[Enregistrement électronique]
Le lundi 16 octobre 1995
[Traduction]
Le coprésident (le sénateur Oliver): La séance est ouverte. Il s'agit d'une réunion du comité mixte spécial sur un code d'éthique, le lundi 16 octobre dans la soirée.
Je souhaite chaleureusement la bienvenue à notre invité spécial de ce soir: M. Duff Conacher, du groupe Démocratie en surveillance.
Monsieur Conacher, j'ai lu dans les notes d'information que le groupe Démocratie en surveillance a été créé en 1993 et compte quelque 250 membres au Canada.
Ce qui nous intéresse tout particulièrement, toutefois, c'est que votre organisme fait campagne sur trois fronts, la responsabilité des banques, le lobbying et l'éthique gouvernementale. Certaines de vos études sont donc tout à fait en rapport avec l'objet de la nôtre.
Je crois savoir que vous avez certaines remarques liminaires après quoi vous serez prêt à répondre à nos questions.
Oui, sénateur Gauthier?
Le sénateur Gauthier (Ontario): Avant de donner la parole aux témoins, monsieur le président, je tiens à vous donner avis de mon intention de soulever une question lors de la prochaine réunion de notre comité au sujet du nom de ce dernier.
Le 23 septembre dernier, j'ai demandé si l'expression «code d'éthique» était bien celle qui convenait au nom de notre comité, surtout en français. En effet, un code d'éthique est tout à fait différent de Code of Conduct en anglais. J'ai soulevé la question et fait valoir mes arguments. Je pense m'être fait comprendre. Je n'en sais rien mais j'aimerais savoir maintenant ce qu'il en est.
À mon avis, il vaudrait beaucoup mieux parler de code de déontologie, car en anglais, l'expression Code of Conduct est un euphémisme tout à fait à la mode. Par le ton de bonne ou mauvaise conduite? Qu'en est-il exactement? De quelle conduite s'agit-il vraiment?
C'est pourquoi j'aimerais qu'on en discute lors de notre prochaine réunion. Je ne veux pas empiéter sur le temps consacré à notre témoin ce soir, mais à la prochaine réunion, nous pourrions peut-être nous pencher sur cette question et rectifier le tir.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Je sais, sénateur, que certains greffiers ont fait des recherches sur la question que vous avez soulevée. Nous pourrions peut-être distribuer à tous les documents de recherche sur le sens de cette expression en français et en anglais. Cela facilitera la discussion, que nous pourrons avoir lors de notre prochaine réunion. Je suis tout à fait d'accord avec votre suggestion.
Le sénateur Gauthier: Merci beaucoup, monsieur le président.
M. McWhinney (Vancouver Quadra): J'ai un autre rappel au Règlement. L'argument soulevé par l'honorable sénateur est pertinent, mais il touche toutes les audiences de notre comité. Je suppose que l'expression Code of conduct en anglais visait à préserver la convention du Wickham College, selon laquelle «les manières font l'homme». Cela se rapporte à la conduite objective vérifiable et non à une conception morale intérieure du bien et du mal, et si l'on commence à éplucher le sens de l'expression en français ainsi que de l'expression en anglais, nous risquons de nous aventurer sur deux voies qui ne se croiseront peut-être jamais, si ce n'est de façon extrêmement complexe.
C'est pourquoi j'estime que l'argument est bien senti et qu'il mérite sans doute une décision immédiate, au lieu de remettre cette discussion à une date ultérieure indéfinie.
Le coprésident (M. Milliken): Il n'y a rien d'indéfini.
M. McWhinney: Au sein du comité, ou au Parlement, tout est...
Le coprésident (le sénateur Oliver): Monsieur Conacher, sans plus attendre, nous vous donnons la parole.
M. McWhinney: Vous n'allez pas trancher cette question?
Le coprésident (le sénateur Oliver): Nous y reviendrons lors de notre prochaine séance.
M. McWhinney: Ce sera peut-être trop tard.
M. Duff Conacher (coordinateur, Démocratie en surveillance): Merci beaucoup, monsieur le président. J'espère que le comité pourra résoudre ce litige ainsi que de nombreux autres, de sorte que cette septième tentative faite au cours des dix dernières années en vue d'adopter un code d'éthique visant les parlementaires ne se solde pas comme les autres par un échec.
Je suis sûr que le comité mixte sait que, au moment où se déroulent ces délibérations, les Canadiens manifestent plus que jamais leur méfiance à l'égard des institutions et des élus politiques.
Nous avons fait parvenir à la greffière un mémoire intitulé Rétablir l'intégrité au gouvernement, et cette dernière m'a donné l'assurance que vous en recevrez tous une copie dès qu'il aura été traduit.
Comme nous le disons dans la première partie du mémoire, vous avez là une nouvelle possibilité de vous pencher sur un vieux sujet, mais dans le contexte actuel, le comité devrait savoir que les résultats des sondages récents ont révélé un énorme manque de confiance de la part des Canadiens envers le gouvernement et les politiques.
Un sondage très poussé, en deux étapes, parrainé par le gouvernement et effectué auprès de 2 400 Canadiens par la firme Ekos Research Associates Inc., en février et novembre 1994, a révélé que 83 p. 100 des Canadiens estiment que les politiques et les dirigeants d'entreprises se sont occupés d'eux et de leurs bons amis tandis que les Canadiens moyens mangeaient de la vache enragée. Soixante-treize pour cent des déclarants estiment que les gouvernements ont perdu de vue les besoins des Canadiens moyens. Soixante-neuf p. 100 d'entre eux sont d'avis que les normes morales du gouvernement fédéral se sont beaucoup détériorées depuis les 10 ans et 44 p. 100 des Canadiens ont perdu entièrement confiance dans le système de gouvernement actuel.
Ce sentiment se reflète également dans le sondage réalisé auprès de 2 400 Canadiens qui montre que 33 p. 100 seulement des Canadiens seraient fiers que leur enfant devienne plus tard homme ou femme politique.
Comme l'a fait remarquer le président de la maison de sondage qui a mené l'enquête, si le premier ministre s'imagine que les gens se disent maintenant «Bon, voilà, nous faisons de nouveau confiance au gouvernement. On peut continuer», il a tout à fait tort. L'amertume et l'hostilité que les gens ressentent à l'égard du gouvernement ne s'est pas vraiment atténué. D'après ce que je vois, il n'y a pas de différence marquée dans le niveau de confiance.
Par ailleurs, il s'est produit bien des choses au cours de l'année dernière qui montrent que les règles régissant les conflits d'intérêts ne sont pas assez complètes ou pas assez claires. Dans ce contexte et fort du mandat qui lui a été confié, le comité mixte spécial a l'occasion de jeter un regard neuf sur ce problème qui ne date pas d'hier, et il pourra peut-être bien y trouver une solution acceptable à l'échelle fédérale.
Le comité mixte spécial a également certaines promesses. Il doit donner suite. Le gouvernement avait effectivement déclaré, dans son Livre rouge exposant son programme électoral, intitulé «Pour la création d'emplois pour la relance économique», que pour que le gouvernement joue le rôle constructif qui est le sien, il faut restaurer l'intégrité de nos institutions politiques.
Le gouvernement s'était notamment engagé à adopter un code d'éthique pour les titulaires de charges publiques. Malheureusement, le comité doit maintenant rédiger ce code à partir du code existant, qui a été remanié en juin 1994. Le comité a donc un défi de taille à relever, car il doit travailler à partir du code existant au lieu de rédiger un nouveau code à l'intention de tous les parlementaires.
Le comité mixte spécial de 1992 avait recommandé que toutes les règles adoptées prennent la forme de modifications à la Loi sur le Parlement du Canada. Étant donné qu'il était membre de ce comité, je sais que le sénateur Oliver connaît bien les recommandations du comité.
Démocratie en surveillance, nous considérons que ce serait là la meilleure façon de s'y prendre, et nous entérinons de manière générale le rapport du comité mixte spécial de 1992 et invitons votre comité à suivre grosso modo ses recommandations.
Nous croyons toutefois que certaines améliorations pourraient être apportées aux recommandations contenues dans ce rapport, et c'est ce dont je vous entretiendrai dans ce qui reste de mon exposé préliminaire.
Je reviendrai aux promesses faites par le gouvernement libéral relativement à la nomination d'un conseiller en éthique qui serait indépendant et qui aurait d'importants pouvoirs d'enquête. Il s'agit-là d'un élément essentiel que j'examinerai tout à l'heure de façon plus détaillée, mais le gouvernement a pris des engagements très importants que nous énumérons aux pages 5 et 6 de notre mémoire. Le comité devrait certainement avoir ces engagements à l'esprit dans ses délibérations.
Il y a au moins cinq raisons, que nous énumérons d'ailleurs dans notre mémoire, qui incite à rédiger un code d'éthique efficace et à mettre en place un système d'application efficace.
À cet égard, la nécessité d'amener la public à avoir de nouveau confiance dans les institutions gouvernementales est une considération primordiale.
Comment y arriver et pourquoi? D'abord et avant tout, pour éviter autant que possible le moindre conflit d'intérêts dans la prise de décisions au gouvernement.
Encore là, en raison du code qui existe déjà et de la nature de notre régime parlementaire, le comité devra déterminer en priorité en quoi consiste la prise de décisions au gouvernement. Nous sommes d'avis qu'il ne suffit pas de dire que, comme les ministres et les secrétaires d'État sont les seuls à pouvoir proposer des mesures législatives et des programmes au Parlement et que le gouvernement peut rejeter les propositions faites par n'importe quelle autre parlementaire, il n'est donc pas nécessaire que les autres détenteurs de charges publiques soient soumis aux règles régissant les conflits d'intérêts.
Il existe d'ailleurs des règles qui s'appliquent déjà au personnel ministériel et aux fonctionnaires, qui dans certains cas ne participent pas de façon aussi directe que les parlementaires à la prise de décisions au gouvernement.
De nouvelles règles ont également été proposées en février 1994 imposant aux comités parlementaires de nouvelles procédures à suivre pour la rédaction et la modification de mesures législatives. Les comités sénatoriaux sont eux aussi, comme on a pu le constater, en mesure d'influencer les mesures législatives en les examinant et en en retardant l'adoption, comme dans le cas du projet de loi sur les limites des circonscriptions électorales.
Votre comité lui-même témoigne du pouvoir des députés et des sénateurs d'influencer la prise de décisions.
Étant donné les multiples façons d'influencer la prise de décisions au gouvernement, si l'on tentait de faire une distinction quelconque entre les détenteurs de charges publiques qui, de par la Constitution, participent effectivement à la prise de décisions et ceux qui n'ont pas ce pouvoir, on se retrouverait avec une panoplie de règles régissant les conflits d'intérêts qu'il ne serait guère facile de comprendre ou d'appliquer. Il serait bien préférable d'adopter un seul ensemble de règles claires, auxquelles on pourrait prévoir des variations, uniquement dans des circonstances bien particulières. Ainsi, tous les parlementaires seraient soumis aux mêmes règles concernant la communication de leurs intérêts; ceux qui participeraient de façon plus directe à la prise de décisions seraient toutefois assujettis à une plus grande rigueur éthique du simple fait que les règles s'appliqueraient à eux dans un plus grand nombre de cas.
Par conséquent, nous entérinons la recommandation contenue dans le rapport du comité mixte spécial de 1992, selon laquelle les règles régissant les conflits d'intérêts pour l'ensemble des parlementaires ne devraient pas prévoir de variations importantes, surtout pas en ce qui a trait à la communication de leurs intérêts.
Nous entérinons également les recommandations de ce rapport concernant l'opportunité de modifier la Loi sur le Parlement du Canada et le Code criminel pour veiller à ce que les détenteurs de charges publiques et les ministres soient visés par les dispositions du Code criminel à cet égard.
