SDIR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 26 septembre 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous, je déclare la séance ouverte.
Nous entamons notre étude sur les droits de la personne entourant l'extraction des ressources naturelles en Amérique latine. Nous avons déjà examiné cette question à plusieurs occasions par le passé, mais de manière isolée. La présente étude nous a été suggérée par notre collègue Cheryl Hardcastle.
Aujourd'hui, nous allons entendre des représentants du ministère des Affaires étrangères. Nous accueillons Duane McMullen, directeur général, Service des délégués commerciaux, Opérations, qui va amorcer les discussions. Nous accueillons également Jeffrey Davidson, conseiller en responsabilité sociale des entreprises de l'industrie extractive. Si possible, veuillez vous en tenir à un exposé de 10 minutes chacun, messieurs.
Je sais qu'il y a d'autres témoins et je vais les présenter.
Martin Benjamin est directeur général de la Direction générale de la Stratégie pour l'Amérique du Nord.
Sylvia Cesaratto est directrice de la Direction des relations bilatérales avec l'Amérique du Sud et Tarik Khan est directeur général de la Direction générale de l'Amérique centrale et Caraïbes.
Monsieur McMullen, je vous invite à présenter le premier exposé et à ne pas dépasser 10 minutes. Nous entendrons ensuite M. Davidson, puis les membres du Sous-comité vous poseront des questions. La parole est à vous.
Je vous remercie, monsieur le président.
La gestion responsable des ressources naturelles est essentielle pour engendrer des retombées économiques durables. Bien des pays d'Amérique latine font une promotion active des investissements dans le secteur des ressources naturelles afin de générer d'importants revenus nationaux et de créer de nombreuses occasions d'emploi directes et indirectes. L'Amérique latine présente un potentiel énorme, mais il reste des difficultés à aplanir dans les domaines comme la corruption, les droits de la personne et la gestion environnementale.
Le Canada entretient de longue date des relations dynamiques et diversifiées avec les pays d'Amérique latine. Ces relations couvrent tout le spectre politique, reposent sur des assises commerciales solides et contribuent grandement au développement et à l'élaboration d'importants programmes de sécurité.
Nous allons poursuivre notre partenariat avec cette région pour faire la promotion de nos intérêts communs comme la défense des droits de la personne, la promotion des principes démocratiques, la stimulation d'une croissance économique forte et inclusive et l'amélioration de la sécurité pour tous.
De nombreuses institutions canadiennes jouent un rôle important dans ce processus, dont le gouvernement, la société civile et le secteur privé.
Le secteur privé au Canada joue un rôle très important, même s'il ne le reconnaît pas toujours. Je parle en particulier des entreprises minières et des sociétés dans le domaine du pétrole et du gaz. Par sa présence massive que je décrirai dans un instant, le secteur privé canadien prend des responsabilités qui vont au-delà de simplement « faire des affaires », strictement parlant. Le gouvernement du Canada veut que les entreprises privées canadiennes apportent une contribution positive au développement des pays où elles investissent. Pour ce faire, nous avons un certain nombre d'outils que nous utilisons activement.
La contribution des entreprises canadiennes est en évolution. Nous sommes fiers des efforts réalisés au Canada, mais si nous reconnaissons qu'il reste beaucoup de pain sur la planche. Le président du Sous-comité a invité Affaires mondiales Canada à lui parler en particulier du secteur canadien de l'extraction et, notamment, de son incidence sur les droits de la personne en Amérique latine.
Tout d'abord, je signale que le secteur de l'extraction au Canada a déjà investi plus de 90 milliards de dollars en Amérique latine. Environ 340 entreprises ont créé 930 projets dans presque tous les pays de cette région.
Les dépenses en salaires locaux, en achats auprès d'entreprises locales et en redevances et impôts locaux par les sociétés extractives canadiennes en Amérique latine dépassent largement les dépenses totales du Canada en aide publique au développement à l'échelle mondiale. Certaines entreprises sont de loin le contribuable le plus important aux recettes nationales et elles offrent un très grand nombre d'emplois parmi les mieux rémunérés. Les dépenses effectuées par certaines sociétés canadiennes rivalisent avec toutes les dépenses consacrées par le Canada à l'aide au développement. Il est difficile de donner le nombre exact d'employés et de sous-traitants, mais il se chiffre sans doute dans les centaines de milliers.
C'est donc dire que si les sociétés minières canadiennes qui possèdent des exploitations en Amérique latine croient que tout ce qu'elles font, c'est déplacer de la roche, elles se trompent. Compte tenu de la faible capacité de gouvernance locale dans bien des pays, on s'attend souvent des sociétés canadiennes à ce qu'elles participent à la prestation de services de base comme les routes, le traitement des eaux, l'électricité, les soins de santé et l'éducation. Ces tâches ont bien sûr comme effet de rehausser leur profil et les attentes auxquelles elles doivent répondre, alors qu'elles sont appelées à jouer un rôle au sein la gouvernance locale. Mais elles ne peuvent pas remplacer les gouvernements locaux, qui doivent prendre leurs responsabilités et assurer la prestation de services publics, ainsi que l'administration de la justice, la démocratie locale et la sécurité publique.
Nos programmes d'aide au développement dans bon nombre de ces pays renforcent les capacités locales et nationales afin de gérer l'extraction des ressources de manière responsable et en toute conformité avec les normes liées aux droits de la personne. Dans ce domaine, nos ambassadeurs, de même que le personnel affecté aux politiques, au commerce et au développement dans nos ambassades, travaillent de concert afin de favoriser le changement. Personne n'est plus motivé que nos diplomates travaillant dans les missions en Amérique latine et le personnel employé là-bas, qui se serrent tous les coudes. À Ottawa, nous appuyons ces gens de sorte que le Canada joue son rôle dans le développement en Amérique latine.
