[Enregistrement électronique]
Le mercredi 7 juin 1995
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte. Cet après-midi, notre témoin est M. Seymour Isenberg, de l'Office national des transports.
Monsieur Isenberg, pouvez-vous nous présenter les gens qui vous accompagnent.
M. Seymour Isenberg (directeur général, Transport ferroviaire, Office national des transports): Merci, monsieur le président. Je suis accompagné de M. Ian Mackay, notre conseiller juridique; de M. Neil Thurston, chef de la Direction générale des taux et paiements; et de M. Don Rees, qui, au sein de cette direction générale, s'occupe des questions relatives aux grains et des autres questions relatives aux coûts, qui, d'après nous, pourraient vous intéresser, monsieur.
Le président: Je crois que vous devez faire un bref exposé, qui sera suivi de questions. Vous pouvez commencer quand vous voulez.
M. Isenberg: Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
La semaine dernière, nous avons transmis nos remarques préliminaires au greffier de votre comité. Par souci de brièveté, je ne lirai pas notre mémoire aux fins du compte rendu, mais j'en ferai simplement ressortir les points principaux, si vous êtes d'accord.
Le président: Allez-y.
M. Isenberg: Notre mémoire fournissait des renseignements sur trois grands points qui intéressent l'Office aujourd'hui. Les voici: premièrement, les responsabilités actuelles de l'Office national des transports en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest (LTGO) et la façon dont elles changeront par suite de l'adoption du projet de loi C-76 actuellement à l'étude par le Parlement; deuxièmement, la procédure ainsi que la démarche adoptées afin de procéder à l'examen des embranchements, que le ministre des Transports a récemment demandé à l'Office d'effectuer; troisièmement, le rapport du vérificateur général ainsi que ses conclusions relatives au programme régi par la LTGO et administré par l'Office.
Par la suite, nous répondrons volontiers à toute question portant sur les points mentionnés.
Nous sommes également accompagnés d'autres membres de l'office qui connaissent tous les aspects dont fait état le rapport du vérificateur général. Ils seront en mesure de répondre aux questions qui pourraient être soulevées à ce sujet.
Premièrement, les incidences de la réforme de la LTGO sur l'Office.
[Français]
la réforme de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest a une incidence majeure sur les responsabilités sous-mentionnées. Mis à part l'établissement de barèmes annuels, les responsabilités de l'Office relatives au programme actuel prendront fin lors de l'adoption du projet de loi C-76. L'Office continuera d'établir les barèmes annuels pendant la période de transition jusqu'à l'an 2000, en déterminant et en publiant les barèmes annuels liés à la distance. Il est prévu que l'Office prendra part à deux examens qui seront effectués, y compris l'examen effectué par l'industrie, lequel doit être complété d'ici le 1er août 1998, ainsi que l'examen qui doit être effectué en vertu de la loi en 1999.
[Traduction]
Deuxièmement, l'examen des embranchements. Le 10 avril dernier, le ministre des Transports a demandé à l'Office de procéder à l'examen des embranchements en acier léger et de certains embranchements de faible volume utilisés pour le grain des Prairies. Cet examen a pour but de faciliter la prise de décisions par le gouvernement fédéral en ce qui a trait à la procédure à suivre en cas d'abandon éventuel de ces embranchements. L'examen comportera des recommandations, à soumettre au gouverneur en conseil aux fins d'examen, concernant les embranchements en acier léger servant au transport d'un faible volume de grains, qui pourront être abandonnés à la suite de la nouvelle procédure accélérée proposée dans le projet de loi C-76. L'Office est tenu de soumettre son rapport sur l'examen au ministre d'ici au premier novembre 1995.
La décision en ce qui a trait aux embranchements qui seraient «désignés» et qui pourraient être abandonnés à la suite de la procédure accélérée sera fondée sur une analyse approfondie des coûts et des avantages pertinents, englobant les facteurs de coût pertinents qui touchent l'industrie de la manutention et du transport du grain.
L'examen comporte un processus de consultations, effectué par un groupe consultatif constitué de 24 représentants de l'industrie en général, y compris des représentants d'organisations de producteurs, de compagnies céréalières, de compagnies ferroviaires, d'entreprises de camionage, des gouvernements provinciaux et d'associations municipales.
Enfin, le rapport du vérificateur général. Comme vous le savez probablement, le 11 mai 1995, le vérificateur général a déposé à la Chambre son rapport sur les subventions au transport. Ce rapport traitait en partie des responsabilités de l'Office en matière de programmes régis par la LTGO. En gros, il était d'avis que les mesures de contrôle mises en place par l'Office en ce qui a trait au système d'administration des taux et de paiement des subventions étaient appropriées. Il était également d'avis que nos activités portant sur une grande partie de l'examen quadriennal des coûts étaient bien documentées et bien contrôlées.
Toutefois, le vérificateur général se disait préoccupé du fait que l'Office n'avait pas défini, de façon quantifiable, ce qui constituerait un réseau de transport ferroviaire adéquat, fiable et efficace pour le transport du grain. Le vérificateur général conclut cette partie du rapport traitant des activités de l'Office en vertu de la LTGO en formulant une recommandation. Celle-ci porte sur la saisie des données nécessaires ainsi que sur le recours à expertise et à l'analyse pour les deux examens qui seront effectués à la suite de la réforme de la LTGO. En ce qui a trait à cette recommandation, l'Office collabore étroitement avec Transports Canada.
Monsieur le président, je conclus ici mes remarques préliminaires. Le personnel de l'Office national des transports est maintenant tout disposé à répondre aux questions que vous pourriez soulever à ce sujet.
Le président: Qui veut commencer?
Monsieur Chrétien.
[Français]
M. Chrétien (Frontenac): Merci beaucoup, monsieur le directeur général.
Vous avez dit plus tôt que lorsque vous étudiez les possibilités d'abandonner des lignes peu importantes de chemin de fer, vous évaluez le coût versus les bénéfices.
J'aimerais vous rappeler, et obtenir votre point de vue là-dessus, qu'en dehors des bénéfices, il y a bien d'autres problèmes reliés à l'abandon de ces lignes de chemin de fer qui ne sont pas palpables en dollars. Qu'on pense aux centaines de camions qui brisent nos routes. On dit même qu'un camion représente, en termes de dommages aux routes, 40 000 autos. C'est presque incroyable. Chaque fois que, par l'abandon d'une ligne de chemin de fer, on met un camion de plus sur la route, on devrait multiplier cela par 40 000. Cela représenterait une circulation épouvantable.
On sait que l'état des routes est une compétence provinciale. On ne peut pas l'inclure dans les bénéfices. Et regardez le nombre de décès sur nos routes causés par l'industrie du camionnage.
Je mets donc sérieusement en doute le raisonnement voulant que, si ce n'est pas rentable, on ferme la ligne. Je suis en mesure d'en parler parce qu'on a fermé un tronçon de 382 km dans ma région. Évidemment, tous les intervenants politiques et économiques du milieu s'y sont opposés. On a même communiqué avec votre bureau, l'Office national des transports, mais la décision, évidemment, avait été prise longtemps à l'avance.
Cela ne touche pas, bien sûr, le transport des grains en particulier, mais j'aimerais quand même mettre en doute la théorie des coûts et bénéfices que vous mettez en pratique lorsqu'il s'agit de donner la permission d'abandonner des tronçons.
[Traduction]
M. Isenberg: Monsieur le président, si vous me le permettez, je vais replacer la question dans le contexte de l'étude spéciale que l'Office effectue actuellement à la demande du ministre des Transports. Ce sont les compagnies de chemins de fer elles-mêmes qui ont choisi les embranchements désignés dans l'Ouest, à savoir ceux qui sont en acier léger. L'étude en cours est l'occasion pour un grand nombre de groupes d'intérêt de passer en revue les facteurs qui auront une incidence directe sur la région en cas d'abandon d'un embranchement.
Qu'on songe notamment aux coûts liés à l'éventuelle amélioration des routes. Qu'on songe également aux possibilités, le cas échéant, d'aménager de courts tronçons. Ainsi donc, ce qui est actuellement effectué pour le compte du ministre fait appel à tous les intervenants importants qui ont un mot à dire dans le dossier.
Je crois que M. Chrétien a posé une autre question, qui avait trait au processus normal d'abandon en vigueur à l'Office national des transports. La disposition régissant la marche à suivre en cas d'abandon d'une ligne de chemin de fer figure dans la Loi de 1987 sur les transports nationaux. C'est dans le cadre de ce processus que l'Office examine l'éventuel abandon d'un embranchement ou d'une ligne principale.
Le président: Juste à titre d'information, je me demande si vous ne pourriez pas expliquer le processus d'abandon qui est actuellement appliqué en vertu de la loi.
M. Isenberg: Monsieur le président, je pourrais également fournir au comité un schéma. Nous avons un schéma d'analyse très simplifié qui explique le processus juridique suivi en cas d'abandon d'un embranchement en vertu de la loi actuelle. Je vais faire de mon mieux.
De façon générale, le transporteur fédéral peut, au moyen d'un avis, demander à l'Office national des transports l'autorisation d'abandonner un embranchement donné. L'Office exige que cet avis soit publié dans tous les secteurs concernés et reçoit des commentaires sur la voie ferroviaire de la part de toutes les parties intéressées, expéditeurs et autres. Au cas où une objection serait soulevée, l'Office procède à une analyse très approfondie des coûts afin de déterminer si l'embranchement est rentable ou non.
Si on conclut que l'embranchement n'est pas rentable et ne le deviendra vraisemblablement pas, la loi nous oblige à ordonner son abandon. Toutefois, si les perspectives d'avenir sont favorables, ce qui peut être prouvé lors de l'audience, qu'il s'agisse d'une étude de dossier ou d'une audience ouverte, l'Office peut alors décider s'il est dans l'intérêt public d'assurer le maintien de cet embranchement.
En vertu de la loi actuelle, si c'est le cas et que la ligne est déficitaire, le gouvernement fédéral doit absorber toutes les pertes qu'elle encourt. Voilà essentiellement ce qui est prévu dans la loi. Il y a également une disposition prévoyant un appel au gouverneur en conseil si les parties intéressées ne sont pas satisfaites de la décision prise par l'Office.
Je vais interroger mon conseiller juridique. Selon vous, ai-je omis quelque chose en expliquant le processus et le schéma, ou l'ai-je bien fait?
M. Ian Mackay (avocat, Direction générale des services juridiques, Office national des transports): Monsieur le président, à mon avis, M. Isenberg a brossé un tableau complet.
M. Isenberg: Oui, il y a aussi un échéancier à respecter. Le processus dure six mois depuis la date où la demande a été faite jusqu'à la date où nous devons rendre une décision. La loi ne nous autorise pas à faire traîner ce processus en longueur. Nous devons rendre une décision, quelle qu'elle soit, dans les six mois qui suivent l'envoi de l'avis à l'Office national des transports.
[Français]
M. Chrétien: M. Isenberg a entièrement raison. C'est la filière normale que j'ai vécue, mais je pourrais peut-être ajouter qu'il est très facile pour une compagnie ferroviaire de décider de rendre son tronçon non lucratif. On n'a qu'à donner un service exécrable, ou mieux encore, à refuser de nouveaux clients.
Je peux vous dire, monsieur le directeur général, qu'à mon bureau, on s'est déguisé en client très très sérieux voulant faire du transport de ma région vers Denver, au Colorado. On a commencé à 10 heures à traiter avec le Quebec Central et le CP. À 15h00, on n'avait pas réussi à obtenir de prix. On ne voulait absolument rien savoir de nous.
Je comprends pourquoi il passe de moins en moins de wagons et pourquoi c'est déficitaire. Je sais très bien que c'était déficitaire.
Mon commentaire avait pour but de compléter ce qu'a dit M. Isenberg.
[Traduction]
Le président: Nous avons déjà entendu la question que soulève M. Chrétien, pas tant à ce comité, mais dans des conversations en privé. Est-ce que l'ONT peut faire quoi que ce soit dans les cas où les clients ont l'impression que les compagnies ferroviaires ne leur offrent pas le service prévu?
M. Isenberg: Eh bien, en vertu de la loi actuelle, un expéditeur peut déposer une plainte auprès de l'Office national des transports s'il a l'impression qu'un transporteur ne s'est pas acquitté de ses obligations normales ou qu'il entrave de toute autre façon l'acheminement des marchandises. Nous analysons alors la plainte dans un délai prescrit. Donc, il existe un recours.
J'ajouterai, monsieur le président, que lors d'une audience relative à l'abandon d'une ligne, l'Office demande à ce qu'on lui fournisse tous les éléments tangibles établissant dans quel cas de figure la ligne pourra être économique dans l'avenir.
Donc, pour vous dire bien franchement, nous appliquons un processus très ouvert, dont le but est de faciliter la tâche aux Canadiens qui veulent expédier leurs marchandises par rail.
Le président: Madame Cowling.
Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Merci de comparaître devant le comité aujourd'hui.
J'ai déjà posé plusieurs fois cette question à d'autres témoins. Elle touche à l'inter-financement et à la rentabilisation du réseau.
Moi, je viens du Manitoba et mon collègue vient de l'est de la Saskatchewan. Nous constatons que dans un régime déréglementé, les agriculteurs de nos circonscriptions sont ceux qui devront payer le plus pour faire expédier leurs céréales à l'étranger, surtout ceux de Dauphin ou de Swan River, je crois, et ceux d'Estevan.
On n'a jamais parlé de l'inter-financement des embranchements, mais il n'a jamais été question non plus de l'inter-financement de l'axe ferroviaire vers l'est.
Pourriez-vous nous dire aux fins du compte-rendu, ou nous le communiquer plus tard, ce qu'il en coûte pour acheminer les grains. On me dit que 94 p. 100 du service en provenance de l'Ouest...que ce sont les producteurs de grain de l'Ouest qui financent le transport par chemin de fer d'est en ouest. Dites-moi, est-ce vrai? S'il est question d'instaurer un système rentable et équitable, j'estime que nous en sommes loin si les agriculteurs de l'Ouest doivent assumer ces coûts supplémentaires.
M. Isenberg: Je préfère poser la question à mes collaborateurs qui s'occupent du coût du transport du grain pour voir s'ils ne pourraient pas vous répondre de façon plus précise.
M. Neil Thurston (directeur, Coûts, taux et paiements, Office national des transports): Voilà une très bonne question, monsieur le président.
Au titre de nos responsabilités en vertu de la LTGO, l'Office national des transports doit effectuer une évaluation des coûts du transport des grains par chemin de fer tous les quatre ans et nous avons effectué cette étude pour la campagne agricole de 1992.
À cette occasion, nous avons pu déterminer le coût du transport du grain pour les compagnies de chemin de fer, mais uniquement dans la région de l'Ouest. Nous n'avons pas effectué cet exercice pour tout le réseau. Nos responsabilités se limitent au mouvement des grains dans l'ouest du Canada, à destination des ports admissibles aux fins d'exportation ou encore des grains qui sont destinés au marché intérieur et qui passent par Thunder Bay. Nous pourrions jeter un coup d'oeil à nos dossiers pour voir ce que l'on pourrait y trouver sur cette question de l'inter-financement telle que nous la percevons.
Les compagnies ferroviaires ont des réserves quant à la quantité de renseignements que l'Office peut rendre publics. Les compagnies de chemin de fer nous font parvenir des informations à titre confidentiel et nous devons nous plier aux limites qu'elles nous imposent à ce sujet. Mais nous jetterons un coup d'oeil sur ce que nous avons et, si cela vous convient, monsieur le président, nous ferons parvenir ces renseignements au comité à une date ultérieure.
Le président: Et le plus vite possible, car j'espère que nous aurons terminé la semaine prochaine.
Mme Cowling: Si vous pouviez nous les faire parvenir le plus vite possible, nous pourrions les soumettre au comité et les inclure dans notre présentation au ministre.
Mon autre question est la suivante. Dans l'Ouest, on parle beaucoup d'embranchements et d'abandon des embranchements. Eh bien, si nous ne sommes pas très prudents à cet égard, une fois que l'ONT se sera retiré, nous risquons de laisser un groupe de gens pour compte; nous risquons soudainement, si nous ne faisons pas attention durant la transition, de laisser tomber les agriculteurs. Je pense qu'il convient d'instaurer un climat de confiance, et quelqu'un doit surveiller ce processus.
Ne pensez-vous pas que nous aurons besoin d'un chien de garde, d'un organisme de supervision, quand l'ONT se sera retiré, pour ne pas abandonner ceux qui en fait se serviront du réseau pour écouler leurs produits sur le marché? La survie de tout le système dépend de ces éléments particuliers, à savoir les producteurs.
M. Isenberg: Vous parlez du retrait de l'ONT, madame Cowling. En fait, en vertu de la loi actuelle, en vertu de la Loi de 1987 sur les transports nationaux, tous les expéditeurs peuvent se prévaloir des dispositions de la LTN relatives à l'accès à la concurrence. Ces dispositions sont prévues pour assurer un équilibre entre les intérêts des transporteurs et ceux des expéditeurs. À ma connaissance, pour l'instant, les dispositions de la Loi sur les transports nationaux seront maintenues. Quand nous en arriverons au renouvellement des rails, il pourra y avoir des modifications - je ne sais pas ce dont il pourrait s'agir - mais, pour l'essentiel, d'après la loi actuelle, tous les expéditeurs peuvent se prévaloir des dispositions relatives à l'accès à la concurrence contenues dans la Loi sur les transports nationaux, et, aux termes de cette loi, les agriculteurs sont des expéditeurs.
Mme Cowling: Parfait. Je vous remercie.
Le président: Monsieur Hoeppner.
M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): Merci de votre visite, messieurs.
Est-ce que, à cause de la réorganisation complète du système, votre travail s'arrête ici ou est-ce que vous allez continuer...?
M. Isenberg: De toute évidence, le rôle qui nous avait été confié à l'origine en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, soit d'effectuer des versements aux transporteurs au titre de la subvention du Nid de Corbeau, arrive à terme cette année. Mais nous continuerons d'avoir un rôle à jouer relativement au tarif maximum fixé pour le transport du grain, jusqu'en l'an 2000, et nous aurons aussi un rôle à jouer dans l'examen du processus global coût-efficacité.
De plus, les expéditeurs de tout le Canada peuvent se prévaloir des dispositions de la Loi sur les transports nationaux relatives à l'accès à la concurrence. D'après ce que je crois savoir, notre rôle se poursuivra à cet égard.
M. Hoeppner: Combien de personnes y a-t-il à l'ONT, à l'organisme qui régit le système? Vous devez être plusieurs à siéger au conseil d'administration. Ou alors, comment fonctionnez-vous?
M. Isenberg: Eh bien, monsieur, nous sommes divisés, si «divisés» est le bon mot... Il y a d'abord un personnel permanent, composé de fonctionnaires, qui peuvent passer d'un ministère à l'autre. Par exemple, je relève du président de l'Office national des transports, qui est président et membre de l'Office. Et puis, il y a les autres membres qui viennent des différentes régions du pays, certains siégeant à titre permanent et d'autres à titre temporaire. Normalement, pour qu'une ordonnance prenne effet, deux membres doivent la signer.
Pour l'instant, nous avons un personnel d'environ 475 personnes. Je ne suis pas totalement sûr de ce chiffre. Les choses sont en train de changer au moment même où nous parlons. Dans l'avenir, plusieurs programmes seront interrompus, comme la subvention versée aux termes de la Loi sur les subventions au transport de marchandises de la région de l'Atlantique et de la Loi sur les taux de transport des marchandises dans les provinces maritimes. Cela aura une incidence sur nos effectifs. Donc, l'effectif de l'Office sera probablement réduit par rapport à ce qu'il est aujourd'hui.
Les pouvoirs, quant à eux, sont assumés par les membres du conseil. Le personnel nous prépare les cas, et ce sont les membres qui tranchent.
M. Hoeppner: Est-ce que les personnes clés sont nommées par le gouvernement? Comment sont-elles choisies?
M. Isenberg: À ma connaissance, les membres sont nommés par le gouverneur en conseil.
M. Hoeppner: Eh bien, cela m'amène à vous poser une question, et je m'adresse ici à vous en tant qu'agriculteur et non pas en tant que politicien.
M. Isenberg: C'est très bien.
M. Hoeppner: Il y a quelques mois, j'ai vu que vous aviez recommandé qu'on n'accorde aucune augmentation aux gens de l'administration de la Voie maritime du Saint-Laurent. On n'a pas tenu compte de votre recommandation, n'est-ce pas, et par décret, on a accordé une augmentation de 8,9 p. 100 à ces gens?
M. Isenberg: Je dirais simplement qu'il ne s'agit pas là de mon domaine de compétence, monsieur le président. Je suis directeur général du transport ferroviaire. Si vous désirez poser une question à ce sujet, nous pourrons vous désigner un témoin.
Mais pour vous répondre de façon générale, je vous dirai qu'il en est ainsi dans tous les cas concernant la fonction publique: le Parlement est suprême et le gouverneur en conseil peut renverser dans bien des cas les décisions rendues par les tribunaux administratifs, et c'est de cette façon qu'on a voulu que fonctionne le processus démocratique.
M. Hoeppner: Cela m'amène à vous poser une autre question. Vous continuerez de fixer les taux futurs jusqu'en l'an 2000. Êtes-vous vraiment investi de l'autorité nécessaire pour cela? Vos décisions risquent d'être renversées si elles ne plaisent pas au ministre.
M. Isenberg: À ce sujet, je pense que nous allons continuer d'utiliser les taux de 1994-1995, qui ne seront modifiés qu'en fonction de l'inflation. Je tiens à préciser ici qu'il s'agit de taux maximums. Rien n'empêche les expéditeurs de négocier avec les transporteurs des taux qui soient inférieurs aux taux maximums ou d'avoir recours à d'autres formules compétitives susceptibles de leur permettre de faire acheminer leurs produits à un coût moindre. C'est la même chose que dans le cas du contrôle des loyers, rien n'empêchant les gens de négocier des prix inférieurs au maximum établi.
M. Hoeppner: Mais on nous a clairement fait savoir, dans le milieu agricole, que les compagnies ne pratiquent que très rarement les taux minimums. On parle toujours de taux maximums dans le cas des frais de stockage en élévateur ou de nettoyage du grain. Il n'y a pas de concurrence, et nous espérons que les choses vont changer. Voilà pourquoi je me demande jusqu'à quel point l'agriculteur peut faire confiance à l'ONT.
Le vérificateur général a essayé de produire un rapport sur la question du rebroussement. Comme vous le savez, il y a un an, ce sous-comité a demandé à ce qu'on mette un terme au rebroussement. Tout le monde estimait que c'était illégal à cause de la clause de non-rendement dans la LTGO. Mais cela ne s'est jamais produit.
Pouvez-vous nous parler de l'évolution des coûts du rebroussement? Je soupçonne fortement que nous l'avons interfinancé en partie, comme Mme Cowling l'a dit. J'aimerais savoir où les subventions s'arrêtent; si elles s'arrêtent à la limite du Manitoba ou si elles soint maintenues jusqu'à ce que les marchandises arrivent au destinataire final, parce que c'est là quelque chose de très important pour moi, en tant qu'agriculteur.
M. Isenberg: Je vais vous donner une réponse très succincte et je demanderai à mes collaborateurs de la compléter.
La loi sur le transport du grain de l'Ouest permet le paiement de la subvention dans le cas que vous mentionnez, où il y a livraison à Thunder Bay. Une fois le grain arrivé à Thunder Bay, le contribuable n'est plus concerné car le coût n'est plus subventionné. Le système ne s'applique plus.
Le transporteur ou le groupe peut alors décider de mettre le grain dans un bateau et d'utiliser le système qu'il désire. Je suppose qu'il était dans l'intérêt des transporteurs de garder ce grain et de le ramener à l'Ouest. Les coûts ne sont pas touchés. Une fois que le grain arrive à Thunder Bay, ça y est.
Est-ce que quelqu'un de mon groupe veut ajouter quelque chose?
M. Thurston: Ce qui importe ici, c'est que tout ce que nous faisons tous les quatre ans au sujet des coûts en vertu de la LTGO permet bien de déterminer les coûts qui entrent en jeu dans le transport jusqu'au port des grains admissibles. Pour ce qui est de la question particulière du rebroussement, nous ne retiendrons que les coûts des chemins de fer, pour le transport des marchandises jusqu'à Thunder Bay. Aucun des coûts que subissent les compagnies ferroviaires au titre du transport du grain de Thunder Bay à Winnipeg, avant que celui-ci soit expédié vers les États-Unis, vers le sud, n'est inclus dans le prix de base d'établissement du tarif, aux fins de la LTGO.
La Commission canadienne du blé et les expéditeurs de l'ouest du Canada demandent aux compagnies ferroviaires d'acheminer le grain vers le marché américain par Thunder Bay, ou d'aller jusqu'à Thunder Bay pour revenir ensuite; les compagnies ferroviaires sont tenues de le faire si c'est ce que veut l'expéditeur. Dans ce cas de figure, les coûts sont pris en compte dans le calcul pour l'année de référence.
On nous a fourni certains chiffres. Nous avons comparu devant le sous-comité de la voie maritime, l'année dernière, et cette question nous a été posée. Transports Canada nous avait fourni des chiffres que le ministère avait lui-même obtenu des compagnies ferroviaires. Je crois qu'environ 1 million de tonnes de grain ont été expédiées à Thunder Bay, avec retour aux États-Unis. Encore une fois, ce renseignement a été fourni par les compagnies ferroviaires à Transports Canada, l'année dernière, quand cette question a fait surface.
Pour résumer, dans nos calculs de coûts, nous ne tenons compte que des coûts correspondant au transport jusqu'à Thunder Bay, et c'est ce que l'on retrouve dans...
M. Hoeppner: Donc, sur le chemin du retour, il n'y a pas de financement. On m'avait fait comprendre que le rebroussement était financé.
M. Isenberg: Non, le choix revient entièrement au transporteur ou à toute personne demandant au transporteur de transporter le grain ainsi.
Le président: Si je puis intervenir, Jake, ce système sera fait un fait accompli le 1er août 1995.
M. Hoeppner: Mais j'aimerais tout de même savoir ce que cela a donné et combien il en a coûté aux contribuables. C'est cela qui m'intéresse.
Le président: Allez-y.
M. Hoeppner: Mon autre question est la suivante: une fois que les subventions ont été versées, que les frais ont été prélevés, auprès de qui obtenez-vous vos renseignements? Quand je fais transporter mon grain jusqu'à un élévateur, on me facture le droit de mise à pied, la manutention et le fret. Est-ce que vos chiffres correspondent au transport jusqu'à l'élévateur? Est-ce que vous les obtenez directement de la Commission canadienne du blé?
M. Thurston: Monsieur le président, comme nous commençons à entrer dans des sujets techniques, peut-être que Don Rees pourrait répondre à cette question, puisqu'il s'occupe des méthodes de paiement et de calcul.
M. Don Rees (gestionnaire, Coûts, taux et paiements LTGO, Office national des transports): Pour vous répondre, je commencerai par vous citer quelques chiffres. Au cours des trois dernières années, environ 20 millions de dollars par an, en moyenne, ont été versés aux compagnies de chemins de fer pour le transport du grain jusqu'à Thunder Bay, avec rebroussement par la suite. Comme Neil vous l'a dit, le volume transporté a été d'environ 1 million de tonnes.
Comment en est-on arrivé à ces chiffres? Nous procédons toujours de la même façon au titre de notre système de paiement et même de notre système d'évaluation des coûts: une fois qu'un wagon a été chargé et qu'il a été autorisé pour l'exportation, nous confirmons qu'il est bien chargé de grain admissible conformément au barème et qu'il s'agit d'un mouvement également admissible. Dans toute la mesure du possible, nous nous servons de documents de tierce partie - normalement de ceux du Conseil des grains du Canada - pour vérifier le poids de la cargaison après chargement des wagons. C'est sur cette base que nous payons.
