[Enregistrement électronique]
Le mercredi 23 octobre 1996
[Traduction]
La présidente: Je déclare la séance ouverte. Encore une fois, il est question du projet de loi C-41.
Du Barreau du Québec, nous entendons maître Miriam Grassby, maître Dominique Goubeau et maître Suzanne Vadeboncoeur.
Mesdames, je vous souhaite la bienvenue. Nous sommes très reconnaissants au Barreau du Québec de nous avoir accueillis à une réception lors de notre passage à Montréal, il y a quelques semaines, et de sa participation à l'examen de la Loi sur les jeunes contrevenants. Évidemment, nous sommes aussi très heureux de vous accueillir aujourd'hui.
Je sais que vous avez un exposé à nous faire. Nous l'entendrons volontiers, puis nous vous poserons des questions.
[Français]
Me Suzanne Vadeboncoeur (secrétaire du Comité permanent sur le droit de la famille, directrice du Service de recherche et de législation, Barreau du Québec): Good morning, madame la présidente, messieurs les députés. J'aimerais d'abord remercier le Comité permanent de la justice et des questions juridiques de donner au Barreau du Québec l'occasion de venir se prononcer sur le projet de loi C-41 de même que sur les lignes directrices qui ont été rendues publiques par le ministère de la Justice en juin dernier.
Nous nous attendions à venir vous rencontrer seulement au mois de novembre. La date des présentations ayant été devancée, nous nous sommes penchés en catastrophe sur l'étude du projet de loi lundi dernier, et c'est la raison pour laquelle, malheureusement, nous n'avons pas pour le moment de mémoire écrit. Nous sommes reconnaissants aux membres du comité de nous permettre de faire une présentation verbale. Il nous fera plaisir de déposer un mémoire écrit dans les jours ou les semaines à venir.
J'aimerais également souligner, à titre de remarque préliminaire, que Me Grassby, présidente du Comité permanent du Barreau du Québec sur le droit de la famille, est ici uniquement pour répondre à certaines questions qui auraient une incidence essentiellement pratique. Quant à moi, je suis directrice de la législation au Barreau du Québec; donc, je ne suis plus en pratique depuis plusieurs années. Me Dominique Goubeau, professeur à la Faculté de droit de l'Université Laval, a écrit plusieurs ouvrages en droit de la famille; ce domaine du droit lui est donc très familier. Nous voulions nous assurer de la présence d'une praticienne au cas où il y aurait des questions qui porteraient essentiellement sur la pratique du droit de la famille.
Ces petites remarques ayant été faites, j'aimerais vous dire, avant d'entrer dans le vif du sujet, que ce projet de loi C-41 et ses barèmes de pension alimentaire pour enfants sont nés à la suite d'un constat effectué dans les années 1980, à savoir que les pensions alimentaires accordées aux enfants à travers le Canada étaient nettement insuffisantes d'une part, et très inégales d'autre part, donc tout à fait imprévisibles.
On a donc voulu, par cet exercice, tenter d'uniformiser l'octroi des pensions alimentaires pour enfants à travers le pays et les rendre un peu plus prévisibles. Les pensions alimentaires ont augmenté, en tout cas au Québec, depuis ce temps. Peut-être que l'exercice a donné un coup de pouce aux tribunaux et les a encouragés à augmenter les montants. Cela dit, il importe au Barreau que les barèmes ou les tables qui seront prévues dans la loi éventuelle ne soient pas un plafond, mais bien un plancher pour les pensions alimentaires accordées pour enfants.
L'intérêt de l'enfant doit demeurer la priorité pour les tribunaux, et les pensions alimentaires qui seront fixées éventuellement à la lumière de ces tables doivent demeurer un plancher.
L'objectif, comme je le disais plus tôt, est la recherche d'un certain équilibre entre, d'une part, une uniformité et une certaine prévisibilité des pensions alimentaires pour enfants et, d'autre part, une souplesse suffisante pour que les pensions alimentaires tiennent compte des situations particulières des régions et des familles à travers le pays.
Les nombreux documents de consultation préparés par le ministère depuis au-delà de cinq ans, et auxquels le Barreau du Québec a été partie en tant qu'organisme consulté à chacune de ces étapes, reflètent l'évolution qu'on a pu constater au fil des ans dans l'amélioration des projets. Donc, on a pu atteindre un certain équilibre entre prévisibilité et uniformité et l'exercice d'une discrétion judiciaire permettant une certaine souplesse.
Toutefois, on constate que les lignes directrices, parce qu'il faut bien dire que les lignes directrices représentent la toile de fond de l'application de ce projet de loi C-41, ouvrent certaines portes de sortie ou certaines possibilités de s'exclure de l'application des barèmes.
On constate malheureusement, notamment à la lecture des exemples qui sont donnés quant à la possibilité d'invoquer des difficultés excessives, que les portes de sortie sont un peu trop souvent du côté du parent payeur et au détriment du parent gardien et de l'enfant. On y reviendra en détail un peu plus loin, mais il y aurait peut-être lieu d'équilibrer un peu mieux les droits, de façon à ce qu'il soit vraiment clair que les lignes directrices et les portes de sortie qui sont ouvertes le sont autant d'un côté que de l'autre.
