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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 5 décembre 1995

.1109

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

[Français]

Il y a un mini-quorum, ce qui nous permet d'entendre les témoins. Nous pouvons donc commencer. Nous recevons aujourd'hui M. Tom Hopwood et M. David Miller du Conseil du Trésor.

.1110

Nous avons aujourd'hui à l'étude l'ébauche d'un rapport. C'est un rapport de notre sous-comité au sujet des crédits.

[Traduction]

Madame Catterall, vous pourriez peut-être présenter le sujet. Ensuite, si c'est nécessaire, nous pouvons entendre les témoins.

J'invite ces messieurs à venir prendre la place des témoins à la table. Nous n'allons peut-être pas vous entendre mais j'ai plutôt tendance à penser que si. Mme Catterall nous réserve sûrement quelques surprises et nous allons l'écouter.

Mme Catterall (Ottawa-Ouest): Sur le modèle de vos excellentes interventions à la Chambre, monsieur le président, j'ai l'honneur de présenter le premier rapport du sous-comité chargé de l'étude des crédits.

Le comité nous a demandé d'examiner une proposition du Conseil du Trésor visant à changer les éléments entrant dans le crédit pour dépenses de fonctionnement dans le prochain budget. Le comité s'est réuni à deux reprises pour étudier cette question et a entendu les témoignages de M. Hopwood et de M. Miller. Nous vous présentons donc notre rapport. Considérant que nous n'étions pas en mesure de dire que nous approuvions ce changement, nous avons simplement déclaré que nous ne voyions pas d'objections pour l'instant au changement.

Nous avons exprimé deux inquiétudes. Tout d'abord, nous voudrions que le Conseil du Trésor sache que la nature des «dépenses en capital secondaires» que l'on doit inclure dans le nouveau crédit pour dépenses de fonctionnement nous inspire une certaine inquiétude. Deuxièmement, nous hésitons à formuler ce genre de recommandation sans être aller un peu plus loin dans notre mandat. Cependant, nous pensons que le changement peut être apporté et nous verrons si nous souhaitons présenter d'autres recommandations sur ce point lorsque nous aurons progressé dans nos travaux.

Nous avions quelques doutes quant à la procédure à suivre. Nous avons finalement recommandé, suivant les conseils de l'attaché de recherche de notre comité, que vous adressiez une simple lettre au président du Conseil du Trésor pour lui faire part de cette opinion. Je crois que certains se demandent si le comité ne devrait pas aussi présenter un rapport à la Chambre.

Le comité pourrait décider de présenter un rapport à la Chambre à titre d'information, ce que je recommanderais si la Chambre devait donner son accord, mais je ne crois pas que ce soit nécessaire dans ce cas. Ce serait donc, d'après moi, faire mauvais usage de cette procédure.

Il est important de régler ce problème parce que le Conseil du Trésor a demandé à notre sous-comité d'examiner une autre question de façon à vous présenter un rapport avant Noël: il s'agit du changement dans le mode de présentation des renseignements dans le budget; le nouveau format sera utilisé à titre d'essai pour plusieurs ministères lors de la présentation du budget au Parlement.

Nous avons là aussi un petit problème de temps parce qu'il ne nous reste que cette semaine et le début de la semaine prochaine pour nous pencher sur cette question. Néanmoins, nous allons annuler d'autres témoins, nous occuper de cela et vous faire rapport mardi prochain. Je crois que la même question se posera quant à la procédure à suivre.

Je dois signaler au comité - et je viens d'en parler à M. Langlois - que le représentant du Bloc n'a pas assisté aux réunions du sous-comité et n'a pas contribué à ce rapport, non plus que le membre NPD de notre comité. Ils ont peut-être des questions à poser maintenant. M. Williams du Parti réformiste était là et a participé à toutes nos discussions.

Le président: Récapitulons. Si j'ai bien compris votre position - peut-être suis-je un peu lent - le sous-comité a examiné la question et a quelques inquiétudes mais estime qu'il pourra y remédier par la suite et recommande que l'on apporte ce changement maintenant. Est-ce exact?

Mme Catterall: Nous disons que le sous-comité n'a pas d'objections à ce que l'on prenne des mesures en ce sens.

Le président: Des mesures maintenant.

Mme Catterall: Oui.

Le président: D'accord. C'est votre position. Les membres du comité ont-ils des observations à faire sur le rapport du sous-comité ou des questions à soulever sur ce point?

M. Speaker (Lethbridge): Je voudrais appuyer la motion et demander le vote.

Le président: La motion porte sur l'adoption du rapport du sous-comité par le comité.

La motion est adoptée

Le président: J'enverrai la lettre.

.1115

Mme Catterall: Nous devons décider si vous devrez présenter un rapport à la Chambre ou pas.

Le président: Le comité souhaite-t-il présenter un rapport à la Chambre, c'est-à-dire en fait déposer le rapport du comité moins le dernier paragraphe, je suppose? Est-ce d'accord?

Mme Catterall propose ensuite que le comité présente à la Chambre un rapport à titre d'information expliquant le contenu de ce rapport et que j'envoie la lettre suivant la recommandation.

La motion est adoptée

M. Ringma (Nanaïmo - Cowichan): Je voudrais revenir rapidement sur l'élimination du dernier paragraphe...

Le président: Je vais envoyer la lettre mais je ne pense pas que cela doive figurer dans le rapport à la Chambre.

M. Ringma: Nous devons avoir deux versions différentes.

Le président: Il y avait deux versions. Il y a eu une première version et ensuite une version modifiée. La version modifiée se lit ainsi:

M. Ringma: Mon collègue est à jour.

Le président: Il l'est généralement.

Il y a une autre question que nous pourrions sans doute régler très rapidement, celle du budget du comité. Nous pourrions peut-être en terminer rapidement parce que l'autre question à l'ordre du jour nous prendra sans doute un peu plus longtemps.

Notre greffière a préparé une ébauche de budget pour le comité et nos divers sous-comités. Je dois dire aux honorables députés que nous sommes l'un des comités les plus modestes pour ce qui est des dépenses. Nous n'avons pas demandé de fonds en plus des 10 000 $ qui nous avaient été attribués mais étant donné le nombre de nos réunions, le nombre de sous-comités qui siègent et le nombre de témoins ayant comparu ici et devant les différents sous-comités, nous allons peut-être avoir des frais supplémentaires. Contrairement à d'autres comités, nous ne voulons pas dépenser l'argent avant d'avoir fait approuver notre budget.

