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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 27 avril 1995

.1104

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Avec l'indulgence des témoins qui comparaissent aujourd'hui, nous voudrions aborder brièvement une question d'administration interne, et vous pouvez rester dans la salle pendant ce temps si vous le voulez. Il s'agit de l'élection d'un nouveau vice-président, à la suite de la mutation de l'un de nos vice-présidents à un autre comité.

Sur ce, j'accepte maintenant les mises en candidature.

.1105

Mme Catterall (Ottawa-Ouest): Monsieur le président, je propose de nommer comme vice-président pour remplacer M. Telegdi M. Bob Wood, membre du comité dont les états de service sont excellents.

Le président: On a proposé la candidature de M. Bob Wood. M. Bob Wood accepte-t-il ce poste?

M. Wood (Nipissing): J'accepterais volontiers.

M. Maloney (Erie): J'appuie la candidature.

Le président: Y a-t-il d'autres candidatures que le membres du comité voudraient proposer? Avec le consentement du comité puis-je déclarer que cette candidature a été approuvée par acclamation.

Des voix: D'accord.

Le président: Je déclare donc M. Bob Wood élu à l'unanimité.

Monsieur Wood, le président peut maintenant partir et vous laisser diriger la réunion.

Sérieusement, nous accueillons aujourd'hui le greffier de la Chambre des communes et certains de ses collaborateurs pour répondre aux questions que nous pourrions vouloir leur poser au sujet de la Chambre, en l'occurrence, et de la mesure dont nous sommes saisis, la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Voulez-vous faire une déclaration liminaire ou souhaitez-vous que l'on passe directement aux questions?

M. Robert Marleau (greffier de la Chambre des communes): Merci, monsieur le président. Je suis heureux d'être ici. Je n'ai pas préparé de déclaration liminaire étant donné que dans notre conversation téléphonique de lundi vous m'avez dit que vous aviez quatre ou cinq catégories de questions. Cependant, j'aimerais vous présenter mes collègues, Diane Davidson, notre conseiller juridique, et Jacques Sabourin, notre directeur des ressources humaines.

Le Bureau de régie interne a promulgué une politique sur l'équité en matière d'emploi à la Chambre des communes en 1992. Nous vous en avons distribué un exemplaire accompagné de la petite brochure que nous remettons aux employés et candidats éventuels à un emploi à la Chambre. Si vous le voulez, je peux demander à M. Sabourin de résumer rapidement cette politique et son application après quoi nous pourrons passer aux questions.

Le président: Je pense que cela serait utile. Vous avez la parole.

M. Jacques Sabourin (directeur général, direction des ressources humaines, Chambre des communes): Je vous remercie beaucoup de votre invitation. Cette politique consiste évidemment en une déclaration beaucoup plus simple que le projet de loi C-64 que nous avons dû lire très attentivement avant de venir ici. Cela dit, on y trouve énormément de similitudes pour ce qui est de l'intention et des objectifs visés. Par exemple comme on l'énonce dans la déclaration d'intention législative d'ouverture du projet de loi, l'objet de la mesure est de réaliser l'égalité en milieu de travail et à corriger les désavantages subis par les groupes désignés. Or, c'est exactement les termes que vous retrouverez à la page 1 de notre politique. Le deuxième paragraphe exprime en outre notre intention de supprimer les obstacles systémiques à l'emploi, comme on les appelle, et d'offrir des chances égales aux membres des quatre groupes désignés.

Sur le plan de l'application, il n'y a évidemment pas de comparaison possible. La politique de la Chambre des communes s'applique uniquement aux employés de la Chambre, qui sont des employés du Bureau de régie interne, lequel est l'employeur officiel à la Chambre. Bien sûr, cela exclut tous les employés des députés.

Ensuite, nous expliquons de façon un peu plus détaillée les objectifs que nous cherchons à réaliser grâce à notre politique et les principes que l'on entend ainsi appuyer.

Outre certains objectifs sur le plan de la représentation, la politique comporte aussi un aspect de sensibilisation ou d'éducation si vous voulez. On peut y lire que l'équité en matière d'emploi ne veut pas uniquement dire qu'on doit traiter tous les employés de la même façon, mais qu'il faut prendre des mesures spéciales pour faciliter l'acceptation des différences. D'ailleurs, en prenant connaissance de certains de nos rapports, vous verrez ce que nous avons fait pour rendre la Colline plus accueillante pour les personnes handicapées. Nous avons fait des efforts variés, qu'il s'agisse de transformer les toilettes ou autre. Ces efforts à mon avis ont permis des progrès assez impressionnants.

.1110

La dernière partie de la politique porte essentiellement sur les moyens que nous prenons pour nous assurer qu'il existe le rôle et les responsabilités de chacun sont bien précisées, et qu'il existe aussi des mécanismes de surveillance. On compte quatre grands champs de responsabilités. Il y a d'abord la fonction de planification de la direction des ressources humaines qui procède aux analyses générales et ainsi qu'aux analyses de l'écart et qui essaie également d'aider les gestionnaires à planifier dans les domaines où il convient de faire des efforts et de recruter des représentants des quatre groupes.

Par exemple, nous veons tout récemment de tenir un concours pour recruter des constables. En l'occurence, nous avons fait un effort spécial pour communiquer avec l'Institut national canadien pour les aveugles ainsi qu'avec des organisations autochtones pour voir s'ils ne pouvaient pas présenter des candidats. Tout cela, vous l'imaginez bien, se fait toujours dans le respect du principe du mérite qui gouverne la procédure de concours à la Chambre.

Le deuxième intervenant, si vous voulez, et sans doute le plus important, est le gestionnaire lui-même. En effet, dans le cas d'un nouvel employé, c'est le supérieur appelé à travailler avec l'employé qui décide si celui-ci convient pour le poste. Essentiellement, cette responsabilité repose sur ses épaules et nous estimons qu'une grande part de notre travail aux ressources humaines consiste à appuyer les gestionnaires mais aussi à les inciter à traiter leurs employés avec toute la considération voulue et, bien sûr, à penser aux groupes désignés.

Pour être plus précis,

[Français]

l'agent de dotation qui va seconder le gestionnaire dans le processus de recrutement va effectivement essayer de donner des conseils et de trouver des sources d'information qui pourraient rendre le processus plus ouvert, et même stimuler les candidatures pour certains concours.

En dernier lieu, la direction générale des ressources humaines doit agir comme conscience corporative pour s'assurer que ces politiques - comme les autres d'ailleurs, qu'il s'agisse de langues officielles ou de politiques en dotation - sont non seulement respectées, mais qu'on s'efforce activement de les appliquer.

La direction générale est le lien, en ce qui a trait à cette politique, avec le Bureau de régie interne pour produire des rapports, fournir de l'information et des analyses. Évidemment, il n'y a pas, chez nous, tout le processus prévu dans les parties II et III du projet de loi où on mentionne l'application du contrôle et du suivi des politiques.

Selon moi, je ne suis pas sûr que ce soit nécessaire. Depuis la mise en place du Programme d'incitation au départ, nous avons seulement 1 500 employés. Je ne crois pas que ce nombre exige un mécanisme de contrôle très lourd, même s'il doit en exister un.

Voilà un bref aperçu de la politique de la Chambre des communes en équité en matière d'emploi. Vous verrez aussi qu'il y a un glossaire qui, là où ça s'applique, ressemble beaucoup à ce que vous trouvez dans le projet de loi. Pour ce qui nous touche, bien sûr.

[Traduction]

C'était donc un survol rapide de l'intention visée par la politique. Il s'agit d'un document simple et direct que nous avons commencé à examiner d'un peu plus près. Nous allons sans doute commencer à le réviser sous peu pour voir si on ne pourrait pas y apporter des améliorations au cours des six ou huit prochains mois.

Le président: Merci, monsieur Sabourin.

Pouvons-nous maintenant passer aux questions?

[Français]

M. Ménard (Hochelaga - Maisonneuve): Merci, monsieur le président. Permettez-moi de féliciter notre nouveau vice-président qui a mené une campagne assez facile. Nous avons vécu la même chose de ce côté-ci, donc, c'est parfait.

Monsieur le président, je comprends que le comité aura à prendre une décision qui concerne la nécessité ou pas d'assujettir les employés de la Colline au projet de loi sur l'équité en matière d'emploi.

.1115

Je comprends qu'on ne discutera pas du personnel des bureaux de circonscription et des employés des parlementaires de la Colline. Essentiellement, on parle d'à peu près 1 500 personnes, si j'ai bien compris.

De ces 1 500 personnes, y a-t-il finalement un équilibre à peu près naturel qui s'est établi sans qu'il n'y ait de politiques trop orientées vers l'équité en matière d'emploi? Est-ce que vous avez des statistiques à nous mettre sous la dent sur le nombre de personnes handicapées, de femmes, d'autochtones et évidemment sur les quatre catégories désignées? Je crois que ça nous aiderait à savoir s'il faut ou non assujettir les membres de la Colline à la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

M. Marleau: Je peux vous donner certaines statistiques, monsieur Ménard, mais, au préalable, je dois vous dire que c'est très difficile de les citer avec assurance.

Nous avons procédé, à deux occasions, à un petit recensement volontaire de nos employés par le biais du processus d'identification volontaire. Or, comme c'était volontaire, la cueillette a été faible. Nous n'avons eu que 22 ou 23 p. 100 des répondants qui se sont autoidentifiés. Il est alors difficile de se fonder sur ces chiffres d'une façon absolue.

Cependant, je peux vous donner le nombre de répondants pour chacune des catégories. On a eu 8 hommes et 6 femmes qui se sont identifiés comme autochtones, 14 hommes et 5 femmes comme personnes handicapées, et comme minorités visibles, 9 hommes et 12 femmes.

Si les chiffres étaient absolus, ce serait fort intéressant parce que les pourcentages globaux dépasseraient nettement les proportions de la Fonction publique et les proportions qui sont citées dans la déclaration du ministre lorsqu'il a comparu chez vous.

M. Ménard: [Inaudible]

M. Marleau: Exactement. Si on parle de la représentation des femmes et qu'on l'applique aux 357 répondants, ce n'est pas énorme. Ça ferait 54 p. 100 de représentation chez les femmes, 3,9p. 100 de représentation chez les autochtones, qui est au-delà de 2,2 p. 100 dans la société, 5,3 p. 100 pour les personnes handicapées et 5,9 p. 100 pour les minorités visibles. Ces chiffres seraient légèrement inférieurs à ceux qu'a cités le ministre. Encore une fois, je tiens à souligner que ces pourcentages sont artificiels jusqu'à un certain point.

M. Ménard: J'ai deux autres questions. Évidemment, je ne suis pas ici depuis très longtemps, mais si on me demandait spontanément dans quels secteurs est-ce que je crois qu'il peut y avoir des disproportions en termes de catégories représentées, je dirais spontanément - et je veux m'assurer que ça relève de votre responsabilité - le personnel des cafétérias. Est-ce que ça relève de votre responsabilité également?

M. Marleau: Si, si.

M. Ménard: Parmi les constables, il me semble qu'on y voit peu de femmes. Peut-être n'avez-vous pas fait un travail d'analyse exhaustif à cet égard, mais partagez-vous mon impression?

Et parmi les mesures de redressement à apporter aux services assujettis à la Loi sur l'équité en matière d'emploi, y aurait-il un effort accru à faire pour intégrer les personnes handicapées? Les personnes handicapées que j'ai vues me semblaient surtout appartenir au Service des messagers.

