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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 120 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 juin 2018

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

     Bonjour. Comment va tout le monde aujourd'hui?
    Soyez les bienvenus à cette 120e séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, séance au cours de laquelle nous allons poursuivre l'examen prévu par la loi de la Loi sur le droit d'auteur.
    Avec nous, aujourd'hui, de la Fédération canadienne des musiciens, nous recevons M. Alan Willaert, vice-président pour le Canada; de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec, M. Éric Lefebvre, secrétaire-trésorier; et de l'Association canadienne des éditeurs de musique, Mme Margaret McGuffin, directrice exécutive.
    Avant de commencer, je tiens à vous signaler que jeudi prochain, il va y avoir environ sept votes à la Chambre. Étant donné la qualité des témoins que nous attendons pour cette séance, je préfère de ne pas l'annuler. Êtes-vous d'accord pour prolonger cette réunion d'une demi-heure?
    Avez-vous un avion à prendre? D'accord. Nous allons voir ce que nous pouvons faire.
    La parole est à M. Willaert, pour sept minutes.
    Je m'appelle Alan Willaert et je suis le vice-président pour le Canada de l'American Federation of Musicians of the United States and Canada. Au Canada, notre organisation s'appelle la Fédération canadienne des musiciens et elle compte 17 000 membres, mais nous représentons également tous les musiciens visés par la Loi sur le statut de l'artiste.
    Permettez-moi de commencer par quelques statistiques — elles risquent de vous ébranler un peu —, statistiques qui sont à la base de mon raisonnement et de mes recommandations.
     Le Canada compte environ 33 750 musiciens et chanteurs professionnels, et la proportion de travailleurs autonomes au sein de ce groupe est très supérieure — 80 % — à celle enregistrée au sein de la population active en général. Les artistes sont beaucoup plus scolarisés que la moyenne des travailleurs: 44 % d'entre eux ont au moins un baccalauréat, soit le double par rapport à la moyenne. Le revenu annuel moyen de la population active est de 48 100 $. Le revenu individuel moyen des musiciens et des chanteurs est de 17 699 $, mais leur revenu individuel médian est de 11 431 $. Il est aussi intéressant de remarquer qu'il y a autant de chanteuses que de chanteurs. Ceux qui gagnent le plus ont entre 45 à 54 ans, et le nombre d'artistes a augmenté de 50 % depuis 1989.
    Il importe aussi d'examiner la situation dans une perspective globale. Avec des recettes de 53,2 milliards de dollars, l'industrie des arts et de la culture est responsable de 3,4 % du PIB du Canada, le produit intérieur brut. Elle dépasse en cela l'industrie de l'hébergement et de la restauration, et pèse deux fois plus lourd dans la balance que le secteur « agriculture, foresterie, chasse et pêche ». Plus précisément, les spectacles génèrent des recettes de plus de 2 milliards de dollars et les enregistrements comptent pour 500 millions. Or, avec des profits d'une telle ampleur, comment se fait-il que le revenu médian des musiciens soit si bas? S'il ne se retrouve pas dans les poches des musiciens, où s'en va l'argent?
    Pour remédier à certains problèmes, nous recommandons bien entendu la modification de la Loi sur le droit d'auteur. Tout d'abord, nous recommandons la modification de la définition d'« enregistrement sonore » afin de permettre aux artistes d'obtenir des redevances lorsque les enregistrements de leurs prestations musicales sont utilisés dans la trame sonore d'oeuvres audiovisuelles diffusées ou mises en ligne. Bien entendu, pour faciliter cela, nous recommandons la ratification et la mise en vigueur du Traité de Beijing.
     Nous recommandons également la suppression de l'exemption de redevances de 1,25 million de dollars accordée aux radiodiffuseurs commerciaux. Chose intéressante à souligner: lorsque cette disposition a été instaurée, elle ne devait s'appliquer qu'aux stations mineures dont les revenus publicitaires ne dépassaient pas 1,25 million de dollars, sauf que la dispense a fini par s'appliquer à la première tranche de revenus publicitaires de 1,25 million de dollars pour toutes les stations. C'est une situation qui doit être corrigée sans faute.
    De plus, nous recommandons d'étendre la portée de la « copie pour usage privé » afin d'inclure les nouvelles technologies de reproduction. C'est quelque chose qui va de soi. Personne n'utilise plus les cassettes et les CD-R. Tout se fait désormais en numérique. Nous recommandons la réforme de la Commission du droit d'auteur. Nous recommandons la réduction du piratage dans la sphère numérique. Bien entendu, cela signifie que nous préconisons le renforcement de la réglementation visant les fournisseurs de services Internet, notamment par l'instauration d'un régime d'avis et de retrait semblable à celui qui s'applique aux États-Unis.
    Nous exhortons également le gouvernement à travailler avec le secteur de la musique afin de faciliter le passage des quotas de contenu et du système MAPL de l’analogique au numérique, de manière à ce qu'il puisse réglementer l'industrie de l'écoute en continu. L'écoute en continu doit être réglementée, car c'est une industrie qui atteindra bientôt les 70 milliards de dollars à l'échelle mondiale. Nous sommes en outre d'avis que tout ce qui est produit au Canada — comme pour Netflix, par exemple — devrait être assujetti à des processus de négociation collective comme ceux qui sont décrits dans la Loi sur le statut de l'artiste.
    Avant de terminer, j'aimerais vous lire un extrait d'une lettre que nous avons reçue d'une de nos membres, Damhnait Doyle, une auteure-compositrice-interprète très populaire de Terre-Neuve.
J'appartiens à la section locale 280 du syndicat des musiciens depuis 25 ans, et j'en suis fière. Cependant, tout au long de ces années, j'ai pu constater que le niveau de vie de ceux d'entre nous qui ont choisi de faire ce métier n'a cessé de se dégrader. On nous attaque sur tous les plans: il y a le piratage et l'écoute en continu, il y a le fait de se retrouver du mauvais côté des exemptions accordées aux diffuseurs et de perdre les redevances que pourraient nous apporter les oeuvres que nous produisons pour le cinéma et la télévision. La définition d'« enregistrement sonore » doit être repensée afin que nous puissions, à l'instar de nos collègues américains, être rémunérés pour nos efforts. Entretemps, le coût de la vie n'a cessé d'augmenter et notre classe moyenne a été éviscérée.
(1540)
Je vous demande d'examiner sérieusement les recommandations de la Fédération canadienne des musiciens, car elles permettront aux artistes musicaux de s'approprier les revenus qu'ils attendent depuis si longtemps et grâce auxquels ils pourront poursuivre de façon réussie leurs aspirations et leurs talents. Si rien ne change et si les revenus offerts aux musiciens n'augmentent pas, la perspective de devenir un artiste et un créateur canadien de profession — et fier de l'être — cessera d'être viable.
    Merci de votre attention.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer au témoin suivant.

[Français]

     Monsieur Lefebvre, vous disposez de sept minutes.
    Je m'appelle Éric Lefebvre. Je suis le secrétaire-trésorier de la Guilde des musiciens et des musiciennes du Québec. Je suis heureux de comparaître devant vous cet après-midi. Au nom des membres de notre association, je vous remercie de nous permettre de vous faire part de nos commentaires sur la révision de la Loi sur le droit d'auteur. Je suis également heureux de participer à cette réunion en compagnie de M. Alan Willaert, le vice-président canadien de l'American Federation of Musicians, fédération à laquelle nous sommes affiliés depuis plus d'un siècle.
    Nous comprenons que le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie doive se pencher sur la révision de la Loi sur le droit d'auteur. Il est à noter que la qualification des prestations des artistes interprètes dans la catégorie des objets du droit d'auteur est relativement nouvelle. En effet, la Loi sur le droit d'auteur prévoit, depuis le 1er septembre 1997, la possibilité pour les artistes interprètes d'exercer certains droits sur leurs prestations. Ces droits ont été bonifiés en novembre 2012, en intégrant de nouveaux droits exclusifs touchant à l'enregistrement sonore.
     À cet égard, la Loi sur le droit d'auteur prévoit, au bénéfice des artistes interprètes, deux catégories de droits. Il y a tout d'abord les droits que l'on dit exclusifs, principalement pour la fixation, la reproduction, la distribution et la mise à la disposition de la prestation d'un artiste. Ensuite, il y a deux droits que l'on appelle « à rémunération ». Le premier s'applique lorsque l'on communique publiquement un enregistrement sonore qui est commercialisé, que l'on appelle aussi le régime de la rémunération équitable ou le régime du droit voisin, qui est géré actuellement par la société de gestion Ré:Sonne. Le second relève du régime de la copie privée, géré par la Société canadienne de perception de la copie privée. De tous ces droits, le régime de la rémunération équitable demeure actuellement le plus important, ayant donné lieu à plusieurs tarifs de la société Ré:Sonne, certifiés par la Commission du droit d'auteur du Canada.
    Mentionnons que, outre les redevances versées par les sociétés de gestion, la Guilde négocie aussi une rémunération pour l'utilisation des prestations enregistrées dans le cadre de ses ententes collectives.
    Les redevances que l'on retrouve pour les artistes interprètes dans les accords collectifs sont négociées depuis plusieurs dizaines d'années. Des modifications apportées à la Loi sur le droit d'auteur en 1997 et en 2012 ont transformé une partie du cadre juridique, mais sans diminuer nos préoccupations, qu'a très bien illustrées M. Alan Willaert il y a quelques minutes.
    Ces préoccupations sont simples: les musiciens s'appauvrissent d'année en année. Nous constatons que les nouveaux droits conférés aux artistes interprètes ne permettent pas une amélioration de leur rémunération. Ou bien les transformations structurelles de l'industrie de la musique initiées par les Google, Amazon, Facebook, Netflix et Apple font en sorte que la classe moyenne des musiciens devient maintenant une classe d'artistes pauvres, laissant à quelques artistes et producteurs ultra-riches 95 % des revenus générés par l'industrie, ou alors les nouveaux droits bénéficiant aux artistes interprètes demeurent sans effet en raison de l'adoption de dispositions législatives ou de règlements qui ont un effet contraire.
    Nous allons illustrer notre propos. Nous nous demandons à quoi sert le droit à rémunération pour la copie privée des enregistrements sonores pour les auteurs, les artistes interprètes et les producteurs, si le régime ne vise que le disque compact vierge, que plus personne n'utilise maintenant pour faire de la reproduction. La Cour suprême a déjà indiqué que la loi était technologiquement neutre. Pourquoi ce « deux poids, deux mesures » quand il s'agit d'adopter une modification réglementaire à l'avantage des artistes et des créateurs? Il serait important de faire en sorte que tous les supports de reproduction soient visés, tels que les cartes SIM, les clés USB ou encore les disques durs des ordinateurs.
    De même, on peut se demander à quoi servent les nouveaux droits exclusifs de mise à la disposition et de distribution pour les artistes interprètes, qui ont été introduits dans la loi en 2012 afin de permettre l'application de droits sur Internet et des supports déjà existants comme le disque compact, si les sommes provenant de l'écoute en continu demeurent faméliques et que la responsabilité des fournisseurs de services Internet n'est toujours pas reconnue en raison de leur statut d'intermédiaire.
    Enfin, à quoi sert le nouveau droit exclusif de distribution si, comme je l'indiquais un peu plus tôt, la principale source d'écoute pour la musique demeure l'écoute en continu? Comme le confirme le sondage que le gouvernement a commandé en 2017 visant la consommation en ligne de contenu protégé par le droit d'auteur, on a appris que, dans les trois mois qui ont précédé le sondage, 11,2 millions d'internautes avaient écouté de la musique en ligne en continu. Il est clair que cette réalité a un impact sur la vente des enregistrements sonores, tant sous la forme de disques compacts que de téléchargements en ligne, qui demeurent encore les seules façons réglementaires d'obtenir une rémunération.
    Il serait important d'obtenir une compensation des fournisseurs de services Internet, qui profitent indûment de cette situation. Il faut donc mettre en place des mécanismes qui visent à rééquilibrer les forces en présence, tout en cessant de poursuivre par voie législative l'affaiblissement des droits conférés aux titulaires, déjà commencé par une jurisprudence qui met sur le même pied les droits des utilisateurs et ceux des créateurs, comme dans le cas des oeuvres littéraires, ou qui laisse une industrie poursuivre sa déchéance, comme dans le domaine de la musique.
(1545)
     Pour atteindre cet objectif, nous recommandons au gouvernement de faire siennes les propositions suivantes: modifier la Loi sur le droit d'auteur afin de permettre au régime de perception de la copie privée de s'appliquer sur l'ensemble des supports qui servent à reproduire un enregistrement sonore; modifier la Loi sur le droit d'auteur afin de permettre au régime de perception de la copie privée de s'appliquer sur les appareils qui servent à la reproduction et à l'écoute d'enregistrements sonores; et enfin, responsabiliser les fournisseurs de services Internet, entre autres d'une façon plus technique, en éliminant une exception dont ils bénéficient dans la Loi sur le droit d'auteur, à l'article 31.1 .
    Nous soutenons de plus notre fédération sur les recommandations qu'elle a soumises à l'égard de la modification de la définition d'enregistrement sonore, qui doit permettre les versements de redevances lorsqu'un enregistrement sonore est intégré dans une oeuvre audiovisuelle, ou encore sur une exemption qui profite actuellement aux radiodiffuseurs dans le cas du régime du droit voisin.
    Nous entendons fréquemment les gens dire que le droit d'auteur est extrêmement complexe. En fait, il est devenu complexe en raison des modifications apportées à la Loi depuis plusieurs années ayant pour effet de diluer l'efficacité des droits, entre autres par le nombre très important d'exceptions maintenant en vigueur.

