[Enregistrement électronique]
Le mardi 18 mars 1997
[Français]
Le président (M. Clifford Lincoln, Lachine - Lac-Saint-Louis, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.
[Traduction]
M. Leroux nous a fait savoir qu'il va arriver un peu en retard, mais nous allons tout de même commencer.
Comme vous le savez, l'objet de la réunion d'aujourd'hui est de nous permettre de prendre connaissance du rapport qui a été préparé, dans les deux langues, bien entendu, par les experts du comité, à savoir M. Lemieux, Mme Alter et Mme Noel. Ces personnes vont nous fournir les données de base nécessaires pour entreprendre l'étude de l'évolution du rôle de soutien du gouvernement fédéral en matière de culture au cours du siècle qui vient.
Alors je voudrais tout de suite donner la parole à M. Lemieux et ses collègues pour nous présenter leur rapport, et ensuite, nous pourrons leur poser des questions.
[Français]
Je dois vous dire que nous avons également trois ou quatre questions concernant des affaires courantes à étudier après le rapport de M. Lemieux, et je vous demanderais de rester après l'étude du rapport et les questions pour qu'on puisse discuter de l'itinéraire du voyage que nous devons faire à travers le Canada pour notre étude.
Sans plus tarder, je cède la parole à M. Lemieux.
M. René Lemieux (attaché de recherche auprès du comité): Merci, monsieur le président.
Il y a trois semaines, les membres du comité demandaient aux recherchistes de préparer des notes d'information portant sur le plan de travail adopté par le comité. L'intention était de permettre aux députés de prendre connaissance de ces questions avant et pendant les vacances parlementaires.
Au cours des deux dernières semaines, Wanda Noel, qui est assise ici, s'est jointe à Susan Alter et à moi-même pour accomplir ce travail.
Les deux documents que vous avez devant vous aujourd'hui, l'un étant intitulé «Étude» et l'autre portant sur une liste de témoins proposés, sont le résultat préliminaire de nos travaux. Le premier porte sur les questions relevant du plan de travail et le deuxième, comme je l'ai déjà mentionné, est une liste de témoins.
Comme vous pouvez le voir, ces documents sont incomplets puisque dans le document intitulé «Étude», il manque le tableau numéro 1 à la page 4, le tableau numéro 2 à la page 5, ainsi que la toute dernière partie intitulée «Évolution sociale».
On pourrait aussi qualifier ces documents de préliminaires dans le sens où les questions qui y sont traitées ne couvrent pas tous les aspects qui pourraient être soulevés.
Nous croyons néanmoins qu'il y a suffisamment de matière dans ces documents pour lancer notre discussion aujourd'hui et vous permettre de suggérer d'autres pistes à explorer ou d'approfondir certaines questions.
Vous voudrez sans doute revenir sur les parties qui sont à compléter dans ce document, soit au retour des vacances parlementaires, soit aujourd'hui si nous en avons le temps.
Les deux premières questions qui seront abordées aujourd'hui sont celles qui concernent au plus haut point les membres du comité, à savoir l'impact du commerce international et de la technologie sur les mesures politiques et culturelles. C'est Mme Wanda Noel, qui est ici avec nous aujourd'hui, qui vous parlera de ces questions.
Un autre aspect qui préoccupait les membres du comité était d'arriver à avoir une vue d'ensemble de toutes les mesures politiques et culturelles que nous avons. Cet aspect de notre étude sera présenté par Susan Alter.
Enfin, je me chargerai de traiter de l'impact socioéconomique de certaines de ces politiques.
Monsieur le président, afin de stimuler la discussion, je me permets de suggérer que les députés soient invités à poser leurs questions après chacune des présentations au lieu d'attendre que les trois exposés soient terminés.
Le président: Oui, ce serait beaucoup plus logique. Est-ce que je peux vous poser une question avant de commencer, monsieur Lemieux?
Quelles sont vos intentions concernant les parties du rapport qui ne sont pas complétées, comme les tableaux 1 et 2 et la partie 2.4? Est-ce que Mme Alter et vous-même allez les compléter plus tard, ou bien est-ce que vous allez simplement nous fournir une documentation quelconque?
M. René Lemieux: Notre intention était de compléter ces documents pendant les vacances parlementaires.
Le président: Vous allez donc nous soumettre un document complémentaire. Très bien. Nous sommes d'accord.
M. René Lemieux: C'est cela.
Le président: Monsieur Bélanger, vous avez une question?
[Traduction]
M. Mauril Bélanger (Ottawa - Vanier, Lib.): Je me trompe probablement, mais j'avais l'impression qu'une partie du travail devait consister en une sorte d'aperçu général d'études précédentes de la politique culturelle par d'autres commissions et particuliers. Cela devait nous permettre de nous situer par rapport aux études qui ont déjà été menées dans ce domaine. Je suis tout à fait disposé à attendre cette information, si elle doit nous être fournie, mais si je me fonde sur le document qui nous a été remis et l'explication du travail qui est encore à faire, je n'ai pas l'impression qu'on envisage de nous transmettre cette information- là. Je voudrais donc quelques éclaircissements à ce sujet.
[Français]
Le président: Monsieur Lemieux.
M. René Lemieux: Les tableaux 1 et 2, qui ne sont pas encore prêts, devraient vous donner une vue d'ensemble des mesures et politiques existant dans le domaine des arts et du patrimoine.
Les autres tableaux que vous voyez, soit les tableaux 3.1 et 3.2, couvrent les mesures et les politiques culturelles existantes dans le domaine des industries culturelles.
M. Mauril Bélanger: Il me semble que ce n'est pas ce qui avait été dit lors de nos discussions en comité.
Le président: Je comprends très bien ce que vous voulez dire. Je pense que le commentaire de M. Bélanger a trait à toutes les études qui ont déjà été faites, certaines très récemment.
Qu'est-il arrivé? Est-ce qu'on peut avoir un compendium de ces études? Est-ce que certaines sont tout simplement restées sur les tablettes? Est-ce qu'il y a eu des suites? Est-ce que nous nous reportons à ces études ou si nous recommençons à zéro? Je pense qu'il faut porter une attention particulière à cette question.
M. René Lemieux: Nous avons abordé cet aspect uniquement par le biais des questions qui vont être traitées aujourd'hui, à savoir le commerce et la technologie.
Le président: Vous pouvez terminer, monsieur Bélanger.
M. Mauril Bélanger: Je me permettrai de faire remarquer que le comité avait même adopté une résolution. Je vais vérifier.
On avait demandé précisément que l'on revienne sur toutes les commissions royales ou autres nommées par des gouvernements précédents qui s'étaient occupées des questions de politique culturelle canadienne.
Je crois que tout le monde autour de la table était d'accord sur cette demande de renseignements. On la croyait essentielle à ce moment-là, et je dois dire que je n'ai pas changé d'avis.
Si cela ne se fait pas, il faudra nous le dire pour que nous le fassions nous-mêmes. J'aurais préféré que quelqu'un nous fasse une synthèse de tout cela et je voudrais savoir si nous pouvons espérer que cela se fasse quand même et quand.
M. René Lemieux: Monsieur le président, je voudrais dire que le comité a demandé qu'on s'intéresse au plan de travail, plus exactement aux numéros 1, 2, et 3 du plan de travail. Ceci ne comporte pas la question que vous venez de soulever.
À ma connaissance, le comité a demandé à ce qu'on présente une vue d'ensemble de toutes les politiques et mesures qui existent aujourd'hui afin de ne pas réinventer la roue, ceci sauf pour les tableaux 1 et 2 qui vous sont présentés aujourd'hui.
Le président: Je voudrais aussi préciser, en me reportant à ce que vient de dire M. Bélanger, que M. Leroux a entamé une discussion l'autre jour au sujet de toutes sortes de recommandations qui ont été faites récemment pour que l'on s'assure de ne pas refaire le même travail deux fois de suite. Il vaudrait donc mieux se servir des études qui ont déjà été faites et ne pas recommencer la même chose.
Je voudrais donc savoir si, dans votre présentation, vous avez tenu compte de tout ce qui a été fait auparavant. Comment pouvons-nous savoir quelles sont les commissions passées et les recommandations qu'elles ont adoptées?