Dans certains domaines en particulier, il pourrait toutefois y avoir des différences entre les divers parlementaires, et nous ne souscrivons pas aux recommandations du comité mixte spécial de 1992 à cet égard.
Prenons tout d'abord les règles concernant le népotisme. Nous sommes d'avis que, comme c'est le cas dans toutes les provinces et tous les territoires à l'exception de l'Île-du-Prince-Édouard, les parlementaires devraient être tenus de communiquer la liste des intérêts ainsi que des actifs et des obligations de leur conjoint et de leurs personnes à charge.
Nous considérons également qu'il faut aller plus loin que la recommandation visant à interdire aux parlementaires de promouvoir les intérêts privés des membres de leur famille immédiate et interdire aux parlementaires de promouvoir les intérêts privés des membres de leur famille élargie.
Pour ce que est des règles concernant les intérêts financiers, le comité mixte spécial de 1992 avait établi dans son rapport un seuil de 10 000$ pour la communication des intérêts financiers, des actifs, des obligations et des sources de revenu. Si la valeur des intérêts en question ne dépassait pas 10 000$, le parlementaire n'aurait pas à le divulguer. Nous considérons que ce seuil est trop élevé. Comme c'est le cas en Colombie-Britannique, au Québec et au Yukon, tous les parlementaires devraient être tenus de communiquer la liste de tous leurs intérêts financiers. Nous ne voyons pas pourquoi nous aurions une norme moins élevée au gouvernement fédéral.
Même si le comité mixte spécial de 1992 a entendu bien des témoins débattre le pour et le contre de la divulgation intégrale par rapport à la mise en fiducie sans droit de regard, nous sommes d'avis que c'est le dessaisissement intégral qui devrait être privilégié, notamment pour les ministres, les secrétaires d'État, les secrétaires parlementaires et les autres qui détiennent un pouvoir de décisions important. L'intérêt public l'exige à notre avis.
En ce qui a trait aux règles concernant les activités extérieures, nous appuyons le comité mixte spécial de 1992, qui a précisé avec raison que le droit de participer à des activités extérieures devrait être soumis à l'obligation d'éviter les conflits d'intérêts. Nous considérons, par conséquent, que les parlementaires ne devraient pouvoir occuper un emploi, exercer une profession, se livrer à des activités commerciales, etc., que dans la mesure où cela ne les empêche pas de s'acquitter de leurs obligations relatives aux conflits d'intérêts.
Nous estimons par ailleurs qu'il devrait être interdit aux parlementaires d'être partie à un marché de services du gouvernement, comme c'est le cas dans plusieurs provinces. Nous croyons en outre qu'il devrait être interdit à tous les parlementaires de négocier un marché de services publics ou de participer à la négociation d'un marché de services publics. Cela permettrait d'éviter les situations comme celles dont nous avons été témoins au printemps dernier, en 1994, quand le sénateur Mario Beaulieu a soumissionné avec son entreprise pour un marché de services publics et qu'il a démissionné du Sénat seulement après que son entreprise a obtenu le marché de services. Ce qu'il faut, c'est une interdiction claire à cet égard, car la divulgation des intérêts, si complète soit-elle, ne pourra donner au public l'assurance que le parlementaire concerné n'a pas exercé une influence indue sur l'appel d'offres.
Nous estimons que seuls les marchés conclus avant que le parlementaire n'accède à ses fonctions de parlementaire ou les marchés conclus dans une situation d'urgence devraient faire exception à la règle. Nous estimons, par contre, que l'interdiction devrait s'appliquer à la prolongation d'un marché existant et au marché de services faisant l'objet d'un appel d'offres.
Passons maintenant aux règles relatives aux «cadeaux, marques d'hospitalité et autres avantages». Nous sommes d'avis que la définition actuelle est trop vague. La valeur minimale des avantages qui doivent être divulgués est trop élevée. Au lieu que les bénéficiaires soient simplement tenus d'en faire la divulgation, il faudrait plutôt imposer des restrictions aux cadeaux qui peuvent être acceptés. Aussi nous invitons le comité à adopter une règle qui élargirait la définition de «cadeaux», notamment pour y inclure les frais de transport et de déplacement, et nous préconisons qu'il soit interdit aux parlementaires d'accepter un ou plusieurs cadeaux dont la valeur cumulative pour l'année civile dépasserait 50$.
Les parlementaires ne devraient jamais être autorisés à accepter quelque cadeau que ce soit, selon nous, si ce n'est lorsque le protocole l'exige. Sinon, il devrait leur être clairement interdit d'accepter quelque cadeau que ce soit.
Nous invitons également le comité à examiner attentivement les conséquences des dons en espèces ou en nature qui sont faits aux parlementaires et aux partis politiques pendant les campagnes électorales et entre les élections. Il ne devrait pas être permis de se servir de dons comme moyen d'influencer la prise de décision en violation de l'objet des restrictions qui s'appliquent à l'acceptation de cadeaux, qui consistent à empêcher que l'argent puisse influencer la prise de décision au gouvernement. Si ceux qui ont de l'argent peuvent s'en servir à cette fin, la qualité de la démocratie au Canada s'en trouve abaissée.
Si le comité mixte spécial n'est pas d'accord pour interdire l'acceptation de cadeaux, il devrait au moins définir le mot «cadeau» de manière à y inclure les frais de transport et de déplacement, ramener à 50$ la valeur minimale de tout cadeau devant être divulgué et faire en sorte que l'interdiction s'applique à tout cadeau venant de quiconque est enregistré ou devrait être enregistré aux termes de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, puisque les lobbyistes sont les personnes les plus susceptibles d'avoir recours aux cadeaux comme moyen d'influencer indûment la prise de décisions.
En ce qui concerne les règles régissant l'après-mandat, notre groupe Démocratie en surveillance considère que les mesures d'observation concernant l'après-mandat énoncé dans le code existant qui régit les conflits d'intérêts, s'appliquent à tous les parlementaires, à cette différence près qu'il faudrait faire passer de deux ans à cinq ans la période de restriction pour les ministres et fixer cette période à deux ans pour les simples parlementaires.
La deuxième raison importante qui incite à l'adoption de règles rigoureuses et d'un régime d'application efficace est d'empêcher que les détenteurs de charges publiques puissent participer à la prise de décision quand il y a conflit d'intérêts. Les propositions que nous faisons ci-dessous visent à définir les intérêts qui mettent les parlementaires en situation de conflit, afin de les aider à éviter les conflits éventuels. Par ce que nous proposons, nous voulons faire en sorte de préciser les circonstances ou les parlementaires doivent reconnaître qu'il existe effectivement un conflit d'intérêts et se retirer de la prise de décisions. Comme l'a indiqué le comité mixte spécial de 1992:
- Nous avons conclu [que] le fait d'assurer que toutes les décisions sont prises sans égard pour
l'intérêt privé du parlementaire l'emporte, en tant qu'intérêt public, sur le fait de pouvoir
profiter entièrement de toute l'expérience acquise lorsqu'il s'agit de prendre une décision au
Cabinet et au Parlement.
Dans son rapport de 1992, le comité a toutefois exempté de l'application de cette règle la participation aux votes ou aux décisions concernant des questions visant le grand public dans son ensemble ou un secteur important du grand public. C'est d'ailleurs ce principe qui a été retenu dans les Règlements de la Chambre des communes et du Sénat.
Nous nous opposons à cette approche parce qu'elle permet aux parlementaires de participer à la prise de décision alors même qu'ils sont manifestement en situation de conflit d'intérêt. Nous demandons, par conséquent, au comité d'interdire expressément aux parlementaires de participer à toute décision dont ils savent, même s'il s'agit d'une décision visant le grand public dans son ensemble, qu'elle servira directement ou indirectement leurs intérêts privés ou ceux des membres de leur famille élargie.
Certains diront que pareille interdiction limiterait excessivement le pouvoir des parlementaires de siéger à des comités et de voter au Parlement. Nous invoquons pour réfuter cet argument ce qu'a dit le Comité mixte spécial en 1992, à savoir que c'est l'intérêt public qui l'exige.
Tout parlementaire qui a des compétences dans un domaine en particulier peut simplement être convoqué comme témoin devant un comité. Il n'a pas besoin de siéger au comité.
Par ailleurs, les parlementaires ont déjà amplement l'occasion, aux réunions des caucus et par les lettres qu'il s'échangent et les conversations qu'ils ont, de faire profiter leurs collègues de leurs compétences particulières, comme vous le savez tous, j'en suis sûr.
Dans ce domaine comme dans d'autres, si nous cherchons à établir une distinction en fonction du degré de participation à la prise de décisions et du type de décisions, nous nous retrouverons avec un régime d'éthique incohérent et inefficace.
La troisième raison qui milite en faveur de l'adoption de règles rigoureuses et d'un régime d'application efficace est d'informer le public pour qu'il puisse déterminer lui-même si les détenteurs de charge publique prennent des décisions vraiment impartiales.
À l'heure actuelle, la prise de décisions au gouvernement et les règles régissant les conflits d'intérêts posent deux problèmes fondamentaux: les règles qui s'appliquent et les informations pertinentes sont réparties dans de nombreux documents disparates et, pour obtenir ces règles et ces informations, il faut s'adresser à des bureaux gouvernementaux assez peu connus et acquitter les droits exigés.
Je réitère notre recommandation selon laquelle tous les codes existants et futurs devraient être unifiés pour former une nouvelle partie de la Loi sur le Parlement du Canada afin que nous soyons assurés d'avoir un régime d'éthique accessible et cohérent.
Nous recommandons également au comité de demander au gouvernement de rendre publiques les dispositions régissant les conflits d'intérêts qui sont actuellement énoncés dans un document secret intitulé «Conseils à l'intention des ministres», afin que le public sache à quelles règles ceux qui ont le plus de pouvoirs politiques et juridiques au Canada doivent satisfaire dans l'exercice de ce pouvoir.
Nous invitons également le comité à recommander au gouvernement fédéral de faire en sorte que le public puisse avoir facilement accès aux détails de toutes les procédures de prise de décisions au gouvernement, aux informations concernant la situation des détenteurs de charges publiques en matière de règles régissant les conflits d'intérêt, de lobbyistes et de dons à caractère politique; pour plus de précisions, ces informations devraient être disséminées gratuitement sur les réseaux informatiques et sur des disques qu'on pourrait trouver dans les bibliothèques publiques des différentes régions du pays.
Toutes les informations qui sont actuellement recueillies sur les lobbyistes et les conflits d'intérêts devraient être transmises sur les réseaux informatiques pour que, dès que le gouvernement prend une décision quelconque, les Canadiens puissent déterminer dans quelle mesure le gouvernement a tenu compte des arguments des particuliers, des groupes, des associations commerciales et des lobbyistes et savoir si la décision était impartiale et si le gouvernement a respecté l'engagement qu'il avait pris pendant sa campagne électorale d'écouter la population.
Quatrièmement, la mise en place d'un régime cohérent et efficace permettrait de donner des indications claires aux détenteurs de charge publique. Le regroupement de toutes les règles profiterait non seulement au public, qui pourrait très facilement comprendre les règles auxquelles les parlementaires sont soumis dans l'exercice de leurs fonctions, mais aussi aux parlementaires, qui pourraient facilement comprendre leurs responsabilités.
Par ailleurs - et il s'agit d'un élément-clé - , la nomination d'un conseiller en éthique indépendant permettrait non seulement de rassurer le public, mais de donner aussi aux parlementaires l'assurance que, qu'ils appartiennent au gouvernement ou à l'opposition, qu'ils soient députés ou sénateurs, s'ils sont accusés d'être en situation de conflits d'intérêts, ils seront traités de façon équitable et impartiale et que la question sera réglée de façon objective au lieu de planer sur eux comme un nuage menaçant pendant le reste de leur vie.
