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FOPO Rapport du Comité

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Rapport supplémentaire des membres du Parti conservateur du Canada du Comité

Les stocks de saumon du Pacifique sont en crise

L’étude du Comité permanent des pêches et des océans (FOPO) sur l’état du saumon du Pacifique s’est déroulée sur une période de 15 mois, au cours desquels la plupart des stocks de saumon du Pacifique ont continué de décliner à un rythme alarmant. Si la crise à laquelle le saumon du Pacifique est confronté n’est pas nouvelle, l’état de ce poisson clé n’a jamais été aussi désastreux. 

Lorsqu’il a comparu devant le Comité, M. Jason Hwang de la Fondation du saumon du Pacifique a indiqué aux membres que des mesures immédiates étaient nécessaires pour éviter un effondrement des stocks, ajoutant que : « [s]i l’on ne prend pas des mesures adéquates maintenant, bon nombre de nos populations de saumon du Pacifique risqueront de subir le même sort que ce qui est arrivé à la morue de la côte Est, et nous savons ce qui est arrivé »[1]. Le besoin criant et urgent d’agir a été renforcé par M. Robert Chamberlin de la First Nation Wild Salmon Alliance, qui a indiqué que « c’est clairement le début d’une spirale descendante vers l’extinction [du saumon du Pacifique] au cours des prochaines années »[2].

M. Arthur Adolph du St’át’imc Chiefs Council a décrit ce à quoi les collectivités autochtones peuvent s’attendre si rien ne change. Il a indiqué que si les stocks de saumon du Pacifique du fleuve Fraser s’effondrent : « [n]otre culture st'át'imc, nos traditions, notre mode de vie et notre bien-être vont tous s’effondrer, nous forçant à vivre dans les conditions du quart-monde sur nos propres terres »[3].

Des représentants des pêches commerciales et publiques et d’autres secteurs ont également fourni des témoignages décrivant en détail l’avenir incertain auquel ils sont confrontés en raison de la diminution constante des stocks.

Les témoignages reçus tout au long de cette étude ont confirmé les nombreux facteurs qui continuent de menacer le saumon de la côte Ouest ainsi que les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire des collectivités autochtones, des travailleurs, des familles et des collectivités qui dépendent de la pêche au saumon. Bien que certaines menaces nouvelles ou récemment confirmées aient été révélées, la plupart des menaces auxquelles fait face le saumon du Pacifique ne sont pas nouvelles : elles sont connues depuis de nombreuses années. 

Des témoins ont également fourni au Comité des solutions viables et éprouvées aux nombreuses menaces qui contribuent au déclin du saumon du Pacifique. Tout comme les menaces qui pèsent sur le saumon aujourd’hui, les solutions proposées au Comité ne constituaient pas de nouveaux concepts ou pratiques. En fait, la plupart des solutions préconisées sont connues depuis des années.

Au fur et à mesure que les preuves s’accumulaient, il est devenu de plus en plus évident que le déclin continu du saumon du Pacifique ne résulte pas en fait de l’absence de réponses et de solutions aux questions et aux problèmes auxquels fait face le saumon du Pacifique. Il est plutôt le résultat direct de la mauvaise gestion du ministère des Pêches et des Océans (MPO), dirigé par la ministre des Pêches, Bernadette Jordan.

Sans une planification, une gestion et des mesures adéquates, les ressources financières ne suffisent pas à rétablir les stocks

Au cours des cinq dernières années et demie, le gouvernement Trudeau et ses quatre différents ministres des Pêches ont affirmé que les changements législatifs, les ressources et l’orientation qu’ils fournissaient au Ministère étaient suffisants pour rétablir et protéger le saumon du Pacifique. Cependant, l’état actuel et le déclin continu des stocks montrent clairement que les affirmations et les mesures du gouvernement ont desservi le saumon du Pacifique et les réseaux trophiques, les travailleurs et les collectivités qui en dépendent.

Le 10 avril 2016, lorsqu’il a comparu devant le FOPO, l’ancien ministre des Pêches Tootoo a indiqué que les investissements de 197,1 millions de dollars prévus dans le budget de 2016 pour les sciences au MPO « permettront de prendre des décisions plus éclairées au sujet de nos océans, de nos voies navigables et de nos pêches »[4]. Malgré cette garantie, l’état du saumon du Pacifique montre que les investissements de 2016 dans les sciences du MPO n’ont pas abouti à des décisions, plans ou mesures de gestion éclairés ayant permis de rétablir les stocks de saumon du Pacifique.