[Traduction]

     Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant écouter la déclaration de Mme McGuffin.
    Vous disposez de sept minutes. Allez-y, je vous prie.
    Je tiens à vous remercier de me donner l'occasion de vous livrer cet exposé. Pour commencer, j'aimerais vous parler un moment de notre organisme, l'Association canadienne des éditeurs de musique, et du rôle que les éditeurs jouent à l'international pour veiller à ce que les chansons canadiennes soient entendues dans le monde entier.
    Bien que certains musiciens enregistrent leurs propres chansons, beaucoup ne le font pas. En lieu et place, ils écrivent des pièces en collaboration avec d'autres auteurs ou exécutent des chansons écrites par d'autres. Il y a aussi ceux qui créent les trames sonores de vos films et émissions de télévision préférés. Vous ne connaissez pas leur nom, mais ils occupent une très grande place au sein de l'économie créative du Canada et ailleurs dans le monde.
    Notre association représente des grandes sociétés comme olé, des éditeurs de musique et des entrepreneurs qui dirigent de petites et moyennes entreprises, comme Jennifer Mitchell, de Red Brick, et Vince Degiorgio, de CYMBA Music. Agissant comme représentant et investisseur, toutes ces entreprises sont derrière les milliers de chansons, de paroliers et de compositeurs qui jouent sur une base quotidienne à la radio, sur les sites d'écoute en continu, dans les jeux vidéos, dans les films et dans les productions télévisuelles de toute la planète. Ces sociétés sont les détentrices de droits d'auteur, et ce débat touche à l'essentiel des efforts qu'elles investissent tant sur le plan créatif que sur le plan des affaires.
    Les revenus de l'industrie se déplacent chaque jour un peu plus vers l'écoute en continu et les plateformes numériques. La technologie présidant à la distribution de la musique a changé radicalement depuis 10 ans, et mes membres aussi. Nous venons de publier un nouveau rapport intitulé Export Ready, Export Critical, dans lequel nous examinons l'importance que nos membres accordent à l'exportation.
    Les éditeurs de musique sont des innovateurs, et les robustes stratégies qu'ils mettent de l'avant pour exporter leur ont permis d'être concurrentiels à l'échelle internationale. À preuve, les deux tiers de leurs revenus proviennent désormais de l'étranger. C'est un changement radical par rapport à 2005, alors que la proportion des revenus provenant de l'étranger n'était que de 28 %. Chez nos membres, ce qui aura été déterminant pour composer avec la transformation des technologies aura été leur capacité de s'exporter sur la scène mondiale.
    Pour continuer à être concurrentiels à l'international, les auteurs et les éditeurs de musique ont besoin d'un marché fonctionnel sur le plan national, d'un marché où ils pourront innover. Dans le monde de l'édition musicale, nos membres continuent d'être exposés à des modèles qui se transforment rapidement, et les redevances pour les nouveaux modèles numériques n'ont pas encore rejoint les redevances traditionnelles découlant des ventes en magasin et des téléchargements.
    Bien que certains détracteurs insistent sur le fait que les revenus de l'écoute en continu augmentent par tranches d'au moins 10 %, ils évitent de préciser que les redevances ne sont pas celles que les ventes d'autrefois permettaient de dégager. Malheureusement, les éditeurs de musique et les auteurs-compositeurs chansonniers se retrouvent dans une position encore plus désavantageuse lorsque la Loi canadienne sur le droit d'auteur prévoit des exonérations de responsabilité, des exceptions et des barrières qui nuisent à la mise en application de leurs droits dans ce contexte nouveau du numérique et que la Commission du droit d'auteur prend des années à réagir à ces transformations.
    L'objet de l'édition musicale est de défendre les auteurs-compositeurs tout au long de leur carrière et de veiller sur les droits d'auteur de leurs oeuvres. Nos membres envisagent les choses à long terme et travaillent énormément dans les coulisses pour créer de la valeur. Les chansons qui ont le plus de valeur peuvent être reprises à l'infini par différents artistes, et elles pourront être entendues dans des productions audiovisuelles bien longtemps après leur enregistrement initial. En anglais, le terme utilisé pour décrire ces reprises est « sync ».
    Les éditeurs les plus puissants et les plus stables sont ceux qui ont un portefeuille équilibré de chansons regroupant des pièces des anciens catalogues et des créations plus récentes. Les recettes générées par les titres éprouvés permettent à l'éditeur de prendre des risques et d'investir dans des auteurs-compositeurs émergents.
    Par exemple, Jennifer Mitchell de Red Brick Songs est une éditrice qui possède à la fois un catalogue étranger — qu'elle administre et sous-édite pour des partenaires étrangers — et un catalogue canadien contenant des oeuvres d'auteurs-compositeurs émergents et établis. Au Canada, elle représente Dan Davidson, de St. Albert, Alberta; Charlotte Cardin, de Montréal; Jeen O'Brien, de Stratford, Ontario; et les membres du groupe Said the Whale, de Vancouver.
    Une ou deux chansons d'un catalogue peuvent avoir une incidence énorme sur la viabilité d'un éditeur musical et sur les auteurs-compositeurs canadiens dans lesquels ils choisiront d'investir. Une pièce du catalogue de Red Brick passera bientôt au domaine public parce que les lois canadiennes en matière de droit d'auteur sont en hiatus avec les normes internationales. Sur une base quotidienne, ces titres individuels ne génèrent peut-être pas beaucoup d'argent, mais sur 20 ans de plus et avec un contrat de bonne tenue en matière de reprise, la propriété de ces droits pourrait se traduire par des recettes de centaines de milliers de dollars.
    Voilà pourquoi il est si important que le Canada s'aligne sur ses partenaires commerciaux mondiaux et qu'il prolonge la durée de la protection du droit d'auteur à 70 ans après le décès de l'auteur.
(1550)
    Nos détracteurs font preuve d'une mauvaise foi tenace lorsqu'ils prétendent que les Canadiens ont besoin d'un nombre accru d'oeuvres dans le domaine public. Le domaine public contient déjà beaucoup de chansons. Nombre d'entre elles pourraient faire l'objet d'une licence conventionnelle — à faible coût ou gratuitement. Rares sont les occasions où les chansons seront utilisées dans de nouvelles productions numériques qui ne seront lancées qu'à l'intérieur des frontières canadiennes, où il est nécessaire d'avoir un contrat de licence.
    De plus, il est important que le Parlement ne propose pas de nouvelles exceptions qui risquent de mettre à mal ces petites entreprises. Nous vous demandons de modifier les exceptions ajoutées en 2012 pour les copies de sauvegarde et les processus technologiques. Nous vous demandons aussi de modifier la section sur les services réseau pour remédier à l'écart de valeur. Les intermédiaires Internet devraient être traités autrement que comme de simples moyens de transport et devraient, dans certains cas, être tenus responsables des activités illicites de leurs abonnés.
    Nous vous demandons également d'améliorer les délais et l'efficacité des processus de la Commission des droits d'auteur — par une combinaison de modifications législatives et réglementaires —, ainsi que la prévisibilité de ses décisions. Nous savons que ces choses sont déjà perçues comme étant prioritaires et qu'elles pourraient avoir préséance sur le reste des modifications qui devront être apportées aux droits d'auteur. Sachez que nous appuyons cette dynamique et que nous sommes ravis du travail qui se fait à cet égard. Enfin, nous encourageons nos collègues d'ici à faire en sorte que le régime de copie privée soit neutre sur le plan technologique.
    Merci.
(1555)
    Merci beaucoup.
    Nous allons tout de suite passer aux questions, en commençant par M. Longfield.
    Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins pour leurs exposés de cet après-midi.
    Plus tôt cette année, j'ai eu un entretien avec Miranda Mulholland, une artiste locale de Guelph dont les chansons sont publiées sur la scène internationale. Elle m'a parlé des lois conciliantes qui existaient en 1997, des changements qui sont survenus à partir de 1998 et des baisses continuelles de revenu que ces changements ont provoqué au cours des 20 dernières années.
     Une des choses qu'elle a proposées était de demander à une tierce partie de faire l'examen des exemptions. À savoir si, dans le cadre de la présente étude, il serait pensable d'examiner les exemptions auxquelles les créateurs sont confrontés... Cela ressemble à la partie précédente de notre étude, alors que nous nous sommes penchés sur le fait que les exemptions permettaient aux éditeurs de faire plus d'argent et privaient les artistes de certains revenus.
    Avez-vous une idée de la façon dont nous pourrions examiner les exemptions, et pouvez-vous nous dire si c'est quelque chose que vos organismes respectifs appuieraient? La question s'adresse aussi bien à vous, madame McGuffin, qu'aux autres.
    Je crois que la responsabilité à cet égard appartient à votre comité. Les éditeurs, les étiquettes, les artistes et les auteurs-compositeurs ont travaillé en collaboration pour vous présenter des recommandations communes. Nous avons passé 18 mois là-dessus, alors il y a bien des renseignements qui vont vous être communiqués au cours des prochaines semaines à propos de ces exceptions.
    Le seul bémol pour moi, c'est que les exceptions ont l'air très modestes. Dans une certaine mesure, comme quelqu'un me l'a fait remarquer, il s'agit d'une mort à petit feu. La dernière fois, les exceptions ont généré beaucoup d'incertitude. En 2012, nous avions une Commission du droit d'auteur inopérante qui mettait trois ans et demi à se prononcer. Puis, ses décisions étaient portées en appel. Pour mes membres et les auteurs-compositeurs qu'ils appuyaient, ces problèmes ont fait en sorte que des ressources financières ont été gardées en retrait, alors que l'économique numérique subissait une transformation complète. Si j'ai une mise en garde à faire à propos des exceptions, c'est qu'il faut les examiner avec grand soin. Passez en revue celles de 2012, et assurez-vous que les auteurs-compositeurs et les petites entreprises ne se retrouvent pas dans une situation d'incertitude.
    Souhaitez-vous ajouter quelque chose?
    Monsieur Willaert, je vous en prie.
    En réponse à votre question, nous serions tout à fait disposés à travailler avec le Comité pour passer en revue ces exceptions et vous aider à déterminer ce qui est pertinent et ce qui ne l'est pas, ce qui devrait figurer dans la loi et ce qui ne le devrait pas. Nous avons certainement la capacité de sonder nos milliers de membres pour savoir ce qui les touche le plus.
    Notre comité ne s'occuperait pas directement de cet aspect. Il y a un organisme de gouvernance qui devrait...
    Y a-t-il un organisme qui pourrait examiner cette question, ou faut-il en créer un? Je suppose que, lorsque les questions atteignent un tel degré de technicité... la plupart des députés ne seraient pas qualifiés.
    Je crois que nous pourrions vous aider à cet égard. Je ne suis pas sûre qu'un comité indépendant soit nécessaire. Comme je l'ai dit, nous avons déjà rassemblé de nombreux groupes pour examiner le tout avec grand soin. Nous pourrons également revenir vous présenter une proposition de libellé et des recommandations à ce sujet.
     Toute recommandation que vous nous fournirez pour notre étude sera transmise aux divers ministères fédéraux qui examineront notre rapport.
    Vous avez également mentionné le rapport Export Ready, Export Critical. Si vous pouviez nous en remettre une copie par l'entremise du greffier, ce serait très utile. Nous nous intéressons aux petites entreprises. Nous les avons déjà examinées dans le cadre d'autres études et nous nous sommes penchés sur des défis comparables dans le secteur manufacturier pour déterminer comment garder l'argent au Canada et assurer la protection de la propriété intellectuelle. J'estime qu'il y a lieu de dégager des thèmes semblables. Le rapport en question tient-il compte de la propriété intellectuelle et du droit d'auteur?
    Oui, il en tient compte de façon indirecte, mais il porte plus précisément sur ce que font les éditeurs de musique indépendants, en mettant l'accent sur le fait qu'ils sont de petites entreprises et qu'ils doivent soutenir la concurrence mondiale. Dans le cas des éditeurs de musique, le marché international se caractérise par une concurrence féroce. Nous voulons donc nous assurer que les Canadiens se surpassent lorsqu'ils livrent concurrence sur la scène mondiale.
     Je suis personnellement très fier du travail accompli par le Comité dans le cadre de l'étude sur la propriété intellectuelle et de ce qui en a résulté: les recommandations faites au gouvernement et, à vrai dire, l'inclusion de postes budgétaires dans le budget de l'année dernière pour la création d'un régime de propriété intellectuelle, assorti d'un processus d'examen, d'un financement et d'une équipe pouvant aider les créateurs de propriété intellectuelle en leur expliquant comment entrer sur le marché et comment protéger leurs idées.
    Y a-t-il un service de liaison pour les musiciens en ce qui concerne le droit d'auteur? Leur manque-t-il des connaissances, ou sont-ils bien renseignés? Est-ce quelque chose que nous devons également examiner dans le cadre de cette étude: l'établissement d'un groupe de liaison pour aider les artistes à se protéger contre le risque de perdre leurs revenus au profit des éditeurs et d'autres points de fuite?
(1600)
    C'est, selon moi, une excellente idée. Depuis 1997, avec l'instauration de droits voisins dans notre pays, nous avons vu toutes sortes d'organismes indépendants faire leur apparition et prétendre représenter les musiciens. Ils tiennent lieu d'intermédiaires qui s'emparent d'une grande partie de l'argent, ne laissant que des miettes pour les artistes. Il y a donc toutes sortes de mises en garde et de pièges qu'il faut exposer au grand jour pour que ces musiciens obtiennent ce qui leur est dû.
    Excellent. Voilà qui pourrait être une recommandation valable de votre part aussi.
     Je crois que le financement est un autre aspect. Il y a des organisations très solides, mais elles n'ont pas le financement nécessaire pour offrir ce genre de formation. L'Association des auteurs-compositeurs canadiens et la Guilde des compositeurs canadiens de musique à l'image seraient de bonnes sources qui sont déjà en contact avec ces gens et qui pourraient souvent conseiller les jeunes membres lorsqu'ils entrent dans le domaine pour la première fois. Nous avons également produit un rapport, en collaboration avec WorkInCulture, dans lequel nous examinons les besoins en formation pour intégrer rapidement de nouveaux employés. Peu de diplômés ont une bonne compréhension de l'édition musicale, alors nous sommes déterminés à mettre en oeuvre une telle formation. Bien des artistes qui ont des gérants ou des maisons de disques ne comprennent pas qu'ils ne monétisent pas entièrement leur édition de musique. Nous étudions donc les mesures à prendre pour offrir de la formation dans pareils cas, comme c'est la pratique au Royaume-Uni.
    Monsieur Lefebvre...
    Merci.
    Oh, c'est dommage.
    Nous reviendrons à vous.