M. Marleau: Pour ce qui est du Service des messagers, les personnes handicapées que vous avez vues font partie d'un programme qui a été commencé en 1986, c'est-à-dire le programme de buddies, comme on l'appelle, en collaboration avec l'école secondaire Ridgemont.

Des personnes handicapées y sont recrutées en tant qu'étudiants. Ainsi, des messagers les prennent comme buddies pour la période scolaire afin de les former en milieu de travail. À la fin de l'année, ces personnes sont formées dans certains aspects du service de messagerie, etc. et cela fait partie de leur curriculum scolaire.

.1120

S'il vous semble y avoir une concentration d'handicapés du côté du Service des messagers, c'est dû au programme très spécifique qui existe à l'école secondaire Ridgemont. Mais encore une fois, vu que l'autoidentification est déficiente, il nous est difficile de vous donner des chiffres plus précis pour les personnes handicapées.

En lisant vos témoignages, j'ai remarqué qu'il y avait des personnes - je pense que c'estM. Telegdi - qui faisaient une distinction dans le processus d'autoidentification entre la personne qui postule un poste et qui a eu le poste; ce sont deux scénarios différents. Dans le premier cas, c'est peut-être avantageux de s'identifier; dans le second, il y a des personnes qui craignent peut-être de s'identifier dans le milieu de travail comme étant handicapées, même si ce n'est pas un handicap tellement sérieux. C'est pour cela qu'on a de la difficulté à vous donner une réponse précise.

Donc, si les personnes handicapées sont plus visibles à certains endroits, comme vous l'avez remarqué, c'est à cause du programme de Ridgemont qui est, à mon avis, un des meilleurs programmes que j'ai connu. La Chambre des communes a été la première à instaurer ce genre de programme et le président Fraser en a d'ailleurs fait rapport à ce comité lors de la dernière législature.

Pour ce qui est des constables, je pense que ce que vous affirmez est un fait. Mais on s'améliore par le biais du recrutement chaque fois que l'occasion se présente.

M. Ménard: Dites-vous bien que celles qui sont là ne passent pas inaperçues, pas à cause de ce qu'elles dégagent, mais à cause de leur présence. Tout le monde est très gentil. Quand j'ai été élu, j'étais même gêné de voir à quel point les gens sont à notre disposition. Ça devient même obséquieux, je dirais.

Il y a trois ou quatre femmes qui sont à l'entrée principale et qui, spontanément, vont vers les députés, leur parlent, entretiennent des relations qui sont vraiment extraordinaires. Mais s'il y avait des mesures correctives à apporter, soit dit entre nous, ce serait assurément du côté de la force constabulaires où les femmes et les personnes handicapées sont sous-représentées. Mais est-ce compatible avec les fonctions?

Ça m'amène à vous poser une dernière question. Parmi le personnel constabulaire, on constate qu'il y en a qui sont clairement identifiés comme constables alors que d'autres me semblent davantage apparentés à un service civil.

Je ne sais pas - peut-être mon imagination est un peu trop fertile pour faire des comparaisons avec le film Sous la ligne de feu où on voit des gens qui se promènent aux alentours du premier ministre - mais est-ce que les gens qui sont liés à la protection des parlementaires ou du premier ministre relèvent de vos services ou de la GRC?

M. Marleau: Ils relèvent du Service de la sécurité de la Chambre. C'est un corps de neuf employés qui sont en civil et qui sont formés protéger le premier ministre lorsqu'il est à l'intérieur de l'enceinte. Ils sont également déployés autour de l'enveloppe, ainsi appelée en termes de sécurité, de la Chambre elle-même. Il y en a toujours au moins un à l'entrée principale et au moins un à la porte de derrière. Je ne veux pas entrer dans les détails. Depuis plusieurs années, les femmes sont représentées dans cette équipe.

M. Ménard: Ah oui?

M. Marleau: Elles le sont actuellement et ce, depuis au moins cinq ou six ans.

M. Ménard: On reviendra pour le deuxième tour. Merci.

[Traduction]

M. Dromisky (Thunder Bay - Atikokan): J'ai une liste de préoccupations élémentaires. Je regarde le document qu'on nous a remis. C'est celui qu'on étudie en ce moment. Je trouve que la définition de «Chambre» est critique. Qu'entendons-nous exactement par «Chambre»? Quels sont les paramètres? Je songe notamment à l'accès pour les personnes handicapées. De quels immeubles s'agit-il? Jusqu'où la «Chambre» s'étend-t-elle au-delà de la Colline? Un demi-mille? Combien d'immeubles sont en cause?

Nous savons bien sûr que le nombre d'employés varient d'une année à l'autre. Mais je trouve qu'il est essentiel d'avoir des renseignements de ce genre, simplement parce que même si nous ne voulons pas parler de quotas, c'est une affaire de chiffres. Il me semble qu'il serait essentiel d'avoir une annexe quelconque à ce document. Je crois que ce genre de renseignement devrait accompagner l'énoncé de politique. Autrement, c'est très difficile pour quiconque d'étudier la question ou de se prononcer sur l'efficacité de ce programme en l'absence de renseignements supplémentaires de la personne qui porte le titre de chef.

.1125

D'ailleurs, qui est le chef? Je trouve qu'il faudrait une définition, une description des responsabilités et fonctions du chef de la planification des ressources humaines.

M. Marleau: Me posez-vous une question, monsieur Dromisky, ou bien faites-vous une recommandation?

M. Dromisky: C'est une sorte de recommandation. J'ignore si vous avez un autre document à nous présenter, qui constituerait une sorte d'annexe à celui-ci, et qui répondrait à ces questions.

M. Marleau: Non.

M. Dromisky: Je trouve que ça devrait être fourni et qu'on ne devrait pas demander aux députés, au Parlement et aux membres du comité de fouiller partout pour obtenir ce genre de renseignement.

M. Marleau: Nous pouvons assurément réunir des renseignements de ce genre à votre intention.

La Chambre des communes occupe actuellement cinq immeubles différents dans l'ensemble qu'on appelle la Cité parlementaire, de l'Édifice Confédération jusqu'à l'Édifice de l'Est, et de l'Édifice Wellington jusqu'à l'Édifice La Promenade, dans lequel nous nous trouvons actuellement. La plupart des immeubles, comme M. Sabourin le disait tout à l'heure, ont été modifiés récemment pour en faciliter l'accès aux personnes handicapées.

Vous devez vous rendre compte que nous sommes locataires dans ces immeubles. C'est un programme des Travaux publics. Tous les aspects de ces immeubles qui pouvaient constituer un obstacle pour les personnes handicapées ont fait l'objet d'un examen dans le cadre d'un programme global. Je crois qu'à l'heure actuelle, la plupart des immeubles sont complets de ce point de vue, sauf peut-être quelques petits projets destinés à les rendre totalement accessibles aux personnes handicapées.

Pour ce qui est du nombre d'employés qui sont handicapés, comme j'essayais de le dire àM. Ménard, le programme d'auto-identification n'a pas été tellement couronné de succès parce qu'il c'est volontaire.

M. Dromisky: En effet.

M. Marleau: Je dois admettre que les efforts ont peut-être laissé quelque peu à désirer dans ce domaine. Je pense que, la prochaine fois, nous devrons déployer beaucoup plus d'efforts pour expliquer aux employés pourquoi ces données sont importantes pour eux-mêmes et pas seulement pour l'employeur, puisqu'il s'agit d'être juste et équitable dans le recrutement, la promotion et l'accès. Je pense donc que nous avons beaucoup de travail à faire pour convaincre les employés de l'utilité d'un tel programme.

M. Dromisky: Vous venez d'apporter une précision qui m'éclaire beaucoup. J'ai toujours cru que la Colline parlementaire s'étendait physiquement à tout endroit où se trouvait un député au Parlement ou un ministre. Autrement dit, le bureau central du ministre de l'Agriculture se trouve à la Ferme expérimentale centrale.

M. Marleau: En effet.

M. Dromisky: C'est un immense complexe. On ne le considère pas comme faisant partie de la Colline?

M. Marleau: Non. Le rôle du ministre à titre de membre du Gouvernement est indépendant de son rôle de député au Parlement. La Cité parlementaire comprend les locaux où sont logés les députés et où ont lieu les activités des comités, et tous ces locaux relèvent du président de la Chambre pour ce qui est de la sécurité, de l'accès et de l'examen, si l'on peut dire. Mais les immeubles eux-mêmes sont des actifs des Travaux publics et nous sommes considérés comme locataires.

M. Strahl (Fraser Valley-Est): Comme vous le savez, la Chambre des communes n'est pas assujettie au projet de loi C-64. Avez-vous demandé à ne pas être assujetti ou bien est-ce simplement le fruit du hasard?

M. Marleau: La question de savoir si la Chambre est assujettie ou non au projet de loi est une question de politique. J'ose dire que c'est une question dont il y aurait lieu de discuter conjointement au comité ou au ministère et au Bureau de la régie interne.

Je crois qu'aujourd'hui, contrairement à ce qui était le cas il y a un certain temps, au début de ma carrière, on comprend mieux au Gouvernement, dans la Fonction publique, le rôle du Parlement et la distinction qu'il faut faire entre l'exécutif et le législatif.

Si la Chambre des communes était assujettie à ce projet de loi et aux dispositions existantes en matière de contrôle, de rapports et de sanctions, l'administration de la Chambre, c'est-à-dire le président de la Chambre et le Bureau de la régie interne seraient alors susceptibles de faire l'objet d'un examen par la Commission canadienne des droits de la personne.

.1130

La Chambre a toujours voulu protéger son autonomie afin de contrôler ses propres affaires internes. Cela s'explique par d'excellentes raisons constitutionnelles et historiques: à savoir que la Chambre ne devrait pas être placée sous l'emprise de l'une de ses créations, si lón peut dire, parce que l'autorité du Parlement est souveraine. Toutefois, l'aspect politique, c'est que la Chambre, sur le plan des affaires administratives, devrait se conduire en conformité avec ce qu'elle exige de la part des autres éléments de la société. Il y a donc un dilemme sur le plan politique.

Actuellement la Chambre n'est pas assujettie à la Loi sur les droits de la personne et notre conseiller juridique a toujours soutenu catégoriquement que c'est seulement lorsque la Chambre est expressément et explicitement visée dans un texte de loi qu'elle est pleinement assujettie à la loi en question, comme c'est le cas pour la Loi sur les langues officielles, par exemple.

M. Strahl: Dans le cas du programme qui nous occupe, qu'arrive-t-il si quelqu'un ou un groupe quelconque décidait qu'il y a discrimination ou qu'il y a un obstacle systémique et si ces personnes estimaient que vous ne faites rien pour y remédier?

M. Marleau: Par exemple, il y a eu des plaintes qui ont été portées à la Commission des droits de la personne et, si la Chambre, en tant qu'entité constitutionnelle, ne reconnaît nécessairement qu'elle est assujettie à la loi actuelle, dans tous les cas, nous nous sommes efforcés de coopérer avec cette institution, cet organisme, ou encore avec l'auteur du grief afin d'essayer de résoudre le problème. Il n'y a aucune avantage pour une institution comme la Chambre des Communes d'écarter du revers de la main une plainte de ce genre. Dans la plupart des cas, nous avons résolu la question à la satisfaction du plaignant, ou tout au moins nous avons obtenu qu'il comprenne la situation, toujours dans les limites du raisonnable.