M. McWhinney (Vancouver Quadra): C'est l'un des rares comités qui n'ait pas prévu une réunion aux Bermudes au printemps ou à Rome à Noël ou un souper au Ritz à Londres. Comment cela se fait-il? Je pensais que vous aviez des goûts de connaisseur.

Le président: C'est plus cher au restaurant parlementaire.

M. McWhinney: Ah! Je crois qu'il faut rendre hommage à notre comité d'avoir su se modérer et de ne pas avoir laissé libre cours à son imagination pour utiliser son budget au détriment de ses responsabilités. Cette démarche spartiate est tout à votre honneur, monsieur, comme à celui des membres du comité.

Vous n'avez pas entendu ce compliment, monsieur. Pourtant, je suis plutôt avare de compliments.

Le président: Comme on dit, il faut presser chaque sou jusqu'à la dernière goutte.

Y a-t-il une objection quelconque à un élément de ce budget? Y a-t-il des commentaires ou des suggestions d'augmentation?

La motion est proposée par M. Boudria

[Français]

que le président soit autorisé à demander un budget supplémentaire de 14 544$ pour le reste de l'année financière se terminant le 31 mars 1996.

[Traduction]

La motion est adoptée

Le président: Monsieur Langlois, vous avez une question?

[Français]

M. Langlois (Bellechasse): Non, c'est sur le C-69.

Le président: Ah bon. Voulez-vous commencer à parler de ces lettres, monsieur McWhinney?

[Traduction]

M. McWhinney: J'ai répondu à la lettre que le sénateur Beaudoin vous avait adressée. Je vous ai envoyé le 3 novembre une lettre portant la mention «personnel», ce qui ne vous empêche toutefois pas, vous et d'autres personnes, de penser qu'elle pourrait être rendue publique en temps utile.

.1120

Je n'en ai pas encore remis d'exemplaire au sénateur Beaudoin car cette lettre est restée jusqu'à présent entre nous, et elle est maintenant entre les mains du comité. Cependant, le sénateur Beaudoin connaît mon point de vue. Depuis environ un quart de siècle, nous déjeunons souvent ensemble pour discuter de ce genre de questions, et je respecte son opinion. J'ai lu très attentivement la lettre qu'il vous a adressée et dans laquelle je constate une distinction entre son avis professionnel et l'opinion qu'il a évidemment en tant que président d'un comité auquel il doit rendre des comptes.

J'ai exposé très clairement la démarche, et pour me rafraîchir la mémoire ainsi que pour la gouverne de Bob Ringma en face, je dirais que je revendique la primauté de cette opinion. J'ai effectivement témoigné auprès d'un certain nombre de comités mixtes et de comités simples du Sénat ou des deux Chambres de ce Parlement au cours des années 70 et 80. La dernière fois que j'ai témoigné, en 1984, j'ai recommandé le remplacement du Sénat par une chambre élue, directement élue sur la base de cinq régions, et dotée d'un veto dit suspensif, le pouvoir de retarder les mesures prises par la Chambre des communes pendant trois mois au maximum, mais avec des pouvoirs beaucoup plus vastes de contrôle et d'examen des nominations gouvernementales, des nominations par décret - les nominations d'ambassadeurs, de chefs de mission, etc. Je mentionne cela à titre de simple préface.

Le point central ici, c'est que là où l'on a au début de l'Acte constitutionnel de 1867 le texte anglais suivant: «a Constitution similar in principle to that of the United Kingdom», on trouve en français une traduction qui est un peu plus qu'une traduction; c'est en fait une version légèrement différente. Elle est même plus catégorique: «avec une constitution reposant sur les mêmes principes que celle du Royaume-Uni». Ce n'est pas une traduction exacte, mais je pense que c'est l'affirmation encore plus catégorique de l'idée que fondamentalement nous accompagnons l'évolution de la Chambre des Lords.

Il est exact qu'à la fin du XIXe siècle, l'égalité de pouvoirs entre la Chambre des Lords et la Chambre des communes avait disparu. Cette réalité revêtit une forme constitutionnelle législative en 1911 à cause de la crise engendrée par la controverse sur le home rule ou autonomie gouvernementale pour l'Irlande, une crise politique extrêmement acerbe. La Chambre des lords ayant rejeté deux fois des mesures adoptées par la Chambre des communes, le premier ministre persuada le roi de l'époque d'annoncer qu'il allait nommer s'il le fallait 500, 600 ou 700 lords de plus pour en arriver à une situation où les lords respecteraient la primauté de la Chambre des communes.

À ce propos, la Loi sur le Parlement avait établi un veto suspensif de deux ans pour la Chambre des Lords; en 1945, cette durée fut ramenée à trois mois. Ce que j'ai recommandé moi-même il y a pas bien longtemps, en 1984, c'est un veto suspensif d'un mois. Mais le fond de l'affaire, c'est que le Sénat, Chambre de réflexion, n'a pas pour rôle d'attendre le jour du jugement dernier ni de rejeter ou retarder indéfiniment les mesures adoptées par la Chambre. Il a la possibilité de faire valoir ses points de vue, mais en tant qu'assemblée non élue, il doit s'effacer devant l'assemblée élue.

Cette remarque concerne à la fois le problème principal et la question de savoir ce qui est tolérable, question qui me préoccupe, monsieur le président, car on rapporte dans la presse des remarques attribuées à deux membres de la majorité au Sénat qui donnent à penser qu'il pourrait s'agir là d'un petit jeu divertissant aux dépens de la Chambre. J'estime que c'est inacceptable.

J'ai toutefois souligné un autre point, qui touche en fait à ce que l'on appelle en termes techniques constitutionnels la règle du projet de loi enregistré: ce sont les Chambres législatives elles-mêmes qui détiennent l'autorité ultime, qui déterminent l'étendue du pouvoir constituant. C'est ainsi que ces chambres sont constituées. Autrement dit, c'est à la Chambre des communes qu'il appartient de se prononcer sur les questions électorales, sous réserve naturellement des dispositions de la Constitution et de la Charte des droits interprétées par les tribunaux. Dans l'ordre normal des choses, la Chambre des communes déciderait et les tribunaux examineraient sa décision à la lumière de la Constitution au besoin. Mais il est complètement aberrant qu'une chambre non élue, une chambre purement nommée, prétende non seulement donner des avis mais aussi dicter à une chambre élue les modalités de sa constitution.