M. René Lemieux: Le travail historique n'a pas été fait, j'en conviens. Mais vous avez devant vous une liste incomplète mais extrêmement détaillée de toutes les mesures et politiques qui existent. Personnellement, je ne vois pas très bien pour quelle raison on veut connaître l'historique de ces recommandations.
Un survol historique, c'est un travail considérable. Vous parlez de retourner en 1945 ou 1947, lorsque la Commission royale d'enquête sur l'avancement des arts, lettres et sciences avait été créée.
M. Mauril Bélanger: Ce n'est peut-être pas clair dans votre esprit, mais ça l'est dans l'esprit des membres du comité.
M. René Lemieux: On m'a demandé de présenter une vue d'ensemble des mesures et politiques en vigueur et non pas de faire un historique. Si vous voulez un travail historique, c'est un travail d'une ampleur considérable et je ne crois pas que vous puissiez obtenir les résultats d'un tel travail en quelques semaines. C'est impossible.
Le président: Avant de vous donner la parole, madame Phinney, je voudrais dire encore quelque chose. Nous avons ici le résultat des diverses mesures entérinées par le gouvernement. Nous en avons un inventaire et je pense que c'est essentiel pour le début de nos travaux.
Je reconnais, d'autre part, que si nous voulions faire des recherches à partir de 1947, ce serait un travail considérable. Mais on pourrait chercher dans un passé raisonnable, disons cinq, six ou sept ans, les commissions importantes qui ont adopté des recommandations qui n'ont pas encore été entérinées et qui sont potentiellement toujours valables. Cela nous éviterait certainement de refaire le même travail. Si ces recommandations n'ont pas encore été traduites sous forme de loi ou de règlement et si elles existent encore aujourd'hui, pourrait-on vous demander, non pas de faire un travail historique et d'aller chercher jusqu'à 50 ans en arrière, mais de faire un inventaire des travaux des commissions les plus importantes, comme le comité du Parlement, par exemple?
M. René Lemieux: Vous me demandez s'il est possible de faire cela? J'aimerais qu'on s'entende. Est-ce qu'il faut faire un retour en arrière sur 5 ou 6 ans ou sur 25 ans? Ce n'est pas clair dans mon esprit.
Le président: Vous pouvez peut-être nous dire ce qu'il est possible de faire compte tenu des effectifs dont vous disposez. C'était clair la dernière fois. Nous n'allons pas recommencer la discussion.
Je vais donner la parole à Mme Phinney.
[Traduction]
Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): À mon avis, on ne demande pas quelque chose de bien précis. Ce qu'on demande, c'est qu'on nous mette au courant des travaux qu'auraient menés d'autres groupes ayant fait une étude de même nature par le passé. On ne demande pas à nos attachés de recherche de nous faire tout l'historique de la question, comme ils le disent. On leur demande de se renseigner sur les études qui auraient déjà été faites, et de nous en préparer une synthèse éventuellement, mais pas d'effectuer toute une nouvelle étude. Peut-on avoir des copies de l'information qu'ils auraient réunie? Sinon, peut-on savoir comment se la procurer?
[Français]
M. Paul Crête (Kamouraska - Rivière-du-Loup, BQ): Je pense personnellement qu'il n'est pas nécessaire d'avoir toutes les informations sur cinq ou six ans, mais plutôt sur les moments les plus importants, c'est-à-dire les introductions et les conclusions des rapports principaux qui ont été présentés.
Il s'agirait donc tout simplement de colliger les documents des rapports principaux: l'introduction nous permet habituellement de connaître le contexte dans lequel l'étude s'est faite, et la conclusion nous permet de connaître les recommandations. Ensuite, il ne resterait que l'évaluation des conclusions à faire. Il serait donc plus avantageux de faire ce travail sur les moments-charnières comme les années 1968 à 1972 du premier gouvernement Trudeau, où il y a eu des choix dont les impacts ont peut-être été plus importants que ce qu'on a connu dans les années plus récentes.
M. Mauril Bélanger: J'essaie de me souvenir des détails de notre discussion. Je pense que c'était un peu ce que mon collègue vient de décrire. C'est-à-dire qu'il faudrait que l'on sache exactement quand il y a eu des initiatives gouvernementales traitant de cette question. Je crois sincèrement qu'il faudrait qu'on commence par la Commission Laurendeau-Dunton sur le bilinguisme et le biculturalisme. Ce point de départ me semblerait satisfaisant et on pourrait ensuite rechercher les moments importants qui ont suivi, ce qui nous donnerait une bonne vue d'ensemble.
Je crois vraiment que nous nous lancerions à l'aveuglette dans cette aventure si, comme on nous le propose aujourd'hui, nous n'avions pas cette vue d'ensemble historique avant de commencer les discussions.
Le président: Je voudrais dire, monsieur Bélanger, qu'il ne faudrait tout de même pas aller trop loin dans nos conclusions à ce sujet. Après tout, le but de notre étude est de savoir ce qu'il y a déjà en place aujourd'hui et ce que l'on peut apporter comme améliorations, compte tenu des impacts technologiques en particulier. Je pense donc que tout ce travail n'a pas été fait pour rien. Bien au contraire, il nous sera très utile.
Ce que vous suggérez va sûrement nous aider à avoir une vue d'ensemble et à savoir ce qui a été proposé et ce qui n'a pas encore été fait. Tout ceci sera complémentaire.
Je pense que M. Lemieux sait maintenant ce que nous souhaitons et qu'il pourra nous dire combien de temps il lui faudra pour faire ce travail si on décide de commencer par les six dernières années, comme M. Crête l'a suggéré.
M. René Lemieux: Est-ce que le comité souhaite que l'on collige l'information qui existe déjà et qu'on vous la transmette, ou est-ce que vous voulez un synopsis analytique des recommandations de tous ces groupes?
Le président: On pourrait peut-être commencer par colliger. Une grande partie du travail sera faite, et on verra ensuite.
M. Paul Crête: Je voudrais mentionner les commissions Aird, Sauvageau-Caplan, Laurendeau-Dunton et Applebaum-Hébert, et peut-être d'autres qui sont importantes. Il y en aurait 20, 25, 30?
M. René Lemieux: Je dirais entre 15 et 20, sans aucun doute.
M. Paul Crête: D'accord. Pourriez-vous, dans un premier temps, colliger les introductions et les conclusions, ce qui nous permettra de voir ce qu'il en est?
Le président: On pourrait inviter Mme Noel.
[Traduction]
Mme Beth Phinney: Monsieur le président, je me demande si nous ne serions pas plus à même de comprendre et d'apprécier l'exposé qu'on va nous présenter maintenant si on nous donne d'abord les autres documents à lire. En fait, nous avions demandé qu'on nous remette cette autre information avant notre congé de deux semaines, afin qu'on puisse en prendre connaissance, de façon à connaître le contexte au moment d'entendre l'exposé qu'on propose de nous faire maintenant. Je me demande s'il ne vaudrait pas mieux lever la séance pour nous permettre de prendre connaissance de cette information avant de continuer.
Le président: Madame Phinney, je ne vois rien qui serait en contradiction avec l'information qu'on va nous transmettre maintenant. Cela nous indique simplement ce qui existe maintenant. Je pense qu'il serait utile de savoir ce qui existe. Je ne vois pas en quoi cela pourrait nuire à notre appréciation de l'information qu'on va nous transmettre par la suite.
En fait, ce qu'on va nous donner par la suite va certainement nous aider à déterminer tout ce qu'on n'a pas fait mais qu'on aurait dû faire. Cette information va nous donner une bonne vue d'ensemble. Et cette vue d'ensemble sera utile parce qu'elle nous permettra de voir quels instruments existent actuellement et quelle est la position des différents ministères vis-à-vis des instruments dont ils disposent pour promouvoir et protéger la culture canadienne.
Mme Beth Phinney: Nous allons donc passer en revue ce document?
Le président: Je pense qu'on va laisser le soin à nos attachés de recherche de nous présenter l'information dont ils disposent. Si nous décidons qu'elle n'est pas suffisante, à ce moment-là... Mais je pense que nous devrions saisir l'occasion qui se présente aujourd'hui pour entendre ce qu'ils ont à dire.
