[Enregistrement électronique]
Le mardi 14 mai 1996
[Traduction]
La présidente: La séance est ouverte.
Monsieur Dupuy, vous remplacez Eleni?
L'hon. Michel Dupuy (député de Laval-Ouest): En effet.
La présidente: Je ne sais pas si vous connaissez notre façon de procéder, mais vous avez cinq minutes pour présenter votre motion, après quoi nous passerons aux questions. Il n'y a aucune limite à la durée de celles-ci.
M. Dupuy: Très bien. Eleni aurait souhaité présenter elle-même sa motion, mais elle est en voyage en Grèce. Elle m'a demandé de la remplacer.
La présidente: Je lui ai dit que si cette question lui tenait vraiment à coeur, elle n'avait qu'à annuler son voyage en Grèce. N'êtes-vous pas de mon avis?
Des voix: Oh, oh!
La présidente: Ce n'est qu'une blague.
M. Dupuy: Elle est en mission officielle.
La présidente: Je sais, et je suis simplement jalouse.
M. Dupuy: Moi aussi.
Un bref mot d'introduction. Pourquoi m'avoir choisi, moi, alors qu'il y a tant d'autres personnes compétentes?
Au fil des ans, j'ai toujours porté un intérêt soutenu à la situation à Chypre, dès le début de ma carrière antérieure de diplomate canadien. À une époque, j'ai été détaché auprès de l'OTAN et j'ai eu l'occasion de participer à des discussions opposant la Grèce et la Turquie.
Par la suite, j'ai eu l'occasion de visiter Chypre. En cette occasion, j'ai vu le côté grec de Chypre, mais je ne suis pas passé du côté turc, ce qui est toujours un peu difficile lorsqu'on vient de l'autre côté de l'île. J'ai marché le long de la ligne verte, j'ai parlé aux soldats de l'ONU, etc.; c'est ce qui explique mon intérêt continuel pour Chypre.
Étant donné que j'ai très peu de temps, je m'abstiendrai d'insister sur le fond de la motion. Sans aller jusqu'à dire que c'est l'évidence même, car il s'agit manifestement d'une motion intéressante, j'aimerais traiter plutôt de la question de savoir pourquoi le Canada devrait intervenir, pourquoi maintenant, pourquoi par l'entremise du Parlement, et d'expliquer pourquoi ma collègue a choisi de proposer une motion d'initiative parlementaire.
La raison, c'est que le Canada a joué un rôle très important à Chypre, et ce, à bien des égards. Notre rôle le plus important a été notre participation aux forces onusiennes déployées à Chypre. Nous y sommes restés pendant longtemps, en fait pendant la majorité des 22 ans de présence. Je peux attester que, de tous les pays étrangers chargés de surveiller la ligne verte, le Canada est à ce jour le plus populaire auprès de la population locale et du gouvernement du pays. Nous avons donc dans ce pays une crédibilité qui nous donne une position très particulière.
Nous sommes membres de l'OTAN. Nous connaissons parfaitement les positions des deux parties en présence. Nous sommes amis aussi bien avec la Turquie qu'avec la Grèce. Nous faisons partie du Commonwealth, et de toute évidence le gouvernement cypriote se réjouit de nous avoir comme interlocuteur au sein du Commonwealth.
Il existe donc de bonnes raisons pour le Canada de prendre officiellement position, puisque les intéressés en tiendront compte.
Pourquoi agir maintenant? Après tant d'années, pourquoi prendre une initiative?
La situation se détériore entre la Grèce et la Turquie. Ces deux pays étaient au bord de l'affrontement sur une question de souveraineté dans de petites îles de la mer Égée. Les deux pays se sont réarmés. Le seul endroit où ils s'affrontent véritablement, c'est Chypre, car l'armée turque est d'un côté et l'armée cypriote est pratiquement inexistante, mais il existe un accord entre Chypre et la Grèce en vertu duquel celle-ci se portera au secours de Chypre s'il est attaqué. Chypre deviendra donc un champ de bataille si la situation continue de se détériorer. C'est une raison importante pour nous d'agir maintenant et de profiter de l'élan vers la démilitarisation.
J'ai parlé d'élan. C'est une autre raison. Le Parlement de l'Union européenne s'est prononcé en faveur de la démilitarisation de Chypre. Le Congrès et le Parlement australien ont fait de même. Le Parlement néo-zélandais doit discuter d'une motion semblable, et les Nations Unies, cela va sans dire, appuient sans réserve la démilitarisation de ce pays. Il existe donc un élan, et le moment est parfaitement choisi pour le Canada de miser là-dessus.
Pourquoi faire intervenir le Parlement canadien? En toute franchise, il importe selon moi que le Parlement canadien, et la Chambre des communes en particulier, intervienne dans les affaires étrangères. Cela a toujours été une bonne chose. Les débats qui se sont déroulés ont toujours été importants. Il y a eu des débats au sujet de la Bosnie, mais à mon humble avis il est utile que nos collègues aient l'occasion de discuter des points chauds susceptibles de poser des problèmes dans le monde.
Pourquoi une motion d'initiative parlementaire? J'ai eu l'occasion de discuter de Chypre avec certains de nos collègues des deux côtés de la Chambre. Personne ne s'oppose à l'idée de la démilitarisation. Nos collègues considèrent qu'il s'agit là d'une mesure positive. Il n'y a là aucune partisanerie politique.
Bien entendu, il n'existe aucune politique étrangère ou initiative de politique étrangère meilleure ou plus efficace que celle qui n'est empreinte d'aucun sectarisme politique. La meilleure façon de le prouver, c'est de proposer une motion d'initiative parlementaire, et d'obtenir l'appui des autres partis.
Voilà donc pour les principaux points, madame la présidente, mais je répondrai volontiers à toutes vos questions.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Dupuy.
J'aimerais d'abord présenter mes excuses à M. Langlois. Cela est très mal élevé, mais je n'ai pas pu décider s'il était plus grossier de commencer sans vous ou d'admettre que je n'avais pas remarqué votre absence, car c'est bien ce qui s'est passé. Je venais à peine de commencer. J'ai vu le greffier du coin de l'oeil et j'ai supposé que c'était vous. Je suis désolée.
Monsieur Stinson.
M. Stinson (Okanagan - Shuswap): J'ai deux ou trois brèves questions. J'avoue ma totale ignorance de la situation qui existe dans cette région du monde, mais depuis combien de temps essaie-t-on de régler le différend là-bas? Depuis combien de temps cette situation perdure-t-elle? En outre, dans quelle mesure le Canada devrait-il s'y investir, selon vous?
M. Dupuy: Pour répondre à votre première question, le problème s'est posé lors de l'indépendance de Chypre, soit au lendemain de la guerre. Cela ne date donc pas d'hier. Il y avait dans le nord de Chypre d'importantes minorités d'origine turque qui remontaient à l'ancien Empire ottoman; il existe donc un long passé historique.
Le gouvernement cypriote a essayé d'adopter un train de mesures qui accordaient une assez grande autonomie à ces minorités turques. Les Nations Unies sont intervenues pour faciliter le processus de ce que l'on a appelé les «entretiens intercommunautaires», lesquels ont été voués à l'échec. Il ne faut pas oublier que cette rivalité et ces tensions entre la Grèce et la Turquie ont toujours existé, et qu'elles ont été au coeur de la guerre des Balkans au début du 20e siècle.
La Turquie a fini par décider d'imposer une présence militaire. Elle a attaqué et conquis la partie septentrionale de Chypre. Ce pays a déclaré que cette mesure visait à protéger les minorités d'origine turque vivant à Chypre. Les Nations Unies n'ont pas tardé à réagir et à imposer un cessez-le-feu. L'OTAN est intervenue, car il n'existe pas de pire situation que lorsque deux pays membres de l'OTAN entrent en guerre. Effectivement, le cessez-le-feu est entré en vigueur quelques jours seulement après le débarquement des troupes.
Toutefois, la ligne de cessez-le-feu, appelée ligne verte, n'a jamais disparu depuis, et tous les efforts réalisés par les Nations Unies en vue de rapprocher les parties ont échoué. La situation a encore empiré, d'une certaine façon, lorsque la partie turque de Chypre a déclaré son indépendance, et même si cet État indépendant du nord de Chypre n'est reconnu par aucun autre pays dans le monde, si ce n'est la Turquie, il n'en est pas moins une réalité.
Le seul aspect positif de la situation, c'est que depuis l'invasion de Chypre et le cessez-le-feu, il n'y a eu aucune échauffourée ou échange de coups de feu occasionnel. Toutefois, c'était une véritable poudrière. Les choses se sont un peu calmées depuis, et l'on s'inquiète vivement à l'heure actuelle parce que les tensions augmentent à nouveau entre la Grèce et la Turquie. Si un incident se produit le long de la ligne verte, la situation risque tout simplement d'exploser.
[Français]
M. Langlois (Bellechasse): J'aimerais faire appel à votre expertise de diplomate et d'historien. En ce qui a trait à la République de Chypre, étant donné qu'elle est délimitée par cette ligne de démarcation dont vous avez parlé plus tôt, peut-on envisager - je parle au diplomate dans la conjoncture géopolitique actuelle - une solution qui ne tiendrait pas compte de l'existence de deux entités juridiques sur le territoire de l'île?
M. Dupuy: Ma réponse est oui. En fait, je crois que c'est la seule solution à longue échéance. La situation actuelle est véritablement anormale. Elle est causée par la politique de l'armée turque. Cette politique a des sources dans la politique interne de la Turquie, où l'armée a joué un rôle prépondérant à certains moments, le pouvoir civil n'étant pas toujours très solide. Vous avez derrière cela, bien sûr, la révolte des Kurdes. Vous avez une situation difficile à l'intérieur de la Turquie. L'armée turque serait naturellement très hésitante à sortir de Chypre du Nord.
Qu'est-ce qui donne un peu d'espoir si on regarde le côté turque? D'abord, le gouvernement civil a commencé à s'affirmer il y a déjà une décennie à peu près. Il y a donc une autorité civile qui devient de plus en plus grande.
Deuxièmement, la Turquie se rend parfaitement compte que son avenir économique est en partie relié à l'Union européenne. La Grèce est associée à l'Union européenne. La Turquie ne l'est pas. La raison qu'invoque l'Union européenne est que, tant que la Turquie occupera, en violation de tous les principes des Nations unies, un territoire d'un pays ami et indépendant, elle ne pourra pas entrer dans l'Union européenne.
Il y a cette pression économique qui s'exerce sur la Turquie. Il y a également, bien sûr, la pression américaine et la pression internationale.
Je pense qu'il y a plus de chances de voir une progression qui devrait prendre la forme d'un retrait des forces militaires turques. Cela ne peut avoir lieu s'il n'y a pas retrait de la présence militaire du côté sud, c'est-à-dire du côté grec.
La démilitarisation est peut-être une formule heureuse, parce que les deux côtés sauvent la face. Le gouvernement cypriote est prêt à démilitariser et il est prêt à dire: «Nous démilitarisons sans toucher à l'indépendance de la République cypriote turque». Donc, ils n'essayent pas de relier la démilitarisation à un règlement politique.
Bien sûr, une fois que les armées ont disparu du territoire, la possibilité d'un engagement entre la population d'origine turque au nord et la population cypriote au sud s'améliore considérablement.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Loney. Pas de questions?
Merci beaucoup. Mme Bakopanos sera sans nul doute très satisfaite de votre exposé. Je lui ferai un rapport détaillé.
M. Dupuy: Merci beaucoup.
La présidente: Merci de votre présence.
Monsieur Stinson, vous êtes le suivant sur la liste. Préférez-vous attendre et passer en dernier?
M. Stinson: Oui, car je vois que d'autres personnes attendent.
La présidente: Nous vous garderons donc pour la fin.
M. Stinson: De toute façon je dois rester ici.
La présidente: C'est exact. Vous êtes un auditeur captif.
Bill.
M. Bill Gilmour (député de Comox - Alberni): Voulez-vous que je lise la motion?
La présidente: Non. Nous l'avons lue d'un bout à l'autre. Si vous voulez dire quelques mots à ce sujet, allez-y.
M. Gilmour: Entendu.
Si je soumets cette motion à l'étude du comité pour qu'elle soit retenue parmi les affaires pouvant faire l'objet d'un vote, c'est parce qu'elle remplit à mon avis les critères de sélection des affaires qui font l'objet d'un vote établis en 1987 et mérite donc d'être mise aux voix.
La protection des droits à la propriété individuelle est une question importante pour les Canadiens. Elle concerne tous les Canadiens et fait partie intégrante du droit et de la société de notre pays. La motion numéro 205 demande au gouvernement de renforcer la protection des droits à la propriété individuelle par une modification de la Déclaration canadienne des droits - pas de la charte, mais bien de la Déclaration des droits - en y ajoutant deux nouveaux articles.
En vertu du premier article, un citoyen aurait le droit de jouir de ses biens personnels à moins que la décision de l'en priver n'ait été prise à l'issue d'un procès équitable et conforme aux principes fondamentaux de la justice. Le deuxième article donnerait au propriétaire d'un bien le droit à une juste compensation à l'égard de ce bien, et ce, dans un délai raisonnable.