.1125

Je considère donc comme une atteinte aux privilèges de notre Chambre ce retard malséant au point d'être quasiment un numéro de cirque, cette lenteur malséante à examiner des mesures adoptées par la Chambre des communes. La seule qui concerne directement notre comité est celle qui porte sur les limites des circonscriptions électorales, mais il a aussi été question d'autres projets de loi ailleurs. La lettre que je vous ai adressée avait pour but de suggérer le déclenchement d'une procédure pour faire connaître au Sénat notre préoccupation face à cette violation des privilèges constitutionnels de la Chambre et de ses membres. Peut-être, si tel est le souhait de ce comité, pourrions-nous examiner comment nous allons procéder à partir de là.

Je dis dans la dernière ligne de ma lettre que nous avons le loisir de prendre des mesures rectificatives. Je ne pense pas que l'endroit soit choisi pour en faire le tour, mais j'ai dit à la Chambre il y a trois jours qu'à mon avis nous étions paralysés par le mécanisme actuel d'amendement, qui date de 1982, et qu'il existait d'autres possibilités de changement constitutionnel, dont certaines que j'ai déjà explorées et que j'examinerais de façon plus approfondie encore le moment venu, des possibilités à mon avis assez prometteuses. Mais je pense que pour l'instant, ce qui nous préoccupe véritablement, c'est de savoir s'il y a atteinte aux privilèges de notre Chambre.

[Français]

Je suis très conscient des observations de notre collègue, M. Langlois, sur cette question. Je dis seulement que le Sénat a dépassé la compétence d'une deuxième chambre en faisant une revue mesurée de projets de loi déjà adoptés par la Chambre des communes.

Je suis un peu gêné par l'expression de sentiments attribués par la presse à quelques sénateurs qui se livrent à une espèce de jeu avec les députés de la Chambre. C'est tout à fait inacceptable. D'une certaine façon, ça peut donner plus de poids à notre objection contre le Sénat.

Je dis seulement en ce moment que c'est une atteinte aux privilèges des députés de la Chambre des communes et de la Chambre des communes elle-même et que nous devons immédiatement, à mon avis, indiquer au Sénat que c'est inacceptable. Ça dépasse la compétence constitutionnelle du Sénat.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur McWhinney.

Comme les députés l'ont probablement constaté, nous avons maintenant une ébauche de rapport sous la main. Vous pourriez en prendre connaissance pendant les commentaires des autres personnes, et si vous voulez y apporter des changements, nous pourrons en discuter après les présentations du premier tour.

Monsieur Langlois, vous avez la parole.

M. Langlois: Je ne reprendrai pas ce que le Dr McWhinney a dit, du moins pas dans sa globalité, parce qu'il a très bien exprimé sa pensée que je partage complètement. M. McWhinney a dit que le Parliament Act de 1911 au Royaume-Uni a été adopté justement à cause de la crise qui est survenue à la suite du refus caractérisé de la Chambre des lords de voter le Home Rule pour l'Irlande. Devant la menace royale de nommer un grand nombre de lords à l'époque, la Chambre s'est inclinée car elle n'avait pas le choix.

Ici, nous avons une disposition statutaire et même constitutionnelle qui fixe une limite au nombre de sénateurs. On ne peut pas demander au gouverneur général d'en nommer un nombre indéterminé et de passer outre, bien que M. Mulroney ait utilisé la disposition qui permettait d'en nommer quelques-uns de plus.

Je pense que tout a été dit là-dessus. J'adopte les propos de M. Boudria de l'autre jour et je propose l'adoption du projet de rapport, en ajoutant toutefois à la fin un dernier paragraphe qui se lirait comme suit:

Le Comité demande à la Chambre d'entériner ce rapport et qu'un message soit transmis par la présidence au Sénat, informant les honorables sénateurs de son adoption par les Communes.

.1130

[Traduction]

Le président: Monsieur Langlois, si la Chambre entérinait une motion d'adoption, je pense qu'il serait normal d'inclure ces mots dans la motion - autrement dit, «proposer l'adoption du rapport et qu'une copie du rapport soit transmise au Sénat pour en informer les honorables sénateurs», ou quelque chose comme cela. Je pense qu'on pourrait y mettre cela.

M. McWhinney: Monsieur le président, je n'ai pas d'exemplaire de votre rapport, et mon collègue n'a pas de copie de ma lettre.

Le président: Cette lettre a été envoyée aux bureaux des membres du comité. Le rapport est une ébauche et a été préparé auparavant.

Je tiens à préciser que si les membres du comité jugent le rapport satisfaisant, c'est très bien. Nous avons rédigé cette ébauche dans l'idée que nous ferions un rapport, puisque nous avions envisagé précédemment d'en rédiger un, lorsque j'ai envoyé ma lettre. Ce rapport s'inspire en fait de ce qui s'est passé à ce moment-là, avec quelques ajouts de mise à jour.

Les membres du comité sont libres de formuler des commentaires, mais j'espère vous donner satisfaction, monsieur Langlois. Je crois que si la Chambre proposait une motion d'adoption, il faudrait bien mentionner que si le rapport est adopté, on adressera au Sénat un message pour en informer les honorables sénateurs. C'est tout à fait normal, et je pense que nous pourrons le faire à ce moment-là, si vous êtes d'accord.

M. Speaker: J'invoque le Règlement ou je voudrais simplement un renseignement; nous proposons que la lettre soit envoyée au Sénat, et vous adaptez le format de cette lettre de manière à ce qu'elle devienne la propriété de la Chambre. Et c'est ensuite qu'elle serait envoyée de la Chambre au Sénat.

Le président: La lettre est partie, et cette question est réglée. Ce qui est proposé aujourd'hui, je crois, bien que nous n'ayons pas encore eu de motion à cette fin, c'est l'adoption de ce rapport. Si j'ai pris les devants en faisant préparer et distribuer ce document, ce n'est pas parce que j'estime que nous devons agir ainsi - c'est au comité d'en décider, et je me ferai un plaisir de m'en remettre à sa décision. Mais au cours de la discussion générale qui a débouché sur notre débat d'aujourd'hui, il a été suggéré que nous adressions à la Chambre un rapport sur cette question pour que la Chambre elle-même puisse faire part au Sénat de son opinion sur son immobilisme en l'occurrence.

