, au moins 10 % des zones côtières et marines, surtout les zones comptant une importante diversité et offrant d'importants services écologiques, devront être conservées à l'aide de zones protégées ou d'autres mesures locales efficaces.
Quant à savoir la mesure dans laquelle les pays ont réussi à protéger l'environnement de cette façon, environ 5,3 % des océans sont protégés. Si l'on regarde les zones juridictionnelles des pays, le pourcentage augmente à 13,2 %. En outre, d'ici la fin de l'année, probablement 21 millions de kilomètres carrés d'océan seront des aires marines protégées. En outre, pour la première fois, la superficie océanique protégée sera supérieure à la superficie terrestre protégée.
Il y a 21 pays qui ont protégé plus de 100 000 kilomètres carrés, dont les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Mexique, l'Afrique du Sud, le Chili et l'Indonésie. À cet égard, c'est fantastique d'entendre l'engagement renouvelé du Canada de respecter la cible de 10 % d'AMP d'ici 2020. Le Canada a actuellement protégé 50 000 kilomètres carrés dans des AMP et arrive pour l'instant au 33e rang à l'échelle mondiale dans ce domaine.
Pour ce qui est du lien entre les AMP et les pêcheries, je viens de parler de la cible touchant les AMP dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique, mais il y a 19 autres cibles tout aussi importantes, et une cible qui est liée particulièrement aux pêcheries, soit la cible 6. Ici, les pays ont convenu de s'assurer que les espèces sont gérées et pêchées de façon durable et que les pêcheries n'ont pas d'impact négatif sur les espèces menacées et les écosystèmes vulnérables.
Il y a un cadre international très clair en place, et il y a aussi des liens très clairs entre des mesures rigoureuses et complètes en matière de pêcherie au titre de la cible 6 et des mesures liées aux aires protégées en vertu de la cible 11 de la Convention. Le problème, c'est que la cible 11, celle des zones marines protégées, a fait l'objet de très bons rapports et attire beaucoup d'attention, tandis que la cible 6 sur les pêcheries ne fait pas l'objet d'aussi bons rapports.
Nous avons beaucoup de données probantes de qualité sur la façon de faire des aires marines protégées une réussite. Des centaines d'articles dans des revues scientifiques ont montré que les aires marines protégées de façon stricte et complète augmentent l'abondance des poissons, la biomasse et la diversité des populations de poissons et d'invertébrés. Nous savons aussi que les avantages obtenus sont liés à une série de facteurs différents et qu'une protection totale, de pair avec une bonne application et une bonne gestion ainsi que des zones marines protégées plus vieilles, plus grandes et plus isolées donnent le plus d'avantages.
Alors...
Oui, j'allais justement conclure.
Le dernier point que je veux soulever, c'est que nous devons voir les AMP et les activités de gestion des pêcheries dans le contexte du changement océanique et des importants défis auxquels nous sommes confrontés en raison du réchauffement, de l'acidification et de la désoxygénation des océans.
Les trois dernières choses que je tiens à dire c'est que les AMP ont de nombreux avantages socio-économiques et sont essentielles pour assurer des pêches durables. D'autres pays ont montré que les AMP, lorsqu'on les gère bien, peuvent fournir ces avantages, et le Canada, par l'intermédiaire de son engagement, a une excellente occasion de montrer au monde de quelle façon il peut obtenir ces avantages d'ici 2020.
Merci beaucoup.
Vous êtes pile à l'heure. Ce que nous constatons, monsieur Laffoley, c'est que s'il y a d'autres choses que vous voulez dire, vous pourrez le faire durant la période des questions.
Nous passons à M. Pauly pour les 10 prochaines minutes.
Ce que je veux vous présenter ce matin est la version illustrée de ce qui vient d'être dit.
La première chose que je veux vous montrer, c'est que les prises à l'échelle mondiale reculent. Les prises reculent, comme vous pouvez le voir dans le premier graphique — il est aussi disponible en anglais — parce que nous pêchons trop. On note tout particulièrement un recul lorsqu'on tient compte de tout ce qui ne figure pas dans les statistiques officielles.
Les prises déclarées, ce sont les prises officiellement déclarées par des organismes comme le MPO à la FAO. Les prises réelles à l'échelle mondiale sont beaucoup plus élevées, parce que beaucoup de choses ne sont pas comptées par les organismes officiels: les poissons rejetés, les poissons pêchés par les collectivités autochtones — par exemple, au Canada, ces pêches ne sont pas déclarées à la FAO — et beaucoup de prises illégales, dont des organismes comme la FAO ou le MPO ne connaissent même pas l'existence. En tant qu'université, nous pouvons en tenir compte. Les vraies prises à l'échelle mondiale sont beaucoup plus élevées — environ 50 % plus élevées — et elles reculent.
Pourquoi reculent-elles? C'est parce que nous pêchons trop. Il y a différentes façons de le dire, mais le pouvoir cumulatif des moteurs dans la flotte mondiale augmente à un rythme qu'on peut qualifier de fou. Vous pouvez le voir. C'est particulièrement vrai en Asie. Les flottes subventionnées augmentent très rapidement.
Le résultat, c'est que l'empreinte des pêcheries, qui était déjà importante dans les années 1950 lorsque les répercussions de la guerre ont commencé à s'estomper, a énormément augmenté. On n'a qu'à comparer la diapositive qui montre ce qui se produisait dans les années 1950 et la diapositive de ce qui se produit maintenant pour comprendre que l'empreinte des pêcheries est immense. C'est un processus mondial.
Pourquoi? Qu'est-ce qui est arrivé? Ce qui s'est produit, c'est que les pêcheries ont pris de l'ampleur. Les pêcheries s'étendent toujours. Elles ne peuvent pas rester au même endroit. Pourquoi? Parce qu'elles sont trop puissantes pour la productivité naturelle des ressources. Elles doivent aller ailleurs parce que, essentiellement, elles vident tout sur leur passage.
La flotte du Canada en est un bon exemple. J'étais un étudiant en Allemagne à l'époque et je suis venu sur un navire de recherche allemand, un navire-usine converti qui pêchait à une profondeur de 500 mètres à 1 kilomètre. Le Canada a pu pendant 500 ans maintenir une bonne pêche à environ 100 mètres de profondeur lorsqu'il pêchait de la morue dans les provinces atlantiques. Les chalutiers sur lesquels je me trouvais et qui étaient en activité dans les années 1970 allaient jusqu'à 1 kilomètre et demi de profondeur pour pêcher le poisson.
La profondeur est un refuge, c'était une aire marine protégée à l'époque. Les poissons étaient protégés par la distance. Ils étaient protégés par le froid et la glace. Les poissons étaient protégés de nous par la nature elle-même. Les progrès réalisés dans les pêcheries sont en train de contourner ces protections.
Les pêches se sont élargies: je parle ici du pourcentage de la production naturelle des océans qui est utilisée par les pêcheries. Si on utilise un seuil de 30, 20 ou 10 %, on peut voir l'augmentation durant les années 1970 d'environ 1 million de kilomètres par année. C'est environ la moitié de la superficie de l'Amazone chaque année. Les pêcheries s'élargissent.
Les aires marines protégées ne sont par conséquent pas vraiment quelque chose d'étranger qui vient de l'espace, comme des extraterrestres. C'est l'autre côté de cette expansion. Nous pêchons dans des endroits où avant, les poissons étaient protégés parce que nous n'y avions pas accès. Maintenant qu'ils sont accessibles, nous devons rétablir des aires marines protégées.
La notion d'aire marine protégée avait déjà été découverte il y a une centaine d'années, mais ces zones ont crû très lentement parce que nous avions de la difficulté à concevoir que les poissons étaient des espèces sauvages devant être protégées. Nous voyions à l'époque essentiellement l'océan comme un garde-manger où nous allions chercher de la nourriture.
L'idée a fait son petit bonhomme de chemin très lentement, et la croissance de ces zones s'est accélérée un peu plus, de 5 % par année. Mais 5 % par année, vu les valeurs de référence basses, n'allaient pas permettre d'atteindre les objectifs mentionnés par Dan Laffoley. Nous étions dans une situation comme celle décrite dans mon mémoire.
Dans l'Atlantique-Nord, vous pouvez voir en vert les zones qui étaient protégées. Oui, c'est une blague. On ne peut rien voir vu la taille de pixels que nous utilisons. Il y a des aires marines protégées ici et là, y compris au Canada, mais elles sont minuscules. L'océan n'était essentiellement plus protégé.
Cela a changé depuis que le président Bush — imaginez! — a créé une importante zone marine protégée autour de l'Île Nord-Ouest d'Hawaï. Il s'est agi de la première importante réserve marine. Le président Obama l'a élargie, et les chefs d'État, bien évidemment, ont commencé à dire « j'en veux une moi aussi ».
Puis, la Nouvelle-Zélande est entrée en scène. La France s'est jointe au groupe, puis la Russie, et on remarque maintenant une tendance liée à la création d'aires marines protégées de grande taille. Cependant, ces aires se trouvent seulement dans les zones économiques exclusives des pays. Puisqu'elles sont à l'intérieur des zones économiques des pays et qu'il n'y a pas de cadre juridique pour créer des réserves marines en pleine mer — aucun pays n'a le droit de le faire à l'extérieur de sa zone économique — la création de réserves marines est essentiellement limitée.
Un jour, toutes les îles inhabitées seront des réserves marines, et là, nous aurons protégé une bonne partie du Pacifique, mais absolument pas l'Atlantique, aucun des lieux de pêche dans l'hémisphère Nord qui doivent être protégés.
Vous pouvez voir qu'une bonne partie de ces aires marines protégées, en bleu foncé, les grosses, sont créées dans l'hémisphère Sud.
Au Canada, même si Dan Laffoley a dit que nous arrivions au 33e rang à l'échelle internationale, nous n'avons pas en fait d'importantes réserves marines dont on peut se vanter. Le Canada s'est traîné les pieds. Je suis au Canada depuis 22 ans et j'ai entendu des paroles et encore des paroles. Et les réserves marines ne sont pas créées au Canada, et nous sommes en train de devenir une retardataire comparativement aux autres pays.
Elles ne coûtent pas cher à créer, en fait, lorsqu'elles sont grosses. Cependant, on est confronté aux mêmes réticences des gens qui n'en veulent pas, les petites comme les grosses, alors aussi bien en créer des grosses. C'est moins dispendieux. C'est ce que nous avons montré dans notre article.
Le message clé, c'est que les réserves marines permettent de protéger efficacement la biodiversité marine pour la simple raison que ces réserves sont l'équivalent d'un monde dans lequel on ne pêche pas, le genre de monde qui crée la diversité que nous voulons voir. C'est l'autre côté de la médaille.
