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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 19 octobre 1995

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[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Nous étudions ce matin les obligations du Canada en matière de rapports en vertu des instruments internationaux sur les droits de la personne. Je tiens à remercier nos témoins, M. Duern et Mme Young, d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. On m'a dit que Mme Young fait une laryngite. Nous en sommes désolés. M. Duern travaille pour Patrimoine Canada.

Monsieur Duern, vous pouvez présenter vos commentaires liminaires.

M. Normand Duern (agent principal, Instruments internationaux, Direction des droits de la personne, ministère du Patrimoine canadien): Merci beaucoup. On nous a demandé de vous expliquer la procédure suivie pour la présentation de rapports aux divers comités des Nations unies sur les droits de l'homme, et de vous parler du rôle que nous jouons à cet égard. Je crois qu'on vous a fourni des renseignements généraux sur les instruments internationaux sur les droits de la personne ainsi que sur les objectifs visés par ces derniers. Vous avez également reçu une liste des instruments internationaux dont le Canada est signataire.

Chacun de ces instruments internationaux sur les droits de la personne s'accompagne d'une exigence en matière de rapport. En effet, chacun de ces instruments stipule que les États parties à un pacte ou à une convention doivent présenter un rapport sur l'inclusion des dispositions du pacte ou de la convention dans les lois et dans les pratiques de l'État. Ces rapports sont préparés à intervalles réguliers qui varient selon l'instrument en question.

Notre comité se penchera aujourd'hui sur les droits civils et politiques. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques précise que des rapports devront être présentés à un intervalle fixé par le Comité des droits de l'homme des Nations unies. En fait, ces rapports sont présentés à tous les quatre ou cinq ans. Techniquement, l'intervalle est de cinq ans. Le dernier rapport a été présenté en 1990 mais portait, évidemment, sur la situation qui prévalait un peu plus tôt.

Je dois d'abord vous rappeler que les rapports que le Canada présente sont des rapports gouvernementaux, comme l'exigent d'ailleurs les conventions. En fait, les conventions exigent des signataires qu'ils présentent un rapport dont ils sont les auteurs. Le rapport est donc celui du gouvernement national. Chaque rapport fait état des activités du gouvernement canadien au chapitre de la mise en oeuvre, de la surveillance et de la promotion des droits de la personne.

Ces rapports sont étudiés par un comité compétent des Nations unies en présence d'une délégation canadienne. Dans le cas qui nous occupe, ce comité sera celui qui est chargé des droits civils et politiques. Il y a habituellement un décalage d'environ un an entre le moment où le rapport est soumis et le moment où un comité des Nations unies l'étudie.

Lorsqu'ils se préparent à l'étude des rapports, les comités des Nations unies peuvent également consulter d'autres intervenants. Évidemment, le comité étudie lui-même les rapports, et pose des questions et demande des précisions à la délégation canadienne, dans le cadre de ses travaux.

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Le comité des Nations unies peut se tourner vers d'autres sources de renseignements pour vérifier la validité des rapports présentés par le Canada. En fait, c'est une chose qui se produit de plus en plus souvent aux Nations unies depuis dix ans, tout particulièrement depuis les cinq dernières années. De plus en plus les comités des Nations unies veulent consulter d'autres sources, tout particulièrement les organisations non gouvernementales.

De plus, nombre d'organisations non gouvernementales portent un intérêt plus marqué pour les travaux des Nations unies; ainsi, un nombre croissant d'ONG présentent, de leur propre chef, des rapports aux comités des Nations unies. Dans certains cas, un de ces comités peut rencontrer des représentants d'un certain nombre d'ONG avant de procéder à l'examen du rapport canadien. Cela s'est produit une ou deux fois au cours des dernières années, plus particulièrement en ce qui a trait au rapport sur la Convention relative aux droits de l'enfant.

Même si les ONG ne jouent pas un rôle officiel dans le processus de présentation du rapport, leur présence se fait de plus en plus sentir et est en fait favorisée par les Nations unies.

Ses rapports que les pays signataires sont obligés de présenter doivent prendre la forme d'une étude article par article de la mise en oeuvre des dispositions de la convention dans les lois et les pratiques nationales. De plus, les comités des Nations unies préparent des directives pour la présentation des rapports.

Ces directives, contrairement aux conventions ou pactes, n'ont pas force de loi. Les dispositions d'une convention ou d'un pacte sont obligatoires pour les pays signataires. Ce n'est pas le cas des directives préparées par un comité. Il ne s'agit que de directives, mais évidemment, le Canada essaie de les respecter dans la mesure du possible. Il y a parfois certains problèmes d'ordre pratique, mais dans l'ensemble, nous respectons assidûment ces directives.

Une fois l'examen des rapports terminé, le comité des Nations unies formule des commentaires, des conclusions ainsi que des recommandations. Certaines conclusions peuvent être simplement des commentaires généraux sur les réalisations du pays signataire ou sur les problèmes cernés par le comité; de plus, ce dernier peut formuler des recommandations.

Encore une fois, les conclusions et les recommandations des comités n'engagent aucunement les signataires, contrairement à la convention. Ces rapports des comités représentent une interprétation de leur part de la situation qui prévaut dans les pays signataires; cependant, nous y retrouvons une obligation morale certaine et nous faisons tous les efforts possibles pour mettre en oeuvre ces recommandations et présenter un suivi à cet égard dans les rapports subséquents. Ainsi, ces recommandations et conclusions jouent un rôle dans l'évolution, jusqu'au rapport suivant, de la politique canadienne en matière de droits de la personne. Nous tenons donc compte de ces recommandations et de ces conclusions.

Au palier fédéral, ce sont des comités de fonctionnaires représentant les divers ministères touchés qui sont responsables du suivi en ce qui a trait aux recommandations et constatations des comité des Nations unies. Certains ministères sont pratiquement toujours représentés, peu importe la convention: notre ministère, par exemple, qui est le principal responsable des droits de la personne; le ministère de la Justice, évidemment, parce que très souvent cela touche à un texte législatif; les Affaires étrangères, dans certains cas, et puis d'autres ministères, selon le contenu et la portée du rapport.

Tout cela se déroule au palier fédéral, et notre direction des droits de la personne, à Patrimoine canadien, surveille de façon générale la préparation des rapports. Un autre ministère peut être le ministère responsable en ce qui a trait à la rédaction du rapport, selon le sujet et le contenu.

En ce qui a trait aux droits civils et politiques, puisque la question est de nature constitutionnelle et juridique, le ministère fédéral de la Justice est en grande mesure responsable du contenu du rapport. Tout cela dépend du pacte ou la convention. Par exemple, en ce qui a trait à la Convention relative aux droits de l'enfant, il y a en fait deux ministères principaux, le ministère de la Santé et le ministère de la Justice.

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Par exemple, nous sommes le ministère principal en ce qui a trait à la mise en oeuvre des dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes formes de discrimination raciale puisque nous sommes le ministère responsable du multiculturalisme et des programmes touchant les relations raciales.

Le deuxième volet du suivi et de la mise en oeuvre des conventions est le rôle joué par les provinces et les territoires. Cela nous amène bien sûr à l'autre dimension capitale de l'établissement des rapports, et je vous en parlerai en plus amples détails tout à l'heure. Cependant, puisque la législation sur les droits de la personne relève principalement des territoires et des provinces, ces derniers jouent un rôle très important.

Notre ministère et notre direction, par l'entremise de d'un mécanisme qu'on appelle la Conférence fédérale-provinciale-territoriale des ministres chargés des droits de la personne, est responsable de la coordination de la rédaction des rapports avec les provinces et les territoires. Les fonctionnaires touchés se réunissent à intervalle régulier.

J'aimerais faire un commentaire de nature générale sur les Comités des Nations unies puis je passerai à la question du fédéralisme, question qui revêt une importance primordiale dans toute cette affaire.

Au cours des dernières années, les comités des Nations unies ont accordé une attention toujours croissante aux mesures prises par les pays signataires pour assurer l'exécution de la convention et la mise en application des recommandations formulées par les comités. Les Nations unies insistent de plus en plus pour que soient créés des mécanismes précis dans les pays signataires qui seraient chargés d'étudier et de surveiller la mise en oeuvre et l'application des dispositions des pactes et conventions. Il s'agit-là d'une nouvelle priorité et nous traversons une période de transition pendant laquelle nous essayons de répondre du mieux possible aux préoccupations dont ont fait état les Nations unies. En fait, le comité permanent dont je viens de vous parler joue ce rôle, mais nous cherchons toujours de nouvelles façons d'améliorer les processus de mise en oeuvre, de surveillance et de suivi.

