[Enregistrement électronique]
Le mardi 29 octobre 1996
[Traduction]
[Difficultés techniques]
M. Art Hanger (député de Calgary-Nord-Est): ...Troisièmement, on entend beaucoup parler de la baisse du taux de criminalité. Toutefois, les crimes violents commis par des jeunes constituent la catégorie de délits en plus forte croissance au Canada. Les Canadiens veulent que soient jugés par des tribunaux pour adultes les jeunes récidivistes qui ont commis des délits violents ou contre la propriété. La présente motion vise à faire en sorte que tous ces récidivistes soient automatiquement transférés à un tribunal pour adultes, sans qu'il y ait nécessairement de demande, d'ordonnance ou de processus spéciaux.
Si ces motifs ne paraissent pas suffisamment convaincants, je pense qu'il faut réfléchir à ce qui suit. En octobre 1996, une adolescente qui avait été complice du vol et de l'assassinat à coups de tournevis de Kulwarn Dhiman a été condamnée à seulement 10 mois de détention. La fille, qui a maintenant 15 ans, affichait un sourire après le prononcé de sa sentence pour homicide involontaire et vol qualifié.
En mai 1996, après avoir été appréhendé, un jeune garçon de 11 ans qui avait orchestré le viol collectif d'une adolescente de 13 ans a dit à la police de Toronto qu'on ne pouvait pas l'accuser parce qu'il était protégé par la Loi sur les jeunes contrevenants.
En mars 1996, trois garçons âgés de 14 ans n'ont manifesté aucun remords quand on les a reconnus coupables d'homicide involontaire et de vol qualifié pour avoir battu à mort un pêcheur américain à Prince Rupert, en Colombie-Britannique. La victime, qu'on appelait «le gentil géant», en raison de sa taille et de son amabilité, avait été battu à mort et dépouillé de 12 $.
En avril 1995, des jeunes âgés respectivement de 13, 14 et 15 ans ont volé et battu à mort un ministre anglican à la retraite et sa femme, à Montréal. Les trois n'ont manifesté aucun remords. Ils ont tous été condamnés à trois ans de prison. Le jeune de 14 ans livrait les journaux chez ce couple et leur en voulait parce qu'il n'en avait jamais reçu de pourboire.
Madame la présidente, voilà mon exposé. Je demande respectueusement qu'en raison des inquiétudes que suscite la criminalité parmi les jeunes le comité envisage sérieusement de considérer cette motion comme devant faire l'objet d'un vote. Je vous remercie.
La présidente: Merci, monsieur Hanger.
Des membres du comité veulent-ils poser des questions?
Monsieur Frazer, vous n'avez pas de questions?
M. Frazer (Saanich - Les Îles-du-Golfe): Non. Je suis au fait de la plupart des éléments qu'a fait valoir M. Hanger.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Hanger.
Madame Guarnieri, voulez-vous commencer, s'il vous plaît?
[Français]
Mme Albina Guarnieri (députée de Mississauga-Est): C'est la deuxième fois que je viens devant vous pour vous présenter mon projet de loi. Je pense que vous en connaissez déjà le contenu puisque vous étiez tous membres du comité, à l'exception de M. Frazer.
[Traduction]
Je présente le projet de loi C-321 au sous-comité pour la deuxième fois, étant donné qu'il n'a jamais été aussi manifeste qu'il est nécessaire et urgent d'adopter un texte législatif pour mettre fin aux peines concurrentes.
Au début de l'été, non pas un, mais deux tueurs en série se trouvaient en liberté conditionnelle à Mississauga. Les peines concurrentes équivalent pour ces tueurs d'habitude à une véritable ristourne pour les crimes qu'ils ont commis.
Dans le cas de John Lyman Kehoe, l'assassinat d'un deuxième enfant n'a en rien modifié sa sentence, si bien qu'il a pu être libéré à temps pour faire une troisième victime. Le 2 juillet, il y a moins de quatre mois, Kehoe et un autre tueur en série bénéficiant de la libération conditionnelle ont attiré une agente immobilière, Wendy Carroll, dans un guet-apens, lui ont tranché la gorge et l'ont abandonnée la croyant morte. Elle a survécu, et ce n'est pas grâce au système judiciaire ni à la Commission des libérations conditionnelles, qui avait relâché des agresseurs. Wendy Carroll a failli disparaître parce que notre système de détermination de la peine fait disparaître les victimes.
Si John Kehoe avait eu à purger une deuxième peine consécutive sans possibilité de libération conditionnelle pour l'assassinat de ce deuxième enfant, comme le dispose le projet de loi C-321, il n'aurait pas été en liberté et en mesure de s'en prendre à Wendy Carroll ni à quiconque. Je n'ai pas eu à chercher bien loin pour trouver un cas de tueur en série ayant bénéficié d'une libération conditionnelle hâtive et ayant fait une autre victime. Cela s'est produit à cinq minutes de voiture de chez moi, seulement deux semaines après que j'ai représenté ce projet de loi.