Dans ce domaine, la cinquième et très importante raison pour qu'on ait un régime efficace et cohérent est la nécessité d'assurer l'intégrité des décisions prises par le gouvernement. C'est à ce niveau qu'il est essentiel de réformer le statut du conseiller en éthique.
Son statut actuel ne respecte en aucune manière les promesses de la campagne électorale du gouvernement contenues dans le Livre rouge. Il prête également le flanc à tous les conflits d'intérêt possibles et imaginables. Le conseiller en éthique est l'administrateur du code actuel mais il est aussi chargé des enquêtes bien que ce pouvoir soit très limité.
Le premier ministre et non pas le Parlement, comme le promettait le Livre rouge, a le pouvoir ultime de résolution des conflits entre le conseiller en éthique et les titulaires de charges publiques. C'est aussi le premier ministre et non pas le conseiller en éthique qui décide des conflits d'intérêts devant faire l'objet d'une enquête même si ces conflits concernent un titulaire autre qu'un ministre, excuse utilisée par certains membres du gouvernement qui estiment tout à fait logique que le premier ministre soit responsable de ses ministres.
Le code actuel s'applique également au personnel politique et non pas simplement aux ministres et par conséquent le seul moyen de résoudre ces problèmes c'est de nommer un conseiller en éthique indépendant.
Les positions actuelles du gouvernement et du conseiller en éthique sont également hypocrites car c'est ce dernier qui a la responsabilité de faire appliquer le code de conduite des lobbyistes de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et qui a le pouvoir de faire des enquêtes et de mener des investigations.
Le gouvernement a ainsi institué un régime plus sévère pour les lobbyistes qui peuvent seulement essayer d'influencer les décisions du gouvernement que pour les ministres du conseil qui prennent ces décisions et les fonctionnaires qui élaborent les mesures et par conséquent peuvent grandement influencer les décisions du gouvernement.
Le conseiller en éthique se trouve également dans la situation actuelle devant un grave problème. Si un lobbyiste viole le code de conduite des lobbyistes en influençant un ministre d'une manière incorrecte, et que le ministre viole le code en accordant sa requête au lobbyiste, le conseiller d'éthique se retrouve dans une position de conflit d'intérêts car on attend de lui qu'il mène une enquête sur le lobbyiste et qu'il fasse publiquement un rapport au Parlement alors que son rapport sur la conduite du ministre reste privé et destiné exclusivement au premier ministre.
C'est une position intenable et on se demande qui garde le garde. Pour répondre de manière satisfaisante à cette question il nous faut un conseiller en éthique indépendant.
Le commissaire aux conflits d'intérêts de l'Ontario que vous entendrez mercredi, a déclaré publiquement: «S'il est nécessaire que le conseiller en éthique au niveau provincial soit indépendant, à mon avis c'est également nécessaire au niveau fédéral».
Aussi, lors de son témoignage devant le comité mixte spécial de 1992, Paul Martin qui était alors simple député libéral, a réclamé la création d'un poste de commissaire en éthique qui aurait des pouvoirs d'enquêteur et qui rendrait compte du résultat de ses activités au Parlement.
La commission devrait avoir tous les pouvoirs lui permettant d'enquêter sur le respect de tous les codes contenus dans la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, de mener des enquêtes, de rapporter publiquement les conclusions de ces enquêtes et de recommander des sanctions au Parlement ou de transmettre les dossiers à la Gendarmerie royale pour déterminer l'opportunité de poursuites.
Démocratie en surveillance est également d'accord avec les membres du comité mixte spécial de 1992, en particulier avec Don Boudria qui exprimait certaines inquiétudes. Notamment:
- Cette proposition de commissaire aux conflits d'intérêts que l'on peut consulter mais qui est
également responsable des enquêtes me cause quelques problèmes... c'est un peu comme s'il
était à la fois juge et policier mais en réalité c'est bien pire; c'est comme si l'avocat de la défense
était aussi l'avocat de la Couronne dans la même affaire.
Nous estimons également qu'il devrait y avoir une commission d'éthique comme le recommandait en 1991 le projet de loi C-43. Une commission d'éthique de plusieurs personnes pourrait beaucoup plus facilement éviter les pièges de conflits d'intérêts dans lesquels une seule personne peut tomber. Bien que le comité mixte spécial de 1992 ait souhaité qu'on évite la création d'une lourde machine bureaucratique, votre comité devrait réfléchir aux économies que permettront de réaliser ces deux fonctionnaires. Ils seront plus efficaces et réussiront à empêcher le gouvernement de faire des dépenses injustifiées, conséquences de conflits d'intérêts. Ils permettront aussi de rétablir la confiance du public dans le gouvernement, ce qui n'a pas de prix.
Enfin, si votre comité se prononce contre la création d'une commission d'éthique, il devrait au moins recommander un alignement sur la norme prévalant dans les provinces en créant un bureau indépendant avec des pouvoirs d'enquête réels. Le code actuel devrait être modifié afin qu'un conseiller en éthique, et non pas le premier ministre, ait le pouvoir d'approuver les dispositions prises pour éviter les conflits d'intérêts et afin que seul un agent en éthique ou un enquêteur, et non pas le premier ministre, puisse approuver les réductions de la période de réserve d'après-mandat. Cet agent devrait être l'arbitre ultime quand un titulaire de charge publique accepte les conseils d'un conseiller en éthique. La commission d'éthique devrait avoir les mêmes pouvoirs relativement aux fonctionnaires.
À propos des mécanismes supplémentaires d'application, notre groupe Démocratie en surveillance n'est pas d'accord avec une des recommandations du comité mixte spécial de 1992 selon laquelle un agent d'éthique ne devrait pas avoir à mener d'enquête dans certaines circonstances et ne devrait en mener que sur demande par voie de résolution de l'une ou l'autre des deux Chambres du Parlement. Le comité recommandait également dans son rapport de 1992 que l'agent en éthique ne soit pas tenu de faire de rapport public sur son enquête si la demande émane du premier ministre.
Nous sommes d'accord avec Paul Martin, qui, lors de son témoignage devant le comité mixte spécial de 1992 recommandait qu'il soit permis au public de déposer une plainte auprès de l'agent en éthique - comme en Alberta et en Nouvelle-Écosse - et que celui-ci soit tenu d'enquêter sur toutes les plaintes et de publier des rapports dans tous les cas. Cette publication des rapports est un élément essentiel rappelé par Paul Martin lors de son témoignage en 1992.
Enfin, les dénonciateurs devraient également être protégés - comme c'est le cas actuellement des fonctionnaires ontariens - afin que ceux qui communiquent des informations menant à une condamnation pour violation des règles de conflits d'intérêts soient protégés. En cas d'amendes, ils devraient en recevoir 50 p. 100 s'ils ne sont pas eux-mêmes coupables de violation des règles. D'après nous, cela encouragerait l'élévation des normes d'éthique des titulaires de charges publiques.
Ceci met fin à notre déclaration d'ouverture et je suis prêt à répondre à vos questions. Si vous avez d'autres questions ou si vous voulez d'autres renseignements, il y a le mémoire que nous avons déposé. Également, en mai 1994 nous avons publié un rapport intitulé Spring Cleaning: A Model Lobbying Disclosure and Ethics Package for Those Hard to Reach Places in the Federal Government. En juin 1995 nous avons publié notre rapport Reinventing Integrity: First Annual Report on the Federal Government's Ethics Package. Spring Cleaning est disponible à la Bibliothèque du Parlement ainsi que notre rapport Reinventing Integrity. Ces rapports contiennent beaucoup plus de détails et de renseignements sur les recommandations proposées aujourd'hui.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Merci beaucoup, monsieur Conacher.
Pendant tout votre témoignage, vous avez dit «nous». Si je vous ai bien compris, votre organisme existe depuis 1993 et compte 250 adhérents. Avez-vous un bureau? Quelles sont vos activités? Quels sont les principes sur lesquels le «nous» dont vous parlez se sont entendus? Qui êtes-vous? Qui forme votre organisme?
M. McWhinney: Qui est ce «nous»?
Le coprésident (le sénateur Oliver): Oui, qui est ce «nous»? Voilà pour la première question.
Deuxièmement, nombre de témoins sont venus au comité nous dire que nous devrions, dans notre code d'éthique, déterminer d'abord toute une série de principes à partir desquels nous déterminerions à quoi ils s'appliquent, comme par exemple aux voyages, ou aux cadeaux, etc. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Troisièmement, vous avez affirmé que, d'après vos membres on devrait limiter la valeur des cadeaux à 50$, à moins que des raisons protocolaires ne dictent de faire autrement. Si un lobbyiste invitait un député pour discuter d'une mesure législative à un déjeuner et que la note se monte à 101$, devrait-il le divulguer, d'après vos principes?
Voilà les trois questions auxquelles je vous demande de répondre.
M. Conacher: Vous voulez savoir d'abord qui nous sommes: nous sommes présentement le seul groupe d'intervention comparaissant au comité qui représente le point de vue des citoyens. Nous ne prétendons pas représenter tous les Canadiens, mais nous essayons de nous mettre dans la peau de l'habitant de Moose Jaw, de Burnaby ou de Toronto et nous nous demandons ce qu'ils voudraient voir figurer dans le code. Nous rédigeons donc nos recommandations en tenant compte du point de vue des citoyens et, comme vous l'avez constaté à la lecture de notre rapport Spring Cleaning (Nettoyage de printemps), nous comparons les règles qui s'appliquent d'une province ou d'un État à l'autre dans toute l'Amérique du Nord.
«Démocratie en surveillance» a un petit conseil d'administration, un comité consultatif composé de trois personnes et regroupe 250 adhérents de part et d'autre du pays, c'est-à-dire au moins un dans chaque province. Vous l'avez dit vous-même, nous avons été créés en 1993 grâce aux fruits de la publication d'un livre intitulé Canada First que Ralph Nader et moi-même avions corédigé. Aujourd'hui, comme tout le monde, nous essayons de survivre financièrement à une époque où le gouvernement diminue de plus en plus ses subventions. Notre politique, c'est de n'accepter aucune subvention ou contribution ni du gouvernement ni de sociétés: nous n'acceptons que les dons des citoyens. Nous sommes donc essentiellement le seul groupe qui suive ces questions de fond d'un point de vue canadien.
J'ai une suggestion à vous faire, pour la prochaine fois, si vous préférez recevoir un groupe à audience plus large: recommander au gouvernement d'annoncer dans son prochain budget qu'il fera imprimer sur toutes les déclarations d'impôt des contribuables une petite case que l'on pourra cocher si l'on souhaite envoyer 10$ de plus en taxes pour que cette somme soit envoyée à une association nationale de contribuables dont le mandat sera de surveiller les normes déontologiques du gouvernement, de surveiller les dépenses du gouvernement et d'informer la population sur la façon dont les deniers publics sont utilisés. Comme la déclaration d'impôt est remplie par 18 millions de Canadiens, si 3 p. 100 d'entre eux envoient la somme, vous vous retrouveriez avec un budget de 5 millions de dollars et une association de 540 000 membres. Autrement dit, vous auriez devant vous comme témoins une organisation beaucoup plus représentative et moins démunie qui insisterait pour que vous instauriez un régime de règles déontologiques musclé, cohérent et efficace.
Le coprésident (le sénateur Olivier): Et mes deux autres questions?
M. Conacher: Pour ce qui est des principes, rien ne prouve que le code de conflits d'intérêts actuel destiné aux titulaires de charges publiques s'appliquerait à tous ceux qui se trouvent dans cette pièce-ci. En effet, la partie I du code ne définit pas de façon restrictive le terme «titulaire d'une charge publique».