Nos diplomates travaillent avec les gouvernements locaux, la société civile et le secteur privé, mais le Comité s'intéresse plus précisément aux sociétés minières canadiennes. Voici comment nous intervenons auprès d'elles. En premier lieu, nous encourageons les pratiques exemplaires. À l'aide d'intenses recherches, ces entreprises et nous-mêmes comprenons de mieux en mieux comment elles doivent fonctionner et comment elles peuvent favoriser la paix, l'ordre et la bonne gouvernance dans les activités entourant leurs projets. De nombreuses normes et lignes directrices utiles nous aident dans tout un éventail de domaines.
Les entreprises qui adoptent de telles pratiques assurent une saine gouvernance. De plus, elles permettent d'assurer une meilleure réussite des projets.
Nous offrons aussi une formation à nos diplomates sur la façon de reconnaître les bons projets, ainsi que sur la saine gouvernance et la façon de déceler les premiers signes de problèmes. Nous nous attendons à ce qu'ils élèvent la voix lorsqu'ils croient observer une situation d'injustice.
Même si nos missions individuelles en Amérique latine sont de petite taille, elles peuvent faire appel à un soutien robuste d'Ottawa lorsqu'il le faut. Nous disposons d'experts pour fournir des conseils, notamment notre conseiller en responsabilité sociale des entreprises de l'industrie extractive, Jeffrey Davidson. Le Canada est le seul pays au monde à disposer d'un tel bureau.
Le Canada a une bonne réputation en Amérique latine. Cette réputation nous confère un pouvoir de mobilisation. Nous nous attendons à ce que nos diplomates utilisent leur pouvoir de mobilisation pour rassembler les factions polarisées, ce qui aide à intégrer une mémoire musculaire dans la pratique de la politique: faire valoir son point de vue, montrer son désaccord, comprendre et accepter un compromis. Nous avons fourni un soutien financier et technique à des centaines de mini-projets qui ont permis de rassembler des parties et d'intégrer cette mémoire musculaire.
Cette approche explique également notre deuxième objectif. Nous essayons de déceler rapidement les problèmes à un stade où ils sont encore mineurs avant qu'ils ne s'aggravent. Selon notre expérience, nous pouvons déceler les petits problèmes. Si rien n'est fait, ces derniers peuvent s'aggraver et devenir beaucoup plus difficiles à résoudre.
Nous travaillons avec toutes les parties concernées pour remédier aux gros problèmes. Notre principal mécanisme est le point de contact national — le PCN —, obligation imposée au Canada en tant que membre de l'OCDE. Le PCN soutient les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales et tente de résoudre les problèmes qui se posent. Les Principes directeurs sont le résultat de discussions multilatérales approfondies et d'un consensus multilatéral, et les pairs apportent un soutien considérable pour assurer la réussite de leur mise oeuvre.
Le PCN du Canada rassemble des experts de sept ministères fédéraux pour régler les problèmes les plus complexes, ce qui nous donne accès à un large éventail de ressources, d'expertise et d'expérience dans des domaines comme les droits environnementaux, la main-d'oeuvre, les droits de la personne, la fiscalité ou les droits des peuples autochtones.
Même si nos processus sont volontaires, le Canada est le seul pays au monde à imposer des sanctions aux entreprises qui n'agissent pas de bonne foi lorsqu'elles travaillent avec nos processus pour comprendre toutes les situations problématiques et y remédier. Les noms des entreprises sanctionnées sont publiés et celles-ci perdent tout accès au soutien offert pas les diplomates canadiens. Nous n'hésitons pas à recourir aux sanctions afin d'encourager les entreprises à agir en toute bonne foi et à travailler avec les parties concernées pour remédier aux problèmes.
Bien que les meilleurs résultats soient obtenus sur le terrain, un projet, une collectivité et une entreprise à la fois, nous reconnaissons également que la meilleure solution est que ces pays développent eux-mêmes des capacités de gouvernance. Nous avons comme priorité d'aider les gouvernements de la région à renforcer ces capacités de gestion durable des ressources naturelles, conformément à la nouvelle politique canadienne d'aide internationale féministe.
En terminant, j'espère que ce qui précède a aidé le Sous-comité à comprendre l'approche du Canada à l'égard de ces enjeux. Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions.
Merci beaucoup, monsieur McMullen.
Nous allons maintenant entendre M. Davidson. Vous avez 10 minutes, monsieur.
Merci, honorable président, mesdames et messieurs les membres du Sous-comité de m'avoir invité aujourd'hui pour vous faire part de mes réflexions et de mon expérience. Je suis le conseiller en responsabilité sociale des entreprises de l'industrie extractive du Canada depuis mai 2015. J'ai été nommé par décret pour une durée déterminée et je relève directement du ministre du Commerce international. Mon rôle est de donner au ministre des conseils et des suggestions en toute franchise. Le conseiller dit ce qu'il pense vraiment et mes déclarations publiques reflètent ma propre évaluation des situations et des enjeux. En 35 ans de carrière, j'ai acquis une expérience variée dans le milieu universitaire, le secteur privé, les institutions multilatérales et maintenant au gouvernement fédéral.
Le conseiller exécute son mandat au sein du Bureau du conseiller en responsabilité sociale des entreprises de l'industrie extractive, lequel est maintenant situé à Ottawa et compte, en plus de conseiller, deux employés techniques subalternes. Le Bureau fonctionne avec un soutien administratif et budgétaire restreint.