À ce stade, nous avons donc effectué trois vérifications. Nous nous sommes assurés qu'il s'agit bien de grain admissible, que c'est un mouvement également admissible et, enfin, nous avons confirmé le poids de la marchandise transportée dans le wagon.
M. Hoeppner: Donc, vous fonctionnez d'après les numéros des wagons. Est-ce que cette donnée prévaut sur toutes les autres?
M. Rees: Tout à fait. En ce qui nous concerne, les renseignements sont propres à chaque wagon, propres à chaque connaissement et ils sont même fonction de la date et de l'heure pour faire les recoupements nécessaires avec les documents d'une tierce partie. Si nous ne parvenons pas à obtenir confirmation d'une tierce partie, nous effectuons alors une vérification aléatoire dans les dossiers de l'expéditeur.
M. Hoeppner: Voilà un sujet qui m'intéresse. Comme vous le savez, je me suis trouvé quelque peu dans l'embarras à cause de toute cette question de la manutention du grain. Je me trouve à présent dans la situation où des agriculteurs ont exporté leur grain en vertu de licences d'exportation émises par la Commission canadienne du blé. Et voilà qu'ils se rendent compte qu'on a déduit de leur paiement initial, avant le rachat garanti, le taux de fret jusqu'à Thunder Bay. Qui obtient ce taux de fret?
M. Rees: Nous avons pour principe, à l'Office, qu'avant de faire tout paiement, nous devons obtenir confirmation de l'arrivée de la cargaison à Thunder Bay, dans ce cas de figure. S'il s'agit d'un autre mouvement ou si, lors de notre vérification, nous constatons que le wagon n'a pas été jusqu'à Thunder Bay ou qu'il transportait un grain non admissible, nous déduisons cette somme du montant réclamé par le transporteur. Donc, nous ne paierions pas ce taux de fret.
M. Hoeppner: Autrement dit, les compagnies ferroviaires ne peuvent absolument pas récupérer ce taux de fret facturé à l'agriculteur, puisque celui-ci va soit à la compagnie d'élévateur soit à la Commission canadienne du blé?
M. Rees: Ce que j'essaie de vous dire, monsieur, c'est que l'Office n'effectue aucun paiement s'il ne s'agit pas d'un mouvement admissible partant d'un point d'origine également admissible. Donc, pour que la compagnie de chemins de fer puisse nous réclamer quoi que ce soit, et que nous soyons, de notre côté, en mesure de confirmer que le mouvement est valable, le wagon doit effectivement avoir été amené jusqu'à Thunder Bay et jusqu'à Armstrong.
M. Hoeppner: C'est bon à savoir. C'est cela que je voulais savoir, parce que je sais qu'on effectue des déductions et j'essaie de voir où elles se retrouvent.
Si vous pouvez me garantir cela, vous me rassurez. J'avais l'impression qu'on subventionnait même ce taux de fret et j'espère que quand j'aurai été jusqu'au fond des choses, je constaterai que tel n'est pas le cas.
Le président: Monsieur Hoeppner, rien ne vaut un esprit comblé, surtout si c'est le vôtre.
M. Hoeppner: C'est sûrement ce que les Libéraux pourront faire pour vous.
M. Collins (Souris - Moose Mountain): Excusez-moi d'être en retard, monsieur le président.
J'ai ici le rapport du vérificateur général et je trouve très intéressant sa déclaration de la page 6-30, au paragraphe 6.94. Je me réjouis que vous soyez accompagné de votre conseiller juridique, parce que n'importe lequel d'entre nous traitant de cette question a besoin d'un avis juridique. Je ne sais pas qui sont ses rédacteurs, mais j'ai demandé à quelques autres...
Je vais commencer par vous lire ce passage:
- L'Office national des transports estimant qu'une analyse quantitative des critères était
impossible, il les a évalués de façon qualitative. Selon l'Office, on a examiné à cet effet les
retombées positives de chaque plan d'investissement.
- Je passe tout de suite au bas du paragraphe.
- Nous avons avons constaté que les contrôles existants, exercés par l'Office pour
l'administration des taux, et les systèmes de paiements de la subvention...
Bref, j'ai constaté, mais j'aimerais plutôt que répondiez à ma question... Monsieur Isenberg, que pensez-vous de ces remarques de nos amis du Bureau du vérificateur général?
M. Isenberg: Eh bien, comme vous l'avez dit vous-même, monsieur, ce n'est pas nous qui avons rédigé ce document. Le Bureau du vérificateur général est un organisme qui fait preuve d'un grand professionalisme et dont nous respectons le point de vue. À cet égard, il a une position particulière et nous la respectons.
Il est dit dans ce rapport que nous effectuons une évaluation qualitative du processus. Ce faisant, nous travaillons de concert avec le Comité supérieur du transport du grain. Nous collaborons également avec un grand nombre d'intervenants qui ont accès à nos analyses de coûts et autres, pour nous assurer que le système est adéquat et qu'il est fiable.
Voudriez-vous ajouter quelque chose?
M. Thurston: Comme M. Isenberg vient de le dire, le vérificateur général a son idée sur la façon dont le contrôle des investissements devraient s'effectuer et nous respectons son opinion. Il n'en demeure pas moins que nous nous sommes livrés à cet exercice à l'occasion de trois examens des coûts, de trois contrôles des investissements, et l'on dit ici que l'on devrait essayer de définir la chose de façon quantifiable ou d'établir des repères en ce qui a trait à l'efficacité, à la rentabilité et à l'adéquation.
Nous avons envisagé cette possibilité, mais nous estimons que nous avons appliqué une démarche diagnostique permettant la réalisation de ce genre d'analyse à laquelle viennent s'ajouter des évaluations qualitatives, travail que nous avons effectué en consultation avec le Comité supérieur du transport du grain.
Nous estimons que cette approche a bien fonctionné pour les trois examens que nous avons effectués, et les gens que nous avons consultés ne nous ont fait part d'aucune réserve à cet égard. Nous respectons l'avis du vérificateur général, mais je précise que nous avons abordé la chose comme je viens de vous l'expliquer: nous avons effectué une analyse quand c'était possible et nous avons complété ce travail par une sorte d'évaluation qualitative.
M. Collins: Mais il y a d'autres personnes qui ont critiqué votre démarche et si je vous ai posé la question, c'est parce que je leur ai demandé ce que cela signifiait, dans les mots du profane, dans les mots de tous les jours; ils m'ont dit que, en résumé, c'était une récusation.
Puisque vous avez fait cela trois ans de suite, combien de fois y a-t-il eu récusation dans le passé, ou s'agit-il de la première fois? J'espère, à ce sujet, que nous visons le même objectif.
J'ai lu cette histoire d'horreur au professeur Heads, que nous avons accueilli au comité. Lui non plus n'était pas d'accord avec le vérificateur général. Donc, je crois qu'il était sur la même longueur d'ondes que vous; il penchait pour la procédure que vous appliquez.
Mais voilà, je constate que nous obtenons ce genre de rapport. J'espère que les gens prennent le temps de voir comment vous fonctionnez, qu'ils ne se contentent pas de vous regarder à distance et d'écrire un gentil rapport qui n'a peut-être aucun lien avec ce que vous faites. Mais je crains que ce ne soit trop souvent ce qui se passe. On produit des tas de documents qui s'empilent sur les tablettes et qui n'ont pas beaucoup de rapports avec la réalité.
Un peu plus loin, au paragraphe 6.102, on apprend qu'en 1986 le gouvernement a adopté le programme RAR, le programme de réserves d'améliorations du réseau. Celui-ci va être abandonné. Que pensez-vous de l'idée de prévoir certains fonds, en vertu de la LTGO, pour maintenir ces programmes? Êtes-vous d'accord avec cette idée?
M. Isenberg: Monsieur le président, il s'agit d'une question touchant à la politique, et l'Officce national des transports est un tribunal administratif. Donc, nous n'avons rien à dire à ce sujet. En ce qui a trait à la LTGO, comme vous l'avez sans doute constaté dans le rapport, nous nous bornons à un simple rôle administratif qui découle essentiellement de la connaissance intime que nous possédons des questions reliées aux coûts du transport par chemin de fer.
Votre question est intéressante, mais elle ne relève pas de notre compétence.
M. Collins: Monsieur le président, c'est ce que j'ai constaté quand nous avons reçu le vérificateur général. Je pensais que j'allais devoir lui tirer les vers du nez pour lui faire dire ce qu'il voulait dire. Finalement, il a craché le morceau et il nous a dit: «Eh bien, ça veut dire que nous n'y croyons simplement pas».
Mais revenons-en à notre discussion. On a prévu le versement d'une somme de 10 000$ au titre du dédommagement par mille de voie abandonnée, et je ne sais pas s'il s'agit là d'une disposition administrative ou pas. J'espère que nous ne serons pas hors sujet et que vous pourrez éclairer notre lanterne. Il semble que les compagnies de chemins de fer ne souhaitent pas trop abandonner de longs tronçons de voies et qu'on ne dépassera sans doute pas les 500 milles. D'aucuns ont suggéré d'envisager 2 000 milles. Estimez-vous que cette somme de 10 000$ par mille de voie abandonnée est appropriée?
M. Isenberg: Il est difficile de vous répondre dans l'absolu, monsieur. Cette somme me semble globalement raisonnable, mais c'est dur à dire. De toute évidence, il s'agit d'une moyenne, et pour qu'il y ait des moyennes, il faut qu'il y ait des différences.
Je crois que je vais devoir demander à un de mes collaborateurs, plus versé que moi dans le calcul des coûts des chemins de fer, de vous répondre.
M. Thurston: En fait, il nous est difficile de nous prononcer à ce sujet. La réforme de la LTGO consiste essentiellement à retirer à l'Office ses responsabilités relativement à la tenue d'un examen de l'établissement des coûts, tous les quatre ans, examen qui avait pour objet de dégager les gains d'efficience et l'accroissement de la productivité des compagnies ferroviaires pour les quatre années précédentes. Je crois que cette somme de 10 000$ par mille est une sorte de compromis, un montant destiné à permettre aux utilisateurs du système de bénéficier de certains gains d'efficience futurs, mais cela n'équivaut pas à ce que nous aurions pu dégager dans un examen d'évaluation des coûts.
Il s'agit de protéger, d'une part, les intérêts des transporteurs en les incitant à continuer à investir dans le système parce que nous n'allons pas chercher tous les gains de productivité et, d'autre part, les intérêts des usagers qui veulent eux aussi profiter de la révision des coûts. Il faut trouver le juste équilibre entre les intérêts de ces deux parties.
M. Collins: Certaines personnes nous ont dit vouloir qu'on abandonne des lignes. Certains aimeraient que cela se fasse le plus rapidement possible. Où intervenez-vous dans tout cela? Si ces personnes s'aperçoivent que leurs coûts vont augmenter très rapidement et qu'elles vont devoir payer la totalité de la facture tout en sachant qu'on pourrait avoir intérêt à se défaire des lignes inefficaces, intervenez-vous pour les appuyer?
M. Isenberg: Nous ne jouons aucun rôle dans le processus que vous venez de décrire, monsieur. Nous intervenons une fois qu'un transporteur a présenté une demande d'abandon d'une ligne ferroviaire et nous décidons du cas en toute objectivité. C'est là que s'arrête l'intervention de l'Office national des transports dans le cas que vous venez de décrire. Nous intervenons sur demande. Nous ne prenons aucune initiative.
M. Collins: Une fois que ces personnes ont dit qu'elles veulent aller de l'avant, où intervenez-vous dans le processus?
M. Isenberg: Lorsque vous dites «ces personnes», faites-vous allusion aux transporteurs?
M. Collins: Je vais prendre l'exemple de l'UGG. Elle dit avoir des silos intérieurs. Je sais ce dont je parle parce que c'est mon secteur. Elle a certaines préoccupations. Combien d'exemples voulez-vous? Je vous dis qu'il y a certaines personnes qui veulent qu'on en finisse. Où intervenez-vous?
M. Isenberg: Monsieur le président, nous intervenons dans le processus d'abandon à la demande d'un transporteur sous réglementation fédérale. C'est à ce moment-là que nous invitons les parties intéressées à nous faire part de leurs observations. Autrement, nous ne jouons aucun rôle politique ni stratégique à long terme dans ce procesus. Nous sommes un tribunal quasi-judiciaire qui examine les cas qui lui sont présentés.
M. Collins: J'ai failli faire un infarctus lorsque je vous ai entendu dire «quasi-judiciaire».
Monsieur le président, on parle ici d'un organisme qui n'aurait aucun lien de dépendance. Je ne sais pas comment on va arriver à s'en sortir. Cela n'a rien à voir avec vous, mais je vois qu'il se passe des choses qui, selon moi, n'ont pas leur raison d'être. Quelqu'un s'amène et nous dit qu'il fait partie d'un organisme quasi-judiciaire, mais, en fait, qui est reponsable ici? Comment s'y retrouver dans tout cela?
J'étais déçu quand nous avons rencontré le vérificateur général, mais je dois dire que je suis maintenant doublement déçu parce que, d'un côté, on élabore une politique et que, de l'autre... Je comprends, mais je tiens à m'assurer que lorsque ce processus est mis en branle, les intervenants du système appuient le...
M. Isenberg: Monsieur, si cela peut vous rassurer, toute décision prise par l'Office national des transports peut faire l'objet d'un appel devant la Cour fédérale s'il s'agit d'un point de droit, ou devant le gouverneur en conseil, s'il s'agit de tout autre point. Comme vous le savez probablement, c'est le Parlement qui décide en fin de compte. C'est la filière que nous suivons.
Le président: Monsieur Isenberg, je pense que le sentiment que Bernie éprouve s'explique en partie par ce que la communauté agricole ne cesse de nous répéter. Il y a en effet des agriculteurs - pas nécessairement des expéditeurs - qui nous demandent si l'Office du transport du grain, qui va bientôt disparaître, et l'Office national des transports sont là pour protéger les intérêts des expéditeurs ou pour défendre les chemins de fer.
Le sous-comité s'est aperçu l'année dernière que l'expérience n'avait guère été concluante, en ce sens que les pénalités et les sanctions prévues par la LTGO ne s'étaient jamais matérialisées. On ne compte plus seulement sur les organismes nationaux pour protéger les intérêts des producteurs en vertu des diverses lois. C'est ce qui explique la frustration dont vous êtes témoins. Au moment où nous nous acheminons vers un nouveau régime dans le cadre duquel la LTN va remplacer la LTGO, malgré le peu de protection dont les producteurs jouissent, ils sont encore plus inquiets.
Je sais qu'un appel peut être interjeté devant le tribunal des décisions rendues par l'ONT. Mais je connais bien le système puisque j'ai participé à des audiences de l'ancienne CCP. J'ai eu affaire à des collectivités qui ont perdu leurs embranchements. Étant donné les frais juridiques en cause, il est hors de question qu'un producteur primaire ou une collectivité de 60 personnes en appellent devant le tribunal. Je sais cependant que c'est une bonne position de repli.
Quoi qu'il en soit, j'aurais quelques questions à vous poser au sujet du paragraphe 6.94 du rapport du vérificateur général. Elles portent en réalité sur le point que Bernie a soulevé et sur ce que je viens de dire.
Vous avez indiqué que le vérificateur général a son point de vue. Tôt ou tard, il va bien falloir se rendre à l'évidence que les agriculteurs ont eux aussi leur point de vue. Comment à travers tout cela arriver à mettre en place un système tel que l'information sera utile à la communauté agricole, un système qui fasse en sorte que l'analyse quantitative ou les chiffres donnés veulent dire quelque chose pour les agriculteurs et qui puisse susciter leur confiance? Les données se prêtent-elles à la prise de décisions? Les avons-nous? Pouvons-nous les obtenir? Ces données prouvent-elles à la communauté agricole qu'une décision rendue était effectivement juste?
Qu'avez-vous à répondre à cela? C'est ce à quoi le paragraphe 6.94 fait allusion.
M. Isenberg: Nous serons dorénavant responsables, monsieur le président, de la collecte des données qui nous permettront d'évaluer les coûts du transport du grain dans les Prairies. Je suis persuadé que l'Office a l'expérience qu'il faut, selon le processus actuel, pour déterminer les coûts de divers mouvements par chemins de fer et qu'il continuera à pouvoir compter sur cette expérience. Les experts comptables et financiers capables de comprendre comment les coûts du transport par rail sont évalués se trouvent actuellement à l'Office national des transports.
M. Thurston: Nous n'avons épargné aucun effort, ces dernières années, pour bien faire comprendre aux divers groupes d'intérêt le rôle et les responsabilités de l'Office national des transports, notamment en ce qui concerne la LTGO. Nous avons présenté des exposés sur la façon dont les taux sont calculés et sur les résultats des examens des coûts. Nous serions très heureux de fournir les mêmes renseignements non seulement au comité, mais aussi aux agriculteurs et ou aux groupes de producteurs qui, à votre avis, aimeraient avoir plus de renseignements sur notre rôle.
Quant au rôle futur de l'Office, M. Isenberg l'a bien défini. Nous aurons un rôle à jouer aux fins de l'établissement des taux pour ce qui est de la LTGO. Nous travaillons en collaboration très étroite avec Transports Canada, selon la recommandation que le vérificateur général a faite à propos de notre programme, à savoir que le gouvernement devrait veiller à ce que les ressources, les données et l'information soient disponibles pour pouvoir être utilisées dans les examens à venir. Nous travaillons avec Transports Canada en ce sens.
Quant à la question qui se rapporte au paragraphe 6.94, il s'agit d'un rapport au ministre des Transports. Ce rapport doit lui être présenté par l'Office conformément à l'article 29 de la loi. Il s'agit d'un rapport au ministre des Transports. Nous ne pouvons pas le publier, à moins que le ministre ne nous autorise à le faire. C'est tout ce que j'ai à dire à ce sujet pour l'instant.
Le président: Vous dites que vous travaillez de concert avec le ministère des Transports, mais certains membres de la communauté agricole nous ont donné l'impression que le ministère ne collaborait peut-être pas avec la communauté agricole en particulier.
Quant aux propositions actuelles, vous savez très bien, je suppose... J'imagine qu'on ne peut rien supposer; nous risquerions tous les deux de nous ridiculiser. Je suppose que vous connaissez bien l'examen du groupe de travail de l'Office national des transports.
M. Isenberg: Voulez-vous parler de l'examen qui a été dirigé par M. Gilles -
Le président: Je veux parler de la Commission d'examen de la Loi sur les transports nationaux.
M. Isenberg: Oui.
Le président: À moins que je ne me trompe, elle a déposé son rapport en 1993. Quelles sont, parmi les propositions à l'étude, celles qui font suite aux recommandations de cette commission d'examen?
M. Isenberg: Je pense, monsieur le président, qu'il faudrait plutôt poser la question à Transports Canada.
Généralement, une commission dépose son rapport auprès du ministre responsable, puis devant le Parlement. Le gouvernement élu représente l'autorité suprême et il peut choisir d'utiliser la totalité d'une recommandation particulière ou de la rejeter. Habituellement, d'après mon expérience du gouvernement, une recommandation est utilisée d'une manière ou d'une autre au cours des années qui suivent, notamment pour l'élaboration de politiques. Je le repète, cependant, monsieur, ce n'est pas à nous qu'il faut poser la question.
Le président: C'est parfait.
J'ai deux autres questions à poser avant que nous fassions un deuxième tour de table. Comme vous le savez sans doute, le mandat du comité est de regarder vers l'avenir étant donné les changements qui seront apportés - et nous les acceptons - pour voir ce qui peut être fait pour atténuer l'impact sur la communauté agricole et s'assurer que le système fonctionne efficacement, pour voir quelle allure peut prendre la diversification, etc.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, on tient absolument à s'assurer que le nouveau régime ne permettra pas aux chemins de fer d'exercer un monopole.
Pour en revenir à ce qui a été dit tout à l'heure, le Vérificateur général en est arrivé à la conclusion, au paragraphe 6.99 de son rapport, que l'ONT n'était pas parvenu à définir:
- ce qui constituerait un réseau de transport du grain adéquat, fiable et efficient.
- Sans une définition détaillée, l'Office ne peut conclure, comme il l'a fait, que les coûts et les
investissements contribuent au maintien d'un tel réseau.
Étant donné que la suppression de la LTGO va modifier radicalement les liens entre le producteur primaire, l'expéditeur et les transporteurs, les représentants ici présents pourraient-ils donner au comité une idée de ce que sera le rôle de l'Office en ce qui concerne plus précisément le secteur agricole de l'économie de demain?
C'est là le noeud de la questions: les gains en efficience seront-ils répercutés sur les producteurs, et pouvez-vous faire l'analyse qu'il faut pour veiller à ce que cela soit le cas?
M. Isenberg: Tout ce que l'Office national des transports peut dire pour vous rassurer, c'est que les agriculteurs, en tant qu'expéditeurs, auront accès aux dispositions de la Loi sur les transports nationaux concernant l'accès concurrentiel.
Cela veut dire que les transporteurs communs devront assumer leurs obligations; cela veut dire que les transporteurs devront acheminer le produit vers le point désigné; et cela veut dire que vous pouvez interjeter appel. Si vous avez l'impression d'avoir été traité injustement, vous pourrez déposer une plainte.
Je tiens à préciser que cela vaut dans la mesure où il continuera à s'agir d'un chemin de fer sous réglementation fédérale, parce que nous n'avons aucune autorité sur les chemins de fer sous réglementation provinciale.
Le président: Je vais laisser cette question de côté pour l'instant et revenir à M. Chrétien.
[Français]
M. Chrétien: J'ai trois petites questions, mais la première va entraîner la deuxième. Il y aurait actuellement, dans l'Ouest, cinq compagnies de chemin de fer. Pourriez-vous les nommer? Bien sûr, il y a le CN, le CP, la Central Western Railway Corporation, mais quelles sont les deux autres?
[Traduction]
M. Isenberg: Il y a de nombreux chemins de fer, mais en ce qui concerne les paiements en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, ils sont versés aux sociétés que vous avez mentionnées: le Canadien National, le Canadien Pacifique, Central Western, BC Rail et la Southern Rails Co-operative.
Je peux vous donner les chiffres officiels qui se rapportent aux sommes versées conformément à la LTGO pour 1993-1994 pour vous donner une idée quantitative de la situation. Le Canadien National a reçu 327 millions de dollars, le Canadien Pacifique, 305 millions de dollars, BC Rail, 1,9 million de dollars, Central Western, 3 millions de dollars et la Southern Rails Co-operative, 400 000$, ce qui fait au total 638,3 millions de dollars en 1993-1994. Cela vous donne une bonne idée, et comme vous pouvez le voir, les grands chemins de fer nationaux ont eu droit à la part du lion.
[Français]
M. Chrétien: Serait-il possible qu'une ou plusieurs des petites compagnies cessent leurs activités suite à la disparition de la formule d'aide en vigueur jusqu'au 1er août en vertu de la LTGO?
[Traduction]
M. Isenberg: C'est une question à laquelle il m'est difficile de répondre, monsieur. N'importe quelle entreprise qui compte sur une source particulière de revenu, risque de devoir cesser ses activités si cette source de revenu disparaît. Je ne peux pas dire si la disparition de cette formule pourrait avoir des répercussions aussi grandes ou s'il y aurait d'autres moyens pour une société en particulier de trouver des sources de revenu. Tout ce que nous pouvons vous dire, c'est combien nous avons versé à chacun de ces chemins de fer en vertu de la LTGO pour services rendus.
Ils ont bien sûr à assumer certains coûts. Je suis certain qu'il ne s'agit pas là de leurs profits nets. Nous ne pouvons toutefois pas vous dire si cette mesure aura le genre de répercussions dont vous parlez. Il faudra poser la question aux propriétaires de ces chemins de fer.
[Français]
M. Chrétien: Je vais revenir sur un point que mon collègue, M. Hoeppner, avait soulevé plus tôt. J'ai entendu répéter plus d'une fois que certaines compagnies ferroviaires transportaient des wagons-trémies à Thunder Bay. Ils les laissaient sur la voie ferrée pendant quelque temps et on prenait les mêmes wagons non déchargés pour les acheminer ailleurs afin de bénéficier d'une deuxième subvention au transport des grains. Je vous en parle pour que vous me disiez officiellement si ce que j'entendais dire était vrai ou faux, qu'il n'y a pas eu, à aucun moment, de distorsion et qu'on n'a pas bénéficié autrement des subventions de la LTGO.
[Traduction]
M. Isenberg: Cela vous rassurera peut-être de savoir, monsieur Chrétien, que dans le rapport dont nous discutons ici, le vérificateur général a examiné notre système de paiement pour s'assurer que nous observions la loi lorsque nous versions des subventions dont le montant s'est élevé ces dernières années à des milliards de dollars.
Le vérificateur général en est arrivé à la conclusion que notre système est adéquat - et je pense que c'est là le mot qu'il a utilisé - ce qui veut dire, dans son langage, qu'il n'a trouvé aucune irrégularité ni aucune erreur. Ce terme veut dire «bon» dans le langage du vérificateur général. Je pense que c'était soit adéquat, soit bon, et que c'est normalement ce qu'on peut trouver de mieux dans ces rapports.
Si cela peut vous rassurer, nous avons demandé à des vérificateurs professionnels de procéder à une vérification indépendante, qui a révélé que les mesures de contrôle en place permettent de croire que la loi a été respectée ces dernières années.
Le président: Monsieur Chrétien, avez-vous d'autres questions?
[Français]
M. Chrétien: Dans les journaux, j'ai lu des articles qui disaient qu'on aurait pu transporter les grains de façon plus économique. Ces articles étaient erronés, à moins que le vérificateur général ne puisse déceler qu'on aurait pu transporter à bon port ce grain par voie ferrée en partant du point A et en se rendant au point B, le point B étant le port de départ le plus rapproché pour prendre la mer.
[Traduction]
M. Isenberg: Je pense que le vérificateur a dit avoir constaté que l'Office national des transports s'était acquitté convenablement de son mandat en s'assurant que soient versées aux chemins de fer les subventions auxquelles ils ont droit selon la loi. Il n'a constaté aucune irrégularité.
Les autres points que vous soulevez concernent des questions de politique. Comme vous le savez probablement, lorsqu'une subvention est offerte, qu'il s'agisse d'une subvention comme telle ou d'un avantage fiscal, il est possible de modifier le comportement, parce qu'il arrive parfois que l'objectif de la politique soit d'encourager certaines choses, etc. Il n'est donc pas inhabituel que les gens à qui une subvention est offerte se comportent de manière à en tirer le plus grand parti possible ou mettent leurs projets à exécution.
[Français]
M. Chrétien: Je ne veux pas dire qu'il y a eu de la fraude ou quelque chose d'irrégulier. Évidemment, lorsqu'on prépare notre rapport d'impôt, on essaie tous - y compris les députés - d'aller chercher le maximum auquel on a droit. Je pense que les transporteurs font la même chose, et votre réponse en témoigne.
J'ai lu cela à plus d'une reprise avant d'entrer en politique. Monsieur le président, avant d'entrer en politique, vous avez sûrement lu des articles dans les journaux qui relataient qu'à partir de l'agriculteur pour se rendre à un port d'expédition, il y avait souvent des wagons-trémies qui se promenaient ici et là et que ce n'était pas rentable pour le pays. C'est la question que je vous pose. Cela existait-il? Cela ne devrait pas exister, mais si c'est encore le cas, ce sont les agriculteurs qui payeront. Ils n'ont pas intérêt à ce que leur blé se promène à travers le Canada avant d'arriver au port.
[Traduction]
M. Isenberg: Tout d'abord, comme vous le savez, les subventions versées en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest ne seront plus offertes à compter du 1er août. Donc, il est fort peu probable qu'on envoie son grain ici et là à la seule fin d'avoir droit à la subvention.