Quant au projet de loi C-41 proprement dit, nous avons des commentaires de fond et de forme à vous livrer. Commençons par les commentaires de fond.
D'abord, les paragraphes 15.1(5) et 17(6.2), qui sont ajoutés respectivement par l'article 2 et le paragraphe 5(2) du projet de loi, constituent, selon nous, une voie d'évitement en regard de l'application des lignes directrices et en diluent grandement la portée.
Par la très large et même trop large discrétion qu'elles confèrent aux tribunaux, ces dispositions représentent, selon nous, la bouée de sauvetage qu'utiliseront les payeurs qui voudront se soustraire à l'application des barèmes.
Une aussi grande possibilité de s'exclure de l'application des barèmes est même contraire à l'esprit qui a présidé à la réforme. Nous sommes d'avis qu'elle engendrera de sérieux et longs débats entre les parties, ce qui est contraire à l'un des objectifs mentionnés aux lignes directrices.
Par exemple, au Québec, comme vous le savez, nous avons une loi particulière sur le partage du patrimoine familial en cas de rupture du mariage. Dans les cas de partage inégal en faveur du parent gardien, les débats seront rouverts au bout de quelques années au motif que la somme donnée en excédent de la moitié de la valeur du patrimoine familial aura profité directement ou indirectement aux enfants.
De même, au moment de l'entrée en vigueur des lignes directrices et du projet de loi C-41, les payeurs seront tentés de faire réviser leur situation à la baisse, prétextant qu'une disposition de l'ordonnance alimentaire prononcée contre eux quelques années auparavant est inéquitable ou encore procure un avantage direct ou indirect aux enfants. Les tribunaux risquent donc d'être inondés de demandes de ce genre.
De l'avis du Barreau, il sera toujours loisible aux parents non gardiens d'invoquer les difficultés excessives pour justifier une baisse du montant accordé au titre d'une pension alimentaire pour enfant.
Par conséquent, dans l'intérêt de la justice et d'une saine administration de la justice, pour éviter un engorgement monstre des tribunaux les 1er et 2 mai 1997, le Barreau recommande le retrait pur et simple des paragraphes 15.1(5) et 17(6.2) de la Loi sur le divorce tels qu'ajoutés par l'article 2 et le paragraphe 5(2) du projet de loi.
Si toutefois le législateur devait décider de maintenir ces dispositions, celles-ci ne devraient pas, à tout le moins, s'appliquer aux ordonnances rendues sous l'empire de l'ancienne loi.
En ce qui a trait à l'article 15.3, cet article d'une grande importance, ajouté à la Loi sur le divorce par l'article 2 du projet de loi, accorde la priorité aux enfants dans l'octroi des pensions alimentaires.
Le second paragraphe, avec justesse, précise qu'une réduction ou suppression de la pension des enfants constitue un changement de situation des ex-époux donnant ouverture à une révision à la hausse de l'ordonnance alimentaire accordée au parent gardien.
Le Barreau est tout à fait favorable à cette position. Il estime toutefois que cette situation, c'est-à-dire la réduction ou la suppression des aliments d'un enfant, devrait également représenter un changement de situation pour le parent gardien qui ne s'est vu octroyer aucune ordonnance alimentaire par le tribunal, étant donné la priorité que le tribunal a accordée à l'enfant et compte tenu des ressources financières limitées du parent payeur.
Donc, cette hypothèse d'absence totale d'ordonnance alimentaire prononcée au profit de l'époux devrait également être ajoutée au second paragraphe de l'article 15.3 comme constituant un changement de situation des parties donnant ouverture à une ordonnance alimentaire à son profit.
À moins que l'article 17 des lignes directrices... Je m'excuse de sauter aux lignes directrices. C'est que pour les praticiens du droit, les lignes directrices constituent la base même de la pratique quotidienne devant les tribunaux. En effet, la Loi sur le divorce fera référence aux lignes directrices qui sont, au fond, un règlement d'application de la nouvelle réforme. On ne peut étudier l'un sans l'autre.
Donc, à moins que l'article 17 des lignes directrices ne soit élargi, le paragraphe 17(4) de la Loi sur le divorce nous semble d'application beaucoup plus restrictive que le paragraphe (4.1) qui vise, lui, l'ordonnance alimentaire au profit d'un époux, puisqu'il ne fait aucune référence au concept de ressources et à l'interprétation qu'en a donnée la jurisprudence, se limitant au revenu tel que défini aux lignes directrices et, dans certains cas, à une possible attribution de revenu elle-même prévue par les lignes directrices.
Par exemple, l'alinéa e) de l'article 17 des lignes directrices se lit comme suit:
- e) les biens de l'époux ne sont pas raisonnablement utilisés pour gagner un revenu;
- Dans cette circonstance, le tribunal pourrait attribuer un revenu dans les cas où les biens de
l'époux ne seraient pas raisonnablement utilisés pour gagner un revenu.
Le fait de considérer ces actifs, lorsque l'une des parties invoque les difficultés excessives, ne nous semble guère suffisant. C'est pourquoi le Barreau suggère d'élargir l'application de l'article 17 des lignes directrices de façon à ce qu'il n'y ait pas trop de différence entre l'application des pensions alimentaires vis-à-vis de l'époux et l'application des pensions alimentaires vis-à-vis de l'enfant. Nous y reviendrons quand nous parlerons des lignes directrices.
