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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 23 octobre 1996

.1814

[Traduction]

Le président: Bonsoir. Nous nous excusons d'être en retard. Comme vous le savez, il y avait un vote à la chambre. Le temps perdu sera compensé. Nous commençons avec 15 minutes de retard, et par conséquent, nous prolongerons la séance de 15 minutes.

[Français]

Je voudrais souhaiter la bienvenue au

[Traduction]

Canadian Publishers' Council, dont la délégation est composée de M. Gary Rodrigues, président;M. Fred Wardle, président du Comité de la propriété intellectuelle; Mme Julia Woods, présidente, Division des éditeurs de publications professionnelles; M. Ron Munro, président, Division des éditeurs de publications postsecondaires; et Mme Jacqueline Hushion, directrice administrative.

La parole est à monsieur Rodrigues.

M. Gary Rodrigues (président, Canadian Publishers' Council; premier vice-président des Publications, Carswell Thomson Professional Publishing): Je vous remercie, monsieur Lincoln.

Nous sommes heureux d'avoir la possibilité de vous rencontrer et de discuter des modifications de la Loi sur le droit d'auteur proposées dans le projet de loi C-32.

.1815

Le Canadian Publishers' Council est une association professionnelle d'éditeurs fondée en 1910. Nos membres emploient plus de 2 300 Canadiens et réalisent 70 p. 100 des ventes nationales de livres canadiens et importés publiés en anglais.

L'an dernier, nos membres ont payé 72 millions de dollars aux fabricants de livres établis au Canada. Ils ont publié plus de 1 000 nouveaux titres canadiens dans quatre catégories générales: romans et autres livres d'intérêt général; ouvrages professionnels et de référence; publications pédagogiques de niveau primaire et secondaire; et manuels postsecondaires. Nos membres ont versé plus de 20 millions de dollars en droits d'auteur à des auteurs canadiens. Vous conviendrez certainement que les membres de notre association occupent une position importante dans la communauté visée par les droits d'auteur.

Nos membres sont généralement satisfaits du projet de loi et de la politique gouvernementale qu'il reflète. En particulier, les dispositions sur les importations parallèles sont bien accueillies, car elles sont vues comme des mesures qui sauront assurer le respect de leurs ententes relatives aux droits d'auteur avec d'autres entreprises dont ils sont les représentants et les distributeurs exclusifs au Canada.

Les dispositions proposées concernant les procédures de recours sont aussi bien accueillies, et l'inclusion implicite de recours légaux donnera aux créateurs une plus grande marge de manoeuvre pour obtenir gain de cause en cas de violation patente de leurs droits. Même si nous préférons d'autres moyens que les exceptions, nous reconnaissons que certaines réserves limitées peuvent être appropriées.

Dans l'ensemble, nos membres sont favorables et participent à la gestion collective des droits d'auteur, et ils admettent que, de façon générale, les permis collectifs sont une alternative logique aux exceptions. Nous sommes heureux que le projet de loi C-32 reconnaisse le rôle important des sociétés collectives. Dans notre mémoire, nous avons souligné les exceptions proposées qui, par inadvertance, dépassent le cadre de la politique que le projet de loi est censé refléter.

Nous admettons également que les dispositions concernant les activités équitables n'ont pas besoin d'être élargies et d'inclure des directives générales. On ne reconnaît à personne au Canada un droit quantifiable de reproduire certaines parties spécifiques d'un ouvrage. En outre, la jurisprudence internationale a maintes fois statué que le droit absolu de reproduction n'existait pas, même dans les pays où les activités équitables, quel que soit le nom qu'on leur donne, sont mieux précisées.

Mes collaborateurs vont maintenant se joindre à moi pour aborder quelques-unes des autres questions soulevées dans notre mémoire. M. Wardle va vous parler des exceptions particulières prévues dans le projet de loi.

M. Fred Wardle (président, Comité de la propriété intellectuelle, Canadian Publishers' Council; président-directeur général, Canadian Almanac & Directory Publishing Co. Ltd.): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité.

Les membres du Canadian Publishers' Council craignent que l'on donne une interprétation trop large à l'expression «exercice scolaire». L'exception limitée qui pourrait s'appliquer aux examens et aux contrôles ne l'est plus quand on inclut les «exercices scolaires». Les membres de l'association s'inquiètent aussi des répercussions des mots «support» et «qualité» que l'on trouve dans la définition de «l'acceptabilité» du matériel.

Il faut considérer ce qui est «raisonnable». Il est important que tous les Canadiens aient accès à l'éducation dans toutes les régions. Toutefois, nous nous inquiétons du fait que les propositions puissent être interprétées de manière à inclure la permission de transmettre par voie électronique du matériel sous droit d'auteur vers des sites éloignés, et que le mot «locaux» puisse même être interprété de façon à inclure, entre autres, des résidences privées.

Aucune des clauses qui portent sur les activités équitables ou les exceptions ne devrait être interprétée comme s'appliquant aux copies électroniques ou au stockage et à la transmission de telles copies.

Nous reconnaissons que, dans le secteur de l'éducation, les paramètres et l'environnement changent, et que les besoins des éducateurs évoluent aussi. Nous avons noté les références à «l'intérêt public» faites par plusieurs groupes au cours du débat actuel concernant les droits d'auteur et les réformes d'ordre technologique. Nous croyons savoir que la phase trois de la réforme sera consacrée à un examen en profondeur de la question de la technologie.

Entre-temps, nous sommes prêts à engager un dialogue proactif avec les représentants des groupes qui utilisent des matériaux sous droits d'auteur, et à discuter des nouvelles technologies médiatiques, de la numérisation, du stockage et de la retransmission de données électroniques et de l'octroi de permis. Nos membres publient sous format imprimé et sous format électronique et ils sont prêts à engager de tels pourparlers.

Les exceptions se rapportant aux bibliothèques et aux services d'archives nous préoccupent aussi. Les membres du Canadian Publishers' Council reconnaissent qu'il faut conserver des collections représentatives et complètes, mais les moyens utilisés à cette fin doivent s'inscrire dans le contexte de la gestion et non de l'enrichissement des collections.

.1820

Nos membres savent quel rôle jouent les bibliothèques qui doivent répondre aux besoins d'information des Canadiens, et les appuient totalement. Nous avons recommandé des modifications qui s'inscrivent dans cette perspective tout en assurant le respect du travail des créateurs. Nos membres craignent que les services de transmission de documents puissent éventuellement se prévaloir de ces exceptions.

Nous convenons que les reproductions faites par les bibliothèques d'entreprises ne devraient pas être exemptées des dispositions du projet de loi C-32. Nous sommes inquiets de constater que l'on n'interdit pas les copies multiples ou systématiques, et que les institutions publiques n'ont qu'une responsabilité limitée au cas où des copies illégales sont faites.

Encore une fois, le plus souvent, la solution serait l'octroi de permis. Un permis établit des paramètres clairs, ce qui devrait rassurer les bibliothèques et leurs usagers ainsi que les créateurs. Nous ne souhaitons pas entraver le fonctionnement des bibliothèques, nous voulons plutôt faire en sorte qu'elles s'acquittent de leur mandat dans la légalité.

Je voudrais maintenant passer la parole à Mme Hushion qui vous parlera des dispositions visant les importations parallèles.

Mme Jacqueline Hushion (directrice administrative, Canadian Publishers' Council): Comme l'a déclaré M. Rodrigues dans la première partie de nos remarques préliminaires, nos membres sont enchantés que l'on propose ces mesures. Ils considèrent qu'avec quelques modifications, elles permettront d'atteindre plus facilement les objectifs des politiques.

Selon nous, les propositions relatives aux avis sont irréalistes dans leur forme actuelle. Les avis devraient être définis et précisés dans les règlements. Il serait alors possible d'en réviser et d'en modifier le contenu au besoin, avec l'approbation des fournisseurs et de leurs clients. Nous considérons qu'il n'est pas approprié de définir une méthodologie visant l'application constructive des avis dans le cadre de la loi.

Nous sommes en faveur de donner libre accès aux Canadiens au marché du livre d'occasion. Une exception, à l'alinéa 45(1)a), prévoit déjà qu'ils peuvent importer des livres de tous genres. Le principe de l'accès aux livres neufs et d'occasion est acquis.

Il y a cependant une deuxième exception qui permettrait l'importation sans restrictions de livres d'occasion, et qui amoindrit incidemment la portée générale des mesures et sape les ententes concernant les droits d'auteur passées par des distributeurs exclusifs. L'énoncé, dans cette seconde exception relative aux livres d'occasion, à l'alinéa 45(1)e), crée une échappatoire permettant l'importation commerciale en grande quantité de manuels d'occasion en provenance des États-unis pour fournir les collèges et les universités.

Nos membres ne sont pas contre la vente de manuels d'occasion sur les campus canadiens, à condition que ces manuels aient été publiés au Canada. Ils comprennent que les étudiants s'efforcent de se procurer des manuels moins chers. Mais les manuels d'occasion importés sont en concurrence directe avec les nouveaux textes équivalents vendus par les distributeurs exclusifs canadiens. Les éditeurs canadiens de manuels postsecondaires investissent directement les revenus de leur commerce de distribution dans la publication de textes par des auteurs canadiens. Cet investissement disparaîtra si l'alinéa 45(1)e) est conservé.

Le prix d'un manuel d'occasion importé est généralement inférieur de 25 à 35 p. 100 au prix demandé par les libraires canadiens pour le même livre, mais neuf. Les libraires vendent souvent les exemplaires neufs à un prix de 10 à 15 p. 100 supérieur à celui suggéré par l'éditeur. Le maintien de cette exception risque de se solder par la disparition d'un secteur de l'édition canadienne. Pour nos membres, il faut absolument que vous reconsidériez cette exception en vue de l'éliminer.

Les membres de l'association sont fermement en faveur de l'élaboration de règlements sur les importations parallèles, règlements qui sauront répondre aux besoins de leurs clients et des consommateurs. S'il est démontré que l'éditeur canadien ne peut satisfaire aux critères de service acceptés par l'industrie, le client sera libre de se procurer les livres ailleurs.

.1825

Le grand principe à la base de ces dispositions est que le distributeur canadien doit être le premier à qui l'on offre de remplir la commande. Les éditeurs ont déjà commencé à investir dans des systèmes qui amélioreront l'efficacité du mode de distribution des livres. Il est dans l'intérêt des éditeurs d'offrir à leurs clients un mode de livraison rapide et de satisfaire, en définitive, le consommateur canadien. Nous croyons que ces dispositions favoriseront la croissance de l'infrastructure de notre industrie.

Pour résumer nos vues sur les importations parallèles, disons que les dispositions concernant les avis devraient faire partie des règlements; que l'exception inutile qui permettrait l'importation en gros de manuels devrait être sérieusement réexaminée; et que nous nous engageons sans réserve à faire en sorte que ces mesures ne posent pas de problèmes à nos clients ni aux consommateurs canadiens.

Nous avons choisi de centrer notre intervention exclusivement sur les exceptions et sur les dispositions se rapportant aux importations parallèles. Notre mémoire aborde de nombreux autres points que nous n'avons pas mentionnés. Nous sommes toutefois prêts à répondre aux questions qui s'y rapportent.

Merci de votre attention.

Le président: Je vous remercie.

Monsieur Leroux.

[Français]

M. Leroux (Richmond - Wolfe): Pour ne pas être impoli, je voudrais d'abord avertir le groupe suivant que je devrai m'absenter pour une réunion importante du caucus. J'ai lu leur mémoire et je vais poser un certain nombre de questions qui vont regrouper les mêmes préoccupations.

D'entrée de jeu, je voudrais vous dire qu'on croit comme vous qu'il est important d'adopter ce projet de loi. On partage avec vous cet important moment qui se présente à nous de ratifier et d'entériner un projet de loi important.

Je vous remercie pour votre mémoire, qui parle également des préoccupations, en ce qui a trait aux exceptions, d'autres représentants des ayants droit et de gens qui sont concernés par les dispositions relatives aux droits voisins.

J'aimerais d'abord entendre votre point de vue sur cette dimension d'un projet de loi qui, finalement, est présenté avec un pan très large d'exceptions. Que ce soit pour les droits d'auteur, que ce soit dans votre champ ou dans celui des droits voisins, ce projet de loi comporte énormément d'exceptions, et les gens nous en font prendre conscience.

N'avez-vous pas l'impression que ce projet de loi, par cette façon d'approcher la reconnaissance des droits, envoie des messages qui font que, dans notre société, les grandes institutions n'ont pas à se préoccuper des droits d'auteur parce que la loi va les en exempter? N'y a-t-il pas dans ce projet de loi un message qui leur dit, notamment en ce qui a trait aux collectifs de gestion ou aux regroupements déjà organisés pour faire de la négociation, qu'il ne leur est plus nécessaire d'être représentés et de négocier leurs droits? Avez-vous l'impression que ce projet de loi lance de tels messages?

[Traduction]

Mme Hushion: En fait, nous avons mentionné nos préoccupations dans notre mémoire et, dans une certaine mesure, dans nos remarques préliminaires. Nous sommes effectivement d'avis que l'on peut donner une trop large interprétation à certaines exceptions. Nous craignons que certaines d'entre elles soient interprétées de façon beaucoup plus laxiste qu'elles ne le sont en réalité.

Nous avons aussi eu de nombreuses discussions, au sein de notre association, au sujet des exceptions. Nous sommes, ne l'oublions pas, en 1996. Nous allons bientôt entrer dans le prochain millénaire, et nous reconnaissons que la société évolue. Il serait certainement inopportun de notre part de prétendre que dans une classe, un enseignant ne devrait pas pouvoir copier un vers sur ce que nous appelons au Canada un tableau à «essuyage à sec».

M. Rodrigues: J'ajouterais que nous avons apprécié vos observations et que nous approuvons totalement votre ligne de pensée. Cependant, nous avons tenté d'adopter une approche réaliste dans notre réponse à ce projet de loi pour essayer de le parfaire, de le focaliser, et de le rendre moins hostile à nos intérêts.

.1830

Mais si vous étiez le seul législateur, et que vous exprimiez ces points de vue dans le texte législatif, il va de soi que nous l'appuierions. Nous voulons nous montrer réalistes et coopératifs, reconnaître les choses comme elles sont, être constructifs et faire en sorte que tout se passe bien.

M. Wardle: Vous avez mentionné spécifiquement les institutions, et vous avez dit qu'avec ce projet de loi, il leur serait facile d'ignorer le droit d'auteur. Je pense que c'est la raison pour laquelle, à plusieurs reprises dans notre critique du projet de loi, nous avons dit que l'octroi de licences est un concept très important, et que nous sommes en faveur d'inclure une disposition à cet effet dans les parties du projet de loi qui risquent d'être mal interprétées.