Ces droits à la propriété ne figurent pas à l'heure actuelle dans notre Charte des droits et des libertés. En droit fédéral, la Déclaration canadienne des droits offre une protection minime. L'alinéa 1 a) de la Déclaration canadienne des droits reconnaît:
- a) le droit de l'individu à la vie, à la liberté, à la sécurité de la personne ainsi qu'à la jouissance de
ses biens, et le droit de ne s'en voir privé que par l'application régulière de la loi;
Selon un sondage effectué en 1987, 81 p. 100 des Canadiens - 87 p. 100 selon un sondage de 1992 - étaient favorables à l'affirmation des droits à la propriété, et bon nombre d'organismes nationaux se sont déclarés en faveur du renforcement des droits à la propriété individuelle. D'autres pays ont pris des mesures en vue de mieux protéger les droits à la propriété. Par exemple, l'Allemagne, le Danemark, la Finlande, la Suède, l'Italie et les États-Unis prévoient une indemnisation en cas de perte de biens. Aux États-Unis, cette protection est garantie en vertu du Cinquième amendement.
La question des droits à la propriété va au-delà des querelles de parti et est défendue par des députés de tous les partis comme une valeur devant être protégée et chérie. Des députés de tous les partis de la Chambre ont appuyé la protection de ces droits. John Diefenbaker en son temps et Pierre Trudeau par la suite ont fait des pieds et des mains pour que les droits à la propriété soient inclus dans la Charte, mais leurs efforts ont été vains.
Plus que jamais les Canadiens tiennent à ce que leurs droits personnels soient mieux protégés. Ils n'ont pas eu le droit de voter sur les droits à la propriété en 1982, lors du rapatriement de la Constitution, et, en 1992, on leur a à nouveau refusé ce droit lorsque les droits à la propriété ont été retirés de l'Accord de Charlottetown, encore une fois contre la volonté d'un grand nombre de Canadiens.
Les députés actuels peuvent donner aux Canadiens l'occasion de voter sur cette motion si elle est soumise à la Chambre. Cette question n'a fait l'objet d'aucun débat ni d'aucun vote au cours de la présente session, pas plus qu'elle n'a été inscrite au programme législatif du gouvernement.
À mon avis, c'est une question susceptible de rallier la majorité des députés. J'espère que mes collègues conviendront qu'il s'agit d'une importante question de portée nationale.
Pour conclure, je demande au comité de bien examiner la question et d'appuyer cette motion en vue qu'elle fasse l'objet d'un vote à la Chambre. Je vous remercie de votre attention.
La présidente: Merci.
Y a-t-il des questions? Monsieur Stinson.
M. Stinson: Pouvez-vous me dire si cette protection des droits à la propriété a jamais existé au Canada?
M. Gilmour: Non. À l'heure actuelle, n'importe quel règlement adopté par le gouvernement a préséance sur cette disposition. Il suffit d'adopter un règlement pour que cette protection minime disparaisse. Il n'y a donc pas de protection de ces droits. La question est très vague, et toute loi fédérale adoptée dans n'importe quel domaine peut l'emporter sur les dispositions actuelles.
C'est à mon avis un droit fondamental que demandent la plupart des Canadiens. C'est ce que me disent mes électeurs, et je suis sûr qu'il en va de même dans vos circonscriptions.
M. Stinson: En effet.
M. Gilmour: Si cette motion est retenue pour faire l'objet d'un vote à la Chambre, cela permettra à tous les députés d'examiner sérieusement la question.
M. Stinson: Cette protection n'a donc jamais existé dans l'ancien Acte de l'Amérique du Nord britannique ou une autre loi?
M. Gilmour: Elle se trouve dans la Déclaration des droits, mais n'a aucun poids.
M. Stinson: Le gouvernement peut donc confisquer des biens sans dédommager les propriétaires?
M. Gilmour: C'est exact. Vous avez tout à fait raison.
La présidente: Vous avez dit que cette question n'a fait l'objet d'aucun débat ni d'aucun vote au cours de la présente session.
M. Gilmour: C'est exact.
La présidente: Savez-vous si elle a fait l'objet d'un débat lors des sessions précédentes? Cela me rappelle quelque chose.
M. Gilmour: Un projet de loi semblable a été proposé par Mike Scott lors de la dernière session. Sa teneur n'était pas tout à fait identique, mais il allait dans le même sens. Je ne pense pas qu'il ait fait l'objet d'un vote.
M. Stinson: Je ne le pense pas.
La présidente: Vous en souvenez-vous?
Une voix: Je ne pense pas qu'il ait fait l'objet d'un vote.
La présidente: Merci beaucoup.
M. Gilmour: C'est moi qui vous remercie.
La présidente: M. Martin a demandé à témoigner plus tard.
Étant donné que M. Thompson est ici, je vais lui demander de se présenter à la table.
Vous n'aurez pas besoin d'attendre trop longtemps cette fois-ci.
Avant d'aller plus loin, monsieur Thompson, pour me rafraîchir la mémoire, est-ce que cette question nous a déjà été soumise sous une forme légèrement différente?
M. Myron Thompson (député de Wild Rose): Cette question vous a déjà été soumise dans le cadre d'une motion portant sur la probation plutôt que sur la mise en liberté conditionnelle et provisoire.
La présidente: Très bien.
M. Thompson: La motion était censée porter sur toutes ces questions la dernière fois, mais elle a fini par ne traiter que de la probation. Au lieu de l'annuler et de tout recommencer, nous sommes allés de l'avant et l'avons proposée telle quelle, dans l'espoir qu'elle soit acceptée. Nous faisons aujourd'hui une autre tentative.
La présidente: Je voulais simplement mettre ma mémoire à l'épreuve.
M. Thompson: Il y a une similitude entre les deux, mais ce n'est pas exactement la même chose.
Merci, madame la présidente et chers collègues, de me permettre de présenter mon projet de loi d'initiative parlementaire, le C-224, dans l'espoir qu'il sera retenu pour faire l'objet d'un vote à la Chambre des communes.
Je vais d'abord essayer de vous expliquer pourquoi ce projet de loi doit être soumis à la Chambre. En répondant à tous les critères visant la sélection des affaires pouvant faire l'objet d'un vote, j'espère prouver que ce projet de loi mérite de faire l'objet d'un vote.
Au cours de tous mes déplacements d'un bout à l'autre du pays, j'ai rencontré des policiers et autres représentants des forces de police en tant que porte-parole de mon parti pour les questions touchant la justice. Au cours de ces rencontres j'ai toujours demandé à ces personnes s'il existait selon elles une façon de leur faciliter la tâche ou si elles avaient des suggestions à faire pour que je les transmette à la Chambre des communes, en vue d'accroître la sécurité de notre société.
Le projet de loi C-224 répond à une préoccupation de tous les Canadiens, surtout dans les grandes villes et ailleurs, en déclarant que si une personne omet ou refuse de se conformer à une condition d'une libération conditionnelle ou d'une permission de sortir sans surveillance ou qui, d'après ce qu'il (l'agent de la paix) croit pour des motifs raisonnables, a enfreint ou est sur le point d'enfreindre une telle condition, l'agent de la paix a le pouvoir d'arrêter cette personne sans mandat.
Un exemple qui m'a souvent été cité à divers endroits, c'est celui d'une personne à laquelle on dit que le fait de se rendre dans un bar ou un débit de boissons quelconque constitue une infraction aux conditions de sa libération conditionnelle, tout simplement parce que cette personne a eu des problèmes par le passé, en général à cause de son penchant pour l'alcool.
La plupart du temps, les policiers connaissent les personnes qui sont mises en libération conditionnelle sur le territoire relevant de leur compétence, et au cours de leurs patrouilles dans ce genre d'établissements ils repèrent les personnes qui enfreignent les conditions de leur libération conditionnelle. À l'heure actuelle, les policiers ne sont pas autorisés à arrêter cette personne. Ils doivent communiquer avec le responsable à la Commission des libérations conditionnelles ou avec le responsable du dossier et attendre l'émission d'un mandat avant de pouvoir arrêter cette personne. Cela prend en général des heures, et, lorsque les policiers obtiennent enfin le mandat, l'individu a quitté l'établissement.
Si mon projet de loi est adopté, il redonnera aux policiers le pouvoir d'arrêter cette personne sur-le-champ. Dans bien des cas, ils l'empêcheront ainsi de commettre d'autres crimes ou de mettre en danger la société.
Ce projet de loi serait aussi efficace dans les cas assez fréquents de contrevenants en libération conditionnelle qui se rendent coupables de harcèlement criminel. Les paragraphes 264(2) et 264(3) du Code criminel définissent le harcèlement criminel et la peine prévue pour ce crime. Le projet de loi C-27 du gouvernement traite de l'homicide commis par suite de harcèlement criminel. Toutefois, ces dispositions ne prévoient aucune mesure préventive comme le fait mon projet de loi.
Tous les jours, nous voyons des exemples d'ex-maris, par exemple, qui menacent de se venger. Dans bien des cas, ces hommes sont en libération conditionnelle, et, même s'ils violent les conditions de cette libération, les policiers doivent obtenir un mandat avant de les arrêter. Si les policiers jouissaient du pouvoir que leur confère ce projet de loi et qu'ils trouvaient un de ces hommes à proximité de son ex-femme ou en violation des conditions de sa libération conditionnelle ou de sa permission de sortir sans surveillance, ils pourraient l'arrêter sur-le-champ et ainsi protéger bien des femmes qui luttent pour survivre.
En ce qui concerne les critères faisant de ce projet de loi un projet de loi pouvant faire l'objet d'un vote, cette mesure législative est d'importance nationale, car elle modifie le Code criminel du Canada. Ce projet de loi n'est ni litigieux, ni controversé, ni négligeable ou insignifiant. Essentiellement, il rehausse la sécurité de tous les Canadiens en augmentant le nombre de gens qui peuvent surveiller les contrevenants en libération conditionnelle, en permission de sortir ou en probation.
Il permettra aux agents de police de patrouiller dans les rues et d'aider ainsi les agents de libération conditionnelle. Il y aura donc davantage d'agents en première ligne, ce qui contribuera à réduire la criminalité et à sauver des vies dans bien des cas. Ce projet de loi ne favorise aucune région du pays au détriment des autres, il ne répète pas des dispositions déjà existantes, il n'est pas inefficace dans son intention ni vicié dans son libellé.
Ce projet de loi s'appliquera à tout le pays. Les policiers, d'un océan à l'autre, réclament ce pouvoir afin de mieux protéger tous les Canadiens.
Ce projet de loi ne touche pas le menu législatif du gouvernement ni ne traite d'une question sectaire. En fait, il clarifie le paragraphe 733(1) du projet de loi C-41 du gouvernement qui a été adopté en juin dernier, mais qui ne rehausse pas les pouvoirs des policiers. Mon projet de loi rectifierait cette situation. J'estime en outre que mon projet de loi devrait être prioritaire, puisque c'est une question qui ne peut être réglée autrement.
Le gouvernement vient d'adopter des modifications significatives au Code criminel avec l'adoption du projet de loi C-41 et propose de nouvelles modifications dans le projet de loi C-27. Il est fort peu probable que cette question soit soulevée de nouveau avant la session d'automne. Il faut donc traiter de ce projet de loi dès maintenant.
Enfin, ce projet de loi n'empiète pas sur les compétences des provinces, ne contrevient pas à la charte ni n'entrave les relations fédérales-provinciales. Les conditions de libération conditionnelle sont fixées par ordonnance judiciaire, alors que les permissions de sortir sans surveillance sont accordées par la Commission nationale des libérations conditionnelles. Ce projet de loi permettra l'application de ces deux genres d'ordonnances en conférant aux policiers le pouvoir de le faire. De plus, il améliorera les relations fédérales-provinciales en donnant aux services de police municipaux et provinciaux tous les pouvoirs dont ils ont besoin pour appliquer les lois dans notre société.
J'espère que vous comprendrez l'importance de cette mesure législative pour notre lutte contre le crime. Elle touchera tous ceux qui sont parties du processus judiciaire, mais, surtout, elle conférera aux travailleurs de première ligne le pouvoir dont ils ont besoin pour rendre nos vies et nos rues plus sûres.
J'ai reçu une lettre de l'Association canadienne des policiers qui dit ceci:
- Au nom de l'Association canadienne des policiers, j'appuie le projet de loi C-224...
- Votre projet de loi donnera aux agents de la paix le pouvoir d'arrêter sans mandat toute
personne qui enfreint une ordonnance de probation ou une condition de sa libération
conditionnelle. Actuellement, les agents de la paix doivent communiquer avec l'agent de
probation ou de libération conditionnelle du suspect avant d'agir, ce qui prend du temps et est
essentiellement inutile.
- Je vous remercie de vous être intéressé à cette question. Votre projet de loi, s'il est adopté,
facilitera grandement la tâche des agents de la paix. Merci et bonne chance.
Merci.
La présidente: Merci.
Y a-t-il des questions?
[Français]
M. Langlois: Au niveau pratique, voyez-vous une différence entre le projet de loi que vous présentez et un autre projet de loi qui criminaliserait le bris d'un engagement de libération conditionnelle, de telle sorte qu'un agent de la paix pourrait, s'il avait des motifs probables et raisonnables de croire que la personne est en train de commettre ou va commettre une infraction, procéder à son arrestation?
Je vois un seul problème là-dedans. On permet d'arrêter des gens qui ne commettent pas directement un acte criminel ou une offense criminelle. Cela permet de les ramener devant le juge plus facilement. Je ne conteste pas la portée du projet de loi et je la comprend très bien, mais ne serait-il pas plus simple de directement criminaliser le bris de conditions de libération?
[Traduction]
M. Thompson: Qu'on me corrige si je me trompe, mais je crois savoir que ces violations constituent déjà des infractions à la loi. Le problème, c'est que les policiers n'ont pas le pouvoir d'arrêter sur-le-champ ceux qui font l'objet d'une ordonnance de libération conditionnelle ou de probation ou qui ont la permission de sortir. Ce que les policiers demandent, c'est que, plutôt que de signaler la violation à l'agent compétent et d'attendre parfois trop longtemps avant de pouvoir agir, on leur permette de prévenir la récidive en arrêtant le contrevenant sur-le-champ.