Actuellement, au rythme où le Canada crée des réserves marines, et il ne respectera pas son engagement de 10 % d'ici 2020.
Le temps est venu de passer des paroles aux actes.
Merci beaucoup.
C'est toujours un plaisir d'accueillir des témoins disciplinés qui utilisent leur temps de façon efficiente afin qu'il y ait plus de temps pour les questions.
Nous allons commencer la première série de sept minutes par M. Hardie.
Merci, monsieur le président.
Merci à nos invités d'être là.
J'aimerais bien avoir plus de sept minutes. Je suis sûr que mes collègues vont assurément eux aussi utiliser tout leur temps.
Monsieur Laffoley, vous avez mentionné l'intégrité génétique comme étant l'un des objectifs des aires marines protégées. De quelle façon peut-on concilier ça, cependant, avec l'impact des changements climatiques?
Nous voyons des incursions d'espèces qui vivaient dans un endroit de l'océan à d'autres endroits où ils n'allaient pas avant.
J'ai, j'imagine, deux questions.
Y a-t-il un aspect des aires marines protégées qui pourrait faire quelque chose par rapport à cette situation ou, à l'inverse, y a-t-il certains avantages liés aux changements climatiques qui permettent à certaines espèces de se rendre dans d'autres zones océaniques?
Merci beaucoup.
Essentiellement, l'enjeu, c'est qu'il y a une interaction, et si nous protégeons de façon stricte les zones, pour permettre aux écosystèmes de se rétablir et permettre aux grandes espèces prédatrices de se rétablir, ces zones pourront mieux contrer certaines des espèces envahissantes. Il y a un genre de relation dans cette optique.
Il y a aussi une relation plus générale, soit le fait que les changements climatiques ont un impact sur tout l'océan, mais les zones plus naturelles afficheront un niveau plus élevé de résilience et vont se remettre plus rapidement. Elles nous permettront aussi de reconstituer les aires environnantes de façon plus efficace.
C'est la raison pour laquelle nous considérons les aires marines protégées, dans ce contexte, comme un outil particulièrement utile.
Lorsque nous regardons la croissance des pêcheries et la quantité de zones océaniques que, essentiellement, on exploite pour en tirer les ressources halieutiques, cela soulève deux ou trois questions.
Premièrement, le fait que nous pêchions plus en profondeur et de façon plus étendue indique qu'il y a une demande commerciale pour ces produits. Est-ce simplement le fait que la demande mondiale augmente à ce rythme?
Y a-t-il certaines choses que nous devons faire? En ce qui a trait à l'efficience de ces opérations, est-ce que nous gaspillons, par exemple, beaucoup de ce que nous pêchons? Pourrait-il y avoir une meilleure gestion de ce que nous pêchons actuellement afin de réduire un peu la pression exercée par la croissance que vous avez constatée?
La plupart des activités de pêche que nous réalisons, une bonne partie de la croissance que vous avez vue, ne sont pas nécessaires pour nos récoltes. C'est surtout le résultat de la compétition entre différents pays qui veulent pêcher, qui veulent ramener le poisson dans leur pays, plutôt que de voir un autre pays le pêcher.
Nous pourrions nous satisfaire du quart de la capacité des pêcheries que nous avons. Chaque bateau perd de l'argent, en fait. À l'échelle internationale, une bonne partie des flottes en opération sont maintenues seulement grâce à des subventions gouvernementales.
Nous gaspillons de très grandes quantités de poissons pour deux raisons. Environ de 10 à 15 tonnes par million de tonnes de poisson sont rejetées chaque année dans le cadre des opérations de pêche régulière, y compris au Canada. C'est une procédure opérationnelle normale, qui touche également la morue dans le cadre des activités de pêche à la crevette.
Une autre source énorme de pertes est l'utilisation de poissons comestibles pour faire de la farine de poisson. Chaque fois que vous mangez du saumon, vous mangez en fait du maquereau et des sardines qui ont été transformés en farine de poisson pour le saumon, un aliment qu'on vend à plus haut prix. Nous dépensons d'énormes quantités d'aliments de cette façon — environ le tiers des prises mondiales sont transformées en farine de poisson et gaspillées de cette façon.
J'ai une question pour vous deux. Pouvez-vous formuler des commentaires sur la nécessité, les pratiques et les répercussions de l'aquaculture en matière de protection de l'intégrité écologique de l'océan?
Je vais commencer par vous, monsieur Laffoley.
Nous nous sommes penchés de près sur cette question, et la relation entre l'aquaculture et les aires marines protégées. Nous croyons qu'il y a de meilleurs choix qui peuvent être faits par l'industrie en ce qui a trait à certains des points que Daniel Pauly a déjà soulevés.
Le fait de pêcher des espèces de niveau supérieur et de nourrir du poisson avec du poisson n'est pas très logique, mais certaines activités d'aquaculture à plus petite échelle utilisant des bivalves et d'autres choses du genre peuvent être compatibles, dans une certaine mesure, avec certaines catégories d'aires marines protégées.
Nous avons besoin de mieux comprendre et de mieux utiliser cette relation.
Essentiellement, l'aquaculture, telle que je la comprends dans l'Ouest ou au Canada, consiste à nourrir du poisson avec du poisson, mais cela ne produit pas du poisson: l'activité en consomme.
L'aquaculture, telle qu'on la conçoit ici, consomme du poisson. L'aquaculture qui produit des millions de tonnes de poisson vise en fait les bivalves et des espèces qui sont très bas dans l'échelle du monde de l'alimentation, comme la carpe. Ce sont des poissons qui ne sont pas très populaires au Canada, mais ils constituent l'essentiel de ce que la Chine et d'autres pays, surtout en Asie, contribuent à l'aquaculture.
Lorsque nous disons que l'aquaculture est un secteur très dynamique qui permettra de nourrir le monde, il faut comprendre qu'on parle ici d'un peu de saumon au-dessus d'une immense production d'espèces moins prisées dans le monde de l'alimentation.
Nous croyons que la production de saumon, c'est de l'aquaculture, mais ce n'est pas le cas. L'aquaculture, c'est une façon d'améliorer la qualité et le prix de ce qu'on vend, mais ce n'est pas une solution à la crise alimentaire — si c'est ainsi que vous voulez décrire les choses — pas plus que les Maserati servent à transporter les gens.
Non, votre temps est écoulé.
Une petite correction pour le compte rendu — je représente la circonscription où l'on produit le plus de canola au pays —, le pourcentage de farine végétale dans l'alimentation des poissons augmente tout le temps, et le canola, comme nous le savons, en fait de plus en plus partie. C'est une grande réussite, et je crois que jusqu'à la moitié des aliments utilisés pour nourrir le saumon est constituée de canola.
L'argument au sujet de la gravité du fait de nourrir le poisson avec du poisson est, je crois, bien compris, mais l'utilisation de farine de canola commence à réduire l'utilisation du poisson dans l'alimentation du poisson.
De toute façon, je voulais faire un peu de publicité pour ma circonscription et mes cultivateurs de canola. Je reste, après tout, un politicien.
Bon, nous en sommes aux sept minutes de M. Arnold.
Merci, monsieur le président, merci à vous deux, monsieur Laffoley et monsieur Pauly, d'être là.
Pour commencer, monsieur Laffoley, est-ce que l'UICM a un énoncé de mission ou un énoncé d'objectif, et dans l'affirmative, quel est-il?
Je ne peux pas vous le fournir immédiatement, mais, oui, nous avons un énoncé de mission très clair. Concrètement, il concerne l'engagement de la société civile envers la protection, la gestion et l'utilisation durable des écosystèmes et le fait de s'assurer qu'une juste proportion de ces écosystèmes sont gérés et protégés de façon efficace pour les générations futures.
D'accord, merci.
Peut-on assurer une conservation marine sans modifier l'équilibre entre la protection de l'environnement et les économies locales qui dépendent de la pêche et de l'aquaculture?
Oui.
Je crois qu'il y a une relation très intéressante ici. L'utilisation de l'environnement est aussi fonction de la protection de l'environnement, et, en fait, il y a en ce moment un vrai déséquilibre.
M. Pauly a aussi décrit l'expansion des pêches, mais, comme je l'ai mentionné vers la fin de mon témoignage, les problèmes actuels avec lesquels nous composons en ce qui a trait à la relation entre les pêches et la santé de l'environnement et la pollution sont maintenant exacerbés par des changements plus globaux découlant des changements climatiques. Les océans ont tendance à être plus acides et à contenir moins d'oxygène. De plus, ils se réchauffent. Cela empire le déséquilibre. Si nous voulons maintenir les avantages que nous constatons liés à la pêche, nous devons aussi protéger une proportion raisonnable des océans.
Comme je l'ai dit dans mon témoignage, et comme M. Pauly l'a expliqué aussi, il y a un déséquilibre, et il faut procéder à un rattrapage. Un certain nombre de pays, comme je l'ai dit, le font déjà, et le Canada s'est engagé à agir en ce sens.
Je crois que vous avez dit que les systèmes de gestion actuels ne fonctionnent pas. Pouvez-vous nous dire pourquoi? Pourquoi les systèmes actuels ne fonctionnent-ils pas?
Si nous pouvions corriger les manquements dans les systèmes actuels, aurait-on encore besoin d'aires marines de protection ou est-ce que de meilleurs systèmes de gestion, essentiellement, permettraient de répondre aux besoins en matière de protection et de conservation sans que des mesures de préservation soient nécessaires?
Je crois que le problème, c'est que nous tirons trop de choses de l'océan et que nous ne le protégeons pas assez.
Je crois que, en fait, il faut trouver un meilleur équilibre à ce sujet et qu'il faut mieux protéger les principaux éléments des écosystèmes en cours de route, ce qui nous permettra de conserver ces valeurs à l'avenir.
C'est plusieurs choses.
Je suis assis ici, et je pense au milieu des spécialistes des aires marines protégées et des gouvernements qui s'engagent à ce chapitre, dont je fais partie, et je dis que nous devons mieux faire les choses. Nous devons mieux faire les choses tant pour ce qui est du niveau de gestion que de l'échelle des activités de gestion.
Nous savons que si nous assurons une gestion des aires protégées, nous pouvons tripler les avantages que les gens obtiennent actuellement. C'est un bon argument d'investissement, mais en même temps, nous avons amélioré la gestion des pêches.
La réalité, c'est qu'il ne faut pas choisir entre les deux. Nous avons besoin de tout. Il faut améliorer la gestion globale de l'environnement marin et mettre en place une meilleure structure de gestion globale.