Aujourd'hui, le Bureau adopte une approche proactive et préventive pour promouvoir les pratiques exemplaires et réduire le risque de conflit associé aux projets d'extraction. Qu'est-ce que cela veut dire en pratique? Nous prenons la parole lors d'assemblées publiques, mais nous rencontrons également des représentants d'entreprises et autres intervenants pour des entretiens particuliers où nous leur expliquons la politique de RSE du Canada ainsi que nos attentes. Nous communiquons directement avec les entreprises lorsque nous sommes informés d'une situation préoccupante sur les lieux d'un projet. Nous représentons une ressource sur les pratiques exemplaires en matière de RSE, pas seulement pour les entreprises, mais aussi pour les diplomates et les délégués commerciaux en affectation, ainsi que pour la société civile, des organismes et les universités. Souvent, des entreprises, des diplomates et même des ONG situés dans d'autres pays communiquent avec nous pour obtenir notre avis lorsqu'ils font face à des situations difficiles.
Nous avons élargi nos activités de sensibilisation aux pays étrangers où des entreprises canadiennes ont des activités. J'ai déjà eu l'occasion de me rendre dans six pays d'Amérique latine et dans deux pays d'Afrique dans le but d'acquérir une compréhension plus profonde et plus nuancée de la situation dans ces pays, des enjeux et des défis entourant la mise en valeur des ressources, ainsi que des préoccupations et des aspirations des citoyens et des gouvernements locaux.
Au cours de la dernière année, je suis allé au Honduras, au Guatemala, au Panama et en Argentine. Dans le but de comprendre tous les points de vue, nous avons rencontré des fonctionnaires du pays hôte, des universitaires, des représentants d'organismes de la société civile, des représentants des collectivités touchées par un projet et des entreprises canadiennes.
J'ai profité de ces voyages pour visiter des sites de projet. L'an dernier, en compagnie de diplomates canadiens, nous avons visité huit exploitations canadiennes afin de constater par nous-mêmes de quelle manière ces entreprises traitent les enjeux et les répercussions sociales et environnementales, de quelle manière ils bâtissent des relations avec les collectivités locales et les autorités gouvernementales, et de quelle manière les intervenants et les populations locales perçoivent leur présence et réagissent.
Sur notre site Web, il y a la liste des intervenants que nous avons rencontrés. Ces visites servent également de manière limitée, mais utile à nous renseigner sur les pays et les projets. Sur notre site Web, vous trouverez également un aperçu de notre voyage en Honduras. Ce rapport donne un aperçu du caractère complexe des relations entre le gouvernement d'un pays hôte, les entreprises étrangères, les groupes de la société civile et les collectivités locales. Il souligne également les difficultés qu'ont les différents intervenants à trouver un terrain d'entente pour résoudre les problèmes qui les opposent.
Ces visites à l'étranger nous ont permis de conseiller directement les entreprises canadiennes sur la façon dont elles pourraient et devraient améliorer le rendement environnemental et social de leurs chantiers. Il y a, dans toute la région, des préoccupations et des enjeux fondamentaux communs y compris, par exemple, la consultation et le consentement, l'utilisation et la qualité de l'eau, la contamination environnementale et les incidences sur la santé, l'achat de terres et la réinstallation, l'intégrité des modes de vie traditionnels et la protection des lieux sacrés, la compétition en ce qui touche l'accès aux ressources naturelles, l'utilisation de services de sécurité publics ou privés, les emplois et un travail valable pour la population locale, la clôture et l'abandon potentiel d'un projet par les entreprises et le partage des profits avec les collectivités touchées par les projets.
Il n'y a pas que les entreprises pétrolières, gazières et minières du Canada qui suscitent ces préoccupations, mais elles sont néanmoins caractéristiques du secteur de l'extraction en général. Quand les gouvernements des pays hôtes, les sociétés d'extraction — qu'elles soient étrangères ou nationales — et les organisations de la société civile ne s'efforcent pas de régler ces problèmes de façon responsable, ils peuvent dégénérer au point d'ouvrir la porte à des abus potentiels des droits de la personne.
J'aimerais vous donner quelques exemples de la manière dont notre bureau s'est efforcé de favoriser de nouveaux dialogues autour des enjeux difficiles qui sont directement liés aux droits de la personne. En Colombie, en juin, nous avons été les modérateurs d'un dialogue que nous avions coordonné entre de multiples intervenants sur les rôles et responsabilités des différents acteurs, y compris le gouvernement, la société civile, les collectivités ou le secteur privé dans l'établissement de la paix dans un pays émergeant d'un conflit, en portant une attention particulière au rôle du secteur de l'extraction.
Au Honduras, en compagnie de l'ambassadeur du Canada, nous avons passé deux jours sur le terrain à rencontrer des représentants des communautés, des ONG nationales, le commissaire local des droits de la personne et des chefs de chantier afin d'appuyer les efforts déployés à l'échelle locale pour trouver des solutions qui conviendraient à toutes les parties. L'Argentine, un pays où l'extraction minière est encore embryonnaire, mais qui a subi le regard critique du public et son scepticisme, nous avons participé à une réunion spéciale de parlementaires pour les aider à mieux comprendre le risque et les possibilités que présentent les activités minières et les initiatives stratégiques qui pourraient être efficaces pour l'Argentine, un État fédéral comme le Canada.