Nous savons que les tribunaux ont toujours eu et ont encore du mal à définir ce que sont les «charges publiques», les «agents de la Couronne» et les «titulaires de charges publiques» et qu'ils le font de façon ponctuelle. Mais nous sommes d'avis que les dix principes sont une bonne base de départ et qu'ils pourraient former un préambule à la partie I, comme c'est le cas dans le code actuel.
Mais nous répétons que tout cela devrait figurer dans une loi plutôt que dans le code actuel dont le statut n'est pas clair. En effet, il est très difficile d'appliquer ce code. Personne ne peut vraiment se plaindre au conseiller en éthique. Tout est entre les mains du premier ministre. Personne ne peut interjeter appel auprès d'un tribunal ou d'un organe indépendant. Le code actuel a donc un statut extrêmement douteux, voilà pourquoi nous recommandons que toutes les règles soient regroupées dans la Loi sur le Parlement du Canada, avec les dix principes inscrits en préambule, dans la première partie.
Votre troisième question portait sur la limite de 50$. Nous pensons simplement que la limite devrait être très claire. Nous ne voyons pas pourquoi quiconque devrait pouvoir utiliser ce moyen-là pour exercer de l'influence. Si l'on n'impose que la divulgation, cela signifie que n'importe quel lobbyiste qui en a les moyens pourrait inviter un député tous les jours à déjeuner. Cela s'appelle avoir un accès inéquitable à la députation, car ce ne sont pas tous les citoyens qui peuvent se permettre d'inviter un député à déjeuner tous les jours. Voilà pourquoi nous recommandons de fixer un maximum de 50$ par an et par personne.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Merci beaucoup.
Madame Catterall.
Mme Catterall (Ottawa-Ouest): Vous aurez peut-être l'impression que ma question n'est pas sérieuse, mais ce n'est pas le cas, croyez-moi: Connaissez-vous personnellement un député? Avez-vous travaillé avec un député? Avez-vous une idée de ce qu'ils font dans leur journée et dans leur semaine?
M. Conacher: À la fin de mon cours de Droit, j'ai fait un stage à la Division de l'élaboration de la politique au bureau du procureur général de l'Ontario. J'ai également travaillé de près avec plusieurs députés membres du comité de l'industrie l'année dernière, dans le cadre de notre campagne sur la responsabilité des banques.
Mon grand-père était député libéral dans le gouvernement de Louis Saint-Laurent. J'ai depuis plusieurs années des contacts continus avec des députés, y compris Patrick Boyer. Monsieur Milliken connaît peut-être un document que nous lui avons soumis sur l'accès des citoyens aux prises de décisions, document concernant le rappel des parlementaires par référendum organisé sur initiative populaire.
Mme Catterall: Je vais vous dire l'une des raisons pour laquelle je vous ai posé cette question. Vous n'avez pas fait la différence entre le code qui pourrait s'appliquer à des ministres, qui prennent directement des décisions, celui qui s'appliquerait aux secrétaires parlementaires, qui ont accès à de l'information confidentielle et qui peuvent influer sur les décisions, et celui qui pourrait s'appliquer aux autres députés, qui ne sont pas habilités à prendre des décisions. À vrai dire, vous m'avez perdue quand vous avez affirmé que les députés devraient se voir interdire de participer à un comité, tout simplement parce qu'ils ont d'autres façons d'influer sur des décisions. En ce qui me concerne, j'ai l'impression que faire partie d'un comité, c'est la façon la moins efficace d'influer sur une décision qu'un ministre est à la veille de prendre. Il existe d'autres façons d'exercer de l'influence qui ont beaucoup plus de poids, surtout lorsque vos intérêts personnels sont en jeu.
M. Conacher: Les nouvelles règles de février 1994 ont donné beaucoup plus de pouvoirs aux comités. Ainsi, le projet de loi C-43, Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, a été renvoyé au comité après la première lecture. Or, le comité a modifié à fond le projet de loi, et ce dernier, tel que modifié, a été adopté par le Parlement qui n'y a pas changé un seul mot, à l'exception d'un amendement supplémentaire présenté par votre collègue, M. Epp. Voilà ce que j'appelle le pouvoir de prendre des décisions d'ordre législatif.
Mme Catterall: Mais cela ne constitue pas le pouvoir de dépenser les deniers publics. Seul le Parlement, et ses ministres, ont ce pouvoir. Les comités ne l'ont pas. Toutefois, un député qui pressentirait en privé un ministre ou son représentant pourrait influer sur ce type de décision. Je me demande donc pourquoi vous voulez nous empêcher de prendre part à des comités ou à des scrutins, mais que vous ne dites rien sur les autres formes beaucoup plus subtiles et plus efficaces encore d'exercer de l'influence.
M. Conacher: Parce que ces autres façons de faire constituent un moyen d'exercer de l'influence et non de participer à la prise de décisions.
Mme Catterall: Mais si les décisions n'ont pas d'effet...
M. Conacher: Mais elles en ont. Le code que vous rédigerez ici aura un effet. Le sous-comité qui a étudié le projet de loi C-43 a modifié la législation.
Mme Catterall: Mais ça ne changera pas la façon dont les fonds publics sont dépensés ou les faveurs publiques distribuées.
M. Conacher: Non, mais cela peut tout de même modifier les intérêts.
Mme Catterall: C'est la raison pour laquelle je pose la question, parce que franchement, cela dénote un manque de compréhension des rapports qu'ont les députés avec les décisionnaires. Ni les comités, ni les votes à la Chambre n'ont d'influence.
M. Conacher: Je comprends cela, mais c'est à ce niveau-là que vous participez au processus décisionnel. Comme le comité mixte spécial de 1992 l'a expliqué avec beaucoup de clarté, l'idée d'un régime, c'est que cela permet au parlementaire de s'exclure du processus décisionnel lorsqu'il s'expose à des conflits d'intérêts réels, potentiels ou apparents.
Mme Catterall: C'est précisément ce que je veux dire. C'est le ministre ou un haut fonctionnaire qui prennent les décisions, ce ne sont pas les comités. À mon avis, les parlementaires devraient se dissocier de ce niveau-là également et s'abstenir de tout contact auprès de quiconque est en mesure de dispenser des faveurs.
M. Conacher: Si vous disiez «s'abstenir également», alors je serais d'accord avec vous.
Mme Catterall: Si je devais choisir l'un ou l'autre, je dirais que vous avez choisi le mauvais si vous comprenez la situation.
Passons à une autre question; vous avez dit que quelqu'un devrait pouvoir réserver 10$ à vos activités et à celles de votre organisme. Est-ce que vous suggérez également un type de formulaire d'impôt à mentions multiples, un formulaire qui me dirait que 9 p. 100 de chaque dollar que je verse est consacré à la défense, 40 p. 100 à la santé et aux services sociaux, et qui me permettrait de choisir les secteurs auxquels je souhaite contribuer?
M. Conacher: Non.
Mme Catterall: Dans ces conditions, pourquoi envoyer 10$ à un organisme de contribuables?
M. Conacher: Parce qu'il est très difficile pour les citoyens de s'organiser et de se regrouper. Les entreprises n'ont aucun mal à réserver une partie des bénéfices effectués sur la vente de produits et de services à des consommateurs, à des activités de lobbyisme. Par exemple, l'Association des banquiers canadiens est financée directement par les consommateurs.
Pourquoi ne pas donner aux citoyens les mêmes facilités de se regrouper?
Mme Catterall: Pourquoi avez-vous dit «contribuables» au lieu de «citoyens»?
M. Conacher: Peu importe comment on les désigne. Vous pouvez l'appeler l'Association nationale des citoyens pour la probité gouvernementale et en faire un instrument pour contrôler les aspects déontologiques.
Mme Catterall: Une dernière observation suivie d'une dernière question; en effet, vous avez dit qu'il n'était pas nécessaire d'adopter une disposition prévoyant une communauté d'intérêts. Vous savez peut-être que cela figure dans la législation municipale sur les conflits d'intérêts, c'est-à-dire à un niveau où chaque député a des intérêts en commun avec la communauté qu'il représente. Cela ne les empêche pas de voter. Vous avez choisi d'écarter cet aspect-là.
Savez-vous pourquoi cette disposition figure dans la législation municipale sur les conflits d'intérêts?
M. Conacher: Vous parlez de Toronto?
Mme Catterall: Un intérêt commun avec la communauté.
M. Conacher: Nous reconnaissons qu'un membre du Parlement pourrait demander une décision à un agent en éthique indépendant. Cela dit, cette indépendance est importante mais, contrairement au système actuel. S'il juge qu'il y va de l'intérêt public, cet agent indépendant pourrait décider que le député peut participer.
Je le répète, dans un tel cas la décision doit être enregistrée et il doit être possible de la consulter sur les réseaux informatiques. D'un autre côté, lorsqu'un député décide de s'abstenir, cela doit être enregistré également, ainsi que les raisons invoquées, et cela doit être mis à la disposition du public pour qu'on sache à quoi s'en tenir sur les membres du Parlement qui participent aux décisions.
Mme Catterall: Enfin, pouvez-vous nous donner votre définition de «famille élargie»?
M. Conacher: C'est un point difficile. En fait, nous pensons que la définition devrait aller plus loin que les seuls conjoints et leurs personnes à charge.
Mme Catterall: Aller jusqu'où?
M. Conacher: Je crois qu'en 1992 le comité avait décidé d'inclure les parents et les frères et soeurs du député également. À mon avis, cela serait satisfaisant.
Mme Catterall: Merci.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Sénateur Gauthier. Nous passerons ensuite au sénateur Spivak et à M. Epp.
Le sénateur Gauthier: Monsieur le président, j'ai deux questions très courtes à poser à notre témoin, M. Conacher.
Vous avez dit que c'était la sixième ou la septième fois que vous essayez de faire adopter un tel code déontologique. Vous nous avez également rappelé les principaux éléments du rapport de 1992 et, à quelques exceptions près, vous semblez entériner la plupart des recommandations de ce rapport. À votre avis, pourquoi le rapport de 1992 n'est-il jamais devenu la politique du gouvernement, pourquoi le Parlement n'a-t-il pas adopté cette proposition?
M. Conacher: L'organisme «Démocratie en surveillance» a été créé en 1993.
Le sénateur Gauthier: Non, je vous demande pourquoi le gouvernement n'a pas jugé...
M. Conacher: Je n'étais pas là à l'époque. Cela dit, d'après tout ce que j'ai lu, le comité mixte spécial de 1992 avait conclu que le projet de loi C-43 qui était à l'étude, avait été rédigé avec trop de précipitation et avait par conséquent recommandé un grand nombre d'amendements importants ainsi qu'une série de règles cohérentes.
Tout ce que je sais, c'est que lorsque le projet de loi modifié a été renvoyé à ce comité en 1993 sous la désignation C-116, après de courtes audiences, le comité s'est déclaré très frustré de voir qu'on n'avait tenu aucun compte de la plupart de ses recommandations. Je ne sais pas si M. Oliver a d'autres détails à ce sujet, mais le tout fut alors renvoyé dans le collimateur du gouvernement et de la fonction publique pour en ressortir assez méconnaissable. Après un nouvel examen, le comité décida de rejeter le projet de loi C-116.
Le sénateur Gauthier: Vous me dites donc...
M. Conacher: Actuellement... Néanmoins, comme on l'a vu en juin 1994, un code à l'intention des détenteurs de charges publiques a été présenté. Le gouvernement actuel, tout comme celui qui l'a précédé, a donc l'intention d'imposer ses limites, ce qui à mon avis est une erreur.
Sur le plan des normes, la différence devrait se situer au niveau de l'application. Les règles sont très semblables pour tout le monde. C'est un principe que Paul Martin a réaffirmé en 1992 lorsqu'il a comparu devant le comité mixte spécial. La distinction intervient au niveau de l'application puisque les ministres devront suivre ces règles dans des cas plus fréquents que les autres intéressés à cause de la nature de leurs responsabilités et de leur pouvoir décisionnel.