[Français]

     Monsieur Bernier, vous disposez de sept minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Avant de poser mes questions, je voudrais donner oralement un avis de motion. J'aimerais qu'elle soit étudiée par le Comité, et elle se lit comme suit:
Que le Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie recommande formellement au Comité permanent des finances d’entreprendre une étude sur quatre (4) réunions afin d’examiner, entre autres éléments, le coût de l’achat et de l’expansion du projet d’oléoduc Trans Mountain, les coûts liés à la surveillance (société d’État) du projet et les répercussions de la décision sur la confiance des investisseurs envers les projets canadiens liés aux ressources naturelles; et que le Comité fasse rapport de ses observations à la Chambre des communes et formule des recommandations sur la façon de rétablir la confiance des investisseurs.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de cet avis de motion.
    Je passe maintenant aux questions que je veux poser aux témoins. Je commencerai par M. Lefebvre.
    En ce qui concerne les droits d'auteurs pour les oeuvres musicales, les représentants de Music Canada qui ont comparu devant le Comité permanent du patrimoine canadien ont dit que la durée du droit d'auteur pour les oeuvres musicales devrait être prolongée de 20 ans, pour un total de la durée de vie plus 70 ans.
     Êtes-vous d'accord sur cette suggestion?
    Oui, nous le sommes tout à fait.
    Quel serait l'impact de ce changement pour les membres de votre organisme?
    La Guilde des musiciens et des musiciennes du Québec représente des artistes interprètes, qui ne sont pas directement visés par cette mesure. Nous ne représentons pas d'auteurs-compositeurs à proprement parler, mais ces auteurs-compositeurs font partie de sociétés et d'associations avec lesquelles nous collaborons étroitement.
     Cela dit, nous sommes tout à fait d'accord sur la possibilité de prolonger la durée du droit d'auteur à plus de 50 ans. Cela se fait déjà dans plusieurs pays, comme la France et les États-Unis, et cela permettrait un régime de protection qui favoriserait une rémunération sur une plus longue période. Cela bénéficierait surtout aux auteurs dont l'oeuvre musicale est exploitée pendant une longue période de temps.
     D'accord.
    Tout à l'heure, on a parlé des salaires, des revenus que reçoivent les interprètes, les musiciens et les chanteurs. On nous a dit que leur revenu moyen était passé de 19 794 $, en 2010, à environ 19 042 $, en 2015.
    Comment expliquez-vous cette baisse de revenus des musiciens et des chanteurs, malgré la hausse des revenus des producteurs de musique?
    On s'aperçoit qu'ils sont les perdants. Comment pouvez-vous l'expliquer?
(1605)
    Pouvez-vous répéter ces chiffres? J'ai mal compris.
    Dans le cas des musiciens et des chanteurs, le revenu moyen a baissé de 19 794 $, en 2010, à 19 042 $, en 2015. C'est donc un revenu très bas.
    Oui, tout à fait.
    C'est un revenu moyen. Comment expliquez-vous cet écart?
    Cela dépend de plusieurs facteurs.
    D'abord, les contrats signés entre les artistes interprètes, les musiciens et, admettons, les producteurs d'enregistrements sonore, peuvent peut-être, dans certains cas, prévoir une stabilisation de la rémunération. Ce que nous observons tous les jours, dans nos ententes collectives, c'est qu'il est de plus en plus difficile d'obtenir soit une rémunération convenable pour les musiciens, soit des droits associés à l'utilisation d'une prestation enregistrée.
    Je vais vous donner un exemple. Une émission de télévision est produite. Il y a quelques années — mon collègue M. Alan Willaert pourrait vous en parler aussi —, la rémunération qui était associée à la diffusion ultérieure d'une émission de télévision était beaucoup plus élevée. À présent, on a Netflix qui vient faire concurrence, à titre d'exemple, à des radiodiffuseurs ou à des producteurs d'émissions de télévisions canadiennes. Cela fait en sorte que la pression est de plus en plus forte sur les radiodiffuseurs, qui demandent aux producteurs de pouvoir offrir le service avec ce qu'on appelle un « ensemble de droits plus importants ».
    Par la suite, le producteur d'une émission de télévision transfère ce fardeau aux artisans et, entre autres, aux musiciens. À titre d'exemple, au lieu de verser 500 $ pour l'utilisation d'une émission durant un certain nombre d'années, on va donner 100 $. Il y a donc une pression à la baisse qui est directement liée, au fond, à l'environnement numérique qui existe actuellement dans l'industrie de la musique.

[Traduction]

     Monsieur Willaert, êtes-vous d'accord?
    Oui, je suis d'accord et j'ai quelques points à ajouter.
    Premièrement, le modèle au complet a changé au fil des ans. Autrefois, lorsqu'un artiste créait un enregistrement ou signait un contrat avec une maison de disques, il obtenait une part des ventes, et il partait en tournée pour susciter de l'intérêt pour cet album particulier; bien entendu, il faisait de l'argent à partir de la vente de billets, mais l'objectif principal de la tournée était de vendre plus de disques compacts ou de vinyles. Si le tout s'avérait un franc succès, c'était alors une façon lucrative de gagner de l'argent.
    De nos jours, évidemment, c'est l'inverse. Les artistes sont loin de faire autant d'argent, et les ventes de disques compacts sont au point mort. Tout repose sur la diffusion en continu, et les artistes touchent une fraction de cent par million d'écoutes en continu. Ensuite, on leur demande de partir en tournée, mais la façon de faire de l'argent est de vendre des t-shirts et quelques disques compacts pendant qu'ils sont en tournée. Ils ne sont plus payés pour la musique. Cela passe maintenant par la vente d'accessoires connexes.
    De plus, pour revenir à ce que mon collègue disait au sujet de la radiodiffusion, une des choses que nous observons, c'est que, dans le cadre de la production d'un film ou d'une émission télévisée, lorsqu'un compositeur est embauché au pays, il arrive souvent que la sonorisation se fasse à l'étranger. Ainsi, on aura recours à des musiciens à Prague plutôt qu'à des musiciens canadiens. Cette situation est inacceptable, mais c'est une autre raison qui explique pourquoi les sources de revenu de nos musiciens continuent de diminuer, parce qu'une bonne partie du travail est confié en sous-traitance à l'étranger.
    Avez-vous une recommandation, ou y a-t-il quelque chose que nous pouvons faire dans le cadre de notre travail actuel au Comité, ou s'agit-il plutôt d'une mesure préalable à la mise en marché...
    En ce qui concerne le dernier point, il suffit d'apporter un changement très simple: la Loi de l'impôt sur le revenu doit être légèrement modifiée pour changer les critères du Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens. Ainsi, au moment de faire une demande de crédit d'impôt — et on obtient un point lorsqu'il s'agit d'un compositeur canadien —, il faut non seulement un compositeur canadien, mais aussi des musiciens canadiens; autrement, aucun point ne sera accordé. Vous verrez alors beaucoup plus d'enregistrements effectués au pays.
    Merci beaucoup.
    Merci.

[Français]