J'imagine qu'il faut trouver l'équilibre entre la gestion de toutes les pêches et l'exploitation afin que tout le système marin devienne, dans une certaine mesure, une aire protégée, sans nécessairement réserver des zones précises ou des zones d'exclusion à de nombreuses opérations.
De quelle façon peut-on trouver cet équilibre?
Selon moi, ce sont deux approches légèrement différentes.
Les aires protégées sont des écosystèmes totalement protégés, ce que nous appelons de la conservation in situ, ce qui permet aux gens, pas nécessairement de comprendre tous les liens dans la chaîne, dans le réseau alimentaire, mais qui permet d'accroître la résilience et d'améliorer la protection.
La gestion des pêches a tendance à mettre l'accent sur des espèces individuelles, peut-être, sans tenir compte du contexte des répercussions plus globales sur l'environnement ou les autres pêches réalisées dans une zone.
On peut peut-être faire une analogie avec la grande forêt que nous avons en Colombie-Britannique, là où il y a ces énormes arbres. Nous ne pourrions pas en bénéficier si nous faisions un peu d'agriculture dans la forêt. Ils sont là parce qu'il y a certaines zones où nous avons dit qu'il n'y avait pas d'exploitation forestière, pas d'agriculture, rien. C'est la raison pour laquelle nous avons ces arbres.
S'il y avait un peu d'agriculture et que nous permettions d'utiliser des scies à la chaîne seulement un jour sur deux ou un dimanche sur deux, ça serait fini. La réglementation de l'exploitation de certaines espèces animales n'est pas possible...
Si vous me permettez, j'aimerais passer à autre chose et préciser une autre déclaration, soit que le Canada arrive au 33e rang des pays en ce qui a trait aux zones protégées.
Pouvez-vous nous donner un peu de renseignements contextuels à ce sujet? Est-ce que vous comparez les totaux par pays, les pourcentages de zones marines par rapport à la masse terrestre ou est-ce un calcul par habitant? Et quel est le lien avec la protection de la biodiversité et tout le reste?
C'est peut-être compliqué.
C'est une statistique assez simple.
C'est plus compliqué lorsqu'on y regarde de plus près, mais les données sont fondées sur les statistiques des aires protégées que le Canada a officiellement fournies dans la base de données mondiales des aires protégées. C'est une mesure fondée sur la superficie et qui indique combien de zones maritimes sont actuellement protégées dans le territoire marin de compétence canadienne comparativement aux statistiques des autres pays, alors c'est [Note de la rédaction: inaudible].
Non.
Essentiellement, une des statistiques qui sont recueillies conformément à la Convention sur la diversité biologique, c'est la zone océanique que les pays définissent comme des aires marines protégées, et c'est uniquement cette statistique.
Il y a, évidemment, tandis que nous avons parlé de ces questions, beaucoup d'enjeux liés au fait qu'il ne faut pas seulement avoir des aires, mais les gérer de façon efficace aussi.
Merci, monsieur le président.
Merci à nos témoins de témoigner sur cet important sujet.
Je veux commencer par mentionner l'objectif de ce que nous faisons ici. Nous examinons les critères et les processus utilisés pour cerner et établir des aires marines protégées, les AMP, dans le but de s'assurer que les critères et les processus sont harmonisés de façon à obtenir, par exemple, des avantages prévus des AMP.
Monsieur Laffoley, je devrais peut-être commencer par vous. Vous avez défini ce en quoi consiste une AMP. Vous allez aussi parler des principaux outils éprouvés en matière de conservation de la nature. Pourriez-vous nous envoyer des données probantes ou des études à ce sujet? Vous pourriez peut-être nous envoyer vos cinq ou dix meilleures études qui prouveraient au Comité, grâce à des données probantes clés, que ces AMP sont des outils éprouvés. Vous avez aussi mentionné qu'il y a beaucoup de données probantes sur la façon dont nous pouvons protéger les AMP. Vous avez mentionné des centaines d'études. Vous pourriez peut-être nous envoyer vos principaux outils éprouvés en matière de conservation de la nature et peut-être les 10 principales études sur la meilleure façon de protéger les AMP. Je crois que le Comité apprécierait cette contribution.
De plus, vous avez parlé du fait que les AMP peuvent renverser le déclin des populations visées par les pêcheries. Vous avez aussi mentionné la protection de l'abondance des principales espèces, ce que ces outils, ou ces AMP, permettent de faire. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ces deux choses, en quoi elles renversent les déclins et en quoi elles protègent l'abondance?
Premièrement, je serai très heureux de vous fournir l'information. Toute une initiative, la Science of Marine Reserves, a analysé des centaines d'articles publiés dans des revues avec comité de lecture. C'est là un des ensembles de données probantes. Il y a aussi un ouvrage publié très récemment dans la revue Nature, et c'est cet article auquel j'ai fait référence lorsque j'ai dit qu'une gestion efficace permettait d'augmenter les avantages. Je vous fournirai ces renseignements.
Essentiellement, pour ce qui est de savoir ce que les aires marines de protection permettent de faire lorsqu'on protège de façon stricte une zone de l'océan, nous constatons dans quasiment tous les cas que nous enlevons la pression et permettons aux écosystèmes de se rétablir en revenant à un état plus naturel. Les statistiques révèlent que, en moyenne, on obtient une augmentation de la biomasse de 446 % — on parle ici de la quantité d'organismes dans la zone — parce que nous ne l'épuisons plus. On obtient une meilleure diversité.
En fait, nous faisons quelque chose d'essentiel qui est important pour les interrelations entre les aires marines protégées et les pêcheries: nous permettons aux poissons de vieillir. Les poissons femelles plus âgés produisent plus d'oeufs qui sont de meilleure qualité. Elles ont tendance à être plus résilientes à ce dont on parle lorsqu'il est question de la tempête silencieuse des changements climatiques à laquelle nous serons confrontés. On permet à ces aires d'agir comme des barrières de protection qui permettent la régénération. Il y a des quantités massives d'éléments de preuve et de renseignements à ce sujet. Nous pouvons vous fournir certaines références clés.
C'est concrètement ce qu'on obtient. Tout pays qui veut gérer de façon durable son environnement marin devrait en fait savoir quelles sont les données de base, ce qui est une autre valeur associée à ces zones. C'est un peu comme dire: « je vais vous faire de la chimie au niveau A, mais je ne vais pas utiliser de groupe témoin pour démontrer la réaction que j'obtiens ». On nous a tous enseigné que nous avons besoin de groupes témoins, et les aires peuvent aussi jouer ce rôle utile.
Excellent. Merci beaucoup.
Monsieur Pauly, vous avez fourni au Comité un graphique des prises déclarées à l'échelle mondiale et de leur déclin. Merci de nous avoir fourni cette information.
J'ai une question de pure forme avant de poser ma vraie question. Comment se fait-il que tous les pays peuvent pêcher à l'extérieur des limites de leur pays, mais qu'aucun d'entre eux ne peut protéger des zones à l'extérieur de ses limites marines? Je trouve qu'il s'agit là d'une dynamique intéressante. J'ai souvent eu de la difficulté à comprendre cette situation, assurément dans le cadre de mon rôle au sein du Comité permanent et au sein du caucus qui s'intéresse au dossier des océans, dont je suis le coprésident. En tant que pays, nous pouvons seulement travailler dans nos limites, mais toutes les activités ou la destruction se produit à l'extérieur. Nous n'avons pas notre mot à dire, en tant que pays, sur la façon de protéger ces zones, mais nous pouvons tout de même y pêcher.
En fait, les activités de pêche — en tonnage — qui sont réalisées à l'extérieur des zones économiques exclusives représentent moins de 10 % des prises mondiales. Ce sont essentiellement les pêcheries de thon.
Le gros des pêches dans le monde a lieu dans les zones économiques exclusives...
C'est bon à savoir.
Vous nous avez fourni certaines aides visuelles, ici. Avez-vous une carte des zones dans les océans du Canada que votre organisation nous recommande de protéger?
En m'en venant ici, hier, je me suis dit: « oh, mon Dieu, j'aurais dû inclure une telle chose ».
Mon groupe à l'Université de la Colombie-Britannique ne participe pas aux décisions stratégiques et fournit seulement des renseignements contextuels.
Cependant, je suis assez sûr que le Canada respectera son exigence de 10 % d'ici 2020 en créant une importante zone marine protégée au beau milieu de nulle part, dans l'Arctique. C'est ce que la plupart des pays font actuellement. La France le fait en créant sa zone dans le milieu du Pacifique, autour des îles où il n'y a personne. C'est ce que le Royaume-Uni a fait. Les États-Unis ont fait la même chose.
Eh bien, nous faisons dans la roche et la glace en Colombie-Britannique.
Pouvez-vous nous dire où sont les principales aires productives d'un point de vue biologique dans nos océans?
Il aurait dû y avoir des aires marines protégées dans les zones qui maintiennent la morue au Canada. Avec la morue, on a un peu fait sauter la banque. On pigeait à même les capitaux plutôt que de simplement pêcher les intérêts. S'il y avait eu des zones le long des côtes du Labrador et de Terre-Neuve où il n'y avait pas de pêches, il y aurait encore de la morue.
Merci beaucoup.
Je vais me permettre un court commentaire éditorial.
M. Laffoley a parlé de la valeur des plus grandes femelles. Il y a eu une importante évolution de la réglementation des pêches récréatives en vertu de laquelle il est maintenant obligatoire de libérer les grands poissons. Avant, il fallait remettre à l'eau les petits poissons et garder les gros, ce qui était exactement ce qu'il ne faut pas faire. Le changement de culture dans la pêche récréative n'est rien de moins que phénoménal. Les gens sont très fiers de remettre à l'eau ces gros poissons. C'est très rare maintenant de voir un gros poisson tué par un pêcheur récréatif responsable.
De toute façon, nous allons maintenant passer à M. Morrissey, pour sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Ma question, je crois, est destinée à M. Laffoley.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet des cibles internationales? Vous avez dit que le Canada a été un signataire de ces cibles en 2010.
Qui en a parlé?
Oui, c'est moi qui l'ai dit. Je cherche ma référence à ce sujet.
Il s'agit de la Convention sur la diversité biologique que les pays ont signée. Il y a eu une réunion à Aichi, au Japon, en 2010, pour examiner et renouveler les cibles. C'est la raison pour laquelle on les appelle les cibles d'Aichi. Il y a 22 cibles, et la cible 11 est celle qui concerne les aires marines protégées.
Oui, pour autant que je sache.
Je ne connais pas très bien tout le détail de l'ensemble des discussions au Canada, mais c'est ce qui explique l'engagement d'essayer de respecter la cible de 10 % d'ici 2020.
D'accord. Je voulais simplement le préciser.