Je crois que la violation des conditions constitue une infraction à la loi et qu'on suivrait la procédure habituelle après l'arrestation.
[Français]
M. Langlois: Supposons qu'une personne ne peut être en dehors de son domicile entre20 heures le soir et 8 heures le matin. Elle doit rester à la maison, mais le policier voit cette personne-là à 23 heures dans un bar. Il doit tout simplement faire rapport et la personne sera probablement citée à comparaître pour justifier pourquoi elle n'était pas là. Le fardeau lui incombe. Si elle ne peut pas se justifier, les conditions de remise en liberté tombent et la personne sera réincarcérée. Le fait de briser une condition n'est pas en soi un acte criminel, mais c'est une raison pour faire tomber une libération.
Je comprends très bien le but de votre projet de loi, qui est de permettre d'agir sur le coup, lorsque l'individu est là, plutôt que d'avoir une procédure longue. Vous êtes on the spot, comme dit l'expression anglaise. Je comprends le but de votre projet de loi. Je vous en remercie.
[Traduction]
M. Thompson: Essentiellement, les policiers disent que, trop souvent, s'ils avaient eu le pouvoir d'arrêter et de maîtriser le suspect sur-le-champ, ils auraient pu prévenir un crime. Il s'agit donc d'une mesure de prévention qui s'ajoute à toutes les dispositions du Code criminel traitant de ces violations.
Il est tout à fait logique que nous voulions tous que la société soit mieux protégée, et lorsqu'un contrevenant est remis en liberté, mais qu'il viole les conditions de sa libération, le bon sens veut qu'on puisse l'arrêter le plus rapidement possible.
La présidente: Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Stinson.
M. Stinson: Tout le monde sait que la ville de Vernon fait partie de ma circonscription. Il y a eu un incident dramatique il n'y a pas longtemps, mais juste auparavant une dame a été agressée par son mari, et elle est maintenant handicapée à vie. Les policiers savaient que cet homme pouvait être violent, mais ils se sont dits impuissants. Cette dame avait déposé une plainte, mais elle n'y a pas donné suite, de sorte que les policiers ne pouvaient intervenir. Ce projet de loi aurait-il donné une plus grande marge de manoeuvre à la police en l'occurrence?
M. Thompson: Non. Ce projet de loi vise uniquement ceux qui enfreignent une ordonnance de probation ou une condition de leur libération conditionnelle ou de leur permission de sortir, parce qu'un grand nombre de crimes sont commis par eux - les récidivistes qui violent les conditions de leur libération.
On en a eu un exemple hier: un contrevenant en liberté conditionnelle est parvenu à se rendre jusqu'à son ex-femme, qu'il a battue sauvagement avec un bâton de base-ball. Vous en avez probablement entendu parler. Les policiers savaient qu'il était en liberté. Ils m'ont téléphoné aujourd'hui pour me dire qu'ils auraient pu prévenir ce crime parce qu'ils connaissaient ce contrevenant et savaient qu'il était en liberté, mais que tout ce qu'ils pouvaient faire, c'était de signaler la violation.
M. Stinson: Merci.
La présidente: M. Loney.
M. Loney (Edmonton-Nord): Pour qu'un agent de la paix puisse arrêter un suspect sans mandat, il faut d'abord qu'il le reconnaisse.
M. Thompson: En effet.
M. Loney: Cela signifie-t-il qu'il n'a plus à déposer de dénonciation? Disons qu'un agent de la paix en autopatrouille voit dans la rue un homme dont il a des motifs de croire qu'il viole les conditions de sa libération conditionnelle; votre projet de loi permettrait-il à cet agent de l'arrêter sur-le-champ?
M. Thompson: Oui.
La présidente: Avez-vous terminé, monsieur Loney?
M. Loney: Oui.
La présidente: Je suis curieuse. Je vais poser la même question que la dernière fois.
Deux questions me préoccupent. La première, c'est l'expression «ou est sur le point de». Comment un policier peut-il être absolument sûr que le suspect est sur le point de commettre un crime? Comment peut-il juger des intentions d'un autre?
M. Thompson: On ne lui demandera pas de faire cela. On lui demandera de déterminer si le suspect a enfreint une ordonnance judiciaire en étant à un certain endroit ou dans la rue après une heure précise, par exemple. Il y a alors violation de l'ordonnance.
La présidente: Vous avez donné l'exemple d'un alcoolique qui est à la porte d'un bar et qui se fait arrêter juste avant d'y entrer; si être dans un bar constitue une violation des conditions de libération conditionnelle, arrêtera-t-on cette personne une fois qu'elle a passé le seuil, ou même avant, lorsqu'elle est devant le bar?
M. Thompson: J'imagine que cela dépendra de ce que dit l'ordonnance judiciaire. Souvent, l'ordonnance précise que le contrevenant ne doit même pas s'approcher d'un débit de boissons.
La présidente: Qu'en est-il de la question de M. Loney, qui a demandé s'il ne faudrait pas que le policier reconnaisse le suspect? Ne donnez-vous pas aux policiers un grand pouvoir discrétionnaire en leur permettant d'arrêter quelqu'un tout simplement parce qu'il ressemble à un suspect? Ne risquent-ils pas de harceler des innocents?
M. Thompson: J'ai moi-même posé cette question aux policiers. J'ai été étonné de voir, lorsque j'ai parcouru les rues de Toronto assis à l'arrière de l'autopatrouille, qu'ils reconnaissaient bien des gens qu'on voyait dans la rue et qu'ils savaient quel crime ils avaient commis et qu'ils étaient en libération conditionnelle. Ils semblaient très bien les connaître.
Il est évident qu'il y a un risque. Il est certain qu'il pourrait y avoir erreur sur la personne. Mais ces risques me semblent minimes. Il faut peser le pour et le contre: qu'est-ce qui est préférable? Qu'on se trompe à l'occasion et qu'on arrête un innocent, ou qu'on arrête un contrevenant juste avant qu'il ne blesse ou ne tue quelqu'un?
La présidente: Vous conférez donc ce pouvoir à la police. Vous leur dites que s'ils croient que cet homme ressemble à un contrevenant qui pourrait être sur le point de commettre un crime, ils peuvent l'arrêter.
M. Thompson: Non, pas s'ils croient qu'il est sur le point de commettre un crime. Que cela soit bien clair: ils pourront l'arrêter seulement s'il a manifestement enfreint une ordonnance judiciaire ou une condition de la libération conditionnelle ou de la permission de sortir. Les policiers sont au courant de cela. On les informe de la libération et des conditions de libération des contrevenants afin qu'ils puissent faire rapport aux agents de libération conditionnelle ou de probation le cas échéant. Toutefois, ces rapports restent souvent sans réponse parce qu'il n'y a tout simplement pas suffisamment de gens pour veiller au respect des ordonnances judiciaires.
La présidente: Merci beaucoup. Monsieur Thompson.
M. Thompson: Merci.
La présidente: Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Tremblay. Vous êtes probablement venu ici plus souvent que moi. Vous avez cinq minutes pour faire vos remarques liminaires, après quoi nous vous poserons des questions bien gentilles.
[Français]
M. Benoît Tremblay (député de Rosemont): Vous connaissez les critères mieux que moi: cette motion est votable et elle aborde un sujet nouveau. Plus largement, au point de vue politique, il est important que cette motion soit votable et qu'elle soit débattue à trois reprises.
C'est un cas qui est d'actualité. Par exemple, on vient d'apprendre aujourd'hui l'enlèvement d'un enfant par un père. Il s'agit du déplacement illicite de l'enfant en Égypte et la mère n'a pas encore revu son enfant. Comme il n'y a pas de traité avec l'Égypte, elle doit faire valoir ses droits en Égypte, selon les lois et la culture égyptiennes et devant les tribunaux égyptiens.
Elle devait comparaître hier et, avec l'aide des Affaires extérieures canadiennes, on a réussi à faire retarder le procès parce qu'elle avait été avertie qu'elle devait comparaître en Égypte une semaine à l'avance. Elle devait amener deux témoins avec elle. Elle devait payer les billets d'avion au prix maximum, soit 1 800$ chacun, etc. On a donc réussi à faire retarder sa comparution au10 juin. Donc, c'est un dossier très actif.
C'est un dossier qui a besoin de l'appui du Parlement. Il existe deux traités internationaux. Il y a d'abord la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants, qui est un traité d'application judiciaire auquel les pays peuvent adhérer. Malheureusement, il y a seulement un certain nombre de pays qui y ont adhéré, surtout les pays développés occidentaux, essentiellement l'Europe, le Canada, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande et l'Australie. Il s'agit d'un traité dont l'objet essentiel, lorsqu'il y a eu un déplacement illicite d'enfant, est de ramener cet enfant dans le pays où il était au départ afin que la justice s'exerce là. Cela vaut aussi pour les relations entre le Canada et les États-Unis.
Par exemple, si un Canadien ou une Canadienne demeure aux États-Unis avec un conjoint américain et qu'un des conjoints décide unilatéralement de partir avec un enfant et de revenir au Canada, selon l'entente internationale, l'enfant sera immédiatement ramené aux États-Unis, et la mère ou le père devra faire valoir ses droits là où ils sont établis, selon les règles qu'il a acceptées au départ. Notre problème concerne les pays qui n'ont pas signé le traité.
Il y a aussi évidemment la Convention internationale des droits de l'enfant des Nations unies, mais c'est un traité incitatif. La Convention des Nations unies peut sans doute servir à l'interprétation de la loi dans les pays qui l'ont signée, mais ce n'est pas un traité d'application judiciaire; c'est un traité d'intention.
Ce traité stipule que les pays doivent adhérer à la Convention de La Haye ou signer entre eux des ententes bilatérales concernant ce problème de déplacements illicites d'enfants par des parents qui ont une double nationalité ou une nationalité différente.
C'est un phénomène qu'on rencontre de plus en plus souvent étant donné le grand nombre de déplacements internationaux de personnes et l'ouverture du Canada à l'immigration. Donc, on a beaucoup de personnes qui ont double nationalité.
Chaque cas est absolument dramatique. Dans ce cas-ci, la mère avait la garde légale de l'enfant. Le père et la mère vivaient en commun, mais n'étaient pas mariés et le père avait quand même un droit de visite. Une fin de semaine, il a pris l'enfant et il a téléphoné à la mère le dimanche soir pour lui dire qu'il était parti en Égypte avec l'enfant. Il y a de cela trois ans. Elle n'a jamais revu l'enfant.
J'ai discuté avec le ministre et les gens concernés, mais il est très difficile pour le gouvernement d'exercer des pressions sur le gouvernement égyptien. Cependant, il y a des tentatives de négocier une entente bilatérale. La France a réussi à négocier une telle entente bilatérale avec l'Égypte.
Lorsqu'il y a entente, le pays a l'obligation d'intervenir rapidement et de ramener l'enfant. Donc, on peut penser que les tribunaux vont accorder un traitement équitable.
Dans les cas d'enlèvement dans des pays qui n'ont pas signé la Convention, c'est très compliqué. Par exemple, dans le cas de l'Égypte, le fait qu'ils ne soient pas mariés rend la chose très difficile devant les tribunaux égyptiens. Et il y a encore plus grave: l'enfant a été baptisé dans la religion catholique. Je pourrais vous montrer une lettre du ministère canadien des Affaires étrangères lui conseillant de débaptiser l'enfant, parce que ses chances de gagner son procès en Égypte avec un enfant... Là-bas, c'est une insulte, apparemment.
Je ne suis pas un spécialiste de la culture égyptienne, mais je voulais vous donner une idée des problèmes auxquels on fait face dans de telles situations.
En tant que parlementaires, nous sommes peut-être mieux en mesure d'agir que le gouvernement canadien. Il y a une exigence pour le gouvernement d'intervenir, mais nous pourrions exercer une pression politique sur le gouvernement, pression qui pourrait en bonne partie être transmise au gouvernement égyptien, puisque le gouvernement canadien doit aussi vivre avec son Parlement.
Il est important que les parlementaires interviennent dans ce dossier-là. Il me semble que cette motion devrait être appuyée largement, pour ne pas dire unanimement, par le Parlement canadien. Cela aiderait considérablement la situation évoquée dans la motion.
La dame en question est une citoyenne de ma circonscription. Je souhaite que la problématique beaucoup plus large du droit civil à l'égard de l'enlèvement international d'enfants soit, pour le gouvernement canadien, une préoccupation d'actualité et qu'on tente, dans la mesure où il y a des pays qui n'ont pas signé ou qui ne veulent pas signer la Convention de La Haye, de négocier des accords bilatéraux. Je souhaite que ce soit davantage prioritaire dans le programme politique du gouvernement. C'est ce que je voulais vous soumettre.
La présidente: Merci.
[Traduction]
Y a-t-il des questions?
[Français]
M. Langlois: Je vais résumer ce que j'ai compris. Mme Tremblay a un fils, Karim Noah, et, selon un jugement d'une cour canadienne, elle en a la garde légale. Karim Noah est un citoyen canadien enlevé par un résident et citoyen étranger.
M. Tremblay: Écoutez, je ne sais pas s'il a obtenu sa citoyenneté canadienne, mais il est certainement un citoyen égyptien et peut-être même un citoyen canadien aussi. Je puis vous dire qu'un mandat criminel a été émis contre lui pour enlèvement d'enfant. Il y a l'aspect civil et l'aspect criminel, et il faut faire une distinction entre les deux.