Le sénateur Gauthier: Si je vous disais que la grande majorité des hommes politiques et des parlementaires était d'accord avec le rapport de 1992... Mais comme vous venez de me le dire, tout le projet a été renvoyé aux instances administratives et est revenu sous une forme inacceptable. C'est bien ce que vous pensez? C'est également la façon dont je vois les choses.
M. Conacher: Effectivement, c'est bien...
Le sénateur Gauthier: Qu'est-ce qui vous fait croire que les choses tourneront différemment cette fois-ci?
M. Conacher: Les promesses du gouvernement actuel semblent plus claires, du moins je l'espère.
Le sénateur Gauthier: Je ne vous parle pas des parlementaires. J'ai de bonnes intentions. Je suis ici depuis 23 ans et personne ne s'est jamais plaint de ce que je faisais, personne ne m'a jamais soupçonné, je n'ai jamais reçu le moindre cadeau. Donc, quand vous nous dites qu'on a de bonnes raisons de se méfier de la politique et que les hommes politiques sont une bande d'escrocs, je ne marche pas.
Cela dit, nous faisons des efforts considérables pour élaborer un code de conduite. Qu'est-ce qui vous fait croire qu'en dépit de mes bonnes intentions et des bonnes intentions de ce comité nous allons réussir si des gens comme vous ne nous soutiennent pas dans cette tentative?
M. Conacher: C'est la raison pour laquelle je suis ici. C'est la raison pour laquelle, si vous élaborez un code bien conçu, le jour même, nous convoquerons une conférence de presse pour féliciter le comité. Et avec le soutien d'une association nationale de citoyens, vous auriez le soutien de centaines de milliers de Canadiens qui réclameraient...
Le sénateur Gauthier: Mais vous avez entendu parler de la coalition nationale.
M. Conacher: J'ai entendu parler de la coalition...
Le sénateur Gauthier: Voilà un homme qui semble ne pas manquer d'argent, apparemment, il lui en arrive de partout.
M. Conacher: Oui.
Le sénateur Gauthier: Pourquoi ne faites-vous pas la même chose?
M. Conacher: Pourquoi ne faisons-nous pas la même chose? Pour commencer, il a commencé avec une somme un peu plus importante que nous.
Comme je l'ai dit, ça a commencé avec le produit d'un livre à succès paru en 1993 au Canada Canada First. Mais un livre à succès au Canada, comme ceux d'entre vous qui ont écrit quelque chose le savent, ça ne se traduit pas par des centaines de milliers de dollars...
Le sénateur Gauthier: Vous avez dit quelque chose au sujet de la Loi sur le Parlement du Canada. Vous avez dit, et j'essaie de vous citer, qu'il faudrait modifier les dispositions du Code criminel:
- pour s'assurer que les ministres des cabinets fédéral, provinciaux et territoriaux et les
secrétaires d'État sont explicitement couverts...
M. Conacher: Le comité mixte spécial de 1992 avait reconnu que les tribunaux avaient des difficultés dans plusieurs domaines.
Le sénateur Gauthier: Nous avons modifié la loi depuis lors. La Loi sur le Parlement du Canada a été modifiée.
M. Conacher: Oui, mais en ce qui concerne le Code criminel, il y a des difficultés.
Le sénateur Gauthier: Je ne suis pas avocat, mais vous l'êtes, vous, et je vous demande vers quoi je dois me tourner. À quels articles du code devrais-je m'intéresser?
M. Conacher: Aux articles 118, 119, 121 et 122. La définition d'un personnage officiel qui figure à l'article 118 n'est pas claire et on ne sait pas si les ministres fédéraux et provinciaux et les membres des assemblées législatives provinciales et territoriales en font partie. On ne sait pas très bien si l'article 119 couvre également les ministres et les secrétaires d'État.
Le sénateur Gauthier: Et l'article 121?
M. Conacher: Les articles 121 et 122 sont tributaires de la définition de l'article 118.
Le sénateur Gauthier: Dans votre définition, un parlementaire est un représentant officiel du gouvernement?
M. Conacher: Les tribunaux ont...
Le sénateur Gauthier: Non, à votre avis. Je sais ce qu'ont dit les tribunaux.
M. Conacher: Oui. C'est un énorme problème. Pour une raison quelconque, chaque fois qu'on rédige un texte, on utilise un terme différent. On parle donc de code de conduite, de conflit d'intérêts et de code d'emploi pour les détenteurs de charges publiques. Par contre, si vous consultez la Loi d'interprétation on parle de «fonctionnaire public» mais si on passe au Code criminel, on parle alors de «fonctionnaire».
Lorsque je faisais mon droit, j'ai suivi un cours de rédaction législative, et le conseiller législatif de l'Ontario qui donnait ce cours aurait conclu qu'une telle rédaction était vague, généralement incohérente et ambiguë. Vous devez donc la rendre plus cohérente.
Le sénateur Gauthier: Je serais peut-être d'accord. Je n'ai pas d'autres questions pour l'instant.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Sénatrice Spivak, je vous en prie.
La sénatrice Spivak (Manitoba): J'ai deux questions à vous poser, dont une qui porte sur les dons.
Vous y avez fait allusion; à mon avis, la méfiance du public envers les hommes politiques tient plus à la façon dont fonctionne le système des partis qu'à des transgressions individuelles des parlementaires.
Le problème, c'est que l'administration d'un parti coûte des millions de dollars, qu'il faut constamment solliciter des dons et qu'en présence d'un tel système l'être humain a tendance à ne pas être très impartial. À propos de ce système qui consiste à financer les partis politique à l'aide de dons, pensez-vous qu'il aurait besoin d'être modifié? Pensez-vous qu'il conviendrait de le changer radicalement? Que pensez-vous des dons aux partis politiques et de leur influence sur le comportement des parlementaires?
M. Conacher: C'est un sujet que nous n'avons pas encore approfondi. Dans le document Pour la création d'emplois pour la relance économique, le Parti libéral avait promis de modifier les règles sur le financement des élections pour éliminer l'influence des intérêts spéciaux et, dans ce domaine, certains systèmes existent.
Le Québec a un système qui est suivi par les membres du Bloc et, aux termes de ce système, les dons des sociétés et des organisations ne sont pas autorisés et chaque candidat doit se limiter à 5 000$. On a proposé un autre système qui constituerait un changement encore plus grand, c'est de demander 1$ d'impôt supplémentaire à chaque contribuable. Cela permettrait de réunir 18 millions de dollars qui seraient ensuite divisés entre les partis en proportion du vote populaire obtenu aux dernières élections et du nombre de sièges qu'ils occupent à la Chambre.
Nous pensons que notre système est préférable à celui des États-Unis puisque les sommes que nous dépensons sont limitées. Mais comme les médias l'ont révélé, dans le cas de certains secteurs - comme celui des services financiers qui a donné environ 1,2 million de dollars au Parti libéral l'année dernière - il est difficile de ne pas considérer cela comme un moyen d'influencer les partis à moins que les mêmes sommes ne soient versées à tous les partis.
Nous n'avons pas étudié cet aspect-là attentivement, mais nous espérons que le gouvernement fédéral se penchera sur la question avant les prochaines élections, comme il a promis de le faire. À ce moment-là, nous reviendrons sur la question.
La sénatrice Spivak: En ce qui concerne le lobbyisme, pensez-vous que de nouveaux règlements soient nécessaires? Comparez à il y a 10 ou 15 ans, c'est un mouvement qui a connu une expansion phénoménale.
Les firmes de lobbyisme se protègent généralement en retenant les services de membres de tous les partis, des gens qui ont fait partie du gouvernement ou qui ont travaillé en étroite collaboration avec le bureau du premier ministre. À votre avis, faudrait-il adopter de nouvelles règles, de nouveaux règlements dans le cas des lobbyistes?
M. Conacher: Oui, absolument. Nous avons soumis un mémoire à ce sujet au comité qui étudiait le projet de loi C-43. Certaines de nos recommandations ont été retenues. Certaines recommandations-clés ne l'ont pas été. Le système qui est maintenant en place permet d'obtenir plus d'informations, mais pas des informations-clés.
À notre avis, les lobbyistes devraient être tenus de révéler toutes leurs activités passées, rémunérées ou bénévoles, pour le compte d'un gouvernement ou d'un parti politique. A notre avis, les lobbyistes ne devraient pas être autorisés à occuper des charges importantes au sein des partis politiques, par exemple directeur de campagne ou trésorier. D'autre part, les lobbyistes devraient être tenus de révéler toutes leurs dépenses chaque fois qu'ils se livrent à des activités de lobbyisme. De plus, si un lobbyiste se contente de communiquer des informations au lieu de chercher à influencer directement un fonctionnaire, s'il s'agit d'informations auxquelles le public n'a pas facilement accès, ce type d'activité devrait être enregistré également.
Par conséquent, la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes sous sa forme actuelle ne nous satisfait toujours pas complètement, et nous espérons qu'un code de conduite des lobbyistes permettra d'y remédier. Nous espérons qu'une disposition de ce code de conduite des lobbyistes précisera que les lobbyistes ou les firmes de lobbyisme ne peuvent pas se livrer à des activités de lobbyisme auprès d'un ministère alors qu'ils travaillent pour le compte de ce même ministère.
C'est ce qu'on a vu l'année dernière avec le groupe Earnscliffe qui conseillait le ministère des Finances en matière de communication et qui, en même temps, représentait des clients qui faisait du lobbyisme auprès du ministère des Finances. C'est intolérable.
La sénatrice Spivak: Vous ne pensez donc pas que nous ayons besoin de règlements spécifiques qui empêchent quelqu'un de travailler pour une firme de lobbyisme après avoir eu des contacts étroits avec les décisionnaires haut placés du gouvernement, et cela, peu de temps auparavant.
M. Conacher: Oui, absolument. C'est une porte tournante qu'il faudrait certainement bloquer.
La sénatrice Spivak: Avez-vous des recommandations précises à nous faire?
M. Conacher: Nous ne les avons pas formulées dans ce mémoire car il nous a semblé que ces dispositions avaient plutôt leur place dans le code de conduite des lobbyistes, mais nous pensons que le détenteur d'une charge importante dans un parti politique ne devrait pas être autorisé à faire du lobbyisme, parce que ce genre de rapport donne autant d'influence, sinon plus, qu'une charge au sein du gouvernement.
La sénatrice Spivak: Vous nous avez cité une liste de raisons qui justifient l'adoption d'un code de conduite. Certains témoins sont venus nous dire que nous n'avons pas besoin d'un code de conduite, que nous devrions oublier tout cela.
Finalement, je pense qu'un code de conduite est nécessaire, mais il y a d'autres secteurs, comme le système des partis et le lobbyisme, où l'influence est beaucoup plus considérable et dont le public a de bien meilleures raisons de se méfier. En effet, dans l'ensemble, les parlementaires ordinaires ne sont pas des gens malhonnêtes. Que pensez-vous de cela?
Vous avez commencé par parler de la confiance du public, mais je me demande si c'est un sujet aussi simple qu'on le présente dans les sondages. La confiance du public englobe une foule de choses et je ne suis pas certaine qu'il suffirait de modifier le code d'éthique pour modifier le moindrement le sentiment de la population qui ne fait pas confiance au gouvernement.
Il y a de nombreuses raisons, comme le système des partis et les lobbyistes. Il y a aussi l'impression générale qu'une fois élu le gouvernement récompense ses amis.
Que répondez-vous à cela?
M. Conacher: Je pense que votre comité aura fait un important pas dans la bonne direction s'il adopte en général le rapport du comité spécial de 1992.