L'article 25.1 de la Loi sur le divorce prévoit une révision administrative des ordonnances alimentaires pour enfants. Cette révision, prévue à l'alinéa b) de cet article, soulève certaines inquiétudes.
En effet, de l'avis du Barreau, il n'appartient pas à un organisme administratif ou à un fonctionnaire, même si sa décision peut être revue et modifiée par un juge aux termes du paragraphe (4), de réviser une décision judiciaire ni, pour ce faire, d'évaluer le bien-fondé des demandes de majoration ou des demandes de changement fondées sur les difficultés excessives. Nous croyons que l'exercice d'une telle discrétion revient aux tribunaux seuls, donc à un arbitre indépendant du pouvoir exécutif.
On se pose des questions parce que cette nouvelle disposition, 25.1, est à l'état très embryonnaire. Y aura-t-il une audition? Les parties pourront-elles faire des recommandations avant qu'un nouveau montant ne soit fixé? Les parties bénéficieront-elles d'un minimum de garanties procédurales? On ne le sait pas.
Au Québec, nous avons la chance de bénéficier depuis quelques années d'une indexation annuelle des pensions alimentaires. Donc, à moins que ce processus de révision administrative ne soit précisé davantage et ne réponde aux inquiétudes soulevées, le Barreau recommande de ne pas y avoir recours dans l'état actuel des choses de façon à ne pas compromettre les droits des justiciables.
Enfin, et cela termine les remarques de fond pour le projet de loi C-41, nous avons parlé plus tôt des mesures transitoires desquelles on voulait retirer l'application des paragraphes 15.1(5) et 17(6.2). Donc, je n'y reviendrai pas.
Quant à Loi d'aide à l'exécution des ordonnances et des ententes familiales, je ferai une seule remarque. Je tiens à préciser que je soulève un problème qui n'est pas nouveau, mais étant donné qu'on touche à cette loi, peut-être y aurait-il lieu d'aplanir la difficulté dont je vais vous parler.
Le nouvel article 79 de la Loi d'aide à l'exécution des ordonnances et des ententes familiales reprend l'actuel article 62, en y ajoutant toutefois l'alinéa c), soit la référence à la nouvelle partie III de la loi.
Le problème, qui n'est pas nouveau, je le répète, provient de la formulation très large de l'alinéa a) qui, contrairement aux alinéas b) et c), lesquels requièrent un lien nécessaire entre les renseignements recherchés et la partie II ou III de la loi, permet la communication de tous les renseignements contenus dans les fichiers visés à l'article 16. On sait qu'avec un nouvel amendement, les fichiers du ministère du Revenu national sont ajoutés aux fichiers déjà prévus.
Cela nous semble peut-être un peu large, à première vue, que de permettre la consultation de tous les renseignements pouvant figurer dans les registres qui sont visés à l'article 16. Nous croyons que les renseignements susceptibles de consultation devraient être davantage circonscrits et se rapporter uniquement au but visé par la loi, c'est-à-dire retrouver le débiteur alimentaire et favoriser l'exécution des ordonnances alimentaires.
Je passe maintenant aux commentaires de forme sur le projet de loi C-41. Nous nous interrogeons d'abord sur le remplacement, aux paragraphes 15.1(4) et 19(10) de la Loi sur le divorce, du mot «appropriées» par le mot «indiquées». Le mot «indiquées» peut susciter certaines questions telles que «indiquées» ou «indiquées par qui?». Je pense qu'il serait avantageux de conserver le mot «appropriées» dans la version française.
Quant au paragraphe 15.1(5), nous avons recommandé plus tôt de le retrancher. Mais dans l'hypothèse où le législateur déciderait de le maintenir, nous avons quand même décelé une différence entre les versions anglaise et française.
Dans la version anglaise, les alinéas a) et b) du paragraphe 15.1(5) semblent être des conditions cumulatives, parce qu'il y a la présence du mot «and» à la fin du paragraphe a), ce qui fait que le paragraphe b) devient une condition cumulative. Le mot «et», en français, n'existe pas à la fin de l'alinéa a), ce qui tend à démontrer que, dans la version française, ce sont deux conditions alternatives et non cumulatives. Donc, il y a vraiment un problème de concordance entre la version anglaise et la version française. Nous sommes d'avis que la version anglaise est préférable. Il y aurait donc lieu d'ajouter à la version française le mot «et» à la fin de l'alinéa 15.1(5)a).
Également, à cause de l'ajout des dispositions spécifiques touchant les ordonnances alimentaires pour enfants, on a modifié la numérotation des paragraphes de l'article 15.2, de sorte que les paragraphes (5), (6) et (7) de l'actuel article 15 deviennent les paragraphes (4), (5) et (6) du nouvel article 15.2, ce qui risque de provoquer certaines erreurs et de semer la confusion lorsque les procureurs citeront ces textes ou que les juges s'y référeront dans leurs jugements. Donc, si c'était possible de conserver la même numérotation au niveau des paragraphes, cela permettrait d'éviter ce risque, cet écueil.