Il est officiellement recherché par Interpol. Il a comparu ce matin en Égypte. Le problème est qu'on n'a pas de traité d'extradition avec l'Égypte et, de plus - je ne sais pas si on peut dire cela publiquement - j'ai rencontré des policiers qui m'ont dit qu'on n'aura aucune collaboration de la part des policiers égyptiens pour un cas d'enlèvement parce que, pour eux, un garçon doit avoir la religion du père, etc.
Il y a donc une dimension criminelle à cette réalité-là. Il y a un mandat. Il est recherché, mais il est introuvable et, pour que la police canadienne ou Interpol puisse intervenir, il faut qu'il circule dans un pays avec lequel on a un traité d'extradition. On n'en a pas avec l'Égypte.
Mais cela ne règle pas le problème de l'enfant. Étant donné que le père fait l'objet d'une accusation criminelle, s'il était trouvé en France, en Belgique, aux États-Unis ou en Angleterre, il pourrait être arrêté. La police canadienne irait le chercher. Il serait ramené ici, mais son enfant pourrait très bien rester dans sa famille, comme c'est souvent l'habitude dans ces pays-là.
On sait du père - je ne peux le confirmer - qu'il circule dans différents pays, mais l'enfant est élevé par son grand-père ou la famille du père. Cela fait partie des moeurs.
Quant à nous, on s'intéresse à l'enfant et à sa mère. Il y a à cela une dimension criminelle qui n'est pas facile à solutionner. Cependant, ce n'est pas de cela que j'aimerais parler. J'aimerais plutôt vous dire que, malgré les accusations criminelles, malgré la recherche par Interpol, la mère n'a pas revu l'enfant depuis trois ans. Elle n'a pas revu le père non plus, mais on sait par son avocate qu'il était en cour ce matin. Ce matin seulement, le jour de la comparution du père, on a obtenu un délai jusqu'au 10 juin.
Imaginez-vous les frais. Cette dame travaille au service de la paie à la Banque nationale. Elle doit payer ses billets d'avion, les billets d'avion pour les témoins et une avocate. D'ailleurs, là-bas, elle a dû changer d'avocat trois fois. L'ambassade canadienne l'aide dans la mesure où, par exemple, elle facilite l'envoi et la réception de fax, les communications entre elle et son avocate, etc., mais on n'a aucun programme financier pour l'aider autrement. C'est une situation grave.
Il est très important de faire pression, d'abord dans ce cas-là, mais aussi pour inciter fortement l'Égypte à signer une convention bilatérale avec le Canada. Dans un tel cas, les frais seraient beaucoup moins élevés et le droit serait beaucoup mieux respecté.
[Traduction]
La présidente: Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Stinson.
M. Stinson: J'ai moi-même été saisi d'un cas semblable, mais ici même, au Canada. Les différences entre les lois des provinces ont causé des problèmes.
Demandez-vous de l'aide financière dans ce projet de loi?
[Français]
M. Tremblay: Personnellement, je pense que le gouvernement canadien est sympathique à cette cause. Le gouvernement canadien a été l'un des plus actifs dans la promotion de la Convention de La Haye. Il est difficile de faire pression auprès du gouvernement égyptien dans des situations ayant trait aux droits de la personne. D'ailleurs, le premier ministre et tous ses ministres sont très mal à l'aise devant cela.
Donc, je me dis qu'en tant que parlementaires - et je pense que c'est la raison pour laquelle ce comité-ci existe - , on peut se saisir de certaines situations. Je suis convaincu que les parlementaires du côté ministériel voteraient en faveur de la motion. Cela donnerait au gouvernement des outils supplémentaires importants pour faire pression. L'expression du Parlement canadien à cet égard est très importante.
Je ne demande pas d'aide financière parce que je voudrais qu'on règle cette situation-là en signant une entente bilatérale. Je pense que si on soulevait davantage cette question auprès de pays avec lesquels on n'a pas d'entente, on pourrait éventuellement évaluer une aide financière. Honnêtement, je pense à cette mère et à son enfant, et à tous les autres qui attendent. Je veux qu'on bouge assez rapidement sur cette question-là.
Évidemment, demander une aide financière, c'est un peu avouer qu'on ne peut pas bouger. C'est se dire que que la situation actuelle va persister. Donc, je ne suis pas prêt à faire cela.
[Traduction]
M. Stinson: Merci.
M. Loney: Quel âge a l'enfant?
M. Tremblay: Il avait trois an et demi à l'époque. Il a maintenant six an et demi.
M. Loney: Il est né au Canada?
M. Tremblay: Oui.
M. Loney: Sa mère est-elle canadienne?
M. Tremblay: Oui.
M. Loney: Mais vous ne savez pas si le père l'est?
M. Tremblay: Il est certain qu'il a travaillé ici. Je ne sais pas s'il est canadien. Mais je peux faire des appels et m'enquérir de son statut. Il a travaillé au Canada, alors, il devait avoir des papiers. Il a passé de nombreuses années ici. Son frère est encore en Ontario où il a une entreprise.
M. Loney: Vous avez dit qu'il devait comparaître devant le tribunal ce matin?
M. Tremblay: Oui, en Égypte.
M. Loney: En Égypte, oui.
M. Tremblay: Oui, en fait, il devait comparaître lundi.
M. Loney: Les lois égyptiennes pourraient causer de graves problèmes, parce que je crois que la tradition, là-bas, veut que le père puisse faire adopter son fils par sa famille immédiate.
M. Tremblay: Vous avez raison. C'est là l'un des problèmes. C'est juste. Dans le cas d'une fille, c'est plus tard.
M. Loney: Oui.
M. Tremblay: Nous avons donc ce problème. Il nous suffirait de montrer au tribunal une photographie peu flatteuse de la mère de l'enfant pour que cela se fasse.
C'est l'objectif de la convention internationale. Quelqu'un qui est marié ou qui a un enfant au Canada devrait respecter les règles du pays où il habite. Si un Canadien habite en Australie, il respecte les lois de l'Australie. Il en va de même pour l'Égypte.
M. Loney: En l'occurrence, on juge que la mère n'a aucun droit.
M. Tremblay: Nous savons que, du point de vue juridique, elle a peu de chance, et c'est pourquoi il est si important de faire adopter cette motion par la Chambre. Nous pourrions la faire adopter en juin, le jour même de sa comparution devant le tribunal là-bas, le 10 ou le 11 juin. J'ignore quand on pourra faire adopter cette motion par la Chambre, mais, selon le jugement qui est rendu et les raisons qui sont invoquées, nous pourrions expliquer ce qui s'est passé et pourquoi elle a eu gain de cause.
M. Loney: Ou non.
M. Tremblay: Ou non, en effet.
C'est une situation délicate. J'en suis conscient, mais il y a quand même une convention internationale. C'est très simple. Le chapitre 11 de la Convention des Nations Unies encourage la signature de... ou d'une convention bilatérale. Nous avons déjà fait beaucoup, mais il faut trouver de nouveaux membres et, pour ce faire, il faut que la Chambre des communes exerce des pressions.
La présidente: Vous avez plaidé votre cause éloquemment, monsieur Tremblay.
John, avez-vous d'autres questions?
M. Loney: Non, pas pour l'instant.
La présidente: J'aimerais vous poser deux ou trois questions, parce que notre tâche est de choisir les motions et projets de loi qui sont d'intérêt national.
Je ne voudrais pas donner l'impression de ne pas sympathiser avec cette dame. Je crois savoir que vous siégez à la Chambre depuis de nombreuses années. À votre connaissance, y a-t-il de nombreux pays avec lesquels le Canada transige mais qui n'ont pas signé de traité?
M. Tremblay: Il y a tellement... Je ne saurais vous dire.
La présidente: Y en a-t-il des centaines?
M. Tremblay: Il n'en faut pas autant. Nous accueillons de nombreux immigrants du Maroc au Québec, ou du Pakistan ou d'ailleurs. Peut-être faudrait-il choisir, pour ces ententes bilatérales, les pays d'où proviennent...
La présidente: Monsieur Tremblay, ce que je veux savoir, c'est si, pour autant que vous sachiez, il y a de nombreux pays où un incident semblable pourrait se produire...
M. Tremblay: Oui.
La présidente: ... avec lesquels nous n'avons pas d'entente bilatérale?
M. Tremblay: Oui. Pour autant que je sache, le Canada n'a pas encore de convention bilatérale avec d'autres pays. Jusqu'à présent, le Canada a encouragé les autres pays à signer la convention. C'est la stratégie qu'on a adoptée il y a déjà quelques années. Maintenant, on envisage la signature d'ententes bilatérales, parce que ces pays refusent...
La présidente: Comme il y a très longtemps que vous êtes ici, croyez-vous qu'il y a eu des centaines, sinon des milliers de cas de ce genre au Canada?
M. Tremblay: Pas des centaines de milliers. Non.
La présidente: Des centaines?
M. Tremblay: Oui, des centaines, et davantage, à cause de l'internationalisation, de la globalisation. C'est la même dynamique qu'on a avec l'économie, mais c'est...
La présidente: Monsieur Tremblay, si vous étiez à notre place et que vous deviez décider que votre projet de loi peut faire l'objet d'un vote, ne craindriez-vous pas d'en recevoir des centaines comme ça de toutes les circonscriptions?
M. Tremblay: Je n'ai pas compris la dernière partie de votre question.
La présidente: L'interprète va bien travailler.
Je vous demande de vous mettre à notre place un instant. Si l'on faisait de ce cas particulier un projet de loi pouvant faire l'objet d'un vote, ne craindriez-vous pas que tous les députés fédéraux du pays ne s'empressent de soulever des cas semblables pour mettre de leur côté toute la puissance du Parlement?
M. Tremblay: J'essaie de me rappeler. Je ne me souviens d'aucun cas de ce genre.
La présidente: Eh bien, est-ce que vous ne craindriez pas cela? J'exprime ma propre crainte.
M. Tremblay: Non. Eh bien...
La présidente: L'une de nos fonctions...
M. Tremblay: Non... Il n'existe pas des centaines de pays qui présentent autant de problèmes pour nous. Il y a peut-être plus d'un millier... Je ne crains pas que cela touche des milliers d'enfants, mais peut-être... Bien sûr, il existe une organisation, qui s'appelle en français Réseau enfants retour. Cette organisation aide les gens même si...
[Français]
l'enfant a été kidnappé par quelqu'un d'autre
[Traduction]
et il y a des cas différents. Cette situation existe au Canada aussi. Par exemple, un couple est de l'Alberta, et la femme rentre en Colombie-Britannique. Dans la plupart des cas, nous avions un rôle quelconque à jouer. Nous avons établi cela au cours des 20 dernières années, mais maintenant c'est fait, et il est plus difficile d'élargir ce genre de traité ou d'accord bilatéral avec d'autres pays, nous devons donc insister un peu, et je pense que pour le Parlement, c'est important.
Je pense que nous allons avoir une partie des cas, mais l'autre raison pour laquelle cette motion a été formulée de cette façon, c'était parce qu'il s'agissait de la décision de la mère. Si elle avait travaillé là-dessus pendant trois ans... Je lui ai demandé si elle voulait qu'on rende son cas public. Pour moi, c'est sa décision à elle, et c'est une décision privée. C'est une question d'intérêt civil, c'est une question privée, donc je me suis limité à cela, parce que c'est elle qui a décidé de rendre son cas public. Il y en aura peut-être d'autres qui en feront autant.
Je connais un autre cas, celui d'une mère de cinq enfants, et son mari est parti avec les cinq, donc nous aurons peut-être d'autres cas comme ça.
La présidente: D'accord, monsieur Tremblay. Merci beaucoup.
M. Tremblay: Mais la GRC a un bureau ici, et elle ne traite pas des centaines de cas, peut-être...
La présidente: Avez-vous une autre question, John.
M. Loney: J'aillais seulement dire qu'il ne fait aucun doute que cela créerait un précédent.
M. Tremblay: Que cette question soit débattue au Parlement?
M. Loney: Oui.
M. Tremblay: Non.
M. Loney: S'il s'agit d'un débat, je pense que oui. Je crois que toute votre affaire repose sur la question de savoir si le père est citoyen canadien ou a la double citoyenneté, pour ce qui est de savoir si on peut exercer des pressions sur le gouvernement égyptien ou les autorités égyptiennes.
M. Tremblay: Non, je ne crois pas. L'Égypte n'a pas signé, mais elle était présente à l'assemblée... Ce ne sont pas tous les pays.
Ces pays ont ratifié l'accord des Nations Unies sur l'enfant. Des pressions internationales s'exercent déjà sur l'Égypte. La France a un accord bilatéral avec l'Égypte, et je ne vous parle pas des autres pays que je n'ai pas besoin de nommer ici, mais la France a un tel accord bilatéral. L'Égypte était censée ratifier cette convention. Elle en était au début du processus, mais elle ne l'a pas adoptée. Chaque pays doit adopter des lois pour mettre en vigueur cette convention. L'Égypte était censée le faire il y a plusieurs années de cela.
Je vous le dis, et j'ai le texte ici, la France a un accord avec l'Égypte, il y a donc déjà un pays avec lequel nous pouvons travailler. Mais je vous dis seulement... et vous pouvez poser la question à vos propres ministres. Je pense que le Parlement peut et doit jouer un rôle ici.
La présidente: Merci, monsieur Tremblay. Nous vous avons accordé amplement de temps. Nous avons accordé tout le temps voulu à tous ceux qui voulaient poser des questions. Merci beaucoup. Vous avez bien défendu votre cause. Cette dame a beaucoup de chance.