La question n'est pas théorique. Le projet de loi C-321 vise à remédier à une lacune de notre système de détermination de la peine, qui fait fi des victimes et fait courir des risques à des citoyens innocents.
En juin, Allan Rock a dit au Comité de la justice:
- Je ne sais pas pourquoi il est si difficile de percevoir la différence qui existe entre le fait de
commettre une infraction et celui d'en commettre plusieurs.
- Quant à savoir si je serais favorable à l'infliction de peines consécutives pour le meurtre, ce
n'est pas impossible.
- Cependant, il a ajouté que pour sa part il n'avait pas l'intention de déposer de projet de loi.
Vous ayant déjà soumis ce projet de loi, je sais qu'il ne fait aucun doute qu'il respecte les critères établis pour être considéré comme devant faire l'objet d'un vote. C'est bien clair. Pourtant, vous constaterez dans vos dossiers que la présidence a fait savoir publiquement qu'à la dernière occasion personne d'entre vous n'a voté pour que ce projet de loi soit considéré comme devant faire l'objet d'un vote et a fait remarquer que ces questions de politique étaient empreintes d'un esprit assez partisan. J'ose espérer que le reste du comité voit d'un autre oeil ce que j'estime être très grave et non partisan.
Par ces propos qu'elle a tenus publiquement, la présidence a donné l'impression que le comité n'estimait pas que la question des peines consécutives était suffisamment importante pour justifier un débat approprié, ni même pour faire l'objet d'un vote à la Chambre des communes. Il va sans dire que les parrains du projet de loi s'opposent à cette prise de position, tout comme les députés qui n'ont pas la chance de se prononcer à ce sujet.
Dans vos dossiers, vous trouverez des lettres d'appui au projet de loi C-321 qui proviennent de gens pour qui l'actuel système de détermination de la peine est bien plus qu'une question théorique. Il y a aujourd'hui dans l'auditoire des gens qui appuient ce projet de loi. Debbie Mahaffy est venue voir de ses propres yeux ce qu'elle appelle la justice de casino, tout comme Sharon et Gary Rosenfeldt, qui ont perdu leur fils aux mains du tueur en série Clifford Olson. Ils sont tous venus aujourd'hui parce qu'ils considèrent que les lettres qu'ils vous ont adressées la dernière fois sont restées sans écho.
Je termine en vous lisant une lettre d'une des dernières victimes du système des peines concurrentes, Wendy Carroll. Elle écrit:
- Je trouve inconcevable que ces criminels violents, les auteurs de multiples crimes commis avec
violence, comme les deux hommes qui ont tenté de m'assassiner le 2 juillet 1996 (quand je
faisais tout bonnement mon travail), soient en libération conditionnelle parce qu'ils bénéficient
en quelque sorte d'une ristourne. Ces deux monstres avaient déjà tué à deux reprises; pourtant
chacun n'a purgé qu'une peine de 12 ans. Vous appelez cela de la justice? Où est la justice pour
les deux enfants qui sont morts, les deux adultes qui sont morts, et moi-même? J'aimerais qu'on
m'explique en quoi ils sont réadaptés. Je porte de nombreuses cicatrices et j'ai subi des torts
permanents qui prouvent le contraire.
- Combien de gens encore devront subir cette expérience horrible et extrêmement douloureuse
que j'ai vécue en essayant de défendre ma vie contre des criminels... combien d'autres
innocents devront mourir pour que le Parlement décide qu'il est temps d'apporter quelques
changements?
Madame la présidente, je pense que tout est là.
La présidente: Merci.
Avez-vous des questions? Monsieur Langlois.
[Français]
M. Langlois (Bellechasse): Madame Guarnieri, je comprends que ceux que vous ciblez par votre projet de loi sont des criminels irrécupérables comme Bernardo ou Olson. On aurait pu parler aussi de Léopold Dion, un cas qui s'est produit il y a quelques années au Québec, pour lequel le projet de loi pourrait également s'appliquer. Est-ce que vous pourriez trouver une façon de modifier ce projet de loi de sorte que l'on puisse plaider des cas qui ne seraient pas aussi évidents afin que les sentences ne soient pas nécessairement consécutives et que le juge puisse bénéficier d'une discrétion? Vous ciblez tout le monde, vous visez très large et, de la sorte, vous atteignez tout le monde, même des gens qui pourraient constituer une exception à la règle que vous voulez établir.
Il y a des gens que vous avez nommés et pour lesquels il faudrait, à mon avis, la discrétion judiciaire. Évidemment, le cas de Bernardo est très clair: il a été déclaré criminel dangereux et il ne ressortira pas de prison. Dans l'affaire Olson, j'ai bien l'impression que le jury va régler son cas assez rapidement aussi, mais il ne faut rien anticiper. Est-ce que vous voulez vraiment que cette loi s'applique à tous les criminels qui se retrouveraient dans cette situation ou à des cas spécifiques avec des circonstances aggravantes comme ceux que vous avez mentionnés au début?