J'aimerais vous citer ce qu'a dit Paul Martin lorsqu'il a comparu devant le comité. Il a cité comme exemple le fait d'avoir des intérêts dans une société tout en étant ministre. Bien sûr, il n'était pas membre du Cabinet à l'époque. Il a dit:
- Pour en revenir à mon exemple d'Oceanex, si j'avais été membre du Cabinet - qu'à Dieu
ne plaise - et qu'il m'était interdit de participer à la gestion de l'entreprise, je ne saurais pas ce
qui s'y passe, et si tout à coup on me pose une question, comment diable la population
pourra-t-elle croire que tout a été fait de façon juste et légitime si un agent indépendant du
Parlement est incapable de vérifier les faits?
M. Epp (Elk Island): Monsieur Conacher, j'ai vraiment apprécié votre exposé. J'ai noté 23 choses. J'ai très hâte de recevoir un exemplaire de votre rapport lorsqu'il nous parviendra enfin.
M. Conacher: En fait, le titre de la deuxième partie de notre rapport est: «Cinq raisons de prendre les 25 mesures pour rendre le système efficace». Il y en a donc quelques autres.
M. Epp: J'en ai raté quelques-uns.
Vous dites souhaiter que les parlementaires prennent leur distance du monde des affaires, de l'argent, etc. Cela suscite ma curiosité. Je suis d'accord pour dire que ce serait l'idéal, mais je me demande si cette idée est vraiment pratique.
Nous avons déjà quelques exemples. Pouvons-nous vraiment nous attendre à ce qu'un agriculteur qui se présente aux élections et qui est élu député se départisse de sa firme? Ou alors, doit-on lui interdire de se prononcer ou de voter sur les choses qui touchent le plus sa collectivité, même s'il a été élu par une collectivité agricole? Comment pouvez-vous concilier ces choses?
M. Conacher: Pour ce qui est des activités, nous estimons qu'il peut évidemment y avoir une exception pour les entreprises familiales. Par exemple, il est très difficile de se dessaisir d'une telle entreprise.
Lorsque je dis que nous préconisons le dessaisissement total, nous pensons surtout aux ministres et aux secrétaires d'État, ceux qui occupent les postes de décisions-clés. Mais pour les autres, il peut suffire qu'ils placent leurs biens dans une fiducie sans droit de regard ou qu'ils le divulguent tout simplement. Essentiellement, encore une fois, il faut un conseiller en éthique indépendant pour statuer sur ce cas et rendre une décision publique afin que tout le monde soit au courant.
M. Epp: Le fait est que les agriculteurs qui sont élus, surtout s'ils représentent une collectivité agricole, ne peuvent pas se dessaisir de leur exploitation.
Vous avez dit que cette règle doit s'appliquer non seulement au député, mais au conjoint du député, à ses enfants, au conjoint de ses enfants, à ses parents, etc.
M. Conacher: Mais pas le dessaisissement. Les membres de la famille seraient tenus de divulguer leurs intérêts.
M. Epp: Très bien.
M. Conacher: Et lorsque c'est possible, le député devrait se dessaisir de ses intérêts.
M. Epp: J'ai l'impression que nos meilleurs experts dans beaucoup de secteurs ce sont des gens qui ont travaillé dans ces domaines. Lorsque je songe au secteur des banques et des affaires, je suis très reconnaissant de la contribution que peuvent faire ceux qui ont l'expérience des affaires dans ce genre de discussions.
À propos d'influence, je suis membre d'un parti qui ne compte qu'un seul avocat. Je vous présente mes excuses. Nous avons 51 autres députés dont la plupart sont des gens d'affaires. D'ailleurs, la plupart d'entre eux ont vu leur revenu diminuer lorsqu'ils sont devenus députés. Et maintenant vous leur demandez d'aller encore plus loin et d'accepter des pertes financières. Est-ce que vous pensez que cela peut avoir des répercussions sur le genre de personnes qui pourraient se présenter aux prochaines élections?
M. Conacher: Vous soulevez un problème, à savoir qu'il est difficile d'envisager un code sans songer à un régime de pension, d'indemnisation, de règles pour l'après-emploi, et tous les sacrifices.
Certains diront que cela découragera les gens bien de se présenter aux élections. Nous croyons que l'expression «gens bien» est un euphémisme pour «élite». La plupart des Canadiens ne verraient pas leur revenu diminuer, mais auraient plutôt une grosse augmentation s'ils devenaient députés. Alors les «gens bien» n'auront pas peur de se porter candidats pour une charge publique si on applique une norme élevée en matière de divulgation et d'éthique; les gens moins bien craindront cela, ce qui est parfait.
Que faut-il abandonner? Nous ne disons pas que les députés doivent vivre en vase clos. Nous disons que vous pourrez apporter vos compétences, mais que vous devez abandonner vos liens. Cela veut dire que si vous maintenez certains de ces liens, vous ne pourrez pas participer au processus décisionnel. Et ce, parce que vous avez un intérêt dans la décision qui sera prise.
Si vos collègues veulent profiter de vos connaissances spécialisées, ils peuvent vous appeler à comparaître comme témoins devant un comité. Vous pouvez donner des conseils d'experts à vos collègues en caucus avant la réunion du comité, soit en public soit en privé. Vous pouvez dîner avec eux et partager avec eux vos connaissances. Mais si vous avez un lien et un intérêt alors, pour éviter tout «conflit d'intérêts» vous devez vous retirer de ce processus de décision. Tout autre définition du conflit d'intérêt vise à éluder le problème.
M. Epp: Je ne veux pas trop insister ou m'attarder sur ce point, mais je crois vraiment que même cette exigence aurait pour effet d'exclure un grand nombre de gens bien uniquement parce qu'ils ont réussi.
Je pense à la personne qui connaît à fond l'industrie du transport. C'est un excellent homme d'affaires. Il ferait un excellent député. C'est un bon gestionnaire. Il a une excellente aptitude pour analyser ce qui doit être fait et comment il faut le faire.
Je pense que ce sont des qualités qui manquent au gouvernement. J'ai l'impression que nous passons des mois et des années à discuter, à débattre à «Colloquer». Au bout du compte, nous rédigeons un rapport à l'eau de rose qui n'aboutit à rien.
J'aimerais qu'il y ait plus de gens comme lui au Parlement, mais je ne pense que nous réussirons à en attirer.
M. Conacher: Il n'y a rien dans nos recommandations qui découragerait cette personne de se porter candidate. Simplement, il ne pourrait pas être membre du comité qui traiterait de...
M. Epp: Et il ne pourrait jamais aspirer à devenir ministre, car il serait obligé de se dessaisir de tous ses intérêts d'affaires.
M. Conacher: Étant donné la rémunération que touchent les ministres, je pense que la plupart des Canadiens jugeraient qu'ils sont suffisamment indemnisés. Ils gagent deux ou trois fois ce que gagnent la plupart des Canadiens en un an.
M. Epp: Très bien. Je veux profiter du temps dont je dispose pour aborder une autre question, celle du financement des campagnes politiques. Je suis très heureux de n'avoir reçu aucun don important pour ma propre campagne. Plusieurs centaines de personnes ont contribué entre 20$ et 100$ à ma campagne, et je pense que c'est certainement la meilleure solution.
L'une des options que vous proposez pour remplacer le financement individuel des campagnes politiques c'est que les gens ajoutent un dollar à leur impôt sur le revenu et que cet argent serve à financer ces campagnes. La distribution des fonds se ferait en fonction du nombre de sièges remportés aux élections précédentes.
M. Conacher: Et en fonction du vote populaire.
M. Epp: Mais alors, comment un nouveau parti pourrait-il jamais être créé? Je vous parle de notre expérience récente.
M. Conacher: Je ne dis pas que nous préconisons ce système. C'est l'une des possibilités qui a été proposée. L'auteur - Mel Hurtig du Parti national - a essayé lui aussi de faire une percée lors des dernières élections. Il propose une exception unique pour un nouveau parti, ce qui bien sûr s'appliquerait à son propre parti qui a reçu un don de 4 millions de dollars d'une seule personne. Ce serait peut-être une façon pour ce système de fonctionner. Si cette idée était mise en oeuvre, un nouveau parti pourrait recevoir toutes les contributions qu'il veut pour une campagne électorale, mais s'il n'avait pas de succès pendant cette campagne, il n'aurait pas d'autre chance.
M. Epp: Avez-vous connaissance de cas où des gens qui ont contribué lourdement à une campagne électorale ont obtenu des faveurs politiques ou des contrats du gouvernement après que celui sur qui ils avaient misés ait été élu? Il serait probablement sage que vous évitiez de nous donner des exemples précis, mais j'aimerais pouvoir me faire une idée de l'ampleur de ce phénomène. Est-ce que c'est très généralisé?
M. Conacher: Nous recommandons que ce genre d'information, comme le registre des lobbyistes, soit placé sur des réseaux informatiques, car à l'heure actuelle il est très difficile de trouver des renseignements sur le financement des campagnes. Pour une raison quelconque, Élections Canada n'exige pas que les partis déposent leurs listes de dons sur des disquettes informatiques. Ils leur demandent plutôt une copie sur papier, une photocopie de ces copies, puis les distribuent dans les bibliothèques de tout le pays. Il faut donc consulter des centaines et des centaines de pages pour trouver ces renseignements.
Il y a eu une enquête sur un don de l'Alcan au Parti conservateur. Cette enquête a eu lieu parce que le Parti conservateur a par la suite exempté le projet Kemano II de l'examen prévu en vertu des lois fédérales sur l'évaluation environnementale. C'est le seul cas dont j'ai entendu parler, et l'enquête a été abandonnée.
Alors, peut-on établir un rapport clair? Non, mais je pense que nous pouvons améliorer le système de financement des campagnes afin d'encourager les partis à établir plus de liens avec les citoyens - qui, après tout, sont ceux qui les élisent - et ainsi le principe que nous défendons le jour des élections, à savoir le suffrage égalitaire s'appliquerait également entre les élections. Pourquoi est-ce que tous les quatre ou cinq ans tout le monde au Canada a la même influence sur le gouvernement - puisque chacun a un vote - mais qu'entre les élections nous permettons à des gens plus fortunés ou qui ont un accès plus facile ou leurs propres lobbyistes, d'exercer une plus grande influence? Je pense que c'est une norme démocratique assez basse et que nous pourrions relever la barre.
M. Epp: J'aimerais passer à mon troisième point. Puis-je?
Le coprésident (le sénateur Oliver): Avant que vous ne posiez votre question, est-ce que cela vous ennuierait beaucoup que le coprésident, M. Milliken, en pose quelques unes et ensuite je vous rendrai la parole?
M. Epp: C'est très bien.
Le coprésident (M. Milliken): J'aimerais discuter avec vous de certains éléments de la réponse que vous avez donnée à mon coprésident, le sénateur Oliver, au sujet de l'organisme que vous représentez. Vous avez dit que vous avez un conseil d'administration. Est-ce que le groupe «Démocratie en surveillance» est constitué en personne morale?
M. Conacher: Oui.
Le coprésident (M. Milliken): En vertu de quelle loi?
M. Conacher: La Loi sur les sociétés par actions.
Le coprésident (M. Milliken): À titre de société sans but lucratif?
M. Conacher: Oui.
Le coprésident (M. Milliken): Alors vous avez un conseil d'administration composé de trois personnes. Comment sont-elles choisies?
M. Conacher: Le conseil est composé des membres fondateurs. Nous n'avons pas encore assez de membres ni de ressources pour faire élire des membres au conseil d'administration ni pour avoir un processus de mise en candidature.
Le coprésident (M. Milliken): Est-ce que vous n'êtes pas tenus de tenir une assemblée annuelle des membres?
M. Conacher: Oui, mais pour le moment, nous avons des adeptes mais pas de membres.
Le coprésident (M. Milliken): Alors les trois directeurs sont les trois membres.