[Français]

M. Leroux: J'apprécie la réponse que vous avez donnée. Elle exprime votre préoccupation majeure en ce qui a trait aux exceptions, mais vous exprimez aussi votre volonté d'être positifs et d'essayer de travailler avec ce projet de loi. L'objectif ultime qu'on poursuit est son adoption.

J'aimerais que vous me parliez de certains autres aspects. Entre autres, en ce qui a trait aux exceptions, vous parlez de l'importation limitée de livres d'occasion et de l'expression «exercices scolaires» que vous voudriez voir modifiée ou retirée. Vous parlez des copies stockées ou transmises par voie électronique, qui font appel à la technologie actuelle et à d'autres qui viendront.

J'aimerais que vous nous parliez de ces aspects-là. Concrètement, comment cela fonctionne-t-il?

J'aimerais que vous me parliez aussi d'une disposition que vous identifiez comme absente, qui porterait sur les copies multiples systématiques. Vous identifiez très bien cela. Comme c'est absent, vous voudriez qu'on introduise une mesure pour interdire ces copies-là.

Finalement, j'aimerais que vous nous parliez d'une façon plus détaillée et précise de ce fameux avis écrit qui semble être inopérant ou inopérable, celui qu'il faut donner pour interdire l'importation d'éditions étrangères.

Avez-vous pris des notes? Je vais donc vous laisser répondre à ces questions. Je pense qu'on travaille ensemble correctement là-dessus.

[Traduction]

Mme Hushion: Il vaudrait peut-être mieux commencer par votre dernière question et remonter en arrière.

Pour ce qui est des avis, selon le projet de loi, il faudrait que chaque éditeur qui a des fonctions d'agent et qui représente des titres notifie chacun de ses clients qu'il est le distributeur exclusif, titre par titre.

Julia Woods peut vous répondre et vous dire quel fardeau cela représenterait pour sa société.

Mme Julia Woods (présidente, Division des éditeurs de publications professionnelles, Canadian Publishers' Council): Le problème vient de ce qu'un éditeur distribue, en moyenne, de 3 000 à 4 000 titres. Par conséquent, si la notification devait être donnée titre par titre, cela s'avérerait très lourd, non seulement pour l'éditeur, mais également pour le libraire ou le bibliothécaire qui reçoit l'information et qui doit la gérer.

Nous avons proposé que l'on se serve des instruments qui sont déjà en place: les catalogues envoyés aux libraires et aux bibliothécaires chaque saison; les représentants de commerce qui visitent cette clientèle; la CTA, le système de commande électronique de livres et de documents; et Books in Print, qu'il s'agisse de la version imprimée ou de la version électronique. C'est ce que nous suggérons au lieu d'une notification titre par titre.

Donc généralement, au Canada, quand un éditeur en distribue un autre, il distribue toute sa gamme de produits. Ce serait donc à titre d'exception que l'on dirait, en fait, en l'occurrence, que tel titre de St. Martin's Press n'est pas distribué par McClelland and Stewart, mais par Stoddart.

Mme Hushion: J'aimerais demander à Ron Munro de répondre à l'autre point que vous avez soulevé, à savoir l'importation des livres d'occasion et la raison pour laquelle cette exception, dans le cadre des dispositions sur les importations parallèles, fait tellement problème.

M. Ron Munro (président, Division des éditeurs de publications postsecondaires, Canadian Publishers' Council): Il s'agit d'un problème dans la mesure où cela sape au départ les principes du droit de distribution.

.1835

Comme nous l'avons déclaré, ce n'est pas la vente de livres d'occasion en tant que telle qui nous pose un problème, dans la mesure où ce sont des livres qui, au départ, ont été achetés au Canada. Il y a toutefois des importations massives de livres d'occasion, principalement des États-Unis. Ces pratiques sapent les perspectives de vente des ouvrages sur lesquels nous détenons des droits de distribution. Les revenus et toutes les sommes que nous retirons de ces ventes sont perdus pour nous, et ne peuvent donc être réinvestis dans notre entreprise d'édition. Nous en avons besoin.

Comme nous l'indiquons dans notre mémoire, nous utilisons naturellement la distribution de titres américains et anglais pour faire vivre de nombreuses parties prenantes du secteur de l'édition, qui sont très souvent marginales. Il est donc important que nous détenions le droit exclusif de vendre ces titres importés, et que notre activité ne soit pas sapée par l'importation massive de livres d'occasion.

Mme Hushion: Je voudrais ajouter un post-scriptum. L'exportateur de manuels ou de livres d'occasion installé à l'étranger ne contribue aucunement ni à la vie canadienne, ni à l'infrastructure de son industrie. Il ne paie pas d'impôt et il n'emploie personne au Canada. Il s'agit donc, avant tout, pour nous d'une question d'infrastructure.

Fred, auriez-vous l'obligeance de parler des copies systématiques.

M. Wardle: Là encore, il faudrait - c'est clair - octroyer des licences chaque fois que cela est possible, de manière à ce que personne ne puisse simplement ignorer le droit d'auteur. Selon nous, le projet de loi devrait dire de façon claire et nette que cela n'est pas permis par l'exception.

Quand on regarde les choses d'un peu plus près et que l'on voit les machines qui sont installées dans les établissements d'enseignement, les photocopieuses et ainsi de suite, nous pensons qu'il faut insister pour que des contrats de licence soient passés avec ces établissements, plutôt que de se limiter à l'envoi de simples avis qui n'engagent aucunement leur responsabilité, comme semble l'indiquer l'énoncé du projet de loi sous sa forme actuelle.

Mme Hushion: J'aimerais simplement répéter que les lois des États-Unis et du Royaume-Uni interdisent les copies multiples ou systématiques de cette nature.

[Français]

Le président: Avez-vous des questions, monsieur Leroux?

M. Leroux: Vous voulez que je la pose maintenant?

Le président: Oui.

M. Leroux: Dans votre mémoire, vous dites qu'il y a un conflit en puissance entre les politiques d'enregistrement de droits d'auteur appliquées depuis longtemps - vous dégagez ce principe-là - et les nouvelles politiques d'enregistrement visant l'accès aux oeuvres ou à un recours. Pouvez-vous nous parler davantage de cette position? Pouvez-vous l'illustrer? Quel est ce conflit potentiel que vous identifiez?

[Traduction]

Mme Hushion: Je ne crois pas que nous ayons dit qu'il y a un conflit entre les politiques d'enregistrement et les recours. Ce que nous avons dit, c'est que si l'éditeur, l'importateur de l'oeuvre, est réputé détenir un intérêt dans le droit d'auteur, il s'ensuit que l'incapacité de l'éditeur de se prévaloir du recours préétabli dans les cas de violation semblerait être en contradiction avec le fait que ledit éditeur peut détenir un intérêt dans le droit d'auteur en vertu d'un accord contractuel.

[Français]

M. Leroux: C'est là que vous voyez le conflit potentiel?

[Traduction]

Mme Hushion: C'est effectivement un des domaines où nous en voyons un.

Le président: Madame Phinney.

Mme Phinney (Hamilton Mountain): Merci, monsieur le président.

J'aimerais vous poser une question par curiosité. Disons qu'un livre vendu dans une librairie coûte 30 $. Combien touchent l'auteur et l'éditeur, en pourcentage? Y a-t-il d'autres parties prenantes qui touchent quoi que ce soit - par exemple, le libraire? J'ai une idée, mais je ne suis pas tout à fait sûre qu'elle est juste. Je pensais que c'était...

Mme Woods: Oui, mais presque sûre.

Mme Phinney: Oui, 10 p. 100 à l'auteur, 30 p. 100 à l'éditeur, et 10 p. 100 au libraire?

Mme Woods: Je vais reprendre depuis le début. Pour les titres publiés au Canada, disons que pour un livre de 30 $, l'auteur percevra entre 10 et 15 p. 100 du prix de catalogue. Donc, dans le cas d'un livre de 30 $, il recevra entre 10 et 15 p. 100 de ce montant.

Le libraire indépendant bénéficiera d'une remise d'environ 40 à 48 p. 100, tout dépendant de l'éditeur avec lequel il fait affaire. Il bénéficiera de cette remise sur le prix de catalogue. Donc pour un livre de 30 $, il paiera environ 17 $.

.1840

Mme Phinney: Par conséquent, le libraire touche la différence entre 17 $ et 30 $?

Mme Woods: C'est cela.

Mme Phinney: Donc vous, vous avez le reste?

Mme Woods: Nous accordons au libraire une remise de, disons, 40 p. 100. Nous versons une redevance à l'auteur en fonction du prix de catalogue...

Mme Phinney: Vous me faites travailler trop fort.

Mme Woods: ... de 30 $.

Mme Phinney: L'auteur reçoit entre 10 et 15 p. 100 des 30 $?

Mme Woods: Du prix de catalogue, par opposition au prix net du libraire.

Mme Phinney: Dites-moi simplement combien de dollars perçoit l'éditeur, et combien de dollars le vendeur gagne sur un livre de 30 $.

Mme Woods: À quoi correspond une remise de 40 p. 100? Malheureusement, j'ai un diplôme de littérature anglaise avec mention et je ne suis donc pas très bonne en mathématiques.

M. Wardle: Me permettrez-vous d'aborder la question sous un autre angle? Essentiellement, le libraire bénéficie d'une remise de 40 à 46 p. 100 par rapport au prix de catalogue du livre. C'est la marge bénéficiaire avec laquelle il joue, une marge qui se situe donc entre 40 et 46 p. 100.

L'éditeur peut avoir vendu le livre à un grossiste, qui l'a lui-même vendu à un libraire; le grossiste prendra pour lui 2, 3 voire 4 p. 100 de plus.

Comme le disait Julia, l'auteur touchera entre 10 et 15 p. 100, et dans certains cas, 20 p. 100 des recettes. Si un illustrateur a travaillé sur le livre, il touchera un faible pourcentage, de l'ordre de5 p. 100 des recettes.

Par conséquent, dans le cas d'un livre grand public, la marge de l'éditeur se situe autour de40 p. 100.

Mme Phinney: De 30 $?

M. Wardle: Oui.

M. Rodrigues: Et nous assumons toutes les dépenses.

Mme Woods: Il y a les coûts de fabrication ou les coûts non récurrents, plus le papier, l'impression et la reliure pour chaque livre, ainsi que les charges indirectes qui viennent du fait que l'on doit avoir des représentants d'un bout à l'autre du pays.

Mme Phinney: C'est trop compliqué. J'ai posé la question à quelqu'un aujourd'hui et on m'a donné très rapidement quatre chiffres. Je ne voulais pas que cela devienne si compliqué.

Revenons-en donc au projet de loi. J'aimerais avoir quelques renseignements à titre personnel.

Parlons des avis écrits. Quelle serait, selon vous, la meilleure façon pour les distributeurs de fournir des avis écrits aux libraires? Vous avez donné quelques exemples. Mais en l'occurrence, comment le libraire peut-il être tenu responsable?

Si je vous ai bien compris, vous ne souhaitez pas leur écrire pour les informer que vous éditez tel ou tel livre. Si vous ne les informez pas de cette façon, et que j'appelle un libraire pour demander un livre, il n'a aucun moyen de savoir si quelqu'un au Canada le distribue, à moins de consulter tous les catalogues et toutes les autres sources d'information.

Vous suggérez qu'il téléphone à l'éditeur en Angleterre ou aux États-Unis. Pourquoi devrait-il être tenu responsable de ne pas avoir fait ce qu'il faut si vous ne leur avez rien dit, à moins que vous espériez qu'ils lisent les catalogues que quelqu'un leur aura envoyés?

Mme Hushion: Madame Phinney, nous avons suggéré la mise en place d'une base de données commune pour le Canada. Nous continuons de penser que cela s'avérerait un instrument essentiel.

Mme Phinney: Il n'y en a pas actuellement?

Mme Hushion: Il en existe une. La plupart des libraires, des bibliothèques publiques et des universités achètent soit un CD-ROM soit la version imprimée de la base de données. Par conséquent, ils savent où localiser les livres.

La difficulté à laquelle nous nous heurtons, c'est que certains magasins n'achètent pas normalement ce type d'instrument bibliographique - par exemple, le petit magasin du coin, qui a un présentoir de livres grand public mais dont l'activité principale est de vendre du pain et du lait. Nous devons donc nous assurer que tous ceux qui vendent des livres au Canada ont accès à de tels renseignements. Selon nous, ce serait beaucoup demander d'exiger que chaque petit magasin se procure une base de données de plusieurs centaines de dollars.

Mme Phinney: Mais ils ne prennent pas de commande de toute façon, donc personne ne leur demande...

Mme Hushion: Exact. Par conséquent, d'une manière générale, la base de données commune serait l'instrument clé.

Vous vouliez savoir pourquoi ou comment le libraire ou n'importe qui d'autre - pas uniquement le libraire - pourrait être tenu responsable pour ne pas avoir agi dans la légalité. Je pense que c'est une responsabilité qui incombe à chacun d'entre nous au Canada, et que nous devons tous nous assurer que ce que nous faisons constitue une activité légitime.

Du moment que les instruments existent, et qu'ils sont complets et exacts, alors, ce devrait être la responsabilité de la personne qui souhaite importer le droit d'auteur de s'assurer qu'elle a le droit de le faire.

J'aimerais demander à Fred puis à Julia Woods de nous faire part de leurs commentaires.

.1845

Mme Phinney: Pourrais-je demander quelque chose avant cela? Vous dites que les libraires... Vous garantissez sans aucune restriction que chaque éditeur du Canada mettra ses textes dans la base de données commune.

M. Wardle: Oui.

Mme Phinney: Vous le garantissez?

M. Wardle: Oui.

Mme Hushion: Oui.

Mme Phinney: Par conséquent, nous devrions indiquer ici que tous les libraires seront tenus légalement d'acheter cette base de données. Si l'on décide de faire une loi, il faut s'assurer qu'elle fonctionne des deux côtés.

Mme Hushion: Tout à fait.

Mme Phinney: Donc, il faudra qu'elle fonctionne des deux côtés.

M. Wardle: J'aimerais ajouter quelque chose. Je pense qu'il existe des mécanismes de référence standards pour les libraires et les éditeurs. Il y a deux annuaires d'éditeurs canadiens où l'on trouve la liste des agences qu'exploitent les distributeurs et les éditeurs canadiens au Canada. La plupart des libraires indépendants s'en servent en permanence, et ils savent, par exemple, quelles sont les agences dont peuvent se servir McGraw-Hill ou Stoddart au Canada.