M. Tremblay: [Inaudible - Éditeur] m'a dit que nous devons répéter tout cela, seulement...
La présidente: Répétez, répétez, répétez. Madame Tremblay a beaucoup de chance de vous avoir à ses côtés. J'imagine qu'elle n'est pas parente avec vous.
Madame Guarnieri, bienvenue.
[Français]
Mme Albina Guarnieri (députée de Mississauga-Est): Je ne ferai pas un long discours.
[Traduction]
Je ne veux pas m'étendre là-dessus. Je pense que mon projet de loi est assez clair. Il vise à abolir les peines concomitantes pour les violeurs et les tueurs en série. À l'heure actuelle, qu'une personne ou dix soient tuées, cela n'a aucune importance; on vous impose la même peine. En substance, c'est une aubaine pour les meurtriers et les violeurs.
Mon projet de loi vise à faire reconnaître les victimes, à leur donner un visage. Mon second objectif consiste à restaurer l'authenticité du processus pénal.
Je crois que ma proposition respecte les critères du choix des projets de loi pouvant faire l'objet d'un vote. J'ai une lettre du conseiller législatif disant que c'est le cas. Ma proposition respecte absolument le critère de l'importance nationale. Il s'agit d'un problème très important et il n'y a rien ici qui fasse double emploi avec le Code criminel.
Ma prémisse est simple: les contrevenants les plus dangereux qui font le plus de victimes passent le plus de temps en prison. Jusqu'à présent, les tribunaux ont maintenu que les sentences multiples devaient être purgées de façon concomitante, à moins que le juge exerce sa discrétion dans le sens contraire.
Mon projet de loi a reçu des lettres de soutien de Debbie Mahaffy; de Scott Newark, de l'Association canadienne des policiers; de Sharon Rosenfeldt, des Victimes de violence; deMarjean Fichtenberg, de Citizens United for Safety and Justice; de Steve Sullivan, du Canadian Resource Centre for Victims of Crime; et de Priscilla de Villiers.
Je ne crois pas que je puisse ajouter quoi que ce soit à la lettre éloquente que m'a écrite Debbie Mahaffy. Je cite:
- Le «Système pénal» ne s'adresse pas qu'aux criminels! Vous n'avez pas le droit d'exclure la
VICTIME du processus pénal.
- Je crains qu'il y ait beaucoup d'opposition à ce projet de loi justement parce que le principe de la
peine consécutive est TROP raisonnable, TROP simple, et parce que c'est trop simple à
comprendre pour certains!
- de sortir le principe de la RAISON, de la «Peine consécutive», de l'ombre où il est resté
beaucoup trop longtemps.
La présidente: Merci.
Y a-t-il des questions?
Mme Guarnieri: C'est évident.
La présidente: Laissons-leur quelques instants pour lire les lettres.
Mme Guarnieri: J'ai peut-être été trop brève.
La présidente: Non, ça va. On aime la brièveté.
Monsieur Stinson.
M. Stinson: C'est une préoccupation. Je pense qu'il y a longtemps que ça préoccupe les gens. C'est bon à savoir.
Mme Guarnieri: À mon avis, la lettre de Debbie Mahaffy aux Communes était déchirante. J'espère que vous avez tous pris le temps de la lire parce qu'on y dit bien pourquoi l'heure est venue d'adopter ce principe. Elle plaide au nom de sa propre fille Leslie, de Kristen French, de Tammy Homolka, de Jane Doe, de toutes les victimes qui ont été violées par Paul Bernardo etKarla Homolka.
Je pense qu'il faut donner suite à ce plaidoyer.
La présidente: Monsieur Langlois, avez-vous des questions? Monsieur Loney?
D'accord, merci beaucoup.
Mme Guarnieri: Merci. Voilà qui était succinct. J'ai confiance en vous. Merci.
Une voix: Le représentant de M. Assadourian est ici.
La présidente: D'accord.
Mme Guarnieri: Je tiens à ce que vous sachiez tous qu'étant donné que j'ai été brève, il me doit son premier-né. Comme ça, il pourra faire son exposé plus tôt.
La présidente: Non, parce qu'il n'est pas ici.
Vous représentez M. Assadourian?
M. Daniel Kennedy (adjoint législatif de M. Sarkis Assadourian, (député de Don Valley-Nord)): Oui.
La présidente: Très bien. Il nous faut la permission du comité pour entendre un membre du personnel. Avez-vous des objections?
Une voix: Aucune.
La présidente: Vous êtes tous tellement gentils.
M. Kennedy: Merci. Je m'appelle Daniel Kennedy, je suis l'adjoint législatif deM. Assadourian. Je vous présente aujourd'hui le projet de loi d'intérêt privé que M. Assadourian entend soumettre à la Chambre.
Il s'agit d'un projet de loi que vous connaissez peut-être déjà. Il s'agit essentiellement du même projet de loi qui a été déposé lors de la dernière session et qui s'appelait alors le projet de loi C-229.
Ce projet de loi part du principe que si le Parlement tient à fonctionner efficacement, il doit jouir d'un climat politique plus stable.
Au cours des quelques dernières années, le climat politique a connu des secousses dramatiques. Le régionalisme et les petits groupes d'intérêt qui en émanent gagnent du terrain, ce qui fait de plus en plus obstacle au consensus qui doit se réaliser au sein du Parlement et parmi les Canadiens.
Ce projet de loi ne conteste nullement le processus démocratique mais plutôt la définition de ce qui constitue un parti aux élections fédérales et les obligations qu'un parti a envers les Canadiens. Si un groupe demande le statut de parti à une élection et ne respecte pas les conditions que comporte la modification que nous présentons, ce groupe ne pourra pas entrer à la Chambre des communes à titre de parti reconnu, et ne pourra par conséquent jouir des droits et privilèges dont jouit normalement un parti reconnu.
Il ne fait aucun doute que cela soulève la question de la représentation proportionnelle et tous les arguments qui en émanent. À de nombreuses reprises au cours de notre histoire, on a fait l'essai de la représentation proportionnelle ou du moins, on en a discuté aux niveaux provincial et fédéral.
Ce projet de loi ne vise pas à instaurer la représentation proportionnelle dans le cadre de notre système électoral actuel mais plutôt à établir une relation entre la reconnaissance d'un parti par le Parlement et la représentation de ce même parti au pays en vertu des modifications que nous proposons à la Loi électorale du Canada, dans le sens même du projet de loi C-229.
C'est essentiellement la première chose. Il y a plusieurs questions auxquelles je suis prêt à répondre et auxquelles M. Assadourian m'a préparé. À part ça, je devrai...
La présidente: Merci.
Monsieur Stinson, avez-vous des questions?
M. Stinson: Vous avez dit que cette proposition se retrouvait auparavant dans le projet de loi C-229?
M. Kennedy: C'est exact.
M. Stinson: Qu'en est-il résulté?
M. Kennedy: On a jugé que ce projet de loi ne pouvait pas faire l'objet d'un vote. Il n'a pas été renvoyé au comité.
M. Stinson: Merci.
La présidente: Monsieur Langlois.
[Français]
M. Langlois: Je ferai mes commentaires plus tard, mais on comprend que, si cette loi avait existé, les partis comme le CCF, le Crédit social, les Fermiers unis et le Bloc québécois n'auraient pu voir le jour. C'est, finalement, la portée de cette mesure. Je crains qu'elle soit un très sérieux danger pour l'histoire démocratique canadienne. Enfin, on en débattra.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Kennedy, j'ignore si M. Assadourian le sait, mais nous siégeons tous au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, et nous avons longuement discuté de ce principe lorsque nous avons été saisis du projet de loi d'intérêt privé de M. McClelland. Le comité en a longuement discuté.
Le projet de loi C-69, qui a été rejeté par le Sénat, était partiellement le résultat de toutes ces discussions. Mais on en a longuement discuté au Sénat aussi.
Je ne sais pas si M. Assadourian sait cela. S'il ne le sait pas, je causerai avec lui lorsque je le verrai.
M. Kennedy: D'accord.
La présidente: Merci. Dites-lui que vous avez bien travaillé.
M. Kennedy: Merci.
La présidente: Dites-lui que vous méritez une augmentation. Je vous signerai un billet.
C'est maintenant au tour de M. Milliken, sans son premier-né.
M. Peter Milliken (député de Kingston et les Îles): Je siégeais à ce comité auparavant. J'ai siégé à ce comité pendant presque toute l'ancienne législature.
La présidente: J'espère que vous n'avez pas dit au grand public que c'est le meilleur comité de la Colline.
M. Milliken: Je n'ai rien dit. Je suis resté absolument silencieux sur ce sujet. Non je n'ai rien dit au grand public, je n'ai rien dit non plus à mes collègues de la Chambre.
J'ai proposé ce petit projet de loi, le projet de loi C-270, lors de la dernière législature. Certains s'en souviennent peut-être - M. Loney a raconté un autre incident dans le même sens - , au cours de la dernière législature, à compter de la fin de la première session en décembre 1988 jusqu'au commencement de la nouvelle session le 3 ou 4 avril 1989, la Chambre des communes n'a voté aucun crédit. On n'a même pas demandé de crédits dans le discours du Trône de la première session de la législature, si je me souviens bien. Je crois que ça n'a même pas été fait lors du second discours du Trône non plus, mais c'était une omission.
Mais on n'a voté aucun crédit pour cette période, donc le budget des dépenses supplémentaire pour l'exercice financier se terminant au 31 mars 1989 et le crédit intérimaire pour les trois premiers mois du nouvel exercice financier commençant le 1er avril 1989 n'ont jamais fait l'objet d'un vote par la Chambre.
Ce qui est arrivé, c'est que le gouvernement s'est servi dans le Trésor en recourant aux mandats spéciaux du gouverneur général.
On a invoqué l'utilisation des mandats en Chambre, et le document a fait l'objet d'un examen par un comité. C'est tout ce qu'on a fait. Je crois qu'il s'agissait du Comité permanent des comptes publics, mais je ne m'en souviens pas avec exactitude. Je me rappelle avoir assisté à une séance de ce comité et avoir posé des questions précises. Les députés du gouvernement m'en ont voulu. Ils jugeaient que mes questions étaient impertinentes.
Je me suis dis qu'il fallait mettre un terme à cette pratique, et c'est pourquoi j'ai proposé une modification à la Loi sur la gestion des finances publiques afin d'interdire l'utilisation des mandats spéciaux entre les sessions parlementaires.
Lorsque le Parlement siège, il ne fait aucun doute qu'on ne peut y recourir; il faut s'adresser à la Chambre des communes et lui demander de voter des crédits. Mais dans ce cas-ci, le gouvernement a recouru à ces mandats spéciaux entre la première session et la seconde session du Parlement, ce qui a eu pour effet d'écarter la Chambre des communes.
Si l'on suit cette logique, le gouvernement pourrait fort bien renvoyer la Chambre et gouverner pendant quelques années en se servant des mandats spéciaux. La Chambre n'aurait jamais besoin de siéger parce qu'elle n'aurait pas à voter les crédits si la loi actuelle reste en vigueur. La plupart des gouvernements ne seraient pas aussi peu scrupuleux, mais légalement, cela peut se faire.
Cette modification vise à interdire cela. On ne pourrait recourir aux mandats spéciaux qu'à compter de la date de la dissolution du Parlement jusqu'à une date antérieure de deux semaines à la date fixée après la dissolution par la proclamation convoquant le Parlement pour l'expédition des affaires. Lorsqu'il y a dissolution et que des élections sont déclenchées, la proclamation du gouverneur général fixe toujours la date de convocation du nouveau Parlement, si bien qu'on saura ainsi quand exactement on pourra utiliser les mandats spéciaux. On ne pourra les utiliser autrement.
Si le gouvernement a un besoin urgent d'argent, il se sert du crédit pour éventualité, ce qui est maintenant prévu par le budget des dépenses, ou alors il convoque le Parlement et obtient les crédits voulus par la voie habituelle. C'est aussi simple que cela.
La présidente: Si ça passe, cette mesure sera très populaire auprès des bureaucrates.
M. Milliken: Oui, vous avez raison. C'était une mesure très populaire lorsque j'ai saisi le comité de ma proposition il y a plusieurs années de cela.
La présidente: Je vais poser mes questions tout de suite parce que vous autres, vous posez toutes les bonnes questions et il ne reste plus rien pour moi après.
Vous avez parlé d'une situation dramatique où la Chambre pourrait se dissoudre et pourrait ne pas siéger pendant deux ou trois ans. Pouvez-vous me dire plus exactement comment ce projet de loi nous fera faire des économies ou nous épargnera des ennuis?
M. Milliken: Je ne crois pas que cela va nous faire épargner de l'argent.
La présidente: Zut!
M. Milliken: Cela réaffirmerait le droit du Parlement de voter les crédits sans être court-circuité par le recours aux mandats spéciaux.
La présidente: Très bien. Y a-t-il d'autres questions?
[Français]
M. Langlois: Vous parlez de la première date fixée par la proclamation lorsqu'il y a dissolution de la Chambre? Il y a une date dans le bref d'élection, pour rapporter les brefs à telle date et fixer une date pour le début de la session.
De mémoire, cette date-là a été respectée en 1974 parce qu'il y avait un gouvernement minoritaire. Habituellement, la date n'est pas respectée et la Chambre est convoquée beaucoup plus tard.
Cela aurait-il pour effet, à toutes fins utiles, que la Chambre doive être rappelée plus rapidement qu'elle ne l'est actuellement?