Mais ce qui est peut-être plus important encore, c'est que la LTGO a été adoptée par le Parlement et que la subvention devait être versée pour un type particulier de transport. En réalité, l'Office a été chargé - je n'essaie pas d'esquiver votre question - de verser des paiements après avoir vérifié que les produits avaient bien été expédiés vers les ports où ils devraient l'être. C'est là le véritable rôle administratif de l'Office national des transports et ce que le vérificateur général a dit, c'est qu'à son avis, nous avons adéquatement protégé les intérêts du contribuable en nous assurant que les paiements versés étaient légitimes.
Le président: Madame Cowling.
Mme Cowling: Pensez-vous que le rendement des chemins de fer va augmenter dans un régime déréglementé? Dans l'affirmative, pourquoi? Dans la négative, pourquoi pas?
M. Isenberg: Bien que vous veniez de me poser là une question à caractère essentiellement politique qui m'oblige à faire des suppositions, je dirai que la théorie actuelle veut que, peu importe le type d'entreprise, moins on réglemente, plus on alloue de liberté sur le plan commercial aux gens qui ont une plus grande expérience de la gestion de leurs affaires. Selon cette hypothèse, je m'attendrais à ce que ce genre de liberté favorise les gains en efficience au Canada, aux États-Unis et dans d'autres régions du monde. Je crois que c'est la politique actuelle du gouvernement, politique qui consiste dans la mesure du possible à déréglementer les secteurs où une réglementation ne s'impose plus.
Mme Cowling: J'ai une autre question. En vertu de la LTN, serait-il possible d'avoir une structure transparente d'établissement des taux en fonction des coûts?
M. Isenberg: Exception faite de la LTGO, l'ONT ne réglemente pas vraiment les taux. Il était simplement le dépositaire de contrats confidentiels, parce que la loi l'obligeait à l'être, et il avait pour fonction de recevoir les plaintes et d'enquêter sur celles-ci. Il n'établit cependant pas les taux pour le transport des marchandises. Il laisse au marché le soin de le faire.
L'avantage des dispositions concernant l'aspect concurrentiel, si un producteur est isolé en ce sens qu'il n'est desservi que par un seul chemin de fer, c'est qu'elles favorisent la concurrence parce qu'elles lui permettent, lorsque des manoeuvres interréseaux sont possibles, de demander à un chemin de fer concurrent d'expédier ses produits. Il peut ainsi bénéficier de ce qu'on appelle un prix de ligne concurrentiel, même si cela n'est pas arrivé très souvent. Encore une fois, c'est une simulation de la concurrence sur une distance plus longue.
Dans l'est du Canada, bien sûr, il y a d'autres modes de transport concurrentiels, pas pour les produits en vrac, mais pour d'autres genres de produits. Il y a toujours la concurrence des camions et du transport maritime, par exemple. Des forces concurrentielles interviennent donc je suppose, pour aider l'expéditeur à obtenir un meilleur prix des chemins de fer.
Le président: Pour poursuivre dans le même ordre d'idée, dans une certaine mesure... et je veux revenir aux dispositions sur l'accès concurrentiel. C'est peut-être que je ne comprends pas très bien. Si je prends les chemins de fer... si nous avions une grande carte de l'Ouest canadien, où à l'intérieur du réseau se situerait plus la concurrence?
Je vais vous rapporter ce que l'Alberta Wheat Pool a dit dans son mémoire. Elle a fait les observations suivantes à propos du rôle de la LTN dans la promotion de la concurrence par opposition à celui de la loi actuelle, la LTGO. Elle a dit que la LTN ne favorise pas la concurrence et nous comprenons tous cela. Elle a dit aussi qu'elle permet à un chemin de fer d'exploiter pleinement le marché captif qu'est celui du grain pour les expéditeurs. Les prix que devront payer les agriculteurs augmenteront à cause du caractère captif du marché. Les exigences sur le plan de la performance sont beaucoup plus faibles que dans le cas de la LTGO et rien ne dit que l'échec monumental en ce qui concerne la performance auquel nous avons assisté en 1993 et 1994 ne se reproduira pas.
L'Alberta Wheat Pool a ajouté que la LTN ne règle pas la question de l'absence de performance de la part des chemins de fer, qu'en vertu de la LTN, la performance est régie par les négociations individuelles entre un expéditeur et un transporteur et que la réglementation ne règle pas du tout la question du marché captif. C'est ce qu'elle nous a dit.
C'est ce que nous ont dit aussi les agriculteurs. Comment allons-nous nous assurer qu'il va y avoir de la concurrence? Les mesures visant l'accès aux autres transporteurs suffiront-elles? Je ne le pense pas. Vous pourriez peut-être essayer de m'éclairer à nouveau.
M. Isenberg: Nous avons toujours été prêts à expliquer à n'importe quel groupe ce que la LTN de 1987 peut faire pour lui, étant donné ses dispositions visant l'accès aux transporteurs.
Si on prend les chemins de fer, il est important de bien comprendre qu'ils sont monopolistiques par définition, parce qu'on a à faire à une infrastructure très coûteuse. Il faut de vastes étendues de terrain et de nombreuses mesures de sécurité, de sorte qu'on ne pourrait pas tout bonnement aménager une deuxième ligne à proximité d'une ligne existante à cause de l'augmentation phénoménale des coûts que cela supposerait pour tous les intéressés.
En 1987, quand la nouvelle loi a été rédigée, les gens qui s'en occupaient à l'époque ont essayé, si vous voulez, de simuler la concurrence sans intervenir outre mesure. Si vous examinez la loi - et nous sommes toujours prêts à expliquer aux groupes et aux collectivités quels sont leurs droits en vertu de la Loi sur les transports nationaux - vous constaterez qu'elle contient des dispositions qui permettent de simuler la concurrence; les gens qui le désirent peuvent avoir accès à un deuxième transporteur fédéral, ils peuvent demander un prix à une ligne de chemin de fer concurrente et ils peuvent aussi déposer une plainte au sujet du service et des tarifs. Donc, ces dispositions existent bel et bien.
Je dois souligner, monsieur, que nous donnons toujours une réponse rapide. Autrement dit, quand quelqu'un saisit l'office de quelque chose, il n'obtient pas sa réponse trois ans plus tard, mais bien 90 ou 120 jours après. La loi prévoit des délais très stricts. Donc, les réponses sont très rapides.
Nous constatons toutefois qu'il est très rare que les gens en arrivent à des relations de ce genre. Après tout, les transporteurs ne sont pas là pour mécontenter leurs clients et s'ils se rendent compte qu'un client n'est pas satisfait, ils essaient de négocier quelque chose avec lui, dans leurs meilleurs intérêts à eux, bien sûr. Donc, très souvent, on n'en arrive jamais vraiment à l'étape quasi-judiciaire, qui consiste à venir nous voir une fois que le transporteur est saisi d'une plainte. Il est possible que ce ne soit pas la même chose pour tout le monde, c'est à peu près ce qui se passe en général.
Le président: Au sujet de l'Office national des transports, le vérificateur général disait, aux 10 dernières lignes du paragraphe 6.108:
- Aux termes du programme actuel, certaines de ces sociétés sont légalement tenues de fournir à
l'Office national des transports certaines des données nécessaires. L'abolition du programme
mettra aussi fin à cette obligation. Si l'obligation n'est pas maintenue, on risque de
compromettre l'intégralité et l'objectivité de l'information provenant de ces sources.
M. Thurston: Comme je l'ai déjà souligné, et comme M. Isenberg l'a dit également tout à l'heure, dans sa déclaration préliminaire, c'est la seule recommandation que le vérificateur général avait à faire au sujet des programmes de l'office relatifs à la LTGO.
Nous travaillons actuellement en étroite collaboration avec le ministère des Transports pour déterminer quelles seront les données nécessaires pour nous permettre d'assumer nos responsabilités courantes, pour permettre au ministère d'assumer ses responsabilités en matière de politique et pour effectuer les deux examens dont il est question dans les énoncés de politique. Donc, nous en sommes encore à essayer de définir de quelle information nous avons besoin.
Nous savons à quelles données nous avons dû avoir accès pour remplir nos fonctions jusqu'ici. Nous allons avoir des responsabilités dans le domaine de l'établissement des barêmes, et c'est pourquoi nous allons évidemment avoir besoin d'un accès continu à l'information sur laquelle devra s'appuyer cette fonction. Mais du point de vue de la politique et de l'examen, je pense que c'est encore en discussion et que les choses vont certainement évoluer au cours des prochains mois, avant la fin de ce programme, le 1er août.
Le président: Merci. C'est bon à savoir.
M. Collins: Vous avez parlé d'une vérification indépendante. Quand a-t-elle eu lieu? Vous avez fait l'objet d'une vérification indépendante.
M. Isenberg: Nous parlions de la vérification du vérificateur général.
M. Collins: Vous avez mentionné une autre firme qui a...
M. Isenberg: Non, je ne pense pas.
M. Collins: Oh, vous vouliez parler du vérificateur général.
M. Isenberg: Le vérificateur général est indépendant de nous.
M. Collins: D'accord. Je pensais que vous parliez d'un autre organisme.
M. Isenberg: Non, monsieur.
M. Collins: Pour en revenir à ce que M. Easter a dit, le passage pertinent est imprimé en bleu. Je ne sais pas si vous avez vu le document...
M. Isenberg: Non.
M. Collins: ...mais c'est extrait est vraiment mis en relief, en gros caractères imprimés à l'encre bleue:
- Nous n'avons pu déterminer comment l'Office avait établi s'il existait un lien entre les coûts
subis par les chemins de fer et le maintien d'un réseau de transport ferroviaire adéquat, fiable et
efficient pour le grain de l'Ouest.
Pour une raison ou pour une autre, on a jugé que le message était vraiment important, parce qu'on a mis cela en gros caractères, séparément du reste. Cet extrait est imprimé en gros, en bleu, à la page 6-31.
Je me demande un peu jusqu'à quel point ces gens-là sont inquiets du processus en cours, parce qu'ils ont certainement voulu insister sur ce message.
M. Isenberg: Là encore, je ne peux pas interpréter les intentions du vérificateur général. Il a droit à son point de vue.
Nous avons déjà souligné, en réponse à cette question, qu'il existe un processus qualitatif à ce sujet-là, parallèlement aux critères quantitatifs. Dans une certaine mesure, si on s'attache à cet examen trop en détail, on en arrive presque à anticiper la gestion des chemins de fer. Mais ce n'est pas là le rôle d'un organisme de réglementation dans les années quatre-vingt-dix.
Le président: Donc, vous pensez que nous aurions dû anticiper la gestion des chemins de fer au CN il y a 20 ans?
M. Isenberg: Je n'ai pas d'opinion là-dessus, monsieur.
Le président: Je le comprends très bien.
M. Collins: Quand Mme Cowling a fait une observation, j'ai eu l'impression que vous vouliez éluder la question, mais vous avez dit - j'espère que je vous ai bien compris - qu'un allègement de réglementation pourrait entraîner des gains d'efficience. Est-ce que cela rend bien votre pensée?
M. Isenberg: C'est certainement la théorie qui a cours actuellement en Amérique du Nord.
M. Collins: Je suppose que vous êtes d'accord.
M. Isenberg: Je n'aime pas faire de déclaration générale applicable dans tous les cas, et dans tous les secteurs de l'économie, dans quelque pays que ce soit. De façon générale, quand on laisse aux gens plus de souplesse, ils trouvent la façon la plus efficiente de fonctionner, mais il faut aussi tenir compte de l'intérêt public, qui doit également être protégé.
M. Collins: Je suppose qu'en définitive, cela signifie que moins le gouvernement intervient, mieux c'est pour beaucoup d'entre nous - tant pour les petites entreprises que pour les grandes - parce que nous croulons sous la paperasse.
Permettez-moi de revenir à votre dernier commentaire. Vous parlez toujours de nous rassurer, eh bien, j'aimerais bien qu'on me rassure un peu. Il y a eu des discussions, et j'aimerais savoir ce qu'il en est. Vous pouvez prendre ma question dans un sens général ou alors vous pouvez y voir une intention sadique.
Qu'est-ce que vous diriez, monsieur Isenberg, si quelqu'un - par exemple M. Hoeppner - était nommé à l'ONT pour représenter le Parlement? Est-ce que cela vous rassurerait de savoir qu'il y aurait un député qui surveillerait vos faits et gestes?
M. Isenberg: Vous voulez dire qu'il serait nommé à l'Office national des transports?
M. Collins: Il serait là par le moyen que vous voulez. J'aimerais simplement savoir si cela vous dérangerait.
M. Isenberg: Les membres actuels de l'Office sont d'allégeances politiques très différentes. Je ne peux pas vraiment répondre à votre question, sauf pour dire que les membres de l'Office prennent des décisions indépendantes, en tant que membres d'un tribunal quasi-judiciaire.
M. Collins: Est-ce que cela vous dérangerait si, par exemple, M. Easter nous représentait là près de vous?
M. Isenberg: Je n'ai pas d'opinion là-dessus, monsieur. Il me semble que nous travaillons bien avec tout le monde.
M. Hoeppner: Vous avez parlé de «réponse rapide». M. Young a déjà dit, dans un discours quelque part, qu'il faut à peu près deux semaines pour faire modifier certains règlements aux États-Unis. Or, vous avez parlé de 90 à 180 jours. Allez-vous un jour devenir efficient?
M. Isenberg: Je ne sais pas exactement de quoi le Ministre parlait, mais c'était peut-être au sujet de la cession de nos lignes de chemins de fer.
M. Hoeppner: Il était question de réglementation, de lignes de chemins de fer et de cession.
M. Isenberg: Tout ce que je peux vous dire au sujet de notre travail, c'est que nous avons toujours respecté les limites fixées par la loi. À ma connaissance, depuis que je suis à la Direction générale du transport ferroviaire, nous avons toujours respecté nos délais.
M. Hoeppner: Est-ce que ces délais devraient être plus courts, alors?
M. Isenberg: C'est une question à laquelle vous devrez répondre, en tant que députés, monsieur. On a l'impression que la rapidité est synonyme d'efficience. Mais souvent, il faut du temps pour permettre aux intéressés de réagir à une proposition; il faut donc constamment établir un équilibre entre la rapidité de la réponse et la nécessité de donner aux gens le temps nécessaire pour réagir dans des délais raisonnables.
M. Hoeppner: Vous avez dit que les agriculteurs pouvaient avoir accès au régime de libre concurrence.
M. Isenberg: Oui, monsieur.
M. Hoeppner: Comment est-ce possible? Nous n'avons pas le droit d'obtenir, en tant que producteurs, tous les wagons dont nous avons besoin. Nous sommes assujettis à un système de quotas, quel que soit le nom que vous lui donnez. Je pense que c'est maintenant un système de contrat. Nous ne pouvons absolument pas y avoir accès, sauf que nous avons le droit d'aller voir de l'autre côté de la frontière.
M. Isenberg: Tout ce que je peux vous dire, monsieur, c'est que si vous expédiez des marchandises par voie de chemin de fer, vous êtes visés par les dispositions de la Loi sur les transports nationaux au sujet de la concurrence, comme n'importe quel autre Canadien qui veut expédier quelque chose par train.
M. Hoeppner: Mon autre question est la suivante: Vous avez dit que les subventions versées pour le grain de l'Ouest s'élevaient à 694 millions de dollars l'an dernier.
M. Isenberg: Il s'agit de 638 millions de dollars.
M. Hoeppner: Dans le budget, il est question de 540 millions de dollars. D'où vient cet écart?
M. Isenberg: C'est une question de volume.
M. Thurston: Les chiffres indiqués dans les documents, c'est-à-dire 540 ou 560 millions de dollars, ont été établis pour les besoins de l'établissement des taux, en prévision des récoltes et des mouvements de grain pour l'année suivante. Les chiffres cités par M. Isenberg correspondent aux paiements réels, qui reflètent le tonnage des marchandises ayant effectivement été transportées en 1993-1994.
M. Hoeppner: D'accord, merci.
L'autre question que je me pose porte sur vos méthodes d'établissement des coûts et sur les données dont vous tenez compte. J'ai rencontré quelques agriculteurs l'autre jour et ils m'ont dit que 11 wagons pleins avaient été renvoyés dans leur patelin. Est-ce que vous tenez compte de ce genre de choses dans l'établissement de vos coûts? Est-ce que vous acceptez les pertes de ce genre quand vous calculez les coûts?
Le sous-comité a entendu l'an dernier, des témoins de la FPC; je pense qu'il s'agissait des manutentionnaires de grains, ou des inspecteurs. Ils nous ont dit que, sur 13 000 wagons, environ 1 100 étaient mal chargés, devaient être transportés plusieurs fois ou n'étaient pas pleins de grains. Est-ce que vous tenez compte de tout cela dans vos coûts?
Le président: C'était en vertu de la LTGO, n'est-ce pas? Je ne pense pas que l'ONT ait été responsable de cela à ce moment-là.
M. Hoeppner: Mais est-ce qu'ils en tiennent compte quand ils établissent leurs coûts?
M. Thurston: Nous tenons compte seulement des coûts liés au transport des marchandises visées par la LTGO.
M. Hoeppner: Mais ces marchandises-là sont quand même transportées, même si ce n'est pas de façon efficiente.
M. Rees: Monsieur le président, la réponse à cette question, c'est que nous nous fondons sur l'année de référence. Ce que les compagnies de chemins de fer font les autres années découle de cette année de référence, sur laquelle nous nous fondons pour établir les coûts. Donc, si cela c'était produit en 1992, par exemple, nous l'aurions constaté. Nous avons examiné 440 000 mouvements depuis leur origine jusqu'à leur destination, en 1992. Je peux vous assurer, étant donné la façon dont nous avons analysé tout cela, que nous nous en serions rendu compte et que nous aurions posé des questions aux transporteurs. En fait, nous aurions normalisé la distance.
M. Hoeppner: Quand il a témoigné devant notre comité, M. Allen a dit que ce genre de choses se produit chaque année depuis une dizaine d'années.
M. Rees: Monsieur le président, je voudrais simplement répéter que si un wagon revient chargé pendant l'année de référence, par exemple, ce n'est pas considéré comme un mouvement. Le wagon doit être déchargé. Il doit avoir une origine et une destination admissible, dans une position admissible, et transport d'un grain admissible, selon l'horaire.
Autrement, s'il n'y a pas d'attente à la livraison, cela signifie que le wagon n'a jamais été chargé et que les compagnies ferroviaires ne seront pas payées. Cela n'entrera donc pas en ligne de compte dans nos coûts.
Le président: Les compagnies de chemins de fer vont comparaître devant nous mardi prochain; nous pourrions leur poser la question.
M. Hoeppner: Ma dernière question est la suivante. J'aimerais vous faire une suggestion sur la façon dont nous pourrions résoudre tout le problème de la concurrence. Je veux parler des droits de circulation. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Isenberg: La loi permet actuellement à toute société ferroviaire réglementée au niveau fédéral de percevoir des droits de circulation de toute autre société ferroviaire réglementée par le gouvernement fédéral.
M. Hoeppner: Et qu'en est-il des nouvelles lignes de chemins de fer?
M. Isenberg: Qu'est-ce que vous voulez dire? S'agirait-il de lignes réglementées au niveau fédéral?
M. Hoeppner: Supposons que les agriculteurs soient actuellement propriétaires de la majorité des wagons-trémies. Pourquoi ne pourrions-nous pas acheter quelques locomotives et lancer une nouvelle ligne de chemins de fer?
M. Isenberg: Vous pourriez le faire. Si vous étiez constitués en société ferroviaire et...
M. Hoeppner: C'est possible?
M. Isenberg: Il y a une procédure simple à suivre pour se faire constituer en société ferroviaire. Je ne devrais pas dire que cette procédure est simple, mais il y en a une. Si vous vous constituez en société en vertu des lois fédérales, vous aurez accès à toutes les dispositions sur la concurrence, notamment celles qui portent sur les droits de circulation.
M. Hoeppner: C'est intéressant.
M. Isenberg: Mais vous circuleriez sur la propriété de quelqu'un d'autre.
M. Hoeppner: Oui, mais vous dites que c'est le cas, parce que nous avons eu un problème à cet égard dans le cas des lignes couvrant une courte distance.
M. Isenberg: Encore une fois, un transporteur réglementé au niveau provincial n'a pas nécessairement des droits de circulation sur une ligne réglementée au niveau fédéral...
M. Hoeppner: Pourquoi cela ne peut-il pas être modifié?
M. Isenberg: Parce que c'est la loi et que vous devriez changer la loi.
Le président: Cela devient vraiment une question d'échange négocié.
M. Hoeppner: Monsieur le président, vous devez changer la loi. Cela permettrait de résoudre le problème très simplement.
Le président: Il faudrait que vous nous aidiez plutôt que de vous opposez à nous tout le temps.
Je voudrais poser une autre question au sujet du seuil de 10 000$ relatif aux abandons; c'est M. Collins, il me semble, qui en a parlé tout à l'heure. Nous entendons des opinions différentes à ce sujet-là, à savoir que si les économies sont supérieures à 10 000$, les sociétés ferroviaires abandonneraient probablement, alors que ce serait le contraire si ce montant était inférieur à 10 000$. Il me semble que j'ai bien compris. Qu'en pensez-vous?
M. Isenberg: Il faudrait le demander aux sociétés ferroviaires, parce que nous sommes là pour répondre à leur réaction. Nous ne leur suggérons rien nous-mêmes; nous nous contentons de répondre en vertu de la loi actuelle. C'est donc à elles qu'il faudrait demander quelle position elles vont prendre sur cette question-là.
Le président: Au nom du Comité, je vous remercie beaucoup, messieurs, d'être venus répondre à nos questions et de nous avoir remis votre résumé.
M. Isenberg: Merci, monsieur. Tout le plaisir est pour nous.
Le président: Nous entendrons maintenant M. Kancs.
PAUSE
Le président: Bon, nous poursuivons.
Monsieur Kancs, je pense que vous avez une courte présentation à nous faire, après quoi nous passerons aux questions. Vous avez certainement comparu devant de nombreux comités. Vous savez comment cela se passe. Je vous souhaite la bienvenue.
M. Henry Kancs (secrétaire-trésorier, Grain Workers' Union): Monsieur le président, madame et messieurs, j'ai reçu les questions de votre sous-comité et j'ai préparé des réponses à votre intention. On nous a demandé premièrement si, à notre avis, l'élimination des subventions au transport versées aux collectivités rurales dépendant de l'agriculture pourrait entraîner de nouvelles possibilités de diversification à valeur ajoutée et si oui, comment et sous quelle forme.
Ma réponse est la suivante: on constate déjà un virage vers les produits à valeur ajoutée parce que les agriculteurs les jugent plus profitables. J'ai l'impression que la suppression des subventions au transport va accélérer cette tendance et que les agriculteurs vont produire de plus en plus de produits à valeur ajoutée. Cela aura des répercussions sur la rotation des cultures dans les différents types de sol. Il est probable que cela posera un problème dans le cas du canola et du linola.
On nous a aussi demandé si, à notre avis, l'élimination des subventions au transport suffirait à susciter des activités de diversification à valeur ajoutée. Je pense qu'il y a des possibilités de diversification, par exemple la production d'huile de canola et de linola. Mais nous ne savons pas encore si la suppression des subventions aidera.
Les agriculteurs se lancent dans des cultures de plus grande valeur, mais ils ont besoin d'argent pour mettre sur pied les entreprises du secteur secondaire qui permettront de profiter des possibilités qu'offrent ces nouvelles cultures. Mais pour mettre sur pied une nouvelle entreprise et pour savoir où on s'en va, il faut au moins deux, trois ou parfois quatre ans à partir du point de départ. Je pense qu'il faudrait effectuer une étude sur les possibilités et les coûts, et sur les délais nécessaires pour la mise en place de nouvelles entreprises.
Il y avait aussi une autre question: quels autres changements ou initiatives en matière de politique suggéreriez-vous pour assurer la diversification? Premièrement, il faudrait préciser quelles sont exactement ces possibilités de diversification. Je suppose que, quand on parle de diversification, on veut parler de possibilités de produits à valeur ajoutée, par exemple, l'huile de canola ou la nouvelle huile de linola. Mais il faudrait évaluer toutes ces possibilités et en faire une liste. À mon avis, il faut faire preuve de prudence si on veut encourage les agriculteurs à se diversifier dans quelques domaines parce que, s'il y a 1 000 agriculteurs qui se lancent dans la production de deux ou trois produits de transformation, les marchés vont bientôt être saturés et les profits vont se volatiliser.
Je propose donc une conférence sur les possibilités agricoles pour examiner cette question; l'organisation pourrait en être confiée à un organisme neutre comme le Saskatchewan Research Council.
Je propose également de tenir une conférence visant à examiner les possibilités d'association entre les groupes agricoles et les autres intéressés. Les gouvernements pourraient jouer un rôle sur le plan de la politique, en réduisant les impôts ou en offrant, au niveau provincial, des stimulants fiscaux visant à rendre les associations de ce genre intéressantes pour les investisseurs. Ils pourraient même favoriser ces associations en y investissant leur propre argent.
Il y avait aussi une question au sujet du fonds d'adaptation de 300 millions de dollars: on nous a demandé quels seraient, à notre avis, les nouveaux modes de transport susceptibles d'être mis en place. Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans le maintien de l'infrastructure nécessaire pour ces nouveaux modes de transport. À quoi pourrait surtout servir ce fonds d'adaptation?
Il y a plusieurs possibilités: le transport par camion jusqu'aux réseaux ferroviaires canadiens; le transport par camion jusqu'aux réseaux ferroviaires américains; un réseau ferroviaire canadien sur courtes distances; et le prolongement direct des lignes de chemins de fer américaines au Canada, par exemple, la mise en place d'un nouveau service de voyageurs d'Amtrak entre Seattle et Vancouver.
Le gouvernement devrait soutenir une infrastructure qui favorise l'utilisation des lignes canadiennes et décourage l'utilisation des lignes américaines. Nous devons nous assurer que la compétitivité des lignes de chemins de fer canadiennes, dans la nouvelle structure, sera bien comprise. Dans le cadre de la poursuite du retrait des subventions accordées dans le cadre de la LTGO, les sociétés ferroviaires seront autorisées à abandonner des embranchements sous-utilisés, pour améliorer leur efficience, ce qui leur permettra ensuite d'établir des prix concurrentiels par rapport aux sociétés ferroviaires américaines.
Les nouveaux changements proposés pourraient, d'après nous, avoir des effets sérieux sur la compétitivité des sociétés ferroviaires et sur leur capacité d'améliorer leur efficience. Nous vous demandons par conséquent d'axer votre réflexion d'abord et avant tout sur la compétitivité des sociétés ferroviaires et d'évaluer les effets de tout changement proposé, avant d'aller plus loin, sur cette compétitivité.
Il y avait aussi une question sur les avantages dont nous disposons dans les domaines des transports et de la commercialisation. Nous avons l'avantage d'offrir des produits propres et d'excellente qualité. Tous les pays du Pacifique, et du monde entier d'ailleurs, veulent notre grain parce qu'il est propre et de la meilleure qualité qui soit; et il y a naturellement la question des protéines. Nous vendons tout le grain que nous produisons, jusqu'au dernier boisseau.
Il nous est très difficile de faire concurrence aux Américains, qui produisent du grain de qualité inférieure. Si nous faisions la même chose, nous ne pourrions pas soutenir la concurrence. Ils produisent 17,5 milliards de boisseaux par année, alors que nous en produisons seulement 1,1 à 1,3 milliard environ.
On nous a demandé par ailleurs dans quelle mesure les problèmes de relations de travail nuisent à l'efficacité. Ma réponse, c'est que ces problèmes ne nuisent pas à l'efficacité. Il arrive cependant à l'occasion que la rupture des négociations entre la direction et les syndicats entraîne des interruptions. Nos clients ne l'acceptent pas. Ils ne le comprennent pas.
Ce qu'il nous faut avant tout au Canada, c'est une bonne coopération entre les employeurs et les syndicats, non seulement dans le domaine du grain, mais dans toutes nos industries.