Vous avez mentionné le fait qu'il n'y a pas beaucoup de rapports liés à la cible 6. Pourriez-vous nous en dire un petit peu plus au sujet de votre préoccupation liée à la cible 6?
Oui, bien sûr.
La Convention sur la diversité biologique réalise des examens réguliers pour voir les progrès relativement aux cibles afin de laisser savoir aux pays comment vont les choses. Les responsables savent si certaines cibles font l'objet de bons ou de mauvais rapports.
Assurément, la cible 6, qui concerne la pêche durable — c'est-à-dire que les pêcheries ne devraient pas avoir « d'impacts négatifs marqués sur les espèces menacées et les écosystèmes vulnérables » et que « l'impact de la pêche sur les stocks, les espèces et les écosystèmes restent dans les limites écologiques sûres » — est une cible dont on reconnaît qu'elle pourrait faire l'objet de meilleurs rapports.
Je veux revenir sur ce point avec M. Pauly.
Pour moi, un député de la côte Atlantique qui représente une zone de pêcheries, vos graphiques étaient fascinants et éclairants. Ils ont mis en contexte certains des défis auxquels l'économie des pêcheries est confrontée. J'ai deux questions.
Un certain nombre de témoins du Comité se sentent très préoccupés par le fait que la documentation du MPO — les gens responsables de surveiller les prises — et les prises réelles déclarées par les acheteurs et les diverses autres parties ne concordent pas. Votre graphique semble le confirmer. De quelle façon pourrait-on régler ce problème?
Tous les pays, y compris le Canada, adhèrent à ce qu'on appelle une pêche fondée sur les écosystèmes ou une gestion des pêches fondée sur les écosystèmes, mais cela ne correspond qu'à des voeux pieux, parce que, en réalité, on continue à assurer une gestion espèce par espèce. Imaginez que nous interdisions la pêche à la morue, mais nous continuions en fait de pêcher de jeunes morues accidentellement dans le cadre des activités de pêche à la crevette. Le MPO ne déclare pas ces prises parce qu'elles sont éliminées. Je suis perplexe chaque fois que j'entends: « nous avons cessé de pêcher la morue en 1992 en raison du moratoire ». En fait, nous avons continué à pêcher la morue dans le cadre des activités de pêche de crevettes, mais si ce n'est pas une pêcherie ciblée, la cible étant les crevettes, la morue qui est pêchée n'est pas déclarée à ce titre. C'est totalement absurde, mais c'est de cette façon que fonctionnent de nombreuses, très nombreuses organisations de gestion des pêches, surtout dans l'Atlantique-Nord. Il faut une réforme, parce que l'on se moque de la façon dont on tue le poisson, que ce soit par une pêche ciblée ou accidentelle. Cependant, une pratique bien ancrée au sein du MPO, c'est de déclarer seulement les pêches ciblées.
C'est un très bon point.
J'ai une dernière question destinée aux deux témoins, et j'aimerais connaître votre avis. Il y a des frictions entre la pêche commerciale — et les économies associées aux pêches commerciales — et la protection de l'habitat des poissons. Nous entendons des témoins du milieu de la pêche et des collectivités qu'ils représentent. Pouvez-vous tous les deux nous en parler rapidement? Croyez-vous que, au sein des aires marines protégées, les deux parties peuvent travailler et atteindre le même objectif, les pêcheurs commerciaux gagnant leur vie et soutenant leur collectivité alors qu'on protège aussi la durabilité à long terme des pêcheries dans ces régions? Ou n'est-ce simplement pas possible?
Si vous me le permettez, les pêcheries ne devraient jamais être considérées comme une chose distincte. L'aquaculture n'est pas une chose distincte: il y a des carnivores et d'autres types d'aquaculture. C'est la même chose à Terre-Neuve-et-Labrador: il y a de petits pêcheurs qui ne peuvent pas aller très loin, et ce sont eux qui ont constaté l'effondrement de la morue. De plus, il y a les chalutiers, les gros chalutiers, comme celui sur lequel je suis embarqué lorsque j'étais étudiant, qui peuvent se rendre là où sont les poissons, partout. Ils ne remarquent pas que les stocks chutent, parce qu'ils restent toujours au centre de la concentration. Le Canada a entrepris un processus — notre pays est en train de réaliser ce processus — de réouverture de la pêche à l'intention des grands chalutiers. Historiquement, la pêche à la morue consistait en une quantité de 100 000 à 200 000 tonnes de poisson pêché par des petits pêcheurs qui descendaient à une profondeur de 100 mètres. Maintenant, si on rouvre la pêche aux grands chalutiers, encore une fois, tous les stocks seront disponibles — tous les stocks le seront — et ils seront pêchés. Il faut mettre l'accent sur les plus petites pêcheries, qui sont compatibles avec la conservation.
Je suis d'accord avec ce qui vient d'être dit. Selon moi, il faut regarder l'intersection entre les intérêts commerciaux et les intérêts de conservation et se rendre compte que les aires protégées peuvent être une partie essentielle du processus.
J'ajouterais que, selon moi, nous allons peut-être être témoins d'un dénouement assez intéressant dans cette direction au cours des prochaines années. La cible que j'ai mentionnée, la cible 11, concerne les aires marines protégées et d'autres mesures efficaces par zone. Nous travaillons avec les responsables de la Convention sur la diversité biologique — et en fait avec les Pêches, au Canada aussi — pour réfléchir à ce à quoi ce chevauchement pourrait ressembler. Il y a des choses sur le terrain, des mesures fondées sur les zones, qui, si elles respectent les critères au titre de la cible 11 en matière de conservation in situ, devraient être mieux reconnues comme étant des contributions utiles. En même temps, on pourrait ainsi mieux comprendre de quelle façon obtenir le plus d'avantages du côté des pêches.
Il y a d'importantes choses qui pointent à l'horizon.
Merci, monsieur le président.
Je crois que je vais poser ma question aux deux témoins, qui pourront répondre l'un après l'autre, si possible.
Je veux connaître votre opinion. Est-ce que les activités autres que l'exploitation des stocks de poisson — je parle de la pêche et de tout ça —, comme l'observation des baleines, le transport maritime, l'extraction des ressources naturelles et l'énergie marémotrice, peuvent se poursuivre dans les AMP si on juge qu'elles ont un effet négligeable sur les objectifs escomptés en matière de protection de la biodiversité dans ces AMP? Est-ce que ces types d'activités sont encore possibles dans une AMP?
Tout dépend de l'objectif de l'aire marine protégée en question. Comme M. Pauly l'a mentionné, les pays mettent de côté des zones de protection strictes, pour assurer la survie de la biodiversité, des zones où il y a seulement des activités comme des visites de touristes. Parfois, les visites de touristes sont compatibles.
Dans diverses situations, il existe peut-être une certaine compatibilité, mais, ensuite, il y a les aires marines protégées à utilisation multiples où l'on accepte des activités durables pouvant avoir un certain impact. Il y a un continuum dans le cadre de ce processus. Cela ne signifie pas que, si on arrête les pêches, il faut arrêter tout le reste. Tout dépend de l'objectif de l'aire marine protégée.
C'est très clair. Je crois que les AMP peuvent avoir des objectifs différents, alors des activités pourraient quand même être permises dans ces zones.
La Grande Barrière de corail est un bon exemple. Elle est maintenant en danger en raison du réchauffement climatique. Un grand éventail d'activités sont permises autour de la Grande Barrière. Il y a certaines zones où seulement des recherches sont permises et, dans de très rares zones, on ne peut même pas mener de telles activités tandis que dans d'autres, on peut en réalité faire des expéditions.
Merci.
Vos réponses me ramènent à l'une de mes questions précédentes au sujet du fait que le Canada se classe au 33e rang. Est-ce que certaines des règles et des restrictions liées à nos pêches pourraient compter, même, lorsqu'on évalue ce qui est déjà protégé?
C'est ce dont je parlais justement au sujet de l'élaboration des recommandations sur lesquelles nous travaillons. En plus des aires marines protégées, n'oublions pas l'expression « autres mesures de conservation efficaces par zone ».
Si la fermeture d'une pêche permet d'assurer la conservation in situ de la diversité biologique dans le cadre d'une gestion plus générale des pêches, une fermeture des pêches par zone à long terme qui vise en fait à garantir la persistance de la nature et des poissons dans ce contexte, eh bien, une telle mesure pourrait faire en sorte que des cibles de durabilité dans le cadre de la gestion des pêches pourraient être aussi reconnues comme des mesures de conservation efficaces parallèlement aux aires marines protégées. C'est ce sur quoi nous tentons de travailler actuellement. Je crois qu'il y a une très bonne occasion de tenir des discussions très intéressantes avec le secteur des pêches.
Faudrait-il qu'il y ait fermeture en tant que telle ou pourrait-il s'agir de restrictions très strictes?
Pour l'instant, ces zones sont différentes des aires marines protégées. L'origine des processus peut être différente, mais le résultat devrait être le même: la conservation in situ. Dans le cadre de la gouvernance de ces zones, il faudrait s'assurer de la persistance de la valeur de conservation.
Comme je l'ai dit plus tôt, la gouvernance peut prendre de multiples formes. C'est une question de niveau de contrôle et le fait de s'assurer qu'on possède un niveau de contrôle suffisant pour assurer la persistance de la valeur de conservation à l'avenir. Certaines zones de pêche pourraient respecter ces critères. Les grandes zones protégées où il y a des épaves historiques ou des cimetières de guerre peuvent aussi respecter ces critères, parce que le résultat correspond justement au maintien de la valeur de conservation.
J'ai bien peur qu'il faille s'arrêter ici.
Je tiens à remercier nos invités de nous avoir présenté des exposés très instructifs. Trop souvent, nos témoins nous présentent des exposés de nature très générale. Ce que nous avons vraiment aimé au sujet des vôtres, c'était les suggestions très pratiques que vous avez formulées, étayées par des données de recherche très détaillées. Je crois que vos témoignages seront très utiles au Comité lorsqu'il produira son rapport.
Cela dit, je vais suspendre quelques minutes afin que nous puissions accueillir nos prochains témoins.
Encore une fois, merci beaucoup.
Le Comité reprend ses travaux.
Nous accueillons nos deux prochains témoins pour la prochaine heure. Il s'agit d'Al Martin, directeur des initiatives stratégiques de la B.C. Wildlife Federation, et de Michel Richard, représentant syndical de l'Union des pêcheurs des Maritimes.
Chacun de nos témoins se verra accorder 10 minutes. Je vais tenter de faire en sorte que vous vous en teniez à 10 minutes parce que notre comité est très impatient de poser des questions.