M. Boudria (Glengarry - Prescott - Russell): Je vais poser la question fondamentale, car je pense qu'il est temps de commencer à la poser. Que se passera-t-il si nous gagnons? Si nous faisons peur aux sénateurs et qu'ils cèdent, et qu'ils adoptent le projet de loi, où en serons-nous dans notre calendrier et quel sera le résultat? Qu'obtiendrons-nous en définitive si nous gagnons? Les prochaines élections se dérouleront-elles sur la base du découpage de 1981? Est-ce que ce n'est pas vers cela que nous nous aventurons? N'oublions pas que si nous gagnons, nous risquons de perdre plus que si nous perdons. C'est ce qui finira par arriver. Où se trouve le seuil actuellement? C'est une question qui mérite vraiment réflexion.

Je ne dis pas que j'aime ce qu'ils ont fait, car je trouve que c'est épouvantable. Mais imaginez qu'ils fassent traîner les choses juste assez longtemps pour que cela ne puisse plus du tout marcher et qu'ils laissent faire ensuite? Cela nous ramènerait à la redistribution de 1981, avec par exemple un quart de million de personnes dans la circonscription de Mme Parrish, et d'autres éventuellement, etc.

Quelqu'un pourrait peut-être nous rafraîchir la mémoire sur ces dates.

Le président: D'après les témoignages que nous avons entendus, il faudrait environ deux ans pour effectuer un redécoupage en vertu du projet de loi C-69. Si le projet de loi était adopté ce mois-ci, on pourrait s'attendre à ce que les nouvelles limites soient en place en décembre 1997.

.1135

M. Speaker: C'est déjà presque trop tard. Autrement dit, il est à peu près exclu que cela puisse se faire.

Le président: À moins de tenir les élections la cinquième année.

M. Boudria: Le projet de loi C-69 prévoit-il une date fixe de proclamation, ou est-ce laissé à la discrétion du gouverneur en conseil?

Le président: Le projet de loi entre en vigueur quand il reçoit la sanction royale. Nous avons modifié cela dans le projet de loi. Je crois que dans la proposition qui nous avait été soumise, il y avait une date de proclamation, mais le projet de loi actuel dit que c'est la date de la sanction royale.

M. Boudria: Pour poursuivre dans cette voie, supposons que nous gagnions et que le projet de loi aille de l'avant. Est-ce que cela veut dire que nous allons néanmoins pouvoir conserver le découpage actuel et proclamer le projet de loi seulement le lendemain des prochaines élections, pour les suivantes?

Le président: Ce serait possible. Il faudrait modifier la loi, ce qui pourrait être fait par le Sénat et approuvé par la Chambre.

M. Boudria: Donc, si le projet de loi est adopté sans modification et que les élections ont lieu même un peu plus tôt que cette date de la fin de 1997, la campagne pourrait se faire sur la base du recensement de 1981.

Le président: S'il n'est pas modifié, c'est exact. Ce serait possible. Sur les limites électorales existantes.

M. Boudria: Cela fait réfléchir.

M. McWhinney: Nous avons confirmé que s'il y avait des élections tôt l'année prochaine, elles se dérouleraient sur la base des anciennes limites de circonscriptions puisque quelle que soit la date, le 1er janvier ou décembre, le projet de loi ne serait pas en vigueur avant 1997. Nous avons trois scénarios possibles.

Quand j'en ai parlé avec le sénateur Beaudoin, notre discussion n'était pas particulièrement axée sur le projet de loi sur les limites des circonscriptions électorales. En fait, le Sénat avait d'autres préoccupations, et c'est une question de principe constitutionnel. La lettre que je vous ai adressée ne portait donc pas particulièrement sur les éventuelles conséquences dans un sens ou dans l'autre. Je pense qu'il y a ici une question de principe fondamentale qui me préoccupe depuis un certain nombre d'années, de même d'ailleurs que le sénateur Beaudoin et diverses autres personnes.

M. Boudria: Je voudrais ajouter quelque chose à ce que vient de dire M. McWhinney. Il est peu probable - mais rien n'est impossible en politique - que des élections aient lieu avant 1997, mais il est certainement possible qu'il y en ait avant 1998.

M. Speaker: Ce serait très possible à l'automne 1997.

M. Arseneault (Restigouche - Chaleur): Ça pourrait aller au printemps de 1998.

M. Boudria: Oh, certainement. D'ailleurs, on pourrait même aller jusqu'à l'automne de 1998, puisque les deux ou trois derniers mandats ont largement dépassé les quatre ans. J'en suis bien conscient, mais j'examine simplement les règles de probabilité. Nous nous rapprochons dangereusement de la situation dont je parlais tout à l'heure, où nous serions simultanément perdants et gagnants.

M. McWhinney: La date des élections pourrait même être repoussée jusqu'au 25 décembre 1998. Légalement, ce serait possible. C'est fonction de la date à laquelle les brefs ont été retournés après les dernières élections. Je crois que M. Vander Zalm est le seul à être allé ainsi jusqu'à l'extrême limite en Colombie-Britannique, mais il y a peut-être d'autres exemples. Peut-être que Lord Bennett l'a fait, qui sait.

M. Speaker: Pourriez-vous vérifier cela?

M. McWhinney: Oui.

Mme Catterall: Je comprends la préoccupation de M. Boudria, et ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'il en parle au comité, et je pense que cela ne fait que renforcer l'argument de M. McWhinney, à savoir que le Sénat paralyse la Chambre des communes sur une question qui n'est absolument pas de son ressort puisque c'est un organe non élu. Personnellement, je n'apprécie d'être placée dans cette situation de paralysie, mais je pense qu'il est extrêmement important pour les parlements à venir d'aller au fond de cette question avec le Sénat et de tout faire pour régler ce problème non seulement pour notre Chambre, mais pour les parlements futurs.

.1140

Je propose que nous présentions ce rapport si nous pouvons effectivement réussir à faire respecter par le Sénat la compétence de la Chambre des communes. Il nous appartiendra alors de régler les problèmes d'ordre pratique comme celui qu'a mentionné M. Loubier. Je préférerais nettement cela plutôt que de laisser le Sénat le faire à notre place par défaut.

Je proposerais toutefois d'utiliser un terme un peu plus ferme à l'avant-dernier paragraphe. Nous devrions au moins «prier» plutôt que simplement «espérer». «Demander instamment» serait peut-être même encore mieux. «S'attendre à ce que»? Le comité «s'attend à ce que»... Non. Mais je trouve que «espère» fait plutôt mollasson ici, et je vous suggérerais donc de le remplacer par quelque chose de plus ferme.

Le président: J'aillais dire «invite instamment le Comité permanent... à traiter sans plus tarder le projet de loi C-69».

M. McWhinney: C'est une bonne formule juridique, qui ne nous place pas en situation d'infériorité.

Le président: M. Speaker est le suivant sur ma liste.