Madame Noel.
Mme Wanda Noel (experte-conseil auprès du comité): Merci, monsieur le président. Je suis très heureuse d'être de retour et de vous revoir tous. J'étais ravie qu'on me demande de faire ce travail. Je tiens à vous en remercier. C'était tout un défi à relever.
Le travail à accomplir a été réparti entre nous trois. On m'a demandé de préparer des synthèses de deux questions de fond: la première, sur l'évolution technologique, et la deuxième, sur l'interdépendance commerciale. Avant de vous présenter les faits saillants des documents que nous avons préparés à ce sujet, j'aimerais, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, commencer par présenter un bilan historique ou anecdotique de la question. Je pense que c'est probablement la meilleure approche à adopter, vu la discussion qui vient d'avoir lieu.
Donc, pour vous permettre tout d'abord de situer cette étude, je devrais vous dire, d'entrée de jeu, que le changement technologique a toujours représenté un défi considérable pour le législateur fédéral. Quand nous parlons de technologie, nous semblons vouloir en faire un dossier qui a émergé seulement pendant les années 90.
Mais ce n'est pas vrai, à mon avis. Il convient donc de situer le problème dans son contexte historique.
Je voudrais vous inviter maintenant à remonter dans l'histoire jusqu'aux années 30. À l'époque, le secteur de la radiodiffusion au Canada en était à ses premiers balbutiements. La télévision n'était encore qu'une possibilité lointaine et la plupart des ménages canadiens n'avaient pas de radio.
Dans les années trente, on a demandé au gouvernement fédéral et aux législateurs, un peu comme ce qui se passe autour de cette table, de regarder dans leur boule de cristal et d'essayer d'imaginer l'éventuelle incidence de la télévision sur la culture et la population canadienne. À votre avis, combien de législateurs dans les années trente pouvaient déjà entrevoir l'impact de la télévision?
À l'heure actuelle, la technologie vous confronte, vous les législateurs, aux mêmes problèmes, essentiellement de la même façon. Aujourd'hui, en 1997, la technologie que vous entrevoyez quand vous regardez dans votre boule de cristal n'est pas la radio ou la télévision, mais Internet, la radiodiffusion directe par satellite, et la convergence des techniques de câblodistribution et de téléphonie.
Et dans les années trente, les législateurs qui regardaient dans leur boule de cristal ont pris des décisions assez importantes pour la culture au Canada. La Société Radio-Canada, même si elle avait un autre nom à l'époque - a été créée en 1930. Je pense qu'on peut dire que leur vision était une vision prospective et clairvoyante.
Ce qui a suivi pendant des générations successives est présenté, sous forme synoptique, dans les tableaux: la Loi sur la radiodiffusion, les règlements sur le contenu canadien, et les règles en matière de propriété étrangère. Tous ces éléments venaient soutenir la vision élaborée pour la première fois dans les années trente. Donc, les défis que représente la technologie pour les responsables de la politique culturelle fédérale et pour les législateurs ne sont pas nouveaux.
De la même façon, le travail qu'accomplira ce comité n'est pas nouveau. Ce qui a changé, c'est la technologie qu'on vous demande d'examiner. La prémisse fondamentale de l'action prise dans les années trente vaut également pour la ministre Copps. Elle l'a exprimée en termes très simples mais percutants, à mon avis; elle disait que nous, en tant que Canadiens, devons nous assurer de pouvoir nous raconter nos propres histoires. Telle était l'hypothèse de départ pour le législateur dans les années trente, et c'est encore l'objectif du législateur à l'heure actuelle.
Donc, avec cette toile de fond historique, nous pouvons passer en revue le document portant sur l'évolution technologique. J'aimerais maintenant vous parler un peu de certaines de ces technologies.
Si vous regardez le document qui vous a été remis, la première question qu'on y traite se trouve au paragraphe 2.1.2, à la page 11, c'est-à-dire la rubrique «L'autoroute de l'information». Tout le monde au Canada a entendu parler de l'autoroute de l'information, mais bon nombre d'entre nous se demandent exactement de quoi il s'agit.
J'aimerais donc essayer de vous l'expliquer de deux façons - d'abord, au moyen d'un exemple, et deuxièmement, en vous décrivant de façon générale ce qu'elle permet de faire. Donc, je commence par l'exemple. Quand vous lisez un journal sur un écran d'ordinateur, vous passez par l'autoroute de l'information. Quand vous recevez un message électronique qui vous arrive de l'autre bout de la colline du Parlement ou de l'autre bout du monde, vous passez par l'autoroute de l'information. Quand vous vous servez d'un guichet automatique à la banque ou chez le dépanneur pour obtenir de l'argent, vous passez par l'autoroute de l'information. Quand vous allez à un kiosque commercial afin d'acheter un billet pour un match des Sénateurs d'Ottawa ou pour un concert, vous passez par l'autoroute de l'information.
Quand j'ai introduit ma carte de crédit dans le lecteur se trouvant sur la pompe, pour prendre de l'essence ce matin, je suis passée par l'autoroute de l'information. Quand je télécharge des fichiers vers l'ordinateur qui se trouve dans mon bureau, que ces fichiers se trouvent dans un autre ordinateur à l'autre bout du monde ou tout simplement à l'autre bout de la ville, je passe par l'autoroute de l'information. Quand je me sers de mon téléphone cellulaire pour passer un coup de fil et quand je participe à une vidéoconférence, je passe par l'autoroute de l'information. Elle est tout autour de nous.
Mais de quoi s'agit-il au juste? Cette technologie représente le résultat de la fusion de systèmes de communications et informatiques qui étaient autrefois distincts. Elle représente la fusion de tous ces réseaux en un seul grand réseau par lequel est transmis tout ce contenu. C'est un système qui nous permet, à nous les utilisateurs, de naviguer pour trouver ce que nous cherchons: un billet pour un match de hockey, de l'argent à un guichet automatique, et le fichier qui se trouve au bureau deMme Phinney que je voudrais télécharger vers mon ordinateur.
Ce que cela signifie pour le comité, qui entreprend cette étude, c'est que nous avons maintenant la possibilité de distribuer les produits culturels plus efficacement, plus rapidement et plus économiquement. De même, de nouveaux produits peuvent être élaborés grâce à cette nouvelle technologie. Elle offre un excellent moyen de distribuer les produits culturels traditionnels, c'est-à-dire les films, la musique, les livres, les journaux, et les magazines.
Cette technologie va occuper une place de plus en plus importante dans notre vie quotidienne. En 1999 - c'est-à-dire dans deux ans seulement - il est prévu que 200 millions de personnes dans le monde utiliseront les services d'Internet.
Par rapport à la politique culturelle, la caractéristique la plus importante de ces trajectoires technologiques, c'est qu'elles sont bidirectionnelles. L'autoroute de l'information part du Canada. Sur le plan culturel, elle présente donc des possibilités énormes, étant donné que nous pouvons distribuer nos films et nos livres sur l'autoroute de l'information, et de cette façon, créer de nouveaux groupes de clients à qui nous pouvons vendre nos produits.
Mais cela va dans les deux sens: c'est-à-dire que l'autoroute va également vers le Canada. Cela veut donc dire qu'il existe une multiplicité de trajectoires par lesquelles les produits culturels étrangers peuvent pénétrer au Canada. Il faut donc bien se rendre compte que l'autoroute de l'information, tout en offrant de nouvelles possibilités, représente à certains égards - le mot «menace» est trop fort, mais disons un obstacle à l'application efficace de certaines de nos politiques culturelles actuelles.
Si vous passez à la page 12 du document, vous allez voir que le gouvernement fédéral a préparé sa propre évaluation des progrès réalisés en ce qui concerne le contenu canadien sur l'autoroute de l'information. J'ai voulu inclure cette petite évaluation pour vous indiquer que le gouvernement fédéral prend déjà différentes initiatives, étant conscient de la nécessité d'assurer la présence de contenu canadien sur l'autoroute de l'information. Certaines mesures ont déjà été prises, et d'autres sont prévues. Cette petite évaluation vous donne une liste de différents éléments qui vous aideront à comprendre ce que nous avons fait jusqu'à présent et ce que nous comptons faire à l'avenir.