J'aurais un dernier commentaire, qui est peut-être inutile parce que j'imagine que tout le monde s'en est rendu compte, mais je voudrais quand même le signaler. Depuis le 30 mai 1996, date du dépôt à la Chambre des communes du projet de loi C-41, l'article 15 de la Loi d'aide à l'exécution des ordonnances et ententes familiales a été modifié par la Loi constituant le ministère du Développement des ressources humaines et modifiant ou abrogeant certaines lois, chapitre 11 des lois de 1996. Cette modification est entrée en vigueur le 12 juillet dernier par le décret 1996-1140. Il y aurait donc lieu d'en tenir compte dans la rédaction de la version finale du projet de loi et de modifier le libellé de l'article 15 en conséquence.
Je ne sais pas combien de temps il me reste, mais j'aimerais ajouter quelque chose. Bien que vous n'ayez pas à vous pencher de façon directe sur les lignes directrices, je pense qu'il est du devoir du Barreau du Québec de vous livrer certains commentaires à l'égard de ces lignes directrices.
D'abord, tout en étant favorable à ce que les objectifs soient précisés dans les lignes directrices, le Barreau nourrit certaines réserves quant à leur réalisme. Certains amendements apportés à la Loi sur le divorce par le projet de loi C-41, notamment les paragraphes dont je parlais plus tôt, soit 15.1(5) et 17(6.2), sont de nature à augmenter les conflits et les tensions entre époux ou ex-époux plutôt qu'à les réduire.
En outre, par la nature des exemples fournis au chapitre de la contrainte excessive, on ne semble pas vouloir donner beaucoup de latitude aux parents gardiens à qui le montant envisagé paraîtrait insuffisant. Dans cette perspective, le premier objectif sera difficile à atteindre.
Quant à l'application du paragraphe 2(3) des lignes directrices, le Barreau est favorable au champ d'application décrit sous réserve des inquiétudes soulevées plus tôt à l'égard de l'article 25.1 de la Loi sur le divorce, c'est-à-dire la révision administrative par un organisme ou un fonctionnaire à la suite d'une entente qui serait intervenue entre le fédéral et les provinces.
En regard de l'article 4 des lignes directrices, qui a trait aux dépenses spéciales ou extraordinaires, au premier paragraphe, la discrétion du tribunal nous paraît beaucoup trop grande. De l'avis du Barreau, dès que le tribunal considère les dépenses nécessaires par rapport à l'intérêt de l'enfant et raisonnables eu égard aux ressources des époux, il doit ajouter au montant de l'ordonnance le montant jugé approprié pour ces dépenses.
L'utilisation du mot «spéciales» pour qualifier les dépenses relatives aux frais de garde d'enfant nous paraît douteuse, puisque bien que variant d'une famille à l'autre, ces dépenses existent effectivement dans toutes les familles où il y a au moins un enfant. Il y aurait peut-être lieu de trouver un terme plus approprié.
Quant au mot «extraordinaires», il pose, quant à nous, certains problèmes reliés à la subjectivité de cette notion; subjectivité selon le niveau de vie de la famille, selon la perception qu'en a le juge saisi du dossier et selon sa propre conception, en fonction de son expérience et de ses valeurs, de ce qui constitue une dépense hors de l'ordinaire.
À notre avis, l'établissement d'un plancher, par exemple 200 $ par année par enfant, a le mérite d'être plus clair, plus objectif et plus conforme à l'objectif des lignes directrices, qui est de réduire les dégâts et les conflits entre époux ou ex-époux. Ce plancher pourrait être établi en ce qui a trait aux alinéas b) et c), c'est-à-dire les soins de santé et les dépenses reliées aux études primaires ou secondaires ainsi qu'aux programmes éducatifs pouvant répondre aux besoins spéciaux d'un enfant. C'était d'ailleurs prévu dans le document de consultation du ministère de novembre 1995.
Quant à l'alinéa e), c'est-à-dire les frais extraordinaires reliés aux activités parascolaires, non seulement le mot «extraordinaires» soulève-t-il la difficulté que j'exprimais plus tôt, mais il soulève également une difficulté supplémentaire, soit le sens beaucoup plus restrictif, en français, du mot «parascolaires» par rapport à son équivalent anglais, «extra-curricular». En français, il signifie que les activités doivent être reliées à l'école ou organisées par elle. Le Barreau préfère, et de loin, l'interprétation beaucoup plus large du mot anglais «extra-curricular».
En outre, relativement à ces activités parascolaires, le Barreau estime que le mot «extraordinaires» devrait être remplacé par une description. Il ne s'agit pas nécessairement d'établir un plafond de 200 $ par année par enfant, ce qui est difficilement applicable. En ce qui a trait aux dépenses pour les activités parascolaires, nous sommes d'avis qu'elles devraient être les frais relatifs aux activités éducatives, culturelles ou sportives qui développent ou suscitent une aptitude ou un intérêt particulier chez l'enfant ou qui répondent à des aptitudes familiales.
Enfin, il nous apparaît essentiel que les camps d'été soient inclus dans cette dernière catégorie, à l'alinéa e), ce qui n'est pas évident à première vue. D'ailleurs, cet exemple précis des camps d'été était prévu dans les lignes directrices de l'ébauche de novembre 1995. On ne les retrouve plus dans les nouvelles lignes directrices.