M. Strahl: Cette politique représente à peu près ce que je ferais moi-même si j'avais moi-même à établir une politique en la matière. Beaucoup de gens voudraient inclure la Chambre des Communes, affirmant qu'elle devrait être un employeur modèle, ce qu'elle est probablement déjà, je n'ai aucune raison d'en douter. Et cela, sans même parler de ce que vous devrez faire si vous êtes assujetti au projet de loi C-64.

Vous avez évoqué les données recueillies grâce au programme d'auto-identification, qui ne sont guère impressionnantes puisque le taux de réponse est de seulement 22 p. 100. De toute manière, cela soulève la question de savoir dans quelle mesure c'est volontaire. En effet, on dit aux gestionnaires que c'est un programme volontaire et qu'ils font mieux d'avoir de bons résultats et de veiller à ce que ce soit fait et volontairement. Je n'aime pas beaucoup cela.

Cela dit, vous dites que les données ainsi recueillies permettent a la Chambre de comparer ses effectifs à l'ensemble de la population active canadienne. Essayez-vous de vous conformer à l'ensemble de la population canadienne ou plutôt à la population active de votre secteur d'embauche, qui a à peu près 50 milles de diamètre? Essayez-vous de refléter la composition de la population active dans ce secteur géographique ou dans l'ensemble du Canada?

M. Marleau: Premièrement, la politique que vous avez sous les yeux a été adoptée par le bureau de régie interne en 1992 et représente la somme de tout ce qui a été fait pour répondre aux exigences croissantes de la société en matière d'équité. Ce n'est donc pas un succédané; cela est antérieur au projet de loi C-64. Mais vous avez raison de dire que si le projet de loi C-64 s'appliquait à la Chambre, nous aurions énormément de travail à faire en sus de ce qui est énoncé dans la politique.

Nous avons déposé un rapport annuel au Bureau de régie interne sur notre performance en la comparant aux exigences de la politique à certains égards, en signalant les progrès qui ont été accomplis, les progrès qui se poursuivent et les secteurs où il serait souhaitable de progresser. Donc, le bureau de régie interne s'est penché sur la question. La dernière fois, c'était en janvier 1994. Nous n'avons pas fait de rapport cette année à cause du programme d'encouragement à la retraite anticipée qui battait son plein à l'époque. Comme vous le savez, quand on opère des compressions d'effectifs, cela a des répercussions considérables sur les proportions et nous n'avions pas les résultats. Mais nous ferons un autre rapport au bureau dans le cours de l'année 1995.

.1135

Pour ce qui est de notre stratégie d'embauche, si je peux me permettre cette expression, nous n'avons certainement pas de quota. Deux choses entrent en jeu pour la restructuration de la Chambre des communes, et je peux vous les expliquer en me servant de n'analogie de trois tiers.

Évidemment, il y aura un plus grand nombre de personnes de la Région de la capitale nationale qui vont poser leur candidature ou être embauchés pour travailler à Ottawa et sur la colline du Parlement, et cela est un premier facteur. Ensuite, nous adhérons aux normes stratégiques auxquelles M. Sabourin a faites allusion. En effet, dans le cadre de notre processus de dotation, nous offrons l'accès à des épreuves spéciales au besoin. Ainsi, nous prévoyons des interprètes gestuels pour les entrevues de personnes malentendantes. Tous ces services sont offerts aux personnes qui souhaitent les obtenir et en font la demande.

Deuxièmement, même si nous n'appliquons pas de quotas particuliers comme je l'ai dit tout à l'heure, nous essayons de conserver dans notre répertoire le plus grand nombre possible de candidats de l'extérieur de la région de la Capitale nationale qui souhaitent trouver un emploi ici.

Dans le programme des pages et des guides - et c'est là le troisième volet donc dans notre programme jeunesse - , nous recrutons les pages et les guides dans toutes les régions du pays. Nous faisons de la publicité partout au pays et nous faisons aussi des entrevues partout au pays. Je ne pourrais dire qu'il existe un quota provincial, mais au fil des années, on note une moyenne lorsqu'il y a un certain nombre de représentants du Manitoba, un certain nombre de l'Ontario... Cela est dû en grande partie à la population. Nous n'avons pas tellement de représentants des Territoires du Nord-Ouest, mais nous faisons des efforts particuliers pour essayer d'en trouver.

M. Strahl: Voici ce que je veux savoir. Lorsque vous dites que vous essayer de comparer votre propre main-d'oeuvre à la main-d'oeuvre canadienne pour voir si la Chambre est représentative, vous posez-vous la question suivante: «Dans cette région, la région de la Capitale nationale, là où j'embauche le plus, cela représente à peu près...?» Je n'ai pas les statistiques, mais il semble que ce soit 10 p. 100 pour les minorités visibles. Je n'ai pas de données précises, mais c'est environ 50 p. 100 de femmes, un nombre plus ou moins égal de francophones et d'anglophones, des autochtones. Essayez-vous de donner une idée juste de la région?

Jusqu'où poussez-vous vos efforts pour essayer de réfléter la main-d'oeuvre canadienne? Il y a environ 1 500 employés à la Chambre. Essayez-vous d'embaucher environ 20 personnes d'origine chinoise, ou vous dites-vous tout simplement que c'est sans espoir et que vous allez faire du mieux que vous pouvez en embauchant dans la région, mais que ce ne sera pas...? Fait intéressant, je ne crois pas avoir vu quiconque d'origine orientale.

Mme Catterall: [Inaudible - Éditeur]...pas exactement près de la colline du Parlement.

M. Strahl: Très peu. Comme je suis de la côte ouest, je suis habitué à voir des gens d'origine orientale en grand nombre au gouvernement fédéral et dans tous les milieux de travail. Je ne parle pas de la population active en général, de la liste de la Chambre. Je ne vois pas un grand nombre de personnes de cette origine.

Est-ce que c'est bon, mauvais ou neutre, ou essayez-vous de refléter cela? Dans quelle mesure essayez-vous de donner l'image de la population active canadienne?

M. Marleau: Nous recrutons selon le principe du mérite. Nous faisons en sorte que nos emplois soient le plus accessible. Nous n'avons pas de stratégie particulière pour recruter dans un groupe ethnique en particulier ou dans une région du pays.

Si je me souviens bien, au milieu des années 80, nous avons essuyé une critique du Commissaire aux langues officielles car il y avait une sureprésentation des francophones. Je ne sais plus quels sont les chiffres exacts, mais je crois qu'en moyenne il y avait 55 p. 100 ou 58 p. 100 de francophones. Nous avons prêté attention à cette critique et c'est ainsi que nous avons atteint un meilleur équilibre. Mais la situation est aussi plus équilibrée parce qu'il y a davantage de personnes bilingues dans les autres groupes. Que ce soit au niveau local ou national, il y a d'avantage de personnes dans les programmes d'immersion un peu partout au pays. Par conséquent, dans les cas où le bilinguisme est exigé, on peut choisir à partir d'un bassin de candidats plus vaste. C'est une amélioration.

Cela dit, nous n'avons pas de stratégie particulière en ce qui a trait à des normes nationales.

M. Strahl: Dans cette brochure, on mentionne que vous essayez d'être représentatif de la population active canadienne, et je ne comprends pas trop ce que cela veut dire. Si vous ne trouvez pas suffisamment de personnes d'une certaine origine ethnique ou des minorités visibles dans la Capitale régionale, lancer vous une campagne de publicité plus vaste ou vous dites-vous que le poste est disponible si par hasard quelqu'un, ailleurs, en entend parler? Quelles mesures prenez-vous pour vous assurer de représenter l'ensemble de la population?

.1140

Premièrement, je ne sais pas encore ce que vous représentez. J'ignore si vous représentez la population active typique de la région de la Capitale nationale d'Ottawa ou la population active de l'ensemble du Canada. Si cette dernière hypothèse est la bonne, comment vous y premez-vous pour recruter? Vous avez mentionné une chose ou deux, notamment que vous communiquez avec les collectivités autochtones, mais c'est dans la région ici. Si vous regardez la chose dans une perspective canadienne, je pense que la représentation à l'échelle du Canada diffère de celle de la région.

M. Marleau: Il faudrait que j'analyse les statistiques pour vous donner une réponse étoffée à ce sujet. Honnêtement, j'ignore comment la population active de la région de la capitale nationale se compare à celle de la population active nationale.

Tout ce que je peux vous dire, c'est que nous avons une approche dynamique. Si je prends l'exemple du programme des pages, dans nos brochures publicitaires et dans nos portfolios, nous avons des photos d'autochtones ou de représentants de minorités visibles de sorte que l'image des personnes que nous recherchons est...

M. Strahl: Et cela se fait à l'échelle du Canada?

M. Marleau: Oui, à l'échelle du Canada.

M. Sabourin: Je peux vous dire que dans la foulée de la dernière campagne de recrutement pour les guides et les pages, qui vient tout juste de se terminer, nous avons embauché une personne malvoyante et trois ou quatre représentants de minorités visibles. Encore une fois, je vous communique cela sous toutes réserves étant donné que nous n'exigeons pas l'auto-identification dans le cadre du recrutement.

M. Wood: En 1990 ou 1992, l'occasion de l'examen précédent de la loi concernant l'équité en matière d'emploi, on avait réclamé son application au Parlement. À mon sens, nous sommes en présence d'une situation unique qui met en cause les principes bien établis de l'indépendance parlementaire. Comme vous le savez, les employés de la Chambre tombent sous le coup d'une loi spéciale, la Loi sur les relations de travail au Parlement et, à ma connaissance, ce ne sont pas des employés du Conseil du Trésor. Évidemment, la Bibliothèque du Parlement doit rendre compte au Parlement. La Chambre et le Sénat sont tous deux des organes autonomes qui gèrent leurs propres affaires en matière de ressources humaines et qui font rapport à leur propre bureau de régie interne.

Pensez-vous que le fait d'être assujettis au projet de loi C-64 pourrait rogner l'indépendance traditionnelle du Parlement pour ce qui est de la protection de ses affaires internes? En outre, pouvez-vous me donner des exemples où l'indépendance du Parlement pourrait être compromise si ces employés relevaient de la Loi?

M. Marleau: Je peux vous répondre en me fondant sur une situation hypothétique. Il ne fait aucun doute que chaque fois que la Chambre des communes se soumet à un processus d'examen elle perd un peu de son pouvoir. Elle pourrait se retrouver devant la Cour fédérale dans un conflit mettant en cause une pratique particulière. Les choses se compliquent lorsque l'on commence à assujettir un organe législatif à un processus judiciaire. Il fut un temps - mais ce n'est plus tellement le cas aujourd'hui - où le Parlement était le plus haut tribunal du pays. D'ailleurs, en Grande-Bretagne, la Chambre des Lords continue de jouer le rôle de tribunal.

Voilà donc le principe global, ce qui m'amène à dire qu'effectivement cela pourrait miner l'autonomie du Parlement. Je suppose qu'on pourrait imaginer un scénario apocalyptique selon lequel la division des comités et le système des comités dans son ensemble pourraient être paralysés par une série de plaintes qui feraient l'objet d'un examen et d'une enquête de la part d'un organisme de l'extérieur. Ainsi, le processus législatif pourrait se trouver ralenti, sinon totalement bloqués. Je n'ai pas l'intention de nommer qui que ce soit dans le prochain cas dont je vais vous parler. Nous avons toujours eu une relation de coopération avec la Commission des droits de la personne mais la commission a un certain point de vue, qui n'est pas identique au nôtre, sur une partie de la loi actuelle et, je crois savoir, sur d'autres procédures concernant les prévisions budgétaires ainsi que sur la mesure à l'étude. Je dois donc vous répondre qu'effectivement il pourrait y avoir une érosion du pouvoir du Parlement.