S'il advenait que notre bureau se rende compte qu'une entreprise n'est pas de bonne foi ou qu'elle se comporte de manière jugée irresponsable ou inacceptable, en ma qualité de conseiller, je serais prêt à recommander le rejet ou le retrait de la diplomatie économique canadienne. Il en est autrement pour les entreprises qui, par ignorance, par négligence ou en raison d'un malentendu, suscitent des difficultés pour elles-mêmes et d'autres, mais sont disposées et prêtes à corriger la situation et à rétablir des relations positives.
De tous les pays de l'OCDE qui ont dans leur sein des entreprises minières d'intérêts étrangers, le Canada a adopté, à mon avis, la démarche la plus progressive et la plus audacieuse pour favoriser et tenter d'assurer au mieux le comportement responsable et respectueux des droits de la personne de la part de ses propres entreprises.
Il y en a, ici et à l'étranger, qui se demandent si le Canada en fait assez, s'il ne devrait pas faire plus, compte tenu de l'ampleur et de la portée de ses activités pétrolières, gazières et minières à l'étranger. C'est sur la forme que devrait prendre ce « plus » que sont centrées des discussions tant privées que publiques au sein du gouvernement et de la société civile.
Je termine donc sur cette réflexion.
Je vous remercie.
Merci beaucoup monsieur Davidson.
Nous allons passer directement à la première série de questions en commençant avec M. Sweet.
Je remercie les témoins pour les services qu'ils rendent au Canada.
Les chiffres sont ahurissants en ce qui concerne les problèmes touchant le secteur de l'extraction en Amérique latine. J'ai quelques chiffres ici, mais il y en a un que je trouvais tout à fait stupéfiant: c'était celui qui porte sur les plaintes reçues par le bureau de l'ombudsman au Pérou, soit 177 conflits sociaux en un mois — juillet 2017; et 73 % de ces conflits étaient liés au secteur de l'extraction, ce qui soulève des préoccupations.
Bien sûr, ce secteur comprend de nombreux joueurs, pas tous canadiens, quoique le Canada représente de 50 à 70 % d'entre eux de sorte qu'il est un joueur important.
Monsieur McMullen, vous avez dit que vous vous attendiez à ce que les diplomates vous le fassent savoir lorsqu'ils voient quelque chose d'anormal. Tiennent-ils un registre de leurs interventions lorsqu'ils perçoivent quelque chose qui ne va pas? A-t-on une preuve écrite de ce qui s'est passé, du nombre d'interventions qu'ils ont dû faire et qui décrit le modus operandi des entreprises canadiennes?
Nous ne tenons pas de dossiers à proprement dit, mais nous recevons des notifications de nos diplomates à l'étranger. En fonction de l'événement qu'il rapporte, nous pouvons déployer un de nos experts, comme M. Davidson, pour faire un suivi.
La plupart des enjeux comprennent des situations complexes qui reflètent la nécessité d'établir du capital social dans ces endroits et le besoin de mettre sur pied un mécanisme de règlement des griefs afin que les gens puissent se faire entendre et que leurs craintes soient dissipées.
Très bien, monsieur McMullen. Merci. Je n'ai pas beaucoup de temps.
Vous avez mentionné que « les noms des entreprises sanctionnées sont publiés et celles-ci perdent tout accès au soutien offert par les diplomates canadiens », c'est-à-dire à la défense des intérêts commerciaux et au soutien économique. Pouvez-vous me dire combien d'entreprises canadiennes ont été sanctionnées à ce jour?
À ce jour, nous avons sanctionné publiquement une entreprise, mais nous en avons menacé plusieurs de sanctions pour les encourager à agir de bonne foi pour régler les problèmes.
Merci.
Monsieur Davidson, Hudbay Minerals, Tahoe Resources et Chevron attendent que leurs causes soient entendues par des tribunaux canadiens. Avant votre entrée en poste, est-ce que votre bureau a eu des contacts avec ces entreprises — ou en avez-vous eus vous-mêmes depuis votre arrivée — avant qu'elles ne fassent l'objet d'une poursuite?
Je crois savoir que vous êtes intervenu ou que vous avez, à tout le moins, rédigé des rapports sur six dossiers, dont cinq ont été réglés. Est-ce exact ou votre bureau est-il saisi d'autres affaires?
Il y a eu six affaires, qui ont été examinées par l'ancien conseiller et réglées avant son départ. Nous n'avons reçu aucune demande d'examen officiel.
Merci.
Le gouvernement actuel s'est engagé à « créer un poste d'ombudsman indépendant qui conseillera les entreprises canadiennes, prendra en considération les plaintes faites contre elles, et fera enquête lorsque ce sera jugé nécessaire ». Il a fait cette promesse en 2015.
S'il existait un ombudsman, est-ce que ses capacités seraient différentes des vôtres?
Probablement. Il y aurait davantage de ressources spéciales, une meilleure architecture pour l'exécution du mandat actuel et une architecture plus robuste qui fournirait à l'ombudsman ou au conseiller des ressources.
D'accord. Pourriez-vous me dire ce que vous proposez? Quel type de ressources vous faudrait-il pour être plus efficace?
Je vais dire ce que je pense et exprimer ma propre opinion: j'estime qu'il faudrait une approche hybride, permettant un pouvoir de prévention, en plus d'un pouvoir de réglementation et d'un pouvoir judiciaire.
Le système judiciaire est maintenant ouvert à entendre des procès. Nous essayons diverses approches pour voir comment nous pouvons améliorer l'efficacité de mise en oeuvre d'une approche préventive par le biais du bureau du conseiller. La question est de savoir s'il faudrait encore plus et si, avec de plus grandes ressources comme mécanisme de prévention, nous pourrions faire même plus que ce que nous avons accompli.