M. Speaker: Personnellement, je pense que je ne souhaiterais pas envoyer ce rapport ou le présenter à la Chambre pour l'instant, même si j'ai des préoccupations et même si nous avons appuyé la lettre tout à l'heure. Je me fonde sur deux arguments. Premièrement, je pense que l'avenir du projet de loi C-69 est assez clair. Je ne pense pas qu'il puisse servir de guide pour la délimitation des circonscriptions lors des prochaines élections.

Deuxièmement, il y a peut-être un autre argument plus sérieux dont nous devrions tenir compte. Si nous soumettons ce rapport à la Chambre et que nous affrontons le Sénat de cette manière, nous allons établir un important précédent. Le Sénat n'a pas freiné des projets de loi de cette manière jusqu'à maintenant. Ce que nous disons au Sénat, et ce que le Sénat va nous dire, c'est que nous faisons appel à notre pouvoir légal pour pousser les choses plus loin; nous allons pousser l'intervention au niveau législatif plus loin que nous ne l'avons jamais fait au cours de notre histoire. En faisant envoyer un message d'une Chambre à l'autre, nous établissons un précédent. À l'avenir, d'autres projets de loi seront soumis au Sénat et les sénateurs se diront qu'ils ont traité la Chambre des communes de cette façon une fois, et qu'ils peuvent le faire à nouveau. Je pense qu'il faudrait y réfléchir dans ce que nous faisons ici.

Le président: Madame Parrish.

Mme Parrish (Mississauga-Ouest): J'aimerais dire officiellement que je suis absolument opposée à ce que le Sénat a fait. Je conviens avec Mme Catterall que c'est scandaleux, surtout compte tenu du sujet dont il est question, les limites de circonscriptions électorales, un sujet auquel ils ne connaissent rien et par lequel ils ne sont malheureusement pas concernés. Et je suis extrêmement préoccupée par la question de principe d'un côté et celle de la perception du public et des aspects pratiques de l'autre.

M. Boudria nous a bien fait remarquer que même si notre entreprise réussit et que nous gagnons cette bataille, les circonscriptions redessinées risquent de ressembler tout à fait à celles que nous avons aujourd'hui. Nous aurons ainsi dépensé 6,6 millions de dollars supplémentaires pour en revenir finalement exactement aux mêmes limites que maintenant. C'est toujours possible.

Personnellement, cela ne me dérange pas de me présenter devant un corps électoral de 250 000 personnes. Franchement, j'aime assez l'idée du coussin. Le déplacement de quelques voix ne fait pas aussi mal. Je suis donc tout à fait prête à recommencer cela. Mais je me demande si la Colombie-Britannique est prête à renoncer aux deux sièges auxquels elle a droit dans le cadre de cette redistribution si les choses traînent trop longtemps.

Je suis donc extrêmement préoccupée par ce qu'ils ont fait, mais je suis aussi très inquiète à l'idée de déclencher une procédure qui va coûter 6,6 millions de dollars aux contribuables de notre pays pour risquer d'en revenir exactement aux mêmes limites. Puisque la Commission électorale n'a pas encore fait connaître ses réponses à toutes les objections que nous formulions dans le dernier rapport, pourquoi tirons-nous au jugé? Ne pourrions-nous pas attendre d'avoir ce rapport pour prendre notre décision, monsieur le président?

Le président: Quel rapport?

Mme Parrish: Celui que nous avons donné à M. Kingsley. Nous avions un million d'objections... s'il doit toutes les examiner.

Le président: Oh, les rapports des commissions.

Mme Parrish: Si nous recevons une réponse favorable à une grande partie de ces objections, je me demande encore une fois bien franchement à quoi cela nous servirait de redéclencher toute cette procédure pour nous retrouver finalement avec les mêmes circonscriptions?

Le président: Eh bien, nous le saurons vers le 30 décembre.

Mme Parrish: Puis-je respectueusement vous suggérer que nous ne fassions rien tant que nous n'aurons pas reçu ce rapport?

Le président: D'accord.

Mme Parrish: Je continue naturellement à protester contre l'arrogance du Sénat.

.1145

M. Ringma: Je me demande si nous ne pourrions pas envisager de discuter des deux questions séparément, d'un côté l'adoption du projet de loi C-69 et de l'autre le principe du blocus au Sénat. Je pose la question en toute candeur aux membres du comité. Est-ce souhaitable et est-ce possible?

M. McWhinney: Nous avons argumenté que la crise de 1911 concernant la Loi sur le Parlement découlait d'une affaire bien précise, l'affaire du référendum irlandais. Il faut donc une cause. Toutefois, rien n'oblige l'exécutif à donner suite au projet de loi C-69 s'il est adopté. Les dispositions qui prévoient un pouvoir, si elles ne sont pas exécutoires... J'imagine que les dirigeants tiennent compte des réalités politiques, mais je pense que pour soulever la question du principe, il faut avoir une cause.

L'un des problèmes ici, c'est le manque de respect généralisé pour les politiciens et les institutions parlementaires. C'est le Sénat et le mépris du public pour le Sénat qui sont au coeur de ce problème. Je ne devrais pas vous tenir ce discours, mais le fait est que les gens s'interrogent sur le Sénat. Comment se fait-il qu'on ait ce curieux organisme qui n'est pas élu? Comment devient-on sénateur?

Je pense aussi qu'il importe de se souvenir, sans nécessairement entrer dans le détail, qu'il existe des méthodes en dehors du mécanisme d'amendement constitutionnel de 1982 qui, comme je l'ai déjà dit et comme je l'avais dit à M. Trudeau à l'époque, est un instrument de paralysie constitutionnelle qui ne marchera jamais.

Il existe des moyens de tester la validité constitutionnelle de cette question au besoin, mais je crois que ce que nous avons ici dans le rapport du président à notre comité, c'est une démarche très modérée et progressive. Il soulève la question dans le contexte d'une affaire particulière, mais il ne sous-entend nullement que, du simple fait que l'on n'a pas résolu le problème, quelqu'un dans l'exécutif va se mettre à agir en vain, à faire une proclamation, à déclencher tout un mécanisme et à dépenser de l'argent. Il y a toujours un certain élément de bon sens au niveau de l'exécutif.

Je crois que la question est fondamentale. Le fait de garder ce projet de loi indéfiniment dans les limbes, comme d'autres auparavant, est une atteinte au privilège de notre Chambre. Ce n'est pas parce que les prédécesseurs du gouvernement actuel n'ont peut-être pas les mains parfaitement propres non plus que je changerai d'avis sur le principe.