    Madame Sansoucy, vous disposez de sept minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence à notre comité.
    C'est vraiment une belle occasion pour moi d'être ici cet après-midi.
    En effet, le mois dernier, j'ai été interpellée par un auteur de Saint-Hyacinthe, une ville de la circonscription que je représente. Je m'aperçois que la réalité des créateurs et des auteurs est semblable à celle des musiciens. D'ailleurs, je vais vous lire un extrait de sa lettre, qui est éloquente, comme celle que vous avez lue, monsieur Willaert.
    Les changements de 2012 à la Loi sur le droit d'auteur, dit-il, ont « servi de cadre légal au dépouillement autorisé des artistes et des écrivains. »
    Il poursuit ainsi:
Saint-Hyacinthe a une longue tradition culturelle. Le Cégep de la ville est un terroir à futurs auteurs [et acteurs], puisqu'il accueille en son sein une des meilleures écoles de théâtre de la province. Cette mesure fait particulièrement mal aux écrivains régionaux [cela pourrait être la même chose pour les musiciens] puisque les occasions de rentabiliser leur art sont souvent moindres que dans les grands centres. Ces revenus qu'on leur soutire sont des deniers manquants qui affectent leur famille, leur capacité de se développer dans notre district et leur participation à notre économie locale.
En mon nom et en solidarité avec tous les créateurs du pays, je vous invite à faire entendre votre voix [...] lors du processus de l'examen de la Loi [c'est intéressant que j'aie l'occasion de le faire cet après-midi], en appuyant des modifications qui rendront la Loi sur le droit d'auteur juste et équitable pour les artistes et créateurs canadiens qui sont au coeur de notre culture.
    Il s'agit d'un auteur, mais nous avons aussi de nombreux artistes de la scène musicale et des lieux de diffusion incroyables dans une petite communauté comme la nôtre.
    Je pense, entre autres, au Zaricot, pour ne nommer que celui-là. Le Zaricot de Saint-Hyacinthe est une petite salle de spectacle que vous connaissez peut-être, qui anime la vie culturelle avec une programmation variée, tant avec des artistes locaux émergents qu'avec ceux de grand public, qui sont d'ailleurs probablement membres de votre organisme.
    Cette petite salle se démarque parce qu'elle est encore en vie. Dernièrement, plusieurs salles de spectacle de ce genre — je pense au Divan Orange de Montréal — ont fermé leurs portes. Pour nous, animer la vie culturelle de nos petites communautés, c'est important. Il faut que ces salles restent ouvertes, et il faut que les artistes puissent vivre de leurs spectacles dans ces salles. Depuis 15 ans maintenant, le Zaricot est vraiment créatif et actif pour faire vivre la musique à Saint-Hyacinthe.
    On pense souvent aux spectacles de grande envergure qui ont lieu dans les grands centres, comme le Centre Bell, mais la réalité de nos artistes québécois — et vous en avez bien parlé —, c'est de longues tournées, avec beaucoup de kilométrage, à parcourir le Québec et à offrir des prestations dans des petites salles en région, comme le Zaricot. S'ils sont chanceux, les artistes vont au Centre des arts Juliette-Lassonde, une salle de taille moyenne de chez nous. Pour ces artistes qui peinent à vendre leur musique en raison des plateformes de diffusion, telles que Spotify, les spectacles et la marchandise vendue sur place demeurent maintenant pratiquement leur seule source de revenu, comme vous l'avez dit.
    Je suis donc d'accord avec l'auteur qui m'a écrit: il faut une loi sur le droit d'auteur qui soit juste et équitable pour les artistes. Pour cela, il faut une taxation des géants comme Spotify. Il faut que les redevances soient perçues. Tous les acteurs de notre écosystème culturel, à partir des câblodistributeurs jusqu'aux syndicats des techniciens, en passant par les artistes et les scénaristes, exigent aussi cette mesure. Vous l'avez bien démontré.
    Les diffuseurs en ligne, contrairement à nos diffuseurs comme MusiquePlus par exemple, n'ont aucune obligation de mettre en valeur le contenu d'ici, et cela m'apparaît fort inquiétant. Notre culture vit une concurrence déloyale face à ces géants du Web sous tous les aspects, que ce soit le Web, la musique, les auteurs, et le reste.
    Monsieur Lefebvre, vous nous avez parlé des différentes recommandations que vous proposez. Vous l'avez dit vous-même, cette Loi est devenue complexe. J'aimerais vous entendre parler davantage de chacune de ces différentes recommandations, afin de nous éclairer sur la manière de soutenir ce dont je viens de parler, soit le développement de la culture dans une circonscription en région comme la mienne.
(1610)
    De fait, la Loi sur le droit d'auteur, c'est une loi...
    Quand un musicien produit un spectacle, il est souvent auteur-compositeur, mais lorsqu'il agit comme interprète, sa rémunération vient directement d'un cachet payé par le producteur. Si ce musicien enregistre des disques, d'ailleurs, appelons-nous encore cela des disques, je ne le sais pas...
    En tout cas, c'est comme cela que je les appelle.
     S'il produit l'enregistrement sonore d'une oeuvre musicale, cet enregistrement sonore pourrait théoriquement engendrer des redevances qui vont permettre à l'artiste interprète ou au musicien de continuer sa carrière. Ce revenu est indispensable afin que le musicien puisse continuer à se produire dans de petites salles de spectacle.
    Actuellement, l'enregistrement sonore génère certaines redevances en vertu du régime de la rémunération équitable, mais il n'en génère pratiquement plus en vertu du régime de la copie privée.
    Le régime de la copie privée s'applique aux disques compacts, et à la bonne vieille cassette audio, mais il ne génère plus de redevances, parce qu'un règlement a été ajouté à la Loi sur le droit d'auteur. Ce règlement fait que la définition de « support audio » prévue dans la loi exclut les cartes mémoires Micro SD, entre autres. Cela veut dire que les nouveaux supports sur lesquels on pourrait compter pour verser une redevance pour les artistes interprètes ne sont plus applicables.
    En soi, la copie privée favorise trois catégories d'ayants droit, soit les auteurs, les artistes interprètes et les producteurs. C'est donc toute l'industrie de la musique qui est visée par ce régime. Le régime de la copie privée s'applique seulement au CD vierge, qui est maintenant inutilisable. Lorsque je dis « inutilisable », je veux dire qu'il n'est plus utilisé pour faire de la reproduction.
    Le fait qu'on limite les supports audio sur lesquels on pourrait appliquer une redevance réduit une grande partie des revenus. Je peux vous donner un chiffre. Je ne sais pas si des représentants de la Société canadienne de perception de la copie privée ont témoigné devant le Comité, mais je peux dire qu'elle a vu ses revenus chuter de 89 %, ce qui est un énorme pourcentage. Il s'agissait d'une somme d'argent que les sociétés de gestion versaient aux artistes interprètes. Cela faisait en sorte que, à la fin de l'année, après avoir fait des concerts, vendu des t-shirts, produit des albums et enregistré des émissions de télévision pour faire mousser la vente des albums, entre autres, donc lorsque l'ensemble de l'écosystème était présent, l'artiste interprète générait des revenus suffisants pour vivre.
    Présentement, je peux comparer la Loi sur le droit d'auteur à un gruyère. Ce n'est qu'une des lois sur la propriété intellectuelle actuellement en vigueur au Canada. Il existe la Loi sur les marques de commerce, la Loi sur les brevets et la Loi sur les dessins industriels. Toutes ces lois font que le Canada devrait, en principe, être un terreau fertile pour l'innovation.
    Présentement, la Loi sur le droit d'auteur fait office de parent pauvre ou de vilain petit canard. La Loi sur les marques de commerce est relativement robuste. Si, demain matin, une université décidait d'ouvrir un restaurant de hamburgers portant le nom de McDonald's, il y aurait de fortes chances que l'entreprise McDonald's intervienne, parce que ce serait une violation de sa marque de commerce.
    Alors pourquoi est-il possible que, dans le cadre de la Loi sur le droit d'auteur, une université, en vertu de l'exception d'usage équitable aux fins d'éducation, reproduise des oeuvres littéraires ou des oeuvres musicales? C'est parce que la loi contient des exceptions, et c'est pour cela que je parle de la Loi sur le droit d'auteur comme d'un tout cohérent. Présentement, elle compte à peu près 160 pages, alors que celle sur les marques de commerce en compte 80. Cette loi est complexe et lourde, et elle contient plusieurs exceptions. Si le Canada veut véritablement être un terreau d'accueil pour l'innovation, il doit faire en sorte que l'ensemble des lois sur la propriété intellectuelle soit efficace pour l'ensemble des créateurs et non seulement pour les compagnie comme McDonald's, qui peuvent bénéficier de la Loi sur les marques de...
(1615)
    Je m'excuse de vous interrompre, mais votre temps de parole est écoulé.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Baylis, vous avez disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Willaert, vous avez parlé des stations de radiodiffusion qui ont droit à une exemption de 1,25 million de dollars. J'aimerais en savoir un peu plus à ce sujet. Cette mesure a été instaurée pour aider — comme vous l'avez dit — les stations mineures. Aimeriez-vous que cette exemption soit supprimée, ou voulez-vous qu'elle soit maintenue pour les stations mineures, sans toutefois s'appliquer aux...? Comment souhaitez-vous que nous procédions relativement à cette exemption?
    Je n'ai rien contre l'exemption de 1,25 million de dollars pour les stations qui n'ont pas ce genre de revenus. Là n'est pas le problème. Ce qui pose problème, bien entendu, ce sont les grandes stations qui ont des revenus beaucoup plus importants et qui s'en tirent à bon compte grâce à cette exemption de 1,25 million de dollars. L'élimination de cette mesure ne ferait aucun tort aux grandes stations. Cela ne poserait pas de problème.
    Bon nombre de ces petites stations ont été rachetées et fusionnées. Selon vous, devrions-nous préciser que si une petite station indépendante gagne moins de x dollars, elle ne recevra pas...? Qu'aimeriez-vous exactement?
     Personnellement, et c'est juste mon avis, j'aimerais que l'exemption soit appliquée de la manière prévue à l'origine, c'est-à-dire que toutes les stations ayant des revenus de moins de 1,25 million de dollars soient exemptées du tarif.
    Si vos revenus sont inférieurs à 1,25 million de dollars, vous aurez droit à une exemption, mais si vous faites partie d'une grande société... Le hic, c'est que les grandes stations font une demande pour chacune des petites stations dont elles se sont emparées.
(1620)
    C'est exact, mais il y a tout de même la radio collégiale, par exemple.
    Vous voulez faire en sorte que cette exemption ne s'applique pas aux grandes stations.
    C'est exact.
    D'accord.
    Pour m'assurer d'avoir bien compris, je vais résumer vos propos. Vous aimeriez que l'exemption soit maintenue pour les petites radios collégiales et d'autres stations de ce genre, mais dans le cas de stations qui ont été fusionnées et s'il s'agit d'une grande société ayant plusieurs stations de petite ou moyenne taille, elles n'ont pas besoin de cette exemption.
    Oui, c'est exact.
    Et l'exemption vise la première tranche de revenus. Les grandes stations paient quand même un tarif, à l'exclusion de cette première tranche. Cependant, elles devraient payer dès le premier dollar qu'elles gagnent.
    Oui.
    D'accord.
    Vous avez évoqué le régime d'avis et de retrait, qui est en vigueur aux États-Unis. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Oui. La Loi sur le droit d'auteur du Canada prévoit un régime d'avis et avis. Sachant que la diffusion en continu peut maintenant être piratée, enregistrée et téléchargée au moyen de logiciels, il est plus important que jamais d'être en mesure d'identifier ceux qui enfreignent le droit d'auteur. La solution pour venir à bout du problème réside dans le régime d'avis et de retrait; c'est ainsi que nous pourrions mettre un terme à cette situation.
    Le régime d'avis et de retrait provient-il des États-Unis?
    Oui, c'est prévu dans leur loi sur le droit d'auteur.
    Pouvez-vous nous en expliquer le fonctionnement?
    En gros, si une infraction est constatée, un avis est envoyé pour que cette situation cesse, à défaut de quoi l'accès est bloqué.
    Par qui?
    Par le fournisseur de services Internet.
    Si un avis est envoyé à la partie contrevenante et qu'elle n'agit pas, alors le fournisseur de services Internet reçoit un avis lui ordonnant de bloquer l'accès. Est-ce bien cela?
    Oui, c'est exact.
    Que se passe-t-il au Canada?
    À l'heure actuelle, on ne fait qu'envoyer avis sur avis. Il n'y a pas de solution définitive, pour ainsi dire.
    Donc, vous aimeriez que...
    Vous avez quelque chose à ajouter, madame McGuffin?
    Mes collègues aux États-Unis sont également préoccupés par le régime d'avis et avis. Les Américains utilisent un régime d'avis et de retrait, mais son efficacité laisse à désirer, d'autant plus que cela a donné refuge aux... C'est comme le jeu de la taupe: même si l'accès est bloqué, il ne s'agit pas d'un recours suffisamment musclé pour amener les mauvais joueurs à la table des négociations et leur faire payer des redevances.
    C'est donc dire que le régime d'avis et de retrait aux États-Unis ne fonctionne pas.
    En effet, cela ne fonctionne pas, et un examen est en cours pour trouver des solutions de rechange.
    Quelles seraient ces solutions de rechange?
    Je n'ai pas l'information à portée de la main, mais je pourrais vous en fournir les détails dans mon mémoire.
    Oui. On dirait bien le jeu de la taupe. Ces types se pointent ici et se font bloquer l'accès, puis ils réapparaissent ailleurs, et la même chose se répète. En tout cas, c'est plus que ce que nous avons en ce moment au Canada, c'est-à-dire rien du tout. Nous ne faisons qu'envoyer des avis à n'en plus finir.
    Oui, en effet. Les bons joueurs comme Spotify et Apple se présentent à la table pour négocier. Nous avons l'option de nous adresser à la Commission du droit d'auteur et, espérons-le, lorsque celle-ci en viendra à fonctionner sans heurt, nous pourrons y recourir en cas de problème.
    Nous surveillons des acteurs, comme les sites de téléchargement de fichiers Torrent et les services d'extraction de flux, qui se trouvent à l'extérieur du Canada et qui refusent de venir s'asseoir à la table pour obtenir une licence.
    D'accord.

[Français]

     Monsieur Lefebvre, vous avez soulevé un point intéressant. Vous avez mentionné Google, Amazon, Facebook, les géants du Web. Quel est votre point de vue précis à ce sujet? Est-ce le fait que ces entreprises ne paient pas leur part? Pourriez-vous nous donner plus d'explications?
    Les géants du Web profitent d'un système où ils ne sont pas responsabilisés, quoique Spotify verse des sommes d'argent aux sociétés de gestion pour l'utilisation de répertoires. Ce que je veux dire, c'est que les sommes d'argent versées à l'ensemble des ayants droit sont minimes. On dit que les revenus tirés de l'écoute en continu sont faméliques, et c'est véritablement ce qui se passe. Les sommes versées sont vraiment minimes.
    YouTube, par exemple, donne des sommes très minimes, comme vous l'avez dit. Voudriez-vous que la Commission du droit d'auteur du Canada fixe un certain pourcentage à redonner aux auteurs? Quelle solution proposez-vous?
    C'est difficile pour moi de me substituer à la Commission du droit d'auteur. Je précise cependant qu'elle possède toute la latitude voulue pour fixer des tarifs dans certaines situations prévues dans la Loi.

[Traduction]

     Madame McGuffin, vous avez dit que la Commission du droit d'auteur mettait trop de temps à se prononcer. La solution consiste-t-elle à imposer des minimums pour la diffusion en continu ou le visionnement de vidéos sur YouTube, et tout le reste?
    Ces choses ont déjà fait l'objet de discussions dans le cadre de l'audience en ligne pour le compte des éditeurs de musique et des compositeurs, et vous allez d'ailleurs recevoir des représentants de la CIMA et de la SOCAN, qui pourront répondre à plus de questions à ce sujet. Le problème avec la Commission du droit d'auteur à l'heure actuelle, c'est qu'il lui faut trois ans et demi ou quatre ans pour rendre des décisions. Elle formule des décisions qui ne correspondent pas au marché actuel parce que de nouvelles entités voient le jour entretemps, et celles qui étaient présentes à l'audience n'existent plus.
    Nous sommes heureux de savoir que la stratégie en matière de propriété intellectuelle prévoit un investissement dans la gestion des cas. C'est important. Nous avons pris part à la consultation tenue en septembre dernier. Il y avait 60 mémoires et, d'après ce que j'ai cru comprendre, les participants des deux côtés de la table à la Commission du droit d'auteur ont fait ressortir certains thèmes tout à fait communs. Nous attendons avec impatience que des mesures soient prises à cet égard.
(1625)
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer au prochain intervenant. Je suis sûr que vous aurez l'occasion d'y revenir.
    Monsieur Jeneroux, vous avez cinq minutes.
    C'est parfait. Merci, monsieur le président.
    Merci d'être des nôtres.
    Je suis tenté de demander à M. Lefebvre pourquoi il a choisi de comparer la Loi sur le droit d'auteur au gruyère plutôt qu'à un autre fromage. Je n'en dirai pas plus. Vous pourrez peut-être vous expliquer dans vos prochaines réponses.
    Je voudrais obtenir une précision, monsieur Willaert, et veuillez répondre simplement par oui ou non, si possible. Êtes-vous pour le régime d'avis et de retrait?
    Oui, comme solution provisoire, jusqu'à ce qu'on trouve quelque chose de mieux.
    Madame McGuffin, êtes-vous du même avis?
    Nous ne l'appuyons pas dans la façon de l'appliquer aux États-Unis, et nous vous fournirons plus de détails dans notre mémoire.
    Monsieur Lefebvre.

[Français]

     Je partage l'avis de Mme McGuffin.