La deuxième question que j'aborde dans les notes d'information que nous avons préparées concerne le danger, qu'entrevoient certains commentateurs, que le Canada crée une société de «nantis» et de «démunis», technologiquement parlant, s'il ne surveille pas de près l'effet de ses politiques. L'une des prémisses fondamentales de la politique culturelle canadienne depuis les années 30 est justement l'égalité d'accès à la production, aux produits et aux services culturels par tous les Canadiens. Dans le contexte de l'autoroute de l'information, cela voudra dire que tous les Canadiens auront besoin d'un certain matériel, et donc de certaines compétences pour pouvoir bien utiliser ce matériel, s'ils veulent continuer d'avoir un accès égal à la culture.
Un programme fédéral appelé le «Programme d'accès communautaire» a déjà été mis sur pied à cette fin. D'ailleurs, nous avons récemment vu une très belle photo dans les journaux qui représentait des enfants inuit qui visitaient tous les coins du monde par l'entremise d'Internet. Ce matériel a été financé en partie par le Programme d'accès communautaire.
Nous avons également mis le doigt sur une autre question importante, à savoir la possibilité, au moyen des nouvelles technologies, de contourner les politiques culturelles. J'ai déjà donné deux exemples pour illustrer ce phénomène: d'abord, les services de radiodiffusion directe à domicile par satellite. La plupart d'entre vous ne vivez sans doute pas en milieu rural, mais moi, oui. Il est assez facile de donner une adresse non canadienne - c'est-à-dire une adresse américaine - et d'accéder aux services américains de radiodiffusion directe à domicile par satellite, services qui ne sont pas autorisés par le CRTC. Donc, nous sommes en présence d'un moyen technologique qui permet de contourner les politiques culturelles actuellement en vigueur en ce qui concerne la réception des services de radiodiffusion directe à domicile par satellite.
Mon deuxième exemple fait référence à Sports Illustrated. Nous savons tous ce que sont des magazines à tirage dédoublé. Dans ce cas, la technologie a permis aux responsables du magazine Sports Illustrated de ne pas enfreindre les dispositions tarifaires canadiennes interdisant l'importation de magazines à tirage équifractionné - et ce, tout simplement parce qu'ils n'ont pas importé les magazines; ils se sont contentés de transmettre par voie électronique le contenu rédactionnel à l'imprimeur canadien, qui a ensuite fait imprimer les magazines au Canada.
Voilà donc un autre moyen par lequel la technologie peut compromettre l'application de mesures culturelles actuelles. Par ailleurs, un facteur décisif pour l'élaboration de nouvelles mesures sera certainement la facilité avec laquelle on peut les contourner grâce à la technologie.
Le paragraphe 2.1.7 traite de l'impact de la technologie sur les établissements du patrimoine. La technologie a une incidence à la fois positive et négative sur ces établissements - positive, en ce sens qu'elle permet de rejoindre de nouveaux auditoires beaucoup plus importants.
Citons, à titre d'exemple, le contrat signé il y a environ un an par les Archives nationales du Canada et la société Corel pour produire 10 CD-ROM représentant les collections des Archives nationales qui sont vendues par l'entremise du réseau de Corel. Bon nombre de trésors qui font maintenant partie de la collection des Archives nationales n'auraient jamais été accessibles, mais le sont maintenant grâce aux CD produits par la société Corel.
Donc, il y a également une incidence très positive en ce sens que les trésors nationaux de nos établissements du patrimoine atteignent maintenant de nouveaux auditoires qui n'auraient jamais pu y accéder précédemment.
L'incidence négative se traduit par la crainte que le nombre de personnes qui visitent ces établissements baisse, étant donné qu'on pourra désormais utiliser son propre ordinateur pour accéder à ces collections.
Le document sur l'évolution technologique se termine par une série de questions qui figurent aux pages 18 et 19. Ces questions sont là pour vous inciter à la réflexion. Ce sont d'ailleurs des questions que vous voudrez peut-être approfondir avec bon nombre des témoins qui figurent sur la liste de témoins proposés.
Le deuxième document qu'on m'a demandé de préparer concerne l'interdépendance commerciale.
Les différentes études révèlent en effet que le commerce et la culture sont de plus en plus interdépendants. Plusieurs raisons expliquent ce phénomène.
D'abord, le Canada est sans aucun doute une nation commerçante.
Deuxièmement, au cours des dernières années, la politique culturelle du gouvernement fédéral, au lieu de favoriser la création de produits culturels canadiens pour les Canadiens, met de plus en plus l'accent sur la vente de ces produits à l'étranger. C'est ainsi qu'a été créé le lien avec le commerce.
Troisièmement, le monde devient de plus en plus petit, non seulement pour le Canada, mais pour tous les pays du monde. Depuis 1989, c'est-à-dire il y a environ huit ans, nous avons conclu les accords commerciaux internationaux suivants: l'Accord de libre- échange entre le Canada et les États-Unis, l'Accord de libre- échange nord-américain, l'Accord général révisé sur les tarifs douaniers et le commerce, l'Accord général sur le commerce des services, l'Accord sur la technologie de l'information, et enfin - en février de cette année - le nouvel Accord sur les télécommunications de base.
Cela fait beaucoup d'accords commerciaux en très peu de temps. Et c'est une bonne indication que le Canada, à titre de nation commerçante, est maintenant actif sur les marchés mondiaux.
La première sous-rubrique que j'ai examinée dans la documentation portant généralement sur le commerce et la culture est ce que j'appelle «la mondialisation». Quand j'ai vu ce terme pour la première fois, j'avais du mal à en extraire le vrai sens. C'est un mot à la mode, et tout le monde en parle, mais qu'est-ce que cela signifie au juste?
Eh bien, ce terme décrit le phénomène de l'intégration des économies du monde. Par le passé, dans le domaine culturel, le gouvernement fédéral prenait toutes sortes de mesures. Mais ces mesures visaient à soutenir la production culturelle canadienne. Or, il y a environ sept ans, cette politique a été réorientée de façon à soutenir la promotion de nos produits culturels à l'étranger.
Je pense qu'on peut dire que notre politique culturelle fait maintenant partie intégrante de la politique étrangère du Canada, à un point tel que la croissance future du secteur culturel est perçue par le gouvernement fédéral comme étant tributaire du degré d'acceptation des produits culturels canadiens sur les marchés étrangers. C'est peut-être un peu excessif à certains égards, mais je crois que la tendance que traduit cette réorientation des politiques est tout à fait visible dans les programmes mis sur pied par le gouvernement fédéral.
La troisième question que j'ai examinée concerne ce que j'appelle «l'exemption culturelle dans les accords internationaux». Par le biais d'une telle exemption, un gouvernement national peut adopter des mesures destinées à mettre en valeur la culture dans ce même pays, mesures qui seraient autrement contraires à un accord commercial. L'Accord de libre-échange entre le Canada et les États- Unis, l'ALÉNA et les deux accords du GATT prévoient tous des exemptions culturelles. On en parle d'ailleurs beaucoup aux nouvelles depuis un moment, car l'OMC, c'est-à-dire l'Organisation mondiale du commerce, a récemment décidé, dans le cas du magazine Sports Illustrated, que la taxe d'accise sur la publicité dans les magazines à tirage dédoublé était contraire aux règlements du GATT.
La plupart des commentateurs qui se sont prononcés sur la décision de l'OMC y voient, à son niveau le plus élevé, l'affrontement de deux approches tout à fait divergentes.
La première part du principe que les produits culturels sont des produits comme les autres. Peu importe qu'il s'agisse de volaille ou de grains de café, les livres, les magazines et les films sont des produits à vendre au même titre que la volaille. Ils sont tous pareils, c'est-à-dire des biens à vendre, qui relèvent tous du système d'échanges international, et par conséquent, les mêmes règles devraient s'appliquer. Les affaires sont les affaires.
La deuxième prône le retrait complet des produits culturels du système commercial international et part du principe que ces produits devraient échapper aux règles, vu leur importance pour l'identité nationale. C'est un conflit qui, au lieu de disparaître, va aller en s'intensifiant, comme l'illustre bien la récente décision des Américains de soumettre le cas du magazine Sports Illustrated à l'Organisation mondiale du commerce.