Il y a aussi des ouvrages bibliographiques standards, je veux parler de Whitaker's Books in Print pour le Royaume-Uni et d'American Books in Print, publié par Bowker aux États-Unis.

Mme Phinney: Pourquoi quelqu'un devrait-il en avoir besoin s'il utilise la base de données commune qui, selon vous, contiendra toutes les informations possibles et imaginables?

M. Wardle: C'est justement ce à quoi je voulais en venir. Canadian Books in Print, qui a été publié par University of Toronto Press pendant de nombreuses années, avant que la tâche devienne trop lourde, a été numérisé. Whitaker, au Royaume-Uni, et les Américains ont tenté d'intégrer les informations canadiennes dans une base de données standardisée pour les éditions de langue anglaise. Les résultats sont généralement bons actuellement, sauf que les données canadiennes ne sont pas très solides. On espère que la situation s'améliorera, et c'est ce que l'on s'efforce de faire actuellement. Il existe donc en réalité une base de données standard...

Mme Phinney: Mais vous dites qu'elle n'a pas le niveau voulu.

M. Wardle: À vrai dire, c'est...

Mme Phinney: Ce n'est pas parfait.

M. Wardle: Ce n'est pas parfait, mais les choses sont en bonne voie, et on est pas loin de disposer d'une base de données standard pour...

Mme Phinney: Quand cela pourra-t-il être prêt?

M. Wardle: À vrai dire...

Mme Hushion: L'industrie estime que tous les problèmes de la base de données d'information à distance sur les livres des agences seront réglés dans les six mois. Mais la plupart des libraires utilisent déjà ce genre de données et sont tout à fait au courant.

Le président: Une dernière question.

Mme Phinney: Combien de temps estimez-vous que cela prendra pour mettre en place des critères de service adéquats au sein de l'industrie du livre?

Mme Woods: Bonne question. C'est encore une situation où une collaboration avec la CBA, l'ACP et les autres groupes... Il faut que l'on passe par leur intermédiaire, et qu'on définisse ces critères, mais nous avons déjà fait énormément de progrès en ce sens.

Mme Phinney: Parlez-vous de cinq ans, deux ans?

Mme Woods: Non.

Mme Hushion: Au cours des 18 derniers mois, on a organisé une table ronde. Cela s'appelle le groupe de travail sur les directives facultatives de l'industrie. Tous les grands éditeurs, les libraires, les grossistes, et la Canadian Library Association ainsi que certains représentants des milieux de l'enseignement y ont participé.

La mission de ce groupe de travail était de formuler un ensemble de critères de réglementation sur lesquels pourrait s'entendre l'industrie, quelque chose qui pourrait servir de plus petit commun dénominateur, auquel tout le monde accepterait de se conformer. Nous y sommes parvenus. En janvier 1996, toutes les parties prenantes qui participaient au groupe de travail ont approuvé des directives facultatives. Nous croyons que ces directives ne sont plus aujourd'hui remises en cause, mais qu'en fait elles peuvent servir de base aux règlements qui permettront d'appliquer la législation qui...

Mme Phinney: Combien de temps pensez-vous qu'il va falloir attendre avant qu'il y ait un standard adéquat?

Mme Hushion: Le groupe de travail se réunira à nouveau le 19 novembre, avec pour objectif de terminer ses travaux avant que le projet de loi reçoive la sanction royale.

Mme Phinney: Combien de temps cela va-t-il prendre selon vous? Il est important que nous sachions si l'on parle de six ou de deux mois.

Mme Hushion: Je dirais entre six et huit mois.

Mme Phinney: Oh, j'espère que vous allez aller plus vite que ça. De toute façon...

M. Wardle: J'aimerais, si vous le permettez, faire remarquer que la majorité des distributeurs et éditeurs canadiens fournissent déjà un service très efficace. Il y en a quelques-uns qui, pour diverses raisons, ne parviennent pas à respecter la norme que nous leur imposons, mais c'est pour cela que nous collaborons pour atteindre cet objectif.

Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une question cruciale, car les éditeurs qui publient les auteurs canadiens et qui les envoient au front, pour ainsi dire, offrent un bon service pour soutenir l'offensive.

Mme Phinney: Je dois vous dire que j'achète environ seize livres toutes les deux ou trois semaines, et que je rencontre des problèmes.

M. Wardle: Nous sommes effectivement tous conscients qu'il y a des problèmes avec certaines sources d'approvisionnement actuellement, mais on va y remédier rapidement.

Mme Phinney: Parfait. Merci.

.1850

M. Bélanger (Ottawa - Vanier): Je voudrais m'assurer que je comprends bien votre position au sujet des dispositions sur les avis. Vous n'êtes pas, par principe, contre le fait que l'on exige un avis?

Mme Hushion: Pas du tout.

M. Bélanger: Et vous n'avez rien contre le fait que le concept - son application - figure dans la loi?

Mme Hushion: Aucune objection.

M. Bélanger: Très bien.

Hier soir, nous avons rencontré un groupe, la Canadian Booksellers Association, qui a proposé que le droit d'importer et d'acheter des livres dont jouissent les particuliers - ou l'exemption dont ils bénéficient - soit transmissible. Autrement dit, en vertu du projet de loi, tel qu'il est présenté, les particuliers ont le droit d'acheter un livre, en dépit des restrictions s'appliquant aux importations parallèles. La Canadian Booksellers Association suggère que l'on ajoute un article qui permettrait à un particulier de céder ce droit, ou le droit d'exemption, quelle que soit la façon dont vous voulez l'appeler.

Mme Hushion: Par procuration.

M. Bélanger: Par procuration. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

Mme Hushion: C'est une question épineuse. D'un côté, je suppose qu'à titre individuel, je pourrais souscrire à cette façon de voir les choses. Toutefois, le problème, comme vous le savez, monsieur Bélanger, c'est quand on considère la situation dans son ensemble.

Si les libraires commandaient un exemplaire de chaque titre que nous représentons, où irions-nous? Les éditeurs canadiens stockent les succès de librairie et un grand nombre de livres, et ils dépensent de l'argent pour conserver un stock de livres qui ne sont pas des succès de librairie. Je crains fort que cela minerait le commerce des agences.

Je comprends ce qu'ils veulent. Du fait que le projet de loi accorde une exemption aux bibliothèques lorsqu'une copie unique est en cause, ils aimeraient en réalité bénéficier également de cette exemption. Nous pensons que la différence, c'est que...

M. Bélanger: Non, ils parlaient des particuliers...

Mme Hushion: Ah bon.

M. Bélanger: ...pas des bibliothèques. Je le leur ai demandé. Il ne s'agissait pas des écoles, strictement des particuliers, et pas d'une procuration globale. Il faudrait en demander une pour chaque livre commandé.

Mme Hushion: À chaque fois?

M. Bélanger: Pour chaque titre, oui.

Leur argument est que leurs affaires dépendent largement des services divers qu'ils offrent à leurs clients, et qu'en l'occurrence, obtenir un livre pour eux est sans doute le principal service qu'ils assurent vis-à-vis leur clientèle. Dans ce cas, ils se demandaient si l'on pourrait me permettre à moi, par exemple, qui souhaite obtenir un livre, de signer une procuration ou un papier - n'importe quel papier, je suppose - qui leur donnerait l'autorité d'importer un livre.

Mme Woods: Il y a deux points précis que je voudrais soulever. Le premier est que si l'on s'entend sur les règlements relatifs aux niveaux de service - et cela comprendrait les délais de livraison - et si un éditeur canadien, le titulaire du droit d'auteur, n'était pas en mesure de surmonter ces difficultés, les libraires auraient alors la possibilité de s'adresser aux États-Unis pour trouver le livre.

J'ai d'ailleurs un exemple: au congrès de la Canadian Booksellers Association qui s'est déroulé à Vancouver plus tôt cette année, nous avons vu sur les rayons des exemplaires de l'édition américaine du livre The Stone Diaries de Carol Shields, publié par Penguin aux États-Unis, plutôt que l'édition canadienne publiée par Viking. Le problème, c'est que le bénéfice de tout le travail effectué par Viking Canada et les ressources qui ont été investies...

M. Bélanger: Là n'est pas la question; on veut parler d'un particulier. Le projet de loi, dans sa forme actuelle, limite les importations parallèles.

Mme Woods: Oui, mais si chaque librairie obtenait une procuration d'un particulier, comme il y a 1 250 librairies au Canada, cela pourrait prendre les proportions d'un problème majeur.

M. Bélanger: Bon. Ça va.

M. Wardle: D'après mon interprétation, le libraire pourrait dire «signez cette liste» à chaque client qui entre dans son magasin, et une fois qu'il aurait 50 signatures, il pourrait commander 50 exemplaires à un grossiste américain. C'est tout à fait ridicule!

M. Bélanger: Bref. Avez-vous quelque chose à dire au sujet...? Je suis parfaitement...

Dites-moi quand mon temps sera écoulé, monsieur le président, de manière à ce que je puisse...

Le président: De fait, c'est votre dernière question, car je dois passer la parole à M. Abbott.

M. Bélanger: Parfait. Dans ce cas je vais sauter la question du vendeur enregistré, en espérant que quelqu'un d'autre se chargera de l'aborder.

Je voudrais parler des livres d'occasion, si vous me le permettez. Pourquoi n'y a-t-il pas de distributeur canadien de livres d'occasion? Si c'est une activité lucrative - et ça l'est sans doute, puisqu'il y en a qui le font - pourquoi n'y a-t-il pas de distributeur au Canada?

.1855

M. Munro: Eh bien, je suppose que c'est pour la même raison que celle que l'on peut citer pour expliquer pourquoi il n'y a pas de grossiste important. C'est un marché géographiquement très difficile. En Ontario, en particulier, les activités sont concentrées dans la région de Toronto; il y a quelques marchands itinérants de livres d'occasion qui s'installent dans les magasins, mais ils doivent faire des aller-retour à travers le pays avec leur marchandise et cela mange une partie des bénéfices qu'ils peuvent faire.

Mme Hushion: Monsieur Bélanger, j'aimerais intervenir juste un instant.

Il y a quelques années, notre association a demandé à Ernst & Young de faire une étude de faisabilité portant sur la création d'une entreprise canadienne de vente de manuels d'occasion comme il en existe aux États-Unis. Ernst & Young nous ont dit à l'époque que la taille du marché canadien était insuffisante à l'époque pour justifier un tel investissement.

Nous avions prévu votre question en quelque sorte, quand nous avons effectué cette étude, car nous voulions voir s'il était possible - et si les éditeurs étaient disposés à former un consortium précisément dans ce but - de racheter les livres d'occasion et de les redistribuer d'un bout à l'autre du pays.

L'étude réalisée par Ernst & Young - que je serais très heureuse de vous faire voir - disait, en gros, que l'on ne pourrait pas réellement espérer rentabiliser cette activité. Le nombre de manuels d'occasion qui franchissent la frontière est néanmoins, sur le plan quantitatif, suffisant pour menacer l'activité des éditeurs canadiens.

Je suppose que c'est l'histoire de l'oeuf et de la poule. Quand arrivera le moment où l'on pourra se lancer dans ce genre d'activité, toutes les places auront été prises.

Je vous l'enverrai.

M. Munro: D'un autre côté, certaines grandes sociétés américaines spécialisées dans le livre d'occasion ont entrepris de mettre en place un système de distribution au Canada, mais elles ne l'ont pas fait exclusivement pour les livres d'occasion. Elles sont arrivées et ont pris en gérance les librairies de plusieurs collèges. De fait, elles gèrent le magasin tout entier - et il ne s'agit pas uniquement des livres d'occasion - et cela crée tout un tas d'autres problèmes.

M. Bélanger: Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur Abbott, je crois comprendre que vous n'avez pas de questions à poser immédiatement.

M. Abbott (Kootenay-Est): En toute franchise, je dois vous dire que je n'ai pas entendu l'exposé, et par conséquent...

Le président: Merci. Monsieur Flis.

M. Flis (Parkdale - High Park): Merci beaucoup. Je serai très bref.

En ce qui concerne les exceptions prévues pour les établissements d'enseignement, vous recommandez que l'expression «exercice scolaire» soit exclue de l'exception autorisant la reproduction d'une oeuvre visée par un droit d'auteur en vue d'un exercice scolaire, d'un examen, etc.

Dans une vie antérieure, j'ai enseigné à des enseignants, à des étudiants, etc. Les enseignants n'arrêtent pas de photocopier des textes pour donner des devoirs. Par ailleurs, vous dites que la reproduction est acceptable quand elle est faite dans l'établissement où l'on enseigne, ou lorsque la photocopie est dans cet établissement. Un grand nombre de professeurs préparent leurs leçons dans un immeuble et enseignent dans un autre, ou photocopient chez eux pour enseigner ailleurs.

Pourriez-vous prendre quelques minutes pour m'expliquer votre objection à propos des exercices scolaires, des examens ou des contrôles - je ne vois guère de différence - et vos autres préoccupations concernant la photocopie de documents dans l'établissement.

M. Wardle: Pour ce qui est de l'expression «exercice scolaire» nous craignons que cette expression réfère au devoir d'un élève qui suit des cours à distance, une situation où une grande quantité de documents - disons, plusieurs chapitres d'un roman, ou je ne sais quoi - sont transmis dans le cadre d'un travail que l'étudiant doit faire chez lui. Nous considérons donc que l'expression est inappropriée pour une telle utilisation.

.1900

Mme Hushion: Je pense aussi que l'expression «exercice scolaire» pourrait être interprétée de manière à la faire englober l'éventail complet de l'expérience éducative. C'est-à-dire qu'elle pourrait comprendre les documents photocopiés fournis à un étudiant pour qu'il les emporte chez lui, qu'il finisse son devoir à la maison et qu'il les rapporte le lendemain, etc.

On pourrait donc, me semble-t-il, dire que l'expression «exercice scolaire» recouvre toute l'expérience éducative, du début à la fin, et nous pensons que c'est une interprétation trop large. Nous ne nous opposons pas à ce que les enseignants bénéficient d'une certaine marge de manoeuvre; nous craignons simplement que l'expression «exercice scolaire» soit interprétée trop libéralement.

M. Wardle: Nous suggérons simplement la suppression de cette expression. Il nous paraît que l'objectif poursuivi en incluant ce paragraphe serait alors plus raisonnable.

M. Flis: Vous laisseriez «examen» et «contrôle»...

Mme Hushion: Oui.