Mme Guarnieri: Je pense que le fait que vous me posez la question prouve la nécessité d'un vrai débat autour de mon projet de loi. Cela prouve aussi que le projet de loi doit être soumis à la Chambre pour une étude plus approfondie. Si vous pouvez démontrer que mon projet de loi ne marche pas, je vous demanderai de le dire au comité, parce que je pense que mon projet de loi est très simple. Les gens qui tuent d'autres personnes devraient rester en prison très longtemps. C'est peut-être un raisonnement simple, mais le fait est qu'on joue à la roulette russe avec des victimes innocentes. Dans le cas que j'ai cité, celui de M. Kehoe et de son ami, je suis sûre que Mme Carroll n'aurait jamais subi ce qu'elle a subi si mon projet de loi avait été en place.
M. Langlois: Merci.
[Traduction]
La présidente: Merci, madame Guarnieri.
Nous allons entendre M. Gilmour au nom de M. Breitkreuz. Soyez le bienvenu.
M. Bill Gilmour (député de Comox - Alberni): Puis-je commencer?
La présidente: Oui, vous le pouvez. Vous avez cinq minutes.
M. Gilmour: Le projet de loi C-284 a trait au droit de propriété. Garry est conscient de la nécessité de renforcer le droit de propriété dont on a débattu relativement à la motion M-205. Cependant, il n'a pas été question de mesures législatives spécifiques pour ce faire. Le conseiller législatif ainsi que la Division du droit et du gouvernement de la Bibliothèque du Parlement ont consacré des centaines d'heures à la préparation de ce projet de loi. La question n'est pas banale. J'estime qu'elle devrait faire l'objet d'un vote, parce qu'il me semble que tous les députés devraient pouvoir représenter leurs commettants.
Dans le cas des Libéraux en particulier, le très honorable Pierre Elliott Trudeau a réclamé avec conviction dans les années 60, 70 et 80 l'inclusion du droit de propriété dans la Charte des droits et libertés. J'estime que c'est une question qui transcende les divisions politiques et que tous les députés devraient avoir l'occasion d'en débattre à la Chambre.
Actuellement, en droit, rien ne protège le droit de propriété, et la Loi constitutionnelle canadienne ne contient aucune mesure relative à l'octroi d'une indemnité équitable en cas de dépossession obligatoire d'un bien.
C'est une question dont nous devons tous traiter, et je pense que les Canadiens veulent en discuter. Je vous demande instamment de considérer cette motion comme devant faire l'objet d'un vote.
La présidente: Voilà un exposé tout à fait concis. Merci.
Avez-vous des questions?
[Français]
M. Langlois: Si vous pouviez m'expliquer davantage le projet de loi, cela m'aiderait.
[Traduction]
Si vous pouviez m'expliquer brièvement la portée et le fond du projet de loi, cela m'aiderait à prendre une décision.
M. Gilmour: Ce projet de loi vise essentiellement à inclure dans la Charte des droits une mesure pour que le droit de propriété soit protégé, afin qu'aucun gouvernement, et plus particulièrement le gouvernement fédéral, ne puisse arbitrairement déposséder quelqu'un de ses biens - par exemple pour construire une autoroute - sans verser d'indemnité juste et équitable au propriétaire. C'est l'essentiel de cette mesure. Elle vise à restreindre le pouvoir qu'a le gouvernement en matière de droit de propriété des individus.
Les États-Unis et d'autres pays reconnaissent ce droit depuis des années, mais pas le Canada, et j'estime qu'il est temps que nous débattions de cette question.
[Français]
M. Langlois: Si je comprends bien, c'est la loi de 1960 et non pas la Charte de 1982 que vous visez.
[Traduction]
M. Gilmour: Ce n'est pas dans la loi pour l'instant. Comme je l'ai dit, notre conseiller juridique y a consacré des centaines d'heures. On reconnaît que ce droit doit être inclus, qu'il n'est pas protégé alors qu'il devrait l'être. C'est pourquoi notre service juridique a consacré énormément de temps à l'examen juridique de cette question pour essayer de voir si cette protection existait. Or, elle n'existe pas, et elle pourrait être accordée très facilement. Il suffit que le gouvernement le veuille.
M. Langlois: Merci.
M. Frazer: Monsieur Gilmour, j'aimerais avoir une précision. Si je comprends bien, ce projet de loi ne vise nullement à retirer au gouvernement fédéral le pouvoir d'exproprier des biens requis dans l'intérêt public; il s'agit simplement d'imposer l'octroi d'une indemnisation raisonnable en cas d'expropriation de ces biens, n'est-ce pas?