Des mesures immédiates possibles existent, mais ont été rejetées

Au cours de l’étude, le Comité a été informé de solutions viables et fondées sur des données scientifiques qui pourraient aider le saumon du Pacifique directement et immédiatement si elles étaient mises en œuvre. De nombreuses solutions sont connues ou ont été proposées, mais le MPO les a rejetées sans donner de raison.

Par exemple, Carl Walters de l’Institut pour les océans et la pêche de l’Université de la Colombie-Britannique avait expliqué comment la prédation des saumoneaux du Pacifique par les pinnipèdes avait contribué au déclin des stocks.

« Une étude importante réalisée en 2010 par des scientifiques du MPO indique que les populations de phoques, dans le détroit de Georgie, avaient décuplé entre 1972 et 2000, un ordre de grandeur qui correspondait assez bien au déclin de la pêche commerciale dans le détroit de Georgie, a indiqué Walters. Nos données indiquent que le nombre de saumons juvéniles consommés chaque année par les phoques dans le détroit de Georgie suffit à lui seul à expliquer ce déclin. Il y a presque autant de jeunes saumons chinook et coho qui arrivent chaque année dans le détroit de Georgie qu’il y en avait dans les années 1970, mais ils ne survivent pas plus d’une année dans l’océan. »[5]

M. Ken Pearce de la Pacific Balance Pinniped Society a dit au Comité que son organisation avait soumis un plan de gestion intégrée des pêches au MPO en 2018, pour la gestion des pinnipèdes, mais que la proposition n’avait pas été acceptée[6]. À ce jour, aucun plan visant la survie du saumon du Pacifique par la gestion des pinnipèdes n’a été annoncé par le MPO.

M. Owen Bird du Sport Fishing Institute of British Columbia a également indiqué avoir soumis au MPO une proposition sur la pêche sélective des saumons marqués afin de cibler le saumon provenant d’écloseries de manière à réduire la mortalité du saumon sauvage[7].

Au moment de ce témoignage, M. Bird et plus de 9 000 travailleurs employés par l’industrie de la pêche publique en Colombie-Britannique espéraient que le MPO accepte la proposition. Mais le Ministère a émis son avis six semaines après la date à laquelle il était attendu, et à ce moment, l’avis ne contenait pas la proposition. Ni le MPO ni la ministre Jordan n’ont fourni d’explication scientifique concernant le rejet de la proposition de pêche sélective des poissons marqués.

Jesse Zeman de la BC Wildlife Federation a mis en lumière l’urgence de se tourner vers l’utilisation d’engins de pêche sélectifs afin de protéger le saumon du Pacifique lorsqu’il a déclaré : « Il faut adopter des méthodes de pêche sélective. Le saumon arc-en-ciel n’est pas la seule victime des filets dans le Fraser. Le saumon l’est aussi, tout comme nous constaterons, l’année prochaine, que l’esturgeon est lui aussi en déclin, principalement à cause des filets »[8].

Par ailleurs, M. Zeman a ajouté : « […] pendant la première année qui a suivi la création du Fonds de restauration et d’innovation pour le saumon de la Colombie-Britannique, plusieurs Premières Nations ont déposé des demandes pour faire la transition vers des méthodes plus sélectives, et leurs demandes ont été rejetées »[9].

Le capitaine Josh Temple[10], de la Coastal Restoration Society, et Aaron Hill[11], de la Watershed Watch Salmon Society, ont tous deux attiré l’attention du Comité sur la nécessité de prendre des mesures de protection contre les espèces envahissantes et d’éradiquer ces dernières afin de protéger l’habitat du saumon du Pacifique.

Les menaces que les espèces envahissantes font peser sur le saumon du Pacifique n’ont rien de nouveau : elles sont connues depuis de nombreuses années. Dans la lettre de mandat remise à la ministre Jordan en 2019, le premier ministre demandait à cette dernière de réaliser de nouveaux investissements pour lutter contre les espèces envahissantes. Or, aucun nouvel investissement en ce sens n’a été fait pour protéger les eaux de la Colombie-Britannique, y compris l’habitat du saumon du Pacifique.