En regard des difficultés excessives prévues à l'article 5 des lignes directrices, nous sommes d'avis que le paragraphe premier de l'article 5 n'offre aucune équivoque quant à la possibilité que soit augmenté ou diminué le montant envisagé par la pension. Donc, le payeur ou le parent gardien peut invoquer les difficultés excessives pour lui-même ou les difficultés excessives que pourrait vivre l'enfant. Il est important que l'enfant soit dans le décor.
Les exemples énumérés au paragraphe (2) ne sont pas aussi évidents. Ils semblent davantage pencher, comme je le disais en introduction, du côté de la réduction du montant, donc du côté du payeur. Il faudrait peut-être ajuster des exemples en conséquence, ajouter, notamment à l'alinéa b), comme circonstance où pourraient exister des difficultés excessives, la situation où les frais seraient occasionnés par le non-exercice du droit d'accès. Cela était prévu aux lignes directrices de novembre 1995 et, malheureusement, on ne les retrouve plus dans la nouvelle ébauche.
Il faut également souligner, dans les exemples donnés aux lignes directrices, que la difficulté excessive peut être vécue non seulement par l'un ou l'autre des parents, mais aussi par l'enfant. Il serait peut-être de bon aloi de prévoir des exemples pour exprimer cette réalité ou cette hypothèse.
Ces exemples pourraient être, par exemple, le fait que des besoins des enfants ne sont pas comblés par l'application des lignes directrices. Ce pourrait être également l'exemple de disparités importantes existant entre les niveaux de vie des deux familles après l'application des lignes directrices. Cela aussi était prévu dans le document de 1995.
À cet égard, on pourrait nous dire que cela va constituer, dans le fond, une demande déguisée d'obtenir, pour le parent gardien, une pension alimentaire. Or, selon la jurisprudence, spécialement au Québec, les tribunaux accordent, en cas de disparité des niveaux de vie, un montant additionnel non pas au parent gardien, mais bien aux enfants. On a de la jurisprudence qui confirme cet état de fait.
En ce qui a trait à l'application du paragraphe (5) relativement aux difficultés excessives, le Barreau estime essentiel que le tribunal fixe un délai pour le remboursement de la dette, sans quoi la situation d'endettement risque de perdurer, empêchant l'octroi d'une pension alimentaire juste et appropriée. Les mots «peut fixer», en français, devraient donc être remplacés par «fixe». Donc, «le tribunal fixe» une période pour le remboursement de la dette.
En ce qui a trait à l'article 6 relatif à la garde exclusive, le texte français donne l'impression qu'il doit y avoir deux demandes d'ordonnance alimentaire, l'une par chacun des parents qui a la garde d'un enfant. Or, dans la version anglaise, ce n'est pas cela. On dit que la compensation s'opère comme s'il y avait deux demandes d'ordonnance alimentaire. Je pense que la version française devrait être claire et conforme à la version anglaise à ce sujet, et ne pas nécessiter absolument l'existence de deux demandes d'ordonnance alimentaire, mais faire comme si.
Souvent, dans les cas de garde partagée, on a l'impression de n'avoir à verser aucune pension alimentaire parce que les enfants passent sensiblement le même temps chez chacun des deux parents. D'aucuns sont d'avis que les dépenses sont à peu près les mêmes et qu'il n'y a pas lieu de payer une pension alimentaire.
Évidemment, les pensions alimentaires, comme vous le savez, sont fixées en fonction des besoins et de la capacité de payer. Dans les cas où il y a une disparité de revenus, nous croyons que les pensions alimentaires devraient continuer à être payées, sauf qu'avec cette croyance, dans le cas où le parent créancier d'une pension alimentaire n'aurait pas les moyens d'aller demander une pension alimentaire au tribunal, il n'irait tout simplement pas, d'où l'importance, à notre avis, d'appliquer à la situation de garde partagée le même régime qu'à la situation de garde exclusive. C'est-à-dire que dans chacun des cas, vous calculez la pension alimentaire qui serait normalement fixée en vertu des tables et vous opérez compensation. C'est exactement le même régime que pour la garde exclusive. Cela aura pour effet d'assurer, dans tous les cas qui le méritent, l'octroi d'une pension alimentaire au parent le moins favorisé financièrement.
Les articles 10 et 12 ont trait aux ententes entre époux. Pour ce qui est des ententes, soit pour une première ordonnance alimentaire, soit pour une ordonnance modificative, le Barreau suggère que le tribunal doive avoir, pour apprécier vraiment le caractère raisonnable de ces ententes, d'avoir en main les renseignements financiers utiles et pertinents, c'est-à-dire l'état des revenus de même qu'une description sommaire de l'actif et du passif de chacun des époux. Ce n'est pas prévu à l'heure actuelle.
En ce qui a trait à l'article 14, c'est-à-dire le calcul du revenu et le rajustement, le Barreau est d'avis qu'un alinéa g) devrait être ajouté de façon à ce qu'on déduise du revenu les dépenses encourues pour réaliser ces mêmes revenus, sauf dans la mesure où elles ont procuré un avantage ou un bénéfice personnel. Le cas classique, c'est la voiture, l'automobile, qui fait l'objet d'une déduction fiscale, mais qui profite au bénéfice personnel de celui qui réclame la déduction et au bénéfice de sa famille. Il faudrait à ce moment-là rétablir le montant et ne pas permettre la déduction de la portion à usage personnel.