Une autre tendance que j'ai repérée est celle qui consiste à «établir des alliances». Le Canada n'est pas le seul petit pays à être envahi par des produits culturels provenant en grande partie des États-Unis. Le gouvernement fédéral a d'ailleurs récemment adopté une stratégie qui consiste à se trouver des alliés dans d'autres pays qui connaissent la même situation que le Canada. Ainsi la ministre Copps se cherche des alliés dans de plus petits pays dans l'espoir d'en arriver à une stratégie internationale sur la culture et le commerce. Ce n'est pas quelque chose de nouveau dans la politique fédérale, étant donné que nous avons des accords internationaux de coproduction cinématographique depuis un certain nombre d'années. Dans ce contexte, l'établissement d'alliances avec d'autres pays se fait à un niveau supérieur pour permettre d'en faire la promotion en général, à l'échelle internationale.
La question suivante que j'ai examinée est celle des «limites imposées à l'égard de l'investissement étranger». Dans le secteur culturel, le gouvernement fédéral a adopté des lois dans différents secteurs pour s'assurer que la production et la distribution de produits culturels demeureraient entre les mains de Canadiens. Notons, à titre d'exemples, la Loi sur Investissement Canada, la Loi sur la radiodiffusion, et la Loi sur les télécommunications. Toutes ces mesures législatives limitent l'investissement étranger d'une façon ou d'une autre.
Quant à la dernière rubrique, je l'ai intitulée: «Pour commercer, il faut avoir quelque chose à vendre»; c'est un titre qui relève davantage de la langue parlée peut-être, mais il me paraissait particulièrement descriptif. Pour participer à tout système commercial international, il faut nécessairement avoir quelque chose à vendre.
Au Canada, cela signifie que nous avons absolument besoin d'un marché intérieur de productions culturelles sûr pour avoir des produits à vendre à l'étranger. Il s'agit donc d'une politique culturelle à deux volets, en ce sens que, d'une part, elle répond aux besoins culturels canadiens en créant un marché intérieur sûr, et d'autre part, elle permet à ces produits culturels d'être vendus à l'étranger, ce qui est favorable à nos intérêts commerciaux.
Dans cette section, j'énumère certaines mesures conçues au fil des ans pour soutenir cette production, mesures qui ont un effet secondaire, puisqu'elles nous permettent également de vendre ces produits à l'étranger. Cette liste figure à la page 25.
Comme c'est le cas de la première analyse, celle-ci se termine par une série de questions destinées à orienter votre réflexion, pour que vous voyiez mieux, en essayant d'assimiler toute cette information, les éléments les plus importants à approfondir avec les témoins.
Voilà donc pour ma contribution au projet. Je cède à nouveau la parole au président. Merci.
[Français]
Le président: Monsieur Crête, est-ce que vous avez des questions après cette première partie?
M. Paul Crête: Je veux parler de technologie. Il y a, bien sûr, les éléments de contenu, mais dans le document, il n'y a pas d'indication de l'effet que cela va avoir sur les deux langues officielles au Canada.
L'autoroute électronique, entre autres, aura un impact très différent selon la langue. Si, dans une vision canadienne, on veut faire la promotion des deux langues, est-ce qu'on a étudié les différences d'impact?
Je pense qu'on va retrouver là ce qu'on retrouve par rapport aux réseaux de télévision. Pour le Québec comme pour le Canada francophone, il y a en quelque sorte une barrière naturelle qui permet à la culture locale de prendre une place plus grande, alors que le Canada anglais, qui n'a pas cette barrière, doit faire face à des problèmes plus complexes. Dans la préparation de cette étude, avez-vous exploré ou développé des moyens qui permettraient de voir quel type d'impact cela pourrait avoir sur le développement des deux langues au Canada?
[Traduction]
Mme Noel: Oui, nous étions conscients de l'importance de cette question, et nous en avons même longuement parlé parmi nous. Cependant, nos recherches n'ont pas révélé l'existence de programmes particuliers traitant spécifiquement de la question de la langue. Dans certains des documents, vous allez voir que nous avons fait une ventilation de ce qui existe en français et en anglais, notamment dans le secteur de la télévision, car comme vous l'avez signalé - à juste titre, d'ailleurs - les effets sont très différents. Je pense que le gouvernement va devoir créer des programmes ciblés dans ce secteur, car les besoins sont effectivement très différents en anglais et en français.
Mais jusqu'à présent, même si nous étions conscients du problème et si nous en avons parlé dans la documentation, nous n'avons pas réussi à trouver d'initiatives portant directement là- dessus. Donc, ce n'est que nous n'en étions pas conscients, mais plutôt que nous n'avons rien trouvé.
Mais vous avez raison de dire que j'aurais dû le mentionner.
[Français]
M. Paul Crête: Je crois comprendre que vous vous êtes basée sur les émissions qui existent à la télévision. Cela veut dire qu'au niveau de l'autoroute électronique, il n'y a pas eu non plus ce type de vision pour assurer le lien entre le Québec et la francophonie, d'une part, et les autres provinces anglaises et le Commonwealth ou les États-Unis, d'autre part. En tout cas, je parle des réseaux d'échange. Vous n'avez donc pas trouvé si, actuellement, la technologie, les modes de fonctionnement et les réseaux existants favorisent le développement des communications dans la langue anglaise plutôt que dans la langue française ou si c'est un champ d'action qui est vierge et sur lequel on ne peut pas porter de jugement pour l'instant. C'est bien cela?
[Traduction]
Mme Noel: La réponse à votre question est oui, c'est un champ d'action nouveau. Susan vient de me dire que certaines mesures sont actuellement en voie d'élaboration, et nous pouvons certainement vous fournir des notes sur les initiatives qui sont envisagées.
En général, le contenu canadien sur l'autoroute de l'information est une question tout à fait nouvelle. Les éventuelles initiatives à prendre pour l'une ou l'autre langue seraient en réalité un sous-groupe. Mais au niveau de la politique, nous ne nous sommes pas encore attaqués au principe général.
Mais si on me demandait ce que je vois comme possibilité, je dirais que l'établissement d'alliances avec de petits pays ayant des besoins particuliers, qu'il s'agisse de besoins linguistiques ou culturels, ou encore avec d'autres pays qui ont la même langue ou les mêmes besoins culturels, serait une très bonne chose. Il me semble d'ailleurs qu'on a déjà commencé ce travail dans le contexte du système commercial international et de la technologie.
[Français]
M. Paul Crête: Merci.
[Traduction]
Le président: Puis-je vous interrompre brièvement pour explorer un peu plus le point soulevé par M. Crête?
Mettons que nous partions du principe que la langue et la culture sont interdépendantes et qu'il est plus difficile, d'après les éléments d'information dont nous disposons actuellement, d'avoir le même impact en français au Canada qu'en anglais, étant donné que l'anglais est la langue parlée aux États-Unis et que ce pays est plus puissant que le nôtre.
Si nous prenons ensuite comme hypothèse que l'autoroute de l'information va dicter une bonne partie des éléments de notre culture future, comment donc s'assurer, par rapport aux 200 millions de personnes qui vont être touchées par cela, que les gens qui parlent la langue de la minorité au Canada, qui est le français, auront les mêmes possibilités? Autrement dit, comment s'assurer que l'incidence sur la culture va être équilibrée? À mon avis, c'est une question importante à laquelle il faut absolument s'intéresser.
Mme Noel: Oui, absolument.
Le président: Autrement dit, on peut parler du principe qui sous-tend le contenu canadien, mais l'aspect linguistique est certainement un aspect important du contenu canadien.
Mme Noel: Oui; et tout cela a été très bien expliqué, disons du point de vue des éléments qui en font partie.
Le président: Oui.
Mme Noel: Je suis tout à fait d'accord. Au fur et à mesure de vos rencontres avec différents témoins dans le cadre de votre étude, vous voudrez peut-être inviter un certain nombre d'entre eux à vous faire des propositions très concrètes sur la manière d'atteindre cet objectif.
Le président: Il faudrait peut-être l'inclure dans la liste des questions.
Mme Noel: Oui.
Le président: Monsieur Abbott.