M. Gilmour: C'est exact.
Il arrive - par exemple si l'on construit une autoroute qui passe sur votre propriété - que le bien commun l'emporte. Toutefois, actuellement, dans la loi il n'est nulle part question d'indemniser le propriétaire, de lui accorder une audition impartiale ni de l'indemniser adéquatement pour ses biens.
M. Frazer: De sorte que pour l'instant l'indemnisation est laissée à la discrétion du gouvernement.
M. Gilmour: Tout à fait. C'est arbitraire, et c'est pourquoi il faut mettre en place un mécanisme pour que les gens puissent s'adresser quelque part, qu'ils puissent comparaître devant une tierce partie, être traités de façon juste et équitable, et régler la question plutôt que de se contenter de...
Habituellement, ce n'est pas le gouvernement, mais des fonctionnaires qui s'occupent de ces questions. Ils se contentent de fixer un chiffre arbitrairement, et le gouvernement a d'énormes pouvoirs dans ce domaine.
M. Frazer: Merci.
La présidente: Merci beaucoup.
Très bien, Jack, vous pouvez maintenant jouer votre autre rôle.
M. Frazer: Madame la présidente, membres du comité, si vous le permettez, je vais lire mon exposé, étant donné le peu de temps dont je dispose et le fait que je veux m'assurer de dire tout ce que j'ai à dire et de respecter l'horaire.
La présidente: C'est bien.
M. Frazer: L'approbation du projet de loi C-300 équivaudrait à demander au gouvernement de reconnaître la contribution des Canadiens qui ont servi dans la force de maintien de la paix des Nations Unies en leur décernant une médaille du service volontaire canadien de maintien de la paix. L'agrafe serait portée attachée au ruban-médaille pour signaler la première attribution, le 30 septembre 1988, du prix Nobel de la paix au Canada et aux forces canadiennes de maintien de la paix. L'agrafe ne pourra être décernée qu'à ceux qui ont fait partie de missions de maintien de la paix avant la date de remise de cette distinction.
Les membres du comité connaissent le monument qui se trouve à l'angle de la promenade Sussex et de la rue Murray, et qui a été érigé en l'honneur des troupes de maintien de la paix du Canada. Ils savent aussi qu'un bon nombre de Canadiens ne viendront jamais à Ottawa pour le voir, et que ce monument ne permet donc pas de reconnaître individuellement la contribution de ceux qui ont mérité cet honneur pour le Canada.
En 1942, le commandant et lieutenant-général canadien Guy Simonds écrivait à ses commandants pour leur dire, et je cite:
- L'ultime critère pour différencier une bonne distinction d'une mauvaise, c'est la réaction des
troupes. Si les troupes estiment que c'est une bonne distinction, elle l'est. Si les distinctions
remises suscitent des critiques des troupes, c'est que ce sont de mauvaises distinctions. Avant de
donner suite à toute recommandation, à chaque palier le commandant doit se poser cette
question: «Est-ce que le soldat de première ligne, s'il était au courant des faits, considérerait
que c'est bien mérité?»
Appuyés par l'association canadienne des anciens combattants ayant participé à des missions de maintien de la paix des Nations Unies, ils appuient fermement la proposition. L'Air Force Association of Canada a adopté une résolution à son récent congrès. En outre, j'ai reçu des pétitions portant plus de 2 000 signatures d'anciens combattants de tout le Canada, et j'ai également des lettres d'appui provenant de la municipalité du comté d'Annapolis, en Nouvelle-Écosse, de la ville de Kingston, du premier ministre de la Colombie-Britannique, M. Glen Clark, ainsi que quantité d'autres lettres.
Cette proposition reçoit l'appui d'anciens députés ainsi que de députés actuels, comme le whip en chef du gouvernement, Bob Kilgour; Stan Keyes; Simon de Jong; l'ancienne députée et première ministre de l'Île-du-Prince-Édouard, Catherine Callbeck; l'honorable Sheila Copps; notre président, l'honorable Gilbert Parent; l'honorable Diane Marleau; Mac Harb; l'honorable Warren Allmand; Bill Blaikie; Jean Leroux; George Proud; et d'autres encore. De plus, au cours de la dernière législature, deux députés ont présenté des projets de loi similaires qui n'ont cependant pas été tirés au sort.
En outre, en 1993, le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants avait recommandé l'octroi de la médaille du service volontaire canadien de maintien de la paix de l'ONU, mais le Parlement a été dissous avant qu'on donne suite à cette proposition.
Par ailleurs, Rideau Hall s'est jusqu'à maintenant abstenu d'insister pour qu'on octroie une médaille pour service volontaire canadien de maintien de la paix. La Chancellerie des ordres et décorations du Canada considère les médailles de maintien de la paix des Nations Unies comme canadiennes et estime qu'une seule distinction peut être accordée pour une réalisation, un acte ou un service donné, et qu'aucune nouvelle distinction ne peut se superposer à une autre. Pourtant, on a créé un précédent quand, à l'initiative des parlementaires, a été créée une médaille spéciale pour service volontaire en Corée, proposition qui a été approuvée en juin 1991 et a reçu la sanction royale le 10 juillet 1991.