L'article 17, qui traite de l'attribution du revenu, prévoit que le tribunal peut attribuer à un époux le montant du revenu qu'il juge indiqué, notamment dans les cas prévus à cet article. Je disais plus tôt que les circonstances qui sont prévues à cet article semblent supposer un comportement légèrement fautif ou une certaine mauvaise foi de la part de l'époux en question. Ces circonstances ne sont peut-être pas les seules qui devraient être prévues à cet article. On devrait notamment ajouter un paragraphe à cette possibilité d'attribution d'un revenu, qui traiterait des cas où le niveau de vie de l'époux est incompatible avec sa situation financière telle que déclarée.
En outre, puisque le régime fiscal applicable au revenu de l'époux revêt une très grande importance dans l'établissement des barèmes, il y aurait lieu de prévoir également la situation particulière qui prévaut à cet égard lorsque la totalité ou la majeure partie du revenu d'un époux est constituée de dividendes ou de gains en capital, lesquels sont imposés à un taux moindre que le revenu d'emploi ou d'entreprise. Donc, un deuxième ajout devrait prévoir les circonstances où l'époux reçoit une portion significative de son revenu sous forme de dividendes ou de gains en capital.
Par rapport aux obligations ou aux documents relatifs aux renseignements financiers qui sont prévus tant pour le demandeur que pour le défendeur, nous estimons que, pour aider le tribunal à bien évaluer la situation des conjoints, à l'énumération faite à l'article 19 des lignes directrices devrait être ajouté l'état complet des actifs des parties, de façon à ce qu'on puisse avoir la situation financière complète.
Dans les cas de défaut prévus par les articles 20 à 22 des lignes directrices, on comprend que les sanctions qui sont prévues, qui sont fort intéressantes d'ailleurs, s'appliqueront même s'il existe des règles provinciales sur la communication des renseignements.
À cet égard, le paragraphe 19(5) des lignes directrices prévoit ce qui suit:
- (5) Le présent article n'a pas pour effet d'empêcher les autorités compétentes, au sens de
l'article 25 de la Loi, d'établir des règles concernant la communication de renseignements qui
sont considérés comme nécessaires pour la détermination du montant d'une ordonnance
alimentaire ou d'une ordonnance modificative de celle-ci.
On veut s'assurer que l'application des règles provinciales n'empêche pas l'application des sanctions rattachées au défaut de communication des renseignements.
Je pense qu'il est important de vous signaler une dernière petite différence entre les versions anglaise et française. À l'alinéa 22d) et au paragraphe 23(4), la sanction prévue est la possibilité pour le tribunal d'accorder au demandeur un montant qu'il juge indiqué jusqu'à concurrence du montant égal à tous les coûts, frais et dépens relatifs à la procédure.
En français, le mot «coûts» englobe à peu près tout ce qu'on peut trouver de déboursés et d'honoraires extrajudiciaires. Les frais et les dépens sont davantage rattachés à ce qu'on appelle, dans le jargon juridique, les mémoires de frais, c'est-à-dire les timbres judiciaires, les frais d'expertise, les frais de signification, les coûts des timbres judiciaires, etc. Autrement dit, dans la version française, cette sanction vise tous les déboursés, tous les honoraires, tout ce qui peut se rattacher aux dépenses de procédure.
Or, la version anglaise se limite, elle, aux costs and disbursements, ce qui est beaucoup plus limité. Que vise-t-on au juste? Vise-t-on seulement les costs and disbursements ou vise-t-on tous les frais?
Le Barreau n'aurait pas de peine si on élargissait la version anglaise pour l'étendre à ce qui est compris dans la version française, compte tenu qu'il s'agit là d'un article qui prévoit une sanction par suite du défaut du débiteur d'agir selon les règles de la loi.
En terminant, je voudrais encore une fois vous remercier et insister sur un point. Vous savez probablement que le gouvernement du Québec est actuellement à travailler à ses propres lignes directrices. Nous avons d'ailleurs comparu en commission parlementaire, à Québec, au mois d'août dernier à ce sujet. Je dois vous dire qu'en apparence, je dis bien en apparence, le système fédéral semble n'être basé que sur le revenu du payeur. J'insiste sur «en apparence» parce que je sais que, dans le calcul et dans le modèle, on a pris en considération le revenu du parent gardien. Mais, dans les tables et aux yeux de quiconque ne fait pas un examen très approfondi du modèle, le système fédéral ne semble être basé que sur le revenu du payeur, alors que le système québécois - je ne sais pas s'il y en a dans d'autres provinces - sera nettement basé sur une contribution des deux parents en fonction des revenus de chacun.
Pour que le système soit vendable - passez-moi l'expression - , il va falloir que le gouvernement du Canada fasse une campagne d'information très sérieuse et très efficace pour essayer d'enlever cette impression que pourront avoir les justiciables québécois que le système fédéral est peut-être «injuste» par rapport au système du Québec. Je m'empresse d'ajouter que ce n'est pas le cas, mais compte tenu de ce que je vous ai dit, on aura peut-être cette impression. Il faudra donc que les campagnes d'information auprès du public soient efficaces.