M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Merci, monsieur le président.
Pour ce qui est des exemptions culturelles que prévoient certains accords internationaux, certains fonctionnaires semblent ne pas être très sûrs s'il existe ou non une exemption culturelle.
Je vais essayer de formuler ma question de façon à éviter de compromettre votre position à titre d'expert indépendant. Pourriez- vous nous dire si, d'après vous, suite aux négociations de l'Accord de libre-échange, de l'ALÉNA et du GATT, mais spécialement de l'ALÉNA, il existe à l'heure actuelle une véritable exemption culturelle - c'est-à-dire une mesure qui soit vraiment efficace - ou est-ce simplement de la poudre aux yeux?
Mme Noel: C'est en effet une question à prendre avec des pincettes.
Dans ma recherche et dans mes conversations avec différentes personnes à ce sujet, c'est ma formation d'avocate qui prend le dessus. Toute exemption, que ce soit celle de la Loi sur le droit d'auteur que nous avons examinée pendant des mois et des mois l'automne dernier, ou celle qu'on retrouve dans un accord commercial international, donne exactement le même résultat. Le champ d'application de l'exemption est explicité dans l'accord, de sorte que certains éléments sont visés, et d'autres non.
L'une des questions fondamentales que soulève ce dossier, comme vous allez d'ailleurs le constater quand vous aurez le temps de lire au complet ces analyses, c'est que le champ d'application de l'exemption culturelle qu'on retrouve actuellement dans l'ALÉNA et l'Accord du GATT est un signe précurseur de ce qui nous attend à la prochaine ronde de négociations du GATT, à l'occasion de laquelle les Américains vont sans doute remettre toute cette question sur le tapis. Ils vont nous chicaner sur le champ d'application de l'exemption culturelle.
La question que vous m'avez posée était la suivante: Existe-t-il ou non une telle exemption? Mais à mon avis, ce n'est pas ça la question fondamentale. Pour moi, la question fondamentale est de savoir quelle est l'étendue de cette exemption. C'est ça la question fondamentale que nous devons examiner. Nous avons déjà certaines indications dans la décision préliminaire de l'OMC sur le cas du magazine Sports Illustrated. Dans sa décision, l'OMC trouvait que certains aspects de l'exemption culturelle n'étaient pas très utiles, mais il faut dire que cette décision portait sur d'autres éléments, notamment des dispositions du GATT, et pas simplement sur l'exemption culturelle.
Donc, au cours de la prochaine ronde de négociations, nous allons peut-être devoir élaborer une autre exemption. La façon dont nous allons la formuler ou la négocier déterminera la latitude qu'auront le Canada et d'autres membres de l'Organisation mondiale du commerce pour protéger leurs industries culturelles en dehors des règles prévues dans ces accords.
Je ne cherche pas à m'esquiver. Mais peut-être auriez-vous dû formuler votre question... Voilà une réponse typique d'avocat, n'est-ce pas?
M. Jim Abbott: Et je vous en remercie. Je fais appel à votre expertise dans ce domaine. Disons que si je voulais tenter de reformuler ma question en ma qualité de non-initié, je vous demanderais ceci: Êtes-vous en train de nous dire que même si l'Accord de libre-échange et l'ALÉNA contiennent une exemption culturelle, le champ d'application de cette exemption n'est pas clairement défini et que les deux parties peuvent donc l'interpréter de façon différente?
Mme Noel: Oui, c'est un aspect du problème.
L'autre aspect, c'est que les mots n'ont pas toujours la même signification pour tout le monde. Par conséquent, le champ d'application de l'exemption proprement dite n'est pas clair, comme nous l'avons d'ailleurs bien vu en discutant des exemptions de la Loi sur le droit d'auteur.
Le comité a entendu différents témoins à ce sujet. Eh bien, à partir d'une même formulation, on s'est retrouvé avec deux interprétations diamétralement opposées. Il en va de même pour l'exemption culturelle que prévoient ces accords.
M. Jim Abbott: Merci.
Merci, monsieur le président.
Le président: Avez-vous des questions, madame Phinney?
Mme Beth Phinney: Non, pas pour le moment.
M. Russell MacLellan (Cap-Breton - The Sydneys, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je voudrais approfondir un peu la question soulevée par M. Abbott. Jusqu'à un certain point, je suis d'accord avec vous pour dire que la question fondamentale dans ce dossier n'est pas de savoir que l'exemption culturelle existe ni l'étendue de cette exemption. Je pense qu'on peut voir la chose sous un autre angle. Je dirais que l'étendue de cette exemption culturelle dépend dans une très large mesure de sa relation avec le commerce.
Voilà ce qui me préoccupe. Du moment que le facteur commerce ou concurrence est présent, l'aspect culturel devient nécessairement moins important. On commence à entrevoir une certaine tendance dans le cas de la Loi sur le droit d'auteur. À mon sens, cela pose problème non seulement dans cette loi mais ici également, et je voulais juste savoir ce que vous en pensez.
Mme Noel: Je suis entièrement d'accord avec vous. On peut examiner l'exemption culturelle et certains aspects de la Loi sur le droit d'auteur, comme vous l'avez signalé à juste titre, d'ailleurs, et les comparer aux dispositions analogues qui se trouvent dans certaines lois ou des accords commerciaux internationaux. Et à force de les examiner, on peut en arriver à des interprétations complètement différentes.
Si vous partez du principe que les affaires sont les affaires, vous arrivez à une conclusion. Par contre, si vous y voyez surtout une question de politique culturelle, les mêmes termes vont vous faire parvenir à une conclusion complètement différente.
Pour moi, tout cela est le fait d'un affrontement permanent entre deux points de vue. On l'observe sur la scène internationale. À mon avis, ce conflit ne va pas disparaître. Il va continuer à tout jamais. Pour moi, il sera toujours présent.
Des pays comme les États-Unis, qui exportent leurs produits culturels et veulent que tous les marchés du monde leur soient accessibles, sans restriction, vont contester sans arrêt des mesures législatives comme celle qui concerne les magazines à tirage dédoublé. Nous soutenons qu'il s'agit là d'une mesure culturelle. Mais ils ne sont pas d'accord et ils nous répliquent qu'on veut simplement protéger une industrie nationale et qu'il s'agit là d'une question commerciale. Tout cela va continuer, à mon avis.
Ainsi il importe qu'il existe des mécanismes d'arbitrage adéquats au niveau international, afin que les deux points de vue puissent être présentés. Et le libellé de l'exemption culturelle est évidemment un facteur très important aussi. Donc, je suis d'accord avec vous.
M. Russell MacLellan: Je voudrais soulever un autre point, si vous me permettez. En ce qui concerne les mécanismes de règlement de différends, je me demande parfois si les motifs accompagnant les décisions sont vraiment suffisants.
Je vais situer le problème dans un contexte juridique. Quand vous vous présentez devant un tribunal, ce dernier va exposer les raisons de sa décision de façon claire et précise.
Avez-vous l'impression que ces comités d'examen qui sont établis pour régler un différend assortissent leurs décisions de motifs aussi clairs et précis? Est-ce que les décisions que rendent ces comités d'examen vont nous permettre de réunir un ensemble de connaissances à partir duquel nous pourrons peut-être prédire les décisions et les résultats futurs, comme on peut le faire dans la common law?
Mme Noel: C'est une très bonne question. Je n'ai jamais vraiment vu la chose sous cet angle-là. Mais à mon sens, nous n'avons pas suffisamment d'antécédents pour nous permettre de faire une évaluation éclairée. Mais je suppose que la structure de ces comités d'examen est effectivement critique, car c'est comme pour toute autre chose: par exemple, la qualité de notre système judiciaire et de nos tribunaux dépend nécessairement de la qualité de nos juges. Si les juges ne sont pas bons, la jurisprudence ne va pas non plus être bonne.
C'est une question importante qu'il conviendrait d'approfondir à l'échelle internationale. Il nous faut nous assurer que l'infrastructure est adéquate et que les personnes qui sont nommées sont compétentes. Il nous faut des gens qui peuvent créer cet ensemble de connaissances et de précédents pour que ceux et celles qui suivent puissent y recourir. C'est un point très intéressant que vous avez soulevé.