M. Milliken: Je crois qu'avec ce projet de loi, on peut changer cela. On peut changer la date du commencement de la nouvelle législature, mais mon intention n'est pas d'éviter cela; c'est plutôt de faire en sorte que le gouvernement ne puisse pas utiliser les mandats spéciaux du gouverneur général entre les sessions.
Après le discours du Trône de la première session, on ne pourrait employer ces mandats spéciaux avant la dissolution de cette législature.
M. Langlois: Merci.
[Traduction]
M. Milliken: Merci beaucoup. J'espère que vous recevrez ma proposition. Je crois qu'elle répond à tous les critères du petit livre vert.
La présidente: Forcément, Peter, sans quoi vous n'auriez pas...
M. Milliken: Je ne l'aurais pas présentée ou je n'aurais pas pris la peine de venir, c'est certain.
M. Stinson: Vous avez dit que c'est la deuxième fois que vous présentez cette proposition?
M. Milliken: Oui, je ne crois pas qu'elle ait fait l'objet d'un débat par le passé, si mon souvenir est bon. Une seule de mes motions a été choisie au tirage et c'était pour une autre proposition de loi.
M. Stinson: Bon, je vois.
M. Milliken: Je ne crois donc pas que cela ait fait l'objet d'un débat à la Chambre. D'autres questions étaient plus urgentes.
La présidente: Nous entendons maintenant M. Keith Martin. Oh, un instant. En fait, vous avez manqué votre tour parce que vous aviez un peu de retard. Nous entendrons donc M. Szabo plutôt.
Nous avons du retard. C'est comme lorsque l'on va consulter un médecin. Nous avons pris trop de rendez-vous. Certaines des propositions de loi ont capté notre intérêt et nous avons posé beaucoup de questions. Vous tenez à ce que nous fassions du bon travail, j'en suis sûre. Mon médecin me dit qu'il doit ausculter ses malades de la tête aux pieds et qu'il ne se contente pas de les écouter.
Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo (député de Mississauga-Sud): Merci, madame la présidente.
[Français]
Je suis désolé de ne pouvoir parler français, monsieur Langlois. Je m'en excuse.
[Traduction]
Je suis ici pour vous présenter la motion suivante: Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager de modifier la Loi de l'impôt sur le revenu pour accorder un crédit d'impôt aux personnes qui restent à la maison pour s'occuper d'enfants d'âge préscolaire, de handicapés, de malades chroniques ou d'aînés. Si cette formulation vous dit quelque chose, c'est qu'elle est tirée d'une pétition portant des signatures de partout au pays que j'ai présentée plus d'une centaine de fois à la Chambre.
Aujourd'hui, dans nos familles, on est de plus en plus contraint de s'occuper à la maison des enfants d'âge préscolaire à cause de la rareté de places de garderie abordables. À cause de la lutte contre le déficit et des compressions budgétaires au niveau provincial, on doit aussi souvent s'occuper des personnes âgées, des malades chroniques et des handicapés, qui seraient normalement placés dans des établissements spéciaux. Ces établissements sont aussi très coûteux.
L'idée que j'avance figure dans une proposition de loi qui finira un jour j'espère par être présentée à votre comité. Il est envisagé de modifier le régime fiscal de façon à transformer des déductions en crédits et de créer un critère d'admissibilité pour le crédit d'impôt non remboursable ou la déduction pour frais de garde d'enfants.
Prenons un exemple. Celui ou celle qui gagne 70 000$ par année et paie 5 000$ par an de frais de garde pour un enfant d'âge préscolaire a droit à un remboursement d'impôt de 2 600$. Le contribuable qui gagne 30 000$ par année et qui doit payer des frais identiques de 5 000$ ne touchera que 1 800$ de remboursement. C'est un écart de 800$ pour la même somme consacrée à la garde d'enfants. C'est injuste et il y a d'autres cas semblables.
La motion n'occasionnerait pas de dépenses supplémentaires. Elle aurait pour effet de réaménager des avantages fiscaux très coûteux. En fait, la déduction transférable d'un conjoint à l'autre - un crédit d'impôt non remboursable - coûte au pays environ 1,4 milliard de dollars par année. Ce crédit est offert que l'on s'occupe ou non d'enfants ou que l'on ait ou non d'autres responsabilités. C'est un avantage fiscal accordé au conjoint pour la seule raison qu'il ne travaille pas. Si cette prestation était calculée en fonction du revenu, il serait possible d'en faire profiter expressément ceux qui en ont vraiment besoin.
Bref, ce que je vous dis, c'est que la réforme de la fiscalité est inévitable au pays. Un groupe de travail composé de spécialistes s'occupe actuellement de l'impôt sur les sociétés. Vu la tendance généralisée aux compressions budgétaires, surtout dans les provinces, il est grand temps, je crois, de songer à réaffecter le peu de ressources dont nous disposons au bénéfice des citoyens qui en ont besoin. Je parle de ceux qui fournissent un service incalculable à la société et qui s'occupent de ceux qui ont le plus besoin d'aide - les enfants d'âge préscolaire, les malades chroniques, les handicapés et les personnes âgées.
Je serais très heureux que vous choisissiez cette motion pour en faire l'objet d'un vote. Beaucoup de députés aimeraient discuter d'une question aussi brûlante d'actualité. Cela permettrait de prendre le pouls de la Chambre concernant l'aide à accorder à ceux dont le travail pour la société n'est pas reconnu.
C'est aujourd'hui jour de recensement. Une des questions porte sur le travail non rémunéré. Le travail à la maison en est une forme. C'est pourquoi je vous demande d'appuyer la motion M-30.
La présidente: Monsieur Langlois.
[Français]
M. Langlois: Je ne remets pas du tout en question votre engagement à défendre les valeurs familiales et, d'ailleurs, je vous en félicite. Ma question porte plutôt sur les conséquences.
Le fait de donner un crédit directement déductible de l'impôt à payer par la personne qui s'occupe au foyer d'enfants ou de personnes handicapées plutôt que de lui accorder un crédit d'impôt non remboursable fait une ponction fiscale à l'inverse sur le gouvernement.
Le rééquilibrage des finances publiques, le manque à gagner, à quel endroit le voyez-vous?
[Traduction]
M. Szabo: De fait, il n'y aurait pas de manque à gagner. Le critère du revenu permettrait de n'en faire profiter que ceux qui en ont besoin. Deuxièmement, le fait de transformer la déduction pour frais de garde d'enfants en crédit d'impôt ferait économiser au pays environ 250 millions de dollars par année. Et puis, deux personnes dans la même situation ne recevraient pas 2 600$ dans un cas et 1 800$ dans un autre. Les deux seraient traitées de la même façon.
Quel que soit le taux retenu pour le calcul du crédit, il n'est pas nécessaire que ce soit le taux minimum, actuellement établi à 17 p. 100. Comme vous le savez, dans le cas des dons de charité, on utilise un taux fractionné. Cela varie donc un peu. Deuxièmement, si l'on applique le critère du revenu, comme pour la sécurité de la vieillesse, passible de récupération fiscale, on pourra économiser 100 millions de dollars de plus.
Il faut aussi tenir compte du fait que les gens voudront quitter le travail parce que, après impôt, le coût des soins accordés aux enfants ou aux autres... et vu les coûts associés à un emploi, la rémunération nette est si peu importante que, en toute logique, la décision saute aux yeux. Il n'est pas nécessaire d'en assumer le coût au complet, mais un avantage fiscal modeste fera qu'il sera peut-être possible pour eux, financièrement, de choisir de rester à la maison pour s'occuper des membres de leur famille.
Cette décision libère un emploi et une place en garderie, que nous subventionnons à raison de 12 000$ par an au total au fédéral et au provincial. C'est une économie considérable attribuable au seul fait que nous faisons baisser la demande de places en garderie. Et puis, l'emploi libéré pourra être occupé par un chômeur ou un assisté social.
Le taux de chômage est de 9,4 p. 100 au Canada et beaucoup de chômeurs sont aussi des assistés sociaux, des mères seules qui ont besoin de la dignité que confère un emploi. Ces personnes ne dépendront plus de l'assistance sociale pour vivre, ce qui se traduira par une énorme économie pour le gouvernement. Elles se trouveront un emploi et il y a fort à parier qu'elles paieront plus d'impôt sur le revenu que la personne qu'elles auront remplacée parce qu'elles ne jouiront pas des mêmes déductions. La personne qui prendrait cet emploi paierait donc plus d'impôt que son prédécesseur parce qu'elle n'aurait pas droit à la déduction pour frais de garde d'enfants.
Il y a beaucoup d'éléments dans cette équation. Je ne veux pas m'étendre très longtemps sur les calculs. C'est le principe qui compte ici.
Par exemple, dans la pétition que je fais circuler, le préambule déclare que la tenue du foyer et le soin des enfants d'âge préscolaire constituent une occupation honorable dont la valeur est méconnue dans notre société. Nier ce principe et ne pas l'appliquer à ceux qui s'occupent des malades chroniques, des handicapés et des personnes âgées, c'est une perte immense. Il faut d'abord toutefois souscrire à ce principe.
Voilà donc ma motion. Ce serait une occasion de discuter de nos valeurs de société et de la justice fiscale, autant de questions importantes et d'actualité dont les députés voudront débattre.
La présidente: Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Langlois.
M. Langlois: Non, merci.
La présidente: Monsieur Stinson?
M. Stinson: Non.
La présidente: Monsieur Loney?
Merci, Paul.
M. Szabo: Merci beaucoup.
La présidente: Monsieur Martin.
M. Keith Martin (député d'Esquimalt - Juan de Fuca): Merci beaucoup, madame la présidente.
La présidente: Je vous souhaite la bienvenue.
M. Martin: La motion que je propose aujourd'hui au comité, et qui porte le numéro 206, fait suite au malentendu qui existe depuis les sept derniers mois sur la question de savoir qui ou quoi peut se séparer du Canada. Il y a beaucoup d'incertitude et d'avis divergents sur la question de savoir ce qui peut ou ne peut pas se séparer et en fonction de quels critères une région peut quitter le Canada.
Tel est l'objet de la motion. J'ai repris les cinq principes du droit international qui déterminent qui ou quoi peut se séparer. Ces principes sont dans la motion. Je ne vais pas les lire.
J'essaie d'exposer un ensemble concret de critères qui devront être respectés pour que le gouvernement fédéral envisage de négocier avec des éléments sécessionnistes d'une région du pays. Il nous faut des lignes directrices très claires. Il ne fait pas de doute que celles-ci ont fait défaut lors du dernier référendum et rien n'est fait à l'heure actuelle pour préciser les choses.
Je me suis servi des principes internationaux généralement acceptés et qui l'ont d'ailleurs été par des membres du gouvernement de la province de Québec. Par exemple, le ministre des Affaires intergouvernementales du Québec, M. Jacques Brassard, a déclaré que les valeurs démocratiques sont les valeurs suprêmes et quel que soit l'avis d'un tribunal ou de la Constitution, le droit international l'emporte sur le droit intérieur en pareil cas et que l'on peut toujours dire que la sécession est illégale.
Toutefois, ma motion permettrait aux députés de formaliser les critères de sécession. Voilà donc brièvement l'objet de la motion. J'espère que les membres du comité accepteront de la soumettre à un vote.
La présidente: Merci beaucoup. Y a-t-il des questions?
[Français]
Une voix: En anglais, s'il vous plaît, monsieur, car mon français est très pauvre.
[Traduction]
M. Langlois: En ce qui concerne le dernier critère relatif à la sécession, vous dites que les deux tiers de la population doivent répondre par l'affirmative.
M. Martin: Oui. Deux tiers des voix, c'est le pourcentage généralement accepté en droit international. Ce n'est pas 50 p. 100 des voix plus une. En droit international, il faut une majorité des deux tiers pour qu'une région puisse se séparer. Je pense au cas de la Slovaquie, où 70 p. 100 de la population a voté en faveur de la sécession, ou à la partie turque de l'Île de Chypre, où 90 p. 100 de la population a voté en faveur.
M. Langlois: Merci.
La présidente: Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Stinson.
M. Stinson: Je vais me récuser dans ce cas-ci. C'est la seule question que j'aurais posée.
La présidente: Monsieur Loney? Merci beaucoup.
M. Martin: Merci.
La présidente: En un tournemain.
Passons maintenant à M. Shepherd.
M. Alex Shepherd (député de Durham): Merci beaucoup, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du comité. C'est la deuxième fois que je comparais ici en un mois à peu près.
La présidente: Vous devez être bien luné.
M. Shepherd: La proposition de loi dont vous êtes saisis aujourd'hui, proposition C-214, a pour titre Loi sur la déclaration du coût des programmes. En réponse à une question posée par la présidente il y a quelques instants, je crois que cette proposition permettrait de réaliser des économies.
C'est un texte tout simple. Il prévoit que chaque fois qu'une mesure législative est présentée à la Chambre, cette dernière doit se faire communiquer le coût estimatif du programme. Autrement dit, combien cela coûterait-il à l'État? De plus, il faudra faire connaître le coût par habitant en fonction du dernier recensement. Autrement dit, si un programme doit coûter 30 millions de dollars, il faut diviser le chiffre par 30 millions de citoyens, ce qui nous donne le coût par habitant.
Il est également prévu que la méthode de calcul doit être attestée par le vérificateur général, qui doit conclure que celle-ci est juste et raisonnable.
Évidemment, je parle ici de coûts estimatifs mais il n'est pas rare qu'en comptabilité on se serve d'une formule jugée juste et raisonnable dans les circonstances.
Tel est l'objet de la proposition de loi. Par ailleurs, partout où le programme est offert, l'information doit être mise à la disposition de la population.