M. Wardle: Oui.

M. Flis: ... et vous enlèveriez «exercice scolaire»?

Mme Hushion: Oui.

M. Flis: Je ne suis pas de votre avis. Je ne pense pas que vous en sachiez beaucoup sur l'enseignement et l'apprentissage si c'est ce que vous pensez.

Il y a d'autres préoccupations que vous exprimez qui me paraissent manifester une certaine discrimination à l'égard des étudiants qui suivent des cours par correspondance. L'enseignant est obligé de faire des copies, d'envoyer des documents, pas nécessairement un livre. Qu'en est-il de l'instructeur qui fait 100 photocopies et qui les distribue à des enseignants qui suivent un cours et qui, ensuite, font eux-mêmes des copies pour leurs élèves?

Mme Hushion: On se trouve devant une situation de copie systématique, et c'est exactement ce dont nous parlions plus tôt.

M. Wardle: C'est pourquoi nous avons CANCOPY, l'office canadien des licences, et un grand nombre d'écoles s'y sont inscrites. C'est le genre de chose qui, je pense, est nécessaire si l'on veut protéger le droit d'auteur: sensibiliser les enseignants au fait qu'une licence est nécessaire. Dans la plupart des cas, on ne leur fera rien payer du tout, mais il y a une licence qui existe, et les droits d'auteur subsistent dans la documentation photocopiée.

M. Flis: Je suis néanmoins heureux d'entendre que, globalement, votre conseil est en faveur de ce texte législatif.

Disons que vous n'obtenez pas les changements que vous souhaitez, car le comité a entendu un autre son de cloche de la part d'autres témoins. Seriez-vous quand même en faveur que l'on adopte ce projet de loi aussi rapidement que possible dans sa forme actuelle?

M. Rodrigues: C'est une question piège.

M. Flis: Non, il n'y a pas de piège. Nous sommes ici... Tout l'exercice vise à améliorer la législation...

M. Rodrigues: Eh bien, certainement...

M. Flis: ...et nous apprécions le fait que vous ayez pris le temps de venir et de nous faire connaître vos opinions.

M. Rodrigues: Les parties du projet de loi que nous appuyons et auxquelles nous sommes favorables devraient être adoptées avec diligence. C'est à cela que nous aimerions nous en tenir.

Pourrais-je ajouter une observation? Nous n'avons pas parlé des exceptions qui touchent les maisons d'édition spécialisées dans les textes juridiques parce que demain, un comité représentant les principaux éditeurs de textes juridiques comparaît devant vous. Je tiens donc à vous faire savoir que nous appuyons l'exposé qui vous sera présenté, parce que c'est à ce comité que nous avons laissé le soin de vous parler de cette question précise.

Mme Hushion: Monsieur Flis, pour en revenir à la question que vous avez posée. Nous ne voulions pas empêcher le secteur de l'enseignement d'avoir accès aux oeuvres. Ce que nous voulons, c'est que cet accès s'accompagne d'une meilleure gestion du droit d'auteur. Soyez tranquille, nous n'essayons pas d'empêcher les éducateurs et les étudiants d'avoir accès aux oeuvres de nos propres créateurs. Personne n'y gagnerait.

Le président: Madame Phinney, avez-vous une question à poser?

Mme Phinney: Pour en revenir à la qualité du service, je voudrais juste savoir ce qui constituerait pour vous un délai de livraison raisonnable pour expédier des livres à un libraire. Qu'est-ce que vous, les maisons d'édition, considérez comme un délai de livraison raisonnable?

Si je vous pose cette question, c'est qu'hier, on nous a dit - ce que je sais d'ailleurs moi-même d'expérience - que l'on peut se procurer un livre aux États-Unis en deux jours. Par livraison expresse, vous pouvez le recevoir en deux jours. Selon vous, qu'est-ce qu'un délai raisonnable? Dites-moi juste brièvement, est-ce deux semaines, cinq jours...?

Mme Hushion: Nous avons dit que cela varie, tout dépendant si le livre est disponible au Canada ou si nous devons le faire venir spécialement. Et puis il y a un programme...

Mme Phinney: «Disponible au Canada», cela veut dire que vous avez déjà le livre en stock? C'est bien cela?

Mme Hushion: C'est exact.

Mme Phinney: Bon. Alors, si vous l'avez en stock, les gens peuvent se le procurer habituellement dans la journée, dans la demi-journée, ou à peu près? Vous pouvez prendre votre voiture et aller chercher le livre à la maison d'édition.

Mme Hushion: Un libraire de Colombie-Britannique ne pourra pas se procurer un livre à Toronto en un ou deux jours.

Mme Phinney: Bien sûr, mais vous pouvez le faire livrer par messagerie en 24 heures, si les gens le demandent.

Mme Hushion: Oui, si c'est nécessaire.

Mme Phinney: Par messager?

Mme Hushion: Tout à fait.

Mme Phinney: Bon. Alors, pour ce qui vient de l'étranger, qu'est-ce qui constituerait un délai raisonnable?

Mme Hushion: Dans les lignes directrices établies par le groupe de travail que j'ai mentionné plus tôt, on parle de plusieurs jours, tout dépendant du type de livre et du client - les choses ne se passent pas de la même façon pour les institutions que pour les librairies - et cela allait de cinq à onze jours.

.1905

Mais ce qui a plus d'importance - je suis sûre que l'on vous en a parlé hier soir - et ce que les libraires souhaitent avant tout, c'est une confirmation: une confirmation dans les 24 heures que leur commande a été reçue, que le livre est en stock et qu'ils vont le recevoir. Ils nous l'ont dit et répété que c'est ce qui leur importe le plus: la confirmation. Une fois qu'ils savent que vous avez le livre en stock, et que vous allez l'envoyer, ils sont satisfaits. C'est lorsqu'ils reçoivent le colis, qu'ils l'ouvrent et que - surprise - le livre n'y est pas que les problèmes commencent.

Mme Phinney: Nous parlons de deux groupes qui sont concernés, mais il y a aussi le consommateur.

Mme Hushion: Bien entendu.

Mme Phinney: Et il se peut fort bien que le consommateur ne veuille pas attendre onze jours; or, vous lui dites: tant pis, vous ne pouvez pas avoir le livre.

Mme Hushion: Non.

Mme Phinney: S'il ne peut pas attendre onze jours, il ne peut pas avoir le livre en question.

Mme Hushion: Non, nous disons que si cela est nécessaire, un libraire de Colombie-Britannique peut bien sûr faire venir un livre de Toronto en 24 heures, mais...

M. Wardle: Je pense qu'il y a une question sous-jacente encore plus importante: si l'on autorise les importations parallèles, selon les dispositions du projet de loi, nous allons donner naissance à une nouvelle industrie au Canada. Nous allons faire naître une industrie de la vente en gros qui n'existe pas à l'heure actuelle. Il y a des grossistes régionaux en Colombie-Britannique, dans les régions de Toronto et de Montréal, mais il n'y a pas de grossiste à l'échelle nationale, comme il en existe aux États-Unis.

Là encore, le rapport de Ernst & Young indique qu'au Canada, l'économie n'a pas été suffisamment solide pour que nous puissions nous permettre cela, en raison notamment des problèmes découlant des achats parallèles. Je pense que si l'on peut trouver une solution, le secteur de la vente en gros prendra de l'expansion. Il y a à Toronto, tout le monde le sait, un grossiste qui n'attend que l'adoption de ces mesures pour mettre sur pied un organisme national de vente en gros. Cela résoudra la plupart des problèmes auxquels font face les petits libraires indépendants.

Mme Hushion: Le dernier point que l'on pourrait ajouter à la réponse, c'est que si un éditeur est dépassé par les événements et ne peut assurer un certain niveau de service, alors oui - nous l'avons reconnu - le libraire, l'université, ou qui que ce soit a le droit de se fournir au sud, à l'est ou à l'ouest.

M. Wardle: Et cela peut figurer dans le règlement.

Mme Hushion: Nous voulons simplement pouvoir être les premiers à qui l'on s'adresse. C'est notre industrie, c'est notre pays, et nous sommes vraiment convaincus d'être en mesure de faire face à la situation.

Mme Woods: J'ai une autre observation à faire au sujet de la création de l'EDI. Les maisons d'édition sont 100 p. 100 en faveur. Une fois en place, l'EDI va réellement améliorer les délais de livraison. Le problème de la confirmation sera automatiquement réglé, et cela va également améliorer les délais de livraison.

Le président: Nous n'avons plus beaucoup de temps, mais j'ai une question à vous poser sur un sujet qui n'a pas été abordé aujourd'hui. Hier soir, nous avons reçu les libraires, et ils ont insisté... J'ai été plutôt étonné de vous entendre appuyer les dispositions de la loi relatives aux importations parallèles... Les libraires ont défendu un point de vue tout à fait opposé au vôtre. Ils ont déclaré qu'il pourrait fort bien s'agir d'un moyen détourné que pourraient utiliser les grands magasins à succursales multiples pour obtenir des droits de distribution, et inonder le Canada de livres étrangers. Ainsi donc, au lieu d'être une mesure de protection, cette disposition aurait des effets aussi dévastateurs que le cheval de Troie.

Nous avons été un peu déconcertés car nous n'avions jamais envisagé cette mesure de cette façon. Avez-vous des observations à faire à ce propos? Avez-vous lu leur mémoire? Souhaitez-vous en avoir un exemplaire afin de prendre connaissance de leur position? Je voudrais savoir ce que vous en pensez.

Mme Hushion: Nous avons lu leur mémoire; voilà l'exemplaire que je me suis procurée. Je présume que plusieurs d'entre nous vont vouloir faire des commentaires.

Je dois dire que, si les hypermarchés ou les grandes surfaces avaient vraiment voulu que les arrangements de distribution soient non exclusifs, et se réserver la part du lion, ils auraient pu le faire il y a dix, cinq, ou deux ans - ou même l'an dernier ou la semaine dernière.

Sur le plan pratique, une agence ajoute de la valeur au produit. Sa responsabilité ne se borne pas à faire passer des livres d'un côté à l'autre de la frontière, du nord au sud, ou réciproquement. L'agence joue un rôle plus important, et les gens que cette activité concerne la respectent assez pour vouloir la pérenniser.

J'aimerais que Julia vous parle un peu de cette valeur ajoutée.

Le président: Brièvement, parce que le temps qui nous était imparti est écoulé. Mais je voulais savoir si vous étiez ou non d'accord avec ce point de vue. D'après ce que je peux voir, vous ne partagez pas du tout cette opinion.

.1910

Mme Woods: Nous ne sommes pas d'accord. La chaîne détient environ 40 p. 100 du marché du livre au Canada. C'est beaucoup, mais ce n'est pas 100 p. 100. Par conséquent, pour qu'un tel arrangement puisse se faire, il faudrait que quelqu'un soit disposé à abandonner une part appréciable du marché canadien.

En second lieu, les éditeurs-distributeurs canadiens ajoutent vraiment beaucoup de valeur au produit par leurs activités de commercialisation. Ce sont eux qui génèrent la demande. Je pense que les maisons d'édition sont tout à fait conscientes du phénomène aux États-Unis et au Royaume-Uni, et c'est la raison pour laquelle, en l'occurrence, ils n'ont pas décidé d'avoir uniquement partie liée avec Chapters. Cela limiterait leur distribution.

M. Wardle: Monsieur le président, selon moi, les dispositions de ce projet de loi ne changent absolument pas l'environnement commercial. Je suis éditeur depuis 34 ans. J'ai acheté des livres à l'étranger pour découvrir ensuite que les librairies Coles avaient acheté une édition semblable et que je ne pouvais pas leur vendre mes livres. C'est le genre de réalité commerciale à laquelle nous devons tous faire face, nous qui vendons et publions des livres. Je ne crois pas que les mesures sur les importations parallèles vont changer quoi que ce soit. Les éditeurs et les distributeurs d'ici se sont engagés à s'acquitter de certaines obligations d'ordre économique vis-à-vis le Canada. Ils ne sont pas prêts de permettre qu'une grande librairie à magasins multiples fasse des achats parallèles ou conclut des marchés séparés avec leurs mandants dans des pays étrangers. Cela n'arrivera tout simplement pas.

Le président: Je vous remercie de votre exposé. Vous vous doutez qu'étant donné l'intérêt que vous avez pu déceler dans les questions que l'on vous a posées - un feu roulant de questions, d'ailleurs - nous avons beaucoup apprécié votre présence parmi nous. Merci.

M. Wardle: Merci.

Mme Woods: Merci.

Le président: Nous sommes heureux d'accueillir l'Association des éditeurs canadiens représentée par son président, M. Jack Stoddart, par M. Paul Davidson, son directeur général, parM. Roy MacSkimming, son directeur des politiques et par M. Ron B. Thomson, président du comité du droit d'auteur de l'AEC. Je pense que nous avons déjà eu le plaisir d'entendre vos commentaires éclairés. M. Stoddart, vous avez la parole.

M. M. Jack Stoddart (président, Association des éditeurs canadiens): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité.

Le président: Excusez-moi, monsieur Stoddart. Je ne sais pas si vous avez entendu notre collègue de l'opposition officielle mentionner qu'il devait assister à une réunion de son groupe parlementaire. C'est la raison pour laquelle il n'est pas des nôtres en ce moment. Il m'a demandé de l'excuser.

.1915

M. Stoddart: Merci. La dernière fois que l'AEC a fait un exposé, c'était au sujet de l'arrivée de Borders au Canada. Je reconnais parmi vous certains des membres du comité avec qui nous avions discuté à l'époque. Merci de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui.

Je pense que le comité a joué un rôle très utile dans l'affaire Borders, et que les décisions qui ont finalement été prises ont poussé beaucoup de Canadiens à relever le gant - tant et si bien qu'il existe maintenant dans tout le Canada plusieurs nouvelles librairies fort intéressantes. Je pense que le gouvernement a pris une décision très importante, décision à laquelle a contribué ce comité.

L'AEC représente plus de 125 propriétaires canadiens de maisons d'édition qui sont installées dans toutes les provinces et tous les territoires. Ses membres publient des oeuvres littéraires, des ouvrages grand public, des livres érudits et éducatifs. Plus de 80 p. 100 des nouveaux livres dont les auteurs sont Canadiens - j'ai bien dit 80 p. 100 - sont publiés par des maisons d'édition appartenant à des Canadiens.