J'espère que ces commentaires vous permettent de mieux comprendre les obligations de faire rapport prévues dans les conventions et pactes des Nations unies. J'aimerais passer maintenant à l'autre grand sujet.

J'appelle la deuxième question «les traités internationaux sur les droits de la personne et le système fédéral», parce que quand il s'agit de conventions internationales sur les droits de la personne, nous ne pouvons pas oublier que nous sommes une fédération. Le Comité judiciaire du Conseil privé de la Chambre des lords a déclaré en 1936 que seul le gouvernement du Canada, dans ce pays, pouvait signer des conventions internationales. Cependant, on a également fait remarquer que le gouvernement fédéral ne peut adopter de mesures législatives visant la mise en oeuvre des dispositions de traités dans des domaines qui relèvent des provinces ou des territoires, ce qui crée un petit problème.

Ainsi, seul le gouvernement fédéral peut signer des traités, et il peut le faire sans consulter qui que ce soit; il s'agit là d'un pouvoir absolu. Cependant, il n'a pas nécessairement le pouvoir absolu de respecter les engagements ainsi pris si les domaines visés sont de compétence provinciale ou territoriale.

C'est pourquoi certains mécanismes, comme le comité permanent des fonctionnaires chargé des droits de la personne, ont été mis sur pied. Tout cela découle d'une réunion des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux chargés des droits de la personne, en 1975. Les gouvernements provinciaux et fédéral - les territoires n'ont été inclus que plus tard - se sont alors entendus sur la ratification et la mise en oeuvre des traités internationaux sur les droits de la personne ainsi que sur la marche à suivre à l'égard de la soumission de rapports aux Nations unies sur les dix traités.

On a alors convenu qu'il y aurait toujours consultation des provinces et des territoires avant que le Canada ne ratifie un instrument international en matière de droits de la personne. Ces consultations visent à permettre aux intéressés de déterminer si des pratiques ou lois en vigueur sont déjà conformes aux conventions que le Canada envisage de signer; si c'était le cas, il n'y aurait aucun problème, et si des modifications, amendements ou nouvelles mesures s'avéreraient nécessaires, les provinces indiqueraient qu'elles seraient disposées à prendre les mesures qui s'imposent pour que le Canada respecte, dans des délais raisonnables, les dispositions d'un traité ou d'une convention quelconque.

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Cette entente fédérale-provinciale-territoriale permet également aux provinces et territoires de rédiger leur propre rapport sur la mise en oeuvre des dispositions des traités sur les droits de la personne dans leur région; les provinces et territoires peuvent donc, s'ils le désirent, rédiger les chapitres du rapport canadien qui portent sur leurs régions. Cependant, ils ne sont pas tenus de le faire.

Toutefois, le gouvernement fédéral doit inclure toutes les régions et compétences dans son rapport; ainsi, si une province ou un territoire refusait de présenter son propre rapport, le gouvernement fédéral demeurerait responsable de la préparation d'un chapitre du rapport portant sur cette province ou territoire.

Par le passé, des provinces ont demandé, pour diverses raisons, au gouvernement fédéral de préparer les chapitres qui les concernent; dans ces circonstances, le chapitre rédigé par le gouvernement fédéral est présenté au gouvernement provincial ou territorial pour que ce dernier l'approuve avant qu'il ne soit inclus dans le rapport canadien.

Grâce à cette entente, les provinces et territoires peuvent également être représentés au sein des délégations canadiennes qui participent à l'examen des rapports. Encore une fois, ils ne sont pas tenus de nommer des représentants. Le gouvernement fédéral encourage habituellement les provinces et territoires à nommer des représentants pour que ces derniers puissent répondre directement aux questions que pourraient poser les membres du comité des Nations unies. Dans l'ensemble, par le passé, les provinces et territoires ont toujours été représentés.

Le reste de la délégation fédérale est évidemment composé de représentants des Affaires étrangères, chef de la délégation, comme c'est toujours le cas, et de représentants des ministères fédéraux les plus touchés par l'objet de la convention; la délégation peut également comprendre des délégués des provinces ou territoires si c'est le désir de ces derniers.

Enfin, toujours en vertu de cette entente, les provinces et les territoires, même s'ils ne font pas partie des délégations, ont le droit d'être renseignés, par le gouvernement fédéral, sur les conclusions ou observations du comité des Nations unies. Le gouvernement fédéral représente la voie de communication pour les territoires et les provinces si ces derniers veulent répondre au rapport du comité des Nations unies.

C'est là la façon de procéder. Je me dois d'aborder une autre question qui est très importante lorsqu'on discute de la rédaction des rapports. Cette question vous intéressera peut-être d'ailleurs. Il s'agit de la consultation des organisations non gouvernementales.

Comme je l'ai déjà signalé, nous traversons actuellement une période de transition. Le rôle des ONG est devenu de plus en plus important au fil des ans. Les Nations unies favorisent un rôle accru des ONG et ces dernières s'intéressent de plus en plus aux activités des Nations unies. Nous avons constaté que les comités chargés des droits de la personne non seulement se sont tournés vers les organisations non gouvernementales comme source supplémentaire de renseignements, mais aussi ont encouragé les pays signataires à participer à un dialogue avec les organisations non gouvernementales sur les droits de la personne; les comités des Nations unies encouragent également les pays signataires à utiliser ces contacts pour stimuler la discussion publique sur des questions comme celle des droits de la personne. Ainsi, un dialogue avec des organisations non gouvernementales est devenu un aspect toujours plus important du système de comités des Nations unies sur les droits de la personne.

Nous étudions depuis environ deux ans diverses méthodes qui nous permettraient, dans la mesure du possible, de tenir compte du rôle que jouent les organisations non gouvernementales, tout particulièrement à l'étape de la rédaction des rapports. Comme je l'ai signalé plus tôt, ces rapports sont des rapports gouvernementaux, ils représentent une communication du gouvernement canadien aux Nations unies. La version finale de tout rapport doit donc présenter la position du gouvernement canadien, une position que celui-ci est prêt à défendre devant un comité d'examen des Nations unies. La rédaction de rapport est essentiellement un processus gouvernemental.

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Toutefois, nous avons essayé d'inclure autant que possible la participation des ONG au processus au moyen de diverses formules qui sont toujours à l'essai. Au cours de la rédaction du rapport sur la Convention relative aux droits de l'enfant, par exemple, qui a été soumis aux Nations unies à l'été de 1994, pendant que la rédaction du rapport se poursuivait au niveau fédéral dans l'année qui a précédé le dépôt du rapport, différentes ONG clé travaillant dans le domaine de l'enfance et des droits de l'enfant ont été invitées à soumettre des rapports assez volumineux sur leurs préoccupations et opinions. On en a tenu compte au cours de la rédaction du rapport.

Selon le sujet dont on traite, la voie suivie dans le cas de cette convention n'est pas nécessairement toujours pratique. Dans le cas de la Convention relative aux droits de l'enfant, la plupart des ONG intéressées par cette question font partie d'une organisation générale, la Coalition canadienne des droits de l'enfance, si bien que dans ce cas la consultation directe était assez aisée. Pour ce qui est d'autres conventions, les choses ne sont pas toujours aussi simples.

Dans le cas des droits civils et politiques, pour essayer d'obtenir la participation des ONG à la rédaction du quatrième rapport, qui est actuellement en cours, au début de l'année nous avons demandé à plus de 200 ONG qui s'occupent des droits de la personne - soit des associations de défense des libertés civiles, des associations de défense des droits de la personne, différents autres groupes que nous savons actifs et intéressés par cette question - de présenter leurs opinions et leurs préoccupations, leurs vues, que nous pourrions ensuite prendre en compte en vue de la rédaction de notre propre rapport.

Dans notre envoi postal, nous informions les ONG que bien sûr la version finale du rapport serait celle du gouvernement canadien, et que peut-être certains de leurs mémoires ne seraient pas entièrement reflétés dans le rapport canadien, mais que pour compenser on ferait en sorte que conjointement ou parallèlement à notre rapport, tout mémoire présenté par les ONG serait transmis directement aux Nations unies, soit le texte intégral ou ce que les ONG ont fait parvenir, de manière que le comité dispose du document original, qu'il puisse l'examiner parallèlement au rapport canadien.