Je pense que le rapport que vous avez rédigé, monsieur le président, est un rapport modeste, un rapport délibérément modeste. En fait, c'est une façon subtile de vous dire, comme d'autres l'ont déjà fait, que vous pourriez peut-être lui donner un peu plus de fermeté.

Le président: Nous sommes naturellement ouverts à vos suggestions. Il s'agit simplement d'une ébauche.

Monsieur Arseneault, s'il vous plaît.

M. Arseneault: Monsieur le président, je serais d'accord pour envoyer le rapport et y ajouter la partie du message au Sénat. Je crois qu'on pourrait retourner un certain nombre des arguments qui ont été avancés pour suggérer de ne pas l'envoyer. Si je suis pour au contraire, c'est justement que l'attitude du Sénat crée en fait un précédent autour de cette mesure législative très particulière. Il s'agit d'une question qui devrait relever de la Chambre élue.

Je m'inquiète du genre de précédent que les sénateurs sont en train d'établir avec cette mesure législative. Je pense qu'il faudrait que nous prenions des mesures pour protéger l'intégrité de la Chambre, de la Chambre élue, au profit des parlements futurs.

Je ne m'attends pas à ce que les sénateurs sautent sur les tables dès qu'ils recevront notre message, en s'écriant: «Oui, adoptons-le tout de suite; mon Dieu, c'est épouvantable». Je pense que les choses vont continuer avec leur lenteur habituelle, mais nous aurons clairement exprimé notre point de vue.

Par conséquent, que nous attendions la fin décembre ou la fin janvier pour déposer notre rapport, je ne pense pas que cela fera une grande différence pour le Sénat. En revanche, je crois qu'il est important de lui faire connaître notre point de vue le plus tôt possible. Si nous attendons trop longtemps, nous allons faire exactement la même chose que le Sénat et nous ne nous acquitterons pas de nos responsabilités.

Il est très important de déposer ce rapport et d'adresser au Sénat le message par lequel nous lui faisons part de notre mécontentement, en particulier en ce qui concerne cette mesure législative bien spéciale. Ce sont eux qui créent un précédent, pas nous.

.1150

M. Solomon (Regina - Lumsden): Je suis essentiellement d'accord avec les remarques de M. Arseneault. Ce que je voudrais ajouter, toutefois, c'est que le caucus néo-démocrate s'est opposé au projet de loi C-69 à la Chambre pour diverses raisons que je ne prendrai pas la peine de ressortir ici ce matin.

Ce que fait le Sénat est fondamentalement inconvenant et, comme le dit M. McWhinney, anticonstitutionnel. Et surtout, c'est inacceptable. Si nous laissons traîner les choses en longueur et que nous ne faisons pas savoir au Sénat sous une forme ou sous une autre ce qu'en pense la Chambre des communes, nous risquons de laisser s'établir un précédent qui pourrait avoir à l'avenir des conséquences nuisibles sur d'autres projets de loi qui pourraient être plus importants pour les Canadiens.

La dernière chose que je voulais dire, c'est que notre parti réclame depuis plusieurs décennies déjà l'abolition du Sénat parce que c'est en fait un organe inutile. Nous avons ici une raison de plus de l'abolir. J'invite les membres du comité à continuer de réfléchir à cela au cours des semaines et des mois qui viennent car le Sénat n'a en fait aucun compte à rendre à la Chambre des communes ou au gouvernement du jour ni, ce qui est plus important encore, aux citoyens de notre pays. Lorsqu'un organisme n'est pas tenu de rendre des comptes, toutes sortes d'abus et de problèmes peuvent se produire.

J'appuie donc la proposition visant à faire part au Sénat de notre déception et à lui demander d'adopter cette mesure le plus rapidement possible.

J'appuie également la recommandation de Mme Catterall demandant que l'on supprime le mot «espère» pour le remplacer par quelque chose de plus clair comme «demande» ou «prie».

Le président: Monsieur Solomon, je partage vos commentaires. Votre parti a appuyé l'abolition du Sénat pendant des décennies, jusqu'au jour où il a fait tout d'un coup volte-face pendant le dernier Parlement. Je me souviens des discours des députés de votre parti appuyant vigoureusement le Sénat et lui demandant instamment de rejeter le projet de loi sur la TPS. Certains d'entre nous en avaient été vraiment choqués.

M. Solomon: Ils ne sont plus là maintenant.

Le président: Oh si, M. Riis est toujours là.

M. Solomon: Il n'y a plus que ceux qui sont favorables à l'abolition.

Le président: M. Riis est toujours là et j'aimerais que vous lui fassiez part de mes remarques de ce matin. Il appréciera.

[Français]

M. Langlois: Monsieur le président, cette motion ne me pose aucun problème puisque j'ai voté contre le projet de loi C-69. Mais il s'agit maintenant de notre projet de loi, le projet de loi de la Chambre, et je pense qu'au-delà de toute considération partisane, on a atteint un point de rupture concernant la question fort importante de la prééminence de la Chambre des communes quand il s'agit de fixer la redistribution électorale. Je pense aussi que nous n'avons pas à nous soumettre à un pouvoir qui, à mon avis, est périmé au niveau des conventions constitutionnelles.

Je comprends qu'on pourrait argumenter qu'au niveau des textes de loi, étant donné le jugement qui avait été rendu par la Cour suprême en 1938, en référence à power of disallowance and reservation, ce pouvoir-là existe théoriquement encore, mais il semble avoir disparu au niveau des conventions. Il faudra, à mon avis, le réaffirmer.

Si d'autre part, et cela est tout à fait séparé comme Mme Catterall l'a très bien expliqué tout à l'heure, il doit y avoir une mesure législative ad hoc parce qu'on se rend compte que l'adoption de C-69 nous mettrait dans une situation pire que sa non-adoption, nous en prendrons la décision à la Chambre des communes et nous ne laisserons pas le Sénat prendre la décision à notre place. Les députés élus par la population devront décider si, à la prochaine élection, en attendant que le projet de loi C-69 soit adopté, on prend comme mesure intérimaire d'accepter les rapports qui seront déposés au plus tard au début de janvier. Nous pourrons le faire, mais en attendant, cela ne doit pas nous empêcher de réaffirmer notre primauté en termes de législation en matière de redistribution électorale.

[Traduction]

M. Speaker: Je voulais simplement renforcer ce que je disais tout à l'heure en ajoutant que, dans un sens, le Sénat peut se permettre de prendre le comité de haut mais avec la Chambre, c'est autre chose. S'il ne fait aucun cas du rapport que nous allons lui envoyer et n'y donne pas suite mais continue à retarder...