Encore une fois, les plans ou les mandats qui ne prévoient pas de ressources adéquates, les méthodes de gestion et les mesures prises ne permettent pas d’obtenir les résultats escomptés, car les espèces envahissantes continuent à proliférer en Colombie-Britannique et endommagent les habitats du saumon du Pacifique.

L’absence de mesures fondamentales pour exécuter les responsabilités de base contribue au déclin des stocks

La pêche illicite, non déclarée et non réglementée a des effets néfastes considérables sur le saumon du Pacifique.

En 2018, Dominic LeBlanc, alors ministre des Pêches, a dit avoir vu des images satellites montrant un filet d’une longueur de huit kilomètres ayant capturé illégalement plus de 400 000 kilogrammes de saumon en haute mer dans l’océan Pacifique.

À l’époque, le ministre LeBlanc avait déclaré que cette image, et d’autres, devraient être publiées afin d’identifier et de blâmer certains des pires responsables de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée[12]. Trois ans plus tard, l’image en question n’a toujours pas été rendue publique et le gouvernement Trudeau n’a toujours pas identifié ni blâmé certains des pires responsables de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée.

Jesse Zeman a donné au Comité un portrait de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée dans le fleuve Fraser : « S’agissant de la contrebande, nous avons des images qui montrent des saumons chinook, arc-en-ciel et coho, lequel est une espèce en péril, qui sont pris dans des filets illégaux utilisés pratiquement quotidiennement. On les signale au ministère, mais personne ne nous rappelle jamais »[13].

M. Zeman a ensuite ajouté : « Il y a rarement des poursuites. Les agents des pêches sont devenus des spécialistes de la destruction de filets maillants sur le Fraser, au lieu de protéger les saumons contre les contrebandiers. Il faut améliorer la surveillance de la pêche dans tous les secteurs. Les modèles de reconstitution des espèces ne tiennent pas compte de la pêche illégale, et nous savons que les saumons chinook du Fraser qui périssent à cause des activités de pêche ne sont même pas comptabilisés dans les ressources halieutiques du fleuve. Autrement dit, il y a des milliers de poissons, voire des dizaines de milliers, qui sont tués chaque année dans le Fraser et qui, selon le ministère, n’ont même jamais existé »[14].

À elle seule, la pêche illicite, non déclarée et non réglementée peut contrer les efforts déployés par le Ministère, les collectivités autochtones et les organisations de conservation afin de restaurer et de conserver le saumon du Pacifique. Malgré que la pêche illicite, non déclarée et non réglementée constitue une grave menace pour le rétablissement et la conservation du saumon du Pacifique, les différents ministres des Pêches du gouvernement Trudeau jusqu’à la ministre Jordan n’ont pris aucune mesure à cet égard.

Bien que les fonctions fondamentales de gestion des pêches du MPO, comme la surveillance, l’application de la loi et le soutien à la restauration de l’habitat, devraient être bien établies, les intervenants ont affirmé au Comité que ce n’est pas le cas. Lors de son témoignage, Aaron Hill a affirmé sans détour qu’un « […] grand nombre de programmes de surveillance du saumon ont été réduits à leur plus simple expression »[15]. Jesse Zeman a dit au Comité : « Il faut financer la restauration de l’habitat. Il n’y a que six biologistes spécialisés dans la restauration dans toute la province de la Colombie-Britannique. Ils n’ont pas de budget de base »[16].

« Nous avons besoin de disposer de meilleures informations, de meilleures données scientifiques, de meilleurs systèmes de surveillance et de meilleures évaluations pour pêcher les espèces qui sont saines et protéger celles qui sont faibles, a affirmé Jason Hwang durant son témoignage. […] Pour ce qui est de la surveillance, de l’évaluation et des données, je dirai, pour résumer, que nous ne pouvons pas gérer ce que nous ne mesurons pas. Or, nous ne faisons pas suffisamment de contrôle et nous ne mesurons pas assez »[17]. Les lacunes dans les capacités du MPO sont connues, et elles n’ont toujours pas été corrigées.