Nos membres ont contribué à l'édification d'une littérature nationale dont nous sommes tous très fiers; littérature qui permet aux Canadiens de mieux se connaître mutuellement et qui, de plus en plus, a un retentissement à travers le monde. Je viens juste de rentrer de la Foire internationale du livre de Francfort, et je pense que les Canadiens sont beaucoup plus connus comme auteurs que comme éditeurs. Nous nous faisons remarquer grâce à des auteurs comme Margaret Atwood, Rohinton Mistry et bien d'autres qui sont de calibre international - même si c'est une expression que je déteste employer. Disons que lorsque vous voyez la photo de Margaret Atwood en première page du plus grand quotidien de Francfort, et celle de Rohinton Mistry ici et là, on ne peut pas faire autrement que d'être fier de la réussite de nos écrivains, et peut-être aussi du rôle joué à cet égard par nos éditeurs.

L'AEC souscrit au projet de loi C-32 qui vient d'être présenté. Globalement, ce projet de loi renferme un ensemble équilibré de mesures qui modernisent la loi, traduisent concrètement des engagements de longue date et affermissent le commerce du livre au Canada. Après huit ans de consultation et d'études, il est temps que ce texte législatif soit adopté et mis en application.

Nous avons cependant certaines réserves précises dont nous voudrions faire état. Je vais demander à Paul Davidson de vous les signaler. Je reprendrai ensuite la parole pour faire quelques brèves observations en guise de conclusion.

M. Paul Davidson (directeur général, Association des éditeurs canadiens): Merci, Jack.

Le projet de loi aborde deux questions importantes qui intéressent tout particulièrement les éditeurs de livres: il s'agit des mesures concernant les importations parallèles et les exceptions relatives à la reprographie.

En ce qui concerne les importations parallèles, le projet de loi contribuera grandement à résoudre le problème des achats parallèles. Comme vous le savez, lorsque les bibliothèques, les librairies ou d'autres institutions acquièrent un livre ailleurs qu'auprès de l'éditeur-distributeur exclusif de cet ouvrage, il s'agit d'un achat parallèle. Tel est le problème, et le projet de loi contribue grandement à le résoudre.

Le principal résultat de ces mesures sera le suivant: elles permettront aux éditeurs de faire appliquer les ententes de distribution qui ont été conclues librement. Certains considèrent qu'il s'agit de mesures protectionnistes. Nous croyons plutôt que ce texte législatif permet le respect et l'application des contrats, ce qui est, de fait, le fondement même d'une économie libérale.

Même si j'ai dit que le projet de loi contribuera grandement à résoudre le problème des achats parallèles, nous souhaitons émettre des réserves importantes à propos de ces mesures. Notre première réserve porte sur les dispositions concernant l'envoi d'un avis - une question que les précédents témoins ont déjà soulevée. Nous pensons, nous aussi, que l'expression «avis écrit» est sujette à toutes sortes d'interprétations. Nous préférerions que les règles concernant l'envoi d'un avis soient établies par règlement. Et nous estimons qu'il serait à l'avantage de toutes les parties concernées que les exigences en matière d'avis soient clairement définies et incluses dans le règlement.

L'autre réserve importante que nous tenons à formuler à propos des importations parallèles est que les exceptions sont trop nombreuses. Selon l'AEC, ces exceptions devraient être plus limitées. Par exemple, on accorde au gouvernement, sans restriction, le droit d'importer des éditions étrangères, alors que cela semble aller à l'encontre des objectifs poursuivis par le projet de loi. Parallèlement, les bibliothèques, les musées, les services d'archives et les établissements d'enseignement bénéficient également de larges exceptions qui les autorisent à acquérir des éditions non canadiennes, même si ce sont les contribuables canadiens qui financent leurs collections.

Les témoins précédents ont également soulevé la question des manuels d'occasion. De notre point de vue, le projet de loi autorise, par inadvertance, l'importation à grande échelle de manuels d'occasion, ce qui sape l'infrastructure sur laquelle repose l'industrie. Ce problème devrait être abordé.

.1920

L'exception dont bénéficient les particuliers ne règle pas le problème engendré par le nombre grandissant de clubs de livres commerciaux sur le marché. C'est un point que nous abordons dans le mémoire que nous vous avons transmis. Ces entreprises, qui appartiennent à des intérêts américains, sollicitent directement les consommateurs canadiens et leur fournissent des éditions américaines de livres canadiens - et des ouvrages dont les droits exclusifs sont détenus par des distributeurs canadiens. Cette pratique prive les auteurs canadiens d'une partie de leurs droits d'auteur, les éditeurs du pays, de revenu substantiel, et les détaillants canadiens, d'une concurrence loyale et équitable.

Cette disposition devrait être modifiée de façon à ce que, tout en continuant à avoir pour objectif de permettre l'accès aux livres sur une base individuelle, l'on empêche les clubs de livres commerciaux de répondre à la demande en fournissant des éditions américaines. Dans notre mémoire, vous trouverez des recommandations détaillées sur la façon de résoudre ces difficultés.

En ce qui a trait à la deuxième grande préoccupation que nous inspire le projet de loi, c'est-à-dire les exceptions portant sur la reprographie, l'AEC tient à souligner à nouveau que le principe fondamental qui sous-tend le droit d'auteur est sa juste rétribution pour l'oeuvre qu'il a créée. Dans ce contexte, toute exception affaiblit ce principe. C'est aux consommateurs qu'il revient de payer l'investissement consenti par les auteurs et les éditeurs. Comme on l'a fait remarquer, nous estimons que ces oeuvres doivent être largement disponibles, mais pas accessibles gratuitement. Encore une fois, les amendements spécifiques que nous recommandons se trouvent dans notre mémoire. Permettez-moi d'en souligner quelques-uns que nous jugeons importants.

Lorsqu'une oeuvre est reproduite à des fins éducatives, il est important d'interdire que cette copie soit archivée sur fichier électronique ou transmise à distance dans des régions éloignées. On vous l'a fait remarquer, le télé-enseignement est l'un des marchés de l'éducation dont l'expansion est la plus rapide au Canada. Le projet de loi devrait explicitement interdire cette forme de reproduction. De notre point de vue, l'exception est trop générale.

Parallèlement, l'AEC reconnaît que les examens et les contrôles doivent faire l'objet d'une exception; toutefois, inclure dans cette description l'expression «exercice scolaire» ouvre la porte à tous les abus. Vous en avez déjà débattu. Même si les examens et les contrôles font partie du processus d'évaluation, les exercices scolaires appartiennent, eux, au processus d'apprentissage, et ne devraient pas faire l'objet d'une exemption. Par conséquent, nous recommandons que l'expression «exercice scolaire» soit supprimée, mais que les mots «examens» et «contrôles» demeurent dans le texte, et que les versions anglaise et française du texte législatif correspondent.

En ce qui a trait aux exceptions dont bénéficient les bibliothèques, l'AEC souhaite assurer que les reproductions d'oeuvres qui sont autorisées permettent la conservation mais non l'enrichissement d'une collection. L'AEC soutien également que les bibliothèques qui font partie de sociétés professionnelles et celles dont l'activité se solde par des bénéfices qui ne restent pas occasionnels ne devraient pas être admissibles aux moyens de défense mis à la disposition des bibliothèques de prêts et de références sans but lucratif.

Dans la même veine, le projet de loi doit stipuler de façon explicite que la reproduction systématique d'oeuvres en plusieurs exemplaires ne fait l'objet d'aucune exception. On retrouve ce genre de disposition dans les lois américaines et britanniques.

L'AEC a également de sérieuses réserves à propos de l'exception générale dont bénéficient les bibliothèques, les établissements d'enseignement, les services d'archives et les musées, et qui les dégage de toute responsabilité lorsque des oeuvres sont reproduites sur les machines que ces établissements mettent à la disposition du public. À ce propos, j'aimerais attirer l'attention des membres du comité sur le bulletin publié au cours de l'été 1996 par la Metropolitan Toronto Reference Library; on y annonce l'installation de 25 nouvelles photocopieuses qui «améliorent de30 p. 100 la vitesse de reproduction et sont conçues spécialement pour photocopier des livres». L'AEC recommande que cet article du projet de loi soit supprimé.

Sur tous les sujets que j'ai soulevés, l'AEC propose des recommandations précises. L'Association a également formulé des recommandations sur le rôle de la Commission du droit d'auteur et au sujet des moyens qui permettraient de donner plus de poids aux sociétés de gestion - ainsi que sur d'autres aspects plus techniques.

Il est important de se souvenir que le droit d'auteur est le fondement de l'économie de l'information émergente. Les travaux de ce comité sont essentiels si l'on veut s'assurer que les titulaires de droits d'auteur canadiens sont en mesure de protéger leurs droits économiques et moraux.

Au cours des derniers jours et des dernières semaines, vous avez entendu, je n'en doute pas, de nombreux exposés comme celui-ci. J'aimerais néanmoins demander à Jack Stoddart de conclure en vous entretenant de l'importance fondamentale que revêt ce projet de loi aux yeux des maisons d'édition canadiennes.

M. Stoddart: Nous avons l'impression que, dans la plupart des cas, il s'agit de décider de détails techniques et d'autres sujets du même ordre. La protection du droit d'auteur est une question d'ordre économique. Elle remet également en cause l'existence même d'une industrie de l'édition dans ce pays. Il n'y aura plus d'éditeurs au Canada, que ce soit des succursales ou des entreprises détenues par des Canadiens, si nous ne protégeons pas les oeuvres que nous avons payées - dans bien des cas, très cher - ou dont nous nous sommes chargés d'assurer la distribution, la vente et la publication au Canada.

.1925

Si la Canadian Booksellers Association a des réserves à propos des importations parallèles, par exemple, c'est surtout en ce qui concerne les délais de livraison. C'est un point à noter car, à deux reprises, au cours des trois dernières années, l'Association a reconnu la qualité du service que nous offrons à l'industrie. Nous pouvons approvisionner 80 p. 100 des détaillants en moins de cinq jours - et, dans la plupart des cas, en trois ou quatre jours.

Nous distribuons les produits de 50 éditeurs canadiens, et d'au moins 50 éditeurs étrangers. La University of Toronto Press fait la même chose. Cela prend un peu plus longtemps, mais les délais de livraison dans tout le pays ne dépassent pas une semaine. Nous avons installé un gros entrepôt à Vancouver, d'où nous desservons l'ouest du Canada - plutôt que de Toronto.

Je pense que notre industrie, l'industrie de l'édition, doit évoluer. Toutefois, si elle ne bénéficie pas d'une certaine forme de protection qui lui permette de répondre aux besoins du libraire, aux besoins du consommateur qui souhaite être réapprovisionné très rapidement, elle disparaîtra. Elle sera remplacée par un système d'approvisionnement qui permettra à des grossistes situés de l'autre côté de la frontière de satisfaire les besoins des consommateurs canadiens. Le commerce se fera obligatoirement dans le sens Nord-Sud et non dans le sens Est-Ouest.

Il n'est évidemment pas inutile de parler des détails techniques et de bien d'autres aspects des choses, mais la question fondamentale est la suivante: est-ce que notre industrie de l'édition va survivre? Accordons-nous la reconnaissance voulue aux efforts que fait cette industrie pour faire connaître, dans tout le Canada, nos auteurs et les courants de pensée qui se font jour? Bien sûr, nous puisons dans les oeuvres produites partout dans le monde; nous distribuons dans tout le pays des livres qui proviennent de partout dans le monde. Nous n'essayons pas d'exclure certains livres de quelque façon que ce soit. Je ne connais aucun éditeur qui dirait «non, nous ne voulons pas de cela». Mais ce que nous souhaitons, c'est la même chose que souhaitent les éditeurs aux États-Unis.

Nos propositions sont loin d'avoir la rigidité de la position adoptée par les éditeurs américains - ou britanniques, français, belges ou allemands - c'est-à-dire que le droit de distribution détenu par les éditeurs est total, dans leur propre pays. Au cours des négociations, nous avons choisi d'être moins intransigeant à cet égard. Nous avons dit que nous allions nous soumettre à des critères de performance, et garantir à la clientèle certains délais de livraison - et des prix plafonds. Pourquoi les entreprises canadiennes doivent-elles garantir qu'elles ne vont pas arnaquer le public, lorsque dans tous les autres pays du monde, on est libre de faire tout ce que l'on veut. Cela me dépasse. Tous les éditeurs qui constituent l'industrie de ce pays, que ce soit les éditeurs de langue française de l'ANEL, ou ceux qui sont membres du CPC ou de l'AEC, ont accepté de fonctionner dans le cadre de lignes directrices raisonnables.

La question est donc de savoir si cette industrie va survivre. En ce qui concerne l'argument présenté hier soir, par les libraires - à savoir que cette disposition menacerait les éditeurs qui ont des activités d'agent - eh bien, dans mon entreprise, c'est en fait l'activité prédominante. Elle nous rapporte 20 millions de dollars par an; et je peux vous dire que je suis fermement convaincu que, si nous ne jouissions pas d'une protection adéquate et que l'on n'autorisait pas les importations parallèles sans exception substantielle, l'avenir ne serait guère prometteur.

Quand on ouvre un dossier, ce qui est le cas avec l'examen du droit d'auteur, au bout du compte, c'est que tout le monde étudie les décisions qui sont prises et essaie d'en tirer parti au mieux. Le dossier est maintenant ouvert, et si on maintient des exceptions qui sont substantielles et qui, peut-être - de notre point de vue - ne sont pas appropriées, je pense que nous allons assister à l'inondation du marché.

Je vais vous donner un exemple: Barnes and Noble et Follett - et d'autres - sont sur les rangs pour reprendre la librairie de l'Université McGill. Ils offrent certaines garanties. Dans le cadre de nos lois sur le patrimoine - celles qui sont administrées par le ministère, ainsi que la législation culturelle - pour faire des affaires dans le secteur du livre dans ce pays, il faut satisfaire à certaines normes en matière de propriété de l'entreprise, prendre des engagements, etc. Mais ces candidats à la reprise de la librairie de l'Université McGill ont trouvé une échappatoire: comme il s'agit d'un établissement d'enseignement, ils ne sont pas tenus de se conformer à certaines des lois sur le droit d'auteur. Le seul moyen de distribuer des livres à titre de détaillant américain dans ce pays par l'intermédiaire de McGill ou de l'Université d'Ottawa - qui travaillent déjà avec Follett, je crois - est d'invoquer l'exception qui s'applique aux établissements d'enseignement. Autrement, les documents qu'ils font venir des États-Unis... La seule façon de commencer efficacement et rentablement, c'est d'avoir recours à cette exception.