M. Conacher: C'est juste.
Le coprésident (M. Milliken): Alors ils se réélisent eux-mêmes à perpétuité.
M. Conacher: Eh bien, pas à perpétuité. Si nous réussissons à obtenir les ressources nécessaires, nous tiendrons des élections.
Le coprésident (M. Milliken): Mais vous devez recruter des membres avant de pouvoir tenir des élections.
M. Conacher: C'est juste et c'est pourquoi nous préconisons une case sur les déclarations d'impôt que les gens pourraient cocher. Nous pensons qu'il pourrait y avoir un groupe qui représenterait un pourcentage beaucoup plus important de Canadiens que tout autre organisme au Canada à l'heure actuelle. Nous trouverons également les ressources dans le système puisqu'il ne coûtera absolument rien pour lever des fonds. Nous aurons énormément de ressources et nous pourrons organiser des élections et avoir des délégués et un conseil d'administration élu dans tout le pays.
Le coprésident (M. Milliken): La société a-t-elle des employés?
M. Conacher: Non, je suis à contrat.
Le coprésident (M. Milliken): Vous travaillez à contrat pour la société à temps complet?
M. Conacher: Oui.
Le coprésident (M. Milliken): Êtes-vous un des administrateurs?
M. Conacher: Oui.
Le coprésident (M. Milliken): Qui sont les deux autres?
M. Conacher: Aaron Freeman et Craig Forcese.
Le coprésident (M. Milliken): Est-ce que l'un d'eux travaille à contrat?
M. Conacher: Non.
Le coprésident (M. Milliken): Avez-vous un bureau?
M. Conacher: Oui.
Le coprésident (M. Milliken): Où?
M. Conacher: Au no 1, rue Nicholas. Vous trouverez notre adresse complète sur la page titre de notre mémoire.
Le coprésident (M. Milliken): Je pense que c'est vrai. Je l'ai vue sur d'autres documents que vous avez mentionnés tout à l'heure et qui nous ont été remis.
Est-ce que vous dirigez le bureau?
M. Conacher: Oui, et j'essaie de me déléguer efficacement les tâches.
Le coprésident (M. Milliken): Vous voulez dire pour la préparation de ces documents. Merci.
La société a été constituée en 1993?
M. Conacher: Oui, en 1993.
Le coprésident (M. Milliken): Est-ce que vous exercez le droit en parallèle? Vous avez dit que vous êtes avocat.
M. Conacher: Non, je n'en ai pas les moyens. Bien des gens sont dans la même situation en raison de la prime à payer. C'est un autre scandale qui touche à l'éthique et qui fait l'objet d'une enquête à l'heure actuelle.
Le coprésident (M. Milliken): En réponse à mon coprésident, vous avez également mentionné que les principes de l'actuel code régissant la conduite des titulaires de charges publiques sont des principes qui d'après vous devraient se retrouver dans le code que nous rédigerons.
Vous ne semblez pas faire de lien entre ces principes et des règles précises qui pourraient servir de ligne directrice régissant la conduite. Y a-t-il une raison pour laquelle vous ne pensez pas qu'il soit important d'examiner d'abord les principes, ou pensez-vous que ce l'est? Dans l'affirmative, lorsque vous avez réfléchi à ce que vous alliez nous dire et aux suggestions que vous alliez nous faire ce soir, est-ce que vous vous êtes inspiré de ces principes pour formuler vos idées sur ce qui devrait être divulgué et sur ce qui devrait être permis ou interdit?
M. Conacher: Vous voulez savoir si je me suis inspiré des principes du code actuel?
Le coprésident (M. Milliken): Oui.
M. Conacher: Oui, nous avons examiné très attentivement les principes du code actuel, en pensant surtout à des cas comme l'affaire Dupuy et le voyage que certains députés ont effectué à Cuba. Je mentionne ces cas car il n'était pas clair d'après nous si le principe s'appliquait à tous les députés et dans toutes les circonstances.
Le coprésident (M. Milliken): La réponse ne fait aucun doute, c'est non. Les principes du code régissent la conduite des titulaires de charges publiques.
M. Conacher: Oui, mais l'expression «titulaire de charges publiques» est définie dans les parties II et III du code, mais pas du tout dans la partie I.
Comme je l'ai mentionné, parce que l'on trouve encore dans la Loi d'interprétation l'expression «fonctionnaire public» dans le Code criminel, «fonctionnaire» et dans le code lui-même l'expression «titulaire d'une charge publique» les tribunaux ont eu du mal à s'y retrouver; ce fut aussi le cas du comité mixte spécial de 1992 et je pense que cela doit être éclairci.
Le coprésident (M. Milliken): Si vous me permettez de vous la réciter, la première partie dit:
- Le présent code a pour objet d'accroître la confiance du public dans l'intégrité des titulaires de
charge publique et dans le processus de prise de décisions du gouvernement...
M. Conacher: La partie II dit:
- Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie et à l'annexe, «titulaire d'une
charge publique»...
- et on trouve alors une liste de catégories de gens.
Le coprésident (M. Milliken): Je ne soutiens pas que cela ne devrait pas être précisé. Je ne crois pas cependant qu'on ait jamais suggéré que cela s'applique à tous les parlementaires.
M. Conacher: Eh bien je dois dire que c'est un peu déroutant, parce que dans le document intitulé Pour la création d'emplois pour la relance économique, le gouvernement promettait ce qui suit:
- ...nous rédigerons un code de déontologie à l'intention des ministres, des sénateurs et députés,
des personnels politiques et des fonctionnaires pour bien encadrer leurs rapports avec les
groupes de pression.
M. Conacher: Le comité est en train d'élaborer un code d'éthique pour guider les ministres?
Le coprésident (M. Milliken): Non, un code pour les députés et sénateurs, notamment.
M. Conacher: C'est pourquoi je dis que c'est déroutant, parce que dans le document intitulé Pour la création d'emplois pour la relance économique, on parle d'un code - au singulier - pour tous les groupes mentionnés après. Or maintenant, nous allons avoir plus d'un code pour des groupes différents.
Je répète que nous appuierions la solution proposée par le Comité mixte spécial en 1992, qui a été codifiée ensuite dans un instrument législatif.
Le coprésident (M. Milliken): Très bien, mais vous n'avez pas répondu à ma question. Je vous ai demandé si en préparant vos remarques de ce soir, en suggérant des lignes directrices quant aux choses à faire et à ne pas faire, vous vous étiez fondé sur ces principes, qui, selon vous, convenaient aux députés?
M. Conacher: C'est notre point de départ, en effet.
Le coprésident (M. Milliken): Les principes constituaient votre point de départ?
M. Conacher: Oui, bien sûr.
Le coprésident (M. Milliken): Oh, vous les approuvez donc complètement?
M. Conacher: Oui.
Le coprésident (M. Milliken): Vous n'en ajoutiez pas d'autres à la liste?
M. Conacher: Non, ces 10 principes nous conviennent. Je pense que le principe ajouté en juin 1994, selon lequel les titulaires de charge publique ne doivent tenir compte que du bien-fondé d'une affaire pour prendre des décisions, était une excellente addition.
Le coprésident (M. Milliken): Bien.
M. Conacher: Ces 10 principes sont donc excellents, mais ils ne sont qu'un début.
Le coprésident (M. Milliken): Merci.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Monsieur Epp, vous pouvez poser la dernière question.
M. Epp: En fait, j'en ai deux, mais elles sont très brèves.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Bien.
M. Epp: Ma première question porte sur les cadeaux. Vous avez dit qu'à votre avis, il faudrait probablement imposer des limites aux cadeaux qu'on peut recevoir. J'ai pris en note le mot «interdiction» en ce qui concerne les cadeaux, et «divulgation complète».
Comment entendez-vous exercer une surveillance à cet égard et faire respecter de telles règles? Je suis un simple député d'un tiers parti et je constate qu'en dépit de cette position, des gens viennent me dire qu'ils veulent me parler de quelques chose et m'invitent à déjeuner. Il s'agit de gens de ma circonscription, car je n'ai pas l'habitude d'inviter des lobbyistes. J'accepte l'invitation, nous déjeunons, et puis ils insistent pour payer l'addition. Je peux refuser énergiquement, et je le fais parfois, mais ils insistent vraiment pour payer.
Quelques agriculteurs de ma circonscription l'ont fait dernièrement. Ils voulaient me parler de la production laitière et de tout ce qui se passe actuellement à cause de l'ALÉNA, notamment. Ces gens pensaient seulement respecter les règles de l'hospitalité, ils m'avaient invité, ils voulaient déjeuner avec moi, accaparer mon attention, obtenir des renseignements, et ils trouvaient normal de payer l'addition. C'était seulement de la courtoisie. Je pense que ce repas coûtait probablement 7$ ou 8$, mais ils s'ajoutent les uns aux autres.
Dois-je garder une liste de tout cela?
Le coprésident (M. Milliken): Certainement.
M. Epp: Le faites-vous?
M. Conacher: Il est seulement interdit d'accepter un cadeau ou plusieurs cadeaux dont la valeur totale dépasse 50$ d'une même personne ou d'un même groupe dans une année civile.
M. Epp: Mais la même personne peut m'inviter à nouveau et si je ne prends pas note de tout cela, je ne saurais pas quand j'ai franchi ce seuil.
M. Conacher: Vous devez tout inscrire, si l'on impose un seuil de 200$, en ce qui concerne la divulgation. Quel que soit le code qu'on rédigera, j'espère qu'on fixera tout au moins un seuil, et vous devrez tenir un compte détaillé, afin que lorsque vous franchirez ce seuil, vous puissiez le divulguer au registraire.
M. Epp: J'approuve certainement le principe de la chose. Je me pose seulement des question au sujet des détails administratifs.
M. Conacher: Eh bien, je pense que si l'on a un conseiller en éthique indépendant et une disposition pour protéger les dénonciateurs, et si l'on permet à tout citoyen de déposer une plainte auprès du conseiller, on aura alors un mécanisme d'application qui vous encourager à vous auto-réglementer, car sinon, vous pourriez faire face à une plainte d'une personne ayant découvert que vous aviez enfreint un règlement.
M. Epp: Je répète que je suis un néophyte, mais j'ai rapidement appris beaucoup de choses. Je n'avais jamais pensé que les députés étaient tellement recherchés comme conférenciers, par exemple. À plusieurs reprises - et je suis persuadé que c'est votre cas également - j'ai été invité à prendre la parole quelque part et à la fin, on m'a remis une enveloppe et j'ai accepté la première. Je pensais que c'était une gentille note de remerciement, comme on pourrait s'y attendre. Rendu à la maison, j'ai découvert qu'elle contenait un chèque de 100$. J'ai donc dû le retourner, je l'ai refusé. Je ne veux pas ce genre de choses.
Cela m'est arrivé à plusieurs reprises depuis lors, mais maintenant, je demande ce que contient l'enveloppe et je la refuse simplement. Mais ce genre de choses se produit fréquemment. C'est plus que du simple lobbying, parce que ces gens peuvent obtenir très peu de moi pour le moment. Ils pensent peut-être que je serai ministre la prochaine fois, mais ce n'est pas le cas pour le moment.
M. Conacher: Oui, eh bien, nous estimons que le principe général du vote égalitaire s'applique le jour des élections. Pourquoi toutes les autres règles ne devraient pas appliquer ce principe entre les élections?
M. Epp: Je suis d'accord.
M. Conacher: Pourquoi pouvons-nous dire que nous sommes une démocratie?
M. Epp: Mais évidemment, lorsqu'un député à 100 000 électeurs, il lui est absolument impossible de les traiter tous également entre les élections.
M. Conacher: Non, mais au moins, on ne permettra pas que l'argent soit utilisé par quelques-uns pour obtenir un traitement de faveur.