Je suis ici pour vous parler du grain. Je veux dire aux compagnies que nous avons besoin d'efficience et de productivité, de responsabilité et de productivité, et par-dessus tout de flexibilité. Nous offrons aux compagnies céréalières d'appliquer ces quatre principes, mais nous disons que les employeurs et les syndicats doivent s'entendre sur la question de la flexibilité, après quoi nous allons devoir convaincre nos membres, leurs employés, d'accepter cette flexibilité. Autrement, nous allons avoir de graves problèmes tant sur le plan des relations patronales-syndicales que sur celui du fonctionnement efficace de ces compagnies.
La question suivante portait sur la répartition des wagons. Nous pensons qu'il faut faire tous les efforts possibles pour maintenir l'intégrité et la compétitivité du réseau canadien de transport du grain. À notre avis, les wagons-trémies déjà payés par le gouvernement devraient être cédés aux sociétés ferroviaires, à un prix raisonnable. Cette mesure permettrait d'augmenter la compétitivité en améliorant ce processus. Les lignes canadiennes devraient toujours avoir la priorité pour la répartition des wagons.
Comment les producteurs peuvent-ils être assurés d'un traitement équitable dans la répartition des wagons? À l'heure actuelle - et dans le passé également, en fait - il n'y a jamais eu de centre de gravité bien défini pour assurer l'équité dans la répartition des wagons. Il faut des objectifs clairs et mesurables en matière d'efficience, en ce qui concerne la compétitivité de tous les types de grain canadien, sur tous les marchés, lorsqu'il y a possibilité de concurrence avec les coûts de transport américains. Nous ne pouvons pas soutenir cette concurrence. Il n'y a pas à sortir de là. Quand ces objectifs seront établis, nous aurons une base pour mettre en place un système de répartition qui permettra de les atteindre.
Comment s'assurer que tous les intéressés profiteront des gains d'efficience? Il s'agit-là d'une question très complexe. Je pense qu'à la base, les intéressés continuent d'agir de façon indépendante, sans tenir compte des intérêts du réseau. Les intéressés vont continuer à améliorer leur efficience, et ils ne sont pas prêts à partager les gains qui en résultent. Ce qu'il faut, c'est encourager les divers intervenants du réseau à agir comme un réseau. Quand cela se produira, les gains seront automatiquement répartis.
On nous a ensuite demandé si, à notre avis, il était possible de préserver la réputation du Canada en tant qu'exportateur de grain de qualité si nous adoptons des systèmes de ce genre. Voici ce que j'en pense: pourquoi faudrait-il que du grain canadien destiné à l'exportation soit expédié au sud du réseau de l'Ouest canadien, sauf s'il est destiné au marché intérieur américain? Quand on essaie de faire concurrence au réseau américain, cela nuit à l'efficience. Voilà qui répond à la question de savoir dans quelle mesure, par suite de la réforme, le grain canadien sera expédié aux États-Unis en vue de l'exportation.
Nous estimons que la compétitivité des sociétés ferroviaires canadiennes doit être la pierre angulaire de tout régime de réglementation et de développement. La Commission canadienne du blé a dit que 10 millions de tonnes seraient détournées vers les États-Unis d'ici l'an 2005. Mais il est difficile de savoir s'il s'agit de grain qui serait vendu sur le marché intérieur américain ou réexporté. Cela nous inquiète beaucoup.
Pour le réseau de transport de l'Ouest canadien, le coût de l'expédition de marchandises vers le sud pourrait être énorme; pour les producteurs, il est important. À court terme, il n'y a pas d'avantages pour les producteurs, du point de vue des coûts, mais les clients pourraient en bénéficier. Les clients veulent pouvoir compter sur une livraison rapide du grain. Ils veulent être certains que les Canadiens vont leur livrer leur grain à temps. Parfois des problèmes de relations de travail ou des impasses dans les négociations retardent la livraison du grain.
Si le réseau ferroviaire canadien perd une proportion importante du grain transporté, ce sont les expéditeurs d'autres denrées qui devront payer plus cher pour l'entretien, l'achat de wagons, l'achat de locomotives, etc. Par conséquent, ces expéditeurs opteront pour des transporteurs américains chaque fois que ce sera possible, le prix des marchandises canadiennes qui ne pourront pas être expédiées par les États-Unis augmentera et, à long terme, des dizaines de milliers d'emplois dans le secteur des transports seront exportés aux États-Unis. Des usines et des mines fermeront, surtout dans l'ouest du Canada, à cause de la hausse des coûts du transport au pays. Le réseau ferroviaire canadien périclitera et le Canada ne sera plus maître de ses exportations.
Voilà les questions que j'ai tirées du document que vous nous avez remis pour que nous y répondions. J'ajouterai que le transport du grain du Canada fait déjà problème. Il y a eu des mises à pied à Vancouver - pas tellement, une soixantaine d'employés, mais d'autres seront licenciés aujourd'hui. Cela dure depuis deux mois et demi et l'on dit qu'il n'y a pas de wagons à grains ou qu'il n'y a pas de locomotive pour tirer ces wagons.
Si l'on en est à ce point avant le 1er août, imaginez ce que ce sera après ou l'année prochaine ou l'année suivante! Il y aura des mises à pied dans les chemins de fer mais aussi dans les ports de Vancouver, Prince Rupert et Thunder Bay pour ceux qui travaillent dans les céréales.
Il faut trouver un autre moyen non seulement pour épargner les emplois des travailleurs du grain et des chemins de fer, mais aussi les exploitations agricoles familiales. Ces exploitations de la Saskatchewan, du Manitoba et de l'Alberta en pâtiront si nous n'agissons pas très rapidement pour adapter le nouveau système.
J'ai terminé mon exposé, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Kancs. Vous êtes l'un des rares qui se soit vraiment concentré sur le sujet à l'ordre du jour. Il nous arrive souvent de nous en éloigner nous-mêmes. Je vous remercie donc pour cet exposé.
Monsieur Chrétien.
[Français]
M. Chrétien: Monsieur Kancs, avant que je commence à vous interroger, pourriez-vous, pour ma gouverne, préciser combien de membres vous représentez? Vous êtes le secrétaire-trésorier de la Grain Workers' Union. De quelle province viennent ces membres et à quel endroit se trouve l'administration centrale de l'Union?
[Traduction]
M. Kancs: Je représente environ 750 travailleurs céréaliers de Vancouver et de Prince Rupert. Je ne représente que les travailleurs de la Colombie-Britannique. J'occupe mon poste depuis 1950, c'est-à-dire depuis environ 46 ans.
[Français]
M. Chrétien: Donc, ce ne sont pas des producteurs agricoles que vous représentez. Ce sont plutôt des travailleurs, des manutentionnaires de grain.
[Traduction]
M. Kancs: C'est exact. Je représente les manutentionnaires de grain des ports de Vancouver et de Prince Rupert. Je représente aussi quelques cols blancs travaillant pour les sociétés céréalières.
[Français]
M. Chrétien: Je vous remercie. Je ne sais pas si cela change un peu l'orientation de mes questions, mais j'aurais d'abord aimé connaître votre point de vue sur le 1,6 milliard de dollars que le gouvernement va verser peut-être aux propriétaires; M. Goodale n'est pas encore fixé là-dessus. Vous savez très bien qu'il y a plusieurs terres qui sont louées. L'argent sera-t-il versé aux propriétaires ou aux locataires? Si on vous demandait de quelle façon on doit répartir les 1,6 milliard de dollars pour dédommager les producteurs de céréales, de quelle façon aborderiez-vous cela?
[Traduction]
M. Kancs: C'est une question vraiment très épineuse. Je crois que les négociations se poursuivent entre le gouvernement et les autres organismes pour déterminer comment l'argent sera réparti. Je préfère donc me taire.
Une voix: Aux agriculteurs et aux producteurs.
Le président: Voilà une réponse digne d'un politique, Henry, comme celle de l'ONT. Mais c'est correct.
[Français]
M. Chrétien: Vous avez parlé que certaines lignes ferroviaires peu importantes qui auraient de la difficulté à survivre et qui pourraient même fermer, ce qui entraînerait l'utilisation beaucoup plus fréquente des lignes de chemin de fer américaines. Cela pourrait-il aller jusqu'à changer l'orientation de nos ventes? On est habitué à faire des expéditions par Thunder Bay ou par Vancouver, mais si c'était le cas, étant donné que les États-Unis et le Canada partagent la plus grande frontière au monde, ne pourrait-on pas éventuellement développer un commerce Nord-Sud?
[Traduction]
M. Kancs: Si le commerce Nord-Sud se développe, nos céréales s'en iront vers les ports américains. Tout d'abord, aux États-Unis, les silos à grain ne sont pas équipés pour le nettoyage des céréales; par conséquent, notre grain sera expédié aussi sale que le grain américain, ce qui nous fera perdre notre avantage par rapport aux États-Unis. En effet, quel intérêt les Américains auraient-ils à acheter notre grain, puisque le leur coûte moitié prix du nôtre?
Les Américains déclarent qu'ils vont supprimer toutes les subventions, mais c'est faux. Il y a encore des subventions aux États-Unis. Par exemple, si le grain est expédié par le Mississippi jusqu'au golfe; or, tous ces canaux sont subventionnés par l'armée américaine. Ce n'est pas avantageux pour nous ni pour le Canada.
[Français]
M. Chrétien: Vous avez parlé à plusieurs reprises, et c'était très heureux ainsi, de la valeur ajoutée. Vous avez parlé aussi de diversification pour les agriculteurs, les producteurs. Je suis du Québec, vous l'avez bien deviné. Vous savez que la plus grande préoccupation des producteurs agricoles québécois est une diversification des productions de l'Ouest qui pourrait éventuellement concurrencer les productions québécoises à partir de la subvention de 1,6 milliard de dollars.
Revenons sur la diversification qu'on pourrait éventuellement voir dans les provinces de l'Ouest à l'exception de la Colombie-Britannique. Quelle diversification, selon vous, pourrait-on pratiquer, qui pourrait venir concurrencer les agriculteurs québécois?
[Traduction]
M. Kancs: La diversification dans les provinces des Prairies ne va pas nuire du tout aux agriculteurs québécois. Les agriculteurs des provinces de l'Ouest vont diversifier leur production en optant pour le canola, le linola, les pois, les haricots, les lentilles, les graines d'oiseaux ou les cubes de foin parce que ce sont des cultures commerciales. Au Québec et en Ontario, on cultive le maïs et certaines graines oléagineuses, mais pas en aussi grande quantité que dans les Prairies.
Je ne crois donc pas que les producteurs des provinces des Prairies feront concurrence à ceux du Québec ou de l'Ontario. La diversification actuelle des producteurs de ces trois provinces de l'Ouest leur permettra de gagner beaucoup d'argent. Par exemple, nos pois et nos haricots sont très prisés en Inde, qui va acheter toute notre production de cette denrée.
Notre canola est le meilleur du monde, et les prix sont bons pour les producteurs. D'ailleurs, les prix doivent rester à ces niveaux pour que la production soit rentable. Pendant quatre ans, les agriculteurs des Prairies ont vraiment beaucoup souffert. Leur revenu était d'environ 20 000$ par année. Mari et femme étaient obligés de trouver un emploi à l'extérieur de la ferme. L'an dernier, c'était la première année que les agricultreurs tiraient un revenu acceptable de leur production, surtout grâce à la diversification. C'est pourquoi celle-ci va se poursuivre.
En ce qui concerne le Québec, vous n'avez absolument pas à vous inquiéter; il n'y aura pas de concurrence de la part des agriculteurs de l'Ouest. Notre principale crainte, c'est que les agriculteurs transportent toutes leurs nouvelles récoltes par camion jusqu'aux États-Unis, et là, c'est nous, les travailleurs des ports canadiens, qui en souffrirons.
[Français]
M. Chrétien: J'allais dire, monsieur Kancs, que vos 46 ans d'ancienneté à l'Union font de vous un expert; 46 ans, c'est très près de mon âge; j'ai 49 ans.
Du fonds d'adaptation de 300 millions de dollars, il y a aura 100 millions de dollars, en vertu du projet de loi C-92, qui seront alloués au cours des trois prochaines années pour l'adaptation dans le transport des grains. Il restera donc 200 millions de dollars. Si vous aviez des suggestions à faire au gouvernement, particulièrement au président et aux membres du Parti libéral qui sont ici, pour les 200 millions de dollars qui resteraient dans le fonds d'adaptation, quelles seraient vos principales recommandations?
[Traduction]
M. Kancs: Quelle que soit la somme qui reste dans ce fonds - que ce soit 200 millions de dollars ou moins - elle doit servir à améliorer l'état des routes dans l'Ouest du Canada, surtout en Saskatchewan et au Manitoba. Il y a trois semaines à peine, j'ai eu l'occasion de me rendre en voiture du Manitoba en Saskatchewan avec certains agriculteurs, et vous pouvez me croire, les routes sont dans un état vraiment lamentable.
Les agriculteurs sont en train d'acheter des camions pour pouvoir transporter leur grain jusqu'aux silos de tête de ligne après le 1er août. Je crois qu'ensuite une partie de ce grain sera acheminée vers des points à la frontière américaine. Si une partie de l'argent du fonds ne sert pas à la réfection des routes, les agriculteurs n'arriveront pas à survivre. Ils ont besoin d'un bon réseau de transport et de routes en bon état pour aller livrer leur grain à ces silos de tête de ligne qui sont en construction dans l'Ouest du Canada.
Là, une partie du grain sera nettoyé, ce qui est un avantage. C'est une bonne chose que les exploitants de ces silos reçoivent 10 p. 100, 15 p. 100 ou peut-être même davantage de grain propre, ce qui est mieux que le grain acheminé vers les ports en vue de l'exportation.
J'insiste; les routes doivent être réparées. Les villages agricoles et les gouvernements provinciaux n'ont pas les moyens d'agir seuls.
M. Collins: Étant donné vos antécédents et votre expérience au syndicat, nous avons toujours beaucoup de plaisir à vous accueillir. Comme j'ai déjà passé cinq ans au Syndicat des travailleurs des industries pétrolière, chimique et atomique, je comprends un peu comment les choses se passent.
Nous avons entendu un certain nombre de témoins. Comme les agriculteurs et les producteurs vont dorénavant payer plein tarif, ils vont se préoccuper énormément de l'efficacité. Je sais que vous en avez touché un mot, mais je voudrais que vous expliquiez sommairement ce que vous entendez faire, étant donné le temps qui s'est écoulé depuis votre dernière convention collective.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de l'arbitrage des propositions finales. Je sais que certains d'entre vous vont rencontrer des représentants de la SARM en juillet. C'est une initiative louable. Nous devons être certains qu'au cours des cinq à dix prochaines années le système sera efficace. Lorsque nos produits sont exportés, quelle qu'en soit la qualité, si les livraisons n'arrivent pas à temps, nous allons perdre nos clients.
Pourriez-vous nous exposer brièvement certaines de ces préoccupations?
M. Kancs: Je vais commencer par répondre à votre question sur l'arbitrage des propositions finales. Je suis contre l'emploi de cette formule, parce qu'elle ne marche pas. On en a fait l'essai en Australie il y a une vingtaine d'années, et ce fut un échec. Ce sera pareil au Canada.
Dans certaines circonstances elle peut s'imposer, je n'en disconviens pas, mais il nous faut rétablir la confiance entre les syndiqués et les patrons, qui doivent se donner la main dans ces industries. Les syndicats ou les employés doivent avoir le droit de participer au processus décisionnel en milieu de travail. Je ne veux pas parler des conseils d'administration et du reste. Je vise uniquement le lieu de travail. Que les travailleurs, les jeunes, participent à la prise de décisions. Les jeunes veulent savoir. Quand j'ai commencé au syndicat, j'avais 25 ans, et ce n'était pas du tout pareil.
Les jeunes d'aujourd'hui sont prêts à travailler fort et intelligemment. C'est bien beau de travailler fort, mais tout le monde peut le faire. Maintenant, ils veulent travailler avec intelligence, à condition de connaître les raisons pour lesquelles ils doivent produire avec efficacité. Il faut tout expliquer aux jeunes de nos jours. Or, selon moi, la seule façon de le faire, c'est d'établir des communications et des consultations entre les patrons et les employés.
Il ne faut pas que cela se fasse comme dans notre syndicat. Nous sommes en négociation depuis deux ans et demi, parce que j'ai déclaré au début que nous ne ferions pas la grève et que nous ne laisserions pas les compagnies nous mettre en lock-out. Nous nous efforçons d'en arriver à une entente, mais la seule façon d'y parvenir, c'est d'en arriver à établir une confiance mutuelle en tenant également compte de nos clients.
Les clients en ont assez des livraisons en retard non seulement de quelques jours, mais de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois. En ce moment même, à Vancouver, nous avons un problème qui n'a rien à voir avec les relations de travail. On manque d'orge fourragère. Des navires attendent deux mois la livraison de cette denrée. J'ignore qui va payer les surestaries, mais elles sont considérables.
Il doit y avoir collaboration entre le producteur agricole, l'exploitant des silos de campagne, les silos portuaires, le port, les agents maritimes et ceux qui s'occupent de déterminer le moment d'arrivée des navires. À quoi cela sert-il de faire venir les navires à Vancouver, à Thunder Bay ou à Prince Rupert si le grain n'est pas arrivé?
Les mois et les années passent sans qu'on règle les problèmes de livraison systémiques. Le producteur livre le grain qu'il a aux silos de tête de ligne, qui, eux, l'expédient à Vancouver sans savoir s'il y aura au port un navire sur lequel le charger. Le grain est vendu, mais il n'y a pas de navire pour le transporter. Et maintenant, voilà qu'on a les navires et pas de grain. On nous envoie du canola quand on a besoin de blé, de l'orge quand on a besoin de canola. Il faut que ça cesse. Il faut absolument améliorer la coopération et la coordination au Canada si nous voulons éviter de graves ennuis.
Chaque année, c'est le même problème. Ce n'est pas une nouvelle difficulté apparue il y a quelques mois. Ce problème se développe depuis une dizaine d'années.
M. Collins: L'autre jour, je suis allé au port pour observer le rôle que chacun joue dans le système. Une façon de faire m'a semblé complètement dépassée. C'est un vrai mystère. Il ne s'agit pas de votre syndicat. J'ai appris que les débardeurs doivent se présenter tous les jours au syndicat, qui les affecte à un travail donné. Vous avez vraiment fait ressortir certains graves problèmes de tout le système. Je voudrais savoir ce que vous pensez de cette histoire de convoquer les débardeurs au syndicat pour leur donner leur affectation.
Je vous demande cela en passant.
Pour en revenir à ce que vous avez dit, je crois que c'est le noeud du problème. Il faut bien coordonner le rôle de chacun pour que cessent de telles aberrations. Quand le bateau est là, on n'a pas le bon grain, et vice versa. Il existe sûrement un système plus efficace.
Si nous acceptions de suivre vos recommandations, que suggéreriez-vous pour améliorer la coordination entre les syndicats, les débardeurs, l'Association des employeurs maritimes de la Colombie-Britannique et les sociétés céréalières, dans le but de régler le problème? Étant donné votre longue expérience, que feriez-vous si l'on vous chargeait de préparer des propositions que notre sous-comité soumettrait au ministre de l'Agriculture?
M. Kancs: Je peux difficilement me prononcer en ce qui concerne les débardeurs. Comme je fais partie d'un syndicat différent, je ne suis pas vraiment en mesure de vous répondre.
Il faut organiser une conférence regroupant les syndicats et les employeurs concernés. Il faut leur dire carrément que le Canada doit considérer les clients comme... Je ne vais pas dire, comme le font les Japonais, que le client est roi, mais néanmoins il faut savoir que le client a toujours raison. Si nos clients ne sont pas satisfaits, nous allons perdre nos marchés d'exportation. Si jamais cela se produit, c'est la fin de tout. Il faut donc expliquer sans détour au patronat et aux syndicats, et je précise les syndicats, que le temps est venu d'être sérieux et de faire preuve de plus de souplesse.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Hoeppner.
M. Hoeppner: Je suis content de vous voir, monsieur Kancs. Vous resterez toujours pour moi l'homme qui a déclaré un jour que l'OTG était devenu un empire. Vous en souvenez-vous?
M. Kancs: Oui, et je suis toujours du même avis.
M. Hoeppner: Je vais en choquer quelques-uns ici aujourd'hui. L'autre jour, nous avons entendu un monsieur du nom de Buck Spencer. Il a fait certaines allégations pour lesquelles il a été vertement critiqué. Auparavant, je voudrais vérifier quelque chose. Je me suis laissé dire qu'un navire avait attendu de l'orge au port de Vancouver du 26 avril au 20 mai. Est-ce exact?
M. Kancs: Je crois que c'est vrai.
M. Hoeppner: On m'a dit que c'était surtout les Japonais qui achetaient cette orge; c'est bien vrai?
M. Kancs: Pas de l'orge fourragère. Les Japonais achètent de l'orge de brasserie.
M. Hoeppner: On m'a dit que c'était de l'orge fourragère O.C. numéro 1.
M. Kancs: Presque toute cette orge va actuellement en Californie.
M. Hoeppner: Comment?
M. Kancs: Par le canal de Panama.
M. Hoeppner: Y a-t-il des livraisons par camion?
M. Kancs: Une petite partie de l'orge est acheminée par camion. N'oubliez pas que les routes sont en très mauvais état. J'aimerais bien que votre comité, si c'était possible, aille vérifier lui-même l'état des routes dans les Prairies. En Alberta, c'est un peu mieux, mais partout ailleurs, cela fait pitié. Ensuite, le comité devrait aller en Colombie-Britannique pour écouter pendant quelques jours les craintes, les angoisses et les inquiétudes qu'inspire aux gens de là-bas l'avenir du transport du grain. Si l'on décide de transporter l'orge par camion, nous allons tous perdre nos emplois.
M. Hoeppner: C'est très intéressant. Je vais poursuivre sur le même sujet. Vous avez mentionné le nettoyage du grain destiné à l'exportation. Il existe des normes. Je vais vous lire un mémo de la Commission canadienne des grains au Western Grain Standards Committee:
- À l'heure actuelle, le Japon est le seul débouché pour l'orge O.C. numéro 1. Les Japonais
exigent un certificat final de la CCG pour toutes les livraisons. Ils se sont engagés à accepter
l'augmentation proposée pour les autres grains, ce qui portera à 3 p. 100 la proportion
acceptable de corps étrangers.
Cela donne à penser que l'on ne veut pas de l'orge nettoyée. L'autre jour, M. Spencer a déclaré qu'on ruinait notre réputation en augmentant la proportion des impuretés. Il a été violemment pris à partie à cause de cette déclaration.
J'ai aussi en main un document signé le 5 janvier par la Commission canadienne du blé et qui accorde au syndicat du blé de l'Alberta le droit d'exporter 1 600 tonnes métriques de plus d'orge O.C. numéro 1 extra, une qualité meilleure que l'O.C. numéro 1, vers Boardman, dans l'Oregon, au prix de 100$ U.S. la tonne pour le transport par camion. J'ai des bordereaux de déchargement indiquant que ces camions sont passés par la Colombie-Britannique - j'oublie où au juste - et ont été déchargés à Boardman, dans l'Oregon, pour 100$ la tonne.
Quand j'ai vérifié auprès de certaines des personnes qui se sont occupées du camionnage - et elles refusent d'être identifiées - on m'a dit que la livraison par camion de cette orge à Boardman, dans l'Oregon, avait coûté 76$ la tonne. Le profit net pour l'agriculteur de l'Alberta est de 1,59$. La Commission du blé a versé au départ 1,79$ à l'agriculteur.
Monsieur Kancs, pouvez-vous m'expliquer en quel honneur nous avons un tel système de commercialisation? Depuis le début de nos séances, il y a 18 mois, je répète au comité qu'il y a de la manipulation et de la corruption, mais personne ne veut m'écouter. Ces documents seront remis à la GRC la semaine prochaine. J'ai rencontré le sous-commissaire aujourd'hui même, et nous nous sommes entendus sur une façon de faire. Il y aura probablement enquête.
Voilà un exemple de ce à quoi les agriculteurs sont confrontés. Vous savez que le prix sur le marché japonais est bien supérieur à 100$ la tonne métrique.
M. Kancs: C'est vrai. Les Japonais offrent le meilleur prix, mais ils exigent aussi le grain de la meilleure qualité.
M. Hoeppner: Ces gens ont dit en janvier qu'ils n'avaient pas assez d'orge pour approvisionner nos meilleurs clients, les Japonais, et pourtant ils ont autorisé le syndicat du blé de l'Alberta à en expédier aux États-Unis à 100$ la tonne.
Le président suppléant (M. Collins): Monsieur Hoeppner, auriez-vous l'obligeance de remettre ces documents au comité?
M. Hoeppner: Certainement. Je les ai remis aux journalistes hier.
M. Kancs: Après avoir vu de tels chiffres, je dois convenir que quelque chose cloche. Une telle chose devrait être impossible.
M. Hoeppner: Si vous tenez à votre travail à Vancouver, il faut que cela change.
M. Kancs: Absolument. Nous allons finir par en pâtir, mais les agriculteurs en souffrent déjà...
M. Hoeppner: Je le sais.
M. Kancs: ...parce qu'ils n'obtiennent pas un juste prix pour le grain qu'ils livrent. De toute évidence, on leur raconte des histoires qui ne collent pas. Il faut faire quelque chose, car nous manquons d'orge pour les marchés japonais depuis quelques mois déjà. Or, les Japonais sont des gens très patients, mais il y a des limites.
M. Hoeppner: Est-ce qu'on peut leur en vouloir?
M. Kancs: Certainement pas. C'est pourquoi je crois qu'il faut traiter le client avec dignité et respect, sinon on le perd. Un jour ou l'autre, quelqu'un proposera du grain d'une qualité équivalente. On compte sur le fait que personne en ce moment n'arrive à produire du grain d'une aussi bonne qualité que celui du Canada. Mais il ne faut pas présumer que cette situation sera éternelle. Quelqu'un un jour mettra au point un type de grain différent.
M. Hoeppner: Merci, monsieur Kancs. J'apprécie vos observations. Je vous l'ai d'ailleurs dit la dernière fois que vous avez comparu.
Je veux aussi vous interroger au sujet de l'arbitrage des propositions finales pour régler les différends. C'est une formule qui réussit à bien des industries. Les expéditeurs et les chemins de fer y ont recours. Je crois que les administrations de pilotage s'en servent aussi pour leurs pilotes de la voie maritime. Pourquoi une telle formule ne vous réussirait-elle pas? Je crois plutôt qu'elle serait efficace.
M. Kancs: La formule ne conviendrait pas aux travailleurs parce que les règlements doivent être négociés par l'employeur et le syndicat ou les employés. Il faut négocier de son plein gré, sans être menacé de quoi que ce soit. Les travailleurs ont peur du mot «arbitrage». C'est comme les épreuves d'aptitude. Ce ne sont pas les épreuves en soi qui font problème. J'ai proposé aux compagnies de parler d'examens de mécanique au lieu d'épreuves d'aptitude pour que les travailleurs comprennent mieux. Dès qu'on parle d'arbitrage, on sent de la réticence.
M. Hoeppner: J'ai discuté avec beaucoup d'organisations - pas seulement des syndicats d'ouvriers, mais des associations de médecins, d'enseignants - et toutes conviennent que la formule devrait marcher et sont prêtes à l'essayer. Pourquoi les débardeurs ou les manutentionnaires de grain refuseraient-ils de mettre la formule à l'essai pendant cinq ans?
M. Kancs: Ils perdraient leur liberté.
M. Hoeppner: Non, la liberté est la même pour tous. Étant agriculteur, je ne peux pas faire cela. Je ne peux pas dire aux gens de me donner telle chose, sinon... On me dit ce qu'on va me donner. Si l'on veut la liberté, pourquoi ne pas l'accorder à tout le monde?