Je vous renvoie à des cas survenus au Commonwealth, particulièrement en Australie, où les législateurs ont été forcés par les tribunaux à inclure leurs privilèges dans une loi. Résultat, c'est que l'on conteste devant les tribunaux les privilèges du Parlement, ce qui englobe la liberté d'expression et la liberté d'accès, entre autres. Il y a donc un certain risque.

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Il existe des mécanismes de rechange que la Chambre peut envisager et qui lui permettraient de conserver se main-mise sur ses affaires internes tout en respectant l'esprit de quelque mesure législative que ce soit. Ainsi, on pourrait envisager que la Chambre respecte l'esprit de cette mesure mais que sa gestion relève du Bureau de régie interne. Un rapport annuel ou bi-annuel pourrait être présenté à la Chambre et renvoyé à un comité. Ainsi le Parlement demeurerait maître d'oeuvre, au lieu de tomber sous le coup d'un organe de l'extérieur. Ce que l'on considère relever de la politique interne de la Chambre se retrouverait dans un contexte de débat public.

À mon avis, ce genre de mécanisme est plus conforme aux privilèges constitutionnels traditionnels de la Chambre, outre qu'ils permettent un examen périodique de certaines politiques, de Parlement à Parlement.

M. Wood: Je peux envisager que l'équité en matière d'emploi puisse s'appliquer sans problème à la Bibliothèque du Parlement, et peut-être à l'administration de la Chambre et du Sénat, mais je vois mal comment on pourrait l'appliquer au personnel des députés et des sénateurs. Je me demandais comme ça, spontanément, si vous n'auriez pas une idée quant à une méthode ou une formule qui nous permettrait d'appliquer la loi, si elle est adoptée, à ce groupe d'employés très nombreux.

M. Marleau: À l'heure actuelle, en vertu de la Loi sur les relations de travail au Parlement, chaque député est un employeur indépendant. En conséquence, les dispositions de la mesure proposée ne seraient pas visées par la loi, étant donné que ce sont les employeurs qui ont 100 personnes ou plus à leurs services qui seraient touchés. En ce sens, les députés ne tomberaient pas sous le coup de la loi. L'administration de la Chambre compte 1 471 personnes environ. Il n'y aurait donc pas de problème dans ce cas. Cependant, au fil des années, des conflits pourraient survenir à mesure que la situation évolue. Des services de recherche des caucus de l'Opposition pourraient en venir à compter une centaine de personnes n'importe quand.

M. Strahl: Vraiment?

M. Marleau: Oui. Il pourait arriver - c'est un risque - que le caucus de recherche de l'Opposition officielle soit visé mais que celui du Parti réformiste, si c'est le tiers parti ne le soit pas puisque son caucus de recherche est plus petit. Je pense qu'il faut être prudent pour ce qui est de ces chiffres et envisager également qu'il faut faire preuve d'équité dans l'application des règles.

M. Wood: Je suis d'accord avec ce que vous dites. Il est possible que la loi puisse s'appliquer au Parlement par l'entremise de.... Est-il possible de l'appliquer, comme vous venez de le mentionner, par l'entremise des partis politiques? C'est une question hypothétique, bien sûr, mais nous avons 177 députés et le Parti libéral compte probablement 900 employés. Que se passerait-il si le whip libéral était responsable de tout cela? C'est le genre de choses qui pourraient se produire.

M. Marleau: Même si je travaille sur la Colline depuis longtemps, je n'ai jamais vraiment étudié les pratiques d'emploi des partis politiques. En conséquence, je ne me sens pas vraiment compétent pour....

M. Wood: Tout le monde panique.

Mme Catterall: Vous avez parlé d'une enquête d'auto-identification. Qu'avez-vous dit au juste à ce sujet, monsieur le greffier? Avez-vous dit qu'il s'agissait de 22 p. 100....

M. Marleau: Oui. Le taux de réponses a été à peine 23 p. 100.

Mme Catterall: Seulement 23 p. 100 de réponses de tout votre personnel.

M. Marleau: Oui.

Mme Catterall: Avez-vous une idée du nombre de personnes qui se sont déclarées d'elles-mêmes membres de ces groupes défavorisés?

M. Marleau: Brièvement, pour ce qui est des autochtones, nous avons eu 14 cas....

Mme Catterall: J'aimerais avoir des pourcentages pour pouvoir faire certaines comparaisons. Est-ce que 90 p. 100 ou 10 p. 100 des gens se sont auto-identifiés?

M. Marleau: Il s'agit d'une auto-identification à 100 p. 100 des 23 p. 100.

Mme Catterall: Autrement, 23 p. 100 de vos employés ont choisi de s'identifier comme membres de l'un des groupes désavantagés. Mais les femmes ne sont pas incluses de sorte que je présume que c'est un pourcentage assez élevé.

M. Marleau: À l'époque où nous avons effectué l'enquête, en 1994, la Colline comptait 1 700 employés, dont 357 ont répondu. Cela représente 22 p. 100. Sur ces 357 personnes, 14 se sont identifiées comme autochtones, ce qui représente 3,9 p. 100 des répondants. C'est un pourcentage beaucoup plus petit sur les 1 700.

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Mme Catterall: Non, non, ce n'est pas ce que j'essaie de savoir. Vous semblez préoccupé par le fait que seulement 23 p. 100 se sont auto-identifiés. Cela m'apparaît comme un taux d'auto-identification très élevé.

M. Sabourin: Non, 23 p. 100 des employés ne se sont pas auto-identifiés, 23 p. 100 ont renvoyé les questionnaires. Voilà ce que dit M. Marleau.

M. Marleau: Ont répondu.

M. Sabourin: Oui.

Mme Catterall: De ces 357 personnes, combien se sont déclarées d'elles-mêmes membres des groupes?

M. Marleau: Un peu moins de 50 personnes entrent dans l'une des trois catégories de personnes handicapées, autochtones ou membres d'une minorité visible.

Mme Catterall: Qu'avez-vous fait pour essayer d'augmenter le taux de réponses? Savez-vous pourquoi les gens n'ont pas répondu?

M. Marleau: Je suis d'avis que l'une des raisons a été le marketing du questionnaire. C'était quelque chose de nouveau à la Chambre. Je pense qu'il est plus difficile d'obtenir des gens qu'ils s'auto-identifient une fois qu'ils ont un emploi comparativement à avant qu'ils en décrochent un. Le marketing est une raison et la peur en est une autre.

Mme Catterall: Quand l'enquête a-t-elle eu lieu?

M. Marleau: En février 1994, il y a un peu plus d'un an.

Je pense que si on répétait l'expérience, la peur serait moindre. Les gens se demandant ce que l'on va faire de ces statistiques, ce qui va leur arriver et dans quel dossier elles vont échouer.

Mme Catterall: Ne leur a-t-on pas expliqué tout cela avant de commencer l'enquête?

M. Marleau: Oui, les explications accompagnaient le questionnaire, mais comme je l'ai dit, lorsqu'on lance un programme comme celui-là on suscite pas mal de crainte, surtout qu'en l'occurrence, cela n'était pas exigé par la loi.

M. Sabourin: Vous avez un exemplaire du questionnaire avec la politique. Nous sommes maintenant en train de passer en revue ce questionnaire.

Mme Catterall: Est-ce là le questionnaire qui accompagne une demande d'emploi?

M. Sabourin: Non c'est le questionnaire qu'on a envoyé aux employés à des fins d'auto-identification.

Mme Catterall: Je peux comprendre que cela pose certains problèmes alors puisque nulle part on ne dit qu'il est confidentiel.

M. Sabourin: Non, mais le questionnaire était accompagné de notes dans lesquelles on expliquait cela tout clairement aux employés.

Pour reprendre ce que M. Marleau disait tout à l'heure, nous aurions eu intérêt à lancer une campagne de sensibilisation dans laquelle on n'aurait pas demandé aux employés de répondre à quoi que ce soit. Cette campagne les aurait sensibilisés aux programmes et aux avantages de l'auto-identification, ainsi qu'au soutien que nous pouvons offrir. Nous espérons faire un effort en ce sens au cours de la Semaine nationale pour l'intégration des personnes handicapées, à la fin de mai.

Mme Catterall: Mais cela concerne précisément les personnes handicapées.

M. Sabourin: C'est vrai, mais dans le contexte d'un programme éducatif comme celui-là, nous pensons qu'il est nécessaire de toucher les gestionnaires pour qu'ils encouragent leurs employés à s'auto-identifier - sans leur tordre le bras, puisque c'est une question délicate.

On m'a parlé d'une entreprise privée qui, dans le cadre d'une enquête sur ce sujet, avait essentiellement demandé à tous les employés de répondre. On n'avait aucunement mis l'accent sur l'auto-identification mais on avait demandé à tous les employés - au nombre de 800 environ - de renvoyer le questionnaire à tout le moins. Si ces derniers mentionnaient ne pas vouloir s'auto-identifier, cela ne posait pas de problème.

Voilà le genre d'options que nous envisageons. Et il y en a d'autres, bien sûr. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous collaborons avec certains fonctionnaires du Conseil du Trésor pour réviser notre questionnaire et le rendre plus attrayant.

Mme Catterall: Puisque nous parlons information, je voudrais savoir quel genre de formation ont reçu les personnes chargées de mener les entrevues, de recruter, d'embaucher et de faire les promotions afin de s'acquitter de ces tâches sans privilégier un sexe ou un autre ou une culture ou une autre?

M. Marleau: Il y a quelques années, lorsqu'a été adoptée la nouvelle Loi sur l'équité en matière d'emploi, nos agents des ressources humaines ont été en contact avec le Conseil du Trésor. Ils ont assisté à des séances d'information et de formation offertes par ce ministère au sujet de la mise en oeuvre de la nouvelle Loi sur l'équité. Tous nos agents de dotation ont été formés de cette façon et comme M. Sabourin l'a mentionné, ils jouent un peu le rôle de chien de garde du processus de dotation pour s'assurer que ces éléments, particulièrement l'équité et le principe du mérite sont respectés.

Mme Catterall: Donc toutes les personnes qui s'occupent de dotation ont reçu cette formation? J'espère que c'était plus récemment qu'il y a huit ans?

M. Sabourin: Ce n'était rien d'officiel... Aucun certificat n'a été décerné pour ce genre de chose.

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À l'heure actuelle, nous essayons de faire des efforts de façon constante, et nous ne traitons pas nécessairement uniquement avec le Conseil du Trésor, mais aussi avec des organisations du Québec ou de l'Ontario, puisqu'elle sont plus près. C'est le genre de tribunes auxquelles participent nos bureaux et il y a des échanges d'information.

Je ne pense pas que nous ayons organisé des séances de formation formelles pour susciter cette conscientisation, si vous voulez. C'est probablement une très bonne suggestion. Je pense que nous devrions prendre ce genre d'initiative.

Mme Catterall: Vous avez mentionné que la Chambre est assujettie à la Loi sur les langues officielles, par exemple. Y a-t-il d'autres lois auxquelles elle est assujettie?

M. Marleau: Il y avait la Loi anti-tabagisme, une mesure d'initiative parlementaire qui date de 1984 environ. Je pense que cette loi et la Loi sur les langues officielles sont les deux principales. Au cours de la dernière législature, on a procédé à un examen de la Loi sur les langues officielles. Le gel des salaires nous touche également.