[Traduction]

    D'accord.
    Certains témoins jusqu'à maintenant avaient un point de vue tout à fait contraire sur le régime d'avis. Madame McGuffin, j'espère que vous clarifiez cela dans votre mémoire et que vous répondez également à certaines questions qui ont été soulevées précédemment.
    Aidez-nous à comprendre un peu mieux ici. Quand une chanson joue à la radio, quelle part va à l'auteur-compositeur, à la maison de production, à l'éditeur de musique, et à tous les autres intervenants au sein de la chaîne de valeur?
    Deux sociétés de gestion différentes sont concernées. La SOCAN, qui s'occupe des compositeurs et des paroliers et des éditeurs. Puis il y a les droits voisins, soit les redevances qui sont versées aux musiciens et à la maison de disques; il y a donc différentes sociétés et différents tarifs.
    Cela s'applique à une chanson qui joue à la radio.
    Oui.
    Quelle est la différence avec une chanson qui joue sur une plateforme comme Apple ou Spotify?
    C'est un des problèmes. Aux États-Unis, un succès qui obtient 100 millions d'écoutes en continu dans le monde pourrait rapporter à la maison de disques et à l'artiste entre 130 000 $ et 220 000 $. Au Canada, par contre, quand la Commission du droit d'auteur a examiné le tarif no 8, elle a fixé un taux qui correspond à 10 % de celui aux États-Unis. Si un artiste canadien obtenait, par miracle, 100 millions d'écoutes, il recevrait 10 200 $.
    Madame McGuffin.
    Les services de diffusion en continu versent en moyenne entre 12 % et 15 % pour la prestation, une somme recueillie par la SOCAN, et la reproduction mécanique, une somme recueillie par la SODRAC et la CMRRA. C'est ce qui est versé à l'auteur-compositeur et à l'éditeur.
    J'ai oublié l'exemple que vous avez utilisé, mais pour un million d'écoutes, est-ce que le montant est séparé moitié-moitié?
    Au Canada anglais, 75 % va habituellement à l'auteur-compositeur, et 25 % à l'éditeur.
    D'accord.
    La maison de production, est-ce que...
    C'est un élément distinct, et je ne suis pas une experte dans le domaine. Il serait préférable que vous posiez la question à la CIMA ou à Music Canada.
    D'accord.
    Monsieur Willaert, je présume que vous n'êtes pas un expert dans ce domaine vous non plus.
     Non. Je peux vous dire toutefois qu'il y a des aberrations dans le système qui ont des effets dévastateurs pour nos musiciens. Dans le cas de Spotify, par exemple, comme elle est détenue à 20 % par les maisons de disques, quand l'entreprise approche une de ces grandes maisons pour avoir accès à son catalogue, elle lui verse des millions de dollars pour y avoir accès, puis, bien sûr, il y a ensuite des droits pour chaque écoute en continu. Toutefois, les musiciens n'obtiennent pas un sou, rien, de la somme énorme qui est versée pour l'accès au catalogue.
(1630)
    Je suis désolé de vous interrompre. Vous aurez sans doute l'occasion de nous donner plus de détails à ce sujet. Je veux simplement poser une autre question.
    Au sujet de l'exception YouTube, son but était de tenir compte de la diffusion en continu et de sa popularité. L'entreprise a maintenant créé YouTube Music ou YouTube « Remix », peu importe son nom. Ce n'est pas encore offert au Canada. Est-ce que cela remédie à certaines de vos préoccupations au sujet de l'exception YouTube?
    Je ne connais pas aussi bien le dossier que je le devrais, alors je ne répondrai pas à la question.
    Quelqu'un d'autre?
    Pour ce qui est des auteurs-compositeurs et des éditeurs, les licences pour ce nouveau service sont les mêmes que pour Apple ou Spotify. Dans le cas de YouTube, les licences sont différentes.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous passons à madame Ng. Vous avez cinq minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président. Merci à tous nos témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Nous entamons avec vous notre nouveau segment sur la musique et l'édition de musique. Nous avons examiné le secteur de l'éducation, et c'est maintenant une belle occasion pour nous de commencer cela. Pardonnez-moi si je vous pose des questions un peu élémentaires. Je veux d'abord comprendre les enjeux. Les représentants du secteur de l'éducation et de l'édition des livres nous ont beaucoup parlé de ce qu'on appelle ici un écart de valeur. Il y a un problème entre les créateurs et les producteurs de contenu et ceux qui ont une responsabilité, ou qui diffusent auprès des consommateurs, etc. Il y a une inégalité, et si je comprends bien, il y en a une ici également.
    J'essaie de comprendre d'où vient cette inégalité. Dans vos témoignages, vous avez tous dit que les revenus des musiciens ont diminué. Il serait alors bien qu'on commence à comprendre quelle en est la cause et comment on peut y remédier dans la Loi sur le droit d'auteur, mais aussi ce qu'on peut faire pour les créateurs de demain. Quelle modification faut-il apporter à la loi, donc, pour y arriver?
    Au sujet de l'écart de valeur, dites-nous où se trouve cette inégalité et aidez-nous à comprendre de quoi il s'agit. Commençons de gauche à droite, s'il vous plaît.
    Comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, l'écart de valeur a été créé en bonne partie par la chute des ventes de CD, et ensuite, par le passage à l'écoute en continu, et les éléments qui échappent à la réglementation et qui ne sont pas totalement monétisés dans la loi.
    Il y a aussi un autre problème. Si on recule de quelques années, quand un artiste signait un contrat avec une maison de disques, il y avait un responsable des artistes et du répertoire qui le préparait et lançait un bon produit. On en faisait des succès. On fabriquait des succès. Aujourd'hui, avec Internet — et je ne dis pas que c'est mauvais —, les artistes n'ont plus besoin des maisons de disques. Ils peuvent enregistrer leurs chansons dans un studio à peu de frais, dans leur sous-sol ou leur garage, avec du matériel très peu coûteux, et diffuser leur produit sur Internet, mais il est perdu dans la pléthore de musique qu'on y trouve. Cette indépendance a provoqué une multiplication des produits, si bien qu'il y a moins d'argent à répartir entre ceux qui les fabriquent.
    Madame McGuffin.
    Au sujet des recommandations dont on parle aujourd'hui, les temps ont changé. La technologie a changé, si bien que la baisse des revenus est en partie liée aux changements dans la source de ces revenus.
    La redevance sur la copie privée permettait notamment, lorsqu'elle était appliquée pleinement et atteignait 38 millions de dollars par année, d'assurer un flux de revenus qui s'additionnait aux revenus traditionnels provenant des ventes, et maintenant aux revenus de diffusion en continu. Nous appuyons sans réserve la mise en oeuvre de cela d'une façon neutre du point de vue technologique, afin que l'on puisse continuer à percevoir les sommes dues lorsqu'il s'agit de nouveaux appareils. On aiderait ainsi tous les secteurs.
    De plus, sans une commission du droit d'auteur qui fonctionne bien et vers qui on peut se tourner... les gens ne viendront pas à la table pour négocier de façon sincère, il faut quelqu'un pour faciliter la négociation. Si on avait eu une commission du droit d'auteur, cela aurait pu aider. Nous prônons une réforme de cette commission afin que, si les négociations ne peuvent plus progresser de façon productive, une commission responsable puisse examiner les arguments des deux parties et déterminer quel devrait être le taux.
    Nous savons de plus que l'extraction de flux existe encore. Nous savons que des acteurs étrangers ne viendront pas s'asseoir à la table — pas ceux que vous connaissez, les services nommés —, mais c'est un problème, et il nous faut des recours et des dommages-intérêts dans la loi qui vont nous permettre de faire respecter nos droits quand les acteurs refusent de venir négocier.
(1635)
    Monsieur Lefebvre.

[Français]

     Je peux l'expliquer d'une façon peut-être un peu simpliste.
    Il y a 25 ou 30 ans, lorsqu'un producteur d'enregistrements sonores décidait de mettre un album sur le marché, il l'enregistrait dans un studio. Par la suite, il trouvait une maison de disques pour en faire la commercialisation. Venait ensuite un distributeur qui, lui, approvisionnait des milliers de magasins de musique qui vendaient des disques et des albums. Ces milliers de magasins de musique qui vendaient des albums ont tous disparu depuis.
     Que s'est-il passé? L'album est devenu numérique. Cet album numérique s'est retrouvé avec un distributeur en ligne et seulement quelques plateformes sur lesquelles diffuser l'enregistrement sonore. Nous sommes donc passés d'un millier de détaillants qui vendaient un album physique à seulement quelques distributeurs numériques qui font affaire avec trois ou quatre plateformes qui contrôlent le marché. Nous faisons face à une espèce d'oligopole — ce n'est pas un monopole, mais presque — qui contrôle le modèle d'affaires et les prix.
    L'album numérique se vend 10 $ sur iTunes, alors qu'à l'époque l'album physique se vendait 25 $ dans un magasin de musique. Vous voyez la différence. Nous nous retrouvons avec un modèle où le nombre d'intervenants est réduit à quelques acteurs — je parlais tout à l'heure des Google, Amazon, Facebook et Netflix —, qui contrôlent l'ensemble du modèle d'affaires du marché, qui contrôlent les prix et qui imposent le modèle d'affaires.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Lloyd, vous avez cinq minutes.
    Ma première question s'adresse à Mme McGuffin.
    Vous avez mentionné que le Canada accuse du retard par rapport à certaines normes et à nos homologues internationaux. Pourriez-vous nous dire quelles normes nous devrions suivre et de quels régimes étrangers nous devrions nous inspirer?
    Lorsque j'ai fait ce commentaire, c'était précisément au sujet de la prolongation de la durée du droit d'auteur à 70 ans après le décès de l'auteur. Il est actuellement de 50 ans après son décès. C'est la norme chez tous nos principaux partenaires commerciaux, sauf le Japon, et on se dirige dans cette direction.
    Est-ce le cas en Europe et aux États-Unis?
    Oui. Nous sommes un des rares pays dans le monde à ne pas avoir adopté cette norme. Cela va bien au-delà de nos partenaires commerciaux.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Willaert.
    Vous avez parlé de la radio et de l'exemption de redevances pour les stations de radio. Comment pourrions-nous améliorer la situation? Nous sommes en présence, bien sûr, de tous ces conglomérats radiophoniques et ils se prévalent des exemptions pour chacune des stations. Que pourrions-nous faire pour améliorer la situation, afin que les créateurs obtiennent les redevances auxquelles ils ont droit, mais sans désavantager les stations de radio locales?
     Comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, il suffirait de regarder la taille de la station de radio et les recettes en publicité qu'elle génère. Les petites stations qui font moins de 1,25 million de dollars pourraient bénéficier d'une exemption. Les stations de radio collégiales pourraient bénéficier d'une exemption. Celles dont les recettes sont suffisantes devraient verser le plein montant.
(1640)
    Si je ne me trompe pas, il ne s'agit pas d'une exemption totale. On paie une petite somme, puis au-dessus de 1,25 million de dollars, la somme augmente. Est-ce bien le cas?
    C'est exact.
    Est-ce qu'on pourrait simplement augmenter la somme initiale? Est-ce une solution que vous recommanderiez?
    Je n'ai pas fait les calculs. Je ne pourrais pas vous répondre.
    Madame McGuffin, aimeriez-vous dire quelque chose?
    Ce n'est pas mon domaine, mais cela l'a déjà été. Je peux vous dire que j'étais à la table quand nous avons discuté de cela, et l'objectif a toujours été de permettre aux petites stations de radio privées familiales de bénéficier de l'exemption. Le problème vient du fait que les grands conglomérats s'en sont servis pour toutes les stations, ce qui a fait gonfler le montant par rapport à ce qui avait été prévu.
    S'agit-il d'une échappatoire dans la loi, ou est-ce le fruit d'une décision que les grandes entreprises peuvent en profiter elles aussi?
    Non, c'est la façon dont la loi est rédigée, et elle s'applique à chaque station de radio.
    Il n'y a rien dans la loi au sujet des grandes entreprises. Il s'agit donc essentiellement d'une échappatoire, d'une faille, dans la loi.
    Oui. Ce n'est pas ce qui avait été prévu lorsqu'on examinait la loi à l'époque.
    Au sujet de la création, nous avons Amazon Prime, Netflix et CraveTV. Je suis convaincu qu'il y en a d'autres. Il ne semble pas vraiment y avoir une entreprise canadienne de diffusion en continu. Quelles répercussions cela a-t-il pour les producteurs de musique?
    La facilité de faire des découvertes est un problème de taille dans les plateformes de diffusion musicale en continu et les plateformes audiovisuelles. C'est aussi une question de langue si on veut pouvoir découvrir du contenu francophone. J'en parle constamment à mes collègues au Québec. Nous avons été très heureux d'entendre l'annonce aujourd'hui concernant l'examen de la Loi sur les télécommunications et de la Loi sur la radiodiffusion. Ce sera un examen très intéressant qui accompagnera celui que vous faites ici, car il se penche sur tous les types de questions entourant le financement des industries créatives et des petites entreprises, ainsi que la facilité à découvrir du contenu français et du contenu canadien. Nous trouvons cela très excitant.
    J'examinais certains des tableaux que nous ont fournis les analystes de la Bibliothèque. Les revenus tirés des ventes physiques ont chuté abruptement, mais la diffusion musicale en continu compense en partie cette baisse. Selon vous, la diffusion en continu gagnera-t-elle en importance pour réussir à compenser une bonne partie des ventes physiques perdues ou est-elle au beau fixe à ce stade?
    Elle continue de croître très rapidement, et il y a de nouveaux joueurs. Amazon a récemment lancé ses services essentiels, si bien que de nouveaux joueurs font leur entrée sur le marché. C'est bon pour nous tous quand des entreprises veulent pénétrer le marché canadien et quand les abonnés sont prêts à payer pour avoir accès au contenu.
    Pensez-vous qu'il y a suffisamment de concurrence dans ce marché ou qu'il est simplement trop dominé par quelques joueurs?
    Je n'ai pas vraiment de commentaire à formuler sur ce point.
    D'accord.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Vingt secondes.
    M. Dane Lloyd: C'est bien.
    Le président: « C'est bien » dans le sens de « passons à autre chose »...?
    Je pourrais parler de moi, je suppose, mais je vais faire grâce au Comité.
    Des voix: Oh, oh!
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Sheehan.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci à nos présentateurs. C'est un sujet vraiment important: comment nous appuyons notre économie culturelle et ceux qui travaillent fort dans ce domaine.
    Il y a plusieurs années, lorsque je siégeais au conseil municipal, j'ai lancé une initiative pour que Sault Ste. Marie accueille le Temple de la renommée de la musique canadienne. Bien des gens considéraient que c'était peu probable, mais nous avons présenté une très bonne soumission et nous nous sommes rendus en finale. Je me souviens d'avoir été interviewé par une des meilleures agences de presse, et je ne savais pas que je me mesurais à quelqu'un qui se trouvait aussi en ligne à ce moment-là. On m'a demandé pourquoi le Temple de la renommée de la musique canadienne devrait être à Sault Ste. Marie au lieu de Winnipeg et on a nommé divers artistes de là-bas et des scènes artistiques torontoise et montréalaise. J'ai dit que c'était facile de faire valoir qu'on faisait de la musique à Sault Ste. Marie avant d'en faire à Winnipeg, Toronto et Montréal.
    Cela fait partie de la question que nous posons concernant les droits d'auteur autochtones et comment nous protégeons la culture autochtone et les interprètes qui en font partie. Pendant des milliers d'années, les gens venaient à des pow-wow à Sault Ste. Marie en raison de l'esturgeon jaune dans la rivière Sainte-Marie. Ils venaient de partout au Canada et, naturellement, lorsqu'ils étaient ici, ils faisaient commerce, mais ensuite, ils ont commencé à faire des pow-wow dans lesquels ils dansaient et jouaient de la musique.
    Selon vous, que devons-nous faire pour protéger et promouvoir les musiciens autochtones?
(1645)
    Je pense que vous devriez poser la question à ces communautés, car elles savent très bien ce dont elles ont besoin.
    Ce n'est pas faux. On nous l'a déjà dit.
    Quelqu'un d'autre aimerait-il ajouter quelque chose?
    Alan, je veux vous poser une question concernant vos membres. En 2012, combien de membres aviez-vous par rapport à maintenant?
    Nous en avons un peu moins aujourd'hui, mais, au Canada, nous sommes restés environ à 17 000 membres au cours des dernières années.
    Vos membres m'intéressent.
    Quant aux autres, combien de membres aviez-vous entre 2012 et aujourd'hui?