Sur ce, monsieur Martin, vous disposez de 10 minutes pour faire votre déclaration.
Merci beaucoup, monsieur Sopuck.
Je vais vous expliquer brièvement qui nous sommes.
La B.C. Wildlife Federation est un organisme de conservation bénévole provincial représentant tous les Britanno-Colombiens qui a pour objectif de protéger, d'améliorer et de promouvoir l'utilisation sage de l'environnement au profit des générations actuelles et à venir. Nous comptons 50 000 membres dans 110 clubs, et il est certain que nous nous passionnons pour la conservation et la protection du poisson, de la faune et de l'habitat de la province. En tant qu'organisation, nous tentons d'être un chef de file en matière de conservation et d'utilisation sage. La durabilité de la conservation est une priorité de notre organisation.
En ce qui concerne la gestion des ressources naturelles, nous tournons notre attention vers un certain nombre de principes en ce qui a trait aux ressources maritimes, terrestres et aquatiques. Je pense que la meilleure façon de conserver le capital naturel consiste à protéger et à améliorer les habitats existants et que cette règle s'applique aux habitats marins, en eau douce et terrestres.
Dans un document qui — je crois savoir — vous sera distribué plus tard, j'ai présenté la définition du terme « zone de protection marine » prévu au paragraphe 35(1) de la Loi sur les océans. Une zone de protection marine est une région de la mer qui fait partie des eaux intérieures, de la mer territoriale ou de la zone économique exclusive du Canada et qui « a été désignée en application du présent article en vue d'une protection particulière pour l'une ou plusieurs des raisons suivantes ». Ces raisons sont la protection du poisson, des mammifères marins et de leur habitat, et la conservation des habitats uniques. Je mentionne cette disposition parce qu'il s'agit de l'instrument utilisé par le MPO dans les zones de protection marine. De nombreux autres textes de loi — fédéraux et provinciaux — sont utilisés pour appuyer les zones de protection marine, mais c'est sur celui-là qu'on se concentre du point de vue de la conception.
L'Union internationale pour la Conservation de la Nature a établi un certain nombre de classes de protection marine, mais je suis d'avis que les zones de protection marine devraient être désignées en fonction des résultats en matière de conservation plutôt que par des classes et des cibles en pourcentage. Selon moi, les cibles en pourcentage sont ambitieuses, mais le but des zones de protection marine est la protection des résultats relatifs à ces ressources, et il faudrait les concevoir dans cette optique plutôt que de les faire correspondre à des classes.
Pour ce qui est des zones de protection marine, en Colombie-Britannique, quatre zones différentes sont à l'étude: la zone extracôtière, le plateau du Nord, qui est compris dans la ZGICNP; le plateau du Sud et le détroit de Georgia. Chacune de ces zones contient diverses zones protégées, mais le plateau du Nord est la cible d'un effort coordonné déployé par l'intermédiaire de la ZGICNP afin d'établir un réseau de zones de protection marine.
La B.C. Wildlife Federation appuie l'établissement de zones de protection marine en tant que mesure de protection des ressources naturelles fondée sur des zones, aux conditions suivantes: qu'elles soient fondées sur la science; qu'elles soient efficaces pour ce qui est d'obtenir les résultats liés à la conservation; qu'elles soient établies en consultation avec d'autres ordres de gouvernement, les Premières Nations, l'industrie et le public... et il est clair qu'il faut les surveiller et les faire appliquer et qu'elles doivent être adaptatives et utilisées en combinaison avec d'autres outils de gestion. En soi, les zones de protection marine n'ont pas besoin d'autres soutiens en matière de gestion et ne seront pas efficaces de façon isolée. Enfin, il doit y avoir une responsabilisation claire à l'égard de la gouvernance et des comptes rendus concernant les zones de protection marine.
Du point de vue du contexte actuel, la stratégie d'établissement d'un réseau de zones de protection marine de la Colombie-Britannique a été publiée en 2014. Il s'agit d'un très bon document qui établit la vision.
Certes, en juin, une annonce a été faite par le ministre des Pêches et des Océans, selon laquelle 5 % des zones côtières marines seront protégées d'ici 2017, et 10 %, d'ici 2020. Cette année, le plan de gestion intégrée de la zone de la côte Nord du Pacifique a été approuvé par les gouvernements fédéral et provincial et par les Premières Nations. Ensuite, le lendemain, une nouvelle zone de protection marine des récifs d'éponges siliceuses a été établie dans le détroit d'Hecate/détroit de la Reine-Charlotte et annoncée unilatéralement par le gouvernement fédéral. Je pense que le contexte entourant l'établissement de cette zone, c'est la question de savoir si les zones de protection marine sont stimulées rapidement par des cibles de pourcentage et si elles reçoivent un soutien scientifique, communautaire et financier suffisant pour fonctionner efficacement à long terme. Nous espérons que nous n'établirons pas un certain nombre de zones de protection marine et ne mettrons pas en place de limites, pour ensuite abandonner l'accent sur la conservation et les ressources maritimes et délaisser des zones dont l'établissement n'aura pas bénéficié d'assez de temps, d'effort et de ressources pour devenir efficaces. Il s'agit certainement d'une crainte pour nous.
Un certain nombre de buts ont été fixés relativement à un réseau de zones de protection marine sur la côte du Pacifique du Canada et pour la ZGICNP, notamment la protection et le maintien de la biodiversité, de la représentation écologique et des caractéristiques particulières; et la conservation et la protection des ressources de pêche et de leur habitat. Les quatre autres buts sont liés aux loisirs, aux collectivités et à la stabilité économique, au patrimoine culturel, aux fouilles et aux ressources archéologiques et à la recherche scientifique. Je pense que le cadre stratégique est assez bon en ce qui concerne la protection des ressources maritimes, mais qu'il y a beaucoup de travail à faire dans d'autres domaines. La question est de savoir comment on peut faire avancer les choses de façon coordonnée afin que l'on puisse atteindre ces buts, ou bien doit-on procéder à une mise en œuvre par étapes?
La planification du réseau de zones de protection marine pour le plateau Nord de la Colombie-Britannique comporte un certain nombre d'étapes qui sont axées sur le parachèvement des plans d'action pour l'établissement du réseau en une option d'ici le mois de mars 2019. Je pense que les principes de la planification et que les objectifs relatifs au réseau, en général, ont été établis. Les lignes directrices relatives à la conception de ces zones sont essentiellement une liste de vérification. Les priorités en matière de conservation sont essentiellement une question: l'établissement d'une zone de protection marine est-elle la meilleure solution? Les stratégies de conception n'ont pas été parachevées. Selon des documents récemment publiés par le Secrétariat canadien de consultation scientifique, qui a organisé une évaluation pilote des risques pour l'écosystème dans la zone de gestion intégrée de la côte Nord du Pacifique menée par Murray, Mach et Miriam O, essentiellement, les auteurs ont étudié la situation de façon cumulative, et leur analyse ne devrait pas être utilisée pour formuler des recommandations stratégiques. Il est clair qu'il reste beaucoup de travail à faire dans le volet écologique de cette initiative, sans compter les autres objectifs liés à la planification.
L'annonce faite par le MPO à l'échelon régional concernant des processus relatifs à de grandes ZPM extracôtières dans le Pacifique est un problème connexe. Certes, comme elles sont extracôtières, elles pourraient être perçues comme une solution facile. On examine actuellement les zones de conservation du sébaste en tant que ZPM. Il semble qu'aucune consultation n'ait été tenue auprès du Conseil consultatif sur la pêche sportive — le grand groupe qui représente les pêcheurs à la ligne — concernant le processus. On propose de simplifier la désignation de ZPM afin de réduire le temps nécessaire pour l'établir. Je recommanderais certainement que ces désignations soient liées à des réserves maritimes et que l'on dispose d'une période appropriée pour obtenir les données scientifiques, le soutien social et la mise en place d'un financement et pour que la surveillance soit effectuée avant la désignation finale de ces zones.
Je crains que nous devions nous arrêter là. Merci.
Durant la période de questions et de réponses, les témoins sont souvent en mesure de formuler d'autres arguments qu'ils n'avaient pas pu formuler durant leur première déclaration.
Maintenant, nous allons passer à M. Richard, pour 10 minutes.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Dans l'esprit de notre 150e anniversaire, je vais faire ma présentation dans ma langue natale.
Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner au nom de l'Union des pêcheurs des Maritimes, l'UPM.
Nous sommes un organisme qui représente les pêcheurs côtiers et les collectivités de la côte Est du Nouveau-Brunswick et une grande partie des propriétaires-exploitants de la Nouvelle-Écosse, soit un total de 1 243 membres qui vivent de la pêche et qui font vivre leurs communautés respectives.
J'aimerais aborder les principaux éléments de la lettre de mandat du ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne et me référer à certains alinéas de la lettre de mandat de la ministre de l'Environnement et du Changement climatique. Je vais également offrir le point de vue de l'industrie de la pêche côtière sur des objectifs définis dans le cadre stratégique sur les aires marines protégées.
Je tiens à vous assurer que mon intervention va tenir compte de l'approche holistique de l'UPM qui a toujours été pratiquée dans le monde des pêches, toujours dans le but de faire prospérer les communautés côtières des Maritimes.
Tel que nos collègues de la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada l'ont souligné en novembre dernier, le ministère des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne se concentre actuellement sur la conservation et la protection des espèces marines, mais cette perspective n'est pas assez large en ce qui concerne les communautés ayant une économie durable. En tant que parties prenantes de l'industrie de la pêche, nous croyons qu'une perspective plus large est essentielle.
Les deux lettres de mandat parlent de consulter et d'inclure les communautés dans les processus susmentionnés. Or nous ne ressentons pas que cet objectif est atteint.
De prime abord, la lettre de mandat du ministères des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne met en avant des principes tels qu'assurer un suivi avec les intervenants dans un esprit de collaboration. Nous tenons à vous dire que l'industrie ne ressent pas cet esprit de collaboration et qu'elle est sceptique par rapport aux processus qui ont été enclenchés jusqu'à présent.
C'est sur cette note que je désire me référer à un alinéa de la lettre de mandat de la ministre de l'Environnement et du Changement climatique, où il est question de « passer immédiatement en revue les processus canadiens d'évaluation environnementale afin de regagner la confiance du public ». Votre gouvernement prône les valeurs d'inclusion, d'honnêteté et de travail acharné, ainsi qu'un concept directeur de planification collective. Dans cet esprit, nous désirons mettre en avant les préoccupations suivantes dans le but d'améliorer le processus consultatif entourant le concept des aires marines protégées.