Mme Catterall: J'estime qu'avec près de 1 500 employés vous êtes l'un des plus gros employeurs, comparativement aux autres du secteur privé susceptibles d'être touchés par cette mesure. Croyez-vous que le fait que la Chambre soit incluse risque de poser de gros problèmes? Il est manifeste que certains d'entre nous sommes convaincus de la nécessité de donner le bon exemple et de ne pas imposer à autrui des lois que nous ne sommes pas disposés à accepter nous-mêmes, surtout lorsqu'il s'agit de questions aussi fondamentales que les droits de la personne. Envisagez-vous des problèmes concrets?

M. Marleau: Pour ce qui est de respecter et d'appliquer les termes de la loi, je ne vois pas de gros problèmes dans la perspective de l'administration ou du personnel. Cela signifie que nous devrions faire plus qu'auparavant, respecter certains délais et produire certains rapports. En tant que sous-ministre, cet aspect de la chose ne me cause aucune difficulté. Il n'y aurait pas de problèmes.

Pour ce qui est de la question plus vaste de l'autonomie du Parlement, compte tenu de ce qui s'est produit dans d'autres pays, comme l'Australie, cela pourrait donner naissance à des problèmes beaucoup plus complexes mettant en cause le rôle des tribunaux. Le Parlement ou la Chambre des communes pourrait être à la merci de décisions des tribunaux à la suite de contestations menées par des organismes tiers parties. Ces organismes pourraient émaner du processus administratif de réglementation et être en mesure de miner la vocation du Parlement d'adopter des lois sur les subsides.

Mme Catterall: Cela touche l'administration, pas le Parlement.

M. Marleau: Si les services de soutien sont paralysés.... L'autre argument, c'est que le Parlement a toujours souhaité préserver le contrôle qu'il exerce sur ceux qu'ils servent. C'est d'ailleurs pour cela que nous avons une loi particulière, la Loi sur les relations de travail au Parlement. Cette loi interdit la grève et accorde un privilège parlementaire à certains membres du personnel, comme le greffier et les greffiers de la table, notamment pour ce qui est de l'exemption de la fonction de juré. Il y a donc tout un tas de choses comme celles-là qui en pratique font en sorte que le Parlement a les ressources voulues pour s'acquitter de ses fonctions. S'il est possible, dans le cadre du processus administratif de réglementation, de paralyser le Parlement en paralysant les services de soutien administratif, c'est là que cela peut causer des difficultés.

Mme Catterall: Croyez-vous que l'équité en matière d'emploi puisse présenter une telle menace?

M. Marleau: Personnellement, je ne vois aucune menace dans l'équité en matière d'emploi. Tout ce que je puis dire, c'est que je ne peux prédire comment se comporteront des organismes extérieurs.

Me Diane Davidson (conseillère juridique, Chambre des communes): J'aimerais ajouter que si cette mesure s'appliquait à la Chambre, si vous décidiez que tel soit le cas, la capacité du Président de contrôler l'accès à l'enceinte parlementaire serait limitée. Les députés pourraient s'attendre à ce que des agents d'application accèdent aux édifices, mènent des enquêtes dans leurs bureaux et fouillent dans leurs affaires. Cela vaudrait non seulement pour les députés mais aussi pour les administrateurs de la Chambre.

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Mme Catterall: Un instant. Cela ne s'applique pas à moi, en tant que députée, à moins que je n'aie 100 employés à mon service, et vous savez fort bien que je n'ai pas le budget pour cela.

Me Davidson: Si l'on regarde le libellé de la loi, je pense que l'agent d'application aurait le pouvoir de décider ou chercher l'information qu'il juge nécessaire pour exercer son contrôle.

Mme Catterall: Dans ce cas, il faudra sans doute prendre des dispositions spéciales.

Me Davidson: C'est certainement une chose que le comité devra envisager, s'il décide...

Mme Catterall: C'est un peu comme si vous me disiez que si je décide de faire une vérification chez Chrysler, je peux aussi aller dans les bureaux de ses clients pour contrôler leur observation de la Loi concernant l'équité en matière d'emploi.

Me Davidson: La loi stipule que la Commission des droits de la personne devra effectuer un contrôle d'application, de sorte que cela pourrait se faire ici sur la Colline du Parlement si la Chambre était visée.

M. Marleau: Madame Catterall, au sein de l'administration, la Division des comités est un bon exemple car c'est elle qui s'occupe de la procédure, du contrôle et de la gestion en ce qui a trait aux comités. Le Bureau du contrôleur serait un autre exemple car c'est de lui que relève la majeure partie de l'équipement prévu dans le budget des opérations des députés. C'est ainsi que des interventions dans ce genre de domaine qui sont essentiellement du ressort de l'administration qui pourrait déborder.

Mme Catterall: Monsieur le président, il me semble que si nous voulons prendre une décision raisonnable dans ce dossier, il nous faudrait demander des conseils au greffier quant aux dispositions qui peuvent s'avérer nécessaires, que ce soit sur le plan de la législation ou sur celui de la réglementation.

Le président: À moins que le greffier n'estime qu'on lui demande de se compromettre.

M. Marleau: Non.

Mme Catterall: Nous ne lui demandons pas de prendre la décision, mais simplement de nous donner les renseignements voulus pour que nous la prenions.

Le président: Je viens tout juste de dire la même chose en blaguant.

Le président voudrait poser une ou deux questions et ensuite je redonnerai la parole àM. Ménard.

Je voudrais revenir sur le fait que d'une part nous voudrons respecter l'esprit de la mesure, si elle est adoptée, et parallèlement préserver l'indépendance du Parlement. Vous avez pratiquement recommandé de renvoyer à un comité permanent de la Chambre le rapport qui sera terminé à la fin de l'année. Si notre comité optait pour cette voie, quel comité de la Chambre serait le plus apte à s'occuper de ce genre d'examen?

M. Marleau: Permettez-moi une nuance. Je faisais allusion à la possibilité d'implanter un processus parallèle pour la Chambre - et je pense d'ailleurs que c'était là aussi l'idée deMme Catterall - au lieu de vous faire une recommandation. Si, au terme de la loi, le Bureau de régie interne était tenu de respecter les mécanismes de rapport prévu dans la mesure et de déposer un document comme celui-là dans des délais prescrits, document qui serait automatiquement renvoyé à un comité, comme on le fait souvent à la suite d'un grand nombre d'ordres de renvoi, il pourrait être confié au comité de votre choix. Ce pourrait être le comité de la Procédure et des affaires de la Chambre, de qui relève actuellement en vertu du règlement toutes les questions administratives dont la Chambre est saisie au sujet de son propre mandat. Mais il ne serait certes pas inconvenant, au sujet de l'équité en matière d'emploi de renvoyer ce rapport au Comité des droits de la personne.

Cela serait plus conforme au mandat actuel du comité dont relève l'administration de la Chambre, mais le président a choisi de présenter son rapport annuel sur la semaine de sensibilisation aux personnes handicapées à notre comité et non pas à celui de l'administration de la Chambre. Par conséquent, ce ne serait pas tout à fait illogique.

Le président: Mais aux fins du compte-rendu, nous voudrions obtenir des précisions au sujet de la composition du Bureau de régie interne et savoir comment ses membres y sont nommés. À quelle fréquence peuvent-ils être remplacés?

M. Marleau: En vertu de la Loi sur le Parlement du Canada, le Bureau est composé du président et du vice-président, qui en sont membres d'office. Il y a aussi quatre députés ministériels, dont deux doivent être membres du Cabinet et deux qui sont nommés par le caucus; ou, si vous voulez, deux qui sont nommés par le Premier ministre et le Gouverneur en conseil et deux par le Caucus ministériel. Deux autres sont nommés par le Caucus de l'Opposition officielle, il y a aussi un représentant du tiers parti.

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Le Bureau de régie interne se compose de neuf personnes. Les trois grands partis de la Chambre y sont représentés, et il y a aussi deux conseillers privés.

Le président: Question d'intérêt général: Un membre du Bureau de régie interne peut-il aussi siéger au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre?

M. Marleau: Oui. À l'heure actuelle, si je me souviens bien, le Whip en chef du Gouvernement siège au Bureau de régie interne ainsi qu'au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre.

Le président: Donc si un rapport est renvoyé à un comité, je parle d'un rapport du Bureau de régie interne, on pourrait penser qu'il y a conflit d'intérêt si un membre du Bureau de régie interne continue de siéger au comité?

M. Marleau: J'imagine que ce risque existe. Le même problème se pose aujourd'hui pour l'examen du budget des dépenses. Je précise d'ailleurs que deux membres du Bureau de régie interne siègent aussi au Comité de la procédure, car M. Silye du Parti réformiste en est également membre.

C'est le même problème qui se pose maintenant dans une certaine mesure pour l'examen du budget des dépenses. Mais ce pourrait être aussi le cas d'un autre comité. Rien ne garantit cependant qu'un membre de ce comité ne siège pas un jour aussi au Bureau de régie interne.

Le président: Oui. Pour ce qui est du fonctionnement de la loi, si le Bureau de régie interne soumettait un rapport à un comité permanent, est-ce qu'une telle mesure ou une telle exigence ne compromettrait pas l'indépendance du Parlement, à votre avis, et dans le contexte du projet de loi que nous étudions?

Me Davidson: Je ne crois pas. Je crois que soumettre un rapport à un comité serait conforme au processus parlementaire. Mais le Bureau de régie interne s'acquitte de ses responsabilités administratives conformément au mandat que lui donne la Loi sur le Parlement du Canada. Si un comité est saisi d'un rapport, le comité en fait une lecture qui lui est propre.

Je tiens aussi à préciser que si ce projet de loi est adopté, le rapport préparé par le Bureau de régie interne serait déposé devant le Parlement en dernière analyse et serait examiné par un comité de la Chambre. Donc que l'on procède en vertu de cette loi ou volontairement, comme on le propose, le rapport sera quand même examiné par un comité de la Chambre parce que le président du Conseil du Trésor est obligé de le déposer devant le Parlement en vertu du projet de loi C-64. De là, le rapport doit être examiné par un comité de toute manière.

M. Marleau: Monsieur le président, en réponse à votre observation sur les risques qu'il y aurait pour l'autonomie parlementaire en cas de renvoi à un comité de la Chambre, du point de vue de la procédure, un comité est une créature de la Chambre, un microcosme de la Chambre. Le comité est autorisé à soumettre un rapport à la Chambre. Si le comité est mécontent du rendement administratif du Bureau de régie interne de la Chambre, vous pouvez adresser un rapport à la Chambre qui dira si elle est d'accord ou non avec votre rapport. Ce qui vous donne un contrôle sur les affaires internes. Je n'y vois pas une menace pour l'autonomie parlementaire. C'est même probablement le contraire.

Le président: J'ai une remarque à faire au sujet de la déclaration volontaire. Comme il y a des répondants qui refusent de répondre à de telles questions, certains en sont venus à des conclusions fallacieuses. Je pense, par exemple, au questionnaire sur l'auto-identification que vous avez ici, si vous y ajoutez une question - et ce n'est qu'une observation que je fais pour mémoire - et que vous demandez au répondant s'il aimerait avoir une augmentation de salaire et s'il a des remarques à faire qui amélioreraient le milieu de travail, ou s'il a d'autres observations à faire, cela vous donnerait une idée du nombre de personnes qui n'ont pas répondu à la question sur la déclaration volontaire.