Permettez-moi d'avancer une hypothèse. Vous avez mentionné un ou deux cas où vous êtes actuellement sur le terrain pour faire oeuvre de sensibilisation, mais où vous étudieriez, dans certains cas, les plans d'une société canadienne qui s'installe dans un territoire, pour être à même de les voir, avant le lancement du projet, afin de veiller à empêcher toute éventualité négative.
Est-ce le genre de chose que vous envisageriez?
Ce serait un élargissement du mandat qui pourrait avoir des retombées positives si les sociétés étaient disposées à être plus ouvertes. En fait, nous avons déjà avancé et défendu l'idée qu'il faudrait plus de divulgation environnementale dès le départ, que cela se fasse par l'entremise de la Bourse de Toronto ou d'autres mécanismes, afin de cerner très tôt les risques et les occasions à saisir et d'ouvrir la porte à notre appel à une plus large communauté d'intervenants, dont les petites sociétés.
Merci, monsieur le président.
Et merci à tous ceux qui ont accepté de témoigner aujourd'hui.
Laissez-moi commencer par vous, monsieur McMullen. Vous avez mentionné brièvement, au cours de votre déclaration d'aujourd'hui, l'engagement du Canada à faire respecter les droits des femmes dans des secteurs comme celui-ci. Comment le Canada peut-il promouvoir les droits des femmes et l'égalité des genres par l'intermédiaire de ses échanges commerciaux et de ses investissements dans les industries extractives dans les Amériques?
Si vous prenez connaissance de notre politique féministe en matière d'aide internationale qui a été publiée cette année et, plus particulièrement, de la partie intitulée « une croissance qui profite à tous », vous constaterez qu'on y mentionne l'importance de féminiser notre approche afin de favoriser les occasions économiques pour les femmes, en règle générale, et ce, dans tous les secteurs.
Dans le secteur de l'extraction des ressources naturelles, c'est particulièrement intéressant, car il est évident que, lors du processus de consultation sur les répercussions des exploitations d'une société donnée sur une collectivité, il est tout à fait possible d'envisager une bien plus forte participation des femmes dans les chaînes d'approvisionnement appuyant les activités du secteur de l'extraction. Ensuite, bien sûr, à tous les niveaux de la chaîne de valeur, de la chaîne d'approvisionnement, il est possible de rehausser la participation des femmes. Prenez, par exemple, une petite collectivité dans laquelle une société est active et a besoin de certaines choses dans sa chaîne d'approvisionnement; il pourrait s'agir de confectionner des uniformes ou de fabriquer des choses à petite échelle. C'est manifestement un aspect de la chaîne d'approvisionnement dans lequel les femmes peuvent travailler. Ensuite, nous encourageons évidemment les sociétés à être des employeurs souscrivant au principe de l'égalité d'accès à l'emploi dans le cadre de leur exploitation proprement dite.
Je pense que cela dépend de l'industrie. Le secteur pétrolier et gazier et le secteur minier présentent bien sûr de grandes différences. Je pense que dans le secteur minier, les emplois ont traditionnellement été occupés par des hommes, même ici au Canada. Dans le secteur pétrolier et gazier, il y a beaucoup de débouchés, surtout concernant divers aspects des opérations d'une entreprise. On observe un nombre assez important de femmes qui participent activement aux opérations du secteur pétrolier et gazier.
En plus des opérations, les sociétés travaillent dans les chaînes de valeur. Si les dirigeants locaux veulent plus d'activités et plus de diversification dans le secteur économique qui touche une collectivité, nous encourageons les femmes à s'investir davantage dans divers aspects de ces chaînes de valeur. Cependant, ce ne sont pas seulement les femmes qui font face à des obstacles. Ces entreprises rencontrent aussi des difficultés lorsque vient le temps de faire participer les collectivités rurales dans la chaîne de valeur.
Merci.
Monsieur Davidson, vous avez dit travailler avec beaucoup d'entreprises qui ont des exploitations sur place. Pouvez-vous nous expliquer dans quelles circonstances les entreprises demandent votre soutien? Et quel genre de soutien leur offrez-vous?
J'ai divers types d'interactions avec les entreprises. Parfois, elles vont m'informer de difficultés qui pointent à l'horizon, tandis qu'à d'autres occasions, elles veulent simplement me fournir plus d'informations si je le souhaite et obtenir mon avis sur l'approche qu'elles devraient adopter.
Par ailleurs... je commence à me dire que ces choses-là ne sont plus de mon âge.
Des députés: Oh, oh!
M. Jeffrey Davidson: Si vous permettez que je me déplace sur le côté, les ambassadeurs eux-mêmes nous appellent sur le terrain, une fois de plus pour obtenir notre avis sur diverses situations dans lesquelles ils se trouvent et sur les façons de faire affaire avec les entreprises et les gouvernements dans ces contextes.
Lorsque nous nous rendons sur place pour faire l'état des lieux, nous exprimons nos préoccupations auprès de l'entreprise. Nous demandons à connaître les raisons qui sous-tendent l'approche de l'entreprise et nous lui proposons des solutions de rechange. Lorsque nous sommes de retour au Canada, nous allons souvent contacter les dirigeants au siège social de l'entreprise pour leur fournir nos réflexions et nos suggestions quant aux prochaines mesures qu'ils pourraient souhaiter appliquer. Nous faisons ensuite un suivi et faisons part aux responsables des divers sites que nous avons visités des lacunes que nous avons constatées et des améliorations qu'ils pourraient apporter à leurs pratiques d'exploitation.
Dans vos discussions avec ces entreprises, leur fournissez-vous l'analyse comparative entre les sexes?