La mission de ce comité permanent doit avoir comme point de départ une interrogation sincère et approfondie sur le processus consultatif des aires marines protégées. Trop souvent nous avons été témoins des préoccupations des intervenants de l'industrie et de nos membres au sujet de ce qui constitue une aire marine protégée. Qu'est-ce que cela veut dire précisément pour beaucoup de gens?
La prochaine étape doit consister en une communication claire des limites géographiques des aires marines protégées potentielles et des répercussions sur les pratiques courantes de pêche dans ces zones. Les intervenants de l'industrie côtière doivent avoir l'occasion de démontrer l'effet bénin de leurs pratiques de pêche sur l'habitat marin.
Jusqu'à présent, les discussions dans le cadre des comités consultatifs sur les pêches — homard, crabe, hareng — ont mis en évidence une inquiétude majeure des intervenants, à savoir si les aires marines protégées comprenaient des restrictions relatives aux engins de pêche; les représentants du ministère ne pouvaient pas donner de renseignements clairs. Prenons l'exemple de la zone de pêche du crabe 19, dont il a été question au comité consultatif au moyen d'un document à l'appui.
Nous désirons également qu'on nous assure que la promulgation d'une aire marine protégée n'entraînera pas de dommages collatéraux sur notre façon de vivre.
Il faut également que l'industrie soit convaincue que le processus consultatif tient compte des répercussions économiques, sociales et environnementales découlant de la délimitation des aires marines protégées.
En terminant, nous tenons à ce que les utilisations traditionnelles des ressources de la mer soient respectées et que les valeurs des utilisateurs des ressources tels que les membres de l'Union des pêcheurs des Maritimes, dont je suis le représentant, soient prises en considération.
Nous croyons fermement que les objectifs des aires marines peuvent être atteints, mais qu'il devrait toujours y avoir un processus consultatif concret et non un processus où on se limite à distribuer quelques documents aux associations et aux intervenants et à poser quelques questions dans le cadre de comités consultatifs des pêches côtières.
Je pense que ce forum est une occasion spéciale qui va permettre de mettre en avant des modèles de consultation rigoureux et de promouvoir l'esprit de collaboration au sein de l'industrie des pêches côtières.
[Traduction]
Notre cible, c'est le processus et l'assurance du fait que nos membres peuvent poursuivre leurs pratiques de pêche.
Je voudrais encore vous renvoyer à certains éléments des lettres de mandat. Il est souvent question du processus de consultation, mais, encore une fois, comme nous l'avons déclaré plus tôt, il est très limité du point de vue de la portée de l'exposé, et nous avons remarqué qu'il l'est aussi au chapitre de la coordination entre les agents et les gestionnaires ministériels. Personne n'obtient la même histoire.
Les documents que voient certains des membres de l'industrie contiennent souvent des mots à la mode, et il est question de la façon dont cela doit être fait rapidement. Ce sujet est très souvent récurrent. Nous croyons savoir que cette notion est absente dans la zone du Golfe. Nous comprenons cela, mais les principes de l'UPM sont la protection des collectivités côtières et l'encouragement des pêches dont l'incidence sur l'écosystème et les autres espèces est très limitée.
Sur ce, je voudrais vous remercier du temps que vous m'accordez.
Merci, monsieur Richard. Il vous reste trois minutes. Je pense que c'est un record, et nous vous en sommes vraiment reconnaissants.
Le premier intervenant — pour sept minutes —, c'est M. Finnigan.
Merci, monsieur le président.
Merci. Je vous remercie tous les deux de votre présence aujourd'hui en tant que témoins dans le cadre de notre étude.
[Français]
Bienvenue au Comité, monsieur Richard. J'appuie assurément les efforts et le travail que vous faites sur la côte Est.
Comme nous parlons des zones de protection marine, j'aimerais savoir si les pêcheurs, le long de la côte, sont conscients de la nécessité de protéger l'environnement et les ressources.
Certainement. L'Union des pêcheurs des Maritimes ainsi que nos collègues de l'industrie de la pêche au homard et au crabe des neiges sont très proactifs quant au développement de mesures de conservation de la pêche.
On n'a qu'à penser aux casiers utilisés pour la pêche au homard. Tous les mécanismes d'échappement font qu'il n'y a presque systématiquement que des homards et ce qu'il reste de l'appât lorsque le pêcheur lève ses casiers. Au cours de discussions sur ces questions, des organisations comme l'Union des pêcheurs des Maritimes ont été en quelque sorte des visionnaires en proposant l'idée de limiter la participation, en matière de pêche, et, surtout, de pêcher au moyen d'engins déposés qui ont un impact limité sur le fond marin et qui ne ciblent pas les autres espèces.
Il y a 150 ans ou plus que nous pêchons.
Diriez-vous que des espèces ou des ressources ont disparu ou risquent de disparaître et, le cas échéant, que vous avez réussi à gérer ces ressources, qu'il s'agisse du homard ou du crabe?
Certainement. Il y a principalement deux espèces que nous pêchons. Or il est démontré qu'au cours des dernières années, le homard a été incroyablement abondant. À l'Union des pêcheurs des Maritimes, dans le cadre du programme de recherche Homarus, un groupe scientifique fait de l'ensemencement de homard, purement et naturellement. Il ne s'agit en effet que d'ensemencer des oeufs de homard.
Nous réalisons aussi des projets de récifs artificiels là où les pêcheurs trouvent qu'il n'y a pas assez d'habitats. À l'égard de ces pêches, j'appuie entièrement le raisonnement et la participation proactive de nos membres, sauf pour ce qui est de la pêche dont M. Pauly a parlé. Cela se passait pendant les années 1990 et les engins de pêche étaient beaucoup plus volumineux et performants que ceux employés dans le contexte de nos pêches côtières. M. Pauly a dit que les pêches à petite échelle étaient hautement compatibles avec les principes de conservation.
Je pense que c'est aussi M. Pauly qui a fait référence aux prises accessoires. Est-ce qu'on peut gérer ces prises? Est-ce que les pêcheurs pourraient tenir compte de ces prises qui n'auraient pas dû être pêchées?
Oui. Depuis quelques années, nos membres font preuve d'une bonne collaboration et cherchent une façon de faire un meilleur rapport des prises. L'industrie est en train de se doter d'un système de rapports électroniques qui permettra de bien documenter l'incidence des prises accessoires.
Avec leurs engins de pêche, nos pêcheurs ne capturent pas de prises accessoires. De même, avec l'introduction de la grille Normor — un mécanisme très sélectif utilisé pour la pêche à la crevette —, les autres flottilles n'ont observé aucune incidence des prises accessoires auxquelles a fait référence mon collègue et témoin précédent.
L'industrie comme l'UPM collaborent à 100 %. Maintenant, on vous retourne la question en vous demandant pourquoi le concept des aires marines protégées, qui existe depuis 2005, suscite soudainement tant d'empressement.
Ce que nous voulons, c'est participer à la discussion et échanger l'information. Après cela, nous voulons participer au processus consultatif et mettre les idées en avant.
Je ne sais pas s'il y aura une zone protégée dans la zone dont on parle, mais si toutes ces choses étaient faites, croyez-vous que les pêcheurs seraient d'accord d'avoir une zone protégée où vous pourriez quand même pêcher?
Avec un processus très bien établi et transparent, je pense que les pêcheurs pourraient même conseiller à un certain égard les gestionnaires qui veulent mettre en avant des aires marines protégées. Nous aussi avons des préoccupations. L'exploration pétrolière en est une.
[Traduction]
Monsieur Martin, savez-vous s'il y a des ZPM à l'égard desquelles le gouvernement ou le MPO devrait intervenir ou qu'ils devraient cogérer si un problème survenait dans cette zone? Connaissez-vous une ZPM où le gouvernement pourrait gérer une certaine espèce, une algue marine ou quelque chose? Êtes-vous au courant de cela?
La côte Ouest compte des zones de conservation du sébaste précises. Elles ne sont pas classées en tant que ZPM au titre de la Loi sur les océans, mais il y a effectivement des restrictions fondées sur des zones, qui sont conçues pour conserver les zones où le sébaste abonde. Je pense que l'idée est bonne, mais le problème tient au fait que, afin que l'on puisse maintenir leur efficacité, il doit y avoir davantage de surveillance et d'application de ces dispositions législatives. Les zones de conservation du sébaste sont certes appuyées par un éventail de groupes de pêcheurs à ligne — commerciaux et récréatifs — dans le but de maintenir ces ressources de pêche.
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos deux témoins de s'être rendus disponibles aujourd'hui. Je vais commencer par M. Martin.
Vous avez mentionné deux ou trois documents: un de Murray, Mach et Miriam O, et je crois que vous en avez mentionné un autre. Si possible, pourriez-vous faire parvenir les renseignements qui s'y rattachent au greffier afin que nous puissions être en mesure de les distribuer au Comité? Il semble s'agir de documents très intéressants. Vous avez mentionné le processus de consultation relatif à la ZGICNP et certains des autres processus de consultation. Quelle a été votre expérience, du point de vue de l'écoute sur le terrain, sur la côte Ouest, en ce qui a trait aux consultations avec le gouvernement provincial, avec les administrations locales, les municipalités, les collectivités côtières et les pêches commerciales et publiques?
Les consultations entourant la ZGICNP étaient beaucoup plus axées sur le processus que sur la substance. Un bon nombre de représentants des Premières Nations y ont participé, mais pas autant du milieu des pêcheurs à la ligne et de l'industrie. Le processus relatif à la ZGICNP en est certainement un qui est stimulé en collaboration par la province, le MPO et les Premières Nations.
À mon avis, les attentes qui s'y rattachent sont énormes, les délais, courts, et les ressources, limitées. Cette situation fait qu'il est difficile de procéder aux consultations scientifiques et aux autres consultations requises auprès des collectivités et des intervenants. Elles sont nécessaires pour contribuer à la conception et à la mise en œuvre fructueuse de ce qui, pour le moment, sont des notions visant à protéger des pêches et des habitats précieux.
La question clé est la suivante: les zones de protection marine sont-elles le bon outil, et quelles autres mesures sont requises pour que l'on puisse maintenir ces ressources?
Merci. Cela me ramène en quelque sorte à une question que j'ai posée à nos témoins précédents. Je leur ai demandé si la définition officielle d'une zone de protection marine doit englober les zones qui font l'objet de restrictions assez serrées en ce qui concerne la pêche ou d'autres activités qui pourraient faire en sorte qu'elles ne soient pas nécessairement considérées comme une ZPM au titre de la Loi sur les océans.
Le Canada a beaucoup fait pour améliorer la gestion de nos pêches, mais nous avons probablement encore beaucoup de chemin à faire à cet égard. Est-ce qu'une partie de la gestion de ces pêches devrait également être considérée comme des ZPM partielles ou être incluse dans le grand total des ZPM que tout le monde veut compter?