[Français]

     Nos effectifs sont inclus dans ceux de l'American Federation of Musicians. Nous sommes 3 000, mais nous faisons partie de ses 17 000 membres.

[Traduction]

    Vos nombres à vous aussi sont-ils à peu près les mêmes?
    Nous avons une cinquantaine de membres, mais ce qu'il y a de vraiment intéressant est que de nouvelles entreprises indépendantes canadiennes ont fait leur apparition au cours des 12 dernières années, et nous trouvons cela très excitant malgré toutes les perturbations.
    Alors, vous avez pris de l'expansion. Savez-vous combien de membres vous aviez en 2012?
    Les revenus de 80 millions de dollars de nos membres des bureaux canadiens ont augmenté de 120 millions de dollars pendant cette période, surtout, comme je l'ai dit, du côté des exportations.
    Je sais qu'on a mentionné YouTube. Je pense à Justin Bieber. Il s'en est servi comme outil pour se faire remarquer, et ses efforts ont été très fructueux. Cependant, nous savons que cela arrive aux nouveaux artistes. Ils se tournent vers ces plateformes pour se faire remarquer. Parfois, quand ils deviennent connus, ils craignent que ces mêmes plateformes empiètent sur leurs droits d'auteur. Je sais que Justin Bieber a donné la permission que son matériel y soit publié, mais certains des dispositifs qui existent maintenant permettent d'enregistrer un spectacle complet de façon facilement dissimulée. À l'époque, lorsque nous étions plus jeunes, il fallait une grosse caméra pour ce faire — pas que j'essaie de laisser entendre que les gens le faisaient.
    Quelles sont les diverses sources de revenu que les nouveaux artistes en particulier...? Qu'envisagent-ils comme sources de revenu et façons de gagner de l'argent?
    Comme nous l'avons dit plus tôt, on est passé de la vente des CD avec une maison de disques qui permettait de toucher une partie des recettes et d'avoir un véritable revenu à une situation où les artistes espèrent qu'on les remarque, que leurs vidéos seront visionnées quelques millions de fois sur YouTube et beaucoup diffusées, et qu'ils pourront partir en tournée et vendre des t-shirts. Pour des groupes musicaux comme cela, la situation est devenue vraiment difficile.
    Est-ce le cas tant du nouvel artiste qui commence que du grand nom canadien? Y a-t-il une différence? Spotify est-il plus utile à l'un qu'à l'autre?
    La différence est énorme sur le plan des salles de spectacles. Si vous êtes un artiste majeur et que vous êtes en tournée au Centre Air Canada ou au Centre Bell, vous êtes à un tout autre niveau...
    Je parle de Spotify en particulier. Est-il plus utile à l'interprète important qui a réussi qu'à une personne qui n'est pas rendue là?
    Je n'ai vraiment pas de chiffres là-dessus. C'est probablement aléatoire plus qu'autre chose.
    Si vous obtenez ces chiffres, vous pourriez nous les transmettre. Je pense que ce serait aussi utile.
    Si vous les trouvez, vous pouvez les envoyer au greffier.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Madame Sansoucy, vous avez deux minutes.
    J'en suis heureuse.
    J'aimerais poser une question que je n'ai pas pu poser tout à l'heure.
    Monsieur Lefebvre, je dois vous avouer que vous m'avez perdue pour ce qui est de l'une des recommandations que vous nous avez présentées. Vous faisiez référence à un article précis de la Loi. Je vous écoutais attentivement, mais je dois vous avouer que j'aurais besoin de plus d'explications pour bien comprendre cette recommandation que vous nous avez faite.
    En fait, c'est la façon dont sont rédigées les exceptions dans la Loi sur le droit d'auteur. Quand vous voulez créer une exception, vous devez dire que « ne viole pas le droit d'auteur » le fait d'accomplir tel ou tel geste.
     À l'article 31.1, traitant des fournisseurs de services Internet, il est dit que « ne viole pas le droit d'auteur le fait de... »
     Si vous voulez, je peux lire la disposition.
(1650)
    Ce ne sera pas nécessaire. Vous pouvez nous l'expliquer, tout simplement.
     Au fond, l'exception stipule que le fait, pour un fournisseur de services Internet, d'acheminer du contenu protégé par la Loi sur le droit d'auteur ne constitue pas une violation de ce droit d'auteur.
    En effet, la Loi confère certains droits exclusifs à l'auteur. Le fait, pour le fournisseur de services, de reproduire ou de communiquer au public une oeuvre protégée pourrait faire en sorte qu'il viole le droit d'auteur. On a donc créé une exception qui fait en sorte que le fournisseur de services Internet ne viole jamais le droit d'auteur. Or cette exception s'applique même si — et c'est là une donnée que j'ai trouvé intéressante et que vous me permettrez de divulguer, parce que je pense que vous êtes au courant — 32 % des internautes ont téléchargé, lu ou consulté au moins un fichier musical qui intégrait un contenu illégal. Ce chiffre vient d'un sondage réalisé en novembre 2017 sur la consommation en ligne de contenu protégé par le droit d'auteur. Cela veut dire que, sur Internet, au moins 32 % des internautes ont, au moins une fois dans les trois mois qui ont précédé le sondage, lu, consulté ou téléchargé un fichier illégal.
    Jamais je ne croirai que les fournisseurs de services Internet ne sont pas au courant de cette information. Vous comprenez donc que l'exception prévue à l'article 31.1 a du sens à la lecture de ces données, puisqu'elle semble empêcher le fournisseur de services Internet d'être responsabilisé en vertu de la Loi sur le droit d'auteur. Si cette exception n'existait pas, il serait fort possible, ou à tout le moins possible — je dois faire attention —, qu'un fournisseur de services Internet soit condamné pour violation du droit d'auteur.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    C'est ainsi que se termine la première série de questions. Nous allons maintenant passer à la seconde.
    Avant que nous le fassions, la présidence a une question pour Mme McGuffin.
    Vous avez mentionné dans votre allocution qu'au Canada, en 1998, les ventes de musique ont atteint un sommet de 998 millions de dollars. En 2014, ce chiffre a baissé à 397 millions de dollars — son plus bas niveau — et a ensuite monté à 494 millions de dollars en 2016.
    Pourriez-vous nous en fournir la source? De plus, qu'en est-il de 1999 et des autres années?
    La source était le rapport intitulé The Value Gap de Music Canada.
    Le rapport intitulé The Value Gap...?
    J'en ai un exemplaire.
    Merci beaucoup. Quelqu'un l'a transmis au greffier.
    Nous allons maintenant passer à M. Baylis.
    Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame McGuffin, vous avez parlé des exonérations de responsabilité. J'aimerais que vous expliquiez comment vous percevez leur incidence.
    L'incidence est sur la capacité des titulaires de droits d'auteur de faire valoir leurs droits lorsque le fournisseur de services Internet n'a qu'à les informer du recours au principe d'avis et d'avis. On leur dit qu'il ne faut pas le faire, mais cela n'a pas d'effet dissuasif. Cela signifie qu'il est impossible d'amener les services qui utilisent les canaux de communication du fournisseur de services Internet à négocier, ou qu'il n'y a aucune façon de les empêcher de porter atteinte au droit d'auteur s'ils le font.
    Nous voulons que les services de diffusion en continu payants viennent au Canada. Nous voulons que les consommateurs y aient accès et qu'ils soient prêts à les payer. C'est bon pour nos membres lorsque cela se produit. S'il y a un joueur qui ne respecte pas les mêmes règles du jeu que ces services, nous voulons pouvoir intenter une action en justice contre lui au besoin.
    S'agit-il du principe de la notification et du démontage?
    Oui.
    Mais vous avez dit que vous n'aimiez pas cela. C'est ce que j'essaie de comprendre.
    Nous aimerions des recours plus robustes que cela.
    En ce moment, nous n'avez que le régime d'avis et d'avis. Le principe d'avis et de démontage est plus robuste, mais vous dites qu'il ne suffit pas.
    Selon vous, quelle serait alors la prochaine étape?
    Ce n'est pas seulement le principe d'avis et de démontage, mais aussi les recours vous permettant de faire respecter vos droits qui vont de pair avec la disposition. Nous fournissons de plus amples détails à ce sujet dans notre mémoire.
(1655)
    Allez-y, monsieur Willaert.
    J'aimerais ajouter que, dans un monde idéal, nous avons maintenant la technologie: les algorithmes que nous pouvons appliquer pour voir où la musique est utilisée partout dans le monde. L'idée serait d'employer cette technologie et de faire payer les utilisateurs du contenu.
    Pouvez-vous m'expliquer cette technologie telle que vous la voyez? Vous avez la technologie. De quoi parlez-vous exactement?
    Par exemple, avez-vous déjà entendu parler de l'application Shazam?
    Oui.
    Vous pouvez l'allumer et elle reconnaît une chanson. Elle utilise les algorithmes. Elle se souvient des tendances pour vous dire exactement ce qu'était la chanson. Elle peut faire le suivi de la musique, de ce contenu utilisé n'importe où.
    Vous dites qu'il y a de la technologie qui pourrait suivre chaque téléchargement qui passe par un fournisseur de services Internet pour le filtrer avant qu'il ne circule. Est-ce bien ce que vous dites?
    C'est ce qu'on m'a dit quand j'ai assisté à une réunion de l'OMPI à Genève.
     Qui vous l'a dit?
    Il s'agissait d'une tribune ouverte dans le cadre d'une conférence de l'OMPI il y a environ un an et demi où on parlait de cette technologie ainsi que de la technologie de chaîne de blocs et de monnaie numérique...
    Si vous avez quelque chose de précis dans cette veine, quoi que ce soit, vous pouvez évidemment l'envoyer au greffier. Retournons aux aspects de la loi canadienne sur le droit d'auteur.
    Vous n'êtes satisfait ni des exonérations de responsabilité ni du principe d'avis et d'avis.
    Monsieur Willaert, vous avez dit que vous préfériez le principe d'avis et de démontage.
    Madame McGuffin, vous avez dit que vous aimeriez quelque chose de plus que le principe d'avis et de démontage.
    Nous voulons que les fournisseurs de services Internet soient responsables du contenu qui circule dans leurs canaux.
    Disons qu'ils assument la responsabilité et qu'ils les démontent, mais vous avez dit que c'est jouer au chat et à la souris, alors...
    Nous voulons des recours pour pouvoir intenter des actions en justice en cas de violation du droit d'auteur.
    Quels sont ces recours?
    Il s'agit de dommages-intérêts légaux et il y a...
    Voulez-vous que le site se voie imposer des dommages-intérêts légaux ou que ce soit le fournisseur de services Internet?
    Je veux qu'ils soient imposés au site, mais que le fournisseur de services Internet ait une part de responsabilité.
    Oui, mais disons que je suis un fournisseur de services Internet et que je veux vraiment suivre les règles parce que j'ai à faire affaire avec les gens. Je veux suivre les règles et j'ai les mêmes problèmes que vous, celui de jouer au chat et à la souris. Vous me donnez un avis, je le signale à la personne qui a violé les droits d'auteur pour qu'elle supprime le contenu, et celle-ci recommence ailleurs. Ensuite, vous me donnez un avis et je refais la même chose. Voulez-vous me poursuivre, moi, le fournisseur de services Internet? Voulez-vous que je vous verse des dommages-intérêts?
    Nous voulons que, lorsque vous savez qu'on emploie vos services pour mener ce type d'activité, vous en assumiez la responsabilité.
    Qu'on confronte la personne qui viole les droits d'auteur.
    Il y a aussi la capacité... Certains de ces services participent activement à la mise en ligne de la musique et ils encouragent les utilisateurs à en faire autant, et nous voulons qu'ils en assument la responsabilité.
    Nous allons donc mettre la question de côté. J'aimerais comprendre quelque chose de complètement différent.
    Monsieur Willaert, vous avez parlé des enregistrements sonores en lien avec les émissions de télévision et les films. Pourriez-vous comparer la loi canadienne et la loi étatsunienne?
    Oui. Les États-Unis ont ratifié le Traité de Beijing de façon à ce que la musique synchronisée avec les émissions de télévision ou les films soit assortie de redevances ou de tarifs.
    Si on utilise cette musique dans une émission de télévision ou un film...
    C'est exact. Et comme le Canada n'a pas ratifié ce traité, son contenu audiovisuel n'est pas protégé.
    Vous aimeriez que nous ratifiions le Traité de Beijing, qui aurait pour effet de protéger le contenu audiovisuel relatif à la musique, c'est bien cela?
    C'est exact, oui.