M. Russell McLellan: Il n'y a pas que cela. Les États-Unis nous auront peut-être à l'usure avec tous ces différends, qu'on parle de bardeaux ou d'autres produits. Ils déposent une plainte, mais s'ils n'ont pas gain de cause, ils vont tout simplement déposer une autre plainte, comme ils l'ont fait par le passé. Disons que l'avenir m'inquiète, même dans les secteurs où notre action est justifiée.
Mme Noel: D'où l'importance de la structure et des précédents qui sont établis.
M. Russell McLellan: Oui, nous avons besoin de précédents pour savoir ce qui a motivé une décision. J'espère que le ministre et le gouvernement suivent de près la situation en vue de réunir justement un ensemble de motifs et de précédents qui vont nous permettre de comprendre les décisions qui sont prises.
Mme Noel: Cela concerne surtout le long terme, mais c'est certainement très important.
M. Russell McLellan: Mais toutes ces mesures visent le long terme. En tout cas, en ce qui me concerne, il ne s'agirait pas de mesures appliquées dans l'immédiat seulement.
Merci, monsieur le président.
Mme Beth Phinney: Monsieur le président, je voudrais simplement demander à M. McLellan si nous avons le droit de demander qu'on nous donne des motifs plus explicites une fois qu'une décision a été prise? Avons-nous le droit de faire cela? Je ne sais pas c'est possible dans le cadre de cette procédure de règlement des différends.
M. Russell McLellan: Je n'en sais rien. Je ne crois pas qu'on n'ait jamais essayé de le faire - du moins, pas à ma connaissance. Il n'y a pas de procédure d'appel. La décision est annoncée, et le processus s'arrête là. À mon avis, c'est sans doute parce qu'on ne s'est jamais vraiment attardé sur cet aspect de la question.
Mme Noel: Il y a également la question de l'important rôle que jouent les précédents.
M. Russell McLellan: Oui, absolument; en réalité, nous partons de zéro chaque fois qu'un de ces comités d'examen est établi pour régler un différend.
Mme Beth Phinney: Et qui au sein du gouvernement devrait être chargé de négocier, ou de s'assurer que les motifs qui nous sont fournis sont plus précis? Qui aurait cette responsabilité?
Le président: Je pense que le ministre du Commerce international s'occupe des appels en s'appuyant, bien entendu, sur l'expertise du ministère de la Justice, etc. Mais je crois que le ministère du Commerce international se charge d'interjeter appel au nom du gouvernement, n'est-ce pas, madame Alter?
Mme Susan Alter (attachée de recherche): Une procédure d'appel est déjà en place. Je ne sais pas si le gouvernement a déjà annoncé s'il a l'intention ou non d'interjeter appel.
Mme Noel: Je pense qu'il l'a déjà fait.
Le président: Il faudra évidemment suivre de près la situation.
Madame Alter, êtes-vous prête à faire votre exposé?
Mme Alter: Je serai très brève. Je voudrais simplement vous expliquer les tableaux. Comme le disait René dans ses remarques liminaires, lorsque le document sera terminé - il s'agit encore pour le moment d'une ébauche - il comprendra quatre tableaux. Pour le moment, il y en juste deux qui sont prêts, et ces tableaux énumèrent les mesures fédérales de soutien culturel qui sont actuellement en vigueur.
Ce que j'aimerais donc faire, c'est passer en revue avec vous les deux tableaux qui sont prêts, pour vous indiquer ce qu'ils contiennent. Le tableau 3.1, que vous trouverez à la page 6, énumère les mesures de soutien en faveur des industries culturelles - y compris le film et la vidéo, les enregistrements sonores et la publication - qui sont actuellement en vigueur. Ensuite, au tableau 3.2, vous avez les mesures visant les autres industries culturelles, c'est-à-dire les entreprises de radiodiffusion et de distribution. Si cette information est répartie en deux tableaux, 3.1 et 3.2, c'est tout simplement parce que je n'ai pas pu tout mettre dans un même tableau.
Les tableaux 1 et 2, qui ne sont pas encore prêts, vont énumérer les mesures de soutien en faveur des arts - c'est-à-dire, les arts du spectacle, les arts plastiques, et la littérature. Cela comprendrait également les mesures de soutien en faveur de la conservation du patrimoine - c'est-à-dire les musées et les galeries, les lieux et les édifices historiques, de même que les bibliothèques et les archives.
Si vous retournez à la page 6, vous allez remarquer que la première colonne du tableau 3.1 à l'extrême gauche est ombrée. Cette colonne énumère les mesures de soutien, que nous avons réparties en 10 sous-catégories. Cette colonne de mesures de soutien sera la même dans chaque tableau. Par conséquent, les 10 sous-rubriques pour les mesures de soutien seront les suivantes: infrastructure publique, financement direct, incitatifs financiers; et ensuite, à la page suivante, redevances, règles sur la propriété canadienne, exigences en matière de contenu canadien, et droits et protections prévus par la loi.
Et à la page suivante, les accords internationaux, les services publics, et enfin, la politique en cours d'élaboration. Cela englobe les différents éléments que nous avons brièvement abordés en parlant de l'autoroute de l'information et du contenu canadien en français. Des mesures n'existent pas encore dans ce domaine, mais elles sont en voie d'élaboration. Voilà donc l'information que vous trouverez dans les dernières cases du tableau.
Si vous voulez lire les tableaux sans nécessairement prendre connaissance de tous les détails, à la page 6, où se trouve le tableau des mesures de soutien en faveur des industries culturelles, si vous regardez la rubrique du financement direct, vous verrez la liste complète des mesures de financement direct en faveur des trois industries culturelles qui sont nommées au haut du tableau, c'est-à-dire, film et vidéo, enregistrements sonores, et publication.
Vous pouvez également lire les tableaux verticalement. Par exemple, si vous voulez connaître toutes les mesures fédérales de soutien en faveur du secteur de la publication, par exemple, vous n'avez qu'à passer à la colonne «Publication» et lire ce qui est écrit. Tout en fait en haut, vous avez la rubrique «Infrastructure publique», et juste en dessous, la rubrique «Financement direct». Et c'est la même présentation sur chacune des pages dont je viens de vous parler.
Je vous demande de passer maintenant à la page 7, toujours pour le secteur de la publication. Je voulais vous mentionner une chose au sujet de la décision de l'OMC. On a parlé tout à l'heure du tarif douanier interdisant l'importation physique de tirage dédoublé de périodiques étrangers. Eh bien, vous allez justement voir que cette mesure est indiquée sous la rubrique des redevances. Il n'est pas certain qu'on puisse la conserver, mais pour le moment, elle existe, de même que la taxe d'accise de 80 p. 100 sur les tirages dédoublés.
Vous allez voir qu'il y a un grand nombre de sigles dans ces tableaux. Je m'en excuse d'avance, parce que je sais que cela va vous obliger à vous référer constamment à la liste de sigles qui précède les tableaux. Mais on n'a vraiment pas pu faire autrement, en raison du peu de place dont on disposait. J'ai essayé de préparer des tableaux aussi concis que possible.
Je voudrais maintenant vous indiquer ce qui ne se trouve pas dans ces tableaux. Ils ne vous donnent pas le détail de tous ces différents programmes et mesures. On vous indique le titre du programme, le ministère dont il relève, et une brève description des mesures en question. Si jamais vous souhaitez avoir d'autres détails concernant une mesure particulière, nous allons peut-être devoir préparer d'autres documents.
L'autre chose qui manque dans ces tableaux, c'est une analyse de l'efficacité ou une comparaison de ces mesures. En réalité, ce tableau est simplement un inventaire qu'on a présenté de façon structurée et organisée. Quand vous regardez ces tableaux, vous pouvez tout de suite vous faire une idée des mesures de soutien qui existent dans chacune des industries culturelles, par exemple. Et quand le tableau des mesures de soutien en faveur des arts sera prêt, vous pourrez le regarder pour voir ce qui existe dans le secteur des arts plastiques, etc.
Le président: Madame Alter, avant d'ouvrir la période des questions, je voudrais revenir sur la discussion de tout à l'heure concernant la possibilité d'inclure des recommandations sur les changements qui nous sembleraient souhaitables.