M. Arseneault: Le Sénat traite déjà le projet de loi C-69 avec la plus grande arrogance et en n'agissant pas, nous semblons approuver cette attitude.

Le président: Il faudrait prendre des mesures pour que le rapport soit approuvé par une motion en Chambre afin que cette arrogance ne s'adresse pas au comité mais bien à la Chambre.

M. Speaker: Exactement, et je ne suis pas d'accord. Je trouve que nous créons un certain précédent en permettant cela.

Le président: Je vois. D'accord.

Mme Catterall: J'aimerais bien convaincre M. Speaker de changer d'avis parce que c'est une question de principe très importante et un précédent pour la Chambre.

.1155

En fait, en agissant ainsi, le Sénat rend la décision de la Chambre des communes inopérante. Il a tant retardé l'adoption du projet de loi qu'il n'est peut-être plus possible de le mettre en oeuvre. Quoi que l'on en pense, et nous ne sommes manifestement pas tous du même avis, la Chambre des communes s'est pratiquement trouvée dans l'impossibilité d'exécuter une décision qu'elle avait prise et c'est tout simplement inacceptable.

Je ne sais pas si nous pouvons faire bouger la Chambre ou le Sénat avec un rapport comme celui-ci adopté par la Chambre. Pour nous et pour tous les députés qui nous succéderont au Parlement, je crois qu'il est essentiel que la Chambre exprime son opinion. Par son silence, elle accepte l'inconduite du Sénat, elle lui donne le droit de rendre les décisions de la Chambre des communes inopérantes et impossibles à mettre en oeuvre et je trouve que la Chambre des communes ne peut l'accepter.

J'ai très peu d'illusions sur l'effet que ce rapport peut avoir sur le Sénat. Cependant, s'il en a un, et si le Sénat renvoie le projet de loi C-69 à la Chambre, ce sera alors à nous de décider si nous voulons mettre en oeuvre les dispositions du projet de loi. Mais c'est à nous, parlementaires élus, de prendre cette décision alors que pour l'instant, c'est le Sénat qui la prend.

Il en va de même pour ce qui est des commentaires de Mme Parrish. Si nous estimons, lorsque nous aurons le rapport de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales, que l'on a répondu à la plupart de nos objections, nous pouvons tout simplement modifier la date d'entrée en vigueur du projet de loi C-69 afin que la redistribution se fasse après les prochaines élections. La Chambre garderait ainsi le contrôle de la situation.

Le président: Il y a un léger problème de procédure dans cette formule.

Mme Catterall: Je sais qu'il y a un petit problème de procédure.

Le président: Si le Sénat accepte le Message qu'il a maintenant, le projet de loi est prêt pour la sanction royale, et nous ne pourrons plus changer quoi que ce soit. Autrement dit, les modifications que vous décrivez ne sont envisageables que si elles sont apportées par le Sénat et ensuite renvoyées à la Chambre pour approbation. Si cela ne se fait pas et que, pour une raison ou une autre, le Sénat approuve ce dont il est saisi actuellement, nous passerons à la sanction royale immédiatement.

Mme Catterall: Permettez-moi de préciser, si je le puis. Est-ce que le projet de loi exige une proclamation?

Le président: Non.

Mme Catterall: Non. Est-ce que la Chambre pourrait ensuite amender ce projet de loi comme n'importe quel autre?

Le président: Oui, en adoptant une autre loi, qui devrait bien sûr être approuvée par le Sénat.

Mme Catterall: Je crois que les partis s'entendent suffisamment sur la question de la compétence de la Chambre pour que la chose soit possible.

M. Richardson (Perth - Wellington - Waterloo): J'aimerais dissiper un peu le brouillard qui m'encombre l'esprit.

Les options ont été clairement décrites dans le projet de loi qu'étudie le Sénat. Élections Canada a étudié les limites des circonscriptions électorales et a établi une carte que nous avons tous examinée. Ensuite, nous avons entrepris l'examen des modifications des limites des circonscriptions. En vertu de quelle autorité avons-nous entrepris l'examen récent?

Le président: En vertu de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales dans le cadre de laquelle les limites ont été déterminées.

M. Richardson: La première fois.

Le président: Oui.

M. Richardson: Maintenant, c'est la révision de ces limites que nous étudions.

Le président: Nous l'avons étudiée, oui, et nous avons envoyé notre rapport.

M. Richardson: Et nous avons envoyé notre rapport en nous basant là-dessus.

Dans mon esprit, il y a deux cheminements, et c'est peut-être parce que je ne suis pas là depuis le début. D'une part, sous l'égide d'Élections Canada, on se dirige vers de nouvelles limites de circonscriptions établies à la suite du recensement de 1991. D'autre part, il y a la démarche que nous avons entreprise avec le projet de loi C-69. Disons que le projet de loi C-69 n'est pas adopté. La révision des limites de circonscriptions électorales non plus. Les deux disparaissent. Est-ce exact?

Le président: Non. La Loi actuelle sur la révision des limites de circonscriptions électorales est en vigueur et le reste jusqu'à ce que le projet de loi C-69 soit adopté et vienne la remplacer. Si cette première loi est abrogée et remplacée, tout le travail effectué sur les limites de circonscriptions tombe à l'eau et il faudra entamer le nouveau processus, qui prendra deux ans.

M. Richardson: Puis-je alors faire ma dernière observation? Si le projet de loi C-69 ne revient pas, la Colombie-Britannique ne perdra pas ses deux sièges.

.1200

Le président: Si le projet de loi C-69 n'est pas adopté, le processus en cours se poursuit, ce qui donnera à la Colombie-Britannique deux sièges de plus et à l'Ontario quatre.

M. Richardson: D'accord.

Mme Catterall: Quel est le nouveau processus en vertu du projet de loi C-69?

Le président: Ça irait aussi.

M. McWhinney: Est-il aussi possible de créer deux nouveaux sièges pour la Colombie-Britannique et quatre pour l'Ontario par une loi spéciale? Il n'y a pas de problème au plan juridique. En fait, la question a été discutée sur le plan théorique au niveau exécutif. Je crois que ce serait possible si c'était la seule façon d'y parvenir.