En fait, il existe un autre précédent, étant donné que quand le Parlement a pris cette mesure en 1991 une médaille de l'ONU pour services rendus en Corée et une médaille canadienne partageaient un même ruban avec la Grande-Bretagne, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, pays du Commonwealth. Rideau Hall ne peut donc plus affirmer qu'une seule distinction peut être accordée pour un acte donné. On ne s'y est pas encore montré disposé à tenir compte de propositions visant l'octroi d'une médaille du service volontaire canadien.
Il va sans dire que le Parlement, à titre de porte-parole des citoyens canadiens, constitue le forum le plus approprié pour recommander l'attribution de décorations et de distinctions, et il ne s'agit nullement ici d'usurper la prérogative royale du gouvernement ni de Rideau Hall.
Cette distinction n'est pas un cas unique dans le monde. La Belgique, les Pays-Bas, l'Irlande, le Ghana, la Pologne et les États-Unis accordent déjà des médailles nationales de distinction pour participation à des missions de maintien de la paix. La Suède et la Finlande sont en voie d'en créer une, et la Nouvelle-Zélande et l'Australie envisagent d'octroyer une distinction de ce genre.
En vertu du projet de loi C-300, la médaille pour service volontaire canadien de maintien de la paix ne serait pas attribuée qu'à des militaires canadiens, mais aussi à des membres de la Gendarmerie royale du Canada ainsi qu'à d'autres citoyens canadiens qui la mériteraient.
Pour terminer, le projet de loi C-300 satisfait à tous les critères établis pour que le comité puisse le retenir comme affaire ou motion pouvant faire l'objet d'un vote: il est d'intérêt national; il ne suscitera pas de discrimination pour ou contre une région donnée du Canada; sa signification est claire, et il peut facilement être mis en application; il diffère des questions figurant au programme législatif du gouvernement; il est non partisan; il ne va pas à l'encontre des relations fédérales-provinciales ni internationales et n'est pas anticonstitutionnel.
Cette distinction concernerait quelque 35 000 personnes, et le coût estimatif du ruban, de la médaille et de l'agrafe serait de moins de 200 000 $.
Madame la présidente, membres du comité, il est ici question de quelques médailles et d'un peu de tissu. Mais la signification de cette médaille et de ce tissu importe vraiment. Ce que cela signifie pour ceux qui reçoivent cette distinction, c'est que le Canada reconnaît l'honneur qu'ils ont fait rejaillir sur notre pays, que les Canadiens reconnaissent que ces combattants ont volontairement affronté la mort et le danger et ont accepté de travailler dans l'inconfort et parfois dans des conditions horribles et ont accepté d'être séparés de leurs proches à répétition pendant de longues périodes. C'est une médaille qui leur dit notre reconnaissance.
Merci.
La présidente: Monsieur Langlois, c'est un exposé très complet. Il n'y a pas de questions.
Madame Grey, soyez la bienvenue.
Mme Deborah Grey (députée de Beaver River): Merci. Puis-je demander combien il faut de membres pour qu'il y ait quorum?
La présidente: Le quorum est de trois. Malheureusement M. Loney est aux Affaires étrangères, et nous n'en avons pas été informés d'avance, autrement nous lui aurions trouvé un remplaçant. Étant donné le caractère complexe des projets de loi, nous ne pouvons pas nous contenter de mettre la main sur le premier venu pour lui demander de siéger ici. Ce serait inutile. Je pense qu'il vaut encore mieux que nous soyons tous trois ici.
Mme Grey: D'accord, et vous en ferez état, j'en suis sûre, à l'autre équipe.
Je serai brève, madame la présidente.
Merci de m'accorder la parole. Il s'agit de la motion 277. Le libellé, je le rappelle, est concis:
- Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait réutiliser le mot «Canadien» dans les
questions du recensement canadien qui portent sur l'origine ethnique.
- À quel(s) groupe(s) ethnique(s) ou culturel(s) appartenaient les ancêtres de cette personne?
- Par exemple, Français, Anglais, Allemand, Écossais, Canadien, Italien, Irlandais, Chinois, Cri,
Micmac, Métis, Inuit (Esquimau), Ukrainien, Hollandais, Indien, Polonais, Portugais, Juif,
Haïtien, Jamaïcain, Vietnamien, Libanais, Chilien, Somalien, etc.
- Si cette personne:
- Marquer ou spécifier plus d'un, selon le cas.
- On dit ensuite:
- Nota: Ces renseignements sont recueillis pour soutenir des programmes de promotion de
l'égalité des chances afin que tous participent à la vie sociale, culturelle et économique du
Canada.