L'objectif visé ici est de rendre l'administration plus comptable aux citoyens. Je m'étonne toujours de voir que des lois sont présentées à la Chambre sans que quiconque sache combien cela va coûter. Ça me semble élémentaire.
Souvent les ministres et d'autres mentionnent des coûts, mais lorsqu'on examine la façon dont ils s'y sont pris, cela s'est souvent fait en secret et j'imagine que la méthode de calcul est souvent controversée. Si nous nous en doutons, c'est parce qu'après avoir consulté les rapports du vérificateur général nous constatons l'écart entre les projections et les chiffres réels.
C'est faute d'avoir une vision d'ensemble que nous nous sommes endettés. C'est en partie parce que les programmes qui semblaient être une bonne idée à l'époque sont présentés par des ministres de toutes les allégeances politiques sans que l'on ait une idée réaliste de leurs coûts véritables.
Souvent, au gouvernement, on ignore ce que coûtent les choses jusqu'à ce que les factures commencent à arriver. Le gouvernement se comporte comme celui qui va acheter une voiture, examine les pneus et commande toutes les options sans se demander combien ça va coûter et qui attend la facture. C'est ce qui conduit au déficit et à l'endettement.
J'ai vérifié ce qui se fait ailleurs. Les États-Unis ont un mécanisme très semblable. Cela existe depuis quelque temps déjà. Il y a aussi en Australie quelque chose de semblable.
J'ai aussi une lettre d'appui que je vais faire circuler. Le vérificateur général lui-même dit estimer que cette idée est juste et raisonnable et que le moment est venu de mieux gérer les coûts au gouvernement.
Évidemment, le Conseil du Trésor se charge déjà d'une partie de ce travail. Les représentants du Conseil avec qui j'ai parlé disent que c'est une excellente idée qui faciliterait beaucoup la tâche du Conseil du Trésor parce que les ministres ne seraient pas constamment à se chamailler avec le Conseil pour appliquer leurs programmes. Ils auraient déjà pris le temps d'en calculer le coût et de le situer dans l'univers budgétaire du gouvernement.
Je pense que la population canadienne s'inquiète de l'obligation de rendre compte. En outre, le financement du gouvernement semble être pour elle un mystère total. Je pense que l'idée d'attribuer à chaque programme un coût par habitant amènera les gens à tenir compte de ce qu'il va leur en coûter.
Nous avons élaboré dans notre pays un système curieux, fondé sur la conviction que le gouvernement est magique. Ainsi, on peut demander des services qui sont miraculeusement payés par d'autres. Si l'on était plus précis et qu'on présentait aux citoyens un programme en leur disant ce qu'il coûtera à chacun d'entre eux, ils verraient ce programme qu'ils réclament du gouvernement sous un autre jour. Je pense aussi qu'ils comprendraient mieux comment le gouvernement se finance.
Dans ma circonscription, la TPS pose un problème. Il y a une foule de gens qui croient qu'on peut la faire disparaître comme par enchantement, sans se demander où l'on trouvera les 20 milliards qu'elle génère en recettes gouvernementales.
Sans vouloir transformer tous les Canadiens en comptables, nous souhaitons que le citoyen moyen soit mieux informé. De plus, notre rôle de parlementaires gagnerait en crédibilité si, chaque fois qu'un programme est proposé, nous sachions exactement ce qu'il en coûterait à nos commettants. Nous pourrions porter un jugement de valeur et déterminer si les coûts en question sont justes et raisonnables ou trop élevés. Si un programme comme celui-là avait existé auparavant, le déficit et la dette ne seraient peut-être pas aussi élevés qu'aujourd'hui.
Le gouvernement subit énormément de pression pour réduire le déficit et la dette car notre pays est vraiment acculé au pied du mur. Dans bien des cas, ce sont les investisseurs internationaux qui réclament que nous mettions de l'ordre dans nos affaires et menacent de ne plus acheter nos obligations.
Il n'aurait pas fallu en arriver au point où les investisseurs internationaux nous dictent, jusqu'à un certain point, ce que nous devons faire. Voilà où en sont les choses. Dans le contexte de la lutte contre le déficit et la dette, je pense qu'il serait bon d'instaurer des systèmes de gestion qui permettraient aux Canadiens de contrôler les futures dépenses du gouvernement.
Voilà l'essence du projet de loi. Il est simple et direct et, à mon avis, répond aux conditions exigées pour faire l'objet d'un vote. J'estime qu'il a une portée nationale et qu'il est fort opportun. À une époque où l'on réclame davantage de comptes, je pense qu'il serait bon que ce projet de loi fasse l'objet d'un débat exhaustif à la Chambre des communes.
La présidente: Merci, monsieur Shepherd. Les questions se bousculaient dans ma tête pendant que je vous écoutais.
J'aimerais obtenir des précisions. Lorsqu'un nouveau programme ou un changement de programme est proposé par le gouvernement, par un comité ou par un député, par le biais d'un projet de loi d'initiative parlementaire, va-t-on déterminer le coût de ce nouveau programme ou de ce changement?
M. Shepherd: C'est exact. On établira le coût de toute initiative présentée à la Chambre des communes. La plupart des mesures gouvernementales et le dépôt de projets de loi du gouvernement...
La présidente: Les budgets sont souvent entourés du plus grand secret, et l'on puise souvent dans un programme pour en financer un autre. Il y a énormément de réaménagements. Je ne veux pas soulever de controverse avec ma prochaine question. Je suis vraiment curieuse de savoir. Ne croyez-vous pas que le fait que la population sache le prix de ces programmes n'ait une incidence sur le processus budgétaire? Ne serait-on pas porté à prétexter le coût d'un programme pour l'abandonner?
M. Shepherd: Pour ce qui est du secret entourant le budget, notre propre ministre des Finances a essayé de s'en écarter et de créer un processus plus ouvert. En fait, le processus budgétaire s'amorce deux ou trois mois avant le budget, avec les consultations publiques sur la façon de dépenser l'argent disponible.
L'autre chose, c'est que le budget est en fait une prévision des recettes et des dépenses pour l'année à venir. Il faut donc que les programmes s'y conforment. À mon avis, cela serait avantageux pour le processus budgétaire et pour le ministre des Finances car les programmes présentés à la Chambre des communes devraient respecter les exigences budgétaires presque immédiatement. Je soupçonne que ce qui se passe lorsqu'on annonce un programme, c'est que l'on s'attend à le retarder pour qu'il relève du budget de l'année suivante s'il n'est pas conforme à celui de l'année précédente.
Ce sont toutes des choses qui se font couramment. Je pense qu'ainsi, le processus serait plus ouvert. À mon avis, les ministres seraient plus sensibles aux coûts des programmes qu'ils présentent.
Si l'on considère le gouvernement, de tous les ministres du Cabinet, deux seulement sont responsables du contrôle des coûts: le ministre des Finances et le président du Conseil du Trésor. Pour faire une analogie avec un match de hockey, nous n'avons que deux joueurs dans notre camp, et tous les autres essaient de marquer contre nous. Nous avons besoin d'une meilleure protection pour que les coûts ne deviennent pas incontrôlables.
La présidente: Je suis d'accord avec vous, mais je voulais vous l'entendre dire.
Ne pensez-vous pas qu'on calcule ces coûts dans la plupart des ministères de toute façon? Ne pensez-vous pas que ces renseignements doivent être disponibles dans les ministères, particulièrement depuis que notre gouvernement a accédé au pouvoir et que les deux autres partis à la Chambre surveillent de près nos efforts pour réduire le déficit? Ne croyez-vous pas que l'on établit déjà le coût de la plupart de ces programmes? Est-ce simplement que l'on ne nous communique pas cette information?
M. Shepherd: La réponse est non, je suppose.
La présidente: C'est angoissant.
M. Shepherd: Tout dépend du ministère. Certains sont meilleurs que d'autres. Récemment, nous nous sommes attachés à réduire les coûts plutôt qu'à créer de nouveaux programmes. Cela dit, mes tentatives pour essayer de savoir combien coûtent ces nouveaux programmes m'ont amené à conclure que ce calcul des coûts est sommaire.
Certains de ces programmes exigent un calcul des coûts externes. Si l'on doit compter sur des sources externes pour leur exécution, nous avons besoin de soumettre des renseignements concernant les coûts à cette tierce partie, mais cela se fait rarement dans notre système. Je pense qu'on constate l'année d'après que les choses ont déraillé alors qu'on a fait des propositions reposant sur certains coûts et qu'il est impossible de les réaliser...
La présidente: Merci.
Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Loney.
M. Loney: Combien en coûterait-il pour déterminer à l'avance le coût des programmes?
M. Shepherd: Tout d'abord, pour faire suite au commentaire de la présidente, c'est une chose que les ministères devraient faire. Je pense que la seule augmentation de coût concernerait le vérificateur général. Compte tenu de son mandat, je suppose qu'il serait en mesure d'allouer des fonds prévus pour les vérifications courantes. En effet, il est forcé d'examiner les choses après coup, environ cinq ans après le fait. S'il avait l'assurance de pouvoir intervenir dans le processus... Je ne veux pas dire qu'il se mêlerait de politique gouvernementale, mais il pourrait assurer un certain contrôle au niveau législatif au lieu d'intervenir simplement après coup.
À mon avis, cela est très frustrant. On découvre, à la lecture du rapport du vérificateur général, qu'on a gaspillé 200 millions par-ci, 300 millions par-là, mais c'est chose faite depuis longtemps. Si l'on pouvait trouver une façon de rapprocher cette fonction de surveillance du processus en cours, je ne pense pas que cela nous coûterait très cher et nous pourrions économiser des sommes d'argent considérables.
M. Loney: Je voulais ainsi calculer quelles pourraient être les économies nettes.
M. Shepherd: Je serai honnête avec vous: cela serait une tâche ahurissante. Il nous en coûterait un million pour étudier tous les programmes gouvernementaux et déterminer combien il en coûterait pour en calculer le coût. Il existe certainement dans ces ministères des fonctionnaires qui font en partie ce travail, mais je ne pense pas qu'ils le fassent de façon aussi exhaustive qu'ils le devraient. Peut-être suffirait-il d'établir à l'intention des ministères des règles quant aux renseignements que nous souhaitons obtenir avant la présentation d'une mesure législative.
À mon avis, le seul coût véritable serait lié au fait que le vérificateur général se plaindrait d'avoir un peu plus de travail. À cela, je répondrais qu'il n'a qu'à réduire ses vérifications historiques et à examiner des programmes plus récents. Le vérificateur général n'a qu'à demander quelle méthode de calcul des coûts on a utilisée.
Autrement dit, il ne va pas vraiment essayer de calculer ce qui est dépensé, au dollar près. Comment vous êtes-vous pris pour arriver à ce chiffre? Avez-vous fait des calculs fondés sur la vraie vie? Combien d'heures-personnes seront nécessaires? Quelle somme de matériel? Combien de machins allez-vous acheter et comment allez-vous vous y prendre pour assurer la prestation du programme? Allez-vous recourir à l'autoroute de l'information? Combien tout cela va-t-il coûter aux contribuables? A-t-on comptabilisé 20 p. 100 ou 100 p. 100 des coûts?
M. Loney: Il s'agit donc davantage de refaçonner l'administration qui est en place plutôt que de créer un nouveau programme.
M. Shepherd: Je le crois. Il s'agit de rationaliser le système actuel.
La présidente: Ai-je raison de croire qu'à court terme, il est moins question d'économiser de l'argent que d'établir des priorités?
M. Shepherd: Je pense qu'on économiserait simplement en modifiant la méthodologie du système. Bien souvent, le budget des dépenses supplémentaire déguise le fait qu'il y a eu des dépassements de budget. Voilà ce qui se produit dans notre système. Le Conseil du Trésor fait de son mieux pour essayer de contrôler les coûts, mais une fois que le programme est lancé et que le grand public y a accès, c'est très difficile. Il a été convenu d'assurer tel ou tel service, mais au beau milieu, on se rend compte que cela coûte beaucoup plus cher qu'on ne l'aurait imaginé étant donné qu'on n'a pas pris en compte tous les éléments du processus.
Si ce système de gestion était instauré, il contribuerait sans doute à réduire les coûts, et je pense que les ministres seraient moins enclins à présenter des plans grandioses que nous ne pouvons nous permettre.
La présidente: Cela pourrait aussi mettre un frein à l'envoi à répétition de ces chèques fort généreux que nous envoyons à quelque 50 000 organisations.
Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Stinson.
M. Stinson: Tout cela semble très familier. Le comité a-t-il examiné ces questions avant?
M. Shepherd: Non, mais j'ai déjà présenté un projet de loi qui s'intitulait: déclaration des droits des contribuables. Cette déclaration des droits des contribuables a d'abord pris la forme d'un projet de loi omnibus - un projet de loi gratuit - , que j'ai ensuite divisé. J'y recommandais la nomination d'un protecteur des contribuables et il y était aussi question de la responsabilisation au gouvernement, mais ce projet de loi-ci porte davantage sur le processus législatif.
M. Stinson: D'accord.
La présidente: Merci beaucoup, Alex.
M. Crête n'est pas ici. Avons-nous...
Le greffier du Comité: Nous lui avons téléphoné, madame la présidente. Peut-être pouvons-nous l'appeler de nouveau.
La présidente: D'accord. Merci beaucoup.
Monsieur Stinson, vous êtes notre dernier présentateur.
M. Darrel Stinson (député d'Okanagan - Shuswap): Moi aussi, j'ai le sentiment d'être privilégié à bien des égards. J'ai comparu devant le comité récemment au sujet d'un autre projet de loi.