Le financement à lui seul ne suffira pas à restaurer le saumon du Pacifique

Le 8 juin 2021, la ministre Jordan a annoncé l’Initiative de la Stratégie pour le saumon du Pacifique, assortie d’un financement de 647,1 millions de dollars. Lorsqu’on lui a demandé quelle portion de ces fonds serait dépensée durant l’exercice en cours, la ministre n’a pu répondre[18].

À deux reprises, la ministre n’a pu répondre à une question portant sur les sommes qui seront versées en appui aux efforts déployés par les Autochtones pour soutenir le saumon du Pacifique[19].

La ministre a pu expliquer l’utilisation prévue pour seulement 100 millions de dollars des fonds consacrés à l’Initiative et a affirmé à plusieurs reprises que celle-ci était « totalement nouvelle »[20].

Bien que nous espérons sincèrement que les récentes annonces des fonds consacrés au saumon du Pacifique permettront de restaurer et de conserver les stocks, nous sommes inquiets à l’idée que la nouvelle approche du gouvernement Trudeau ne soit qu’une pâle copie des échecs précédents, c’est-à-dire l’affectation de ressources sans plans ni objectifs précis afin d’accélérer la mise en place de mesures rapides et efficaces.

Des ressources ne suffiront pas à restaurer les stocks de saumon du Pacifique. Celles-ci doivent être associées à des plans, à des méthodes de gestion et à des mesures adéquates immédiates.

Les décisions inexpliquées sans plans de transition perturbent des vies

Dans sa comparution devant le Comité aux fins de la présente étude, la ministre a confirmé qu’elle était la première responsable pour le MPO[21]. Cependant, on ignore toujours dans quelle mesure la ministre connaît les dossiers et de quels facteurs elle tient compte pour prendre une décision. La ministre continue d’affirmer que ses décisions sont fondées sur la science tout en maintenant plusieurs décisions annoncées dans la dernière année pour lesquelles elle n’a fourni aucune justification scientifique. Nous sommes d’avis que la ministre doit fonder ses décisions sur la science et fournir aux citoyens des justifications scientifiques adéquates.

Même si la ministre a affirmé être résolue à prendre des décisions fondées sur la science, de nombreux témoignages ont montré que, même si les ressources de 2016 ont été affectées et que le délai de mise en œuvre de cinq ans est écoulé, la ministre Jordan et le MPO n’ont toujours pas comblé les lacunes en matière de sciences et de connaissances auxquelles le ministre Tootoo jugeait nécessaire de remédier pour appuyer un processus décisionnel éclairé en 2016.

Il est également troublant de constater cette tendance de la ministre à faire des annonces précipitées ou tardives qui ont de profonds effets adverses sur la vie des Britanno-Colombiens. Ces effets adverses sont d’autant plus lourds qu’ils ne s’accompagnent d’aucun plan de transition pour aider les personnes, les familles et les collectivités touchées.

Au cours de la dernière année seulement, et pendant une pandémie qui a causé énormément d’incertitude et d’instabilité pour l’économie du saumon, les décisions du gouvernement Trudeau annoncées par la ministre Jordan ont mis en jeu la subsistance et l’avenir de plus de 10 000 personnes qui travaillent dans le secteur des pêches et de l’aquaculture en Colombie-Britannique sans prévoir de plan de transition pour soutenir les travailleurs ou les collectivités concernés.

Au-delà des emplois liés aux pêches et à l’aquaculture, de nombreux autres emplois dans des secteurs liés au tourisme, notamment l’hébergement, le transport, les aliments et les boissons et l’observation des baleines, ont vu leur stabilité s’effriter en raison de décisions soudaines et inexpliquées de la part du gouvernement Trudeau.

En échouant à protéger le saumon du Pacifique, le gouvernement Trudeau a failli à ses devoirs envers les collectivités autochtones, les travailleurs, les familles et les collectivités côtières qui dépendent du saumon du Pacifique. De nouvelles décisions soudaines et inexpliquées sans plans de transition pour les personnes touchées ne sont qu’une insulte de plus.

Les recommandations de la Commission Cohen n’ont pas été mises en œuvre

La Commission d’enquête Cohen sur le déclin des populations de saumon rouge du fleuve Fraser a été créée en 2009 à titre de réponse directe et rapide aux remontes de saumon rouge du Pacifique dans le fleuve Fraser les plus faibles jamais enregistrées.