M. Kancs: Il faudrait plutôt tenter de négocier avec les compagnies et amener les compagnies à négocier avec nous sans entrave. Ce qui fait défaut en ce moment, c'est cette confiance mutuelle. Il ne faut pas inspirer de la crainte à un employé, car alors il ne travaille plus aussi bien qu'il le pourrait; il n'est plus efficace.
Ce que je veux dire, c'est que nous devons amener les travailleurs à produire comme ils le faisaient dans les années 60. Nous travaillions fort, mais avec intelligence. Il faut regagner cette confiance mutuelle, en arriver à ce que les employeurs et les employés rigolent ensemble et parlent de tout et de rien. De cette manière, les employés obtiennent rapidement ce dont ils ont besoin, et les employeurs aussi.
Il faut de la souplesse. La souplesse est essentielle à l'avenir de notre pays.
Mme Cowling: Je vous remercie pour votre exposé.
Je suis du Manitoba. Comme ma province produit du grain depuis un certain nombre d'années, je m'intéresse énormément au sujet que nous étudions.
Croyez-vous à une surcapacité du système? Le cas échéant, quelle solution proposeriez-vous au comité pour le réseau d'embranchement qui sillonne le pays, et à quel rythme devraient se faire les abandons si vous estimez que c'est la solution inévitable?
M. Kancs: Certains embranchements devront effectivement être abandonnés. Mais il faut agir lentement et prudemment afin de ne pas nuire aux municipalités concernées.
Ces municipalités et leurs réseaux routiers seront incapables d'assimiler des changements trop soudains. Il faut que les municipalités rurales de la Saskatchewan, du Manitoba et de l'Alberta continuent d'en discuter entre elles. Il faut écouter le point de vue de leurs dirigeants et trouver un compromis afin d'alléger leur fardeau. Les producteurs auront les moyens de faire pousser le grain, mais pas de le livrer.
Il faut absolument laisser aux gens le temps de s'adapter. C'est essentiel.
Mme Cowling: Monsieur le président, M. Kancs a dit que nous devions commencer par établir un climat de confiance avant de faire quoi que ce soit. Je voudrais qu'il me dise ce qu'il pense de la suggestion que je vais vous exposer.
Comme les modifications que nous allons apporter au transport touchent tant de gens, il serait opportun de réunir tous les intéressés autour d'une table pour discuter de l'avenir du transport au pays et de la façon dont on peut répondre aux besoins de chacun de manière à maintenir un certain équilibre. Qu'en pensez-vous? Je sais que la question n'est pas simple.
M. Kancs: Vous avez raison, c'est la seule façon de procéder. Il nous faut des agriculteurs et des producteurs qui participent à tous ces comités et à tous ces symposiums. Je proposerais qu'au cours des négociations sur les céréales nous ayons des agriculteurs et des producteurs comme observateurs. Ils n'auraient pas à dire quoi que ce soit, ni à participer, mais ils pourraient écouter.
J'ai fait la même proposition à un comité sur les transports à Winnipeg. Tous étaient représentés, sauf les agriculteurs et les producteurs. J'ai proposé qu'ils soient représentés, puisque c'est eux qui cultivent ces céréales. Nous discutions de leur avenir, et ils n'étaient même pas présents.
Si nous tenons un plus grand nombre de réunions avec 30 ou 40 personnes présentes seulement pour discuter des problèmes auxquels nous sommes confrontés, et si nous écoutons ce que les agriculteurs et les représentants des municipalités rurales ont à nous dire, je pense que nous changerons d'avis sur plusieurs points et sur ce que nous voulons faire.
Les travailleurs doivent être présents plus souvent de façon à pouvoir engager le dialogue avec les agriculteurs. J'ai proposé la tenue d'une réunion qui aura lieu en Saskatchewan avec les agriculteurs. Je ne parle pas des représentants des silos et de leurs compagnies; je parle des agriculteurs, des travailleurs et des représentants syndicaux. Nous allons partager nos problèmes. Ainsi nous pourrons peut-être mieux comprendre nos difficultés.
Je sais que les syndicats doivent évoluer. Nous devons évoluer, la gestion aussi. Les agriculteurs pourront peut-être nous aider à le faire.
Le président: J'ai quelques questions à poser, monsieur Kancs.
Vous avez certes acquis beaucoup d'expérience au port. Je pense que vous avez même mentionné l'étude d'Andrew Elliott, dans laquelle il est dit que jusqu'à 10 millions de tonnes métriques de céréales pourraient être expédiées directement vers le Sud, aux États-Unis, ou par les chemins de fer américains. Quelle incidence cela aurait-il sur l'efficacité globale du système au niveau des volumes expédiés via les ports de Thunder Bay et de Vancouver?
M. Kancs: Mon Dieu, cela nous détruirait. Cela détruirait également les sociétés ferroviaires canadiennes. Celles-ci ne peuvent pas demeurer efficaces à la suite d'une perte de revenus de cet ordre. Par exemple, les chemins de fer canadiens perdront chacun 30 millions de dollars lorsque ce changement entrera en vigueur le 1er août.
Il s'ensuivra des mises à pied massives de travailleurs des chemins de fer et des silos. Même si on n'expédiait que six millions de tonnes par les États-Unis, cela signifierait des mises à pied continuelles à Vancouver, Prince Rupert et Thunder Bay. Nous ne pouvons pas empêcher les céréales d'être expédiées aux États-Unis pour y être consommées là-bas, mais nous ne pouvons pas permettre le transbordement vers des marchés d'exportation.
Le président: Quels sont les problèmes que vous envisagez? Je sais que vous avez mentionné plus tôt le contrôle de la qualité. Vous avez dit qu'en fait, parce que nous produisons un produit de qualité, quand on achète canadien, on sait dans les divers pays acheteurs que l'on se procure un produit de qualité.
Envisagez-vous des difficultés à ce niveau? Pouvons-nous faire quelque chose pour maintenir la qualité du produit expédié via les États-Unis plutôt que par le Canada?
M. Kancs: Nous pouvons faire notre éducation et celle des agriculteurs. Dans un même temps, nous devons faire savoir à notre clientèle que nous sommes en mesure et désireux de fournir ce produit de qualité.
Comment définit-on un produit de qualité? Il s'agit de blé, d'orge, de canola et d'autres céréales nettoyées à la perfection. Ce ne sont ni la Commission canadienne du blé ni celle des grains qui exigent que nous nettoyions les céréales. C'est notre clientèle qui l'exige.
Savez-vous ce que fait notre clientèle? Elle achète à un prix raisonnable les céréales américaines subventionnées - qui seront subventionnées même après l'an prochain - pour les mélanger à notre produit. C'est ce que font les Japonais, les Chinois et les Indonésiens, parce qu'ils ont besoin de nos céréales, non seulement de leur haute teneur en protéines, mais également de leur grande qualité, pour faire du pain ou pour faire autre chose.
La demande est très forte. Nous pouvons vendre tous les boisseaux produits au Canada, à condition de continuer à cultiver un produit de grande qualité. Je sais que les céréales de faible qualité ou le grain mou produits aux États-Unis donnent un taux de rendement plus élevé que les céréales de grande qualité, mais nous vendons toute notre production. D'autres pays ne sont pas dans la même situation.
Le président: Merci. Plusieurs membres du comité ont soulevé la question des problèmes dans le milieu de travail, situation qu'il faudra certes régler, à notre avis. Il nous faut mettre fin à ces fermetures, et votre idée de tenir des conférences vaut peut-être la peine d'être examinée.
Bernie, vous vouliez dire quelque chose?
M. Collins: Monsieur le président, M. Hoeppner a mentionné que les enseignants sont en faveur de l'arbitrage au niveau d'une offre finale; j'aimerais connaître la liste. Après 32 ans dans ce milieu, je ne pourrais dire que nous avons accepté d'emblée l'arbitrage comme moyen de règlement.
M. Hoeppner: Il s'agit d'enseignants à qui j'ai parlé dans ma région - et non pas du syndicat des enseignants.
Le président: Merci, Henry, d'être venu. C'est toujours un plaisir de vous voir ici au comité. Vous possédez beaucoup d'information, ce que nous apprécions beaucoup, et nous tiendrons compte de ce que vous avez dit.
M. Kancs: Merci, monsieur le président.
Le président: Je demanderais maintenant à M. Bill Cooper et à M. Bill Copeland de s'avancer. Bill et Bill, je vous souhaite la bienvenue, messieurs.
Monsieur Kerpan. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur.
M. Kerpan (Moose Jaw - Lake Centre): Monsieur le président, monsieur. Merci.
Le président: Qui veut commencer, M. Cooper ou M. Copeland?
M. Bill Cooper (témoignage à titre personnel): Je vais commencer. Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier, monsieur le président, mesdames et messieurs du comité, et Marc, bien sûr, de nous avoir invités à présenter nos opinions.
Si je comprends bien, nous pouvons prendre quelques minutes pour faire notre exposé, et ensuite nous aurons le temps de répondre à quelques questions. J'espère que vous avez tous copie de mon texte.
Je peux peut-être commencer en vous disant que j'exploite une ferme dans la région de Foam Lake, en Saskatchewan, où il y a eu beaucoup d'eau ce printemps. Certains se demanderont peut-être... vous avez toujours des témoins comme Henry Kancs, qui représente son syndicat, etc. Je pense qu'en fait Bill Copeland et moi-même représentons probablement 30 p. 100 des agriculteurs qui produisent 70 p. 100 du produit.
Lorsque l'on fait des sondages, lorsque l'on compte les voix, je pense qu'on devrait procéder par tonnage produit plutôt que par agriculteur. Je ne méprise pas du tout les petits producteurs; ils jouent un rôle très important. Mais c'est un aspect important, à mon avis.
J'aimerais tout d'abord dire que dans l'ensemble il n'est pas évident que les décideurs dans le domaine agricole aient bien compris les changements d'attitude qui se sont opérés chez les agriculteurs des Prairies. Les exploitations agricoles et les agriculteurs sont en train de changer, et jamais dans l'histoire de l'agriculture des Prairies - dans mon histoire - ont-ils été plus disposés à s'adapter au nouvel environnement, et ce, principalement parce que l'on est en train de prendre conscience que les programmes d'aide du gouvernement et la résistance au changement manifesté par certaines institutions ne créeront pas une industrie dynamique et compétitive.
Ce n'est pas tant la fin des subventions pour le pas du Nid-de-Corbeau qui entraîne des frustrations, mais plutôt le fait que les décideurs ne veulent pas revoir ou supprimer la réglementation du système en fonction de la disparition de la subvention. Je tiens à le souligner; il est très important que la suppression de la réglementation se fasse en fonction de la disparition de la subvention.
Cette situation ainsi que l'intransigeance des bureaux de commercialisation sont incompréhensibles pour les membres commerciaux dynamiques de la communauté agricole. Il faut bien comprendre que les agriculteurs sont disposés à changer, prêts à changer, et n'attendent que l'occasion de le faire. Ils ont une attitude très positive.
J'aimerais maintenant parler de l'élimination de la subvention pour le transport du grain. J'ai tenté dans la deuxième partie de mon exposé de répondre aux questions à cet égard, mais je laisserai probablement tomber cela, de crainte de me répéter.
La déréglementation du transport du grain et du système de commercialisation doit être entreprise en parallèle avec l'élimination de la subvention - en d'autres termes, d'ici au 1er août 1995.
Il est utile que la réglementation du transport du grain relève de la LTN, mais les avantages découlant d'une telle mesure sont annulés par les taux plafonds proposés pour les chemins de fer, l'absence de décision quant à l'attribution des wagons et l'indécision concernant les embranchements. Je serai heureux d'entrer dans les détails de ces questions, mais d'abord j'aimerais m'en tenir à un aperçu plus général.
Le taux plafond réduit la compétitivité, entrave les décisions en matière d'investissement, annule les dispositions de protection des expéditeurs prévues par la LTN, nuit à la rationalisation économique des systèmes de manutention et de transport et réduit les possibilités d'exploitation dans les installations efficaces. Les agriculteurs pourraient aussi vouloir choisir le prix des services de transport en fonction de la valeur du produit. En d'autres termes, lorsque mon canola vaut 400$ la tonne et mon blé, 100$ la tonne, je serais peut-être disposé à payer plus cher pour le transport. Le taux plafond ne le permet pas; donc, il faudrait l'abandonner immédiatement.
Il faut changer de formule d'allocation des wagons et abandonner le modèle actuel pour adopter un modèle axé sur le marché, où il y a négociation entre l'expéditeur et le transporteur et où les propriétaires de wagons fixent les frais appropriés. Les propriétaires de wagons devraient décider des questions comme les surestaries et la répartition.
C'est le secteur privé qui doit être propriétaire du parc de wagons de grain. Les gouvernements auraient intérêt à vendre les parts qu'ils ont dans les wagons.
L'abandon des embranchements devrait s'effectuer sans restriction le 1er août 1995. Le dynamisme économique voulu suivra si le gouvernement se retire du processus. Je le mentionne parce que j'estime qu'aussitôt que le gouvernement apparaît à la table certains réclament des subventions plus élevées, une aide plus grande, et ce n'est pas ce que veulent les agriculteurs. Ils veulent un système rationnel, qui se justifie sur le plan économique et qui permette le transport de leurs céréales, et non pas consacrer beaucoup de temps à un grand nombre de voies qui servent à livrer très peu de céréales au port.
Le Comité supérieur du transport du grain de l'Office du transport du grain a relevé 740 milles de voies à faible utilisation qui permettraient aux agriculteurs des Prairies d'économiser 20 millions de dollars par année; on paierait aux agriculteurs les frais additionnels du transport par camion. Dans le cadre de cette étude, on n'a pas tenu compte des autres économies que l'on pourrait réaliser en transportant les céréales à des installations plus efficaces à rendement élevé.
Voici que nous effectuons une étude pour 535 milles de voies. J'ai fait partie du Comité d'action sur les services ferroviaires dans les Prairies, nommé par Otto Lang - j'étais le représentant de la Saskatchewan - et nous avons recommandé l'abandon de certaines de ces voies, et pourtant on les utilise toujours aujourd'hui.
Les chemins de fer secondaires auront peut-être un rôle à jouer si les décisions sont prises en fonction de notions économiques, et non pas de subventions gouvernementales. En d'autres mots, je ne rejette pas les voies sur courtes distances, mais elles doivent se justifier sur le plan strictement économique.
La loi sur le maintien des droits syndicaux, adoptée en Saskatchewan, comme en Ontario et en Colombie-Britannique, pourrait bien entraîner la disparition des chemins de fer sur courtes distances dans cette province. Cette loi oblige quiconque acquiert un de ces chemins de fer à respecter les contrats déjà conclus par la compagnie, et c'est inacceptable.
Une autre critique accessoire que j'ai à formuler à cet égard, c'est que la proposition de hausser le taux maximum de 10c. la tonne pour les verser aux chemins de fer sur courtes distances est rien moins qu'obscène. Nous ne devrions pas avoir d'intrusions administratives à cet égard. Qui administrera cette hausse de 10c. la tonne, et pourquoi cet argent devrait-il être versé à des chemins de fer secondaires qui sont inefficaces? Ces chemins de fer survivront si le climat économique est bon.
Vous avez sollicité notre opinion sur le fonds d'adaptation de 300 millions de dollars. J'ai d'abord pensé que ce serait une bonne idée, mais j'ai changé d'avis. Ce fonds d'adaptation de 300 millions de dollars devrait être joint au paiement de 1,6 milliard de dollars. Cela, parce que l'administration du fonds entrave le processus de déréglementation et de rationalisation.
J'imagine déjà les disputes autour de ces 300 millions. Mesdames et messieurs, nous n'avons pas de temps à perdre à cela. Il faut mettre immédiatement en oeuvre les mesures d'amélioration de l'efficacité, car nous perdons les subventions et nous souhaitons des gains d'efficacité.
Le paiement de 1,6 milliard de dollars est d'une importance contestable quand on songe qu'il équivaut à environ la moitié de la note de transport des produits des agriculteurs pour une année. Ce qui s'impose de façon urgente au niveau de l'exploitation agricole, c'est libéraliser le système en autorisant les agriculteurs à commercialiser leurs produits sur les marchés les plus intéressants en utilisant les modes de transport les plus efficaces.
D'après mes calculs, si la Saskatchewan obtient 55 p. 100 du paiement de 1,6 milliard de dollars pour 47 millions d'acres, cela équivaut à environ 18$ l'acre. Ce paiement est versé en une seule année pour payer les coûts de transport, et il n'y suffit même pas.
Pour ce qui est maintenant de la Commission canadienne du blé, il est certes suprêmement important d'en redéfinir le rôle, et cela devrait se faire parallèlement à la suppression de la LTGO et à la déréglementation globale du système de manutention et de transport du grain. De nombreuses suggestions ont été formulées pour la réforme de la Commission canadienne du blé, mais l'une des plus intéressantes est celle de lui donner un statut extraterritorial. Selon ce scénario, on peut imaginer que la Commission canadienne du blé commercialiserait pour le compte des agriculteurs tous les genres de grains et de produits en concurrence avec les autres négociants. Outre les grandes compétences en commercialisation de la commission, les agriculteurs bénéficieraient également d'un système de manutention et de transport plus compétitif qui serait bien sûr géré par les sociétés céréalières et d'autres qui veilleraient à ce que le grain arrive à destination.
À propos des points de mise en commun de la Commission canadienne du blé, je ne vois vraiment pas pourquoi le système de commercialisation de la commission devrait s'occuper de la mise en commun des coûts de transport. Les zones de collecte pour la mise en commun ne font que substituer une règle ayant un effet de distorsion à une autre. Les nouvelles propositions ne tiennent pas compte des changements que subit le marché d'un jour à l'autre à l'intérieur d'une même zone de collecte. La demande sur le marché n'a rien de statique. Les agriculteurs d'aujourd'hui et de demain utiliseront tous les modes de transport et, dans bien des cas, livreront leurs produits bruts ou transformés directement aux consommateurs, aux détaillants et aux transformateurs.
En ce qui a trait à la valeur ajoutée et à la diversification, les agriculteurs savent depuis plusieurs années qu'il y aura réduction des subventions et ont donc opté pour la diversification des cultures, et dans certains cas pour les produits à valeur ajoutée. L'annonce finale concernant la LTGO a donné lieu à l'apparition d'un certain nombre de nouvelles entreprises.
Ces mesures continueront, mais il existe deux obstacles importants. Il faut accélérer la déréglementation. Les capitaux sont une denrée précieuse, et notre industrie ne saura pas les attirer si elle est surréglementée.
Quant aux grains commercialisés par la commission, le système de mise en commun et d'établissement des prix continuera de limiter les possibilités. Les industries doivent avoir accès à des produits d'une qualité précise, ce qui nécessite, dans bien des cas, que des contrats soient passés directement avec les agriculteurs.
Soit dit en passant, j'ai trouvé intéressant d'apprendre que, lors d'une allocution qu'il prononçait l'autre jour devant la Chambre de commerce, M. Don Loewen, directeur général de la SaskPool, a dit que son organisation, à partir de Saskatoon ou de Moose Jaw - où sont établis d'importants silos terminus - pouvait répondre directement aux besoins de ses clients en termes de qualité et de quantité sans avoir aucunement besoin de la Commission canadienne des grains.
C'est un fait à prendre en considération. Il aurait très bien pu dire qu'il n'avait même pas besoin de la Commission canadienne du blé pour le faire.
Il est important de faire remarquer ici que le client - j'ai déjà entendu cela - est important, et qu'il faut donc satisfaire les clients en leur fournissant le genre de produits qu'ils veulent. J'ai d'autres observations à ce sujet dans le document consacré aux questions et réponses.
À propos de l'accès aux marchés et aux ports américains, si les agriculteurs de l'Ouest du Canada veulent rester compétitifs sur les marchés mondiaux, ils doivent avoir un accès direct aux marchés américains et la possibilité d'acquérir eux-mêmes leurs services de manutention et de transport. Cela semble être une des seules solutions qui nous restent pour ramener une certaine mesure de réalité sur le marché du travail et de la fiscalité. Alors que beaucoup d'industries et, dans certains cas, de politiciens récoltent les avantages du libre-échange et de l'ALÉNA, les agriculteurs sont liés par l'atrophie des règlements et des organismes.
Je tiens à remercier encore une fois le comité d'entendre nos points de vue, et je serai heureux de parler du document consacré aux questions et réponses que le comité nous a adressé, si nous en avons le temps. Je voudrais cependant en rester là pour le moment de sorte que Bill ait tout le temps d'exposer ses observations.
Le président: Merci, monsieur Cooper.
Monsieur Copeland, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Bill Copeland (témoignage à titre personnel): Je vais vous faire mon exposé. Je l'ai préparé en réponse aux questions que vous nous avez adressées; il ne s'agit peut-être pas de réponses très détaillées, mais en nous dépêchant de faire l'exposé, il nous restera peut-être du temps pour des questions à la fin.
Le président: C'est très bien.
M. Copeland: Quoi qu'il en soit, je tiens à vous remercier tous. C'est un honneur que de pouvoir venir vous exposer nos arguments, à vous qui pouvez contribuer, comme nous l'espérons, à améliorer la situation de notre industrie. Nous sommes très heureux de pouvoir nous faire entendre devant vous.
Votre première question résume toute l'histoire de l'agriculture depuis 50 ans. Les règles régissant actuellement le transport exercent une véritable discrimination contre les agriculteurs et tout le secteur des produits à valeur ajoutée. Si on laisse les expéditeurs et les transporteurs conclure leurs propres ententes, les choses se passeront en douceur. Les gens investiront dans le secteur à valeur ajoutée. Ils investiront dans le secteur des transports, les chemins de fer, les camions. Les municipalité devront peut-être réparer quelques routes. Les sociétés exploitantes de silos investiront dans la construction de nouvelles installations ou la modernisation des anciennes, et tout cela permettra de créer des emplois dans la plupart des secteurs.
Une industrie réglementée par l'État n'investira pas pour prendre de l'expansion ou améliorer ses installations, comme nous l'avons vu, et on n'a qu'à penser à la nouvelle usine de concassage de la Cargill, à Saskatoon, aux abattoirs de l'Alberta, et à l'usine de la Prairie Malt, de Biggar, en Saskatchewan, qui semble prendre de l'expansion d'année en année.
Quant au secteur des cultures spéciales, il a pris de l'essor et continuera de le faire s'il peut bénéficier d'un climat propice.
La position actuelle de la Commission des grains, selon qui les négociants doivent avoir une licence et déposer un cautionnement, me paraît trop restrictive. Je sais ce qu'elle essaie de faire, mais, en réalité, l'industrie fonctionne officieusement selon un double système. Cela veut dire que certains négociants sont licenciés et cautionnés, et d'autres non, et c'est bon pour l'industrie dans les deux cas. J'espère que, lorsqu'elle entrera en vigueur, la nouvelle loi légalisera cet état de fait. Il est beaucoup plus économique d'établir et de maintenir un système comme celui-ci plutôt qu'un système entièrement réglementé.
Les localités rurales vont certainement bénéficier de ce genre d'ententes commerciales, et elles en ont bien besoin. Toutes sortes de projets verront le jour une fois que les restrictions imposées par l'État auront été éliminées. Il y faudra sans doute un certain temps, et une partie de cette activité se fera dans le secteur agricole non traditionnel de la séparation, au moyen de procédés de technologie de pointe, des éléments des grains actuellement cultivés, en vue de leur vente.
Je crois que cette industrie est sur le point de donner naissance à une nouvelle industrie, grande et solide. Nous pourrons en discuter plus tard, mais toutes sortes de cas nous montrent déjà que cela est en train de se produire.
À mon avis, la suppression de la subvention du Nid-de-Corbeau n'aura d'autre effet en soi que de faire doubler les coûts de transport des agriculteurs. Voici quels sont à mon avis les autres changements qui doivent accompagner ce changement le 1er août.
La Commission canadienne du blé doit perdre son caractère de monopole, de sorte qu'on puisse choisir de passer ou non par elle. La répartition des wagons doit être dictée par le marché. La commercialisation du grain doit se faire à l'échelle continentale; j'entends par là l'Amérique du Nord - peut-être l'Amérique du Sud également - mais certainement à l'échelle de l'Amérique du Nord.
Nous vivons à côté d'un important client qui paie comptant et qui a besoin de toutes sortes de denrées comme l'orge de brasserie et le blé durum pour la fabrication des pâtes et toutes les cultures spéciales comme les pois, les lentilles, les haricots, les graines à canaris, la moutarde et les céréales fourragères.
Il faut procéder immédiatement à l'abandon des embranchements ferroviaires et éliminer les coûts qu'ils représentent. Le comité actuellement chargé d'examiner la question se penche sur les mêmes vieux tronçons déjà analysés et fait un travail inutile. On ne pourrait même pas rouler sur certains d'entre eux pour aller les examiner sans se munir d'une hache pour abattre les arbres qui poussent sur la voie ferrée. Cet examen a été fait à maintes reprises.
Nous avons besoin d'une marge de manoeuvre pour établir des taux incitant les usagers à expédier leur grain à partir de certains points.
La nouvelle base de mise en commun de la commission s'apparente davantage qu'auparavant à un tarif établi en fonction du marché, mais pourquoi est-ce la commission qui établit le tarif? Je croyais qu'elle avait pour mission de vendre du grain, non pas d'exploiter des chemins de fer et de s'occuper du transport.
Quoi qu'il en soit, ces taux changent probablement tous les mois, ou tous les deux mois, et sont différents pour différents types de grain à destination de différents endroits et à différents moments de l'année. Ils ne peuvent pas être statiques, et seul le marché peut refléter cette réalité.
Si la commission continue à vendre du grain, elle devrait se limiter à cela et en laisser la livraison à ceux qui s'y connaissent en matière de manutention et de transport.
Je fais appel à votre sens des affaires pour laisser le producteur de céréales faire affaire avec une industrie qui tâche de le servir sous le régime de ces règles et non à un coût qu'il ne peut très certainement pas se permettre de payer.
Dans bien des cas, la subvention du Nid-de-Corbeau que nous venons de perdre était à peu près tout ce que de nombreux agriculteurs avaient pour subsister. Ils ont besoin de récupérer rapidement cette année certaines économies résultant des améliorations de l'efficacité du système.
Le projet de loi concernant un fonds d'adaptation pour le transport laisse entrevoir un répit, et je crois que cet argent devrait vraiment être versé à l'agriculteur. Il pourrait ainsi payer certains coûts à caractère local sous forme d'impôt ou de taxes, si c'est là ce qui est nécessaire pour réparer les routes ou effectuer quelque amélioration que ce soit.
Je le répète, les wagons pourraient être répartis en fonction des ententes conclues entre expéditeurs et transporteurs. Les wagons devraient probablement appartenir à des entreprises privées, et certes pas à l'État.
Il y a encore d'autres éléments à prendre en compte et dont les coûts sont élevés. On ne peut parler de transport sans parler aussi de manutention, car tout le système constitue un ensemble. Les coûts élevés sont attribuables à l'existence des nombreuses petites installations que nous avons dans les Prairies et qui exigent des employés et beaucoup d'entretien, mais dont le débit d'expédition est très faible.
Nous avons un réseau ferroviaire qui essaie de desservir ce système de collecte désuet. Nous avons une voie maritime dont les coûts d'exploitation augmentent terriblement. Nous avons à Vancouver beaucoup de terrains riverains où il en coûte cher d'aménager des terminaux pour entreposer et nettoyer le grain. Ces installations nécessitent une nombreuse main-d'oeuvre coûteuse, du moins par rapport aux coûts de main-d'oeuvre ayant cours en Saskatchewan, où une bonne partie de ce travail pourrait être effectué. Tout cela pour du blé vendu pas cher.
Je crains que nous n'ayons bientôt trop de silos terminus intérieurs, ce qui provoquera des coûts inutiles; il leur faut cependant une marge de manoeuvre pour gérer leur dette et leurs affaires. Je pense qu'ils y réussiront très bien si on leur laisse une marge de manoeuvre.