Évidemment, les ONG sont tout à fait libres de soumettre ce qu'elles veulent directement à vos comités, si elles préfèrent procéder ainsi. L'objectif de notre consultation était au fond d'essayer d'ouvrir un dialogue pour que dans nos rapports nous sachions tout au moins que nous avions une vue complète de ce qui préoccupe le plus les organisations non gouvernementales.

Nous continuons de le faire dans le contexte d'autres conventions, notamment le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Pour ce qui est des droits civils et politiques, nous avons obtenu une réaction de certaines ONG - une réponse extrêmement réfléchie. Peut-être aurions-nous souhaité obtenir davantage de réponses mais l'exercice s'est quand même révélé utile, et c'est une nouvelle procédure.

Nous avons essayé de nous montrer aussi ouverts que possible. Nous avions une longue liste de destinataires et, dans notre lettre aux organisations visées, nous précisions que si elles connaissaient d'autres organisations que ces questions pouvaient intéresser, nous les priions de transmettre cette lettre à quiconque souhaitait nous écrire.

Voilà essentiellement où nous en sommes dans la rédaction du rapport. Je sais que c'est beaucoup. C'est peut-être un peu compliqué, et peut-être pourrais-je répondre à vos questions.

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Le président: Merci beaucoup, monsieur Duern.

Nous entamons la période de questions. La parole et à John Finlay et ensuite à John Maloney.

M. Finlay (Oxford): Merci, monsieur le président. À titre de nouveau membre du comité, je trouve que c'est pour moi une excellente occasion de m'informer.

Pour ce qui est du document que nous avons reçu avant la séance, je n'ai que deux petites questions qui concernent des précisions puis une autre question qui touche davantage au fond. À la page 2 du document, où il est question du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, cette phrase sous la rubrique dit que le pacte proclame également le droit à l'autodétermination pour assurer le développement culturel, social et économique ainsi que le droit de disposer librement des richesses et des ressources naturelles.

En tant que membre du Comité de l'environnement, je me demande si vous pouvez me dire ce que cela signifie.

M. Duern: Je pense que nous devons peut-être rappeler un peu l'histoire. Si je me souviens bien, ce pacte a été présenté aux Nations unies en 1966, et donc il a été rédigé quelque temps auparavant. Ce que vous constatez, je pense, c'est qu'on emploie une terminologie qui reflète ce qui était à l'époque une considération première, soit la décolonisation. L'autodétermination des peuples s'est vraiment faite dans une conjoncture où se fragmentaient les vieux empires.

Quant aux ressources naturelles, à ce que je sache - comme je l'ai dit, c'est un peu historique - à ce moment-là on cherchait à dire que, par exemple, les pays nouvellement indépendants d'Afrique et d'Asie avaient le droit d'exploiter leurs propres ressources naturelles et d'en bénéficier, plutôt que de voir les anciennes puissances coloniales le faire à leur place.

Quant à savoir comment cela serait interprété maintenant dans un autre contexte où l'environnement est le mot d'ordre, je serais bien incapable de le dire. Je ne suis pas au fait des questions environnementales et autres qui se rattachent à cette rubrique. Je dirais qu'il existe d'autres tribunes internationales de qui relèverait plus directement l'examen de ce genre de questions.

M. Finlay: Puis-je proposer un exemple pour clarifier les choses dans mon esprit? La majeure partie des terres et des plantations de thé protégées de l'île de Ceylan étaient possédées par la Grande-Bretagne ou par des gens ou des entreprises de Grande-Bretagne. Si je comprends bien ce que vous dites, cela signifie que les Ceylanais, une fois leur indépendance acquise, ont droit de regard sur cette richesses et ces ressources naturelles.

M. Duern: Oui, je suppose que ce serait le cas. C'est un peu étranger à mon domaine de compétence, mais je pense que cela signifierait que le pays en question aurait le droit de régir l'exploitation de ces ressources, mise à part la question de la propriété. Il faut reconnaître qu'il serait en mesure de régir ou de contrôler à tous autres égards cette exploitation d'une manière conforme aux intérêts des Ceylanais.

M. Finlay: Merci beaucoup.

J'ai une autre petite question sur le phrase suivante. Aux termes du pacte, les États signataires élisent un comité des droits de la personne. Cela signifie-t-il les pays qui font partie de l'ONU?

M. Duern: Tous les pays signataires du pacte désignent les du comité à partir d'une liste de candidats présentés par les divers pays membres. Tout pays peut proposer un candidat et il existe un processus qui permet aux pays de s'entendre entre eux sur les candidats des uns et des autres qu'ils appuieront, afin de limiter le nombre de membres.

Le facteur clé, c'est que bien que chaque candidat soit désigné par un pays donné, un fois qu'un candidat devient membre du comité, il agit en toute indépendance. Il n'a pas de compte à rendre à son pays d'origine. Il n'est pas là pour représenter son pays d'origine. Les pays ne sont pas représentés aux comités en fonction de cela. C'est un organisme international indépendant.

M. Finlay: Merci beaucoup.

Je réserve mes autres questions.

Le président: Merci.

Monsieur Maloney.

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M. Maloney (Erie): La question a trait à la réconciliation des différentes attitudes, à l'échelle internationale comme nationale.

Étant donné la formulation large et générale des conventions, l'interprétation - et je prends l'exemple de celle que la Chine donne aux droits des femmes - peut différer grandement de celle que avons ici au Canada. La Chine peut estimer respecter les normes établies aux termes de la convention; nous, au Canada, nous pouvons penser autrement. Comment le comité peut-il faire concorder ces deux interprétations?

En outre, à l'échelle nationale, si une province prend position sur une question de compétence provinciale dans le domaine des droits de la personne et qu'il y a des divergences entre l'approche fédérale et la sienne - supposons que l'Ontario abroge sa loi sur l'équité en matière d'emploi, et nous avons certainement une opinion différente sur cette question - comment allons-nous concilier ces interprétations divergentes au sein de notre propre pays?

M. Duern: Sur le plan international, bien sûr, comme vous le dites, la formulation d'un bon nombre de ces conventions est très large et ces dernières peuvent être interprétées de différentes manières. Il incombe aux comités de décider dans des cas précis, en grande partie par l'examen des rapports, si un pays respecte en fait l'esprit et l'intention de la convention en cause.

Ce sont les comités, par leurs examens, leurs recommandations et leurs observations, qui tireraient les conclusions et mettraient de l'avant ce que, du point de vue des Nations unies, il faudrait faire pour qu'un pays donné observe pleinement la convention. Il y a donc toujours là un facteur d'interprétation.

Comme je pense l'avoir déjà dit, c'est par l'interprétation que la loi trouve son véritable sens. Très souvent, c'est d'autant plus vrai lorsque la question est de nature internationale.

Il existe une controverse en ce moment dans le domaine international, comme vous le savez. Des pays soutiennent que de nombreuses normes internationales établies en matière de droits de la personne reflètent les normes de certaines cultures et peut-être pas vraiment celles d'autres cultures. L'opinion contraire veut que, non, il existe certains droits de la personne tellement fondamentaux qu'ils ne peuvent qu'être universels. La discussion se poursuit et je pense bien qu'elle durera pendant longtemps.

Y a-t-il eu réconciliation? Pour l'instant, je dirais qu'on est en voie de se réconcilier. Ce qui se passe, c'est que des comités des Nations unies font valoir l'interprétation que donne l'ONU de ce que sont des droits dits universels. Il y a des pays qui ne sont toujours pas d'accord. Il s'exerce, pour ainsi dire, une certaine pression morale dans les deux sens. On espère qu'au bout du compte, nous allons nous orienter vers une acceptation de plus en plus grande de ce que sont des normes internationales et de ce qu'elles devraient être et de la façon dont on doit les faire respecter.

Pour ce qui est des différentes interprétations à l'échelle nationale, d'une certaine manière ce processus de conciliation précède la ratification de toute convention internationale. Je le disais, le mécanisme permanent des comités vise à faire en sorte qu'il y a de larges consultations fédérales, provinciales et territoriales avant que le Canada ne signe une convention internationale. C'est au cours de la préparation d'une ratification qu'on cerne les interprétations possibles et les problèmes qui pourraient se poser. C'est à ce moment-là que nous tâchons d'en tenir compte.