J'aimerais donc que vous réfléchissiez à cela, et si l'on obtient ainsi plusieurs réponses, on saura vraiment qui refuse de répondre à cette question en particulier, et on saura que ce n'est pas nécessairement par paresse ou pour tout autre raison.

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[Français]

M. Ménard: Dans le fond, tout ce qui touche à la promotion de l'équité en matière d'emploi ne vous pose pas de difficultés, mais son application et la possibilité qu'il puisse y avoir des contrôles externes. On devra donc, en tant que comité, essayer de trouver un moyen terme entre le maintien des principes d'équité en matière d'emploi et les contrôles dont votre organisation pourrait faire l'objet.

J'ai deux questions additionnelles. D'abord, la première question qui va être, à mon point de vue, déterminante dans la volonté de vous assujettir ou pas: prévoyez-vous faire de l'embauche au cours des prochaines années?

M. Marleau: Deux cent cinquante-sept employés viennent de quitter l'organisation, ce qui équivaut à une baisse de 15 p. 100 de nos effectifs, comparativement à l'année dernière. Nous avons un gel au niveau du recrutement qui date de presque un an. Je pense qu'on a recruté une personne de l'extérieur au cours des six derniers mois, dans un domaine très spécialisé, l'informatique, je crois.

Le réponse courte, monsieur Ménard, c'est: non.

M. Ménard: Une réponse qui, vous le comprendrez, ne m'étonne pas.

Deuxièmement, un des faits très importants de nos travaux, c'est qu'au niveau des témoins qui sont venus, notamment du secteur public ou du secteur privé, il y a une tendance assez naturelle, mais déplorable, dans les organisations qui veut que plus on monte dans la hiérarchie, plus on se rapproche des centres décisionnels, moins on retrouve de femmes. Spontanément - je sais que vous ne pouvez pas nous donner de statistiques - avez-vous l'impression que, dans vos services en particulier ou dans votre organisation en général, c'est une tendance qui est aussi présente?

M. Sabourin: Non. Si vous parlez de femmes, au niveau des cadres à la Chambre des communes, on a de l'avance sur la Fonction publique. J'oublie les statistiques exactes, mais si on parlait de ce qu'on décrit, nous, comme chefs jusqu'aux niveaux supérieurs, je pense qu'on a une nette avance sur l'ensemble de la Fonction publique.

M. Ménard: Au niveau des cadres, du personnel de soutien, par exemple, des choses comme ça, vous avez vraiment un sentiment que vous êtes avant-gardistes?

M. Marleau: Oui. Je sais de mémoire que dans le groupe du Service de la procédure, par exemple, chez les greffiers de comités, les femmes sont majoritaires.

M. Ménard: Est-ce que les...?

Mme Catterall: [Inaudible]

M. Marleau: Pas jusqu'à récemment, madame Catterall. C'est un changement à la Chambre comparé au moment où j'ai commencé.

M. Ménard: Vous voyez qu'on a des préoccupations communes. Ça va se refléter dans des votes ultérieurs, j'en suis convaincu. Sentez-vous bien libre, Marlene.

J'ai toujours compris que lorsqu'on parlait de cadres, les greffiers sont, dans votre terminologie, associés au personnel cadre?

M. Marleau: Non, professionnel, je dirais.

M. Ménard: Professionnel, d'accord. C'est un peu la façon dont on nous présentait ça.

Donc, au niveau des femmes, qui est quand même un des groupes qui vit encore le plus de difficultés, vous avez vraiment le sentiment que vous êtes avant-gardistes et qu'à ce niveau-là, les choses vont pour le mieux.

M. Sabourin: Si vous voulez, on pourrait vous le confirmer facilement.

M. Marleau: ...vous fournir les statistiques.

M. Ménard: Il faut quand même comprendre quels sont les objectifs de l'équité en matière d'emploi. Il ne s'agit pas - à mon point de vue, en tout cas, je ne parle pas au nom de mon parti - d'assujettir des organisations pour le plaisir de les assujettir. Ce sont les objectifs qui doivent être atteints.

Une des choses qui m'étonnent, par exemple, et qui nous désolent un peu, et on en a parlé, c'est que j'ai rarement vu, sauf cette semaine quand je suis allé au Comité de l'industrie, une personne, une greffière, qui était représentante des communautés culturelles. Il ne m'était jamais arrivé de voir, au niveau du personnel de soutien, des gens de la traduction, des greffiers - je vais à trois comités, ce qui est à mon point de vue excessif, mais c'est un grand plaisir de participer aux travaux - des représentants des communautés culturelles.

Pour la première fois, cette semaine, j'ai vu, quand je suis allé interroger le ministre Manley sur la reconversion, une personne qui me semblait venir de l'Inde, de la Thaïlande ou d'une autre pays. Alors, à ce niveau-là, il y a peut-être un effort qui devrait être fait, n'est-ce pas?

M. Marleau: Oui, sur le plan des minorités visibles, c'est plus compliqué, c'est plus difficile, surtout avec le peu de recrutement qui existe. La personne à qui vous faites allusion est une ancienne collègue à moi, recrutée en 1969. Alors, nous étions très avant-gardistes en 1969, jusqu'à un certain point.

M. Ménard: Vous étiez déjà là, vous?

M. Marleau: Oui. On s'est inscrit au même concours.

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Du point de vue des interprètes, ça relève de la responsabilité du ministère des Ressources humaines. C'est un service à contrat avec nous; nous n'en avons pas la responsabilité en ce qui a trait à l'équité en emploi ou au recrutement.

M. Ménard: Une dernière question, monsieur le président. Si jamais la loi s'appliquait, une des choses qui me préoccupent grandement, c'est qu'un plan d'équité en matière d'emploi, pour que ce soit intéressant, pour que ce soit efficace, il faut que ce soit le plus consensuel possible et que la partie patronale comme la partie syndicale y soient associées. Je ne crois pas qu'on puisse atteindre l'équité en matière d'emploi par l'autorité.

Dans le cas où ça s'applique à vous - vous semblez avoir dit tantôt qu'il y avait quelque chose d'assez particulier au niveau de la syndicalisation de vos effectifs - , est-ce qu'il y aurait quand même la possibilité, pour le cas où la loi s'appliquerait, d'avoir des zones de dialogues? Comment comptez-vous associer les travailleurs à la réalisation, à la concrétisation du plan d'équité en matière d'emploi dans l'éventualité, évidemment, où ça s'appliquerait?

M. Sabourin: On a déjà quatre syndicats, agents négociateurs, à la Colline. Il y a des comités de concertation, des comités mixtes de consultation, comme on les appelle. Effectivement, je pense que, jusqu'à récemment, on ne les impliquait pas assez sur le plan de l'élaboration des politiques, etc.

Dernièrement, et je pense que ce sera pour le mieux, surtout dans un contexte d'emploi qui devient de plus en plus difficile, on essaie largement de les amener à faire connaître leurs points de vue, en gardant toujours, évidemment, le droit de gestion. Je donne comme exemple des politiques ou des règlements qu'on vient d'établir sur le traitement ou la façon de gérer les employés déclarés excédentaires dans le contexte d'une réduction des effectifs.

On a aussi une politique sur le harcèlement à la Chambre des communes et on vient d'impliquer les syndicats en ce sens. On a entamé un processus. C'est la façon dont nous avons l'intention de procéder dans les mois et années à venir. Ça ne peut être qu'à notre avantage, bien sûr, parce que, lorsqu'on parle d'un processus où il y a consensus, on court davantage la chance de réussir que s'il est question d'adversité. On a du chemin à faire, mais je pense que c'est bien amorcé.

M. Ménard: Pour mon édification personnelle, savez-vous quelle est la proportion de femmes sur les 1 500 employés? Est-ce qu'elle se situe à 52-48 grosso modo?

M. Sabourin: Sur les 1 500 employés?

M. Ménard: Oui.

M. Sabourin: Je pourrais le confirmer, mais je pense qu'on a un pourcentage plus élevé de femmes que d'hommes dans l'ensemble, sans faire de ventilation.

M. Ménard: Pas par service?

M. Sabourin: C'est ça.

M. Ménard: Merci.

Le président: Monsieur Strahl.

[Traduction]

M. Strahl: Puis-je obtenir copie de ce texte? Je n'en ai pas besoin tout de suite.

M. Marleau: Oui. Et un rapport a été adressé à votre comité en juin 1993, et nous vous en ferons tenir copie.

M. Strahl: Je n'étais pas ici à ce moment-là.

M. Marleau: Je sais.

M. Strahl: Cela me serait utile si j'en avais copie.

M. Marleau: La semaine de sensibilisation approche. Nous planifions beaucoup en fonction de cela aussi.

M. Strahl: Bien.

Cette question d'auto-identification...à quoi sert l'information? En lisant votre dépliant, je me suis demandé pourquoi je devrais m'identifier? Je n'y vois pas d'avantages. À quoi sert l'information? Vous allez réunir les données, vous allez analyser tout cela, puis vous allez protéger ces données, et ce sera fini. Alors pourquoi me donnerais-je la peine de m'identifier? Pourquoi le ferais-je? Disons que j'appartiens à une minorité visible. Pourquoi m'identifierais-je?

M. Marleau: Si vous êtes employé par la Chambre, je suis tout à fait d'accord avec vous. Pourquoi s'auto-identifier? Si cela ne sert qu'à la direction, et que je ne fais moi-même l'objet des mesures en matière de sécurité d'emploi, pourquoi me donner cette peine? Disons que je me considère handicapé parce que je suis diabétique. Pourquoi vous le dirais-je si ce hadicap n'est pas visible? Pourquoi mon supérieur hiérarchique devrait-il savoir ça? Mais si je prends des congés de maladie, il fera le lien entre les deux situations et je serai victime de discrimination dans l'évaluation de mon rendement...c'est le genre de crainte qu'il faut apaiser.

Comme je l'ai dit plus tôt, et comme l'a dit le président, nous devons mettre de l'avant une meilleure stratégie de marketing, pour obtenir les informations dont nous, les gestionnaires, avons besoin pour prendre des décisions et pour fournir au Bureau de régie interne les statistiques qui l'aideront à formuler des politiques.

.1220

M. Strahl: Statistiques mises à part, si je suis membre de minorités visibles, pourquoi me donnerais-je cette peine? Devrais-je vous dire que c'est ma condition parce que j'adore les statistiques? Ou dois-je vous dire tout simplement parce que je tiens à vous dire que je suis membre de minorités visibles parce que je pense que c'est dans mon intérêt de vous le dire?

M. Marleau: La politique en matière d'emploi de la Chambre des communes vise à s'assurer que les femmes, les autochtones, les personnes ayant un handicap ou qui sont membres de minorités visibles, ont un accès égal à l'emploi et à l'avancement au sein de la Chambre. Voilà le pourquoi. Si vous êtes membre de minorité visibles et que vous êtes sensibilisé à l'équité en matière d'emploi, et que vous voulez vous assurer que votre groupe a un accès égal, vous pourriez peut-être dire à votre travailleur que telle est votre situation.

M. Strahl: Mais pourquoi? Si tout est fondé sur le mérite, quelle est la différence? Je peux me présenter à un concours que je sois ou non membre de minorité visible. Tout est fondé sur le mérite, cela n'augmente donc pas mes chances d'obtenir de l'avancement.