Prenons l'exemple de la radiodiffusion. Si je regarde la rubrique «Politique en cours d'élaboration» dans la colonne de la radiodiffusion, je vois ceci «droit d'auteur applicable au signal porteur (projet de loi C-32 modifiant la Loi sur le droit d'auteur)».
Je pense que ce dont parlaient les députés ce matin... Prenons l'exemple du rapport Juneau. Le rapport Juneau contenait-il des recommandations importantes dont on n'envisage pas pour le moment l'inclusion dans notre politique alors qu'il faudrait peut-être le faire? Devrions-nous ajouter une colonne pour énumérer nos principales recommandations à cet égard? Je pense qu'il serait important de le faire.
Mme Alter: Ces tableaux visent simplement à vous indiquer les mesures actuellement en vigueur. C'était d'ailleurs la grande priorité dans le plan de travail du Comité.
Le président: Oui, je comprends.
Mme Alter: Je ne sais pas s'il convient vraiment d'incorporer des recommandations dans ces tableaux, car à mon sens, elles s'inscrivent dans une autre analyse. L'objectif de ces tableaux est simplement de vous indiquer ce qui existe. C'était la seule intention.
Le président: Avez-vous une question, madame Phinney?
Mme Beth Phinney: Non, mais je tiens à remercier Mme Noel et les autres attachés de recherche pour leur travail. C'est excellent. Je n'ai jamais vu l'information présentée de cette façon. C'est très utile. Ce serait également utile qu'on nous fournisse les renseignements que nous avons demandés tout à l'heure, à savoir un aperçu général de ce qui a déjà été recommandé, pour que nous puissions orienter notre étude et éviter de faire un travail qui a déjà été fait. Mais je trouve tout cela excellent.
Le président:
[Français]
Monsieur Lemieux, vous pourriez peut-être compléter.
M. René Lemieux: Pour prendre un exemple, on parle de la radiodiffusion dans le tableau 3.2. Vous pouvez voir toute la série de mesures qui sont présentement en place pour la radiodiffusion, sous le titre des politiques et des mesures culturelles. Une des questions que le comité s'est posées dans son plan de travail était de savoir si ces mesures étaient efficaces et si elles donnaient des résultats positifs.
J'ai donc jeté un coup d'oeil sur ce genre de question qui nous amène, effectivement, à décrire l'impact socioéconomique de certaines des mesures et des politiques culturelles. À la page 33 du texte français, il y un petit tableau dont j'aimerais discuter dans ce contexte. Vous pouvez aussi aller au paragraphe 2.3.4 de votre texte. La numérotation est la même en anglais et en français.
Ici, je décris justement l'impact des mesures en vigueur sur la radiodiffusion. Il y a plusieurs autres façons de mesurer leur impact, mais celle-ci en est une. Vous voyez ici que le Canadien ou la Canadienne regarde la télévision en moyenne 23,2 heures par semaine. Cette activité occupe une place considérable dans les heures de loisirs d'une personne.
Malgré tout, en dépit de toutes les mesures et politiques en place, les Canadiens - et cela répond à une des questions de M. Crête car c'est là que l'on voit une nette distinction entre les deux groupes culturels ou linguistiques - regardent un fort pourcentage de programmation étrangère. Dans le cas des Canadiens de langue anglaise, c'est la programmation américaine.
Si vous jetez un petit coup d'oeil au tableau qui donne ces résultats, vous verrez que chez les anglophones, 71 p. 100 du temps de télévision est consacré à des émissions étrangères, alors que chez les francophones, vous voyez l'inverse: ils ne consacrent que 33 p. 100 de leur temps d'écoute de télévision aux émissions étrangères. Par contre, on peut se lancer dans des analyses très poussées, mais lorsqu'on va un peu plus loin dans l'analyse, les résultats changent considérablement.
Dans un petit paragraphe qui suit ce petit tableau, je fais la distinction pour les émissions dramatiques, c'est-à-dire les variétés, les films ou les séries. On voit ici que les francophones consacrent près de 60 p. 100 de leurs heures d'écoute à des dramatiques étrangères, tandis que les anglophones y consacrent 95 p. 100 de leur temps. Une des questions que le comité se posait, monsieur le président, était de savoir si les politiques et les mesures en place dans tel ou tel domaine d'activité culturelle étaient efficaces.
Comme je l'ai mentionné, il y a plusieurs façons de mesurer l'impact des politiques. Je voulais simplement donner un exemple du genre d'analyse qui peut être faite sur les mesures et les politiques culturelles. Si nous avions plus de temps, une telle analyse pourrait être faite sur plusieurs autres mesures.
Un peu plus loin, au paragraphe 2.3.6, j'ai quelques statistiques qui démontrent l'impact des mesures et des politiques culturelles dans le domaine du film, de l'édition et de l'enregistrement sonore. Je vous laisse le soin de porter un jugement sur les politiques qui sont là. On note en effet que:
- 92 p. 100 des films présentés sur les écrans canadiens sont d'origine étrangère;
- 60 p. 199 des rayons des librairies canadiennes sont occupés par des livres américains; les livres
canadiens ne représentent que 35 p. 100 des ventes;
- 81 p. 100 des revues de consommation de langue anglaise en vente dans les kiosques au Canada
sont importés; les magazines canadiens ne constituent que 14 p. 100 des ventes;
- 88 p. 100 des nouveaux enregistrements sonores mis sur le marché ont un contenu étranger; les
enregistrements canadiens ne représentent que 9 p. 100 des ventes.
Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Lemieux, si on prenait l'exemple que vous avez donné au point 2.3.6, à la page 34 de la version française, et qu'on le transposait en anglais, je pense que les réponses en langue anglaise seraient tout à fait différentes des réponses en langue française.
M. René Lemieux: Vous avez raison, monsieur le président. Nous avons donné dans ce document des renseignements qui étaient, pour la plupart, déjà disponibles. Effectivement, ces renseignements existent et pourraient être donnés dans le cas des deux marchés linguistiques.
[Traduction]
Le président: Madame Phinney.
Mme Beth Phinney: Je voulais simplement vous dire qu'en voyant toute cette information, j'avais l'impression que nous n'avions pas consacré toute cette énergie au projet de loi sur le droit d'auteur pour rien.
Le président: Oui, c'est sûr.
Mme Beth Phinney: On comprend d'autant plus l'utilité de ce travail.
Le président: Oui, cela est très impressionnant quand on la voit disposée de cette façon. C'est assez dramatique.
Mme Beth Phinney: Oui, c'est extraordinaire. Et les gens s'inquiètent du peu d'argent qu'on donne à la SRC.
Le président: Pour votre gouverne, M. Lemieux vient de me passer une copie d'un communiqué de presse du bureau du délégué commercial général des États-Unis en date du 14 mars. L'ambassadeur Barshefsky dit ceci:
- Bien que nous appuyions tout effort visant à renforcer l'identité nationale par le biais du
développement culturel, nous ne pouvons permettre aux entreprises canadiennes d'utiliser la
«culture» comme prétexte pour favoriser sur le plan commercial des produits canadiens ou pour
exclure des entreprises américaines du marché canadien. Nous continuerons de nous opposer
énergiquement à toute mesure de ce genre qui nuit aux intérêts des États-Unis, qu'elle soit prise
par le Canada ou par d'autres pays.
Le président: Oui. Il est donc très clair que cette bataille- là va se poursuivre, et peut-être même se transformer en guerre ouverte.
Malheureusement, nous n'avons pas le quorum et ne pouvons donc pas discuter de questions administratives. Je propose donc aux membres ici présents d'examiner le projet de liste de témoins et de jeter un autre coup d'oeil à ce document. Nous avons déjà donné nos suggestions aux attachés de recherche.
La prochaine réunion se tiendra jeudi. Nous essaierons de commencer une demi-heure plus tôt pour nous attaquer aux questions administratives que nous n'avons pas pu aborder aujourd'hui, faute de quorum.
Mme Beth Phinney: Quand est-ce qu'elle a lieu, cette réunion?
Le président: Jeudi de cette semaine. Nous recevrons le vérificateur général.
De toute façon, nous vous enverrons un avis. Merci.
La séance est levée.