.1930

Nous devons faire attention. En effet, à l'heure actuelle, 95 p. 100 des magasins de détail - les librairies, pas tous les magasins de détail, je présume, mais les librairies - y compris les magasins à succursales multiples, etc. de ce pays sont détenus par des intérêts canadiens, et ils achètent canadien puisque - et je pense qu'ils vous l'ont dit hier soir - ces magasins achètent environ 95 ou 98 p. 100 % de leurs livres au Canada. C'est un marché que notre industrie ne veut pas perdre.

Chose curieuse, les dispositions sur le droit d'auteur, à cause des agissements des universités, commencent à affecter cette industrie. En effet, si vous ouvrez une librairie américaine à l'Université McGill, au centre-ville de Montréal, une librairie contrôlée par des intérêts américains, vous pouvez être sûr que, de l'autre côté de la rue... Pour quelle raison Borders ne réapparaîtrait-il pas dans ce pays? Il y a des questions que nous voulons régler, qui ont leur origine dans ce qui semble être des aspects techniques du droit d'auteur.

Plus tôt, Mme Phinney a soulevé la question des coûts. Si vous voulez, je peux vous dire comment se répartissent en gros les coûts dans l'industrie. Très très rapidement.

Prenons l'exemple d'un livre de 10 $. Je dis 10 $ car je peux faire les calculs moi-même sans l'aide d'une calculatrice - ce qui ne serait pas le cas pour un livre de 30 $. Au Canada, la librairie retient, en moyenne, 45 p. 100 du prix de vente, donc 4,50 $ pour le libraire; pour l'éditeur, c'est 5,50 $. De ce montant, il faut prélever un droit d'auteur qui représente 10 p. 100 du prix de catalogue, c'est-à-dire 1 $, si bien que le bénéfice net est maintenant de 4,50 $. Le coût de fabrication est de 2 $. Pour établir les prix, on multiplie généralement par cinq le coût de fabrication, donc 5 fois2 égale 10. Bref, il en coûte 2 $ pour fabriquer le livre. On en arrive ainsi à 2,50 $. Les coûts non récurrents - les planches, le travail de rédaction et tout ce qu'il faut faire pour préparer le livre avant de le faire imprimer - représentent environ 10 p. 100 de la somme nette qui est perçue, c'est-à-dire 55c. Par conséquent, le montant net que l'éditeur met dans sa poche sur un livre de 10 $ se chiffre à environ 1,95 $.

Si l'on s'en tenait là, la situation ne serait pas catastrophique. Honnêtement, ce n'est pas une grosse marge bénéficiaire, mais c'est un montant que nous jugerions acceptable. Toutefois, dans ce secteur, presque partout dans le monde, les livres que les maisons d'édition fournissent peuvent tous être renvoyés par les librairies. Si la librairie ne les vend pas, elle peut tout renvoyer et se faire rembourser. Quelquefois, on demande aux librairies de payer les frais de port, ce dont elles se plaignent, mais ce sont leurs seuls coûts - à part l'entreposage dans les magasins.

Qu'en est-il alors à nos coûts à nous? Si l'on nous renvoie 10 p. 100 des livres, le prix de fabrication initial monte de 10 p. 100, c'est-à-dire qu'il atteint 2,20 $. Cette année, les détaillants ont renvoyé entre 20 et 30 p. 100 des livres. Vous pouvez imaginer l'effet sur le bilan des maisons d'édition. Mais telles sont les conditions économiques qui s'appliquent dans ce pays au secteur de l'édition, et au commerce de détail - mis à part les ouvrages éducatifs dont les coûts sont différents et dont le commerce est régi par d'autres modalités.

Merci.

Le président: Monsieur Stoddart, êtes-vous prêts à répondre maintenant aux questions?

M. Stoddart: Oui, merci.

M. Abbott: J'ai trouvé votre exposé très instructif, et je vous en remercie.

J'aimerais commencer par rappeler un principe qui ne reflète pas nécessairement mes opinions personnelles, ni celles de mon parti. Je tiens à le préciser à l'intention de mes amis assis de l'autre côté de la table. Si je comprends bien, les activités des éditeurs canadiens à titre d'agent d'éditeurs étrangers leur assurent une part substantielle de leurs revenus. Le problème auquel fait face l'industrie avec l'arrivée dans le secteur du commerce de détail de Borders et de Barnes & Noble - et même de Chapters - c'est un problème de concentration, qui menace spécifiquement la source de revenu que représentent vos activités à titre d'agent. Est-ce un résumé exact de la situation?

.1935

M. Stoddart: J'ai déjà dit publiquement que ce qui se passe à l'heure actuelle au Canada, dans le secteur du commerce de détail, va élargir le marché du livre que nous desservons d'au moins25 p. 100 au cours des deux prochaines années.

Oui, je pense que Chapters est un concurrent avec qui il faut compter, mais depuis que cette entreprise a annoncé qu'elle allait ouvrir des hypermarchés - et il y en a maintenant à peu près une demi-douzaine - un libraire indépendant en a également ouvert à Victoria, à Vancouver, à Calgary, à Regina et à Winnipeg. Il n'y en a pas encore en Ontario. La compagnie Now Industries a annoncé qu'elle allait ouvrir cinq nouveaux magasins. C'est l'entreprise qui, à l'origine, avait établi un partenariat avec Borders, mais ses magasins seront détenus à 100 p. 100 par des intérêts canadiens et la compagnie sera très active sur le marché canadien.

Honnêtement, depuis que je suis dans l'édition, je n'ai jamais connu une époque où les perspectives d'avenir étaient plus prometteuses pour les maisons d'édition et les librairies et donc pour les auteurs. Je pense qu'avec les nouveaux magasins, on réservera une beaucoup plus grande place aux livres. N'importe qui peut s'en rendre compte en allant chez Chapters, au centre-ville. Et l'année prochaine, dans tout le Canada, il y aura 25 magasins - pas nécessairement des Chapters, mais des librairies qui auront différents propriétaires - qui ressembleront à Chapters. Je ne sais vraiment pas ce que l'on peut imaginer de plus pour mettre davantage les livres à la portée des Canadiens.

M. Abbott: C'est l'aspect positif des choses. Toutefois, d'après ce que j'ai pu comprendre en écoutant les exposés d'autres représentants de votre industrie, si les hypermarchés américains - notamment - contribuent à la croissance du marché de détail que vous venez de décrire, on s'inquiète quand même de la menace que représente leur présence. Est-ce exact?

M. Stoddart: Cela aurait pu être le cas, en effet. Je pense que la décision prise à propos de Borders - ils n'ont pas donné suite à leur demande d'autorisation de s'installer au Canada - a arrêté l'implantation d'hypermarchés détenus par des intérêts étrangers. Ce sont maintenant des Canadiens qui sont responsables de l'expansion de ce secteur. Je ne vois donc pas en quoi cela fait un problème aujourd'hui, ni pour l'avenir.

M. Abbott: Cela ne pose pas de problème, mais ce dont il est question n'est pas du ressort du ministère du Patrimoine canadien. Cela relève du ministère de l'Industrie qui s'intéresse à la propriété de ces grands magasins.

Imaginons que Borders trouve une entreprise au Canada qui veuille conclure une entente lui permettant de profiter de ses vastes entrepôts et du réseau de marchandisage qui existe aux États-Unis, et qui se débrouille pour respecter les règles imposées par Industrie Canada. Cela constitue toujours une menace, n'est-ce pas?

M. Stoddart: À ce que je sache, le problème qui se posait à propos de Borders n'avait rien à voir avec les dispositions concernant la propriété de l'entreprise; leur demande a été rejetée parce que Borders avait l'intention d'acheter ses livres aux États- Unis et de les expédier au Canada - sans passer par le système canadien de distribution. Leur propre système ne permettait pas de résoudre cette difficulté, et c'est pour cela qu'ils ont retiré leur demande. Cela n'avait rien à voir avec la propriété de l'entreprise, et encore moins avec son contrôle. Ce qui faisait problème, c'était plutôt que les ventes de livres d'une extrémité du pays à l'autre auraient cessé, et que les échanges auraient été remplacés par une structure Nord-Sud. C'est la seule façon dont leur système pouvait fonctionner.

M. Abbott: Si nous voulons qu'au Canada les gens soient libres de passer des ententes contractuelles, de s'associer et ainsi de suite comme bon leur semble, à votre avis, est-ce que le projet de loi C-32, dans sa mouture actuelle, fait essentiellement disparaître cette menace? Comme le président l'a indiqué aux témoins qui vous ont précédés, je pense que nous avons tous été plutôt décontenancés hier soir lorsqu'on nous a fait remarquer que le projet de loi pourrait éventuellement avoir l'effet contraire, du fait des initiatives que pourraient prendre les gens pour exercer leur droit de passer des ententes contractuelles comme bon leur semble... L'éditeur d'un ouvrage populaire aux États-Unis pourrait passer un contrat avec vous, mais peut-être sans vous accorder l'exclusivité, sachant qu'il peut de toute façon s'approprier 40 p. 100 du marché.

M. Stoddart: Je suis convaincu que tant et aussi longtemps que les lois de notre pays concernant la propriété et le contrôle de l'industrie du livre resteront ce qu'elles sont, le projet de loi atténuera beaucoup cette menace - si l'on ne veut pas aller jusqu'à adopter un texte législatif très restrictif. Je ne suis pas du même avis que la CBA, parce que je ne pense pas que les hypothèses de l'association sont fondées.

M. Abbott: Mais si vous mariez - si j'ai bien compris la réponse que vous avez donnée, et je ne suis pas avocat, par conséquent je ne joue par sur les mots...

M. Stoddart: Moi non plus.

M. Abbott: Je veux vraiment tirer les choses au clair. Si l'on se fonde sur votre réponse, vous dites que ce projet de loi, combiné avec les dispositions concernant la propriété, aura les effets escomptés; mais que, le projet de loi seul ne suffira pas. Est-ce bien ce que vous dites?

.1940

M. Stoddart: Je prétends que ce projet de loi aura les effets escomptés dans le cadre des lois en vigueur au Canada. Évidemment, si les lois du Canada sont modifiées, les règles du jeu changeront également. Il faut envisager ce projet de loi dans le contexte de la législation actuelle.

M. Davidson: Tout d'abord, l'AEC rejette essentiellement l'idée avancée par la CBA selon laquelle le projet de loi va miner le système qui permet aux éditeurs de jouer le rôle d'agent. À notre avis, ce projet de loi contribue énormément à la vigueur de l'industrie canadienne du livre.

Dans notre mémoire, nous signalons également que nous voulons nous assurer que les gens ne considèrent pas ce projet de loi comme une panacée, ni comme un remède miracle aux problèmes fondamentaux auxquels fait face l'industrie canadienne de l'édition. À l'époque où l'on a discuté de l'avenir des hypermarchés américains au Canada, certains ont suggéré que ces mesures sur les importations parallèles étaient tout ce dont nous avions besoin - et que tout irait bien. Telle n'est pas la position de l'AEC. Nous estimons que ces mesures donnent aux éditeurs la possibilité de faire respecter des ententes contractuelles conclues librement. Cela contribue à consolider l'industrie. Toutefois, la question de la propriété étrangère ainsi que d'autres n'entrent pas dans le cadre de cette discussion.

M. Ron B. Thomson (président du Comité du droit d'auteur de l'Association des éditeurs canadiens): Il y a un point qui me paraît semer la confusion. Le scénario que vous avez évoqué se fonde sur une entente de distribution non exclusive - et cela n'est pas couvert par la loi. Ce dont nous parlons, c'est des ententes exclusives. Si un éditeur américain veut conclure avec divers agents au Canada plusieurs ententes de distribution, et qu'aucune n'est exclusive, la loi n'entre pas en ligne de compte.

M. Abbott: C'est justement où je veux en venir avec ma question. Si ce projet de loi était pris en considération à un moment donné, peut-être dans un an ou deux - je ne veux pas dire dans quinze ans - et si une grosse librairie - Chapters ou qui que ce soit - laissait entrevoir la possibilité de réaliser d'importants volumes de vente, parce que ce texte législatif existerait, est-ce qu'une maison d'édition américaine ne serait pas tentée de conclure avec vous une entente de distribution non exclusive? Autrement dit, est-ce que cela ne pousserait pas en fait l'éditeur américain dans cette direction?

M. Thomson: J'en doute car, comme je l'ai mentionné, la commercialisation que ferait un distributeur exclusif a plus de valeur que les ventes rapides qui peuvent être réalisées autrement.

J'ajouterai, pour ce qui est du service fourni, que je peux me procurer un livre aux États-Unis en 24 ou 48 heures, mais que les frais se chiffrent à 60 $ pour un livre qui en coûte 30. Je peux me procurer tout ce que je veux dans les 24 heures si j'accepte de payer des frais de livraison énormes. En fait, le service aux États-Unis est bien pire. Il m'a toujours fallu attendre un mois avant de recevoir le livre que j'avais commandé, à titre personnel, aux États-Unis.

Le président: Monsieur Abbott, c'est la dernière brève question que vous pouvez poser.

M. Abbott: C'est la dernière brève question précédée d'un rapide préambule. Si je pose cette question, ce n'est pas pour argumenter; j'essaie toujours de faire le tour du problème

S'il existait au Canada un gros détaillant ou un mécanisme de commercialisation des livres au détail qui permettrait de capturer 40 p. 100 du marché, est-ce que ce projet de loi n'inciterait pas l'éditeur américain à se dire: «Bon, étant donné que ce projet de loi est en vigueur, je ne peux pas ignorer cette part de marché de 40 p. 100, à cause de ces grands magasins qui vendent des quantités et des quantités de livres».

M. Stoddart: Je ne pense pas que c'est la situation actuelle. Nous ne pouvons pas empêcher, aujourd'hui - même si nous en avons le droit - que quelqu'un importe un livre. Si dans deux ans la situation a évolué, il n'y aura rien de changer à cet égard. L'éditeur en question pourra dire à son agent canadien, ou à n'importe qui d'autre au Canada, nous voulons que vous soyez un de nos agents, ou notre agent exclusif - ou je ne sais quoi.

Quelles que soient ces obligations contractuelles, le projet de loi n'y changera rien. Toutefois, ce qui change radicalement, c'est la façon dont on pourra à l'avenir protéger les droits. Mais, les ententes contractuelles ont toujours priorité car c'est un des fondements de la loi.

M. Abbott: Merci.

Le président: Mme Phinney, et ensuite M. Bélanger et M. Peric.

Mme Phinney: J'ai été la première à prendre la parole lors du dernier tour de table. Est-ce que cette fois-ci je peux céder mon tour à M. Bélanger?