En 2012, le juge Cohen a publié son rapport qui comprend 75 recommandations, dont certaines soulignaient la nécessité d’entreprendre des recherches scientifiques plus approfondies tout en établissant des calendriers pour les décisions qui doivent être prises lorsque la preuve scientifique est complète.

Quelques mois plus tard, au début de 2013, l’Initiative stratégique visant la santé du saumon a été lancée avec un mandat en quatre volets afin de procéder aux recherches scientifiques recommandées par le juge Cohen. Depuis sa création, l’Initiative a réalisé son mandat, et une dizaine de rapports ont été publiés afin d’améliorer nos connaissances des facteurs qui nuisent au saumon du Pacifique.

Les membres conservateurs s’inquiètent de la péremption de crédits appliquée à l’Initiative par le gouvernement Trudeau au moment où deux des quatre étapes du mandat de l’Initiative sont terminées. Lors de son allocution devant le Comité portant sur cette étude, la ministre Jordan s’est fait demander pourquoi le gouvernement appliquait la péremption des crédits à l’Initiative à cette étape cruciale, et elle n’a donné aucune réponse[22].

La péremption des crédits appliquée à l’Initiative par le gouvernement Trudeau et le défaut de mettre en œuvre les recommandations du juge Cohen sont d’autres exemples de solutions connues qui ne sont pas mises en place ou qui sont mises en place de manière incomplète. Aaron Hill a affirmé dans son témoignage que « nous connaissons les solutions […] d’abord, le gouvernement pourrait mettre en place les recommandations générales de l’enquête Cohen, qui a coûté environ 35 millions de dollars aux contribuables. Contrairement à ce qu’on entend, la plupart des 75 recommandations du juge Cohen n’ont pas été mises en œuvre »[23].

Manque de transparence dans la prise de décisions

La ministre Jordan a refusé à maintes reprises de répondre aux questions portant sur les décisions fondées sur des preuves scientifiques qui ont d’importantes répercussions sur les collectivités, et certains témoins ont soulevé des préoccupations qui semblent indiquer que les décisions politiques et administratives ont influencé la science plutôt que le contraire.

En particulier, Jesse Zeman a expliqué dans son témoignage la manière dont les fonctionnaires du MPO se sont ingérés dans un processus scientifique d’évaluation du saumon arc‑en‑ciel lorsqu’il a affirmé ce qui suit : « ce qu’on a appris grâce aux demandes d’accès à l’information, c’est que les conclusions des documents scientifiques examinés par les pairs ont été modifiées pour en faire un avis scientifique, visiblement pour minimiser les effets des filets sur les saumons arc‑en‑ciel »[24].

Des rapports subséquents ont détaillé la manière dont le MPO s’est ingéré dans ce processus fédéral-provincial d’évaluation d’urgence pour protéger le statu quo plutôt que pour protéger les stocks qui sont sur le point de disparaître. L’ingérence insidieuse du MPO dans ce processus était manifestement irrespectueuse à l’égard de ses partenaires du gouvernement de la Colombie‑Britannique.

L’état de la cogouvernance des Autochtones n’est pas clair

Darren Haskell, du Conseil de gestion du saumon du fleuve Fraser, a présenté un témoignage relativement à son étude et a fourni des contributions de valeur détaillant l’Entente de collaboration en matière de gestion du saumon du Fraser signée avec le gouvernement Trudeau en 2019.

Cette entente fournit aux collectivités autochtones situées le long du fleuve Fraser une structure de cogouvernance avec le MPO et le gouvernement fédéral dans laquelle les représentants autochtones ont une représentation équivalente (moitié-moitié) et un pouvoir décisionnel relativement aux décisions de gestion gouvernant l’ensemble des espèces de saumon du fleuve Fraser tout au long de leur route migratoire.

Dans son allocution du 5 mai 2021 au sujet de l’étude, M. Haskell s’est fait demander quel était l’état de mise en œuvre de l’Entente de collaboration en matière de gestion du saumon du Fraser. Il a répondu que c’était « au point mort en ce moment à cause du financement. Le financement que nous avons proposé et dont nous avons besoin pour que ce comité puisse effectuer ces importants travaux ne provient pas vraiment du MPO »[25].