Je souhaite présenter cette mesure à la Chambre car récemment la question de la séparation a fait surface, et non seulement dans la province de Québec. Il y a aussi une discussion en cours à ce sujet dans ma province de la Colombie-Britannique. C'est un problème auquel nous serons sans doute confrontés plus tôt que plus tard, et peut-être sur plus d'un front. J'ai rédigé le projet de loi C-230 dans l'espoir de formuler certaines lignes directrices.
Depuis le référendum au Québec, on se querelle quant à savoir si les règles ont été respectées. Je souhaite que l'on instaure des règles pour que tout le monde comprenne exactement les enjeux et le déroulement de la partie.
J'ai envoyé un exemplaire de mon projet de loi à tous les premiers ministres provinciaux, et j'ai reçu une réponse de deux d'entre eux. Dans sa réponse, le premier ministre du Nouveau-Brunswick disait en partie ceci:
- C'est avec plaisir que j'ai reçu un exemplaire de ce projet de loi relatif à un référendum national
qui autoriserait le gouvernement à négocier les termes de la séparation avec le Québec. Cela a
été souvent mentionné comme une option possible pour le gouvernement fédéral, et je lirai avec
intérêt votre mesure pour en apprendre davantage sur les détails entourant cette possibilité.
- J'apprécie vos efforts pour promouvoir l'unité nationale et je peux vous assurer que pour le
gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador, aucune question ne revêt autant d'importance
que la préservation d'un Canada fort et uni.
Dans mon projet de loi, je propose que le gouvernement fédéral accepte de tenir un référendum national exécutoire qui lui permettrait de négocier avec une région votant en faveur de la séparation. J'ajoute la réserve suivante dans le projet de loi: si, et seulement si le Parlement détermine que certaines conditions fondamentales ont été respectées. Parmi ces conditions, il faudrait que la question soit claire.
Tant dans les annonces préliminaires que sur le bulletin de vote, il faudrait indiquer qu'un vote en faveur de la séparation signifie un vote en faveur de la création d'un État séparé, distinct du Canada, un vote pour cesser d'être une province du Canada et d'avoir une représentation à la Chambre et au Sénat. Cela se traduirait par la perte du droit à la citoyenneté canadienne, au passeport canadien, à l'entrée libre en sol canadien pour y travailler et y voyager.
Mon projet de loi permettrait aussi au Parlement de déterminer exactement ce que cela signifie que de se séparer du Canada et d'établir par combien de voix de majorité un tel projet pourrait être accepté. Mon projet de loi mentionne 50 p. 100 des voix plus une - proportion que j'accepte - mais je pense que cette question devrait faire partie du débat à la Chambre.
À mon avis, ce projet de loi ne relève pas davantage du programme d'un parti plutôt que d'un autre. C'est une question qui intéresse tous les partis à la Chambre, et je suis convaincu que les Canadiens souhaitent vivement qu'on en discute et même qu'on vote à ce sujet à ce moment-ci.
Je pourrais vous citer ce que d'autres ont dit à ce sujet, y compris le premier ministre du Québec, mais nous pourrons y revenir au moment de la discussion. Tout ce que j'espère, c'est qu'on accordera à cette question toute la considération qu'elle mérite.
La présidente: Y a-t-il des questions, monsieur Stinson? Monsieur Langlois.
[Français]
M. Langlois: C'est extrêmement détaillé. Je pense qu'il serait difficile pour quelqu'un d'en sortir. À l'article 3, à la page 4, monsieur Stinson, on dit qu'après le résultat référendaire dans une province:
[Traduction]
le Sénat et la Chambre des communes décident:
- f) si aucune des circonscriptions où le référendum a été tenu n'a été modifiée de façon à
diminuer de façon importante la proportion d'électeurs de la circonscription qui sont
Autochtones ou d'une origine ethnique autre que canadienne française par rapport à la
proportion qui existait dans la circonscription au moment de la dernière élection générale
provinciale avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
Pourquoi faites-vous spécifiquement allusion aux Canadiens français dans une des dispositions de votre projet de loi?
[Traduction]
M. Stinson: C'est parce que cette mention précise est apparue dans les arguments concernant la séparation du Québec. D'ailleurs, cela ne devrait sans doute pas s'appliquer uniquement au Québec, mais à ce moment-là, on discutait du sort des peuples autochtones du Québec et de leur droit de rester au sein du Canada si tel est leur désir.
M. Bouchard a dit tout au long de la campagne référendaire que dans un contexte démocratique - et c'est ce que je crois moi-même - la volonté de la majorité l'emporte dans n'importe quelle région. Je pense que la Chambre est l'endroit idéal pour débattre de cette question, pour s'entendre sur la façon de définir «région» ou «peuple» au sein de la province.
[Français]
M. Langlois: Monsieur Stinson, vous abordez carrément le problème de la partition. C'est-à-dire qu'à l'intérieur des limites provinciales, vous laisseriez à des entités - vous parlez même de circonscriptions - la possibilité de ne pas faire partie de l'unité de négociation si elles ont voté négativement.
Par exemple, dans la province de l'Alberta, où les circonscriptions sont plus descriptives par leurs noms, supposons que, lors d'un référendum sur la sécession de l'Alberta, le Oui l'aurait emporté, mais que la circonscription de Calgary-Centre aurait voté Non. Cette dernière circonscription serait alors entourée par une marée de circonscriptions ayant voté Oui.
Y aurait-il une façon, pour les gens de Calgary-Centre, voyant que les autres ont voté Oui, de revoir leur décision? Ou bien, cette décision serait-elle finale au point que cette circonscription resterait prise en plein milieu de la ville de Calgary, et que la province se trouverait, elle, prise avec une circonscription - je ne sais de quelle façon - qui ferait encore partie du Canada? J'essaie de voir comment on pourrait solutionner ces problèmes de partition, parce que cela s'appliquerait de la même façon au Québec, qui risquerait de ressembler un peu à un fromage suisse, avec des trous un petit peu partout.
[Traduction]
M. Stinson: Cette disposition s'appliquerait de la même façon à la Colombie-Britannique, ma province d'origine. Voilà ce dont il faut discuter pour s'entendre sur les règles du jeu. Nous devons convenir des conditions qui s'appliqueraient. Tout ce que mon projet de loi se propose de faire, c'est de donner le coup d'envoi au débat pour que nous puissions établir les balises d'un référendum et atténuer les craintes et les préoccupations d'un côté comme de l'autre.
[Français]
M. Langlois: Merci. Je n'ai pas d'autres questions.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Stinson, quelque chose dans le sommaire me préoccupe, car - comme l'a signalé M. Langlois - le projet de loi est difficile à faire adopter. Lorsque vous dites: «Le sénat n'intervient dans le processus de confirmation de la validité et d'approbation que s'il est alors devenu une chambre dont les membres sont élus», votre projet de loi ne sert à rien, dans la pratique, tant que nous n'aurons pas rouvert la Constitution et décidé si les sénateurs doivent ou non être élus à l'avenir. Autrement dit, aucune des mesures que vous proposez ne pourra entrer en vigueur tant que le régime gouvernemental qui est le nôtre n'aura pas été modifié.
M. Stinson: Non, non. Ce que cela veut dire, c'est que ces mesures s'appliqueront quand même avec le Sénat tel qu'il est maintenant ou si ses membres sont un jour élus.
La présidente: Très bien, j'avais peut-être mal lu.
M. Stinson: Ça va.
La présidente: «Le Sénat n'intervient dans le processus de confirmation de la validité et d'approbation que s'il est alors devenu une chambre dont les membres sont élus».
La journée a été longue et j'ai mal à la tête.
M. Stinson: Je sais.
[Français]
M. Langlois: Je pense, madame la présidente, que l'article 3 répond à votre question. Si le Sénat n'était pas élu à l'époque où la question se poserait, on ne tiendrait pas compte du Sénat, et la Chambre des communes déciderait alors de la question. C'est ce que je comprends de l'article 3.
[Traduction]
La présidente: Très bien.
Monsieur Loney, avez-vous des questions? Bien, merci.
Nous avons reçu deux projets de loi qui n'ont été expliqués par aucun député. L'un émanait de M. Crête, qui souhaite abolir le Sénat - objectif que je partage, mais le moment n'est pas opportun pour en discuter. L'autre projet de loi émane de M. Ringma, qui souhaite rouvrir le débat sur la peine de mort. Je tiens simplement à vous signaler que le comité a été saisi de ces deux projets de loi même si personne n'est venu nous les expliquer.
M. Stinson: Est-il possible que l'un de ces députés comparaisse devant...? Il m'est impossible de prendre une décision sur-le-champ au sujet de ces projets de loi. Ce n'est pas ce que vous voulez dire, n'est-ce-pas?
La présidente: Pas encore. Nous allons en discuter dans un instant. Je tiens simplement à vous rappeler que nous avons reçu ces deux projets de loi et que les deux députés qui en sont les auteurs ont été informés. M. Ringma refusait de venir mais il souhaite néanmoins que son projet de loi fasse l'objet d'un vote, et M. Crête a dit qu'il serait présent mais il nous a été impossible de communiquer avec lui.
L'autre problème, c'est qu'il y a des votes à la Chambre à 18 heures. Si les membres du comité estiment possible de prendre une décision dans les vingt prochaines minutes sur certaines de ces mesures - les motions ou les projets de loi - nous pouvons le faire. Il n'y a pas autant d'urgence que la dernière fois. Nous pouvons également nous réunir de nouveau demain, ce qui vous laissera le temps d'y réfléchir. C'est ce que préfèrent certains. D'autres préfèrent battre le fer pendant qu'il est chaud. Je m'en remets à vous.
M. Stinson: Je préfère que nous siégions demain. Je vais être honnête avec vous: la journée a été longue. Lorsque nous prenons des décisions à la hâte parce que le temps presse... Loin de moi l'idée de critiquer qui que ce soit, entendons-nous bien. Toutefois, cela me chiffonne, surtout lorsqu'il s'agit d'initiatives parlementaires. Peu m'importe que cela ne nous prenne que cinq minutes pour les passer toutes en revue demain; si nous commençons à en discuter, que la cloche sonne et qu'il nous faille partir, je...
La présidente: Il y a une troisième solution: nous pouvons revenir après le vote.
M. Stinson: J'ai une réunion de caucus.
Une voix: Moi aussi.
M. Loney: Je préfère revenir demain. Nous avons entendu tous les témoins très rapidement aujourd'hui et j'aimerais avoir le temps d'y réfléchir un peu.
La présidente: Monsieur Langlois.
[Français]
M. Langlois: J'ai un problème demain. J'ai une autre réunion qui commence à 15h30. Il s'agit d'une séance du Sous-comité sur la sécurité nationale ayant trait au budget du Service canadien du renseignement de sécurité. Il serait peut-être possible qu'on commence avant, tout de suite après la période des questions. J'aurai eu, à ce moment-là, l'occasion de réfléchir sur ce qu'il y a là-dedans.
[Traduction]
La présidente: À quelle heure est votre réunion demain, monsieur Langlois?
M. Langlois: À 15h30.
La présidente: À 15h30. Ça va être serré.
Est-ce que tout le monde sera là pendant l'heure du déjeuner demain, ou est-ce que nous avons tous des engagements à cette heure-là?
M. Stinson: Je n'ai pas de problème.
La présidente: Ou souhaitez-vous prendre le temps d'y réfléchir? Nous pouvons également nous absenter pendant la période de questions et la présence de M. Langlois est indispensable car il a entendu tous les témoignages. Nous demanderons donc au greffier d'essayer de nous trouver un créneau d'au moins une heure demain. Il ne nous faudra peut-être que 15 minutes, mais il vaut mieux réserver une heure.
Et jeudi matin? Cela me conviendrait parfaitement. Il y a une réunion du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre.
M. Langlois: Peut-être juste avant, à 11 heures.
La présidente: Oui, si nous sommes tous disponibles.
M. Stinson: Cela me convient. Remarquez, je n'ai pas vu mon emploi du temps.
M. Langlois: C'est à 9h30.
La présidente: Et vous, John?
M. Loney: Oui, ça va.
La présidente: Rendez-vous donc jeudi matin à 9h30.
Le greffier: C'est de 9h30 à 11 heures. Je vais annuler pour demain et trouver une salle pour...
La présidente: Pour savoir ce qu'en pensent les collègues du comité: si M. Crête nous demande s'il peut comparaître jeudi matin à 9h30, êtes-vous d'accord pour lui autoriser?
M. Stinson: À mon avis, on passe parfois des mois à rédiger un projet de loi, dans l'espoir qu'il sera un jour tiré au sort. S'il est tiré au sort et que, pour des raisons indépendantes de notre volonté, il nous est impossible d'être présent le jour où le projet de loi est à l'étude, mais qu'il est possible de le présenter la fois suivante... nous ne pouvons pas prendre 10 minutes de...
La présidente: Autrement dit, votre réponse est positive. Aucune objection à ce qu'on le laisse s'exprimer?
M. Stinson: Aucun problème.
La présidente: Très bien.
Monsieur Langlois, cela vous convient-il?
[Français]
M. Langlois: Oui. Il faudrait voir ses raisons. On a quand même un horaire. Le principe est qu'on doit respecter cet horaire. Si M. Crête a de bonnes raisons à nous donner, je pense qu'on peut faire preuve d'indulgence, mais pas de complaisance.
[Traduction]
La présidente: Très bien. Vous vous en remettez à la décision de la présidente.
M. Langlois: Oui.
La présidente: Merci. Merci à tous.