Il y a différentes façons de s'y prendre. Dans la pratique, cela n'a pas suscité beaucoup de problèmes. Quand c'est le cas, une possibilité serait évidemment de ne pas ratifier une convention internationale.

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Par le passé, lorsque des sources de difficulté sont survenues, le gouvernement fédéral a pu faire appel à un autre moyen en signant un traité mais en y ajoutant ce qu'on appelle une réserve ou un protocole d'entente.

Une réserve, c'est une clause qu'on ajoute et qui précise qu'on accepte la plupart des dispositions de la convention mais que l'on ne souscrit pas à un article ou à une clause en particulier. C'est un moyen très rarement utilisé, mais cela s'est vu.

Lorsque l'on recourt à un protocole d'entente en cas d'ambiguïté, cela ne va pas tout à fait aussi loin qu'une réserve. Le gouvernement canadien explique comment il interprète un certain article qui pourrait donner lieu à diverses interprétations, et c'est la condition qu'il impose pour ratifier l'entente.

C'est une pratique qui est considérée comme étant acceptable à condition que le nombre des réserves ou de protocoles d'entente soit strictement limité. Évidemment, ça n'aurait pas beaucoup de sens de signer un traité mais d'exprimer des réserves sur la moitié des clauses. Les réserves et les protocoles d'entente doivent être très spécifiques et très limités. Jusqu'à présent, cela n'a jamais été un problème.

Je ne suis pas certain d'avoir répondu à toutes vos questions.

M. Maloney: Il ne me reste qu'une seule question. A-t-on déjà dit que le Canada ne remplissait pas ses obligations dans un domaine donné en ce qui concerne les normes imposées par les Nations unies sous forme d'ententes dans le domaine des droits de la personne?

M. Duern: Pour toutes les conventions?

M. Maloney: Comment nos résultats se comparent-ils? À quel rang nous plaçons-nous? Est-ce qu'il y a des domaines où nous ne sommes pas à la hauteur?

M. Duern: Si vous me demandé si nous sommes en violation de certaines conventions, la réponse est oui et non. Il y a un cas particulier, mais il s'agit d'un problème d'interprétation. Un article de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale veut qu'on criminalise les organismes racistes. Le Canada, comme la plupart des pays de tradition gouvernementale anglo-saxonne ou britannique, considère que la criminalisation d'une association poserait de graves problèmes sur le plan de la liberté d'association.

Cela dit, nous n'avons aucun mal à criminaliser les actes racistes, la propagande raciste, etc. Notre position est donc la suivante: Non, nous ne criminalisons pas les organisations racistes, nous nous contentons de criminaliser les activités racistes et nous allons suffisamment loin dans ce sens pour empêcher à toutes fins utiles ses organisations d'agir. Racistes ou pas, elles sont neutralisées. Voilà notre position.

Sur le plan pratique, il faut considérer également que la criminalisation d'une association n'est pas forcément efficace. L'association peut changer de nom et de numéro de téléphone et recommencer à zéro. L'important, ce sont donc les activités.

Et c'est là qu'on voit une différence entre deux tradition de la juridiques, c'est-à-dire entre la tradition du droit romain qui est répandue en Europe et la tradition de la common law. De toute évidence, cette convention a été rédigée beaucoup plus dans l'esprit de la tradition juridique de l'Europe continentale.

Techniquement, donc, nous sommes en violation, puisque nous n'avons jamais criminalisé d'organisation. Le Comité des Nations unies sur la discrimination raciale nous signale cela régulièrement et, régulièrement, nous répondons: Oui, mais... Nous avons les lois nécessaires dans nos statuts; nous pouvons arrêter leurs activités, nous le faisons, et c'est une situation qui continue. C'est dont un petit détail qui accroche.

Cela dit, c'est le seul exemple d'une violation, ne serait-ce que technique, d'une convention auquel je puisse penser dans le cas du Canada ans le cas du Canada. Auquel si vous allez dans le détail de l'interprétation de toutes les implications des dispositions de toutes les conventions, il est certain que divers comités diront: Effectivement, vous respectez telle ou telle clause, mais en réalité, vous devriez aller plus loin.

.1200

C'est plus une discussion qu'autre chose.

M. Maloney: Merci.

Mme Gaffney (Nepean): Monsieur Duern, je vous souhaite la bienvenue.

Je suis nouvelle venue à ce comité, mais je suis députée de longue date. Je siège au comité du patrimoine, et il y a un certain lien entre les deux sujets.

J'ai l'impression que nous risquons d'avoir un conflit. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques relève de ce comité, ce qui me paraît normal. C'est une affaire internationale, mais avec des répercussions nationales. C'est la raison pour laquelle ce comité est bien choisi pour s'occuper de la question. Toutefois, ce comité effectue l'analyse, prépare le rapport, et pourtant, c'est le ministère des Affaires étrangères qui présente ce rapport aux Nations unies. Cela revient selon moi à émasculer le comité.

En effet, nous faisons tout le travail de préparation car cela concerne l'intérieur du pays, mais comme les Affaires étrangères sont un organe international, on enlève à ce comité le fruit de ses travaux qui sont présentés aux Nations unies par le ministère.

Au cours de la précédente législature, j'ai siégé au sous-comité chargé d'étudier les droits de la personne sur la scène internationale et également sur la scène domestique. C'était un comité extrêmement actif et j'ai trouvé que son rapport avait été quelque peu édulcoré.

C'est peut-être une question que je ne devrais pas vous poser, monsieur Duern, mais est-ce que vous trouvez cela normal que ce rapport soit présenté au comité des Nations unies par le ministère des Affaires étrangères?

M. Duern: Il faut que je revienne en arrière un instant. Le point principal c'est que ces rapports sont des rapports officiels du gouvernement. Ils ont toujours été préparés - et c'est ce que les Nations unies nous demandent de faire avec ces rapports - par des fonctionnaires et, par conséquent, aucun comité de la Chambre n'a jamais participé à la préparation de ces rapports. En fait, c'est le gouvernement qui prépare ces rapports.

Ces rapports sont en réalité une communication entre un gouvernement signataire et les Nations unies. C'est la raison pour laquelle ils sont traités comme des documents confidentiels jusqu'au moment où ils sont véritablement déposés aux Nations unies. À partir du moment où le gouvernement canadien dépose ces rapports devant les Nations unies, ils deviennent des documents publics.

En ce qui concerne le rôle des Affaires étrangères, je dois vous signaler que ces rapports étant constitués presque entièrement de questions nationales, à l'exception de certains éléments extérieurs, comme la politique d'aide - des questions nationales donc, du droit national, la responsabilité de la préparation de ces rapports est en réalité confiée au ministère du Patrimoine canadien. Au départ, c'était le Secrétariat d'État qui en était responsable, et ensuite le Multiculturalisme et la Citoyenneté. Toutefois, comme il s'agit véritablement d'une question nationale, on a décidé de confier cela au ministère.

Le rôle du ministère des Affaires étrangères est de transmettre officiellement le rapport définitif aux Nations unies. Le ministre responsable de la préparation du rapport, celui qui approuve le rapport, c'est notre ministre, qui communique ensuite le produit fini au ministre des Affaires étrangères qui se charge de transmettre ce rapport aux Nations unies. Le ministère des Affaires étrangères, c'est notre courrier vers le monde extérieur, il faut que cela passe par là. Par contre, c'est notre ministère qui prépare le rapport, puisque nous sommes responsables des questions nationales.

Mme Gaffney: J'allais rester sage et silencieuse aujourd'hui, mais il a fallu que je pose une question.

M. Grose (Oshawa): Monsieur Duern, comme d'habitude, vous avez répondu en partie à certaines de mes questions, mais il me reste trois ou quatre points à démêler.

Une question me préoccupe un peu, celle de l'application. Les nations présentent aux Nations unies des rapports qu'elles préparent elles-mêmes. Il peut s'écouler un an entre le moment où un rapport est déposé et le moment où il est examiné. D'autre part, les rapports de comité ne sont pas obligatoires et... les autorités fédérales et provinciales partagent la responsabilité de ces rapports.

Malheureusement, le terme que j'allais utiliser m'a été volé par ma collègue. J'allais demander si cela n'avait pas tendance à «émasculer» le système, du moins sur le plan international? N'hésitez pas à me dire que je me trompe.