Jusqu'à présent, nous ne fournissons pas ce type d'analyse, mais je dois dire que, en tant qu'employé de Rio Tinto, j'ai fait partie d'une équipe qui a rédigé un manuel d'orientation sur l'importance de l'égalité des sexes. Notre objectif consistait à outiller tout notre personnel d'exploitation pour qu'il comprenne bien l'incidence des activités minières sur les relations hommes-femmes à l'extérieur du site, dans les collectivités touchées par ce secteur industriel. Nous voulions expliquer à nos employés que l'équilibre dans ces relations peut changer et que les femmes peuvent être désavantagées dans de nouvelles circonstances, etc.
La Devonshire Initiative, une ONG qui réunit les entreprises, les ONG et le milieu universitaire, vise activement à quantifier et à mesurer l'incidence des entreprises minières sur les relations hommes-femmes. Comme nous l'avons vu dans bien d'autres secteurs, ces données servent de référence pour établir des objectifs et réaliser des progrès. Nous avons beaucoup avancé dans le domaine. Notre ministère et le secteur minier ont comme priorité de mieux comprendre ce genre de questions.
Je ne sais pas si les rapports ont déjà été rendus publics. Les représentants de la Devonshire Initiative seraient mieux placés pour vous répondre, ou ceux de l'industrie minière si vous leur parlez plus tard.
Merci, monsieur le président, et merci à vous, messieurs, de vos témoignages aujourd'hui.
Monsieur McMullen, tout à l'heure, vous avez dit que le Canada a un processus de sanctions et de recours unique au monde. Pouvez-vous nous aider en nous faisant des recommandations concrètes, comme l'a fait M. Davidson? Le fait que notre processus soit unique pose problème. Nous devons, entre autres, pouvoir examiner de manière plus approfondie le fait que ce soit un processus volontaire.
Pour ce qui est de notre participation à l'OCDE et de certaines des recommandations que cet organisme a formulées à l'égard du Canada, d'après vous, comment pouvons-nous donner suite à ce processus de manière à ce que l'appui diplomatique dont vous avez parlé soit toujours présent, mais avec les ressources et les pouvoirs nécessaires? Pouvez-vous nous dire quelques mots à ce sujet, et ensuite M. Davidson voudra peut-être ajouter quelque chose.
Le Canada est le seul pays à refuser son appui diplomatique à une entreprise sanctionnée, et nous le disons publiquement lorsqu'une entreprise canadienne n'agit pas de bonne foi. Cela fait l'objet de bien des conversations à l'OCDE. Plusieurs pays nous ont demandé comment nous faisons. Ils étudient notre processus activement.
J'ai des sentiments ambivalents lorsque je pense que nous ne serons peut-être pas uniques beaucoup plus longtemps, mais pour le moment, dans ce domaine, nous avons de l'avance par rapport aux autres pays de l'OCDE.
Pour ce qui est des recommandations que l'OCDE a adressées au Canada, elles sont du domaine public, mais l'Organisation croit que le gouvernement, par exemple, devrait créer un comité consultatif multilatéral qui regrouperait des représentants de l'industrie, des universités et de la société civile pour remettre en question notre politique et nous fournir des conseils. Le Canada ne l'a pas encore fait; c'est une recommandation de l'OCDE à laquelle nous n'avons pas encore donné suite.
Elle recommande également que, comment dire, nous donnions plus de détails concernant les cas individuels lorsque nous publierons nos rapports finaux.
Pour gagner du temps, nous nous sommes préparés avant de venir à cette réunion. Nous n'avons pas besoin que vous nous répétiez vos recommandations, mais que vous nous disiez plutôt lesquelles de ces recommandations nous permettront, selon vous, d'aller de l'avant et de renforcer notre système volontaire d'une manière à ce qu'il soit exécutoire. À l'heure actuelle, nous explorons également le cadre législatif.
Vous pourrez peut-être nous expliquer davantage les recommandations que vous venez de mentionner, ou alors céder la parole à M. Davidson, car nous connaissons les recommandations. Merci.
Très bien. Mon rôle ici, monsieur le président, est de défendre et d'expliquer notre politique actuelle, et non pas de faire des observations sur l'orientation que prendra peut-être la politique. Mais, bien sûr, l'adoption d'une loi est une option. Je vais, cependant, céder la parole à mon collègue Jeffrey Davidson, qui voudra peut-être ajouter quelque chose à cet égard.
Eh bien, je ne me suis pas sérieusement arrêté à certaines recommandations en particulier. Cependant, dans ma troisième année, qui a débuté, l'un des objectifs et des éléments clés de notre plan de travail est de mettre à profit certaines des leçons apprises, et de signaler quelques-unes des lacunes et des omissions que le gouvernement pourrait choisir de corriger ou de renforcer. J'espère que cette réunion ne sera pas la fin et que j'aurai l'occasion de parler à d'autres personnes afin de pouvoir inclure non seulement mes propres idées, mais également celles d'autres intervenants dans les rapports finaux que je prépare pour le ministre et, je l'espère, pour le Parlement.
Merci.
Je ne m'attendais certainement pas, lorsque vous venez témoigner, à ce que vous formuliez des recommandations succinctes et que notre travail s'arrête là. Mais c'est une discussion sans précédent — je pense que vous en êtes tous conscients — il faut donc qu'elle soit éclairée. Bien que nous respections le temps que vous avez pris à préparer votre déclaration et le travail que vous avez fait ici, nous croyons fermement que les Canadiens et les parlementaires autour de cette table méritent d'entendre votre point de vue avisé sur cette question et pas seulement le rôle que vous jouez pour défendre ce qui existe déjà.