M. Marleau: Non, mais notre publicité nous aide à rejoindre des minorités visibles que nous ne pourrions pas rejoindre autrement. Particulièrement, du côté des personnes handicapées, il y a des choses concrètes que l'on peut faire: le matériel pour les malvoyants ou les malentendants, la traduction, le braille - toutes ces mesures - où on peut ainsi faciliter le recrutement et l'accès.

M. Strahl: Mais une fois qu'on a le pied dans la porte, cela ne sert à rien. Donc...

M. Marleau: Je crois que c'est M. Telegdi qui a dit que l'auto-identification répond à des motifs évidents et différents, avant qu'on devienne employé et après. Avant, vous êtes à la recherche d'un emploi, et si vous croyez que l'auto-identification vous aidera à mettre le pied dans la porte, vous allez vous identifier. Après qu'on est engagé, on a moins de raison de s'auto-identifier.

Dans certains cas, il nous faut rassurer ceux qui craignent que l'auto-identification ne favorise la discrimination.

M. Sabourin: Je vais vous citer un cas où nous avons fait un effort supplémentaire pour faciler l'accès à un employé, et où cet employé s'est auto-identifier et où l'on sait que nous avons pris des dispositions particulières, et l'employé réussit bien, et si un autre poste s'ouvre, cet employé peut simplement dire: oui, je me suis auto-identifié, je peux faire cela, et l'on va me faciliter l'accès.

Ce n'est peut-être pas dit clairement, mais un gestionnaire pourrait hésiter, et se dire: Mon Dieu, qu'est-ce que je vais être obliger de faire là? Mais si on voit que l'on a facilité l'accès à cette personne et qu'elle a bien fait, sinon mieux que la plupart... Je crois qu'il y a un aspect très positif ici, tant pour la personne que pour l'ensemble des gens.

M. Strahl: Oublions un instant les mesures que vous avez prises pour faciliter l'accès aux personnes handicapées, qui sont assez faciles à rénumérer, comme vous l'avez dit... vous faciliter l'accès aux toilettes, vous faites élargir les portes, vous ajoutez un ascenseur. Il y a une liste de choses qui s'adressent particulièrement aux personnes ayant un handicap. Avez-vous une liste des conditions des personnes défavorisées - je crois que c'est le terme que vous utilisez dans votre dépliant - qui sont employés? Avez-vous une autre liste de choses que vous devez corriger pour abolir les obstacles systémiques?

M. Marleau: Conformément à notre politique sur la formation linguistique, nous tâchons d'éviter la création de ghettos linguistiques, par exemple, et nous tâchons aussi d'éviter les ghettos de minoritaires visibles, ou, pour une raison quelconque, on consentrerait certains groupes d'employés.

Les grands avantages aussi - pour en revenir à l'avantage - c'est la formation, la planification de la formation, en fonction des besoins individuels. On pourrait avoir par exemple chez nous un certain nombre de minoritaires visibles qui voudraient faire carrière dans la sécurité. Si c'est le cas, nous allons identifier leurs besoins et leur donner une certaine formation qui les aidera à réussir aux concours - ils n'auraient pas la préférence, mais nous leur donnerions la formation qui leur permettrait de faire carrière au sein de l'organisation mais qui leure donnerait des chances égales d'avancement.

M. Strahl: Disons que je remplis votre questionnaire sur l'équité en matière d'emploi. Je suis employé et j'aimerais devenir agent de sécurité. Je vais donc dire que je suis autochtone. Pourquoi pas? Je ne connais rien au travail de sécurité, mais peut être que l'on va m'aider. M'aideriez vous si j'écrivais que je suis autochtone?

.1225

M. Marleau: Si vous dites que vous êtes un autochtone, nous saurons alors que vous êtes un autochtone. Si vous vouliez devenir membre du corps d'agent de sécurité de la Chambre et que vous estimiez avoir besoin d'une formation particulière, qu'il s'agisse du programme général que nous offrons ou de la formation assurée par le gestionnaire - disons que vous travaillez dans les restaurants, et que vous vouliez éventuellement obtenir une promotion et poser votre candidature à d'autres affectations - , nous vous donnerions une formation linguistique en cours d'emploi...

M. Strahl: Serait-il avantageux pour moi de dire que je suis un autochtone, ce qui serait carrément un mensonge?

M. Marleau: Vous me demandez si vous auriez un avantage.

M. Strahl: Oui. Si je dis que je suis un autochtone, vous ne pouvez pas prouver le contraire, de sorte que...

M. Marleau: Quel que soit le genre de processus d'auto-identification, je suppose qu'il y aura toujours le facteur humain.

M. Strahl: Je pense que ce facteur peut certainement jouer, surtout si l'intéressé estime qu'il a avantage à dire qu'il fait partie d'une minorité visible. Ce serait peut-être un peu forcé de ma part que de dire que je suis un autochtone, mais je fais certainement partie d'une minorité visible ou autre.

Ce que je veux dire, c'est comment pouvez-vous savoir, lorsqu'il s'agit d'auto-identification, s'il y a un avantage perçu, non pas d'un concours, mais dans le travail préparatoire, et de la formation, etc? Si je passais à l'avancement professionnel, je vous assure que je choisirais un groupe et que je tenterais ma chance. Je ne pourrais sans doute pas passer pour une femme, mais je choisirais probablement l'une des trois autres minorités et je dirais, que je fais partie de telle minorité et que j'ai donc droit à un traitement spécial. Que feriez-vous pour moi?

M. Marleau: Le seul avantage est social, c'est un avantage sur le plan de la conscientisation. Si l'on applique le principe du mérite et que l'avantage que l'on tente d'accorder soit l'égalité d'accès, je ne pense pas que l'on puisse dire qu'il s'agit d'un avantge. Si l'on considère les défavorisés d'après leur origine, leur groupe ou leur handicap et que l'on tente uniquement de garantir, en ayant conscience de ce que vous êtes vraiment...

M. Strahl: Mais vous ne le savez pas.

M. Marleau: Non, mais nous présumons, dans la plupart des cas, que nous sommes assez proches de la réalité, et tout ce que nous offrons alors c'est l'égalité d'accès. Nous nous efforçons d'éliminer les obstacles. Nous devons certes lutter contre l'idée voulant que certaines personnes en profitent et qu'ils considèrent cela comme un avantage, mais peut-être ne l'avons-nous jamais fait. C'est un peu le même problème sur le plan linguistique, car, depuis l'adoption de la Loi sur les langues officielles en 1967, d'aucuns prétendent qu'un groupe linguistique jouit toujours d'un avantage. Comme je suis un Franco-ontarien de Cornwall, en Ontario, je ne me souviens pas quand j'ai appris l'anglais, mais je suis francophone. Bien des gens pensent que je suis avantagé dans ma carrière parce que je suis un Franco-ontarien.

Le président: Je voudrais intervenir dans le débat. Si des possibilités d'avancement professionnel, en matière de programmes, sont offertes dans un emploi donné - dans ce cas-ci, il s'agit de votre emploi - , et si vous estimez qu'elles offriront des possibilités aux personnes qui n'ont peut-être pas les compétences parce qu'elles appartiennent à un groupe non désigné, j'ose croire que ces possibilités d'avancement seraient également ouvertes à tous les autres et, par conséquent, les personnes qui dispossent déjà de ces compétences ne poseraient pas leur candidature. Ainsi, les possibilités d'avancement continueraient d'être offertes aux autres. Est-ce exact?

M. Marleau: Oui.

Le président: Je voudrais que ce soit clair parce que je perçois un parti pris consistant à n'accorder des possibiltés qu'aux groupes désignés, alors qu'en fait elles sont offertes à tous. Si on les a déjà, on ne pose pas sa candidature. En fait, si l'on fait partie de l'un des groupes désignés et si on les a déjà, pourquoi poser sa candidature? Vous estimez pouvoir déjà soutenir la concurrence pour le poste sans jouir de possibilités d'avancement supplémentaires, n'est-ce pas?

M. Marleau: Oui. Je pense que la question de M. Strahl découle du fait que s'il existe des ghettos, qui peuvent constituer en eux-mêmes des obstacles, et que nous ne soyons pas informés à cet égard, nous ne pouvons pas savoir qu'il y a des ghettos. S'il existe des barrières structurelles créant ce genre de ghetto, le processus d'identification nous aide à les identifier avant qu'il ne devienne un réel problème et qu'il ne désavantage les personnes qui veulent concurrencer les autres sur un pied d'égalité. C'est pourquoi je dis que je vois cela non pas comme un avantage, mais comme un moyen de garantir que l'on comble ces lacunes qui se produisent sur les plans structurels et systémiques sans qu'on le sache.

M. Strahl: En résumé, ce n'est pas un problème si vous faites partie d'un groupe non désigné et que vous estimiez pouvoir soutenir la concurrencce et acquérir la formation de base, et ainsi de suite.

.1230

À la commission scolaire de Toronto, nous avons parlé de l'exemple des Portuguais qui, régulièrement, sont moins nombreux à terminer leurs études, ont un niveau de vie plus bas et un taux de chômage plus élevé que les autres. Ils font face à certaines barrières. Je ne sais pas ce que sont ces barrières, mais ils ne font pas partie d'un groupe désigné. Ce sont des Blancs qui se heurtent à une sorte de barrière systémique. Je ne sais pas en quoi elle consiste, mais elle est bien là.

Si je faisais partie de ce groupe, je dirais que j'ai besoin d'aide parce que je fais partie d'un groupe qui ne progresse pas. Mais il n'y a rien pour cela de sorte que j'en choisirais un; j'ai besoin d'aide. Comme d'autres pourraient en avoir besoin, mais il n'y a pas de programme pour moi.

M. Marleau: Dans ce contexte particulier, à la Chambre des communes, vous auriez le même accès. Vous ne seriez pas défavorisés.

M. Knutson (Elgin - Norfolk): Tous les 1 400 employés maîtrisent-ils l'anglais et le français?

M. Marleau: Non, on n'exige pas le bilinguisme pour tous les postes.

M. Knutson: Quel est le pourcentage?

M. Marleau: Je ne peux vous fournir cette donnée aujourd'hui.

M. Sabourin: À la Chambre, il serait très élevé en raison de la nature même du processus.

M. Marleau: Il est élevé. Je dirais qu'il est de l'ordre de 80 p. 100 et même peut-être un peu plus.

M. Knutson: Sur les 1 400 employés.

M. Sabourin: Les compétences requises des employés varient en fonction de la complexité du poste et de ce genre de chose.

M. Knutson: Le niveau de compétence.

M. Sabourin: Oui. Nous n'exigerions pas le même niveau de compétence pour un messager que pour un greffier à la procédure, par exemple.

Me Davidson: La Loi sur les langues officielles n'exige des institutions fédérales qu'elles soient en mesure d'offrir les services dans les deux langues officielles et non pas que chacun des employés soit compétent dans les deux langues. Par conséquent, si on peut offrir les services dans les deux langues officielles, on a satisfait aux exigences de la Loi.

M. Knutson: Existe-t-il des secteurs où l'on peut s'en tirer en ne parlant que l'anglais?

M. Marleau: Oui. À la Direction générale de l'index, il y a une section qui fait le Hansard anglais et une autre qui fait le Hansard français. C'est donc possible, mais c'est de moins en moins fréquent.

M. Knutson: C'est relativement limité.

M. Marleau: Eh bien, c'est limité dans le sens qu'il n'y pas d'exigences pour les services, mais qu'il y a un travail à faire.