Les coûts de main-d'oeuvre à Vancouver sont élevés, mais surtout parce que les effectifs sont trop nombreux. Je ne trouve rien à redire à payer un bon salaire pour une bonne journée de travail, mais il y a là des gens qui n'ont rien d'autre à faire qu'en regarder d'autres travailler. C'est probablement un problème inhérent aux syndicats.
Le monde se soucie peu de savoir si nous subissons une grève ou pas. Nos clients veulent simplement recevoir leur grain à temps et à un prix raisonnable. S'il faut recourir aux services de transport américains à des moments comme celui-ci ou durant les périodes de pointe, on le fera.
Nous devons bien avoir des avantages. Des avantages sur qui, je ne le sais pas très bien, mais notre système de transport présente plusieurs aspects positifs, dont voici quelques-uns.
Nous avons un bon parc de locomotives et de wagons-trémies; un grand réseau de voies ferrées principales en bon état et d'excellents embranchements remis à neuf; dans bien des cas, beaucoup de bonnes routes municipales menant à ces voies ferrées; et de bonnes installations nous permettant de charger un grand nombre de wagons en peu de temps.
Il nous faudrait encore ajouter à ce système des installations comme celles du projet de terminal Mercury à Vancouver; nous pourrions alors vendre une partie de nos propriétés coûteuses du centre-ville, qu'il faut entretenir ou pour lesquelles il faut payer un loyer élevé.
Les wagons seraient répartis plus équitablement si l'État ne s'en mêlait pas. Il s'agirait pour les expéditeurs et les transporteurs de s'entendre entre eux à cet égard.
Une bonne façon de s'assurer que les gains d'efficacité profitent à l'agriculteur, ce serait de lui laisser toute liberté pour gérer son entreprise, vendre son grain et le faire transporter comme il l'entend pour le faire à bon compte. Je parle en fait de la libre concurrence sur le marché.
Dans le cadre de ces ententes, je ne pense vraiment pas que beaucoup de grain passerait par les États-Unis si le système canadien était compétitif. Je préférerais que des Canadiens s'occupent de la manutention du grain canadien, mais, en tant qu'agriculteur, j'ai une entreprise à exploiter et je ne peux me permettre de mécontenter mes clients. Aucune entreprise ne peut d'ailleurs se le permettre.
Nous devrions passer rapidement au meilleur scénario que nous puissions imaginer. Je ne vois aucune raison d'attendre. Cela ne ferait que coûter de l'argent à l'agriculteur. Laissons les expéditeurs et les transporteurs établir leurs propres règles en matière de primes et de pénalités. Si cela ne fonctionne pas pour le contrat actuel, ils feront certainement mieux dans le prochain qu'ils rédigeront.
Les sociétés ferroviaires s'amélioreront dans un contexte de concurrence. Elles ne font probablement pas du mauvais travail à l'heure actuelle; il y a seulement que le système avec lequel elles doivent travailler est désuet à bien des égards.
Dans le cas des producteurs qui constituent parfois un marché captif pour une seule société ferroviaire, il s'agit d'une réalité de la vie. Quand les services ferroviaires deviennent trop chers, le transport par camion devient une option viable. Je ne paierais certainement aucun coût supplémentaire aux chemins de fer sur courtes distances. Il faut nous y prendre tout de suite de la bonne façon à cet égard. Ces chemins de fer ne constituent pas un système particulièrement rentable pour le moment. Je ne dis pas qu'il ne peut pas l'être, mais il faut le réformer à cette fin.
Le paiement de 1,6 milliard de dollars constitue vraiment une somme dérisoire. Je crains bien que nous ne nous préoccupions tellement de ce que nous pourrions faire de ces 16$ ou 18$ l'acre que nous en oubliions tout le reste. Je m'exprime en tant qu'agriculteur quand je dis qu'un épandage d'herbicide me coûte de 15$ à 20$ l'acre, et je me demande s'il n'aurait pas été préférable de consacrer cet argent à la recherche ou à un programme visant à améliorer un jour notre productivité et notre commercialisation en général pour les cinq ou dix années à venir.
Quoi qu'il en soit, il ne faut pas trop nous emballer à propos de cette maigre somme. Pour l'agriculteur moyen, cela équivaut à une ponction annuelle de 15 000$ à 35 000$ sur son revenu, et je ne pense pas que cela plairait beaucoup à la plupart des salariés.
Cette mesure de la part du gouvernement montre bien qu'il faut pouvoir avoir une entreprise non réglementée et compétitive. Je crois que nous devrions laisser à l'agriculteur, au propriétaire et au locataire le soin de conclure leurs propres ententes. Lorsque c'est le gouvernement qui s'en charge, les choses prennent souvent beaucoup de temps. Ils s'entendront entre eux. Nous ne devrions pas nous attarder là-dessus pendant trop longtemps.
J'ai ajouté à la fin de mon mémoire des aspects que nous voulions souligner, mais pour économiser du temps, vous pourrez vous-mêmes en faire la lecture.
Merci beaucoup à tous de nous avoir accueillis et écoutés.
Le président: Je vous remercie, monsieur Copeland.
Nous passons maintenant aux questions, en commençant par un tour de cinq minutes. Monsieur Chrétien.
[Français]
M. Chrétien: Pour ma gouverne et probablement celle de tout le monde, comme vous êtes deux producteurs, que vous venez ici à titre personnel et que vous n'occupez pas de postes de commande au sein des associations dont vous pouvez faire partie, demeurez-vous loin l'un de l'autre?
[Traduction]
M. Cooper: Oui, nous sommes tous deux agriculteurs et habitons à environ 220 milles l'un de l'autre. Je pratique l'agriculture avec mes neveux dans la région de Foam Lake, dans le centre-est de la Saskatchewan. Nous avons ensemencé quelque 3 500 acres cette année.
Pour ce qui est de la représentation, nous appartenons à un grand nombre d'associations. Pour ma part, je fais partie de la Saskatchewan Wheat Pool, de la United Grain Growers, de la Saskatchewan Canola Growers, de la Western Barley Growers, de la Western Canadian Wheat Growers, et je suis président en matière d'agriculture du conseil d'administration de la CITL.
Qui représentons-nous? Comme je l'ai souligné, nous représentons à mon avis 30 p. 100 des agriculteurs qui cultivent 70 p. 100 des produits. Comme je le dis dans mes questions, il y a un autre groupe d'agriculteurs qui sont bien placés - car je présume que vous demandez en fait qui nous représentons vraiment - et dont nous pourrions dire à juste titre que nous sommes les représentants parce qu'ils veulent effectivement un changement. Un pourcentage élevé d'agriculteurs veulent un changement et une déréglementation. Nous en avons assez de la réglementation, et beaucoup d'agriculteurs qui cultivent une grande partie des produits veulent une déréglementation de l'industrie au moment où ils perdent une subvention. Nous sommes prêts à renoncer à la subvention. Pour ma part, je m'efforce depuis 1978 de faire modifier cette subvention, de sorte que...
[Français]
M. Chrétien: Je vous arrête ici, si vous le voulez bien, parce que M. le président m'accorde seulement cinq minutes et je voudrais vous poser encore quelques questions.
Monsieur Copeland, je vous trouve très sévère. À la fin de votre présentation, vous parlez de la fameuse somme de 1,6 milliard de dollars que vous qualifiez de pitance. Vous dites que cela revient à 16 ou 18$ l'acre, et c'est vous ou votre collègue qui disiez que, dans bien des cas, la subvention de la LTGO était, au bout de l'année, le seul revenu qui restait aux producteurs agricoles.
Il me semble qu'il y a là deux poids, deux mesures. D'un côté, on me dit que cela ne vaut à peu près rien, qu'on devrait le donner aux universités ou à des organismes à but non lucratif, que cela ne représente que 25 ou 35 millions de dollars. Je dois vous avouer que j'étais l'un de ceux, en Chambre, qui pensaient qu'on donnait beaucoup aux agriculteurs de l'Ouest comparativement à ce qu'on donnait aux producteurs agricoles de l'Est. Dans l'Est, on produit surtout du lait. On coupe la subvention aux producteurs de lait industriel et il n'y a pas de dédommagement.
Il y a un autre lapsus que je comprends mal. Ici, on dit que cette somme de 1,6 milliard représente très peu, mais il faut bien comprendre que la LTGO, pour 1993-1994, ne représentait qu'environ 640 millions de dollars. C'est donc presque le triple qu'on va donner. A moins que je n'évalue mal mes chiffres, ou que ce soit vous qui les évaluiez mal, cette somme de 1,6 milliard de dollars est le triple de ce qu'on a dépensé l'an passé en vertu de la LTGO. C'est assez important. De votre côté, vous dites que ce n'est pas important. Pourriez-vous m'éclairer à cet égard? C'est vous, monsieur Copeland, qui avez parlé de cela. Si vous voulez prendre quelques minutes pour m'expliquer tout cela, il ne m'en restera plus beaucoup.
[Traduction]
Le président: Il ne vous reste plus de temps, mais nous écouterons tout de même la réponse.
M. Copeland: Vous avez raison. Selon les chiffres concernant la subvention de la LTGO, cela représente environ trois fois le montant annuel versé habituellement. Là où je veux en venir, c'est que ce montant était habituellement payé chaque année. Étant donné l'état de l'industrie des céréales, c'est à peu près le montant que recevaient les agriculteurs pour vivre, selon la taille de leur exploitation agricole. Ils pensaient obtenir cette subvention pendant longtemps. Comme Bill l'a fait observer, je ne pense pas que beaucoup d'agriculteurs soient très bouleversés de la perdre. Ce que nous avons lu dans les journaux et entendu ailleurs, c'est qu'on se demande ce que nous allons faire et qui recevra l'argent.
Bien que cela soit important, la question vraiment cruciale, à mon avis, c'est de savoir quelles seront les nouvelles règles, et non qui obtiendra 15$, 18$ ou 20$ l'acre, ou le montant qui sera fixé en fin de compte.
Je ne peux pas vous donner beaucoup d'explications. Je voudrais me concentrer sur les nouvelles règles de mon entreprise, plutôt que sur les 15$ ou 18$ que vous allez me verser pour payer environ la moitié de la note de transport de cette année.
Le président: En fait, monsieur Copeland, c'est en partie la raison pour laquelle le comité est organisé comme il l'est. Nous ne voulions pas nous engager dans un débat sur les paiements et les rajustements qui devraient être effetués ou non dans le cadre de la LTGO. Nous voulions plutôt regarder ce qui se passera dans l'avenir. D'où les questions sur lesquelles nous voulons nous concentrer. Nous essayons de voir comment nous pourrions, entre autres, diversifier les produits à l'avenir.
Madame Cowling.
M. Copeland: Puis-je faire une observation? Mettons cela de côté et passons aux autres problèmes, et non aux quelques dollars qu'on nous versera.
Mme Cowling: J'ai une question à poser au sujet du rajustement de 300 millions de dollars au titre de la mise en commun des coûts de transport dans la voie maritime. Je soulève cette question parce que mon mari et moi exploitons une ferme dans ma circonscription, au Manitoba, et que cette circonscription est parmi celles où l'on produit probablement la plus grande quantité de céréales. L'idée de nous diriger vers une déréglementation me rend un peu nerveuse. Et si je vous ai bien compris, il faudrait adopter un tel régime le plus rapidement possible.
Cela m'effraie, parce que certains producteurs devront s'adapter. J'estime que les agriculteurs ont besoin d'un peu de temps pour s'adapter à ce nouveau régime, peu importe où ils se trouvent. C'est une des questions que je voudrais vous poser au sujet de cette transition et de cette adaptation. Le gouvernement vise les marchés d'exportation et cherche à y acheminer de plus grandes quantités de céréales. Nous devons cependant prendre soin de ne pas couper l'herbe sous le pied de certains agriculteurs.
Qu'en dites-vous?
M. Cooper: Certainement. Ce qui me préoccupe au sujet de ces 300 millions de dollars, c'est qu'on semble parler d'un genre de fourre-tout politique, où nous pourrions dire: donnons-en une partie à Churchill - je crois que c'est M. Axworthy qui a dit cela - et une autre partie ailleurs. Ce que je soutiens, c'est que lorsque les choses se passent ainsi, pour chaque million de dollars qui est accordé... Disons que un ou deux millions de dollars sont puisés dans ce fonds. Il faut ensuite établir une structure administrative afin de les verser pour les routes ou d'autres installations. Cela ralentit le processus de rationalisation.
Ce que nous devons faire, c'est nous débarrasser de certains des embranchements, de certains silos qui recueillent 5 000, 10 000 ou 20 000 tonnes par année. Un grand nombre ne recueillent que cette quantité. La moyenne n'est que de 25 000 tonnes. Nous devons nous départir de ces silos et des embranchements coûteux pour que le système obéisse aux impératifs économiques.
Je sais que des injustices ont été créées en raison du système de mise en commun établi par la Commission canadienne du blé et des points de mise en comun situés à Thunder Bay et à Vancouver, mais pourquoi passons-nous maintenant à ce système de zones de chalandise, qui constitue une autre distortion? Nous allons nous retrouver avec une deuxième version de la subvention du Nid-de-Corbeau. Nous allons avoir des taux plafonds pour les chemins de fer, exactement comme c'était le cas avant 1983.
Nous n'avons rien en fait d'allocation de wagons. Les points efficaces veulent un plus grand nombre de wagons, mais ne peuvent pas les obtenir, car le système d'allocation ne les attribue pas en fonction des impératifs économiques. Les zones de chalandise que la Commission du blé propose... Comment savoir dans quelle direction les céréales seront acheminées?
Par exemple, la semaine dernière, j'ai envoyé mon dernier chargement de pois à Spokane, dans l'État de Washington. J'y ai envoyé quatre camions. À l'automne, nous avons envoyé trois wagons à Thunder Bay. Alors, cette zone de chalandise n'est qu'une autre distortion.
Pourquoi la Commission du blé se mêle-t-elle de transport? Elle devrait s'en retirer complètement. Si elle veut mettre en commun le prix des céréales, c'est une chose. Mais qu'elle se retire du transport.
Alors, ce qui me préoccupe, c'est l'incertitude autour du fonds de 300 millions de dollars, et cela ralentit vraiment la rationalisation. Les gens veulent investir dans l'agriculture. Il n'y a pas longtemps, nous avons visité une entreprise qui désire installer une usine de trituration du blé. Or, elle doit faire face à tous ces règlements, ce qui l'empêche d'acheter le blé auprès de l'agriculteur et de le transformer.
Alors, ce que je dis, c'est que les agriculteurs sont prêts à s'adapter, capables de le faire et ils le font déjà. En outre, il y a eu certains rajustements dans les prix. Prenons l'avoine, par exemple. Le prix qu'on peut actuellement obtenir pour l'avoine est suffisamment élevé pour rendre la subvention du Nid-de-Corbeau inutile. Il est très élevé parce que, entre autres, il existe une demande pour ce produit et que les États-Unis ne peuvent pas l'ensemencer. Alors, le marché est suffisamment bon pour faire supprimer la subvention. Il en est de même pour le canola. Alors, il y a certains produits qui commandent ces prix et qui continueront de les commander de temps à autre.
M. Collins: À titre d'éclaircissement, je me demande si vous pourriez nous remettre le document de M. Axworthy dont vous avez parlé. Il y a des gens qui viennent faire des observations devant le comité. Si vous avez ce document, pourriez-vous le déposer devant le comité afin que nous puissions le consigner?
M. Cooper: C'était dans la presse. On disait partout dans la presse qu'il y avait...
M. Collins: L'inconvénient, monsieur, c'est que des gens nous font des observations, et si elles sont conformes aux faits... Je voudrais que vous nous remettiez ce document; c'est tout ce que je dis. Si vous l'avez et qu'il est conforme aux faits, déposez-le simplement devant le comité.
Le président: Madame Cowling.
Mme Cowling: Je voudrais revenir au rajustement des coûts de mise en commun car, de toute évidence, vous êtes deux personnes de la Saskatchewan qui présentez un point de vue entièrement différent de celui des producteurs du Manitoba et de ceux que je représente.
Vous avez mentionné que vous représentez 30 p. 100 des agriculteurs qui cultivent 70 p. 100 des produits. Je me demande où ils le font. Ces 30 p. 100 d'agriculteurs sont-ils installés le long des voies principales ou des embranchements?
M. Cooper: L'endroit où ils habitent n'a rien à voir avec les voies principales et les embranchements. En fait, vous et moi n'habitons pas très loin l'un de l'autre. En tant qu'agriculteur, je tirerais probablement profit de la proposition visant à déplacer le point de mise en commun du Manitoba à la Saskatchewan, ce qui permettrait d'obtenir une partie des 300 millions de dollars.
Après ce que j'ai entendu et lu dans les médias, j'en suis venu à croire... Je sais que vous prenez ces décisions et qu'elles ne sont pas définitives, mais ce qui me préoccupe, c'est que tout le monde veut une partie des 300 millions de dollars. On en veut, entre autres, pour les routes en Saskatchewan et au Manitoba, pour Churchill, si bien que tous ces facteurs ont tendance à ralentir la rationalisation.
Nous avons besoin d'un système clair et concis où les expéditeurs et les sociétés ferroviaires peuvent décider de fermer un embranchement parce que son utilisation est trop coûteuse, ou de fermer un silo, même s'il est situé le long d'une voie principale, parce qu'il ne recueille que 10 000 tonnes et ne peut contenir que deux wagons.
M. Copeland: Si vous laissiez les forces du marché agir, tout cela se ferait automatiquement. Vous n'avez qu'à assouplir les règles - vous n'avez même pas à établir des règles; l'économie s'en chargera.
Le président: Vous faites bien plus confiance que moi au marché, monsieur Copeland. Si vous regardez le Dakota du Nord...
M. Copeland: Je parle du point de vue de l'industrie des cultures spéciales à laquelle je participe depuis environ 28 ans. Si je n'obtiens pas le prix que je demande, qu'on aille ailleurs. Nous n'agissons pas d'après les règles. Le prix des pois obéit aux forces du marché, et les choses ne sont pas bien différentes dans le cas du canola. Le prix des pois, des lentilles, des graines à canari, de la moutarde, du tournesol, de la betterave et de bien d'autres produits cultivés au Manitoba obéit aux forces du marché.
Les agriculteurs sont prêts à un changement. Ils ont très hâte qu'il se produise.
Le président: Vous pouvez poser une brève question, madame Cowling. Nous devons avancer. Vos cinq minutes sont écoulées, mais j'ai pris un peu de votre temps.
Mme Cowling: Merci.
J'ai une brève question, que j'ai posée à beaucoup d'autres témoins. Pensez-vous que nous devrions avoir une voie ferrée d'un bout à l'autre du pays si certaines installations sont inefficaces, même jusque dans l'est du Canada? On me dit que certaines installations sont inefficaces et que les avantages se trouvent en fait dans l'ouest du Canada. Croyez-vous que nous devrions continuer de maintenir une voie ferrée pour préserver l'unité canadienne?
M. Cooper: Je réponds à cela que l'unité canadienne sera préservée grâce à une rationalisation économique du système. Si nous pouvons faire plus d'argent en ayant un système plus efficace qui obéit aux impératifs économiques, nous préserverons notre identité canadienne. Nous voulons faire un peu d'argent et nous doter d'un système plus efficace.
À mon avis, un moyen d'y arriver, c'est d'exposer notre système à tous les modes de transport qui existent en Amérique du Nord et de l'utiliser à des fins concurrentielles. Comme je l'ai dit dans mes réponses aux questions que vous avez posées, et qui se rapportent à cela, c'est ce qui assurera la compétitivité du système. Alors, tous nos chemins de fer, nos ports et nos terminaux deviendront plus efficaces parce que c'est la concurrence qui agira, et non un ruban d'acier réglementé par le gouvernement.
Le président: Monsieur Kerpan.
M. Kerpan: Merci, messieurs, de votre exposé. J'y retrouve beaucoup de points que je partage. De toute évidence, nous avons discuté avec beaucoup de groupes et de gens qui ont comparu devant le comité, et la plupart nous ont dit qu'il faut réglementer le transport dans une certaine mesure.
Estimez-vous qu'un certain niveau de réglementation constitue une solution de rechange viable? Je songe ici à une personne qui a comparu devant le comité, il y a quelques semaines, et qui a dit que ce serait le chaos si l'industrie du transport n'était pas réglementée. Partagez-vous cette opinion?
M. Cooper: Je ne crois pas du tout que ce serait le chaos. Je pense que nous avons besoin d'une certaine réglementation et, dans mon mémoire, j'ai proposé que l'Office national des transports s'en charge. Nous acheminons les céréales selon les règles de l'Office.
Le problème est que lorsque nous acheminons des céréales selon les dispositions de l'Office national des transports, cet organisme possède toutes sortes de moyens pour faire ce qu'il doit faire. Nous avons besoin d'un bureau de l'ombudsman comme l'Office national des transports pour surveiller ce qui se passe. Par exemple, si l'on impose un plafond aux tarifs, compte tenu de la façon dont fonctionne le système de prix de ligne concurrentiel, si vous n'êtes pas satisfait du tarif demandé par une ligne de chemin de fer, vous pouvez obtenir un tarif concurrentiel. Si on impose un tarif plafond de 31$ la tonne aux chemins de fer, comme ce sera le cas, pourquoi une autre ligne ferroviaire offrirait-elle un tarif plus avantageux? On constate donc que la réglementation a pour effet de supprimer.... Il n'y a pas d'attribution de wagons qui nous permette d'agir en conséquence à cause de la façon ridicule dont le système sera administré.
Je suis un actionnaire de la Northeast Termninal de Wadena, en Saskatchewan, et conseiller auprès du conseil d'administration et je sais exactement ce qui s'y passe. La réglementation limite le nombre de wagons que nous pouvons obtenir. Fait intéressant, la compagnie de chemin de fer nous avait proposé un tarif spécial pour 50 wagons mais nous n'avons pu obtenir que 46 wagons à cause de la décision d'un fonctionnaire.
L'Office national des transports a tout les pouvoirs. Nous devrions transporter le grain sous son autorité immédiatement mais procéder à une déréglementation de manière à ce que les tarifs concurrentiels, les manoeuvres interréseaux et les mécanismes de protection d'expédition soient efficaces. Ils ne le seront pas tant que le transport du grain sera réglementé. Bien entendu, nous avons besoin d'un organisme de réglementation mais ce qui est proposé ne fonctionnera pas.
M. Kerpan: Je voudrais aussi aborder certains des problèmes ouvriers qui sont survenus ces dernières années, mais je voudrais auparavant éclaircir, pour M. Chrétien, le volet de votre exposé, monsieur Copeland, dans lequel vous dites que les 1,6 milliard de dollars constituent une somme dérisoire.
La plupart des agriculteurs à qui j'ai parlé, y compris ceux qui louent actuellement ma ferme, m'ont dit que l'argent n'est pas ce qui les préoccupe. Ce que je veux dire, c'est que cette somme ne fera pas leur fortune. Dix milliards de dollars ne suffiraient pas. Je voulais simplement faire la lumière à ce sujet pour M. Chrétien. Sur ma propre ferme, si je pouvais encaisser des profits de 18$ l'acre chaque année, j'en serais très heureux.
Le président: Je me permets de vous interrompre brièvement, monsieur Kerpan, pour souligner que nous voyons ici certains aspects du libre marché. Nos collègues du Comité des finances ou du Comité de l'immigratioan nous coupent l'herbe sous le pied. C'est typique de la façon dont on traite les agriculteurs, n'est-ce pas?
M. Kerpan: C'est exact.
Le président: Poursuivez.
M. Kerpan: On pourrait peut-être faire appel à la sécurité.
Je voudrais simplement poser une question au sujet des problèmes ouvriers dont nous avons été témoins depuis de nombreuses années. Il apparaît évident que de nombreux syndicats interviennent dans le processus, depuis la ferme jusqu'au port.
Comment, selon vous, pourrions-nous régler ce grave problème ouvrier? Nous savons tous qu'il va de nouveau se manifester. Y a-t-il une façon dont le gouvernement puisse intervenir pour régler ces problèmes ouvriers?
M. Copeland: Je vois que vous me soumettez les problèmes les plus aisés.
Je ne sais pas, je crois que les relations de travail posent toujours un problème. Comme je le disais, je ne crois pas que la rémunération pose un problème lorsqu'un individu fait bien son travail. La situation devient plus problématique lorsqu'un seul homme travaille et que plusieurs autres se contentent de le regarder faire.
Nous devrions mettre à l'essai les ententes négociées dont il était question au cours de la séance précédente. Elles semblent donner de bons résultats ailleurs. Je ne vois pas pourquoi nous ne tenterions pas au moins de les mettre à l'essai. Elles ne font pas l'affaire de Henry, mais elles donnent néanmoins certains résultats. Je commencerais par là.
M. Cooper: Voilà où le gouvernement peut vraiment nous aider. Nous devrions pouvoir accéder aisément au système américain. Je sais que la Commission canadienne du blé a dit que les tarifs par wagon de la Burlington Northern sont beaucoup plus élevés, mais si cette compagnie devait concurrencer le Canadien Pacifique dans le sud de la Saskatchewan...
Le syndicat du blé de l'Alberta a annoncé hier qu'il participerait avec la Burlington Northern à un projet conjoint de construction d'une installation de l'autre côté de la frontière. Le projet va se concrétiser, et c'est intéressant.
La société Canpotex s'est très bien tirée d'affaire. Face à la hausse des tarifs du port de Vancouver, elle a annoncé son intention d'aller à Portland et c'est ce qu'elle fait. Voilà ce qu'il nous faut. L'organisme de réglementation n'a pas à nous dire comment procéder. Il nous suffit de dire que nous allons transporter des marchandises jusqu'à Burlington. Des camions en provenance de Nipawin, en Saskatchewan, ou en provenance de nos fermes ou de Neadow Lake peuvent assurer le transport, et c'est ce que nous faisons actuellement, comme je l'ai dit plus tôt. Nous avons envoyé quatre chargements de pois à Spokane, et c'était le meilleur prix possible en ce qui concerne ma ferme. Nous ne sommes pas aussi captifs que certains le prétendent. Nous ne sommes pas des expéditeurs captifs. Certaines industries le sont, mais ce n'est pas notre cas.
Le président: Vous n'êtes peut-être pas une clientèle captive mais on entend beaucoup dire que les expéditeurs de certaines régions, surtout dans le nord, sont captifs d'une compagnie de chemin de fer unique. Que se passe-t-il dans leur cas? Quelqu'un parmi vous a dit que l'Office national des transports a toutes sortes de pouvoirs et de ressources. Une des raisons qui explique la présence de l'office est que le vérificateur général a déposé un rapport cinglant concernant l'Office national des transports et la façon dont cet organisme et l'Office du tranpsort du grain ont protégé les intérêts des producteurs dans le passé.
Nous nous demandons si l'Office national des transports possède suffisamment de pouvoir d'ombudsman ou autres pour surveiller.... Quel est votre avis?
M. Cooper: Je crois qu'ils possèdent des pouvoirs suffisants, notamment sous la forme des dispositions concernant la protection des expéditeurs, les manoeuvres interréseaux, les prix de ligne concurrentiels, l'arbitrage final, y compris les obligations du transport public. L'office possède donc une marge de manoeuvre étendue pour intervenir en cas de plainte concernant les tarifs, et il l'a déjà fait. Je persiste à croire que l'office possède des pouvoirs suffisants et si ce n'est pas le cas, je n'ai aucune objection à ce qu'on examine d'autres solutions.
Nous ne voulons pas un régime différent de celui qui régit les autres expéditeurs. Nous voulons avoir les mêmes possibilités que Canpotex, les transporteurs de charbon et de soufre, etc., parce que les mêmes syndicats et les mêmes locomotives interviennent, quoi qu'on n'utilise pas toujours les mêmes wagons, parce qu'il y a là aussi beaucoup de politique en cause. Nous voulons cependant qu'ils fonctionnent....