Je suis très préoccupée par le fait qu'il y a là une incohérence, pour commencer, mais il a été question à propos du recensement précédent de gens qui cochaient «Canadien» et qui se demandaient pourquoi ils ne pourraient pas le faire. Il me semble qu'en ce qui a trait au recensement de 1996, il y a eu ce qu'on pourrait appeler un apaisement, en ce sens que pour que tout ce monde se tienne tranquille nous allons ajouter «Canadien». C'est à la question 17 seulement.
Je conclurai en disant que, d'abord, je pense qu'on sème ainsi la division. Deuxièmement, je pense que c'est discriminatoire. Troisièmement, je pense qu'on scinde les gens en catégories... Et en fait on penserait même à parler de ghettoïsation... On l'a déjà vu à maintes reprises, et je sais que quand vous parlez avec vos commettants ils vous disent ressentir cette frustration. Quatrièmement, on nous prive du droit de dire quelle est notre identité première. Cinquièmement, c'est à ma connaissance le seul pays où il est considéré comme déplacé de se dire Canadien et d'être très préoccupé par cela et d'être en fait fier de sa nationalité. Je ne connais aucun autre pays où on s'est empêtré dans un tel bourbier.
Il me semble donc que c'est là une question pratique.
Vous verrez aussi après avoir étudié la motion qu'elle ne contredit aucun des critères du Précis de procédure, des onze critères qui font qu'une motion peut être considérée comme devant ou non faire l'objet d'un vote. Je ne pense pas qu'elle pose de problèmes. Je ne vais pas vous lire ces onze critères. Ce serait ennuyeux et très long. Vous les connaissez déjà. Je rappelle simplement que cette motion respecte tous les critères.
Je pense que le comité aurait tout intérêt à faire en sorte que cette motion puisse faire l'objet d'un vote à la Chambre des communes.
La présidente: Merci, madame Grey.
Y a-t-il des questions?
[Français]
M. Langlois: Madame Grey, vous parlez de réutiliser le mot «Canadien» dans le recensement de 1996. Est-ce qu'en 1991, les questions étaient différentes de celles du recensement précédent?
[Traduction]
Mme Grey: Si je comprends bien, il y a eu une forte protestation en 1991 parce que les gens n'étaient pas libres de l'inscrire sur le questionnaire du recensement. Ils l'ont fait même si les recenseurs et les gens qui s'occupaient de tout cela disaient qu'on risquait d'aller en prison pour cette raison.
Je connais bien des gens au Canada qui ont pris ce risque. Manifestement, rien ne s'est produit, mais je trouve bien étrange que dans notre pays nous n'ayons pas prévu une petite case pour faire savoir que nous sommes Canadiens et fiers de l'être.
[Français]
M. Langlois: Auriez-vous une objection à ce qu'il y ait une ligne sur la nationalité ou l'origine pour qu'une personne puisse s'identifier? Je pense, par exemple, aux Acadiens du Canada qui n'ont pas de ligne pour s'identifier comme Acadiens. Ils pourraient peut-être le faire s'il y avait une ligne pour s'inscrire comme tel. D'autres personnes pourraient le faire aussi. Cela m'a d'ailleurs toujours étonné de voir qu'il n'y ait pas de ligne pour se décrire comme Acadien.
[Traduction]
Mme Grey: Si nous parlons des Canadiens en général, je pense que les Acadiens entrent certainement dans la catégorie des Canadiens, mais qu'ils voudront peut-être ajouter une spécificité. Après avoir inscrit qu'on est Canadien, on pourrait vouloir y ajouter telle ou telle autre mention. Mais je pense effectivement qu'il y a certainement lieu d'inscrire sur ce formulaire la mention générale de nationalité ou d'identité canadienne.
[Français]
M. Langlois: Merci.
[Traduction]
La présidente: Merci, madame Grey.
Mme Grey: Bien. Merci, Carolyn.
La présidente: Nous sommes très efficaces ce matin; je n'en reviens pas.
Monsieur Bellemare, vous avez cinq minutes pour présenter votre projet de loi. S'il y a des questions nous en traiterons après vos cinq minutes.
[Français]
M. Eugène Bellemare (député de Carleton - Gloucester): Merci beaucoup, madame la présidente.
I hope my projet de loi va être aussi timely, comme on dit en anglais, que ma présence ici aujourd'hui, où je dois présenter mon projet dès mon arrivée. Je vous remercie de m'écouter.
Je me suis posé la question à plusieurs reprises dans le passé:
[Traduction]
sommes-nous le seul pays dans le monde où les députés ne prêtent pas serment d'allégeance au pays et à la Constitution? Au cours de ma recherche, j'ai découvert que nous sommes peut-être le seul pays dans le monde où les députés ne prêtent pas serment d'allégeance au pays ni à la Constitution.
Les provinces sont derrière, sauf dans le cas
[Français]
la province de Québec
[Traduction]
où l'on prête serment d'allégeance au peuple, à la province et à la Constitution. Je pense qu'on nous donne ainsi l'exemple.