Je vous remercie encore une fois. Nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.
[Traduction]
La présidente: Je vous remercie beaucoup.
Monsieur Ramsay, vous disposez de dix minutes.
M. Ramsay (Crowfoot): Je vous remercie, madame la présidente.
J'aimerais remercier les témoins. Je serai bref. Je n'ai que deux ou trois questions à vous poser.
Tout d'abord, vous a-t-on consultés au sujet du projet de loi à l'étude? Avez-vous contribué à sa préparation?
[Français]
Me Vadeboncoeur: Puis-je répondre en français?
[Traduction]
La présidente: Parlez la langue qui vous vient le plus facilement.
[Français]
Me Vadeboncoeur: Le Barreau du Québec a été consulté dans tout le processus d'établissement des lignes directrices depuis le début, donc depuis 1990, je crois. Le Barreau est intervenu à chacune des étapes, mais pas vraiment sur le projet de loi lui-même, qui modifie la Loi sur le divorce, parce que comme on vous l'a dit plus tôt, la toile de fond des praticiens devant les tribunaux, ce sont surtout les lignes directrices et l'encadrement juridique des lignes directrices. Donc, pour répondre à votre question de façon stricte, sur le projet de loi lui-même, nous n'avons pas vraiment été consultés, mais nous l'avons été tout au long de l'élaboration des lignes directrices.
[Traduction]
M. Ramsay: Je vous remercie.
Seriez-vous d'accord pour que le projet de loi soit adopté tel quel?
[Français]
Me Vadeboncoeur: Ce projet de loi pourrait mettre en péril certains droits des justiciables par les articles que je soulignais plus tôt, c'est-à-dire une révision administrative un peu incertaine et les articles 15 et 17 qui peuvent rouvrir un débat, mais ce n'est finalement pas tant le projet de loi C-41 qui est important que les lignes directrices. C'est sûr que nous préférerions que le projet de loi soit modifié dans le sens que nous avons indiqué.
[Traduction]
M. Ramsay: En l'absence de pareilles modifications, quelle serait votre opinion du projet de loi à l'étude?
[Français]
Me Vadeboncoeur: Je pense avoir déjà répondu à cela, monsieur.
[Traduction]
M. Ramsay: D'accord.
À votre avis, le projet de loi à l'étude contribuera-t-il à faire baisser le nombre de parents qui ne versent pas la pension alimentaire fixée par le tribunal à l'égard de leurs enfants?
[Français]
Me Vadeboncoeur: Encore une fois, ce n'est pas le projet de loi lui-même, mais les lignes directrices qui sont importantes. Je pense que l'application des lignes directrices va aider sensiblement à la diminution du nombre de parents délinquants. Peut-être que ma consoeur, qui est devant les tribunaux à la semaine longue, faisant face à des payeurs délinquants, pourrait répondre davantage à votre question.
[Traduction]
Mme Miriam Grassby (présidente, Barreau du Québec): Le fait qu'il existe des lignes directrices plus cohérentes et que les parents payeurs ont le sentiment d'être traités équitablement influera certes sur leur volonté de verser l'aliment.
Alors qu'auparavant, à revenu égal, un pouvait verser 500 $ et un autre, seulement 100 $, désormais, on saura mieux à quoi s'en tenir. De plus, le régime sera beaucoup plus équitable et mettra davantage l'accent sur le bien des enfants. Sur ce plan, je crois qu'il contribuera à faciliter les paiements.
De plus, toutes les autres dispositions relatives à l'exécution aideront beaucoup à convaincre ces parents de payer.
M. Ramsay: Vous estimez donc que l'équité de traitement prévue dans ce document incitera davantage les parents à verser l'aliment. C'est bien le sens de votre réponse?
Mme Grassby: Oui.
M. Ramsay: Parfait.
Le projet de loi comporte des dispositions visant l'exécution. Qu'en pensez-vous, en particulier de la suspension du permis de conduire, du passeport, et ainsi de suite? Croyez-vous qu'elles aideront et qu'elles inciteront les parents à verser l'aliment fixé par le tribunal?
[Français]
Me Dominique Goubeau (membre du Comité permanent sur le droit de la famille du Barreau du Québec, professeur à la Faculté de droit de l'Université Laval): Dans le fond, le Barreau voit cela comme un supplément au régime existant à l'heure actuelle. Au Québec, nous avons une nouvelle loi sur l'exécution des pensions alimentaires, une loi qui a des dents et qui est maintenant sous la responsabilité du ministère du Revenu plutôt que du ministère de la Justice. Nous croyons que les quelques ajouts en termes de suspension de permis sont les bienvenus.
[Traduction]
M. Ramsay: Je vous remercie beaucoup. Je lirai avec grand plaisir votre mémoire.
Madame la présidente, c'est tout ce que j'avais à dire.
La présidente: Je vous remercie.
Je puis peut-être vous aider. Il me serait difficile de vous les réciter de mémoire, mais des membres du parti ministériel sont en train d'étudier des modifications que vous avez proposées.
Monsieur Maloney.