Ce témoignage a, encore une fois, soulevé d’importantes inquiétudes, car il s’agit d’un autre exemple clair du défaut du gouvernement de garantir que les ressources sont adéquatement liées aux plans, à la gestion et aux mesures à prendre. Ce témoignage soulève également de sérieuses questions relativement au véritable statut de gestion et de gouvernance pour toutes les espèces de saumon du fleuve Fraser tout au long de leur route migratoire.

Un manque d’engagement véritable et de responsabilisation

Si le gouvernement Trudeau, la ministre Jordan et le MPO souhaitent améliorer l’état du saumon du Pacifique, ils doivent s’engager et collaborer avec les Britanno-Colombiens ainsi que les peuples autochtones et non autochtones qui dépendent des ressources partagées de stocks de saumon du Pacifique. Le MPO a vidé les consultations qu’il a menées pour en faire de simples exercices permettant à ses représentants de cocher une case et d’affirmer qu’ils avaient fait ce qu’ils avaient à faire.

Cette approche entrave la progression et est contraire aux principes démocratiques qui doivent guider la gestion gouvernementale de toute ressource partagée comme les stocks de saumon du Pacifique. Le saumon du Pacifique du Canada n’appartient pas au gouvernement ni au MPO; il s’agit d’une ressource partagée entre tous les Canadiens qui méritent d’avoir une occasion significative de formuler des commentaires et de présenter des propositions avant que les décisions soient prises et, par le fait même, recevoir des explications détaillées lorsque les décisions sont annoncées.

Le fait d’écarter ou de rejeter les propositions des Britanno-Colombiens est également contre‑productif parce que cela enracine le sentiment croissant selon lequel le gouvernement, la ministre et le MPO pensent qu’ils ont les meilleures connaissances et estiment qu’une approche trop descendante en matière de gouvernance est acceptable, alors que ça ne l’est pas.

Les témoignages présentés au Comité dans cette étude démontrent le degré élevé de compréhension, d’expertise et de sagesse qui existe et est disponible au-delà des limites du MPO. Il s’agit de ressources sous-utilisées à un moment où l’état du saumon du Pacifique en a le plus besoin.

M. Hwang a réitéré la valeur possible des pêcheurs qui peuvent participer de manière significative lorsqu’il a affirmé que « les participants à la pêche – des Premières Nations, publique et commerciale – peuvent apporter leur contribution à la table »[26]

Le pouvoir et la responsabilité de diriger et de gérer le travail du MPO reviennent à la ministre, mais la gravité et l’étendue des menaces pesant sur le saumon du Pacifique nécessitent véritablement un appui et un passage à l’action du plus grand nombre d’organisations et de citoyens possible. Il semble que l’approche adoptée par la ministre Jordan pour diriger le MPO ait miné la confiance du grand public envers le gouvernement, le MPO et leurs tentatives de rétablir et de préserver le saumon du Pacifique.

Conclusion

La situation de crise que vit le saumon du Pacifique est le résultat du défaut du gouvernement Trudeau de déployer les ressources, les mesures de gestion et les plans appropriés de manière opportune et efficace.

Les rejets continus de propositions et de mesures viables ont empêché l’atteinte de résultats plus que nécessaires et attendus depuis longtemps pour le saumon du Pacifique ainsi que les travailleurs et les collectivités qu’il appuie.

Les collectivités autochtones et non autochtones continuent d’être confrontées à l’incertitude quant à leur avenir et à leurs moyens de subsistance en raison des décisions non expliquées annoncées sans plans de transition pour soutenir les intervenants touchés. Trop souvent, les personnes les plus touchées par les décisions du gouvernement Trudeau sont les moins soutenues et les moins sollicitées.

Le défaut de la ministre Jordan et du MPO d’offrir une responsabilité par des processus décisionnels et de consultation authentiques et transparents continue d’aliéner les collectivités avec qui le MPO et la ministre doivent justement collaborer pour atteindre des résultats opportuns et efficaces pour le saumon du Pacifique.