La province de l'Ontario se penche actuellement sur cette question.
La question était de savoir pourquoi le faire.
Par principe et en fait, j'ai prêté serment d'allégeance à la Reine et j'ai ajouté la mention particulière que je présente aujourd'hui. La dernière fois que j'ai prêté serment d'allégeance, je l'ai fait. Le greffier me dit que je suis peut-être le seul député à l'avoir fait. J'en suis fier, et je vais continuer de le faire chaque fois que je serai réélu. Toutefois, je pense que les autres députés devraient faire de même.
Il y a une raison pour prêter serment d'allégeance à la Reine, et c'est une bonne raison; je le reconnais. Mais je pense que comme nous avons une loi constitutionnelle depuis 1867... Nous avons constamment amendé la Constitution, car ce ne sont pas les tables de la loi que quelqu'un nous aurait rapportées du haut de la montagne. Elle a été faite par des hommes - ou par des personnes - et elle doit être examinée, modifiée et améliorée constamment.
Certains vous demanderont quelle est la raison de tout cela. Je pense que la grande raison, c'est que nous - chaque individu, chaque parlementaire - sommes redevables à notre électorat. On est élu pour représenter une certaine région - qu'on parle de circonscription ou de comté dans le langage courant - et on représente tous les citoyens, pas seulement quelques citoyens, et pas seulement les citoyens de son propre parti. On représente tous ceux qui se trouvent dans cette région.
Comment se fait-il qu'on représente ces gens? C'est pour leur bien. C'est pour protéger leurs droits et leurs libertés, qu'ils ont gagné au fil des ans. On est là pour les protéger, et c'est pourquoi je dis qu'on prête serment d'allégeance au pays et à la Constitution.
Il se trouve dans la Constitution des dispositions que certains partis, certains individus, au fil des ans, en sont arrivés à ne pas approuver. Nous avons modifié certains articles; nous venons du reste de le faire dans le cas de Terre-Neuve il y a quelques semaines. À l'origine et pendant longtemps, les citoyens de Terre-Neuve étaient satisfaits de la gestion de leurs écoles. Toutefois, à la demande de la population de Terre-Neuve, nous avons modifié un aspect particulier de la Constitution.
Ce n'est pas parce qu'on est obsédé par certains éléments de la Constitution qu'il faut rejeter la Constitution.
D'ailleurs, nous travaillons tous dans le contexte de la Constitution. Nous avons adopté des lois depuis notre élection en 1993. Par exemple, si j'étais dans l'opposition, et en particulier si j'étais dans l'Opposition officielle, je m'assurerais - par tous les moyens possibles - que les droits des citoyens de ma circonscription, de ma province, de ma région sont protégés, que leurs libertés sont protégées et que nous pouvons constamment modifier la Constitution afin de l'améliorer.
Madame la présidente, quiconque estime que ce projet de loi ne doit pas être mis aux voix a d'autres objectifs que de servir ses concitoyens.
La présidente: Y a-t-il des questions?
[Français]
M. Langlois: Monsieur Bellemare, la première fois que vous avez présenté le projet de loi, cela a duré 37 minutes. Je pense que vous avez battu tous les records des députés au comité. Tout d'abord, je voudrais vous dire que je suis heureux que vous soyez de retour parmi nous. Vous avez été absent longtemps. Je suis content que vous soyez là même si je ne partage pas toujours vos idées, mais en tant que membres de la grande famille canadienne-française, je pense qu'on se rejoint assez souvent.
Ceci étant dit, j'ai une objection de fond à faire valoir parce que vous modifiez la Constitution du Canada par un projet de loi ordinaire. Je me demande même si l'on pourrait mettre en application ce projet de loi s'il était adopté. De cette façon, un député de la 36e législature pourrait se présenter devant le greffier en disant: «Je prête serment à Sa Majesté en vertu de l'article 128, annexe V, de la Constitution. Je jure que je serai loyal et fidèle. Je fais allégeance à Sa Majesté la reine Elisabeth II, mais je refuse de prêter serment au Canada.»
Est-ce qu'on pourrait alors l'empêcher de prendre son siège? C'est ma première question. En fait, vous ne modifiez pas la Constitution canadienne, mais vous en faites une loi ordinaire. C'est une objection qui mérite que l'on y réfléchisse.
Deuxièmement, il y a toujours cette coloration politique qui est bien ressortie la première fois que vous avez présenté votre projet de loi. On avait déclaré qu'on ne pouvait voter là-dessus, mais vous aviez demandé un consentement unanime. Des députés du Bloc québécois avait fait objection, et l'Ottawa Sun avait titré en vous citant, et vous pourrez peut-être corriger ou confirmer:
[Traduction]
«Les rats sont sortis des trous pour rejeter mon projet de loi».