M. Maloney (Erie): Revenons aux dispositions visant à rendre la loi plus musclée. Y a-t-il d'autres moyens qui, selon vous, persuaderaient les parents de verser l'aliment? A-t-on oublié quelque chose qui serait peut-être utile?
Mme Grassby: J'ai un moyen de prédilection, mais j'hésite à en parler ici.
Des voix: Oh, oh!
M. Maloney: Vous ne nous étonnerez probablement pas. Vous pouvez me croire: nous en avons entendu des vertes et des pas mûres!
La présidente: Vous n'en croiriez pas vos oreilles!
Mme Grassby: Cela a rapport au golf.
Des voix: Oh, oh!
Mme Grassby: Non, je ne le dirai pas.
Mme Vadeboncoeur: Allez-y, dites-le!
Mme Grassby: Non, je ne le dirai pas. Il y a peut-être trop de golfeurs dans la salle. Ils sont tous membres d'un club.
Des voix: Oh, oh!
[Français]
Me Vadeboncoeur: Le Barreau, compte tenu du court laps de temps dont il disposait, n'a pas poussé sa réflexion jusqu'à imaginer d'autres scénarios. Je pense que les scénarios qui nous sont proposés nous satisfont. Si jamais il y en avait d'autres qui étaient proposés, nous les examinerions, mais je pense qu'à ce stade-ci, nous n'avons pas à ajouter quoi que ce soit à ces sanctions.
La présidente: Monsieur DeVillers.
M. DeVillers (Simcoe-Nord): Premièrement, je voudrais remercier les témoins. C'est très évident que vous avez fait un travail approfondi et nous vous en remercions. Est-ce vendable?
Me Vadeboncoeur: Oui, c'est vendable. C'est sûr qu'au Québec, la grande majorité des ordonnances alimentaires se verront régies par les lignes directrices provinciales et par les tables provinciales du gouvernement du Québec, sauf qu'il faut quand même... Je n'ai aucune idée à quel nombre cela peut correspondre, mais il faut quand même voir qu'à chaque fois que le parent payeur sera à l'extérieur du Québec, et ce sera peut-être assez fréquent dans les régions frontalières, ce seront les lignes directrices du fédéral qui s'appliqueront.
Je pense à la région de Hull-Ottawa, à celle de la Gaspésie, où il y a bien des gens qui peuvent aller vivre au Nouveau-Brunswick. Je pense également aux régions frontalières américaines. Cela pourrait arriver assez souvent. Au Barreau, quand nous ferons la formation de nos avocats, de nos membres, nous devrons certainement leur enseigner les deux régimes. Je pense que les avocats peuvent comprendre la différence entre les deux, même si, encore là, la prise en compte du revenu du parent gardien n'est peut-être pas évidente.
Si ce n'est pas évident pour des avocats, vous pouvez vous imaginer que ce l'est encore moins pour les justiciables, spécialement pour les gens qui seront appelés à verser des pensions alimentaires. Ils vont regarder les tables et dire: «On ne considère que mon revenu; on ne tient pas compte du revenu de mon conjoint.» Il va falloir vraiment expliquer cela de façon... Mais c'est vendable, oui.
Me Goubeau: Je pense que vous avez raison de vous inquiéter de cela. Nous avons rencontré le ministre Allan Rock, qui est venu nous voir à Québec - je viens de Québec - et nous avons réuni à cette occasion une quarantaine d'avocats spécialisés en droit de la famille. Dans l'assemblée, tout le monde avait lu le projet - ce n'était pas le projet de loi C-41 mais les directives, le document le plus important - et une grande partie des avocats n'avaient pas compris la philosophie du système.
Donc, imaginez ce que c'est pour le justiciable. Des avocats spécialisés en droit de la famille, après une lecture peut-être rapide du projet, mais quand même une lecture, n'avaient pas compris que, fondamentalement, il est basé sur la présomption, parfois contestée d'ailleurs, que madame qui, dans la majorité des cas, a la garde des enfants, va utiliser ses revenus de façon convenable pour l'enfant. C'est une chose qui est contestée par certains payeurs et qui peut donc être problématique. Donc, c'est certain que vendre cette idée à un public non averti ne sera pas une mince affaire.
M. DeVillers: Ils ont du travail à faire.
Me Goubeau: Oui.
[Traduction]
La présidente: Je vous remercie.
Monsieur Ramsay, aviez-vous d'autres questions à poser?
M. Ramsay: Non, tout va bien.
La présidente: A-t-on d'autres questions?
Mesdames, je vous remercie beaucoup de votre aide. Nous devons amorcer l'étude article par article demain soir. C'est à ce moment-là que nous discuterons de modifications. Si cela vous intéresse, je suis sûre que la greffière pourra vous décrire brièvement les modifications proposées. Nous les lui avons déjà remises.
Encore une fois, je vous remercie beaucoup.
Madame Grassby, je crois savoir que nous vous reverrons demain, lorsque nous entendrons l'Association du Barreau canadien.
Mme Grassby: Effectivement.
La présidente: Nous vous reverrons avec plaisir.
Je vous remercie beaucoup.
Mme Grassby: C'est nous qui vous remercions.
La présidente: Le comité s'ajourne jusqu'à 9 h 30, demain matin.