Je crois que le résultat que nous tentons d'obtenir est une bonne gestion des pêches, non pas un niveau prescrit d'AMP. Si les AMP contribuent à une bonne gestion des pêches et sont appropriées, vous pouvez clairement les appliquer. Si elles ne sont pas utiles au maintien de l'habitat ou aux stocks, il faut utiliser une autre méthode. Cette analyse n'a pas été faite.
Je vais vous donner un autre exemple. L'ormeau nordique est rare et est visé par la LEP. Le plan de rétablissement de la LEP indique que l'habitat n'est pas un problème pour le maintien des espèces, mais la pêche excessive l'est. La question est la suivante: mettriez-vous en oeuvre des AMP afin de protéger une espèce alors que le plan de rétablissement indique que l'habitat n'est pas un problème? Il doit y avoir un lien clair entre les résultats que vous tentez d'obtenir et l'application d'un outil, que ce soit une AMP ou une autre restriction.
Merci.
Monsieur Richard, vous avez mentionné qu'il y a certains éléments des lettres de mandat portant sur les consultations qui ne se rendent pas au ministère lorsque vient le temps d'être sur le terrain.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
Nous savions qu'il s'agissait d'un type de dossier inactif, qui avait malheureusement été relégué au niveau de mythe ou de concept politique. Notre gouvernement actuel s'est aperçu qu'il manquait quelque chose. Un de leurs mandats brillait par son absence. Alors il y a une frénésie actuellement pour transmettre les messages, et nous ne disons certainement pas que nous nous opposons à cette transmission. Nous disons — et je vais me citer moi-même — que des « petites réunions impromptues ne constituent pas une consultation ».
Je crois que nous sommes tout près de mettre en oeuvre un processus très transparent et je suis très honoré et privilégié d'en faire partie au nom de l'Union des pêcheurs des Maritimes, mais je pense que c'est le point de départ si nous voulons régler ce problème. Par exemple, je ne peux pas parler au nom des représentants de la zone de pêche au crabe 19 parce nous n'avons pas de membres dans cette zone, mais je peux vous parler de leur réaction lorsqu'un point à l'ordre du jour a été ajouté au comité consultatif relativement au crabe des neiges, qui consistait à parler d'une ZPM dans sa zone de pêche au crabe. Cela a provoqué une stupéfaction et une surprise totales.
C'est intéressant d'entendre votre remarque concernant le fait de secouer la cage du ministère afin d'essayer d'atteindre ces cibles parce que nous avons certainement entendu le ministre dire que tout se déroule bien. Par ailleurs, ce que nous entendons, c'est que tout le monde fait des pieds et des mains et essaie de trouver une façon de procéder.
Nous avons offert à notre ministre le plus grand soutien en la matière au moyen d'une transparence renouvelée.
Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins d'être ici et de donner leur témoignage.
Monsieur Richard, vous avez beaucoup parlé du processus et des préoccupations qui y sont liées. Pouvez-vous décrire au Comité ce qui serait, à votre avis, un bon processus de consultation pour le gouvernement? Vous avez fait effectivement certains commentaires concernant sa nature et ce qu'il pourrait devenir, mais pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
Je comprends, tout d'abord, que leur temps presse. Nous avons des structures de leadership au sein des associations à l'Île-du-Prince-Édouard de même que des membres en Nouvelle-Écosse, et le fait de reléguer au second plan la question des AMP, dans le contexte des comités consultatifs, est tout à fait insuffisant. La première chose à faire est de se concentrer — je ne veux pas galvauder l'expression « se concentrer » —, de tenir des réunions consacrées uniquement aux AMP et d'inviter des représentants de l'industrie. Ce serait la première chose à faire.
Monsieur Martin, avez-vous été en mesure d'écouter les deux exposés précédents de l'UICN et de M. Pauly?
Nous avons entendu les deux témoins déclarer que, selon l'opinion de la communauté mondiale, il y a trop de pêche et un déséquilibre relativement à la protection. Vous avez parlé de la ZGICNP. Êtes-vous d'accord avec ce processus de planification, et est-ce que la B.C. Wildlife Federation est d'accord elle aussi?
La ZGICNP est un bon concept parce que les Premières Nations y participent. Le gouvernement fédéral et la province y participent également, et il est exhaustif. Je m'élève contre le fait que si des entités individuelles agissent comme bon leur semble, en l'absence d'un processus de consultation plus vaste, cela réduit l'efficacité et l'intégration.
Oui, cela mine le processus.
La ZGICNP est pour le plateau nord. Il existe de plus grands problèmes concernant la durabilité des pêches sur la côte Ouest, dont certains peuvent être réglés au moyen d'un processus d'aires marines protégées. D'autres doivent être résolus à l'aide d'une restructuration fondamentale des pêches. Il s'agit d'utiliser l'outil approprié, à l'échelle appropriée et au cours d'une période qui sera efficace.
Les pêches et les aires protégées sont une partie essentielle du même problème, mais on les gère à des échelles très différentes, selon les espèces et l'objectif de gestion qu'on essaie d'atteindre.
Je suis d'accord avec M. Pauly: certainement, si vous lisez la littérature sur les pêches, il existe un problème relativement à de trop grandes attentes. Il y a un manque d'effort, de surveillance, d'application de la loi et de conformité concernant la capture du poisson.
Excellent.
Est-ce que la BCWF fait partie de la ZGICNP, ou participez-vous à la table de quelque façon que ce soit?
Oui, nous parlons des critères de conception et du processus et nous participons certainement aussi au processus fédéral. Notre intention est d'être constructifs et de nous assurer de porter notre attention sur ces aires marines protégées afin d'obtenir des résultats en matière de conservation, non pas des pourcentages arbitraires à court terme. On doit certainement s'assurer que ces aires permettent une adaptation et une amélioration au fil du temps. Je n'aimerais pas voir une mise en oeuvre rapide des aires marines de protection; ensuite, l'ordre du jour change, et nous perdons une occasion en or de gérer ces ressources, y compris pour les collectivités, le secteur des pêches et les Premières Nations.
Nous venons d'entendre M. Laffoley de l'UICN, qui a parlé d'utiliser les AMP pour renverser le déclin des populations de poisson et protéger l'abondance des espèces clés. Il a mentionné que les AMP peuvent être des outils efficaces pour y arriver. Êtes-vous d'accord ou en désaccord?
Je crois qu'on peut utiliser les AMP afin de protéger des espèces, particulièrement celles qui sont très territoriales ou qui se trouvent dans des aires particulières. Quant aux espèces qui parcourent de grandes distances, comme le thon et le saumon, les AMP ne seront probablement pas efficaces parce qu'il y a un degré élevé de variation relativement à la façon dont ces espèces migrent au cours de leur vie adulte.
Je crois que les AMP dans les estuaires et dans les aires de croissance peuvent certainement contribuer à la santé des salmonidés. Nous devons nous appuyer sur des données scientifiques liées à un « élément important de l'écosystème » sur lequel nous nous concentrons.
Je ne suis pas certain qu'on possède les données voulues pour régler le problème. Je crois qu'on doit investir dans la science afin de concevoir des aires efficaces et les adapter aux conditions qui changent au fil du temps. Il s'agit d'un problème très complexe que vous essayez de résoudre, et une solution simple aux AMP... Eh bien, il n'existe pas de solution simple. Les AMP doivent être conçues de manière intelligente.
Je crois que je n'ai plus de temps, mais je veux dire, monsieur Martin, que j'ai apprécié votre témoignage, et nous pouvons vous inviter une autre fois pour parler de l'aménagement des bassins versants. Je veux que ce soit consigné au compte rendu.
Des voix: Ah, ah!
Merci, monsieur le président.
Merci à nos témoins d'être ici aujourd'hui.
Ma première question s'adresse à vous, monsieur Martin, parce que, à mon avis, vous avez fait une déclaration plutôt vague. J'aimerais que vous précisiez un peu votre pensée. Vous avez dit que le MPO a annoncé unilatéralement la mise en place d'une AMP, et je crois que vous avez dit qu'il s'agissait du détroit d'Hecate. Vous avez utilisé les mots « unilatéralement » et « annoncé ». Dites-vous qu'on n'a tenu aucune consultation avec quiconque sur cette question avant l'annonce du ministère?
Ils se trouvent dans l'aire de la ZGICNP.
La veille, le ministère a annoncé l'adhésion au processus de la ZGICNP et aux aires marines protégées. Le jour suivant, le ministère des Pêches et des Océans a annoncé la création d'aires marines protégées pour les éponges de verre. Vu qu'il s'agissait du plateau nord et qu'il y a un large éventail d'intérêts, je crois qu'on aurait pu mener une consultation plus vaste avant l'annonce, et que cette consultation, à ma connaissance, n'a pas été faite.
D'accord. Vous avez dit une « consultation plus large », alors a-t-on mené une consultation avec un des groupes qui se trouvent dans cette aire?
Oui, on a certainement consulté la BC Seafood Alliance, et Christina Burridge a participé à l'annonce. Les Premières Nations ont également participé à l'annonce. Elle n'a pas été faite en collaboration dans le cadre du processus de la ZGICNP. Elle a été faite de manière unilatérale en tant qu'initiative du MPO.
Vous pouvez peut-être tous les deux répondre à ma question parce qu'une des choses dont nous entendons sans cesse parler, c'est le manque de confiance entre l'industrie, des groupes comme le vôtre, monsieur Martin, et le MPO. Qu'en pensez-vous? Faites-vous confiance au processus qu'a suivi le MPO?
Je fais partie d'un certain nombre de processus du MPO, y compris du Conseil consultatif sur la pêche sportive, et je fais certainement partie du processus de planification auquel le MPO participe relativement à la ZGICNP.
Je crois que le problème avec le MPO, c'est la capacité d'offrir un soutien à la consultation de même qu'une communication rapide de l'information dont ont besoin les intervenants, l'industrie et d'autres afin de formuler des conseils positifs et constructifs et pour aussi aider ces secteurs à comprendre les ressources qui sont en jeu et les compromis qui sont faits. Dans de nombreux cas, ces compromis ne sont pas explicites: ils sont plutôt cachés ou implicites. Tous les groupes ont certainement besoin de cette information afin de maintenir le soutien social concernant, selon moi, des mesures potentiellement très précieuses qui visent à protéger les ressources environnementales.
C'est peut-être à cause de la traduction, mais j'examinais mon document et je me disais: « Je ne crois pas avoir utilisé une expression aussi cinglante que « manque de confiance ».