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M. Duern: Sur le plan international? Vous voulez dire que c'est aussi difficile à appliquer dans d'autres pays qu'au Canada?

M. Grose: Si on considère le programme sur le plan international, si on considère que ces rapports proviennent des autorités qui en sont l'objet, qu'il y a des délais, qu'ils n'engagent à rien, etc., est-ce qu'il y a vraiment un moyen - c'est une expression affreuse à utiliser dans ce comité - de serrer la vis aux pays qui évitent délibérément leurs responsabilités?

M. Duern: Pour serrer la vis, on peut exercer des pressions morales et faire appel à des moyens de persuasion morale. C'est précisément le rôle des Nations unies. Il faut d'ailleurs reconnaître que l'ONU fait de mieux en mieux. Et pour parvenir à cette amélioration, elle a appris, entre autres choses, à faire appel à des organismes non gouvernementaux. En effet, de plus en plus on fait appel aux ONG pour faire face aux problèmes posés les pays qui négligent de présenter des rapports ou qui présentent des rapports tout à fait insuffisants ou qui sont une distorsion de la réalité. Cela se produit. C'est une raison qui a poussé les comités des Nations unies à chercher d'autres sources d'information.

Évidemment, il s'agit de persuasion morale. Nous ne pouvons pas envoyer la police. Les Nations unies ne peuvent pas faire cela. Dans quelle mesure est-ce que cette persuasion est efficace? On peut citer des cas où ça n'a pas été très efficace. On peut citer des cas où, au contraire, cela a été très efficace. C'est le genre de situation où on peut se laisser obnubiler par tout ce qui semble ne servir à rien, ou encore on peut se dire que la situation serait bien pire en l'absence de ce système.

M. Grose: Merci.

Le président: Monsieur Scott.

M. Scott (Fredericton - York - Sunbury): Merci, monsieur le président.

J'aimerais revenir sur l'intervention d'Ivan au sujet du meilleur parti à tirer de cette persuasion morale. Vous avez dit que le gouvernement, les fonctionnaires, travaillant en collaboration avec divers ministères, préparent le rapport. De plus en plus, on voit des ONG prendre part à cet exercice. Je crois vous avoir entendu dire cela. Ces ONG pourraient participer à la préparation du rapport aux côtés des fonctionnaires. Ils pourraient ajouter une note en marge du rapport qui servirait de point de repère à ceux qui le lisent plus tard. Ils pourraient également discuter directement avec ceux qui sont appelés à examiner le rapport aux Nations unies, une fois le rapport déposé.

Maintenant, si ce comité en particulier était appelé à participer au processus, est-ce ça ne permettrait pas aux parties canadiennes d'exposer leur point de vue Parlement d'une façon beaucoup plus ouverte, plus transparente. En effet, si un argument moral a un certain poids international, il devrait également avoir un poids national pour que les organisations nationales puissent demander des comptes au gouvernement sur la façon dont celui-ci respecte ces conventions. Cela nous donnerait sur la scène internationale une position beaucoup plus forte qui nous permettrait d'exiger la même chose de la part des autres pays. Dans certains cas, j'imagine qu'il ne faudrait pas s'attendre à tellement de succès, mais au moins cela nous donnerait une position morale forte.

D'autre part, cela aurait pour effet de porter les problèmes à l'attention du gouvernement. En même temps, à la défense du gouvernement, cela permettrait de comparer nos réalisations à celles d'autres pays, et j'imagine que ces comparaisons-là nous seraient assez favorables. Ainsi, cet élargissement du débat serait un moyen intéressant de remédier à certaines faiblesses sur le plan de l'application et cela nous permettrait d'exercer des pressions politiques assez importantes. De nombreuses parties qui se sentent isolées du système auraient également la possibilité de participer légitimement au processus et de demander des comptes au gouvernement lorsque celui-ci ne s'acquitte pas de ses responsabilités dans certains domaines. À votre avis, cela marcherait-il?

M. Duern: D'accord. Il y a ici deux éléments qu'il faut absolument distinguer: d'une part la préparation du rapport, d'autre part l'examen du rapport.

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À propos de la préparation des rapports, si j'ai expliqué en détail la façon dont nous avons essayé de faire participer les ONG, c'est parce qu'il y a une réalité à laquelle nous ne pouvons pas échapper, le fait que les rapports sont des communications de notre gouvernement aux Nations unies. Ces rapports représentent le point de vue officiel du gouvernement canadien, si bien que la décision finale du contenu du rapport doit toujours appartenir au gouvernement. De son côté, celui-ci doit être prêt à défendre cette décision.

Comme je l'ai dit, pour faire participer les ONG, nous les avons invités à nous faire part de leurs idées, de leurs préoccupations, etc, ce qui nous donne une base et un point de départ pour certaines réponses. Mais en fin de compte, c'est le gouvernement qui doit décider du contenu du rapport.

Pendant la période de préparation d'un rapport, quel qu'il soit, je ne verrais pas d'inconvénients - ce serait même probablement très utile - à ce qu'un comité participe à cet exercice en nous faisant part de ses préoccupations. Ce sont des éléments dont nous aurions sans doute à tenir compte lorsque nous préparons le rapport.

M. Scott: Encore une fois, cela dépend de... Si cette persuasion morale est une forme de pression tangible, ce qui me frappe, c'est qu'il nous suffit de décider si ce sont les pressions internationales ou les pressions nationales qui ont le plus d'effet sur les gouvernements. On n'est pas vraiment forcé de choisir l'une ou l'autre, mais personnellement, j'ai l'impression que lorsque la marmite commence à bouillir à Fredericton - York - Sunbury, c'est beaucoup plus convaincant qu'un frémissement aux Nations unies. À mon avis, c'est le moyen d'exercer des pressions dans le cadre de cet exercice de persuasion morale.

S'il me reste suffisamment de temps, j'ai encore une question.

M. Duern: En fait, j'avais autre chose à dire à ce sujet, si vous le permettez.

De ces deux aspects, la préparation du rapport est peut-être d'une certaine façon l'aspect le plus limité. Il y a un autre élément qui pourrait intéresser le comité, c'est le fait que lorsque les rapports sont déposés aux Nations unies, c'est-à-dire lorsqu'ils deviennent des documents publics, rien n'empêcherait le comité de procéder à son propre examen. Cela permettrait au comité de prendre connaissance de ce que le gouvernement canadien dit aux Nations unies. Ce genre d'information vous serait probablement très utile.

Mais il y a d'autres aspects qui pourraient intéresser le comité. Lorsque les rapports sont examinés, par exemple, toutes les conclusions ou observations des comités des Nations unies sont également rendues publiques.

Le mandat de notre ministère est de promouvoir la discussion publique et de familiariser le public avec les questions relatives aux droits de la personne; d'autre part, les Nations unies ne cessent d'encourager les pays à stimuler la discussion publique sur les droits de la personne d'une façon générale et sur les droits de l'homme au niveau international. Le comité pourrait donc servir de forum à ce genre de discussion, un développement qui serait avantageux à tous les points de vue.

M. Scott: En ce qui concerne les stratégies, on a comparé tout à l'heure les démarches du droit romain, du droit civil et de la common law... Je ne me souviens pas de...

M. Duern: Il s'agissait d'un comité sur l'élimination de la discrimination raciale.

M. Scott: Exactement. On s'interrogeait sur la nécessité de criminaliser l'activité ou de criminaliser l'association. Je crois que c'est ce dont il s'agit.

Est-ce qu'une tierce partie tente d'évaluer la stratégie pour que nous puissions prouver que les objectifs sont relativement similaires quand une partie du monde aborde le problème d'une façon et une autre partie d'une autre façon? En fin de compte, le but est d'éliminer le racisme, mais est-ce que quelqu'un a cherché à évaluer l'efficacité de ces démarches différentes?

M. Duern: Vous revenez encore une fois au système de comités des Nations unies. Non, je ne pense pas qu'il existe un organisme céleste ou angélique qui puisse se détacher suffisamment de tout cela pour tirer des conclusions scientifiques.

Excusez-moi, j'ai un peu de mal à cerner cette question.

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M. Scott: Vous reconnaissez donc que dans une partie du monde on a choisi une certaine démarche pour lutter contre le racisme et dans une autre partie du monde, une démarche différente. C'est un sujet qui semble digne d'attention.