Il y a un mois, j'ai assisté à une rencontre des transporteurs de grain à Milfort. M. Tom Culham, de la Western Canadian Shippers Association, y était. Les représentants de cette association ont peut-être comparu devant votre comité. Il a déclaré que les dispositions de la Loi sur les transports nationaux régissant l'expédition ont pour effet de réduire les tarifs de nombreux expéditeurs de 30 p. 100. Voilà un résultat très positif.
Nous avons ces possibilités, utilisons-les. En fait, si vous imposez un plafond au tarif marchandise des chemins de fer et qu'on ne permet pas une négociation des expéditeurs et des transporteurs au sujet de l'attribution du matériel roulant ou certains aspects connexes, le grain ne pourra pas en bénéficier.
Le président: Je ne vous suis pas en ce qui concerne le plafond des tarifs. Je suis stupéfait que vous soyez contre un plafond. Les compagnies de chemin de fer ne peuvent-elles pas être concurrentes dans un tel système?
M. Hoeppner: Je voudrais apporter une clarification, monsieur le président.
Le président: Je vous en prie.
M. Hoeppner: Je crois que cette personne a dit que si le tarif applicable au canola est de 10$, vous seriez prêt à payer un peu plus pour le transport; est-ce exact?
M. Cooper: C'est là une partie de la question.
M. Hoeppner: Mais ce n'est pas possible à cause du plafond. C'est l'impression que j'ai eue.
M. Cooper: Monsieur le président, l'autre aspect est que certains endroits, comme je l'ai dit, qui peuvent se trouver sur une ligne principale devraient payer... certains endroits, qui n'ont besoin que de deux wagons et ne peuvent manutentionner que 10 000 tonnes par année, devraient payer 40$ la tonne. Or, le tarif va être plafonné à 31$ la tonne, si j'ai bien compris.
Comment des endroits où le coût devrait être de 40$ peuvent-ils offrir des tarifs spéciaux à des endroits hautement efficients qui chargent 100 wagons, notamment Saskatoon, Moose Jaw, Weyburn, pour ne nommer que des endroits situés en Saskatchewan, et qui méritent vraiment ces tarifs parce qu'ils sont efficaces et nous permettent d'économiser de l'argent, alors qu'il n'est pas possible de demander des tarifs plus élevés ailleurs?
M. Copeland: L'agriculteur ne le voit pas vraiment. Ce n'est pas visible ailleurs sur le marché et c'est actuellement ce qui pose un problème. L'agriculteur ne sait pas où aller ou comment réaliser la meilleure affaire.
Je crois qu'il y a un problème. Nous pensons que tous devraient être égaux et recevoir le même montant pour chaque boisseau qu'ils essaient de vendre. Toutefois, nous n'avons pas les mêmes céréales. Nous ne vendons pas aux mêmes endroits, mais sur des marchés différents. Nos capacités de gestion diffèrent.
Je déplore que nous nous sentions obligés de traiter tout le monde sur un pied d'égalité. Si un agriculteur est captif d'un expéditeur, qu'il en soit ainsi, jusqu'à ce que cela devienne tellement coûteux... Si quelqu'un peut expédier des pois dans l'État de Washington ou ailleurs par camion, personne dans l'Ouest canadien n'aura de problème assez grand pour ne pas pouvoir le faire.
Le président: Je vais maintenant donner la parole à M. Hoeppner et je reviendrai ensuite à M. Collins.
M. Hoeppner: Je serai très bref, monsieur le président.
Vos terminaux céréaliers situés à l'intérieur des terres sont-ils rentables? Lorsque je me suis rendu en Saskatchewan, j'ai constaté avec étonnement que vous en construisez un cinquième. Pourquoi les agriculteurs reviennent-ils à l'ancien système coopératif?
M. Copeland: Parce qu'ils sont en faveur de la concurrence.
Comme je le disais, j'ai joué à Wadena un rôle très actif, ailleurs que dans le domaine des relations de travail. C'était le second cas. Nous voulions un système plus concurrentiel. À l'époque, nous avions vu venir les changements de tarif et nous voulions pouvoir nettoyer et transformer notre produit et le vendre en fonction de la demande du marché.
M. Hoeppner: Faites-vous concurrence à l'UGG? Vous êtes aussi membre d'un syndicat.
M. Copeland: Oui.
M. Hoeppner: Donc vous devez réaliser des profits...
M. Copeland: Oui. Nous nous tirons bien d'affaire dans le système actuel. Nous avons produit environ 112 000 tonnes l'an dernier. Nous avons effectivement très bien fait.
M. Hoeppner: Je suis allé dans le Dakota du Nord pour examiner leur système de rationalisation des lignes de chemin de fer. Les représentants de cette industrie m'ont prévenu qu'à cause du contexte, ils songeaient à ouvrir certaines lignes de chemin de fer parce que la consommation d'essence a rendu le transport par camion peu efficient.
Certains représentants des lignes ferroviaires nous ont dit pouvoir exploiter leurs lignes de façon très efficiente. Je crois qu'ils ont réussi à réduire les coûts de 4 ou 5$ la tonne. Le problème ne provient pas des lignes secondaires. Elles n'ont pas les droits de circulation et elles ne demanderaient pas 10c. la tonne si elles avaient ces droits sur une partie de cette ligne.
Est-ce que la solution ne réside pas dans une modification de la réglementation? Je crois savoir qu'il s'agit d'une réglementation provinciale et que les lignes provinciales ne peuvent pas utiliser les lignes fédérales.
M. Cooper: Vous faites référence aux droits de succession.
M. Hoeppner: Oui.
M. Cooper: La compagnie RailTex a voulu acheter certaines lignes en Ontario et dès que le gouvernement provincial a adopté une loi concernant les droits de succession, la compagnie s'est retirée. La même chose va se produire en Saskatchewan et au Manitoba ou ailleurs. Voilà où les gouvernements peuvent nous aider au lieu de nous gêner.
M. Hoeppner: C'est ce que je dis. Si les gouvernements provinciaux et fédéral pouvaient coopérer...
M. Cooper: Je crois que Churchill pourrait être un bon exemple de ligne secondaire. Nous devrions vendre cette ligne aux agriculteurs et les laisser l'exploiter uniquement selon les forces du marché. Il y aurait beaucoup de lignes secondaires. Il existe un nombre élevé de lignes secondaires que les compagnies ferroviaires ne voudraient pas abandonner si la réglementation était assouplie. Elles les exploiteront ou les vendront comme lignes secondaires. Il n'y aura pas de problème. Si les lignes secondaires sont rentables du point de vue économique, elles seront exploitées; dans le cas contraire, elles seront vendues. Il est cependant ridicule que nous choisissions de subventionner certaines lignes à raison de 10c. la tonne.
Le président: Je voudrais tirer cette question au clair. Bernie, avez-vous une question?
M. Collins: Monsieur le président, je voudrais revenir sur certaines choses que nous avons entendues dire. Je voudrais ajouter un peu de substance aux propos fantaisistes que nous entendons ici.
Premièrement, si vous voulez parler du montant qui sera versé aux agriculteurs de la Saskatchewan, il s'agit d'un montant d'environ 900 millions de dollars. Je crois que vous avez mentionné un chiffre différent.
Pour ce qui est de la subvention de 10c. la tonne, voyons le cas de la compagnie de chemin de fer Central Western en Alberta, qui dessert environ 1 400 agriculteurs. S'il ne s'agissait pas d'une ligne secondaire, elle aurait certainement été comprise dans l'entente qu'ont obtenue le CP et le CN.
Aussi, nous disons simplement qu'à cause d'un oubli... Vous direz peut-être que c'est... Je crois que vous avez employé le mot «obscène», mais vous avez peut-être employé un autre mot. Je crois que c'est juste. Si vous étiez laissé de côté, je suis sûr que vous seriez le premier à venir réclamer une plus grande justice dans le système. Nous ne sommes peut-être pas d'accord au sujet du processus, mais je crois que nous voulons faire preuve d'équité et être perçus comme tels dans le système.
Voilà comment cela a commencé. Notre intention, en tant que membres du comité, n'était pas de tenter d'éviter d'aborder la question de façon équitable. Je crois qu'il y a deux facteurs à considérer... Il y a l'entente trois, deux, un, c'est-à-dire un montant de 3 millions de dollars passant à deux millions de dollars puis à un million, dans cet ordre de grandeur. Vous pourrez constater l'automne prochain que le ministre va prendre des mesures en ce sens afin de corriger la situation dans l'ensemble de cette industrie.
En ce qui concerne les lignes secondaires, des représentants de la compagnies RailTex ont comparu devant le comité. Ils ont cité comme exemple le fait que la compagnie a acheté une partie d'une ligne de chemin de fer et, comme vous le disiez, les droits de succession. Je voudrais revenir à cette question parce que M. Copeland a fait remarquer que vous pensez que, dans le processus de règlement, les syndicats devraient pouvoir parvenir à un règlement final par arbitrage.
Permettez-moi de dire quelques mots au sujet de l'arbitrage. Au cours des années pendant lesquelles j'ai participé à des négociations, j'ai constaté que s'il n'y a pas de flexibilité - je crois que c'est le mot qu'a employé M. Kancs - autrement dit si M. Kerpan et moi-même avons à négocier tout en sachant très bien qu'un autre organisme va fixer le niveau des hautes eaux et intervenir dans le processus décisionnel, nous n'aurons pas à négocier. Il nous suffira d'attendre, peu importe le temps qu'il nous faudra prendre...
Il faut reconnaître que M. Kancs a eu le mérite d'attendre deux ans et demi sans parvenir à une entente mais qu'il a néanmons obtenu la garantie qu'il n'y aurait pas de grève. Je crois que M. Kancs a tenu des propos justes et que la position que lui-même et le syndicat ont adopté est tout à leur honneur.
Au sujet de ce que vous disiez, si nous allons en arbitrage, nous serons liés par le contenu des ententes parce que l'arbitre, qui n'aura pas à payer la note, aura permis au processus de suivre son cours. Les agriculteurs, comme vous, se retrouvent par conséquent aux prises avec une loi insensée. Vous devez supporter des redevances de stationnement et toutes sortes d'autres choses.
C'est pourquoi je vous mets en garde lorsque vous parlez du processus de négociation. Je crois que l'argument d'Allan était très valable. Comment diable pourrons-nous mettre en place un système qui soit pour vous le plus avantageux, vous permettre d'obtenir le meilleur prix pour vos produits, de sorte que vous en soyez satisfaits en fin de compte? Il faut agir collectivement, avec les syndicats et la direction. Il avait raison: les agriculteurs viennent à la table de négociation pour pouvoir influer sur la décision finale. Les arbitres pourraient être ceux du gouvernement fédéral, mais je ne leur fais pas très confiance car ils ne semblent pas se rendre compte que l'argent qu'ils dépensent est votre argent et le mien.
M. Cooper: Je voudrais répondre à quelques-uns des points qui ont été soulevés. Ensuite, Bill voudra peut-être intervenir.
Au sujet du dernier point que vous avez soulevé, c'est pourquoi je disais que la concurrence est la solution qui est de loin privilégiée. Assurons le transport de notre grain et obtenons l'aide du gouvernement fédéral pour harmoniser la réglementation canadienne et américaine du camionnage. Nous pourrons avoir recours aux services de la compagnie Burlington Northern, qui sera en mesure de concurrencer le CP. Le système bourdonnera d'activité. Nous pourrons concurrencer les camions sur une distance de 1 000 milles ou plus.
En ce qui concerne les lignes secondaires de Tom Payne... Ce dernier a évidemment négocié et il est allé jusqu'au dernier échelon de la Cour fédérale. Il a obtenu gain de cause et ne se retrouve pas aujourd'hui face à des droits de succession. Or, la Saskatchwean vient d'adopter une loi qui est pour nous une grave source de problème. Je regrette de dire, mais il s'agit d'un problème grave.
Je ne suis pas contre les lignes secondaires. Je suis en faveur de leur exploitation à condition qu'elles soient économiquement viables. Si, par exemple, la Southern Rail Co-op achète suffisamment de lignes secondaires, ces dernières pourront peut-être devenir rentables. Toutefois, la quantité de grains transportés sur cette ligne ne justifie pas l'énorme subvention. C'est pourquoi je dis qu'il faut que les lignes soient économiquement rentables.
Vous avez parlé d'un montant de 1,6 milliard de dollars. Mes calculs étaient fondés sur une superficie de 47 millions d'acres de grains et de jachères en Saskatchewan, et le montant de 1,6 milliard de dollars est tombé à 880 millions. Ce montant se rapproche des 900 millions, mais il ne correspond tout de même qu'à 19$ ou 18,75$ l'acre.
M. Collins: Je n'ai pas mis la superficie en doute. J'ai seulement fait valoir qu'il s'agissait d'environ 900 millions de dollars.
M. Cooper: Pensez à l'agriculteur. Quand nous avons réclamé du changement, nous avons appris que nous obtiendrions une somme un peu supérieure à ces quelques cinq milliards de dollars. Le syndicat avait parlé de sept milliards.
Quoi qu'il en soit, voilà ce que doit être le fonds d'adaptation. Dans l'état actuel des choses, il ne nous aide pas beaucoup à nous adapter, parce qu'il ne paie que le transport de nos marchandises pendant environ six mois. De là notre raisonnement.
M. Collins: Vous, les agriculteurs, vous parlez de subvention. Je sais que pour la ligne de transport de marchandises, pour ceux qui ont des gros silos, il existe maintenant un programe d'incitation pour facilier l'utilisation de ces trains-blocs et wagons automoteurs. Il existe pour cela une subvention qui crée des retombées et des avantages. Tâchons de ne pas brouiller les cartes.
M. Cooper: Je ne suis pas sûr de savoir de quoi vous voulez parler.
M. Collins: Je sais que les agriculteurs de l'intérieur reçoivent une bonne rémunération établie par wagon, par tonne, chaque fois qu'ils chargent leur grain sur la plate-forme du train-bloc.
M. Cooper: Et pourquoi n'en serait-il pas ainsi?
M. Collins: Je rappelle tout simplement ce fait.
M. Cooper: Ce n'est pas une subvention.
M. Collins: Non, je dis simplement qu'ils en tirent vraiment un avantage. Pour ce qui est de ceux qui utilisent les lignes secondaires, nous voulons simplement que ce soit juste. Je le dis simplement comme un exemple. Tout ce que nous disons, c'est que nous devrions être justes dans l'organisation du système.
Le président: Merci. J'aimerais que vous reveniez sur la question de la mise en commun des marchandises. Je ne trouve pas ce passage dans votre document pour le moment, mais je sais qu'il mentionne que vous croyez en l'existence de la mise en commun des marchandises. Essentiellement, si je comprends bien, la Commission canadienne du blé envisage maintenant de déduire les nouveaux frais de transport des marchandises du prix de base, ce qui permettra à ces localités d'arriver à un prix assez près du coût réel de l'envoi des marchandises.
Ce que je dis, c'est que je pense que c'est ainsi qu'on procédera. On étudie maintenant cette possibilité. Vérifiez simplement ce que vous en dites afin que les faits soient clairs.
M. Cooper: Tout ce que nous disons là-dessus, c'est qu'il faudra qu'il en soit ainsi si l'on veut que le grain soit acheminé dans toutes les directions.
Le président: Oui.
M. Cooper: En fait, c'est un autre phénomène de distortion dont le système est victime.
Enfin, j'ai vraiment apprécié que vous me consacriez votre temps. Nous avons hâte de prendre connaissance de votre rapport. Je vous remercie beaucoup de vous être intéressés à notre opinion.
Le président: Merci beaucoup, monsieur. Nous tiendrons compte de votre opinion.
Le groupe suivant est une délégation du ministère de l'Agriculture et de la Commercialisation de la Nouvelle-Écosse. MM. Lloyd Evans, Charles Keddy et David Robinson travaillent au ministère.
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue. Qui est le chef de la délégation? Lloyd? Monsieur Evans, ce serait peut-être utile pour commencer que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent. Nous ferons de brèves présentations, puis nous passerons aux questions.
M. Lloyd Evans (président, Comité d'aide au transport du fourrage, ministère de l'Agriculture et de la Commercialisation de la Nouvelle-Écosse): Je suis aujourd'hui en compagnie de M. Dave Robinson, économiste principal au ministère de l'Agriculture et de la Commercilisation de la Nouvelle-Écosse. M. Charles Keddy est président de la Nova Scotia Federation of Agriculture, l'organisation de commercialisation pour les agriculteurs de la province de la Nouvelle-Écosse. Je suis Lloyd Evans. Je suis président de notre comité d'aide au transport des céréales fourragères, qui oeuvre actuellement en Nouvelle-Écosse.
C'est M. Robinson qui nous présentera le mémoire. Nous passerons ensuite à la partie discussion.
M. David Robinson (économiste, ministère de l'Agriculture et de la Commercialisation de la Nouvelle-Écosse): L'aide au transport des céréales fourragères a grandement influé sur le développement de l'agriculture dans notre province, la Nouvelle-Écosse, au cours des 54 dernières années. Je sais que vous devez également tenir compte de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, et que cette loi remonte au début du siècle. Franchement, dans un sens, l'aide au transport du fourrage a eu un impact à long terme beaucoup plus grand sur notre industrie que la Loi sur le transport du grain de l'Ouest parce que, de la façon dont je vois les choses, la loi n'a pas vraiment prévu de subventions avant les années cinquante et soixante. Les tarifs étaient fixés par règlement, mais ils ont obéi aux forces du marché durant bien des années. Cette subvention existe donc depuis bien plus longtemps que la Loi sur le transport du grain.
Grâce à l'influence qu'a eue cette subvention dans les années qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, nous avons aujourd'hui une industrie dont les trois quarts des bénéfices financiers proviennent du bétail et de la volaille. Les graines fourragères constituent le plus gros achat de notre industrie. Si vous voyagez en Nouvelle-Écosse, vous verrez des fermes d'élevage de Yarmouth jusqu'à Sydney. C'est cela, la preuve de l'influence de l'aide au transport du fourrage.
L'honorable Fernand Robichaud a rendu visite à notre province, dernièrement, et nous avons visité quelques fermes porcines très isolées. Ces fermes étaient très loin des grands centres agricoles. En hélicoptère, nous avons survolé les forêts pendant de longs moments. On aurait dit le fin fond de la campagne australienne. Par moments, ses adjoints faisaient des remarques comme: quelle idée d'aller installer un élevage de porcs aussi loin? La réponse est simple, c'est l'aide au transport des céréales fourragères qui a influé sur les décisions d'investissements dans notre industrie depuis la Seconde Guerre mondiale.
L'effet de mettre maintenant un terme au programme ainsi qu'aux autres programmes de transport dans l'Atlantique pose d'énormes difficultés pour notre industrie et nos exploitations agricoles ainsi que les entreprises qui en dépendent. Nous croyons qu'un tel changement à la politique nationale ayant des répercussions aussi importantes et posant autant de risques pour l'industrie agricole d'une province ne s'est jamais vu dans notre histoire, sauf à Terre-Neuve.
Bien des gens sont bel et bien convaincus que des pans entiers de notre industrie sont voués à la disparition, mais, heureusement, nous avons un excellent système d'administration du bétail et tous les intéressés de l'industrie font montre d'une détermination inébranlable dans leur volonté de surmonter cette crise. Dans notre industrie, le bétail est généralement d'une très grande productivité, et tous ceux qui cherchent à s'y tailler une place prennent certainement déjà tous les moyens d'améliorer le rendement. Le même esprit règne dans les entreprises qui en dépendent, comme l'industrie du fourrage, de la transformation ou d'autres.
En plus de s'occuper du bon fonctionnement des fermes dont ils ont la responsabilité, les organisations agricoles et les décideurs dans le domaine de l'élaboration des politiques doivent maintenant assumer de nouvelles responsabilités, et c'est ce dont nous parlons aujourd'hui. Nous croyons qu'il est essentiel d'assurer un traitement juste et équitable à notre industrie par rapport à ses semblables dans les autres régions et provinces. Si nous ne pouvons obtenir un engagement comparable, nous aurons perdu la confiance des familles d'agriculteurs et des autres entreprises agricoles, qui doivent maintenant, dans bien des cas, surmonter un défi angoissant, le grand défi de leur carrière.
Les agriculteurs de l'Ouest se sont dits déçus de l'indemnisation qu'on leur offrait en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest. Pourtant, relativement parlant, on leur a offert presque deux fois plus qu'aux agriculteurs bénéficiant d'aide au transport des céréales fourragères. Les conditions varient grandement dans les diverses régions bénéficiant d'aide au transport des céréales fourragères, et c'est peut-être un peu la raison pour laquelle les agriculteurs en question ont bénéficié d'aussi peu de financement. Par exemple, certaines régions de Colombie-Britannique recevant de l'aide au transport des céréales fourragères réduiront finalement leurs frais et, dans toutes ces régions, la perte de cette aide sera compensée par l'abolition de la LTGO. Ailleurs, on a constaté dernièrement qu'une partie importante des paiements d'aide au transport des céréales fourragères constituait en fait des paiements versés en trop pour le transport de fourrage local. On a fait les corrections qui s'imposaient, et on s'attendait à ce que le programme fasse des économies substantielles.
Par ailleurs, d'autres régions bénéficiant d'aide au transport des céréales fourragères sont parmi les plus touchées, à l'échelle du Canada, par la perte des programmes d'aide au transport du grain. De 15 à 17 p. 100 de la totalité des fonds versés pour l'aide au transport des céréales fourragères sont allés en Nouvelle-Écosse. Pourtant, on prévoit que nos fermes devront assumer le quart des hausses de coûts des graines fourragères engendrées par l'abolition des subventions au transport du grain.
Si l'on considère le faible taux de financement global aux fins d'adaptation du système d'aide au transport des céréales fourragères et la distribution proposée de ce financement, sans tenir compte des hausses de coûts réelles, on en arrive à la conclusion que notre industrie subira un traitement hautement insatisfaisant.
La majorité des provinces bénéficiant d'aide au transport des céréales fourragères cherchent à obtenir le partage de fonds d'adaptation, conformément à la répartition historique de l'aide au transport du fourrage. Ensemble, ces provinces assumeront à peu près la moitié des hausses de coûts, alors qu'elles ont toujours reçu environ les deux tiers des paiements d'aide au transport des céréales fourragères.
La Nouvelle-Écosse espère vraiment obtenir un traitement comparable à celui des provinces assujetties à la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, de même qu'à celui qu'ont obtenu le sud de l'Ontario et l'ouest du Québec lorsque ces régions ont perdu l'aide au transport du fourrage, ainsi que des conditions favorables.
Si ça ne peut se faire autrement, nous allons devoir demander aux décideurs de renoncer à l'option douce qui veut que l'aide à la transition soit accordée en fonction de la distribution historique pour considérer plutôt le coût réel engendré par les changements qui se produisent dans chacune des provinces. Je me rends bien compte que le partage traditionnel exerce une pression considérable, mais le bien-être de notre industrie devrait avoir plus d'importance que le désagrément d'avoir à prendre des décisions difficiles.
Notre évaluation des répercussions relatives des changements sur les coûts n'est pas acceptée par toutes les parties, c'est vrai. Certains ont l'impression que l'augmentation du coût du fourrage ne sera pas partout proportionnelle à l'importance des paiements d'aide au transport des céréales fourragères. On semble avoir beaucoup de doutes, cependant, sur le fait que la distribution des hausses de coût...
[Français]
M. Chrétien: Le témoin pourrait-il parler plus lentement? L'interprète ne le suit pas. Je vais m'en aller, car je ne comprends plus rien.
[Traduction]
M. Robinson: Cette question peut se résoudre de façon objective. Certains effets sur le marché de l'abolition de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest ne se feront sentir que dans huit semaines. Si l'on reporte les prises de décisions jusqu'après l'Action de grâce et qu'on engage des spécialistes neutres, les perspectives seront meilleures, selon nous. Ce ne serait pas dans l'intérêt de notre industrie de précipiter les décisions, pour le moment.
Le vérificateur général a sévèrement critiqué Agriculture Canada, il y a quelques années, au sujet de paiements faits en vertu du Programme spécial canadien pour les grains. Apparemment, on n'avait fait qu'une analyse rapide de la situation et pas tenté grand-chose pour évaluer les besoins ou le résultat. Maintenant, il se pourrait que ce fonds d'adaptation très limité soit réparti sans égards aux circonstances, aux conséquences ou aux ennuis causés, et c'est notre industrie qui, en bout de ligne, en subirait les conséquences.
On met un terme à des programmes de longue date ayant influé des générations d'agriculteurs dans leurs investissements, et ce serait irresponsable, à notre avis, de distribuer les maigres ressources disponibles pour faciliter la transition sans faire d'efforts pour distinguer les secteurs qui en bénéficient de ceux qui ne sont pas touchés ou des autres, qui en souffrent.
Nous avons été déçus de constater qu'on n'avait pas analysé la situation relativement à l'aide au transport des céréales fourragères avant de décider de mettre fin au programme alors que - c'est du moins l'impression qu'on a chez nous - on a procédé à des consultations et des études détaillées dans les régions visées par la Loi sur le transport du grain de l'Ouest.
Le tableau 1 présente les différentes mesures d'adaptation prévues respectivement pour les régions visées par l'aide au transport des céréales fourragères et la LTGO. La fin de l'aide au transport des céréales fourragères signifie que 3,1 p. 100 des subventions au transport du grain sont éléminées. Selon nos calculs, l'argent du fonds d'adaptation alloué aux régions visées par l'aide au transport des céréales fourragères représente environ 1,7 ou 1,8 p. 100 du fonds d'adaptation créé.
M. Fernand Robichaud, secrétaire d'État à l'Agriculture, a mis sur pied un groupe de travail consultatif chargé des questions de transition. Nous espérons très fort que ce groupe de travail sera utile, mais nous n'attendons pas de consensus sur la répartition du financement. Ce serait trop difficile, pour les représentants des provinces qui espèrent obtenir des subventions établies selon le partage historique, de se ranger à notre avis. Il se pourrait qu'ils ne puissent plus jamais rentrer chez eux. Nous aimerions que des rapports techniques produits par une tierce partie ainsi que les vérifications et études de l'évolution du marché du grain qui se feront au cours des deux à six prochains mois, leur assurent une certaine protection.
Nous croyons qu'il faudra faire appel à des spécialistes venant d'institutions comme l'Université de Calgary, l'Université de Lethbridge, l'Université de la Saskatchewan et l'Université de Guelph pour leur confier cette analyse. Nous croyons que l'Office canadien des provendes devrait terminer son étude sur les paiements versés en trop au transport de grain local et que le groupe de travail devrait ajourner jusqu'après l'Action de grâce afin de pouvoir compter sur toute l'information nécessaire lorsqu'ils prendront des décisions.
Par ailleurs, un autre groupe de travail a déjà formulé des recommandations sur la répartition du fonds d'adaptation dans les régions visées par l'aide au transport du fourrage. Le groupe de travail fédéral sur l'Agriculture qui a déposé son rapport en 1969, recommandait l'élimination d'une bonne partie de la réglementation sur la hausse des coûts des graines fourragères et la cessation de l'aide au transport des céréales fourragères.
Pour la Colombie-Britannique, le sud de l'Ontario et l'est du Québec, le groupe de travail signalait que cette aide n'était ni nécessaire ni appropriée. Il reconnaissait toutefois l'état de dépendance et de vulnérabilité de l'agriculture dans les provinces de l'Atlantique et de l'est du Québec. Il recommandait que ces régions reçoivent l'équivalent de sept ans et demi de financement réparti sur 10 ans, en guise de transition.
En 1996, la Colombie-Britannique sera en meilleure position que ne le prévoyait le groupe de travail, grâce à l'élimination des subventions prévues par la LTGO. Après le dépôt du rapport du groupe de travail, la position des producteurs de la région centrale du Canada a continué de s'améliorer, pour ce qui est de la hausse des coûts. Toutefois, quand on a coupé l'aide au transport du fourrage dans ces régions, on s'est engagés à poursuivre ces paiements durant cinq ans, le temps d'assurer la transition.