Ce que nous devons établir... nous devons nous concentrer davantage sur là où nous en sommes actuellement, sur ce qui doit être fait et sur la façon dont on le communique clairement sans créer un climat de panique au sein des membres et des collectivités côtières en disant: « D'accord, si nous faisons cela, nous le faisons pour que l'habitat et la ressource en bénéficient directement, et la cible consiste à réduire certaines pratiques de pêche. »
Par exemple, ce qu'on a fait pour les éponges — même si on a présenté cela d'une manière très précipitée — semble avoir été un avantage ciblé. Comme je l'ai dit plus tôt, lorsque nous nous penchons sur les questions de la protection de l'habitat marin et des ressources dans les collectivités, nous avons toujours des préoccupations très importantes concernant — et je le répéterai — l'exploration pétrolière et gazière, par exemple. Nos membres, lorsqu'ils lisent leur exposé au cours d'une assemblée générale, eh bien, s'ils désirent avoir une aire marine protégée, pourquoi n'associons-nous pas toutes les questions à l'exploration pétrolière et gazière? C'est la façon dont les membres comprennent ce qui devrait être fait chez eux.
Alors, si notre gouvernement veut être très clair, il doit rencontrer les dirigeants de ces collectivités et leur communiquer exactement les cibles parce que les pêcheurs, sans comprendre pourquoi — avec tout le respect que je vous dois — se sentent ciblés.
Ce qui était intéressant, c'est que nous avons écouté votre exposé et que les témoins précédents nous ont présenté la perspective environnementale. J'aimerais vous entendre à propos d'un des commentaires qui, je crois, a été formulé par M. Pauly. Il a affirmé qu'il n'est possible d'utiliser l'environnement que si nous le protégeons.
Je crois que cette affirmation est très juste. Je ne dis pas que ce n'est pas ce que votre groupe fait. Je suis d'avis que les pêcheurs comptent parmi nos plus grands protecteurs de la ressource. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
Pour toute pêche que nous mettons en valeur, par exemple, il y a toujours des préoccupations... Ce n'est pas arrivé récemment, mais disons, par exemple, que l'on met sur pied une pêche à titre expérimental... Reportons-nous en 1984 et au cas du crabe commun. Il y avait des comités spéciaux composés de biologistes et de pêcheurs pour examiner si le fait de pratiquer cette pêche ou ce type d'exploitation aurait des effets délétères sur l'habitat. Il a été conclu qu'il n'y en aurait pas, parce que les casiers mis à l'eau seraient de forme conique. Y aurait-il des effets négatifs sur d'autres pêches? Comme je l'ai expliqué plus tôt, dans le cas de la pêche au homard, il y aurait des évents d'échappement.
Nous examinons, encore une fois, la question suivante. Je vais revenir au quatrième paragraphe de mon exposé, où il est mentionné que le gouvernement actuel accorde la priorité à la conservation et à la protection. Toutefois, qu'en est-il des électeurs et du maintien et de la protection des collectivités côtières dont les membres vivent et prospèrent grâce aux ressources halieutiques?
Votre temps est écoulé. De fait, nous l'avons dépassé.
Il s'agissait d'un témoignage des plus intéressants. Je déteste devoir interrompre les gens.
Monsieur Arnold, vous avez cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais que vous me disiez tous les deux s'il faut établir différents degrés de protection marine dans des zones qui pourraient toujours être considérées comme des ZPM. Pouvons-nous permettre que certaines activités se poursuivent dans de prétendues ZPM si les incidences sur les objectifs de conservation sont faibles ou négligeables, ou devons-nous assurer une protection totale dans une ZPM pour qu'elle soit désignée comme telle? Devrions-nous établir ces différents niveaux de conservation?
Encore une fois, je vous donnerai le point de vue de nos membres recueilli quand nous avons abordé ce sujet il y a un an et demi, parce que, au sein de l'UPM, une partie de notre travail comme représentants est de voir les indices et de prévenir nos membres.
Nous devrons nous pencher sur ces questions, et beaucoup de pêcheurs ont dit: « Très bien, si la désignation de zone de protection marine signifie que je peux quand même mettre à l'eau mes casiers à homard, il faut être certain que la zone soit classifiée comme telle. » Si je me réfère à la zone de protection marine de Bassin Head, où un pêcheur de l'Île-du-Prince-Édouard m'a dit — même si je n'étais pas son représentant — qu'il y a eu une certaine évolution dans cette région en raison des protections supplémentaires, mais que ce n'était pas dans l'intérêt des collectivités en question. Je vous laisse là-dessus.
Monsieur Martin, souhaitez-vous répondre à cette question, concernant les différents niveaux de classification qui permettraient quand même à une zone d'être désignée comme ZPM?
Oui, et, assurément, l'UICN prévoit différents niveaux de classification comprenant différents niveaux de protection. Le point essentiel, c'est que le niveau de protection doit correspondre aux résultats visés, à la fois du point de vue de la biologie et, comme M. Richard l'a dit, du point de vue de l'économie et des collectivités.
On a beaucoup entendu parler du processus de consultation. Afin qu'on puisse examiner cet élément un peu plus en détail, pouvez-vous, tous les deux, expliquer pourquoi il serait utile de réunir tous les intervenants en même temps et au même endroit, au lieu de mener des activités de lobbying indépendantes, comme c'est le cas actuellement? Quelle est votre expérience à cet égard et quelle est la meilleure façon d'obtenir des résultats?
Au cours des quelques dernières années, je n'ai pas vu beaucoup de gestionnaires ou de fonctionnaires du gouvernement qui souhaitaient rencontrer de grands groupes de pêcheurs. Ce n'est pas ce qui s'est passé, alors que nous affirmons que nous vous offrons l'occasion de suivre les processus et de collaborer avec les responsables des organisations. Nous pouvons tenir de plus petites réunions où il risque moins d'y avoir des discussions chaotiques. Le fait est que les membres des collectivités doivent se sentir davantage responsables de l'intendance.
Oui, assurément, mais, pour ce qui est des membres des Premières Nations, par exemple, on nous dit qu'ils sont consultés, mais, quand nous échangeons avec eux, ce que nous faisons, ils nous disent qu'ils ne le sont pas. Il y aurait lieu d'apporter des améliorations.
Pour ce qui est des membres locaux, par exemple, notre syndicat est très fort, et nous sommes très fiers du sentiment d'appartenance que confère l'affiliation à l'UPM. Si des membres des collectivités locales, par exemple un commerçant, un constructeur de bateau ou un préposé d'une station-service, souhaitent participer à ces réunions, c'est très bien. Ces personnes comprennent les relations au sein de la collectivité.
Je crois que les membres des collectivités locales et des différents secteurs ont des renseignements à communiquer et que, afin d'obtenir un soutien social, ils doivent prendre part au processus. Celui-ci doit être transparent, et ils doivent communiquer de façon précise les options et être en mesure de transmettre leurs préférences au décideur.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins.
Je serai peut-être assez bref.
Monsieur Richard, vous avez mentionné le processus de consultation et le fait qu'il y a peu ou pas de consultations préalables. En outre, vous avez aussi dit que ces ententes — et nous en avons entendu parler — ont été signées en 2010 et que, comme vous l'avez dit, elles n'ont pas été appliquées; aucune activité n'a été menée. Après la signature de l'engagement à atteindre un objectif d'ici 2020, rien n'a été fait pendant cinq ans.
Maintenant, ce processus a commencé. Comme vous l'avez dit, on a examiné la question et épousseté les documents, et nous devons agir, parce qu'il s'agit d'une entente signée en vue de l'atteinte de ces objectifs. Une partie du processus de consultation consisterait à rencontrer des groupes ou des personnes, des groupes ou des personnes qui pourraient être différents de ceux qui l'ont déjà été, et le fait que vous êtes ici comme témoin aujourd'hui fait partie de la consultation. Il est à souhaiter que cela continue.
Pour ce qui est de l'avenir — probablement que vous serez tous deux en mesure de répondre à cette question jusqu'à un certain point —, si une aire est désignée comme ZPM et que les règles sont connues de tous, croyez-vous qu'il y a assez de mesures de surveillance ou d'application de la réglementation en place pour que nous soyons capables de faire respecter les règles quant aux activités qui peuvent et ne peuvent être menées dans cette zone? C'est formidable d'exiger l'atteinte des cibles, mais, au bout du compte, si nous les atteignons, sommes-nous en mesure d'effectuer la gestion et la surveillance qui s'imposent dans ces zones et d'assurer de façon adéquate l'application des règles pour nous assurer que les activités permises ont lieu, et non celles qui sont interdites?
Si je puis me permettre, une grande partie de nos membres critiquent le manque de surveillance des activités illégales. Je ne dis pas qu'il y en a partout, mais c'est aussi le coeur d'un des problèmes.
Le forum public se poursuit, et la politique sera appliquée, mais la mise en oeuvre sera probablement très discutable parce que, par exemple, il existe des problèmes à l'échelle locale, que ce soit en Nouvelle-Écosse ou au Nouveau-Brunswick, concernant les projets de câble électrique et le zonage à ces endroits. Nous avons des difficultés à établir une coordination avec les responsables du MPO pour protéger nos pêcheurs.
Donc, oui, je dirais en réponse à votre question ou commentaire que nos pêcheurs s'interrogeront à ce sujet. Si nous participons à ces initiatives, vous devez nous assurer que ce que l'on protège sera effectivement protégé par ceux qui en sont responsables.
Comme le dit l'expression latine: quis custodiet ipsos custodes. En d'autres mots: Qui garde les gardiens?
La surveillance et l'application de la réglementation sont des éléments qui doivent être utilisés dans les ZPM, et l'appui social à l'égard du système diminuerait rapidement si la réglementation n'était pas respectée. Comme c'est le cas pour n'importe quelle autre mesure réglementaire, il est essentiel d'effectuer de la surveillance et d'appliquer les règles pour conserver l'appui social.
Cela met fin à notre séance à 10 h 45.
Je suis sûr que les interprètes ont pu traduire le latin.
Des voix: Ah, ah!
Le vice-président (M. Robert Sopuck): Nous nous attendons à lire cela dans les bleus.
Des voix: Ah, ah!
Le vice-président (M. Robert Sopuck): Je souhaite remercier les témoins de leur témoignage réfléchi et professionnel. Les deux témoins précédents, encore une fois, ont été très concis et ont fourni un témoignage très utile.
J'espère que vous avez pu constater le fonctionnement très collégial du Comité. Les membres ne font pas preuve de partisanerie. Nous travaillons tous dans le même sens en ce qui concerne les questions qui vous préoccupent tous. Nous partageons ces préoccupations.
Je tiens à vous remercier des témoignages d'experts, qui sont très utiles.
La séance est levée.
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