M. Epp: Non, c'est exact.
Ma dernière question porte sur les sanctions. Évidemment, une loi ou un ensemble de lignes directrices n'est pas utile à moins que des infractions n'entraînent des conséquences. Vous n'avez vraiment rien dit au sujet de sanctions ou de mesures à prendre, si des députés et des sénateurs enfreignent les règles établies dans ce code d'éthique. Y avez-vous réfléchi? Quelles sont vos idées à ce sujet?
M. Conacher: Je répète que nous approuvons ce que le Comité mixte spécial dit au sujet des sanctions et nous approuvons généralement le rapport.
M. Epp: Parlez-vous du rapport de 1992?
M. Conacher: Oui. Dans notre mémoire, lorsque nous ne proposons pas quelque chose de précis qui s'écarte du rapport de 1992, cela signifie que nous appuyons le rapport de 1992.
L'élément important en ce qui concerne les sanctions est le fait qu'il y aura un conseiller en éthique indépendant qui aura le droit de faire enquête et de recommander au Parlement de prendre des sanctions. Les sanctions énumérées dans le rapport de 1992 sont les suivantes: une réprimande, la restitution ou le paiement d'une indemnité, la suspension de la Chambre, avec ou sans traitement, pour une période précise, ou encore que le siège du député soit déclaré vacant ou que le sénateur perde le droit d'occuper un siège au Sénat.
Ces quatre niveaux de sanctions me semblent suffisants pour permettre plusieurs combinaisons et variations différentes en matière de sanctions. Nous les appuyons donc.
M. Epp: Bon, c'est bien. Je vous remercie.
En terminant, je tiens à vous dire que je suis certainement d'accord, en principe, avec vous sur presque tout ce que vous avez dit. Je regarde seulement la question du point de vue de son application pratique, ainsi que de la surveillance afin de s'assurer qu'on respecte ces règles. En particulier, et j'ignore qui y a d'abord pensé, vous ou moi, mais votre idée de l'indépendance du conseiller en éthique est de la plus haute importance.
M. Conacher: Eh bien, ce n'est pas Paul Martin qui y a pensé le premier. Il s'agissait d'une recommandation contenue dans le projet de loi C-43. Il l'a appuyée à titre de député de l'Opposition et maintenant qu'il est ministre fédéral, il semble tolérer qu'il n'y ait pas de conseillers en éthique indépendants. La promesse faite dans le document intitulé Pour la création d'emplois pour la relance économique était très claire et elle devrait être tenue.
M. Epp: La seule chose partisane que je dirai est que le gouvernement résiste toujours fermement chaque fois que nous le prions de nommer un conseiller en éthique indépendant, mais nous continuerons de le presser de le faire.
M. Conacher: Eh bien, si c'est assez bon pour les lobbyistes, c'est assez bon pour les parlementaires.
Mme Catterall: Monsieur Milliken vous a posé des questions notamment au sujet de vos membres. Il semble que vous avez un groupe d'adeptes, mais en réalité, le nombre de vos membres est très limité et ils constituent aussi l'exécutif. Ai-je bien compris?
M. Conacher: C'est exact.
Mme Catterall: Il y a combien de femmes parmi vos membres ou vos partisans?
M. Conacher: Il n'y en a pas parmi les membres de notre conseil. Nous en avons deux au sein de notre comité consultatif - Marilou McPhedran et Lyse Blanchard, qui est devenue tout récemment directrice administrative de CUSO - et pour ce qui est de nos membres, je n'ai pas vraiment calculé combien il y avait de femmes parmi eux.
Mme Catterall: Bien. Je veux seulement savoir ce qui vous fait penser qu'un parlementaire, moi y compris, accorderait plus d'attention à quelqu'un qui accapare deux heures de notre temps en insistant pour déjeuner avec nous, qu'à quelqu'un qu'on rencontre dans notre bureau ou dans son salon pendant une heure.
M. Conacher: Rien de ce que j'ai dit ce soir ne me semble indiquer que nous croyons cela.
Mme Catterall: Dans ce cas, pourquoi voulez-vous savoir qui m'invite à déjeuner, et non pas qui prend seulement rendez-vous avec moi?
M. Conacher: Nous voulons seulement que l'argent n'entre plus en jeu.
Mme Catterall: Vous insinuez que le fait que des gens paient mon déjeuner, parce que c'est l'heure qui me convient pour les rencontrer, peut influencer mon opinion plus que l'heure passée avec un électeur dans mon bureau ou dans sa maison?
M. Conacher: Non. L'interdiction que nous préconisons en ce qui concerne les cadeaux ne vise pas seulement les déjeuners. Nous voulons empêcher quelqu'un qui peut se permettre de vous faire un cadeau de 1 000$ de le faire.
Mme Catterall: Non, vous avez dit 50$.
M. Conacher: En effet. On interdirait l'acceptation d'un cadeau d'une valeur supérieure à 50$ de la part d'une même personne dans une année civile.
Mme Catterall: Mais vous insinuez que si je déjeune avec quelqu'un, son opinion m'influencera plus que si je rencontre cette même personne à un autre moment?
M. Conacher: Non. Je dis que quelqu'un qui pourrait vous inviter à déjeuner une fois par semaine pendant un an aurait plus d'influence que quelqu'un qui peut se permettre de vous inviter à déjeuner une seule fois.
Mme Catterall: Ou que quelqu'un que je peux rencontrer une fois par semaine pendant un an? Insinuez-vous qu'il y a une différence qualitative? Je vous dis franchement que la chose qui a le plus de valeur pour moi, c'est mon temps.
M. Conacher: Il y a une différence qualitative. Ce n'est peut-être pas votre cas, et je suis heureux de vous l'entendre dire. Mais si un député fait comprendre directement ou indirectement qu'il apprécie beaucoup être invité à déjeuner une fois par semaine, et que si la personne qui l'invite à déjeuner paie régulièrement elle continuera d'avoir accès à ce député, c'est le genre de situation que nous essayons d'empêcher.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Madame Catterall, puis-je poser une question complémentaire à la vôtre?
Mme Catterall: Certainement, car cela me ramène à mon autre question. Le témoin comprend-il vraiment comment se passent les journées et semaines d'un parlementaire? Je vous dis franchement que le bien le plus précieux pour moi, c'est le temps, et non pas l'argent dans mon portefeuille.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Monsieur Conacher, disons que Mme Catterall va voir dîner. électeurs et frappe à une porte vers l'heure du dîner. Ses électeurs lui disent qu'ils ont hâte de lui parler d'un certain nombre de questions d'intérêt public et l'invitent donc à entrer, mais comme ils sont sur le point de dîner, ils l'invitent à dîner avec eux. Elle dîne avec eux, et on lui sert un steak. Aux termes de votre proposition, serait-elle tenue d'en évaluer le coût et de l'inclure dans la limite de 50$?
M. Conacher: Oui.
Mme Catterall: Et vous croyez vraiment que mon opinion peut être influencée par le fait que je me trouve chez des électeurs à l'heure du dîner plutôt qu'à un autre moment?
M. Conacher: Non, pas si cela se produit seulement une fois. Nous voulons empêcher que les gens qui ont de l'argent à dépenser n'aient plus d'influence que ceux qui n'en ont pas.
Mme Catterall: Qu'est-ce qui vous fait penser qu'ils ont plus d'influence? C'est ce que j'essaie de comprendre.
M. Conacher: Il est certainement possible, ou du moins la possibilité est beaucoup plus grande, que si quelqu'un peut dépenser 10 000$ pour vous dans une année, il ait plus d'influence que quelqu'un qui peut dépenser seulement 25$.
Mme Catterall: Serait-ce vrai dans votre cas? Quelqu'un pourrait-il acheter votre opinion?
M. Conacher: Je ne parle pas d'un parlementaire en particulier, mais les règles visent à empêcher des situations où l'on pourrait indûment...
Mme Catterall: Mais vous vous fondez sur une hypothèse que je conteste, je suppose, et je ne suis pas sûre d'où vient cette hypothèse...
M. Conacher: Elle n'est pas de moi.
Ekos Research a fait un sondage auprès de 2 400 Canadiens en février et en novembre 1994: 69 p. 100 des Canadiens estiment que les règles déontologiques se sont relâchées considérablement au cours de la dernière décennie au gouvernement fédéral; 44 p. 100 des Canadiens ont perdu toute confiance dans notre régime actuel de gouvernement; 33 p. 100 des Canadiens seraient fiers de voir leur enfant devenir un jour politicien; 59 p. 100 des Canadiens ne sont pas d'accord pour dire qu'on impose aux politiciens canadiens des normes excessivement élevées qu'il est presque impossible de respecter.
Mme Catterall: Rien de tout cela ne correspond aux arguments que vous avez formulés, cependant.
M. Conacher: En ce qui concerne les avantages financiers, 77 p. 100 des Canadiens sont d'accord pour dire que trop de gens cherchent à obtenir une charge publique afin d'en retirer un avantage financier.
Je ne dis pas que je représente les Canadiens, mais il s'agit des résultats d'un sondage effectué auprès de 2 400 Canadiens et commandité par le gouvernement. Si vous ne voulez pas écouter les résultats d'un sondage fait par le gouvernement et si vous ne voulez pas m'écouter parce que vous estimez que je ne représente pas vraiment les Canadiens, je vous engage à faire deux choses. Premièrement, exhortez le ministre des Finances à ajouter une case au prochain formulaire d'impôt afin qu'on puisse organiser un groupe largement représentatif et démocratiquement structuré pour surveiller l'application d'un code de déontologie dans les dépenses du gouvernement. Deuxièmement, commandez un sondage dans votre propre circonscription afin de voir si vos électeurs sont du même avis que la plupart des Canadiens, d'après le sondage d'Ekos Research.
Mme Catterall: Je ne mets pas en doute les résultats du sondage, mais je rencontre des dizaines d'électeurs toutes les semaines et des milliers chaque année, et, franchement, je crois savoir assez bien ce que mes électeurs pensent. Je mets cependant en doute l'efficacité des solutions que vous proposez.
M. Conacher: On peut toujours en discuter. Nous préférons probablement une interdiction nette, mais comme vous le verrez dans notre mémoire, si vous n'êtes pas d'accord, abaissez au moins le niveau à partir duquel la divulgation est obligatoire et imposez l'interdiction aux lobbyistes, qui sont les plus aptes à utiliser l'argent pour obtenir de l'influence. En outre, assurez-vous que le registre des cadeaux est accessible au public sur les réseaux informatiques et sur disques informatiques dans les bibliothèques publiques du pays.
Mme Catterall: Autrement dit, mettre ces renseignements à la disposition des personnes qui ont les moyens voulus pour avoir un tel accès?
M. Conacher: Non, j'ai également dit qu'il faut offrir ces renseignements dans les bibliothèques du pays. Les services dans les bibliothèques publiques, à l'exception de la photocopie, sont habituellement gratuits. C'est pourquoi nous recommandons que les bibliothèques du pays soient les dépositaires de ces renseignements, comme l'a recommandé la Direction de l'enregistrement des lobbyistes à propos du registre des lobbyistes. Il existe un projet de règlement à ce sujet.
Le coprésident (le sénateur Oliver): Monsieur Conacher, je tiens à vous remercier beaucoup au nom des membres du comité. Vous les avez certainement stimulés, et nous tiendrons sérieusement compte de votre mémoire lorsqu'il aura été distribué et que nous aurons eu l'occasion de le lire.
Je tiens à rappeler aux membres du comité que la prochaine réunion se tiendra le mercredi 18 octobre, à 16h30, dans cette salle. Je rappelle également aux membres du comité que lundi prochain la réunion commencera à 15h30, et non pas à 19h30. Vous recevrez tous un avis dans ce sens.
Merci beaucoup. La séance est levée.