[Français]

     Monsieur Lefebvre, avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?
    Oui. Le Traité de Beijing est très important parce qu'il crée des droits, un peu comme le Traité de l'OMPI de 1996 pour les enregistrements sonores. Le Traité de Beijing vise aussi les productions audiovisuelles.
    Le fait que le Canada n'ait pas ratifié ce traité fait effectivement en sorte que nous sommes relativement à la traîne.
    L'avons-nous signé quand même? Nous signons toujours les traités, même si nous ne les ratifions pas nécessairement.
    Je ne suis pas au courant des derniers détails, mais j'ai cru comprendre que, contrairement au Traité de l'OMPI, le Canada n'avait pas participé activement à la négociation du Traité de Beijing, ce que M. Willaert pourrait peut-être confirmer puisqu'il était présent lors des discussions qui ont eu lieu à Beijing, je crois.
    En somme, nous ne l'avons pas ratifié, et vous aimeriez que cela soit fait.
    Au bout du compte, il faut que les artistes interprètes détiennent des droits équivalents à ceux actuellement en place pour les enregistrements sonores, mais que ces droits puissent aussi s'appliquer aux productions audiovisuelles.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
(1700)

[Français]

    Madame Sansoucy, vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Tout à l'heure, le président a souligné que c'était ma première participation à ce comité. Je plonge donc dans ce sujet. Plus tôt, ma collègue parlait de questions de base pour nous permettre de bien comprendre un secteur dont vous êtes les experts.
    Je voudrais donc savoir si les intérêts des titulaires des droits d'auteur diffèrent selon leur style de musique. Par exemple, y a-t-il des différences entre les intérêts d'un artiste interprète ou d'un producteur de musique classique et ceux d'artistes ou de producteurs de musique populaire? Le cas échéant, est-ce quelque chose dont nous devrions tenir compte? Comment cela fonctionne-t-il? Peu importe ce que l'on produit ou interprète, est-ce la même chose d'un style à l'autre?
    La réponse est peut-être évidente pour vous, mais elle ne l'est pas pour nous.
     Il y a évidemment des structures légèrement différentes. Prenons l'exemple de la musique classique et d'un orchestre symphonique. Il y a 100 musiciens dirigés par un chef d'orchestre, en plus peut-être d'un soliste invité, comme un violoniste qui va jouer un concerto accompagné par l'orchestre. Un phonogramme va être produit, un enregistrement sonore.
    Prenons un deuxième exemple, celui de Céline Dion et de ses cinq musiciens — elle pourrait en avoir plus, mais je donne un exemple — qui enregistrent aussi un phonogramme. Nous parlons bien sûr ici de musique populaire.
    Y a-t-il une différence entre les deux? Le soliste va probablement signer un contrat avec un producteur, comme le fera l'artiste vedette de musique populaire. Les musiciens vont être liés par des ententes semblables. La différence est que la musique classique implique un plus grand nombre de musiciens, parce qu'ils font généralement partie d'ensembles. Puisqu'il y a plus de musiciens, les redevances qu'ils toucheront seront peut-être moins élevées que celles qui seront versées à un ensemble de seulement cinq musiciens.
    Outre ces différences, les artistes interprètes peuvent se retrouver dans des situations assez diverses. Je connais un musicien qui peut jouer, un jour, à l'orchestre symphonique, aller faire du jazz le lendemain et accompagner un artiste populaire le surlendemain. Ce même musicien va ainsi jouer avec plusieurs artistes de styles différents.
    Les pratiques contractuelles peuvent différer d'un secteur à l'autre. En musique classique, ce sont généralement des ententes collectives qui encadrent les conditions de travail entre un orchestre et un producteur. En musique populaire, on parle plutôt de contrats individuels pour gérer les relations entre un producteur et un artiste.
    Pour ce qui est de la Loi sur le droit d'auteur, je ne pourrais pas vous dire s'il y a de grosses différences en fonction du style de musique.
    Je reprends quelque chose que vous avez dit tantôt. Nous avons beaucoup parlé des services de musique en continu, et vous avez dit que 30 % de ces services étaient illégaux.
    Ce que j'ai dit, c'est que, d'après le sondage qui a été réalisé, 30 % des internautes, au moins une fois dans les trois mois qui ont précédé le sondage...
    Vous parliez de 30 % des internautes. D'accord.
    Cela fait quand même des millions de pistes écoutées ou téléchargées qui renferment du contenu illégal.
    Je dois vous avouer qu'en tant que maman de jeunes adultes, je vérifie s'ils ont téléchargé du contenu illégal. Vous savez, cela fait tellement partie de leur univers qu'on dirait qu'ils ne s'en préoccupent pas.
    En parallèle, je lisais que les redevances versées par les services de musique en continu — vous l'avez peut-être dit plus tôt — étaient de 10,2 cents par mille écoutes pour les artistes interprètes et les producteurs. Cela n'est pas beaucoup.
    Je ne connais pas le montant exact, mais ce que vous dites est très plausible.
    C'était écrit dans La Presse.
    C'est vraiment très peu. J'essaie de voir comment notre examen de la Loi sur le droit d'auteur dans ce contexte d'une industrie du disque nettement moins florissante que par le passé va permettre au gouvernement fédéral d'intervenir pour faire face à cela.
    Je vous écoute depuis le début, et si je comprends bien, le milieu de la musique fait vraiment face à une nouvelle réalité.
    Mme McGuffin en parlait un peu plus tôt, la Commission du droit d'auteur du Canada tient actuellement des audiences sur les tarifs de la musique en ligne, justement pour déterminer la valeur des droits qui sont associés à une prestation d'artiste interprète ou, surtout, les montants qu'un auteur et un producteur vont pouvoir recevoir de la musique en continu. D'après ce que j'ai cru comprendre, les montants en question sont excessivement faibles à l'heure actuelle.
(1705)
    Madame McGuffin, voulez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

    Pour notre part, nous avons estimé au cours des dernières années que si nous avions une commission du droit d'auteur dotée des processus appropriés pour rendre des décisions en temps opportun en ce qui concerne les éditeurs de musique et les auteurs-compositeurs, cela ferait une grande différence, car des choses comme les minimums et la façon de bien structurer un tarif ne devraient pas figurer dans la loi, mais bien être soumises à un comité, si on avait une commission du droit d'auteur qui fonctionne efficacement.

[Français]

    D'accord.
    Si j'ai bien compris, nous avons un rôle à jouer quant au mandat et au rôle de cette commission, mais comme je vous le disais, c'est un univers que je connais moins bien.
    Au bénéfice de notre comité, j'aimerais que vous m'expliquiez un peu comment tout cela fonctionne. J'ai de la difficulté à saisir le rôle du gouvernement fédéral, surtout lorsque vous dites que nous ne pourrons pas influencer la situation simplement en modifiant la loi.

[Traduction]

    Le mandat de la Commission est présenté dans la Loi sur le droit d'auteur.

[Français]

     D'accord, merci.

[Traduction]