Ce genre de choses m'irrite. Je ne suis pas vraiment à l'aise lorsque des gens nous tiennent de tels propos. Et ce n'est pas que je veux attiser la confrontation. Je pense tout simplement que nos délibérations doivent servir de tremplin à d'authentiques discussions. Et bien sûr, c'est à nous que reviendra le travail difficile de présenter des recommandations ou de dire, vous savez quoi, le statu quo est insatisfaisant. Voilà ce que je voulais éclaircir.
Merci.
Merci beaucoup.
Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui. J'ai bien aimé la remarque sur l'OCDE. Je n'étais pas au courant de ces conversations, alors je vous remercie d'avoir fait la lumière là-dessus.
Monsieur Davidson, vous avez indiqué dès le départ que vous avez de l'expérience dans le milieu universitaire, que vous avez aussi travaillé dans le secteur privé et que, manifestement, vous occupez votre poste actuel. Il s'agit donc d'une expérience très vaste. En termes généraux, pouvez-vous nous dire où en est, selon vous, le secteur canadien de l'extraction ou encore quel est notre classement à l'échelle internationale pour ce qui est de notre engagement à l'égard d'activités et de principes de RSE? Il semble que vous interagissiez avec un certain nombre de sociétés sur le terrain. Si j'ai bien compris, vous avez déclaré qu'outre une société qui a un dossier particulièrement mauvais, en général, on constate une adhésion du secteur privé canadien de l'extraction à l'égard de la RSE. Qu'en pensez-vous?
C'est en fait beaucoup plus compliqué que ce que vous venez d'expliquer. Je crois qu'étant donné l'étendue et l'ampleur de l'activité canadienne, sans compter les contraintes et limites des mécanismes en place, nous nous devons de fonctionner en présumant que les sociétés agissent de bonne foi. Bien souvent, nous dépendons des autres pour que des situations difficiles soient portées à notre attention si nous ne les découvrons pas nous-mêmes.
Pour ce qui est des grandes sociétés, la plupart d'entre elles sont des chefs de file et des pionnières dans le domaine. Elles commettent des erreurs, et il arrive qu'elles se créent parfois des problèmes. C'est en partie dû au fait que leur compréhension est limitée ou que leur système de gestion est inadéquat. Elles ont recours à une microgestion à partir du centre pour s'attaquer à des problèmes sur le terrain qu'elles ne comprennent pas vraiment, et ces mêmes sociétés et leurs équipes doivent faire les frais de leurs propres erreurs.
Par contre, ce sont les petites sociétés minières et d'exploration qui nous donnent le plus de fil à retordre, car leur réalité est différente, pour ainsi dire. Leur échéancier est différent. Bon nombre de ces entreprises ne cherchent pas la longévité. Elles affirment être pauvres, donc il est plus difficile de les aider à comprendre l'importance et la valeur de ce type d'effort. Ceci étant dit, il y a toutefois de petites sociétés qui fonctionnent de façon très progressiste et qui ont une vision d'avenir, même s'il y en a qui ne cherchent que des gains rapides.
Voilà le défi à relever.
C'est très utile, car cela permet de cibler les sources de préoccupations précises dans le secteur privé.
Dans le document, il est indiqué que les dépenses des sociétés canadiennes du secteur de l'extraction en Amérique latine, à savoir les salaires des employés locaux, les achats d'entreprises locales ainsi que les taxes et redevances, dépassent largement le budget total d'aide au développement international du Canada.
Pouvez-vous nous en dire davantage, monsieur McMullen? Il s'agit ici d'une véritable contribution au développement.
Effectivement, et il ne s'agit que d'un calcul purement mathématique issu des états financiers annuels des entreprises, par exemple. Cela montre à quel point elles permettent de multiplier les objectifs stratégiques canadiens dans la région, que ce soit en bien ou en mal. Il est donc bien avisé — et d'ailleurs cela fait partie de notre politique — de collaborer avec les sociétés minières canadiennes et de les utiliser comme levier et comme un outil très utile afin de travailler au développement continu d'institutions efficaces en Amérique latine qui puissent apporter une sécurité, une protection des droits de la personne ainsi que des avantages économiques.
Comme nous l'avons dit plus tôt, on compte 930 projets canadiens en Amérique latine seulement, et c'est un nombre considérable. Il est très difficile de se rendre sur les lieux de chacun de ces projets de façon fréquente et constante. Voilà donc l'une des difficultés de notre politique. Nous devons aider les entreprises à comprendre comment elles peuvent bien se comporter, même si nous ne sommes pas nécessairement en train de les surveiller directement.
Je prends note de l'argument que vous avez présenté plus tôt au sujet des ressources et du besoin potentiel d'accroître ces ressources pour faire fond sur les efforts importants qui sont déjà déployés.
Je vais maintenant passer à ma dernière question sur le sujet. Nous sommes le seul pays au monde qui dispose de ce type de bureau. Dans une réponse à une question posée par Mme Hardcastle, je crois que vous avez déclaré avoir été approché par d'autres pays qui sollicitaient des conseils sur la façon de créer ce type de services. Est-ce exact?
Monsieur McMullen, je vous invite à répondre en 30 secondes ou moins. Ce serait bien, car nous devons trouver le temps de poser une question de plus.
... au sujet de notre régime de sanctions, de notre dénonciation publique d'une entreprise qui n'agit pas de bonne foi et des raisons connexes, de ce qu'elle doit faire pour régler le problème et du fait qu'elle ne bénéficiera pas de soutien diplomatique canadien tant que le problème ne sera pas réglé. Ce régime pique la curiosité de bon nombre de pays.
Merci, monsieur le président. Je remercie nos témoins d'être venus aujourd'hui.