M. Knutson: Si on se penche sur vos chiffres et que l'on dise que vous voulez recruter plus d'autochtones... Il ne s'agit ici que d'une hypothèse, car je ne sais rien en particulier des peuples autochtones. Aux fins de la discussion, supposons que très peu d'autochtones soient à l'aise en français et en anglais ou qu'il y en ait moins que dans la population générale. Feriez-vous une entorse aux règles? Disons qu'un autochtone pose sa candidature à un poste de page, qu'il ne parle que l'anglais et que sa langue maternelle soit une langue autochtone. Vous lui diriez, eh bien, vous pouvez vous en tirer en ne parlant que l'anglais si vous observez...

M. Sabourin: Nous n'aurions pas à faire une entorse aux règles dans bien des cas. Nous déterminerions quels sont les postes où la connaissance d'une deuxième langue n'est pas impérative, ce qui signifie que si la personne est jugée compétente, elle n'aurait pas à satisfaire immédiatement aux exigences lignuistiques - c'est pourquoi on dit que la connaissance de la deuxième langue est non opérative - , et nous lui fournirions une formation en cours d'emploi après son engagement. Nous avons quelques postes de ce genre.

Dans le cas d'une personne parlant Cris et anglais qui pose sa candidature à un poste bilingue, et si nous avions la conviction de pouvoir continuer à offrir les services en embauchant cette personne, la personne en cause pourrait toujours occuper le poste. Nous libérerions cette personne pour qu'elle suive des cours afin de satisfaire aux exigences linguistiques.

M. Marleau: En supposons qu'elle remporte le concours.

M. Sabourin: Évidemment - en fonction de ses compétences.

M. Knutson: Savez-vous pour combien de ces 1 400 postes le bilinguisme n'est pas impératif?

M. Sabourin: Il y a deux ans ou deux ans et demi, nous avons demandé que le bilinguisme soit impératif pour un pourcentage très élevé de postes. Dernièrement, par suite des modifications apportées à la Loi sur les langues officielles - vous avez peut-être la date - , la situation a changé. Je dirais maintenant que pour 80 p. 100 des postes, nous n'exigeons pas du titulaire qu'il satisfasse aux exigences de la deuxième langue avant d'occuper le poste.

.1235

M. Strahl: J'ai une autre question à poser sur le même sujet. Supposons qu'un Portugais vient vous voir. Il parle anglais, portugais mais pas français. Il remporte le concours. Lui offrieriez-vous la même chance de devenir page qu'à un Autochtone?

M. Marleau: Oui.

M. Sabourin: Votre question a trait au fait que cette personne ne fait pas partie officiellement d'un groupe défavorisé.

M. Strahl: Il n'y a donc pas d'avantage à faire partie d'un groupe désigné?

M. Sabourin: Il n'y en a pas dans ce sens-là.

Me Davidson: Si les deux candidats étaient égaux, je pense que vous choisiriez la personne faisant partie du groupe minoritaire, si le projet de loi C-64 devait s'appliquer ou selon votre politique - si les deux obtenaient le même résultat. C'est l'action affirmative. Il s'en suivrait que vous deviez choisir...

M. Strahl: On prétend toutefois que le projet de loi C-64 ne prévoit pas d'action affirmative. Il est...

Me Davidson: C'est un programme qui a été mis en oeuvre conformément à la Charte, si vous voulez. L'article qui traite de l'égalité stipule que l'on mette en oeuvre un programme qui fait la promotion d'un membre d'un groupe minoritaire.

M. Marleau: Ce n'est pas de l'action affirmative sur le plan des quotas.

M. Strahl: Ils le nieront catégoriquement, croyez-moi. Mais le problème, évidemment, c'est que si vous ne faites pas de progrès raisonnables, tel que le définit l'agent de mise en oeuvre, malheur à vous et à vos descendants.

Je n'en dirai pas plus.

Le président: Je pourrais peut-être poursuivre rapidement sur ce sujet. Selon votre expérience, arrive-t-il souvent que deux candidats obtiennent le même résultat?

M. Marleau: Non ça n'arrive pas souvent. Le processus de dotation est tel que les facteurs subjectifs jouent autant que les facteurs objectifs. Il est relativement rare qu'il y ait égalité parfaite, selon mon expérience.

Le président: Les gestionnaires sont responsables de la mise en oeuvre de la politique comme celle qui est présentée aujourd'hui. À qui les gentionnaires doivent-ils rendre compte - au chef de la Direction de la plannification?

M. Marleau: Au chef de la Direction de la plannification dans l'application au jour le jour de la politique, qui s'assure du respect des conditions, à la Direction des ressources humaines à titre de fonction de la Chambre et au Bureau de la Régie interne en tant qu'employeur...

Le président: Et qui donc se charge de faire l'évaluation de rendement des gestionnaires?

M. Marleau: C'est une structure hiérarchique. J'évalue le rendement de ceux qui relèvent de moi. Le directeur des Ressources humaines évalue le rendement du chef du Programme d'équité en matière d'emploi.

Le président: Et l'évaluation de rendement se fonde sur le succès ou l'insuccès de la mise en oeuvre de la politique d'équité en matière d'emploi par le gestionnaire?

M. Marleau: C'est une évaluation plus difficile à faire. Je dirais qu'elle serait négative s'il y avait non-collaboration, violation et discrimination, parce que le succès... Notre organisation est très très statique. C'est très difficile d'attribuer un manque de progrès à un gestionnaire parce qu'il y a très peu de mouvement. Il s'agit davantage de déterminer dans quelle mesure le gestionnaire en a tenu compte durant le processus de recrutement. L'a-t-il sciemment ou proactivement ignoré? Je dirais qu'il s'agit plus d'une évaluation négative que d'un lien avec le succès.

M. Sabourin: Mais nous communiquerions certainement avec, disons, l'agent en dotation qui participe à un processus de concours et qui n'a fait aucun effort pour inciter les gestionnaires à élargir la base, si vous voulez. Cela fait partie du travail qui n'a pas été bien fait, ce qui se refléterait sans doute dans l'évaluation.

Le président: Si la Chambre recommande que le projet de loi s'applique à elle, à votre avis, la Chambre aurait-elle besoin d'une période d'ajustement du point de vue administratif? Si oui, combien de temps?

.1240

M. Marleau: D'après ma lecture du projet de loi, je ne vois guère de difficulé du point de vue administratif quant à l'application assez rapide des dispositions de la loi.

En ce qui concerne les taux de progrès et de succès, c'est difficile pour moi de vous donner une autre réponse parce que, si nous continuons à décroître, et ce de façon volontaire - et je n'imagine certainement pas l'établissement d'un programme d'incitation au départ qui viserait des groupes afin de mieux adapter nos données - , je prédis que ce ne sera pas avant le début du siècle suivant que nous recommancerons à croître de nouveau. Je pense donc, d'une part, que nous pouvons répondre assez rapidement. Il se peut que vous trouviez que les cinq prochains rapports soient relativement semblables.

Le président: Mais dans l'élaboration des plans d'équité en matière d'emploi, en ce qui concerne sa forme finale et l'établissement d'objectifs quantitatifs, il sera facile de respecter toutes ces exigences.

M. Marleau: Je ne pense pas que nous tombions dans la catégorie de la GRC, par exemple, ou il y a d'autres problèmes à régler.

M. Strahl: Avez-vous évalué combien il en coûterait pour établir le programme tel que le prévoit le projet de loi.

M. Marleau: Nous n'avons pas fait d'évaluation particulière. Mais je pense que nous pouvons le faire avec nos ressources actuelles.

M. Strahl: Je suppose que cela appelle la question suivante, à savoir combien de temps et d'énergie allez-vous consacrer au cours des cinq ou six prochaines années à un programme qui ne fait aucune différence?

Quand on lit le projet de loi C-64, on se demande combien d'obstacles il va falloir franchir. S'il y a un gel de l'embauche et que les nouvelles règles ne fassent aucune différence, on peut établir tous les objectifs qu'on veut. Combien de temps et d'énergie allez-vous devoir consacrer, ainsi que le gestionnaire des ressources, le gestionnaire du personnel et le gestionnaire d'équité en matière d'emploi...? Vos rapports annuels, etc., doivent prendre un certain temps.

M. Marleau: Cela prend du temps et il y a un coût net à supporter. Quelles que soient les ressources que l'on y consacre, il y a un coût.

Car je dis que nous pouvons le faire avec nos ressources actuelles... Nous avons un certain nombre de données. Un rapport a été remis à la régie interne en 1994. La forme et la teneur varieront un peu, mais je ne vois pas la nécessité d'accroître les ressources. J'estime que nous envisageons davantage une modification du format.

M. Strahl: D'accord.

M. Marleau: J'ai bien peur que l'autre question est une question-piège, et j'aimerais mieux ne pas y répondre.

M. Strahl: Il me semble que c'est une honte de consacrer du temps, des efforts et des ressources pécuniaires équivalant à 100 000$, que l'on aurait pu utiliser pour aider des personnes handicapées en achetant pour 100 000$ d'équipement facilitant l'accès aux personnes handicapées. Je pense que c'est un crime.

Le président: Avez-vous bien dit que cela ne fait aucune différence si la Chambre des communes était incluse dans l'entente? Ou est-ce que cela ferait une différence?

M. Marleau: Quel genre de différence?

Le président: Dans la poursuite du principe de l'équité en matière d'emploi.

M. Marleau: Cela ferait une grande différence dans la sensibilisation au principe de l'équité en matière d'emploi.

Ce que j'ai dit c'est qu'en raison du mode de décroissance dans lequel nous sommes, et je pense que le personnel de la Chambre des communes n'augmentera probablement pas avant le prochain siècle, les données ne devraient pas beaucoup changer, de sorte que les rapports pourraient être quelque peu répétitifs ou ne présenter que de très faibles variations. Mais il est évident que si nous devons répondre à des attentes plus élevées en ce qui concerne les rapports et l'analyse, la sensibilisation s'accroîtra, ce qui est un progrès. à mon avis.

Le président: Cela pourrait être un avantage net.

M. Marleau: Oui.

Le président: Merci.

M. Knutson: Connaissez-vous assez bien les données démographiques pour nous dire si nous nous dirigeons vers une longue période de retraite ou d'attrition?

M. Marleau: La plus grande partie de nos employés suit la même courbe démographique du pays où l'on assiste au vieillissement de la génération de la poussée démographique de l'après-guerre; ils ont donc entre 42 et 55 ans. Nous serons aux prises avec la même risque de crise auquel les grandes institutions sont confrontées, à savoir une pénurie de personnel compétent et la difficulté de combler les vides. Les courbes démographiques sont très, très semblables.

M. Knutson: Je vois.

.1245

M. Marleau: Nos employés sont un peu plus jeunes. À cause du programme d'encouragement à la retraite anticipée, un bon nombre de nos employés plus âgés qui ont chosi de prendre leur retraite sont partis. En fait, presque 100 p. 100 de ceux qui étaient admissibles au programme dans la catégorie des 55 ans et plus ont choisi de prendre leur retraite. Cela ne veut pas dire que tous sont partis.

M. Knutson: Vous seriez aux prises avec de la discrimination si vous n'aviez aucun employé de plus de 55 ans.

M. Marleau: C'était un départ volontaire.

Le président: S'il n'y a pas d'autres questions, je voudrais, au nom des membres du Comité, vous remercier tous de votre temps, de vos efforts et de votre lucidité.

M. Marleau: Merci, monsieur le président. Au plaisir.

Le président: La séance est levée.

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