M. Solomon: Je ne veux pas compliquer encore les choses mais il ne faut pas oublier l'objectif du rapport que nous présentons. Cet objectif est d'envoyer un signal au Sénat. Ce qu'il fait est inacceptable et, ce qui n'est pas négligeable, parfaitement discourtois. Nous pouvons parler des répercussions des amendements mais ce n'est pas le moment de prendre une décision là-dessus. D'ailleurs nous ne le pouvons pas.

Ma seule observation porte sur le système existant et la Commission de délimitation des circonscriptions électorales. Les députés espèrent peut-être que des changements interviendront à la suite des recommandations présentées par les sous-comités et ce comité et aux commissions de délimitation des circonscriptions des provinces. Je leur conseille de ne pas s'emballer. D'après ce que j'ai pu voir personnellement et ce que m'ont dit d'autres personnes des commissions provinciales et fédérales de délimitation des circonscriptions au cours des 25 dernières années, il n'y a que très peu de changements. On va peut-être changer un nom. Peut-être un bureau ici et une ligne là, mais rien de très fondamental.

Dans notre discussion de ce matin, nous devons avant tout parvenir à une décision au sujet du rapport et débattre des questions de principe. Le reste constitue plutôt des éléments d'information supplémentaire. Mais je ne crois pas que cela change la situation pour ce qui est de l'effet que peut avoir l'action du comité et de la Chambre des communes sur le Sénat.

Le président: Je suis à la disposition du comité. Je crois que nous avons un consensus en faveur d'un rapport mais je ne sais pas si vous voulez d'abord débattre de cette question de principe. Ou bien préférez-vous jeter un coup d'oeil au document pour voir si le libellé nous convient?

Mme Catterall a proposé de remplacer le mot «espère» par «demande instamment». Le dernier paragraphe se lirait ainsi: «Le comité demande instamment au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles de traiter sans plus tarder le projet de loi C-69», etc..

Si cela vous convient, la greffière a proposé d'ajouter un paragraphe disant: «Le comité recommande qu'un message soit envoyé au Sénat pour informer les honorables sénateurs du contenu de ce rapport». Si jamais la motion d'adoption n'est pas correcte, cette phrase réglerait la question si c'était adopté.

Les membres du comité ont-ils d'autres changements à signaler avant que nous ne passions au vote sur les modifications proposées par Mme Catterall?

Êtes-vous d'accord pour apporter ce changement au rapport avant de décider si nous envoyons un rapport? Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Le changement que j'ai proposé est-il adopté, au sujet du message que nous enverrions au Sénat pour informer les honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: Très bien. Je crois que j'ai le rapport. Le premier paragraphe complet à la page 3 se lit comme suit:

Par conséquent, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre tient à dire unanimement que les retards occasionnés par certaines sénateurs à l'égard d'un projet de loi traitant...

Que pensez-vous du mot «unanimement»? Vous satisfait-il étant donné les opinions des membres du comité?

M. McWhinney: Je crois qu'on pourrait le supprimer parce qu'un comité à la majorité et la Chambre à la majorité expriment l'opinion de la collectivité. Donc «unanimement» ramène les choses au niveau politique, ce qui fait jouer le lien constitutionnel.

Le président: D'accord, nous allons retirer «unanimement» et dire simplement «tient à dire que». Je crois que «unanimement» se trouvait aussi dans la lettre. Nous dirions donc: «tient à dire que les retards occasionnés»... Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Très bien.

Mme Catterall: Je voudrais simplement dire que j'apprécie beaucoup la phrase suivante:

Le président: Très bien. Sommes-nous prêts pour le vote?

M. Ringma: Je voudrais faire une observation auparavant. Je suis partagé. Je ne veux pas prolonger le débat inutilement mais mon côté pratique me pousse à dire qu'il vaut mieux reporter tout cela. D'un autre côté, je pense qu'il s'agit d'une question de principe et j'aimerais en parler clairement au Sénat.

.1205

Cependant, si j'essaie de combiner les deux, j'aimerais vraiment en discuter avec mon collègue. Pourrions-nous attendre une semaine, afin que je puisse le convaincre ou qu'il puisse me convaincre que c'est bien ainsi qu'il faut procéder? Il y a vraiment à la fois une question de principe et une question pratique. Je suppose en disant cela, monsieur le président, que nous allons voter pour décider de présenter ce rapport à la Chambre.

Mme Catterall: Nous réunissons-nous jeudi?

Le président: Nous ne pensions pas nous réunir jeudi parce qu'il y a généralement une réunion du sous-comité. Si les membres du comité souhaitent se réunir jeudi ou mardi prochain, je suis à leur disposition.

M. McWhinney: Faudra-t-il un grand débat, Bob? Si nous pouvions faire cela jeudi, faudra-t-il un grand débat? Il y a une autre réunion de sous-comité. Mais si vous pouvez présenter une position claire jeudi et s'il n'est pas nécessaire d'en débattre longuement, je crois qu'il est préférable d'éviter la dernière semaine.

M. Ringma: Un simple hochement de tête suffirait.

Le président: J'aimerais ajouter une chose. Il est important de parvenir à un accord. Si nous ne le faisons pas, nous n'avons presque aucune chance de faire entériner une motion d'adoption par la Chambre parce qu'elle pourrait être débattue. Or, nous n'aurions pas assez de temps pour un débat, étant donné le programme législatif de la semaine prochaine.

M. McWhinney: Accepteriez-vous une brève réunion jeudi?

M. Ringma: Oui.

Le président: À quelle heure est votre sous-comité, madame Catterall?

Mme Catterall: À 9h30. Il y a peu de chance pour ce que soit fini à 11 heures mais il n'y a que trois membres de ce comité qui y participent.

Le président: Si nous convoquons notre réunion pour 11h30, puisque ce ne devrait pas être long, cela vous aiderait-il?

Mme Catterall: Ce serait mieux.

Le président: Les membres du comité sont-ils d'accord?

M. Richardson: Il y aura un seul point à l'ordre du jour.

Le président: Oui, il y aura un seul point à l'ordre du jour jeudi. Ce sera ce point-ci, à 11h30. Nous allons faire corriger le texte du rapport. Si les membres du comité ont d'autres changements à proposer, nous serons très heureux d'avoir leurs commentaires.

Mme Parrish: Je voudrais poser une question technique. Le Comité des affaires émanant des députés se réunit cet après-midi et peut-être demain pour vous donner une liste des projets de loi qui feront l'objet d'un vote.

Le président: Nous pourrons aussi faire cela jeudi.

Mme Parrish: Je ne serai pas là jeudi mais la personne qui me remplacera pourra le faire également.

Le président: Exactement. D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Merci de votre participation. La séance est levée.

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