Face à ce problème, deux démarches différentes sont possibles. Ce qui me frappe c'est que cela peut être, au minimum, une question de curiosité. Une de ces solutions pourrait donner de meilleurs résultats mais dans les deux cas on peut apprendre quelque chose.

M. Duern: Pour revenir à cette question, je ne sais pas. C'est peut-être un de ces cas où on se demande: quel est le système qui fonctionne le mieux? Je ne suis pas expert en ce qui concerne l'efficacité des mesures anti-racisme dans d'autres pays, mais j'ai l'impression que les efforts déployés par un gouvernement ont peut-être plus d'importance que le système lui-même.

D'un autre côté, la situation diffère selon les pressions sociales qui s'exercent dans une société donnée. Par exemple, l'Allemagne interdit les associations racistes. De toute évidence, cela n'a pas éliminé le problème.

Le président: Avant de passer au second tour, nous allons nous interrompre car nous avons absolument besoin d'un quorum - un quorum que nous avons pour l'instant - pour approuver le budget de notre étude sur la stratégie nationale. Donc, au cas où quelqu'un aurait un rendez-vous ailleurs, nous allons régler cela tout de suite.

Nous allons avoir d'autres questions à vous poser, monsieur Duern. Je me penche maintenant sur les documents budgétaires préparés à notre intention par notre greffier. J'attends une motion portant leur adoption.

M. Maloney: Monsieur le président, j'ai une question à poser. Je constate que nos amis de l'opposition ne sont pas ici aujourd'hui. Par mesure de courtoisie, est-il absolument essentiel d'approuver ce document aujourd'hui ou ne devrions-nous pas attendre qu'ils viennent, ou du moins leur envoyer un préavis? J'imagine que nous avons...

Le président: Effectivement, un préavis a déjà été envoyé. Le greffier me dit qu'il reste encore l'étape du comité de liaison. En fait, nous allons entendre le premier témoin mardi prochain.

M. Maloney: Autrement dit, il faut le faire tout de suite.

Le président: Il faut le faire tout de suite. Mais votre observation était tout à fait justifiée, monsieur Maloney.

Cela dit, êtes-vous prêt à proposer l'adoption de ce document?

M. Maloney: Je le propose.

Le président: Discussion?

Oui, monsieur Scott.

M. Scott: Dois-je comprendre que si le comité décidait de se déplacer, ou même si à titre personnel les membres du comité pour une raison ou pour une autre...? Puisqu'il n'y a pas de budget, est-ce qu'il s'agit uniquement d'approuver cet aspect-là, c'est-à-dire un poste budgétaire supplémentaire? C'est bien ce que cela signifie?

Le président: Oui.

M. Scott: D'accord. Merci, monsieur le président.

Le président: Y a-t-il d'autres questions? Tous ceux qui sont en faveur de cette motion?

La motion est adoptée [voir les Procès-verbaux]

Le président: Cela dit, nous reprenons notre discussion avec M. Duern.

Monsieur Finlay, vous voulez poser une autre question?

M. Finlay: Merci beaucoup, monsieur le président. Je reviens aux questions posées par mon collègue.

Dans votre exposé, monsieur Duern, vous avez dit que ce n'était pas réglé comme du papier à musique, tous les deux ou trois ans, mais que nous sommes arrivés à produire un rapport tous les quatre ou cinq ans sur, en l'occurrence, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le dernier rapport date de 1990; comme nous sommes en 1995, c'est le moment.

Est-ce que nous avons un rapport pour 1995 et, si ce n'est pas le cas, est-ce que le dernier rapport des Nations unies sur les résultats obtenus au Canada en ce qui concerne l'égalité des femmes, par exemple - le Canada s'est classé au septième ou huitième rang - serait basé sur des données qui remontent à environ 1985-1990? Le rapport de 1990 est le dernier en date, est-ce qu'on peut tirer cette conclusion?

M. Duern: En fait, le rapport auquel vous faites allusion doit être celui de l'UNESCO. Plusieurs organismes et agences des Nations unies font des rapports sur diverses questions sociétales, mais ces rapports ne sont pas forcément fondés sur les rapports des pays individuels.

L'UNESCO en particulier, mais d'autres organismes également effectuent des études sur la qualité de la vie et divers autres aspects. C'est donc plutôt une démarche qui s'apparente aux sciences sociales et qui se fonde sur toute une série d'indicateurs économiques et sociaux.

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Les rapports que les pays préparent au sujet des conventions et pactes relatifs aux droits de l'homme peuvent être consultés, mais je pense que vous faites allusion à une question qui est distincte du système des droits de l'homme. De toute évidence, des questions interviennent, mais il s'agit plutôt d'une analyse socio-économique qui porte sur l'insertion de certains groupes dans une société donnée. C'est une démarche de nature plus scientifique.

M. Finlay: C'est plus objectif, plus scientifique.

M. Duern: Plus objectif, oui.

M. Finlay: Vous avez dit que les rapports préparés dans le cadre des pactes des Nations unies sont préparés par le gouvernement à l'intention des Nations unies. Sont-ils préparés par des ministères du gouvernement? Est-ce que ces rapports sont déposés à la Chambre ou soumis au comité ou bien encore au Cabinet? Ou bien au contraire, sont-ils préparés par un ministère et envoyés directement aux Nations unies?

En réponse à la question de mon collègue, vous avez dit que les réactions du comité des Nations unies étaient publiques, mais par contre, le rapport n'est pas public. Je ne demande pas que le rapport soit publié, mais quand je vois l'expression «du gouvernement aux Nations unies», je me demande quelle est la place du Parlement dans tout cela? Quelle est la place du Cabinet? Quelle est la place du comité?

Le président: Quand nous disons «gouvernement», cela signifie une intervention du cabinet.

Monsieur Duern, vous voulez répondre à cette observation?

M. Duern: Oui, c'est dans ce sens que j'utilise le terme «gouvernement». Il s'agit d'un rapport officiel, et comme je l'ai dit, un rapport préparé par des représentants officiels.

Je tiens à être bien clair; ce rapport n'est pas public tant qu'il n'est pas déposé devant les Nations unies. Dès qu'il est déposé, il devient un document public et nous le distribuons.

Vous avez fait une autre observation.

M. Finlay: Je croyais que cela faisait partie du gouvernement. Je croyais que notre comité était là pour accomplir une tâche gouvernementale qui me semble très importante.

M. Duern: Je précise que ce rapport est préparé par des fonctionnaires. Dans tous les cas, le rapport est approuvé par le ministre du Patrimoine canadien. Dans certains cas, d'autres ministres peuvent également approuver divers passages si leurs services respectifs sollicitent l'approbation ministérielle.

Puisque ces rapports sont censés, dans une large mesure, être fondés sur des faits, il n'est pas nécessaire de réclamer l'approbation des instances supérieures, c'est-à-dire des ministres, dans tous les cas. C'est un rapport préparé par des fonctionnaires. Certains éléments sont passés en revue par un ministre du Cabinet ou plusieurs, puis le tout est transmis aux Nations unies.

M. Finlay: Ils ne sont pas soumis à ce comité.

M. Duern: Non, les comités parlementaires ne participent pas à la préparation des rapports proprement dits.

M. Scott: C'est une observation intéressante. Il y a plus de deux ans, pendant un moment je me suis intéressé à titre personnel à ce genre de choses. Je me souviens d'avoir entendu parler de citoyens canadiens qui étaient allés aux Nations unies et qui avaient contesté la performance du gouvernement du Canada dans divers domaines des droits de la personne.

À titre purement personnel, je dois reconnaître que je m'étais dit: quel dommage que les gens se sentent obligés d'aller à New-York ou ailleurs pour protester contre le gouvernement. En fait, je reconnais que je suis très mal informé à ce sujet - à l'époque je m'étais probablement dit que ces personnes essayaient plutôt d'épater la galerie. Aujourd'hui, je m'aperçois que c'est vraiment nécessaire car ce rapport n'est même pas public avant d'être déposé là-bas. Dans ces conditions, comment peut-on protester, en sa qualité de Canadien, si c'est ce qu'on veut faire?

Prenez le domaine des droits de la personne. Cela implique entre autres les relations entre l'État et ses citoyens. À mon avis, les citoyens ont un rôle important à jouer, c'est une fonction très saine, lorsqu'ils portent un jugement sur la position adoptée par notre gouvernement devant la communauté internationale en ce qui concerne l'application de ces pactes. Ce comité est donc tout justifié de donner aux Canadiens toutes les occasions possibles de s'exprimer.