Je tiens à citer l'extrait d'une lettre rédigée en septembre 2015 par le Parti libéral qui a été envoyée au CNCA. Il y est indiqué qu'un gouvernement libéral établirait un bureau indépendant d'ombudsman qui donnerait des conseils aux sociétés canadiennes, étudierait les plaintes formulées à leur endroit et enquêterait sur ces plaintes lorsqu'il estime qu'il y a lieu de le faire. Le gouvernement a-t-il fait mine de vouloir respecter cette promesse?
Nous avons fourni à notre ministre une gamme de conseils sur les options pour mettre en oeuvre cette recommandation. Je sais que la ministre continue de consulter activement les intervenants en vue d'une décision.
Donc, vous êtes en train de me dire que vous n'avez eu aucune nouvelle, outre le fait que l'on s'intéresse aux options que vous présentez. Très bien, merci.
Les organisations de la société civile communiquent avec nous continuellement. Elles disposent de statistiques sur les attaques, les blessures et les décès liés à certains de ces projets. Or, à la lecture du bilan que vous présentez à la lumière des propos de M. Davidson, on en vient à constater que vous êtes assez à l'aise avec le rôle joué par les sociétés canadiennes en Amérique du Sud. Si j'ai bien compris, vous avez dit qu'une seule entreprise a fait l'objet de sanctions. Pouvez-vous me donner davantage de précisions là-dessus?
Il y a une liste d'incidents menant à des décès et à des blessures rattachés à certains projets, et les organisations blâment les sociétés, alors que vous semblez affirmer que ce n'est pas tout à fait juste. Pourriez-vous éclairer ma lanterne, s'il vous plaît?
Bien sûr. Peut-être qu'en vous fournissant des chiffres, vous comprendrez cet enjeu de notre perspective à nous, qui essayons d'avoir une incidence marquée sur le terrain.
J'ai parlé du fait qu'il y a 930 projets miniers canadiens en Amérique latine. D'après un rapport bien publicisé du Osgoode Hall Law School qui date de l'année dernière, neuf projets ont fait l'objet d'incidents depuis 2014. Cela signifie que nous sommes au courant de neuf incidents sur 930 projets. De ces neuf incidents, un projet a été vendu aux Chinois en 2010, trois projets comportaient une situation où des mineurs ou des sous-traitants ont été victimes d'extorsion par des gangs armés, deux projets impliquaient des arrestations et de la violence rattachées au démantèlement de barrages routiers par des policiers, un projet portait sur des arrestations à la suite du décès d'un agent de police et d'un conflit entre des travailleurs syndiqués et des travailleurs non syndiqués, etc. En aucune circonstance, une allégation précise n'a été avancée contre une société canadienne. Il n'est indiqué nulle part non plus dans ce rapport qu'une société canadienne aurait été la cause des incidents en question. Au lieu de cela, le rapport fait référence à des dossiers très complexes et difficiles rattachés à ces neuf projets.
Notre rôle consiste à essayer de déterminer comment les divers facteurs interagissent pour contribuer à l'incident. Il ne s'agit pas nécessairement de scénarios mettant en cause un méchant et une victime. On a affaire à une dynamique dysfonctionnelle et l'on se demande comment s'y attaquer pour régler le problème. Il arrive fréquemment que les entreprises ne le reconnaissent pas, mais ce sont elles qui sont le mieux outillées pour s'attaquer au problème et qui disposent du plus grand nombre de ressources.
Dans ce contexte, je vais poser une question à M. Davidson.
Cet été, vous avez rendu public un rapport sur votre visite au Honduras en 2016. La réponse des organisations représentant la société civile a été plutôt directe et claire. Voulez-vous vous exprimer au sujet de la réaction à votre rapport?
Essentiellement, on disait que vous aviez tort, que vous faisiez preuve d'un manque de compréhension fondamental dans de nombreux domaines, que le fait de nommer certaines organisations posait un problème réel et que vous minimisiez les dangers auxquels s'exposaient les militants des droits de la personne au Honduras. Pourriez-vous répondre aux critiques soulevées à l'égard de votre rapport?
Ces organisations ont fait référence à un certain nombre d'observations sur 36, ou plus d'une trentaine, que j'ai formulées au sujet de ce que j'ai constaté dans le pays. Elles ont aussi fait allusion à deux ou trois paragraphes à la fin du rapport. Lorsque j'ai rédigé ce rapport, j'estimais que je devais m'adresser principalement aux acteurs canadiens, et que si, à la fin, je proposais des suggestions ou des idées aux sociétés canadiennes et à nos ambassadeurs ou au personnel diplomatique sur le terrain, je devrais aussi essayer d'aborder la question du rôle du développement canadien et des ONG du domaine de la défense des droits de la personne.
Dans le contexte hondurien, contexte fort complexe et difficile à comprendre, je le concède moi-même, d'après ce que j'ai vu, j'ai estimé qu'on aurait pu opter pour des approches plus constructives que certaines qu'on avait privilégiées. Nous avons essayé de rencontrer tant les ONG locales que leurs homologues canadiens sur le terrain. Dans certains cas, notre demande de rencontre pour mieux comprendre leur point de vue a été rejetée à l'avance. Ces ONG nous ont rendu la tâche très difficile.
Honnêtement, j'ai eu du mal à rédiger ces quelques paragraphes. J'ai passé des jours à essayer de déterminer comment je pourrais présenter le tout de façon à ne pas être totalement négatif ou destructif, car je cherchais à avoir un certain effet constructif, mais tout en demeurant honnête. Voilà ma réponse aux critiques.
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