.1945

Le président: Dans ce cas vous devriez peut-être commencer par lui?

M. Bélanger: Je serai bref.

Le président: Commençons par lui. Laissons-lui sa chance.

M. Bélanger: Vous ai-je jamais contredit?

Le président: Jamais. Laissons-lui sa chance.

M. Peric (Cambridge): En deux temps trois mouvements, comme hier soir.

Le président: Hier soir, monsieur Peric...

Une voix: Vous prenez sur son temps de parole.

Le président: Oui, je prends sur son temps de parole. Mais vous savez, hier soir, nous avons reçu une chanteuse québécoise très célèbre. Elle a ébloui M. Peric et finalement, il s'est fait photographier avec elle. Alors, je vais faire inscrire cela au compte rendu.

M. Peric: Monsieur Stoddart, vous avez indiqué que l'on vous renvoyait plus de 10 p. 100 des livres.

M. Stoddart: Oui, entre 20 et 30 p. 100 de la quantité expédiée au détaillant.

M. Peric: C'est un pourcentage élevé.

M. Stoddart: C'est terrible.

M. Peric: Qu'en faites-vous?

M. Stoddart: Que faisons-nous de ces livres?

M. Peric: Oui.

M. Stoddart: Les livres nous reviennent. Dans certains cas, nous pouvons les recycler. Nous enlevons la couverture rigide et la remplaçons par une couverture souple, et nous vendons le livre à moitié prix comme livre de poche. Le prix devient intéressant pour le consommateur.

Si le livre semble ne plus avoir de marché, nous le vendons à des détaillants pour 5¢ à 10¢ au dollar, le prix le plus bas; les détaillants les soldent à 3,95 $ ou 4,95 $.

M. Peric: Bon. Vous avez dit que les auteurs obtiennent des redevances de 10 p. 100.

M. Stoddart: La redevance normale se situe entre 10 et 15 p. 100. En principe, sur 5 000 exemplaires et plus, on obtient une redevance de 12 à 15 p. 100.

M. Peric: Sur quoi?

M. Stoddart: Sur le prix de catalogue du livre.

M. Peric: Sur quel montant, sur les livres vendus ou publiés?

M. Stoddart: Sur les livres vendus. Oui, sur la valeur nette des livres vendus.

Cependant, dans notre secteur, nous avançons l'argent en fonction des ventes possibles. Dans la plupart des cas, l'avance est aussi importante que le montant des gains réels. Bien souvent, ce montant est plus élevé, et parfois nous devons payer les redevances à venir. Mais dans la plupart des cas... Disons que nous avançons 15 000 $ à un auteur. Si les gains sont de 7 500 $, nous avons perdu 2 500 $. Si les gains sont de 15 000 $, nous payons alors les 5 000 $ supplémentaires pendant la période du contrat.

M. Peric: Quand payez-vous l'auteur - au bout de trois mois, quatre mois, six mois?

M. Stoddart: Normalement, on demande tous les six mois un rapport sur toutes les ventes. Ce montant est ensuite comparé à l'avance que nous avons faite avant la publication. Les ventes sont déduites de l'avance et tout ce qui est dû à l'auteur est payé à la fin des six premiers mois. Si l'on n'atteint pas le montant des ventes prévu, au bout des six mois suivants puis tous les six mois par la suite jusqu'à ce que le livre soit épuisé, l'éditeur informe l'auteur du montant des ventes et des redevances qui lui sont dues - et il fait un chèque en conséquence.

M. Peric: Merci.

Le président: Est-ce que vous allez écrire un livre?

Monsieur Bélanger.

M. Bélanger: Monsieur le président, je tiens à féliciter notre greffière d'avoir choisi le bon moment pour la comparution de ces personnes, car M. Stoddart a fait d'une pierre deux coups aujourd'hui. J'ai eu la chance de le rencontrer pour la sortie du nouveau livre de Laurier LaPierre sur Sir Wilfrid Laurier, afin que mon éminent collègue de l'autre côté sache bien de quoi il retourne.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Vous en avez donc obtenu un exemplaire gratuit, monsieur Bélanger.

M. Bélanger: Non, j'en ai acheté deux - et je peux vous montrer le reçu. Je ferai cadeau d'un des exemplaires et je garderai l'autre précieusement. Merci.

J'ai une ou deux questions à poser. Vous nous demandez en réalité de dire à Mordecai Richler qu'il ne peut plus nous vendre ses livres par l'intermédiaire du Book of the Month Club.

M. Stoddart: Non.

M. Bélanger: Ce n'est pas cela.

M. Stoddart: Non.

M. Bélanger: Ce n'est donc que la version américaine du Book of the Month Club.

M. Stoddart: Non. Malheureusement, il n'y a pas de club de ce genre au Canada. Il y en a eu, mais cela n'existe plus. Il y a le Book of the Month Club et le Literary Guild, qui se font concurrence. Les deux sont basés aux États-Unis.

Les droits canadiens pour ces clubs du livre, si cet auteur est choisi par un club du livre, sont vendus à cette compagnie américaine, et les livres sont vendus par le club. Les redevances sont payées sous contrat. Il s'agit d'une activité tout à fait légitime.

.1950

Je crois que quelqu'un a dit hier soir que l'éditeur avait vendu un très grand nombre de livres directement au public. Si j'ai tort, corrigez-moi. On a également parlé des clubs du livre.

Ces clubs sont une industrie en soi. Ce sont des détaillants comme les autres. Si le Canada avait un club du livre, la situation serait différente. Mais il n'en existe pas pour le moment. Nous allons à New York, ou ils viennent nous voir, et nous leur vendons les droits des livres; et ces livres sont vendus tout à fait normalement. Il peut s'agir de l'édition américaine ou de l'édition canadienne; tout dépend des ententes qui ont été conclues.

M. Bélanger: Dans votre mémoire, vous nous recommandez de modifier l'article qui permet à toute personne d'acheter deux exemplaires à un non-titulaire des droits exclusifs de distribution. Vous demandez tout d'abord que nous réduisions le nombre de deux à un.

M. Stoddart: C'est exact.

M. Bélanger: Cette exclusion ne s'applique pas aux ventes des clubs du livre commerciaux, des détaillants ou autres entreprises commerciales semblables destinées à des particuliers.

M. Davidson: Dans notre mémoire, nous disons craindre que les clubs du livre introduisent sur le marché des livres qui n'ont pas fait l'objet des ententes dont Jack a parlé - des éditions parallèles des livres importées au Canada. C'est le problème que nous avons soulevé.

M. Stoddart: À vrai dire, cela n'est plus un problème. En réalité, les clubs du livre, du fait qu'ils détiennent essentiellement un monopole puisqu'ils ne sont que deux sur le marché, agissent de façon très responsable. Nous faisons cette suggestion simplement pour qu'il y ait une protection contre toute initiative future qui pourrait ne pas être aussi légitime.

M. Bélanger: Vous ne seriez donc pas trop surpris si cette suggestion n'était pas prise en compte.

M. Stoddart: Nous préférerions que l'on passe le temps nécessaire pour réviser le projet de loi, et tenir compte de toutes les possibilités.

M. Bélanger: J'ai parcouru votre mémoire. Un autre sujet m'a frappé - mais il se peut que j'aie mal compris. Votre dernière suggestion se lit comme suit:

Pourriez-vous préciser? Je pensais que c'était une formule générale dans la mesure où si nous traitions avec des sociétés de gestion dans d'autres parties du monde, elles seraient définies. Pourquoi cette insistance?

M. Thomson: Parce qu'une société de gestion qui est constituée dans un autre pays pourrait prétendre avoir le droit d'avoir des activités au Canada. Ce faisant, elle pourrait ne pas être régie par la Commission du droit d'auteur.

Il existe une société de gestion qui travaille dans des secteurs de la documentation imprimée - le matériel musical - qui opère en fait au Canada, aux États-Unis, en Australie et en Nouvelle-Zélande. La Commission du droit d'auteur n'a absolument aucun contrôle sur cette société de gestion qui se spécialise essentiellement dans la musique religieuse. C'est une énorme entreprise.

Il existe d'autres moyens qui permettent à une société de gestion des droits de reprographie étrangère d'exercer ses activités au Canada. C'est une éventualité à prévoir.

Cela se produira certainement d'abord dans le domaine du film ou de la radiodiffusion plutôt que dans le secteur du matériel imprimé. Les problèmes seraient très réels.

M. Bélanger: Je ne me rappelle pas avoir vu quoi que ce soit à ce sujet dans les mémoires. Merci de nous le signaler. Nous en parlerons avec les responsables pour voir s'il s'agit d'un oubli.

Finalement, je ne peux résister à la tentation de citer un autre paragraphe. Voilà des mots que nous devrions entendre plus souvent:

L'industrie de l'édition canadienne du livre est un succès sans précédent. Les ouvrages canadiens permettent aux citoyens du pays et aux étrangers de découvrir les richesses du Canada. Nos exportations ont triplé durant les cinq dernières années. Nos auteurs d'oeuvres non romanesques dominent les listes de succès de librairie, et nos romanciers sont acclamés partout dans le monde.

Nous nous portons plutôt bien. Merci.

M. Thomson: Je connais bien le marché hollandais. La Hollande est protégée par sa langue, et son marché représente environ la moitié du nôtre. Nous arrivons à de biens meilleurs résultats par rapport à la taille de notre marché en faisant concurrence aux Britanniques et aux Américains que les Hollandais avec leur marché garanti par la langue. Les auteurs et les petites maisons d'édition canadiennes survivent ici beaucoup mieux qu'aux Pays-Bas par exemple. Nous connaissons beaucoup de réussite. Nous avons tendance à ne pas reconnaître notre réussite, mais nous devons mener une lutte quotidienne pour réussir.

.1955

Le président: Madame Phinney.

Mme Phinney: Dans votre mémoire, vous dites que les bibliothèques sans but lucratif assurent des services de distribution de documents. Je ne comprends pas. Nous n'en avons pas parlé. Personne d'autre n'a soulevé cette question, n'est-ce pas? Je ne voudrais pas revenir sur le sujet s'il a déjà été abordé. Pourriez-vous rapidement expliquer de quoi il s'agit; et comment ces services affecteront vos membres?

M. Thomson: Une entreprise commerciale téléphone à une bibliothèque publique locale et lui demande d'envoyer par télécopieur cinq pages d'une étude économique. La bibliothèque prend un livre protégé par un droit d'auteur, photocopie les cinq ou dix pages et demande 50 $ pour ce travail. Je dis bien 50 $, 10 $ la page.

Mme Phinney: C'est ce que vous appelez un service de distribution de documents?

M. Thomson: Oui. En général ce sont des articles complets. Les gens ne veulent pas acheter le dernier exemplaire du magazine Forbes ou de Canadian Business, ou autre.

Mme Phinney: Ces 50 $ vont donc à la bibliothèque.

M. Thomson: La bibliothèque prend cet argent et déduit les 25¢ de frais de reproduction.

Mme Phinney: Êtes-vous en train de dire que les bibliothèques sans but lucratif agissent ainsi?

M. Thomson: Oui.

Mme Phinney: Qu'entendez-vous par bibliothèques sans but lucratif?

M. Thomson: La bibliothèque de l'Université de Calgary.

Mme Phinney: Que se passe-t-il si Chapters prend la place de la bibliothèque de l'Université de Calgary? Voulez-vous qu'elle continue d'agir ainsi?

M. Thomson: Il existe des services de distribution de documents qui ont obtenu une licence de sociétés de gestion des droits de reprographie, qui perçoivent des frais de contenu demandés à l'usager et redistribués au titulaire du droit d'auteur. Mais l'université prétend qu'il s'agit d'une utilisation équitable; qu'elle peut faire 50 $ à 10 $ la page, mais que l'auteur n'a pas le droit de recevoir 3¢ la page.

Mme Phinney: Bon.

Quelqu'un d'autre a déjà parlé des bibliothèques. Que voulez- vous exactement que les bibliothèques fassent, ou ne fassent pas? Quelles restrictions souhaitez-vous apporter, et comment le projet de loi devrait-il être formulé?

M. Thomson: Tout d'abord, nous recommandons de préciser qu'il s'agit bien de conservation de collections. On peut remplacer un livre abîmé. Il ne s'agit pas d'ajouter quelque chose de semblable, car c'est ce que font précisément les bibliothèques.

Deuxièmement, nous reconnaissons qu'elles peuvent probablement avoir le droit de fournir une copie pour une utilisation équitable - bien que la plupart des usagers s'en chargent eux-mêmes. Nous voulons qu'elles soient des dépositaires du savoir, et non des éditeurs du savoir. Nous ne voulons pas qu'elles fassent des copies d'un document que nous vendrions ou pour lequel nous pourrions percevoir des frais de contenu par l'intermédiaire d'une société de gestion.

Mme Phinney: Avez-vous des suggestions quant à la formulation du projet de loi à ce sujet?

M. Thomson: Nous avons proposé que, dans les nombreux cas où il existe déjà une limite à leurs activités du fait que le document est accessible sur le marché, il soit précisé que «accessible sur le marché» signifie notamment «par le biais d'une licence octroyée à une société de gestion», en ajoutant ces mots. Dans bien des cas, certains d'entre nous ne réimprimons pas de documents, mais allons toucher ce remboursement sur le contenu pour notre travail antérieur et le partager avec l'auteur par le biais d'une société de gestion de droits de reprographie. Nous n'allons pas garder500 exemplaires supplémentaires sur les rayons en espérant en vendre 30 autres.

C'est pourquoi nous pensons que l'expression «accessible sur le marché» inclut également les licences octroyées par la société de gestion, et nous aimerions que le projet de loi le précise. Je pense que cette formulation apparaît dans un certain nombre de mémoires.

Mme Phinney: J'aimerais que vous soyez très clair au sujet des clubs du livre. Les deux clubs américains qui existent actuellement ne vous dérangent pas. Vous vous inquiétez plutôt de l'apparition éventuelle d'un autre groupe qui ne paierait pas, ne ferait pas ce qu'il est censé faire. Vous ne vous inquiétez pas des deux qui existent actuellement.

M. Thomson: Des abus sont en effet possibles. Nous ne disons pas que Mordecai Richler ne peut pas vendre son livre aux clubs du livre américains. Rappelez-vous, toutefois, que Mordecai Richler obtient beaucoup moins de la vente de ce livre importé au Canada que si quelqu'un l'achetait ici au Canada. Le montant des redevances n'est pas de 10 p. 100 du prix de catalogue. Premièrement, le prix de catalogue est très bas; deuxièmement, il ne s'agit que de 3 ou 4 p. 100. À part le fait de placer le nom des auteurs en haut de l'affiche, ce n'est pas leur faire une faveur que de les faire passer par un club du livre.