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Je reconnais qu'en fin de compte, c'est le gouvernement qui fait rapport, il doit défendre ses rapports, etc., mais je pense que ce serait un énorme progrès sur le plan de la transparence et également par rapport aux aspirations de notre population. En effet, il semble que ce soit là les deux seuls leviers susceptibles de pousser le gouvernement à faire quoi que ce soit. Je suis heureux de m'être trouvé dans ce comité, ce qui m'a permis de m'apercevoir de cela.

Le président: À ce sujet, je précise que Mme Gaffney a soulevé cette question dont elle a une longue expérience, à la fois à l'époque où elle faisait partie de l'opposition et encore aujourd'hui, dans la majorité, puisqu'elle a même été présidente de ce comité à un moment donné, tout comme messieurs Maloney, Grose, Finlay, et maintenant, M. Scott.

Vous avez répondu tout à l'heure que le comité pouvait intervenir après que le rapport est déposé aux Nations unies. J'ai une question bien précise: d'après votre expérience, serait-il plus fructueux, plus utile de donner un rôle à ce comité avant que le rapport ne soit déposé aux Nations unies? Oui ou non?

M. Duern: Vous voulez parler d'une participation dans le sens que j'ai décrit tout à l'heure?

Le président: Non. Je vais m'exprimer plus clairement car il nous reste peu de temps. J'aimerais être le plus clair possible.

J'ai l'impression de bien comprendre les sentiments des membres du comité. En bref, le comité voudrait pouvoir voir un projet de rapport, c'est-à-dire le rapport dans une version presque définitive, mais qui pourrait être modifiée à la suite des recommandations de ce comité. Si des changements s'avèrent nécessaires, le comité aurait alors la possibilité de consulter le public canadien.

Je pense que cela exprime assez bien la position des membres de ce comité que je vous soumets maintenant. Ma question est donc très précise: cela vous semble-t-il utile?

M. Duern: Oui ou non?

Le président: Nous voudrions des indications. Nous savons qu'il s'agira forcément d'une opinion.

M. Duern: Sur le plan pratique, cela rendrait probablement la préparation du rapport encore plus difficile qu'elle ne l'est déjà, sinon pratiquement impossible. L'important, c'est d'aboutir à un texte qui reflète la position officielle du gouvernement canadien. Autrement dit, le gouvernement canadien doit pouvoir préparer le rapport comme il l'entend.

Cela dit, s'il s'agit de stimuler la discussion publique, de faire participer le public, une fois le rapport préparé, si le comité souhaitait l'étudier de façon approfondie et peut-être même inviter les ONG et également les fonctionnaires qui ont travaillé sur les documents, à faire des observations, cela pourrait stimuler une discussion particulièrement intéressante et cela permettrait au public canadien de mieux se familiariser avec la question. Bien sûr, cela nous serait utile à nous également puisque cela fournirait des éléments utiles à la préparation du rapport suivant.

Le président: À ce sujet, quand le quatrième rapport doit-il paraître?

M. Duern: En fait, il aurait dû paraître en juin, mais nous avons pris un peu de retard.

Le président: À partir de quelle date est-ce que ça commence à être trop tard?

M. Duern: Il n'y a pas de date limite.

Le président: Est-ce que ce comité aura encore une fois l'occasion de se pencher sur cette question avant que le rapport ne soit déposé, ou bien est-ce déjà trop tard?

M. Duern: Si le rapport est en retard, c'est que nous attendons certaines contributions. Comme vous le savez, 13 sources contribuent à la préparation du rapport: le gouvernement fédéral, les 10 provinces et les 2 territoires.

Le président: Quand pensez-vous posséder tous ces éléments?

M. Duern: D'ici peu.

Le président: Autrement dit, c'est un sujet qui a beau intéresser le comité, en ce qui concerne ce quatrième rapport, la participation du comité et les consultations du public canadien que nous pourrions organiser, sont inutiles parce qu'il est trop tard?

M. Duern: À ce stade, ce serait extrêmement difficile.

Le président: Quand le cinquième rapport doit-il être préparé?

M. Duern: Cinq ans plus tard.

Le président: Justement, c'est une occasion ratée, il ne nous reste qu'à attendre cinq ans. Le comité en prend note.

Je ne voudrais pas vous mettre sur la sellette, mais à propos de la question posée par M. Finlay au sujet de l'environnement et des ressources naturelles, vous avez peut-être noté ce qui a paru aujourd'hui et hier au sujet de la définition du développement durable. Le comité qui a préparé ce rapport a déclaré qu'il fallait envisager la durabilité pour les sept prochaines générations.

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Ma question est bien précise; d'après le document de recherche préparé par notre attachée de recherche, Nancy Holmes, une des fonctions de votre direction est de participer aux discussions lorsqu'il est question de créer de nouvelles conventions.

Vous avez répondu tout à l'heure que rien n'était prévu dans ce domaine en particulier. Pensez-vous maintenant qu'une nouvelle convention pourrait s'avérer possible à la lumière des nouvelles définitions du développement durable?

M. Duern: Je ne sais pas si cela a vraiment sa place dans le contexte des droits de la personne. Que je sache, il n'y a pas actuellement à l'étude ou en considération une convention sur les droits de la personne consacrée à ce sujet.

Le président: Mais est-ce que cela ne fait pas partie de votre domaine de compétence sur le plan du développement économique et social? Il ne s'agit pas forcément et strictement de droits de la personne, bien que certains prétendent que la pauvreté relève des droits de la personne.

Dans ce domaine assez élargi, est-ce que vous ne pourriez pas jouer un rôle, ou bien est-ce que votre direction se penche déjà sur la question?

M. Duern: Non, notre direction est là pour effectuer des consultations et coordonner la réaction canadienne chaque fois qu'on envisage de ratifier une convention existante.

Le président: Est-ce que votre direction est chargée d'examiner la nécessité de nouvelles conventions et d'en discuter?

M. Duern: Non, ce qui nous intéresse, c'est le bien-fondé de signer ou de ratifier des conventions qui existent déjà. En ce qui concerne la nécessité d'adopter de nouvelles conventions, cela relève des Affaires étrangères.

Le président: Je vois.

Je reviens à la participation des ONG; vous leur envoyez des lettres et des sondages, et les ONG vous répondent. Est-ce qu'on n'a jamais cherché à regrouper tous ces gens-là ensemble, dans un cadre interactif, à organiser une conférence, un atelier, une table ronde ou un séminaire? Cela ne s'est pas produit.

M. Duern: C'est surtout que cela pose des problèmes d'ordre pratique.

Comme je crois l'avoir dit, ce genre de chose s'est avéré possible dans le cas de la Convention relative aux droits de l'enfant, et c'est donc ce que nous avons fait. Cela dit, il s'agissait d'un nombre relativement restreint de groupes, c'est-à-dire des regroupements d'organismes: la Coalition canadienne des droits de l'enfance, pour les questions d'ordre général, et cinq organismes autochtones pour les questions spécifiquement autochtones qui étaient particulièrement en cause. C'est la configuration de ce secteur-là qui avait rendu la chose possible sur le plan pratique.

Dans d'autres cas, ce serait impossible sur le plan pratique. Dans le cas des droits civils et politiques, c'est un sujet très large, et comme je l'ai dit, nous avons écrit à plus de 200 groupes de diverses importances dans tout le pays. Cela dit, j'imagine qu'il serait complètement impossible de réunir tous ces gens-là.

J'aimerais ajouter un petit détail; c'est une possibilité à laquelle nous commençons tout juste à nous intéresser, mais en plus des lettres que nous écrivons, nous suivons attentivement ce qui se passe sur Internet. Cela pourrait offrir des possibilités. Il faudra peut-être attendre quelques années, mais lorsqu'un grand nombre de ces groupes auront les moyens de se brancher, ce sera probablement un autre forum possible. Pour l'instant, ce n'est pas encore sûr mais nous suivons cela de près.

Le président: Si vous le permettez, je demande l'indulgence de mes collègues, j'aimerais poser une dernière question au sujet de la Direction des droits de la personne. S'agit-il d'une structure ministérielle ou interministérielle?

M. Duern: Notre direction fait partie du ministère du Patrimoine canadien, mais elle a pour rôle de coordonner les contacts avec d'autres ministères du gouvernement, avec les provinces et les territoires.