Si l’Initiative de la Stratégie relative au saumon du Pacifique de 647,1 millions de dollars vise à atteindre des résultats opportuns et efficaces, comme nous le souhaitons, la ministre Jordan doit abandonner sa vision mal conçue ayant pour objectif d’établir cette nouvelle initiative à partir de zéro et travailler plutôt à faire le lien entre, d’une part, les ressources et, d’autre part, les plans et les mesures qui font déjà partie du mandat et qui sont connus et efficaces pour appuyer le rétablissement et la préservation du saumon du Pacifique.

Il est maintenant temps de prendre de véritables mesures qui entraîneront des résultats concrets.


[1] Jason Hwang, vice-président, Fondation du saumon du Pacifique, Témoignages, 23 juillet 2020.

[2] Robert Chamberlin, président, First Nation Wild Salmon Alliance, Témoignages, 9 décembre 2020.

[3] Arthur Adolph, directeur des opérations, St’át’imc Chiefs Council, Témoignages, 9 décembre 2020.

[4] L’honorable Hunter Tootoo, ministre des Pêches et des Océans et de la Garde côtière du Canada, Témoignages, 19 avril 2016.

[5] Carl Walters, professeur émérite, Institut pour les océans et les pêches, Université de la Colombie-Britannique, À titre personnel, Témoignages, 23 juillet 2020.

[6] Ken Pearce, Pacific Balance Pinniped Society, Témoignages, 11 août 2020.

[7] Owen Bird, directeur exécutif, Sport Fishing Institute of British Columbia, Témoignages, 7 décembre 2020.

[8] Jesse Zeman, directeur de la restauration des poissons et de la faune, BC Wildlife Federation, Témoignages, 23 juillet 2020.

[9] Ibid.

[10] Josh Temple, directeur exécutif, Coastal Restoration Society, Témoignages, 14 avril 2021.

[11] Aaron Hill, directeur exécutif, Watershed Watch Salmon Society, Témoignages, 23 juillet 2020.

[12] Mike Blanchfield, Minister calls for G7 ‘naming and shaming’ on overfishing, Toronto Star, La Presse canadienne, 17 avril 2018, https://www.thestar.com/news/world/2018/04/17/minister-calls-for-g7-naming-and-shaming-on-overfishing.html

[13] Jesse Zeman, directeur de la restauration des poissons et de la faune, BC Wildlife Federation, Témoignages, 23 juillet 2020.

[14] Ibid.

[15] Aaron Hill, directeur exécutif, Watershed Watch Salmon Society, Témoignages, 23 juillet 2020.

[16] Jesse Zeman, directeur de la restauration des poissons et de la faune, BC Wildlife Federation, Témoignages, 23 juillet 2020.

[17] Jason Hwang, vice-président, Fondation du saumon du Pacifique, Témoignages, 23 juillet 2020.

[18] CPAC, Le fédéral lance une stratégie de 647 M$ pour conserver le saumon du Pacifique, 8 juin 2021, vidéo sur YouTube, 36:01, https://www.youtube.com/watch?v=K7N_qZXkT3Q&t=1693s, 27:11.

[19] CPAC, Le fédéral lance une stratégie de 647 M$ pour conserver le saumon du Pacifique, 8 juin 2021, vidéo sur YouTube, 36:01, https://www.youtube.com/watch?v=K7N_qZXkT3Q&t=1693s, 32:20.

[20] CPAC, Le fédéral lance une stratégie de 647 M$ pour conserver le saumon du Pacifique, 8 juin 2021, vidéo sur YouTube, 36:01, https://www.youtube.com/watch?v=K7N_qZXkT3Q&t=1693s, 26:00, 25:02, 35:20.

[21] Hon. Bernadette Jordan, Minister of Fisheries, Oceans and the Canadian Coast Guard, Blues, 2 June 2021.

[22] L’honorable Bernadette Jordan, ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, bleus, 2 juin 2021.

[23] Aaron Hill, directeur exécutif, Watershed Watch Salmon Society, Témoignages, 23 juillet 2020.

[24] Jesse Zeman, directeur de Fish and Wildlife Restoration, B.C. Wildlife Federation, Témoignages, 23 juillet 2020.

[25] Darren Haskell, président, Conseil de gestion du saumon du fleuve Fraser, Témoignages, 5 mai 2021.

[26] Jason Hwang, vice-président, Fondation du saumon du Pacifique, Témoignages, 23 juillet 2020.