En Nouvelle-Écosse, la situation n'est pas très différente aujourd'hui de ce qu'elle était quand le comité l'a étudiée, il y a 25 ans. À bien des égards, notre position est maintenant plus fragile, à cause de la réduction des barrières tarifaires applicables aux importations concurrentielles, de la suppression du tarif de l'Est et de l'abolition du Programme de subventions au transport des marchandises dans la région de l'Atlantique.
Si le fonds d'adaptation limité est maintenant réparti sans égards aux circonstances ou aux problèmes causés, c'est un signe que les décideurs établissent actuellement leurs priorités dans l'ordre tout à fait inverse de ce que recommandait le groupe de travail.
Selon la répartition historique, la Colombie-Britannique recevrait une aide à l'adaptation équivalente à 20 ou 25 ans de hausses de coûts telles que les ont assumées les régions périphériques. Le sud de l'Ontario et l'ouest du Québec ont reçu une aide à l'adaptation pendant cinq ans, ce qui était très avantageux à l'époque. Pour leur part, Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick n'obtiendraient que 32 mois de financement pour les aider à s'adapter à une situation délicate et très difficile à affronter.
Jusqu'au début des années quatre-vingt, toutes les modifications dans le taux d'aide au transport des céréales fourragères visaient à équilibrer le prix des graines fourragères dans toutes les régions visées par l'aide au transport des céréales fourragères. Cela signifiait qu'il fallait conserver les mêmes coûts de transport nets dans tous les secteurs visés par cette aide en Colombie-Britannique et dans l'Est. C'est en 1984 qu'on a vraiment dérogé à cette pratique pour la première fois en 40 ans. Nos taux ont alors été rajustés à la baisse par rapport aux régions de Colombie-Britannique.
Depuis ce temps, il n'y a plus de liens entre les niveaux fixés pour équilibrer les coûts en Colombie-Britannique et dans la région de l'Atlantique. Si la politique d'uniformisation avait été maintenue, l'aide au transport des céréales fourragères n'existerait plus aujourd'hui que dans les régions les plus éloignées de la Colombie-Britannique, et les taux dans ce secteur seraient beaucoup plus bas qu'ils ne le sont aujourd'hui.
On a souvent signalé l'existence de ces déséquilibres régionaux, mais personne n'a jamais vraiment expliqué la raison de cette modification de la politique. Pendant quelques années, l'ancien Office canadien des provendes a affirmé qu'il n'y avait jamais eu de politique d'uniformisation des coûts de transport dans toutes les régions et que c'était un hasard si les prix avaient été les mêmes durant 40 ans en Colombie-Britannique et dans notre région. L'office prétendait que ce n'était pas là le but de la politique, ni du programme.
Cependant, la publication, en 1989, du Rapport de l'Office canadien des provendes dont on s'était servi en 1977, lorsqu'on a équilibré les coûts pour la dernière fois, a permis de constater que cette politique avait effectivement fait l'objet d'une modification majeure.
La décision de conserver des coûts plus avantageux en Colombie-Britannique que dans les provinces de l'Atlantique visait peut-être à compenser l'effet de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, qui avait fait augmenter les coûts pour les producteurs de fourrage de Colombie-Britannique. La hausse des coûts engendrée par l'application de cette loi s'est accentuée à la fin des années soixante-dix et dans les années quatre-vingt. Cette affaire est importante, parce que les indemnisations ne suffisent pas si elles sont éliminées en même temps que les mesures néfastes qu'elles visaient à compenser.
Une autre question importante se pose. Pourquoi a-t-on commencé à traiter la Colombie-Britannique très différemment de la région de l'Atlantique à partir des années quatre-vingt? Nous avons l'impression que ces différences dans le traitement réservé aux différentes provinces bénéficiaires de l'aide au transport des céréales fourragères devraient être prises en compte dans la décision que nous prenons maintenant.
En 1989, le gouvernement fédéral mettait fin au très ancien programme d'exportation du grain aux tarifs de l'Est. Auparavant, ce programme permettait de subventionner l'acheminement par train vers les ports de l'Atlantique du grain destiné à l'exportation, même en hiver.
Le président: Je me demande si vous pourriez tirer les grandes lignes de votre exposé. Nous aurons le document dès qu'il aura été traduit, et je pourrai m'y reporter. Ce qui m'inquiète, c'est que nous n'avons plus beaucoup de temps et qu'il nous faut encore en arriver au vif du sujet et en discuter un peu par la suite.
M. Robinson: Je résume très rapidement.
Les derniers points que nous présentons ont trait aux tarifs de l'Est, un autre programme relatif au transport du grain, auquel on a mis fin en 1989.
Il avait été question de créer un programme d'adaptation dans ce contexte, mais cela n'a jamais été fait.
Nous espérons que le budget de transition mis en place à la suite de la disparition du programme d'aide au transport des céréales fourragères permettra de régler certains des programmes qui découlent de la fin des subventions au transport vers l'Est et nous tenons à vous souligner qu'il est très important pour la Nouvelle-Écosse d'obtenir une aide équitable puisque nous faisons également face à la fin de l'autre programme de transport des céréales.
La seule autre chose qui soit nouvelle, c'est que nous serions heureux que des modifications soient apportées à la réglementation de façon à réduire concrètement nos coûts, et nous y comptons certes pour pouvoir considérer que nous avons reçu un traitement équitable.
Pour résumer brièvement, les exploitations agricoles et les commerces affiliés de la Nouvelle-Écosse sont parmi les plus gravement touchés au Canada par la disparition des subventions au transport des céréales fourragères. Notre industrie doit maintenant exercer tous ces efforts pour surmonter cette difficulté. Nous faisons également face à des défis dans le domaine des politiques et nous tentons de faire valoir nos positions à cet égard également.
En réalité, notre objectif consiste à obtenir des mesures de transition comparables à celles offertes dans d'autres régions. Une possibilité serait quelque chose de semblable aux cinq années de grâce accordées dans le sud de l'Ontario et l'ouest du Québec. En fait, c'est tout à fait ce que nous recherchons.
Depuis vingt ans que je suis dans l'industrie, on entend souvent des prévisions pessimistes en ce qui concerne notre industrie. On essaie de nous faire peur justement en disant: «Vous allez perdre le programme d'aide au transport des céréales fourragères, et ensuite on vous donnera cinq années d'aide de transition, et c'est tout». C'était la pire chose qui pouvait arriver nous disions-nous.
Mais au point où nous en sommes, nous faisons des efforts énormes pour tenter de réaliser ce scénario, pour obtenir un programme de transition semblable à ce que l'on trouve dans d'autres régions, semblable aux programmes offerts dans le sud de l'Ontario et l'ouest du Québec à la suite de la disparition de la LTGO, accompagné d'un financement adéquat.
Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur Robinson.
Monsieur Chrétien, voulez-vous commencer?
[Français]
M. Chrétien: D'entrée de jeu, vous avez signalé que les trois quarts des activités agricoles en Nouvelle-Écosse étaient liées directement à l'élevage du bétail. L'aide au transport des fourragères étant chose du passé, ou près de l'être, cela aura une incidence sur l'augmentation du prix de la tonne de moulée. Dans un premier temps, pourriez-vous me dire à combien vous évaluez l'augmentation du prix de la tonne reliée directement à la perte de l'aide au transport des fourragères?
[Traduction]
M. Robinson: La subvention moyenne au transport des céréales fourragères, en Nouvelle-Écosse, ces dernières années, était environ 16$ la tonne. Le secteur de production qui sera le plus dûrement touché - tous en conviendront je pense - c'est le secteur du porc. Le paiement moyen pour les porcs était d'environ 5$. Cela signifie que ces producteurs vont perdre 5$ du porc de leur marge brute d'exploitation.
[Français]
M. Chrétien: À 16$ la tonne, quel montant total est-ce que cela peut représenter pour toute la Nouvelle-Écosse?
[Traduction]
M. Robinson: Pour l'année financière 1994-1995, on a versé 3,2 millions de dollars, mais les quantités étaient un peu supérieures à la moyenne, qui est normalement d'environ 3 millions de dollars.
[Français]
M. Chrétien: On a un montant qui est prévu pour assurer une transition sans douleur sur cinq ans. Vous avez eu la visite de M. Fernand Robichaud et vous êtes sur le point de former un groupe qui pourrait soumettre des solutions au gouvernement. Si c'était vous qui présidiez le comité qui doit soumettre des suggestions de transition à Fernand Robichaud et à son gouvernement, pourriez-vous faire trois suggestions utiles?
[Traduction]
M. Evans: Tout d'abord, nous voulons être traités de façon juste et équitable en ce qui concerne le nombre d'années d'indemnisation à la suite de la disparition de la LTGO. Nous aimerions un paiement direct la première année et non pas des paiements échelonnés sur dix ans, ce qui serait, nous dit-on, l'intention du gouvernement.
Nos études révèlent qu'un versement direct au départ représente, une fois capitalisé, l'équivalent de 37 p. 100 de plus. Cela ne coûte pas plus cher au gouvernement, mais si le producteur dispose de ce financement au départ, cela représente 37 p. 100 de plus.
Nous aimerions également que l'on reconnaisse qu'il en coûtera plus cher aux producteurs dans certaines régions une fois le programme d'aide au transport des céréales fourragères éliminé, par rapport à d'autres régions du Canada, et non pas simplement pour des raisons historiques.
Le président: Voulez-vous répéter cette troisième suggestion, monsieur Evans.
M. Evans: Le troisième point, c'est ce que nous appelons notre position de plus grande difficulté. Nous prétendons que notre province, que le Nouveau-Brunswick et Terre-Neuve, seront beaucoup plus touchés parce que nous devons payer beaucoup plus cher pour la livraison de céréales fourragères que les autres régions du Canada après la disparition du programme d'aide au transport des céréales fourragères.
[Français]
M. Chrétien: Combien avez-vous de producteurs agricoles actifs?
[Traduction]
M. Evans: En Nouvelle-Écosse?
M. Chrétien: Oui.
M. Evans: Pour tous les produits ou simplement le bétail?
[Français]
M. Chrétien: Pour tous les produits. Les trois quarts de vos activités sont reliées à l'élevage. Donc, j'imagine que vous en avez dans l'industrie laitière.
[Traduction]
M. Evans: Compte tenu de votre définition d'agriculteur et de la valeur des ventes directes, il y aurait environ 3 000 exploitations agricoles.
Mme Cowling: J'aimerais poursuivre dans la même veine que Jean-Guy Chrétien et parler des 3 000 agriculteurs. Avez-vous une idée du montant des subventions que ces exploitations agricoles touchent du gouvernement fédéral? Si vous dites 3 000 exploitations en moyenne...
M. Evans: De tout genre ou simplement aux termes du Programme d'aide au transport des céréales fourragères?
Mme Cowling: En moyenne pour voir combien il en coûte pour maintenir ces 3 000 exploitations agricoles en Nouvelle-Écosse.
M. Robinson: Nous avons préparé un document dans lequel nous examinons les chiffres et une option, et c'est le versement au titre du capital. Il s'agit de déterminer quels secteurs d'activité utilisent des céréales et à combien s'élève la subvention pour chaque producteur moyen. J'en ai ici copie et je serai heureux de vous la laisser.
Bien qu'il y ait 3 000 exploitations agricoles, il y a des milliers d'exploitations d'élevage spécialisé qui sont en fait visées. Il y a 500 fermes laitières; en plus de tout le reste, c'est déconcertant pour ces producteurs car ils travaillent avec des ruminants.
C'est le porc qui est le plus durement touché. Ensuite nous avons une importante industrie dynamique de la volaille où l'on commence justement à s'inquiéter des changements. Ces producteurs veulent de bien meilleures conditions pour les céréales fourragères. La situation s'est encore dégradée. L'industrie du porc est la plus touchée à court terme. Toutefois, à plus long terme, la situation de nos coûts constitue un défi qui nous pousse à nous réoutiller, à renforcer la position concurentielle du secteur de la volaille, ce que nous parviendrons à faire, je l'espère.
Mme Cowling: Quelles sont les possibilités en Nouvelle-Écosse à l'heure actuelle pour les jeunes agriculteurs qui voudraient se lancer dans l'agriculture?
M. Charles Keddy (président, Fédération de l'agriculture de la Nouvelle-Écosse): À cause des importantes mises de fonds nécessaires à l'achat d'installations et de quotas, je pense qu'il est presque impossible pour un jeune agriculteur de se lancer dans l'élevage du bétail en Nouvelle-Écosse, vu aussi le coût des céréales fourragères nécessaires à l'alimentation de ce bétail.
M. Hoeppner: Merci d'être venus, messieurs. Je suis toujours très heureux de parler aux agriculteurs ou à ceux qui les représentent.
Je suis un peu confus. Cela ne fait pas très longtemps que je fais partie du Sous-comité sur le transport des grains. Nous avons parlé du programme d'aide au transport des céréales fourragères et du programme de subventions au transport des marchandises dans la région de l'Atlantique; s'agit-il de deux choses différentes?
M. Robinson: Oui, tout à fait.
M. Hoeppner: Vous prétendez que l'Ontario et le Québec ont été mieux traités que vous. De quelle façon?
M. Robinson: Lorsqu'on a mis fin au programme d'aide au transport des céréales fourragères dans le sud de l'Ontario et l'ouest du Québec, la situation des approvisionnements s'est trouvée modifiée à cause du maïs. Ces régions étaient devenues exportatrices de céréales et par conséquent, le programme de subventions du transport des céréales de l'Ouest vers leurs régions n'était plus dans leur intérêt; les producteurs de ces régions voulaient voir disparaître le programme. Lorsqu'on a mis fin au programme dans l'ouest du Québec et le sud de l'Ontario, on a accordé pour la transition cinq années de subventions équivalentes aux producteurs.
Mais pourquoi la transition? En fait leurs coûts étaient inférieurs aux nôtres et à ceux des autres régions admissibles aux subventions de transport des céréales fourragères avec lesquelles on avait équilibré leurs coûts précédemment. À cause de l'évolution du marché, leurs coûts avaient diminué mais on a quand même accordé aux producteurs cinq années de financement même si le groupe de travail du gouvernement fédéral avait recommandé de mettre fin au programme et de ne pas offrir d'aide de transition.
M. Hoeppner: Dans ce cas, pourquoi, bonté divine, a-t-on accordé cette aide? Voilà ce que je veux savoir.
M. Robinson: C'était certainement il y a longtemps et vous pourriez bien demander pourquoi je ramène cette histoire de la fin des années soixante-dix, début des années quatre-vingt. Si j'en parle, c'est notamment parce que depuis de nombreuses années, ce scénario pessimiste a toujours été à l'arrière-plan de notre industrie, c'est-à-dire qu'un jour nous pourrions perdre ce programme. Nous comptions beaucoup sur ce programme, nous étions très vulnérables. On nous offre peut-être cinq années de transition, mais ensuite ce sera fini, fini un point c'est tout. Ce sera fini et pourtant, nous n'obtenons en fait que 32 mois d'aide de transition.
M. Hoeppner: Je pensais qu'on avait prévu une aide de 10 ans, 60 millions de dollars.
M. Robinson: On a l'intention de répartir cet argent sur 10 ans, mais il n'y a pas d'argent pour 10 ans.
M. Hoeppner: Est-ce que ça ne porte pas un peu à confusion? Si l'on fait une comparaison avec la LTGO, le témoin précédent a déclaré qu'il s'agissait de 1,6 milliard de dollars, sur sept ans, mais que si nous voulions recommencer à zéro, il faudrait environ 7 milliards de dollars et donc c'est une grande réduction. Nous ne toucherons pas les mêmes sommes.
M. Robinson: Le programme, tel qu'annoncé, se chiffrait à 62 millions de dollars. Le financement consacré au programme du 1er avril à la fin du mois de décembre sera déduit de ce montant et donc il restera environ 48 millions de dollars à verser en 1996. Nous sommes donc à 48 millions de dollars que l'on versera aux agriculteurs au cours des quelques années à venir.
M. Hoeppner: Je commence à voir où vous voulez en venir. Je partage votre avis sur une chose - j'ai déjà soulevé cette question devant le comité - c'est qu'il est très injuste que le propriétaire terrien puisse ajouter cette somme à ces immobilisations alors que le producteur devra payer des impôts. Les producteurs de l'Ouest du Canada se verront imposer pour les sommes touchées à la place du propriétaire terrien. Cela revient à dire que le producteur ne devrait pas verser d'impôt; c'est ce que je prétends depuis le début. Je reconnais que ce serait juste, puisque si nous acculons le producteur primaire à la faillite, nous allons tous y perdre.
Le président: Afin de mettre fin à toute confusion, en ce qui concerne les programmes d'aide au transport des céréales fourragères, il y a trois programmes différents. Il y a la LTGO, dont vous connaissez bien les mesures d'adaptation et les versements. Il y a la Loi sur les subventions au transport des marchandises dans la région de l'Atlantique et la Loi sur le transport des céréales fourragères dans la région des Maritimes qui représentent 326 millions de dollars de transition que les provinces recevront, à être utilisés à leur discrétion. Le programme d'aide au transport des céréales fourragères constitue simplement un autre programme de transition qui fera l'objet de discussions par le Comité Arseneault.
M. Hoeppner: Donc ce n'est pas à nous de le faire?
Le président: Non, pas de cette façon-là. Nous comptons beaucoup sur le Comité Robichaud, mais pour l'instant, il n'est pas prévu que les subventions soient versées ni aux propriétaires terriens ni aux producteurs. Cela se fera différemment.
M. Hoeppner: Ai-je bien compris que l'on ne cultive pas beaucoup de céréales ou fait-on encore de la production céréalière dans votre région?
Le président: Il n'y a pas beaucoup de production en Nouvelle-Écosse, mais il y en a à l'Île-du-Prince-Edouard.
M. Hoeppner: Il y a donc une différence même à cet égard.
M. Evans: Prenons le cas des provinces de l'Atlantique. La production de céréales est nulle à Terre-Neuve, de moins de 10 p. 100 en Nouvelle-Écosse, de 20 à 30 p. 100 au Nouveau-Brunswick et de 50 à 60 p. 100 à l'Île-du-Prince-Édouard.
Le président: Oui, elle se rapproche de 70 p. 100.
M. Hoeppner: Il va sans dire qu'un problème se pose.
Le président: De quel ordre? Voici la question à laquelle j'aimerais que vous réfléchissiez. Cette décision risque-t-elle d'entraîner l'abandon de l'élevage dans votre province?
Je suis complètement abasourdi. J'ai déjà soulevé la question auprès du ministère de l'Agriculture. J'ai du mal à croire qu'on prendrait une décision aussi lourde de conséquences sans d'abord avoir fait une étude d'impact. Je crois d'ailleurs que ce serait tout à fait irresponsable de la part du ministère.
De quel ordre est le problème? Si l'on compare la Nouvelle-Écosse à votre province natale du Manitoba, je crois que le coût dans le cas des provendes s'accentuera...S'il était autrefois d'environ 50$ la tonne, il sera désormais de 16$ plus 22$ ou 38$, soit au total près de 90$. Il en coûtera donc 90$ de plus la tonne à un producteur de porcs de la Nouvelle-Écosse. Du jour au lendemain, le coût a augmenté de 38 à 40$. C'est assez marqué.
Vous avez la parole, monsieur Evans.
M. Evans: Tout ce que je veux dire, monsieur le président, c'est que je me suis entretenu hier avec des représentants de l'Office de commercialisation du porc de la Nouvelle-Écosse, lesquels m'ont dit que si des mesures immédiates n'étaient pas prises pour leur permettre de survivre, la moitié au moins de leur industrie disparaîtra d'ici trois ans.
Les exploitant de l'abattoir de porcs de la Nouvelle-Écosse soutiennent qu'ils devront fermer leurs portes s'ils perdent plus de 500 porcs parce qu'ils en ont déjà perdu 50 000 au cours des dernières années. À l'heure actuelle, ils rentrent tout juste dans leurs frais. Non seulement l'industrie de l'élevage sera touchée, mais l'abattoir fermerait aussi ses portes. Il faudrait alors transporter les porcs à Hub, ce qui ajouterait 5 à 7$ au coût du porc. Dans cinq ans, l'industrie serait disparue.
Le président: Pour la gouverne des personnes ici présentes, Hub se trouve à Moncton au Nouveau-Brunswick.
M. Hoeppner: Faut-il comprendre qu'une augmentation de 5 à 7$ dans le prix du porc réglerait le problème du transport de céréales fourragères...
M. Evans: Au cours des dernières années, c'est ce qui a permis aux agricuteurs de survivre. La marge bénéficiaire n'était pas assez élevée l'an dernier. Elle a été de 5$ au cours des dernières années.
Le président: Monsieur Murphy.
M. Murphy (Annapolis Valley - Hants): J'aimerais avoir une précision au sujet de la situation dans l'Ouest et sur le fait qu'on voudrait ramener le délais de dix ans à peut-être deux ans. À quelles fins les producteurs pensent-ils affecter ce que vous appelez le capital de départ? À quoi songent-ils?
M. Evans: Jusqu'ici, nous avons surtout cherché à obtenir notre juste part du gâteau, mais nous avons effectivement réfléchi un peu à la question. Nous avons songé à des moyens de faire en sorte que les producteurs affectent cet argent à des fins qui permettraient à l'industrie de survivre, comme l'achat de nouvelles technologies et la réduction de la dette.
Dans certaines régions périphériques, certains agriculteurs se serviront peut-être de cet arget pour cesser leurs activités. Si on ne peut survivre, pourquoi se laisser mourir à petit feu? Il vaut sans doute mieux soit se diriger dans un autre secteur agricole, soit abandonner tout simplement l'agriculture. Un petit nombre d'agriculteurs opteraient sans doute pour cette solution.
Les grands exploitants, ceux qui sont dynamiques, cherchent cependant des solutions de rechange. Un comité d'Agriculture Canada étudie actuellement les changements réglementaires qui pourraient être utiles. Par le passé, plus d'un million de tonnes de céréales par année ont été transportées dans le cadre du programme d'aide au transport des céréales fourragères. C'est beaucoup de céréales, dont 70 p. 100 environ provenait de l'Ouest du Canada.
Le président: Je n'ai pas tout saisi, mais j'ai cru vous entendre dire que vous souhaiteriez certains changements réglementaires. Pourriez-vous nous donner des explications? À quoi songez-vous exactement?
M. Robinson: Nous avons abordé la question des changements réglementaires dans la dernière partie de notre mémoire. Nous avons fait ressortir le fait que nous allions réclamer auprès de tous les intervenants éventuels un traitement comparable. C'est l'objectif que nous nous fixons. D'autres régions se voient accorder de l'aide, et compte tenu de la situation difficile à laquelle nous faisons face, nous voulons la même chose.
Nous serions évidemment très heureux que le gouvernement adopte des changements réglementaires qui permettraient de réduire les coûts et qui s'accompagneraient d'avantages concrets. Ces changements s'ajouteraient aux mesures de transition destinées à notre industrie. Nous réserverions un bon accueil à ce genre de changement.
Vous trouverez en annexe à notre mémoire un document que nous avons remis en mars au Comité des transports de la Chambre des communes. Nous y proposons des changements utiles à la Loi sur le cabotage. Ce sont les seuls changements dont il est question dans notre mémoire.
Dans l'Atlantique, certains croient que le problème des coûts peut être réglé de cette façon. J'espère qu'ils ont raison. Il ne faudrait pas que la réglementation augmente nos coûts. Beaucoup d'efforts sont consentis à l'heure actuelle pour voir ce qui peut être fait à cet égard. Nous serions reconnaissants de toute mesure prise en vue de réduire nos coûts.
Le président: Pour être sûr de bien vous avoir compris, proposez-vous qu'on modifie la Loi sur la marine marchande du Canada, laquelle prévoit à l'heure actuelle que les céréales soient transportées sur des navires canadiens ou soient transbordées sur ceux-ci, de manière à ce que leur transport puisse être assuré par des navires étrangers?
M. Robinson: Dans notre mémoire au Comité des transports de la Chambre des communes, nous exposions une position que nous avions arrêtée tout de suite après Noël lorsque le Programme d'aide au transport des céréales fourragères existait toujours. Nous ne réclamions pas des changements très radicaux. Nous proposions d'accélérer le processus d'octroi d'une dispense lorsque seuls des navires étrangers sont disponibles. Le processus actuel est trop long.
C'est comme si une réglementation s'appliquait au trajet de retour dans l'industrie du camionnage. Il n'y aurait jamais de trajet de retour s'il fallait mettre 15 jours avant d'obtenir l'approbation nécessaire. Or, c'est le problème qui se pose en ce qui touche la Loi sur la marine marchande au Canada. En principe, le transport peut être assuré par des navires étrangers s'il n'y a pas de navires canadiens disponibles. Le processus est cependant tellement lent qu'il arrive qu'on ne peut pas saisir les occasions qui se présentent. Nous avons donc demandé qu'il soit accéléré.
Nous avons aussi proposé des changements qui devraient, à notre avis, améliorer la situation financière de l'élévateur à céréales de Halifax, un élément clé de l'infrastructure que nous voulons conserver. Nous voudrions d'abord avoir rapidement accès aux navires étrangers lorsqu'aucun navire canadien n'est disponible. La deuxième partie de notre proposition porte sur les tarifs. S'il se trouvait un printemps que les tarifs demandés par les navires canadiens soient tels qu'il n'y a pas de trafic, nous permettrait-on d'affréter un navire étranger pour la saison?
La réglementation le permet peut-être, mais nous n'en sommes pas sûrs.
Le président: Le processus est trop long. Ce document est joint à votre mémoire précédent?
M. Robinson: Oui.
Le président: Quel est le prix actuellement demandé pour l'orge de provende en Nouvelle-Écosse?
M. Evans: L'élévateur de Halifax demandait 187$ la semaine dernière.
Le président: Savez-vous quel est le coût dans ma région? C'est 202$.
Quel est-il au Manitoba?
M. Hoeppner: Deux dollars trente-neuf le boisseau.
Le président: Pourquoi nous parlez-vous de boisseaux? Nous avons adopté la tonne métrique.
M. Hoeppner: Calculez pour vous même. C'est le quota qu'on a cité. Marlene a probablement le chiffre que vous voulez.
Mme Cowling: Comme je n'ai pas fait ce calcul depuis des années, je ne peux pas vous dire ce qu'il en est.
M. Evans: Monsieur le président, j'étais à Victoria il y a deux semaines, et un producteur de provende de la Colombie-Britannique me disait que l'orge se vendait 130$ en Alberta. Le marché est donc...
Le président: Combien de boisseaux dans une tonne, Jake?
M. Hoeppner: Quarante-huit.
Le président: Quel chiffre nous avez-vous donné au juste?
M. Hoeppner: C'est 2,39$. C'est le prix qu'on m'a cité. C'est le prix demandé à l'élévateur.
Le président: Le prix varie donc beaucoup.
Mme Cowling: Voilà pourquoi nous ne cultivons pas d'orge au Manitoba. Ce n'est pas rentable.
Le président: Avez-vous quelques brèves dernières observations à faire?
Le comité a estimé qu'il ne devait pas étudier en profondeur la question de l'aide au transport des céréales fourragères parce qu'un comité relevant du secrétaire d'État, monsieur Robichaud, le fait en ce moment. Nous espérons qu'il comparaîtra devant le comité. Certaines personnes ont cependant abordé la questions avec nous. Nous sommes heureux que vous nous ayez fait part de votre point de vue sur le sujet. Nous sommes conscients de son importance, notamment pour la Nouvelle-Écosse, mais encore plus pour l'Île-du-Prince-Édouard où la production de céréales fourragères est élevée.
Je vous remercie d'être venus témoigner devant le comité.
La séance est levée.