Le président: Quels sont les effectifs de la Direction des droits de la personne?

M. Duern: À l'heure actuelle, huit personnes. Normalement, nous devrions avoir onze personnes, mais certains employés ayant pris leur retraite ou étant partis, nous ne sommes plus que huit.

Le président: Est-ce que c'est leur seul rôle, leur seul mandat? Est-ce qu'on les a engagés spécifiquement pour cette tâche, ou bien ont-ils d'autres activités et fonctions ailleurs dans le ministère?

M. Duern: Vous voulez savoir si en plus de leurs tâches dans le domaine des droits de la personne, ils ont d'autres tâches?

Le président: Oui.

M. Duern: Non, ils s'occupent exclusivement des droits de la personne.

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Il y a un service qui s'occupe exclusivement des rapports et un service plus important qui s'occupe de promotion et d'éducation dans le secteur des droits de la personne. Je fais partie du service des rapports.

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

Mme Gaffney: Merci monsieur Pagtakhan.

Est-ce que la direction n'est pas un organisme indépendant à qui le ministère du Patrimoine a accordé un contrat de sous-traitance? Est-ce que je me trompe.

M. Duern: Le service fait partie, à part entière, du ministère.

Mme Gaffney: Ah oui. Merci beaucoup.

M. Duern: Monsieur le président, je viens de penser à une chose que j'avais l'intention de mentionner tout à l'heure en réponse à M. Grose, je crois, et que j'avais oubliée.

En plus de l'influence morale des comités, je tiens à signaler que dans le cas du Pacte relatif aux droits civils et politiques, nous sommes également signataires à un protocole facultatif, et dans le cadre de ce protocole, tout citoyen qui pense avoir été victime de violation de ses droits civils ou politiques, peut faire appel devant les Nations unies et se faire entendre devant cette instance, mais seulement après avoir épuisé tous les autres recours, des recours qui peuvent aller jusqu'à la Cour suprême.

Encore une fois, la décision des Nations unies n'a pas un caractère obligatoire, mais dans l'éventualité d'un tel appel, une décision négative de la part des Nations unies a une force morale considérable.

Une Canadienne au moins s'est prévalue de cette possibilité d'appel et le système a bien fonctionné; il s'agit de Mme Lovelace, lorsqu'elle revendiquait son statut d'Indienne.

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

Je tiens à vous remercier au nom du comité d'avoir participé à nos délibérations. Je suis désolé que Mme Young se soit trouvée indisposée et dans l'incapacité de nous faire part de ses opinions, mais je comprends. Encore une fois, monsieur Duern, merci beaucoup.

M. Scott: Monsieur le président, ce n'est pas d'une urgence vitale, mais je vous demande d'être indulgent car je connais mal la procédure à suivre. J'aimerais qu'on envisage la possibilité de donner préavis d'une motion ayant pour effet de changer le nom du comité.

Le président: Ce genre de requête est toujours recevable car nous avons déterminé qu'une motion ne pouvait pas faire l'objet d'une discussion le jour où elle est déposée si elle n'a pas été inscrite à l'ordre du jour. Vous pouvez donc donner votre préavis.

M. Scott: C'est ce que j'espérais pouvoir faire, donner un préavis.

Le président: D'accord, allez-y Andy.

M. Scott: Cela découle de l'exposé que nous avons entendu lors de la première réunion de ce comité à laquelle j'ai assisté. À ce moment-là, M. Clark, je crois, avait observé qu'on ferait mieux de mettre l'accent sur les personnes en cause et non pas sur leur handicap. En fait, dans son propre exposé, il a dit que nous devrions parler de personnes avec un handicap et non pas de personnes handicapées.

Dans ces conditions, il me semblerait raisonnable de changer le nom du comité et de remplacer «comité des personnes handicapées» par «comité des personnes avec un handicap». Je ne voudrais pas provoquer une avalanche de paperasserie, mais si nous voulons nous inspirer de l'esprit de ce rapport, il me semble que ce changement serait justifié.

Le président: Prenez donc note de ce préavis de motion qui a pour effet de remplacer l'expression «personnes handicapées» par personnes avec un handicap». D'accord, le préavis de motion est accepté.

Y a-t-il d'autres motions? Y a-t-il d'autres idées au sujet de la suite de nos délibérations aujourd'hui, ou bien cela peut-il attendre la prochaine fois?

M. Finlay: Monsieur le président, j'ai beaucoup apprécié les questions que vous avez posées au témoin au sujet du but que nous recherchons tous, mais pensez-vous qu'il soit tout à fait exclu pour ce comité de voir le quatrième rapport avant qu'il ne soit envoyé aux Nations unies? C'est bien votre conclusion?

Le président: C'est exact, dans sa grande sagesse, lorsque nous aurons terminé d'entendre ces témoins, que ce soit aujourd'hui ou à une date ultérieure lorsque les membres de l'opposition seront là également, le comité pourrait se pencher sur cette question et se demander quelle leçon il faut tirer de tout ce que nous avons entendu.

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M. Scott: Il me semble qu'ils essaient de rédiger un rapport à partir d'un cadre, donc il n'est pas nécessaire d'avoir le rapport, mais seulement le cadre. On pourrait tenir des audiences au sujet du cadre et obtenir des réponses aux questions. Ensuite on pourrait faire rapport au gouvernement de ce qu'on a entendu et demander au gouvernement de tenir compte du rapport.

Je pense que c'est grâce à la participation de la population qu'il sera possible d'exercer des pressions. En fin de compte, ce n'est pas le rapport qui va avoir cet effet. Par conséquent, entendre le point de vue de l'Organisation nationale anti-pauvreté concernant le cadre du rapport aura la même incidence que la participation de ce groupe à la rédaction du rapport.

Le président: Oui, et c'est la raison pour laquelle j'ai demandé si la question est discutable à ce stade-ci. Si l'on invitait maintenant la population canadienne à se prononcer sur la question, et ensuite nous nous rendons compte que nous n'avons pas le temps de terminer l'étude avant la rédaction du rapport, nous pourrons avoir des problèmes.

En même temps, je pense que le comité aura compris de cette expérience que présenter un rapport dans cinq ans c'est trop tard. Il faut commencer à songer à la question maintenant pour ceux qui seront membres du comité à ce moment-là.

John, voulez-vous nous informer d'une motion que vous voulez déposer?

M. Maloney: N'y a-t-il pas danger de double emploi ici? Il a dit qu'ils ont eu une réponse de la part de plus de 200 groupes, organisations et particuliers dans toutes les régions du pays, et qu'ils sont en train de rédiger leur rapport à partir de ces informations. Il y a dix provinces et deux territoires qui participent aussi à la rédaction du rapport. Est-ce qu'on est en train de réinventer la roue?

Le président: Ce serait le cas si aucune autre voie ne s'offre à nous.

M. Maloney: Estimez-vous que le rapport doit être examiné par la population?

Le président: C'est au coeur même de la question.

M. Maloney: Dans ce cas, je l'accepte. Mais d'après ce qui s'est passé pour le premier, le deuxième et le troisième rapport, peut-on croire que c'est ce qui se fera? L'étude du quatrième rapport à la lumière du deuxième et du troisième rapport serait une tâche d'envergure et exigerait beaucoup de temps.

Le président: En effet. Votre remarque est fort pertinente. Peut-être que le comité directeur pourrait examiner cette question. Autrement dit, s'il faut que le comité joue un rôle avant que le rapport ne soit définitif, mettons dans cinq ans, le comité pourrait recommander que le rapport définitif soit terminé un an avant la date prévue, et de cette façon le comité disposerait d'un an pour faire son étude.

C'est difficile, bien entendu, parce que la vie d'une législature est toujours un peu précaire. Mais il faut que le rapport soit présenté à une date précise, quel que soit le gouvernement qui est au pouvoir. Le comité sera peut-être obligé de tenir compte de cela.

Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il faut examiner cette question. Après cet exposé, notre attachée de recherche, Nancy Holmes, pourra peut-être nous faire des suggestions visant à mettre au point des recommandations. De cette façon, nous aurons pris les devants lorsque cette question reviendra sur le tapis.

M. Maloney: Personnellement, je pense qu'il faut examiner le rapport.

Le président: Oui.

Sur ce, je lève la séance. Je vous remercie tous.

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