    En septembre dernier, il y a eu un processus dans le cadre duquel 60 personnes différentes qui doivent aller devant la commission du droit d'auteur ont trouvé différentes façons d'accroître l'efficacité de cette institution. Nous avons présenté un mémoire, et un certain nombre de personnes dont vous allez entendre parler au cours des prochaines semaines l'ont aussi fait.
    Nous avons notamment parlé de donner à la Commission des échéanciers pour rendre ses décisions et de lui fournir des outils de gestion des dossiers. Il s'agit, dans certains cas, de choses que la Commission fera elle-même, et à l'issue de ce processus, vous obtiendrez des recommandations de chacun d'entre nous sur des choses qu'il faudrait modifier dans la Loi sur le droit d'auteur en ce qui a trait au mandat de la Commission.
    Nous allons nous tourner vers M. Jowhari.
    Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais commencer par Mme McGuffin.
    Vous avez mentionné dans votre témoignage que vous étiez favorable à ce qu'on prolonge la protection relative au droit d'auteur des oeuvres musicales pour qu'elle s'applique 70 ans après la mort de l'auteur-compositeurs plutôt que 50 ans. Pouvez-vous m'expliquer en quoi cette prolongation aiderait les musiciens et les chanteurs aujourd'hui?
    C’est avec plaisir que j’aborderai cette question. Premièrement, soyons clairs. Lorsque nous parlons de cette prolongation du droit d’auteur, nous faisons allusion aux compositeurs, et non aux musiciens.
    Mes membres investissent dans des compositeurs naissants. Ils les découvrent, leur donnent accès à des studios et leur permettent de voyager et de coécrire des chansons avec des compositeurs des quatre coins de la planète. Un compositeur qui décide de signer une entente d’édition musicale noue une relation avec un individu ou une entreprise qui l’aidera dans son cheminement de carrière.
    Nos entreprises membres ne peuvent prendre des décisions à propos de tels investissements à moins de bénéficier d’une source abondante de revenus. Comme je l’ai expliqué, parmi nos entreprises de taille moyenne, les plus solides sont celles qui possèdent et gèrent des catalogues étrangers et des catalogues canadiens, comportant d’anciennes œuvres éprouvées qui génèrent des recettes que vous pouvez essentiellement prévoir au cours des 10 prochaines années. Le fait que vous sachiez quelles recettes vous toucherez au cours des 10 prochaines années peut attirer des investisseurs. Cela vous permet alors de signer une entente avec un compositeur de Stratford, en Ontario, et d’investir dans sa carrière.
    Ce que vous dites, c’est qu’une source de revenus à plus long terme vous apporterait une certaine sécurité et vous permettrait de prendre le risque de soutenir non pas des musiciens, mais des compositeurs. En l’absence de cette source de revenus et de cette sécurité, votre tolérance à l'égard du risque couru en aidant des compositeurs plus modestes sera inférieure.
    Les entreprises canadiennes ont 20 années de moins pour réaliser des profits. Il se peut qu’elles aient investi grandement dans leur portefeuille de compositeurs canadiens et que, par conséquent, elles disposent de moins de temps pour recouvrer leurs investissements. Les anciennes chansons qui sont entrées dans le domaine public, comme celles de Cole Porter, ont encore une valeur.
    Je sais. Je syntonise constamment la fréquence 97.3 FM. La musique diffusée date de mon époque.
    Comment cette prolongation de 20 ans aiderait-elle notre industrie à l’étranger?
(1710)
    Elle nous permet de continuer de faire ce que nous avons fait au cours des 12 dernières années, à savoir investir dans des compositeurs, et les faire voyager partout dans le monde.
    Mon président, qui est compositeur, ne se produit jamais sur une scène, et il est incapable de jouer d’un instrument, mais c’est un compositeur et parolier phénoménal, connu à l’échelle mondiale. Il s’appelle Vince Degiorgio. À l’époque où il occupait un poste au sein du service A & R, il a conclu une entente avec le groupe NSYNC. Il s’est familiarisé avec l’industrie de la musique, puis il est devenu parolier à temps plein.
    Il y a deux semaines, il était aux Pays-Bas afin de composer des chansons pour leur artiste principal, Caro Emerald. Lorsqu’il a composé son premier album, il y a trois ans, l’album a atteint le sommet du palmarès des Pays-Bas et a battu l’album « Thriller » de Michael Jackson. En sa qualité d’éditeur canadien de musique, M. Degiorgio conclut maintenant des ententes avec des compositeurs. Il est en mesure de le faire parce qu’il sait quelles recettes il tirera de son portefeuille de chansons. Il embauche ces compositeurs afin qu’ils puissent jouir d’une carrière internationale comme la sienne.
    Notre organisation se soucie également d’aider ses petites entreprises membres à faire la même chose. Au cours de la troisième semaine de septembre, nous irons en Allemagne, puis au Danemark, une semaine plus tard, afin de rencontrer des maisons de disques et des producteurs de films et de télévision, et de permettre à un groupe de compositeurs d’écrire des chansons avec des compositeurs des pays nordiques.
    Dès que vos chansons sont commercialisées dans trois ou quatre territoires distincts, votre chance de réussite augmente. Pour permettre aux petites entreprises de survivre, il est essentiel qu’elles aient accès aux marchés étrangers. Le marché canadien étant trop restreint, il est nécessaire d'avoir une vision mondiale.
    Parlons du fait que vous dites que le marché canadien est trop restreint. Quelle est la taille de l’industrie canadienne de la musique, et qui sont, disons, les personnes les mieux rémunérées de cet écosystème, qui comprend des compositeurs, des producteurs, des réalisateurs, des chorégraphes et des chefs d’orchestre?
    Je dispose de quelques données internationales, mais j’aimerais vraiment avoir une idée de la taille du marché canadien.
    N’importe lequel d’entre vous pourrait répondre à cette question.
    Je peux parler des interprètes et des compositeurs. Si nous examinons toutes les données relatives aux compositeurs provenant des entreprises canadiennes, ainsi que tous les fonds acheminés à la fondation SOCAN et aux autres sociétés de gestion, nous estimons que les compositeurs canadiens rapportent environ 700 millions de dollars.
    À combien se chiffrent les recettes de l’industrie de la musique? Quels compositeurs génèrent environ 700 millions de ces dollars?
    Les recettes dépasseraient un milliard de dollars.
    D’accord.
    Qu’est-ce qui génère la majeure partie de ce milliard de dollars? Quelles sont les deux principales sources de revenus?
    En ce qui concerne nos membres, plus de 50 % de ces recettes découlent de l’interprétation. Les services mécaniques, qui créent les copies, rapportent environ 35 % de cette somme. Le secteur de croissance chez nos membres est celui qu’on appelle la synchronisation, dans le cadre de laquelle on cherche à placer une chanson dans une annonce, un film ou une émission télévisée.
    Il me reste moins de 30 secondes, et je souhaite m’adresser à M. Willaert.
    Vous parliez des musiciens canadiens, et je pense que les chanteurs sont les seuls à avoir observé une diminution de leurs revenus, par opposition à tous les autres intervenants de l’écosystème.
    Pouvez-vous nous donner une idée du facteur déterminant de cette diminution?
    Soyons clairs. Les revenus de tous ont diminué.
    Je préciserais de nouveau que les ventes sont le facteur déterminant. L’écosystème en entier repose sur l’enregistrement et la vente du produit, et cette source de revenus a disparu au cours d’une période de 10 ans. Un nouveau modèle l’a remplacée; il s’agit d’Internet.
    Nous vendons toujours des enregistrements. Quelque chose d’autre a fait chuter les revenus.
    Les revenus des musiciens ont diminué parce qu’ils ne reçoivent plus leur part du gâteau provenant de leur musique.
    J’ai dépassé mon temps de parole, mais, si j’en ai l’occasion, j’aimerais revenir sur cette question.
    Comme je l’ai indiqué, l’industrie elle-même est florissante. En effet, l’industrie canadienne des arts et de la culture rapporte 52 milliards de dollars. C’est seulement qu’aucune de ses recettes n’atterrit dans les poches des musiciens.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Sheehan.
    Vous disposez de cinq minutes, monsieur.
(1715)
    Merci, monsieur le président.
    Pour en revenir à mon lieu de résidence, qui se trouve juste à la frontière de Sault Ste. Marie, il y a parfois des groupes de musiciens qui se réunissent là-bas. Il peut y avoir des Américains qui viennent au Canada pour se joindre à un groupe et jouer de la musique. Il arrive aussi que des Canadiens se rendent aux États-Unis, ou qu’un mélange de ces scénarios survienne... Puis, il y a aussi le musicien proverbial qui déménage aux États-Unis — à Nashville ou ailleurs — pour atteindre la célébrité.
    Comme nous vivons dans une situation frontalière, différents règlements ont été établis par le CRTC, par exemple, afin de promouvoir le contenu et les musiciens canadiens. J’ai toujours vu la nécessité de ces règles, car j’ai toujours été inondé par le contenu américain depuis l’époque où un signal analogue, leur radio ou leur musique traversait la frontière. Je sais que certaines règles sont à l’étude au CRTC en vue d’être révisées.
    J’en arrive à ma question, mais je tenais également à parler de la CBC, la Canadian Broadcasting Corporation, qui joue un rôle important dans la promotion des artistes canadiens. Elle organise des concours de temps en temps auxquels participent des gens de Sault Ste. Marie ou des quatre coins du Canada. Souvent, le gagnant du concours a la chance de signer un contrat avec une maison de disques canadienne. C’est ainsi que la promotion est faite.
    Je constate effectivement que nous sommes inondés par la musique américaine, mais les Canadiens s’en tirent bien. Je pense que le fait que vos membres disent toujours la même chose témoigne de la persistance des musiciens canadiens.
    J’aimerais savoir, entre autres, comment nous pouvons promouvoir la musique canadienne en particulier. Je sais que nous examinons la question du droit d’auteur. Nous avons parlé de certaines des sources de revenus, à savoir les concerts. Ne serait-ce qu’à Sault Ste. Marie, nous apercevons des interprètes de plus en plus célèbres, comme Elton John, que je n’aurais jamais imaginé se produire sur une scène là-bas. Je sais qu’il est américain, mais, oui, il est venu à Sault Ste. Marie. Je crois que cela coïncide avec vos observations, selon lesquelles un plus grand nombre d’interprètes font des tournées.
    Quel autre appareil y a-t-il? Nous savons que nous avons parlé de Spotify. Nous avons également parlé d’autres lecteurs de musique qui existent. Comment la carrière d’un musicien canadien peut-elle être lancée, et comment ce musicien peut-il s’enrichir compte tenu du régime de droit d’auteur actuel? Bien entendu, vous avez fait des commentaires sur certains des changements.
    L’un des aspects dont nous avons parlé longuement au cours d’une période prolongée était la question des utilisations équitables et de la façon dont la musique est utilisée dans le secteur de l’éducation. Je pense donc également à cela. Nous savons que des pièces musicales sont jouées dans des écoles dans le cadre d’événements reliés, etc. J’aimerais donc que vous formuliez aussi quelques observations concernant les utilisations équitables....
    Je sais que ma question est très générale, mais ce sont certaines de mes préoccupations. Cette séance est notre première, et ce sont quelques-uns des enjeux que je tente de cerner.
    Je pense qu’il y a quelques renseignements intéressants à ce sujet dans le rapport qui a été publié plus tôt cette semaine et dans l’annonce concernant l’examen de la Loi sur la radiodiffusion et de la loi sur les télécommunications. Dans ces documents, on a présenté la nécessité de discuter du contenu canadien et du contenu de langue française ainsi que des exigences qui ont véritablement créé un vedettariat dans notre pays, exigences qui, maintenant, s’appliquent seulement aux diffuseurs traditionnels. Les nouveaux services numériques n’assument pas ces responsabilités et ne sont pas obligés d’investir dans des fonds auxquels les musiciens ont accès.
    Ici, au Canada, il y a FACTOR et Musicaction. Leurs revenus provenant de stations de radio privée diminuent. Cela aura des répercussions sur nos musiciens, car ils ne seront plus en mesure d’avoir accès à autant de fonds que par le passé, si nous n’envisageons pas de nouvelles façons de fournir des fonds à ces organisations.
    C’est très intéressant. Y a-t-il d’autres commentaires à ce sujet?
    Toutefois, qu’en est-il des utilisations équitables dans les écoles? Un grand nombre d’auteurs ont témoigné à ce sujet. Y a-t-il des préoccupations concernant les musiciens, non seulement en ce qui concerne l’utilisation de la musique dans les écoles, mais aussi dans les centres de formation. Vous demandez à quelqu’un de venir faire un exposé. Cette personne pourrait être membre d’une entreprise privée. Elle apporte son document de présentation et, souvent, elle utilise de la musique simplement pour soutenir l’exposé. La musique a un effet très puissant dans le cadre d’un exposé.
    Y a-t-il des commentaires au sujet de ce scénario, dans le contexte des utilisations équitables?
    Je dois admettre que j’ai travaillé à Access Copyright pendant 10 ans à titre d’experte-conseil, puis d’employée.
(1720)
    Allez-y, néanmoins.
    Je ne suis plus à leur service maintenant.
    Toutefois, en tant que parent, je paie chaque semaine pour envoyer mes enfants aux installations de la OFSAA pour qu’ils jouent des parties de hockey sur gazon, visitent le Centre des sciences et aient accès à des services supplémentaires dont ils ont besoin à l’école. Tout comme lorsqu’ils rémunèrent leurs enseignants, paient leurs factures d’hydroélectricité et paient pour les réparations à apporter aux écoles, je m’attendrais à ce qu’ils indemnisent aussi les créateurs et les entreprises qui les soutiennent en raison des bons documents qu’ils produisent. Il y a d’excellents enseignants, mais l’apprentissage serait plus uniforme si nos écoles utilisaient des ressources d’apprentissage et des livres produits au Canada. Ainsi mes enfants ne liraient pas uniquement des ressources américaines.
    Et, par extension, ils n’écouteraient pas uniquement de la musique américaine.
    Merci beaucoup.
    Maintenant, pour la toute dernière question, nous passons à M. Longfield.
    Si c’est possible, j’aimerais partager mon temps de parole avec M. Jowhari.
    J’examine le rapport intitulé « L’Écart de valeur » auquel vous avez fait allusion. Selon l’IFPI, qui est une autre organisation que nous devons examiner afin de déterminer comment le Canada est relié à elle…
    Music Canada est reliée à elle.
    L’organisation n’était pas mentionnée sur leur site Web, mais leur Global Music Report indique que l’écart de valeur est le plus grand danger qui menace la viabilité à venir de l’industrie de la musique. Ensuite, ils nuancent cela en affirmant que « Le manque de cohérence dans l’application des lois sur la responsabilité en ligne a encouragé certains [services] à déclarer qu’ils ne sont pas responsables de la musique à laquelle ils permettent au public d’accéder ».
    Précédemment, nous avons entendu un témoignage à propos du fait que l’application des lois était l’un des aspects problématiques et de la question de savoir si l’application des lois était suffisamment robuste.
    Mon interprétation était juste?
    C’est une considération.
    Puis, en ce qui concerne l’argument de M. Baylis — j’ai poursuivi ma lecture pendant que j’étais ici —, si nous ne sommes pas en mesure de forcer les services à s’asseoir à la table des négociations avec nous, nous devons nous adresser aux fournisseurs de services Internet qui profitent de ces services et les assujettir à un permis.
    Merci.
    Selon ce rapport, les profits de la station de radio commerciale s’élevaient à 3,6 millions de dollars en 2015, alors qu’en 2016, ils se chiffraient à 437,5 millions de dollars. Il y a de l’argent dans la chaîne de valeur, mais elle ne se propage pas jusqu’en bas. Cela a été répété à quelques reprises aujourd’hui.
    Dans ce rapport, il y a une citation de Miranda Mulholland qui dit qu’elle joue dans presque chaque épisode de l’émission Republic of Doyle de la CBC, est souscrite à l’échelle mondiale. Elle a reçu un taux syndical unique d’environ 280 $, alors que le compositeur reçoit des revenus tirés de droit de suite chaque fois que l’émission est diffusée dans 44 pays du monde entier.
    Y a-t-il une norme mondiale que nous devrions examiner, ou y a-t-il une norme mondiale avec laquelle nous ne sommes pas harmonisés?
    Certains pays offrent des paiements aux musiciens. Au Canada, il y a deux poids, deux mesures. Les compositeurs sont payés régulièrement par l’intermédiaire de la fondation SOCAN, alors que les musiciens qui jouent les œuvres de ces compositeurs ne sont pas payés régulièrement.
    La citation parle de « 44 pays du monde entier ». Vous avez mentionné que la France et l’Australie en faisaient partie, et que nous faisions figure d’exceptions.
    Au Canada, il y a une différence entre le statut de compositeur et celui de musicien. De plus, dans ces autres territoires…
    Je comprends.
    Elle doit jouer en direct afin d’être rémunérée. Une fois que la musique est enregistrée et utilisée, elle ne reçoit aucune rémunération.
    Qui plus est, ce n'est pas tout le monde qui peut partir en tournée. À certains moments de votre carrière, vous ne pouvez plus partir en tournée si vous avez une famille, et vous devez passer au prochain chapitre de votre vie. Vous devez vous recréer, et la meilleure chose à faire n'est peut-être pas de partir en tournée.
    Merci. C'était utile.
    Je cède la parole à M. Jowhari.
    Merci.
    Dans ma préparation à la réunion du Comité, nous sommes tombés sur le concept ou la notion de collage.
    Connaissez-vous cela? Pouvez-vous nous dire quelques mots à ce sujet et nous expliquer ses effets sur l'industrie et surtout les musiciens?
    Je serais heureux d'entendre tous les témoins.

[Français]

     Parlez-vous du fait d'intégrer plusieurs oeuvres musicales ou des extraits amalgamés à la radio?
    Oui.
    Si je me souviens bien, le problème que cela pose concerne la rémunération, qui est possiblement moindre pour l'ensemble des titulaires de droits. Toutefois, nous n'avons pas fait d'étude très poussée qui nous aurait permis de traiter de cette question aujourd'hui.
(1725)

[Traduction]

    Monsieur Willaert, allez-y.
    Il va sans dire que dans le cas de collages de multiples droits devraient être payés pour de telles utilisations. Souvent, lorsque des collages sont créés, surtout par le public, les gens ne pensent pas que cela viole la propriété intellectuelle et qu'il faut demander la permission au titulaire de droits pour utiliser ses oeuvres et payer des droits d'utilisation pour ce faire.
    Bon nombre de stations de radio qui ont des revenus de moins de 1,5 million de dollars font beaucoup de collages avec des extraits de moins de 30 secondes de chaque oeuvre. Comment se fait-il qu'elles soient exemptées de verser des droits aux producteurs, aux compositeurs ou aux musiciens?
    Selon ce que j'en comprends, lorsque les stations de radio paient leurs droits connexes, le secret pour être payé est de s'assurer de fournir les métadonnées et les titres de chacune des oeuvres. Ainsi, les gens recevront des paiements.
    D'accord.
    Cela se résume à avoir de bonnes métadonnées.
    D'accord. Merci.
    Sur ce, je tiens à remercier nos témoins de leur présence devant le Comité et de la multitude de renseignements dont ils nous ont fait part aujourd'hui.
    Avant de lever la séance, j'aimerais dire quelques mots au Comité. La semaine prochaine, le 11 et le 12, le Groupe d'amitié parlementaire Canada-Ukraine accueillera la première vice-présidente du Parlement d'Ukraine. Comme nous ne pouvons pas rencontrer les membres lors de cette date, si nous organisons un déjeuner, par exemple, y en a-t-il parmi les membres du Comité qui souhaiteraient y participer?
    Je ne sais pas. Je n'ai pas mon horaire. Si vous servez des pierogis, probablement.
    Des pierogis. D'accord. Je verrai si nous pouvons organiser quelque chose lundi matin. Merci.
    Sur ce, merci beaucoup encore une fois. Passez une bonne journée.
    La séance est levée.
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