Mme Phinney: Proposez-vous qu'on abandonne le sujet complètement?

M. Thomson: Oui.

Mme Phinney: Vous dites simplement que vous ne voulez pas d'entreprises basées aux États-Unis; et que les seuls clubs du livre acceptables sont ceux qui seraient ici au Canada.

M. Thomson: Pour être franc, nous avons eu du mal à formuler cette partie. Il nous a fallu plusieurs tentatives pour obtenir le libellé exact. Nous n'avons pas réussi à formuler cette proposition de façon à ne pas toucher en même temps à d'autres aspects légitimes de la politique. Nous espérions peut-être que les rédacteurs du texte de loi...

S'il s'agissait d'une décision politique, nous leur laisserions le soin de la formulation, alors que dans d'autres cas nous leur avons suggéré des points bien précis.

.2000

C'est une question complexe. Comment fermer cette porte et ne pas empêcher une personne qui se trouve dans un pays étranger de ramener un livre qu'elle a acheté dans une librairie, ou de passer une commande à l'étranger pour recevoir quelque chose de difficile à obtenir.

M. Roy MacSkimming (directeur des Politiques, Association des éditeurs canadiens): En ce qui concerne les clubs du livre, le vrai problème n'est pas leur présence aux États-Unis où ils vendent des livres aux Canadiens. Ils répondent en effet à un besoin très réel car de nombreux Canadiens n'ont pas facilement accès à des librairies. Le grave problème est que les clubs des États-Unis devraient vendre l'édition canadienne des livres, ou obtenir les titres du distributeur canadien. Autrement dit, ils devraient agir en bons citoyens.

Le président: Monsieur Flis.

M. Flis: M. Davidson nous a cité un bulletin de la Metropolitan Toronto Reference Library. J'en suis fort heureux car elle met très bien en évidence le dilemme auquel nous faisons face. Lorsque j'ai regardé les manchettes au centre, j'ai pu lire avec intérêt «Crime in the Library - Having a Criminally Good Time». J'ai reconnu sur les photos des dignitaires bien connus.

Le document dit que les étudiants paient 20¢ pour une copie ou 15¢ la feuille en utilisant une machine distributrice; mais pour obtenir une copie laser en couleur, ils doivent débourser 2,55 $. Cet argent est-il redistribué à l'auteur ou à l'éditeur?

M. Thomson: Actuellement ce n'est pas le cas. En fait, la bibliothèque fait au moins 30 p. 100 de profit. CANCOPY est en train actuellement - même dans la forme actuelle du projet de loi - de concevoir une licence de photocopie dans quatre bibliothèques, en collaboration avec les bibliothèques de tout le Canada. Cette initiative a été prise à la suite d'une enquête qui vous a été envoyée il y a une semaine environ. Je ne sais pas si vous l'avez reçue.

Étant donné que les bibliothèques sont conscientes de cet état de chose, elles gagnent beaucoup d'argent. Elles ont la responsabilité de redistribuer cet argent. C'est pourquoi elles sont tout à fait prêtes à conclure ce genre d'entente.

Cette initiative est le fait d'une personne en particulier qui travaille pour le CALUPL. Cet organisme représente les 26 grandes bibliothèques urbaines du pays. Cette licence sera élaborée le mois prochain; elle entrera en vigueur l'an prochain. Une partie de l'argent ira aux créateurs des oeuvres qui sont reproduites en très grandes quantités.

M. Flis: Dans ces conditions, est-il vraiment nécessaire que le texte de loi précise que cet argent...

M. Thomson: Oui. C'est la raison pour laquelle nous pensons que les machines individuelles devraient au moins avoir une licence de droit de reprographie. Il s'agit simplement de placer un avertissement - ne pas violer le droit d'auteur. Ce n'est pas un rôle suffisamment responsable pour les bibliothèques - qu'il s'agisse de bibliothèques publiques ou universitaires.

M. Flis: Dans la plupart des bibliothèques, ce sont surtout les ouvrages de référence qui sont reproduits car ils ne peuvent pas être empruntés.

M. Thomson: Et ils sont également protégés par un droit d'auteur.

M. Flis: Les étudiants sont obligés de faire des copies. Pour moi, je pense que l'auteur et l'éditeur doivent avoir droit à une partie des revenus ainsi générés. Je suis donc heureux queM. Davidson ait soulevé cette question.

En tant que néophyte au comité, monsieur le président, il y a également une autre expression que je n'ai pas bien comprise, lorsque vous avez parlé de la réduction des cas d'exception. Vous avez dit que l'on devrait modifier les dispositions sur la permission de reproduire des textes à des fins pédagogiques en ajoutant le mot «provisoire». Que voulez-vous dire par «reproduction provisoire»?

M. Thomson: Cela sert à renforcer l'idée que ce qui est visé c'est ce qui est écrit au tableau, sur un bloc de conférence ou sur une image présentée au moyen d'un rétroprojecteur. Lorsque vous éteignez la machine ou effacez le tableau, il n'y a plus rien. Ce n'est pas quelque chose qui reste dans la mémoire d'un ordinateur et auquel les gens peuvent accéder à volonté. Nous pensons que les enseignants disposent déjà de ce droit, mais ils craignent toujours que la police du droit d'auteur n'entre dans leur salle de cours lorsqu'il y a plusieurs lignes de Margaret Atwood au tableau.

.2005

Cette exception qui figure dans le projet de loi renforce la position dont tout le monde convient. Nous voulons simplement qu'à notre époque, où ce type de document peut être mémorisé de façon permanente, cette exception s'applique à un système provisoire de présentation.

M. Flis: Monsieur le président, je vais terminer par la même question que j'ai posée aux témoins précédents.

Vous appuyez ce projet de loi. Vous aimeriez que des amendements soient apportés etc., et il faut espérer que certains le seront. Mais si pour des raisons indépendantes de la volonté de ce comité, en raison d'autres témoignages... Seriez-vous en faveur d'une adoption rapide de ce projet de loi tel qu'il est?

M. Stoddart: Tel qu'il est, le projet de loi est très important et nous l'appuyons dans ce contexte. Si rien n'était changé, ce serait déjà une étape dans la bonne direction pour le Canada.

Comme vous parliez des bibliothèques, je me permettrais de faire un commentaire, car cela répond en partie à cette question.

Les bibliothèques canadiennes - les bibliothèques publiques et non celles des écoles - ont des collections canadiennes très limitées. Pourquoi? Pourquoi préfèrent-elles acheter Danielle Steel plutôt que Margaret Atwood? Si vous examinez les enquêtes sur toute cette question, une partie du problème vient du fait que leurs sources, les documents où elles trouvent des renseignements sur ce qu'elles veulent acheter, sont presque exclusivement des journaux et des magazines américains, etc., sauf pour les livres canadiens, bien entendu. Surtout, une bonne partie de leurs sources d'approvisionnement est constituée de grossistes américains. C'est plus facile ainsi. Elles n'ont qu'une facture à faire pour 100 000 $ de livres américains en un mois. Elles n'ont pas besoin de traiter avec dix compagnies à 10 000 $ chacune.

D'une certaine façon, c'est là le coeur du problème. Les bibliothèques publiques - qui sont financées par les contribuables; nous contribuons tous, et certains d'entre nous sommes administrateurs, etc. - pour des raisons économiques et par souci de simplicité, choisissent de traiter avec le seul interlocuteur qu'elles connaissent, c'est-à-dire le marché de gros. Dans le contexte technologique d'aujourd'hui, il n'y a pas de grossiste canadien équipé pour répondre aux besoins du réseau des bibliothèques publiques. Si nous n'avons pas de grossistes, cette situation perdurera. Ou bien les bibliothèques publiques deviendront moins efficaces et commenceront à traiter avec toute sorte de gens.

Si l'exemption visant les achats par les bibliothèques... Quels que soient les mots que l'on emploie, le problème est que si l'on a cinquante succursales et une bibliothèque et que l'on passe une commande pour chacune des cinquante succursales, est-ce là l'exception? Si nos institutions n'achètent pas d'abord chez nous - ce qui n'exclut pas la possibilité de se fournir ailleurs si les livres ne peuvent être obtenus rapidement ou autre - nous n'aurons jamais de grossistes. Nous allons affaiblir nos détaillants et nous nuirons certainement aux éditeurs.

Il me semble que si nous avions un secteur de l'approvisionnement en gros approprié, nous aurions de meilleures collections dans nos bibliothèques. Cela ferait partie de la méthode d'achat normale, et elles ne traiteraient plus avec Baker et Taylor à New York ou Ingram ou Brodart, les grossistes américains, qui sont leurs principaux contacts et sources d'approvisionnement.

C'est pourquoi il me semble que l'exception dont bénéficient ces établissements n'a aucun sens. Pour que notre industrie soit rentable, il ne faut pas que nous ayons une partie seulement des activités et pas le reste. Soit nous trouvons un moyen... de ne pas traiter les établissements de façon injuste... Si l'on ne peut pas acquérir convenablement et rapidement des livres, je n'ai rien à dire. Mais nous devons donner aux Canadiens le temps - au moins deux ou trois ans - de construire l'infrastructure nécessaire.

Le principal élément manquant est le grossiste. Nous avons de bons détaillants, de bons éditeurs et de bons auteurs, mais nous n'avons pas de bons grossistes. Nous avons également de très bonnes bibliothèques. Mais il nous manque ce petit élément. C'est pourquoi les exceptions dont bénéficient les établissements, qu'il s'agisse d'universités, de bibliothèques, de bibliothèques scolaires ou de bibliothèques publiques, me posent un problème. Les grossistes sont particulièrement importants pour eux. Je préférerais de loin que s'organise une coentreprise permettant aux Canadiens de travailler ici et de faire partie de cette communauté de grossistes qui répondrait à nos besoins en tant que Canadiens. Ainsi, les ouvrages de référence que nos bibliothèques utilisent seraient canadiens et non américains, britanniques ou français.

.2010

Pour revenir à la question originale, oui, c'est une étape très importante, mais je pense qu'elle aura des répercussions très différentes dans les divers secteurs de l'industrie du livre, qui comprend les auteurs, s'il n'y a pas d'exceptions. Il y a certaines exceptions techniques qui n'ont rien à voir avec ce dont nous parlons.

Je crois que notre pays est en mesure de se doter d'un secteur de l'approvisionnement en gros efficace et bien administré, et qu'il possède déjà les autres éléments du puzzle. Ce changement, à lui seul - je parle de changer les exceptions s'appliquant aux établissements - contribuerait largement à rapatrier un énorme volume d'affaires dans notre pays, et permettrait aux Canadiens de travailler et de bénéficier du produit de la vente de ces livres.

M. Flis: Merci beaucoup.

M. Davidson: J'aimerais me faire l'écho de ce qui vient d'être dit en ajoutant que l'AEC a confiance dans le processus des audiences publiques. L'équité dont les membres du comité ont fait preuve et les questions que vous avez posées montrent que vous prenez cette question très au sérieux.

Je suis moins familier que d'autres avec les questions de droit d'auteur, mais il me semble évident que les fonctionnaires ont élaboré toutes les options politiques que vous pouvez envisager.

Nous insistons sur l'urgence d'agir, car nous croyons réellement qu'il est temps que les responsables politiques prennent des décisions lorsqu'il subsiste des divergences de vues. Nous vous remercions chaleureusement de nous avoir donné l'occasion de présenter notre point de vue ce soir, car le droit d'auteur est le fondement de l'économie de l'information. Les décisions que vous allez prendre sont très importantes.

Le président: Monsieur Stoddart et vous, mesdames et messieurs qui êtes ses collègues, comme vous l'avez constaté d'après nos questions, nous nous intéressons énormément à votre industrie. Je n'exagérerais pas en disant que la majorité, sinon la totalité, des parlementaires estiment que l'industrie du livre canadien est une valeur intrinsèque de l'identité et du patrimoine canadiens, et que nous souhaitons la renforcer et l'améliorer par tous les moyens possible.

Je pense refléter l'opinion de tous mes collègues en disant cela. Tout ce que nous pouvons faire ensemble pour que le secteur de l'édition, les auteurs et les libraires prospèrent est, je crois, une bonne chose pour nous tous.

Monsieur Stoddart, j'ai été frappé de ce que vous avez dit ce soir au sujet de McGill, qui est sans doute notre université la plus prestigieuse - elle se trouve dans la ville où je vis et quatre de mes enfants y sont allés - et du fait qu'elle pourrait faire ses achats auprès d'une source américaine. Cela est extrêmement important, non seulement à titre de symbole, mais d'un point de vue très concret. J'espère que nous trouverons des moyens de collaborer pour que cela ne se produise pas, car si cela arrive à McGill, l'Université de Toronto, l'Université de Colombie- Britannique et bien d'autres le feront aussi. Ce serait une autre brèche dans la digue.

Nous vous remercions d'être venus ce soir. Nous remercions ceux qui vous ont précédés également. Je pense que nous avons appris beaucoup sur votre industrie grâce aux questions de tous mes collègues, tous partis confondus. Merci beaucoup d'être venus.

M. Stoddart: Merci de l'occasion qui nous a été donnée. Si vous avez des questions ou souhaitez plus de détails, nous serons heureux de vous les fournir. Merci beaucoup.

Le président: Chers collègues, nous avons encore des questions à régler. Nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes.

.2014

.2026

Le président: Je tiens à vous faire savoir qu'une séance d'information est prévue pour ce soir. Nous n'avons pas le quorum, c'est pourquoi je propose de mettre fin à la séance et de tenir une séance d'information informelle. C'est la seule façon. Nous n'avons pas le quorum et nous ne pouvons donc pas avoir de réunion officielle.

Une voix: Allons-nous parler des exceptions?

Le président: Non, cela n'a pas trait aux exceptions.

Une voix: Nous parlons des exceptions depuis le début.

Une voix: Qui comparaît demain?

La greffière du comité: Il y a deux groupes, le Committee of Major Legal Publishers et SARDeC. Ils font l'objet d'exceptions.

Mme Monique Hébert (recherchiste): Oui, il y a des exemptions qui s'appliquent.

Le président: Il n'est pas nécessaire d'y passer la nuit; nous pouvons le faire aussi succinctement que Mme Noel le ferait.

De toute façon, nous n'avons pas le quorum. Je vais donc mettre fin officiellement à la séance pour laisser les interprètes rentrer chez eux. La séance est levée.

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