[Français]
Il y avait une coloration politique là-dedans. Je vais donc vous poser clairement la question: si j'étais élu à la prochaine élection et que je devais prêter ce serment, est-ce que vous accepteriez que le fait d'avoir prêté ce serment m'empêche de faire la promotion du programme actuel de mon parti et de travailler à l'établissement du Québec en tant que pays ou État souverain?
M. Bellemare: Non, pas du tout. Si j'étais un membre du Bloc québécois, je reviendrais au principe de base que je suis là pour représenter. Supposons que je sois un Québécois et en plus un membre du Bloc québécois et que je veuille changer la Constitution pour que l'on ait maintenant une fédération selon ma conception, aussi hypothétique que cela puisse être. Je dirais d'abord qu'il y a eu une erreur monumentale dans l'histoire du Canada lorsqu'on a appelé le Canada une confédération, parce qu'on ne comprend pas ce qu'est une confédération.
Il faudrait retourner à l'histoire des États-Unis où, entre 1677 et 1777, il y avait une pagaille épouvantable, parce que les États étaient plus forts que l'État lui-même. Il arrivait qu'à cause de différends entre les États, on ne pouvait même pas transporter des biens d'un État à un autre, parce que l'État qui se trouvait au milieu interdisait le passage. C'était une question d'imposition et de taxation. La situation était épouvantable et le gouvernement fédéral des États-Unis s'en allait à sa perte. Il y a donc eu des amendements grâce auxquels on a trouvé un équilibre, et on est arrivé à une véritable fédération où le pouvoir national n'étouffait pas les États et le pouvoir de l'ensemble des États n'étouffait pas non plus le gouvernement national.
Je voudrais dire que, parmi les séparatistes, il y en a qui sont vraiment des souverainistes. Pourtant on se demande toujours si ce sont des séparatistes ou des souverainistes et on se met à établir des définitions. Les gens du Bloc québécois que j'ai rencontrés me parlaient souvent comme des souverainistes qui désiraient qu'on examine la Constitution encore une fois et qu'on la modifie pour avoir davantage de droits pour gouverner, comme dans l'entente de 1864 qui a servi de base à la Constitution de 1867. Qu'on ait quatre régions ou dix provinces, ou dix states comme dans la définition des États-Unis, c'est autre chose. On ne fait que jouer avec les termes. Mais il faut arriver à un équilibre - et je parle toujours comme si j'étais un homme ou une femme du Bloc québécois - entre les régions ou les provinces et le fédéral.
Mais il faut connaître la gouvernance. En ce qui concerne les municipalités, par exemple, est-ce que le fédéral devrait s'ingérer dans les municipalités de la province du Québec, de la province de l'Ontario ou des autres provinces? Absolument pas. C'est un secteur qui est sacré pour les provinces. Les municipalités sont les enfants de la province et non du fédéral. Au niveau municipal, on parle des infrastructures surtout et souvent des activités qui aident le côté social, par exemple l'enfance malheureuse ou les pauvres. Il s'agit de services immédiats qui servent à protéger l'individu.
Si j'appartenais au Bloc québécois, je dirais que je suis là pour défendre les individus. Je veux m'assurer que tous les députés, qu'ils soient de la Colombie-Britannique ou de l'Alberta, me respectent et respectent les amendements que je veux faire. Terre-Neuve a fait des amendements durant notre législature! Alors, s'il y a des gens du Bloc québécois, des gens du Parti libéral qui sont au pouvoir présentement, du Parti conservateur ou du Parti réformiste qui veulent faire des amendements à la Constitution, c'est leur droit. Lorsqu'ils prêtent serment, ils prêtent serment à la Constitution, pas aux dispositions de la Constitution, mais aux concepts de la Constitution.
Qu'est-ce que la Constitution? C'est la protection des individus. Dans le cas du Bloc, c'est aussi la question de la francophonie, du berceau francophone en Amérique du Nord; c'est la gérance de ces dossiers. C'est ce à quoi je voulais en venir. Je verrais très mal, en effet, un député qui ne voudrait pas protéger les droits de sa circonscription, les droits des individus. C'est ce qui est important.
Pour le moment, on prête allégeance à la reine. Ça porte à plusieurs interprétations et il faut connaître l'historique pour vraiment en comprendre l'impact.
Je veux éclaircir cette situation et dire que cela va au-delà de la prestation du serment à la reine. Certains vont aller jusqu'à dire que c'est à l'Angleterre qu'il faut prêter serment, puis les monarchistes vont s'exciter et dire qu'on ne connaît pas l'histoire et le gouvernement représentatif. Mais ce n'est pas ce que je voulais dire.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Bellemare, avez-vous...
M. Langlois: A-t-il dit ce qu'il avait à dire?
La présidente: Oui, je crois.
Nous débattons ici du projet de loi. Il essaie de prendre les 37 minutes. Dommage que vous le lui ayez rappelé.
Monsieur Frazer, avez-vous des questions?
M. Frazer: Malheureusement, madame, j'en ai une ou deux.
La présidente: Très bien. M. Bellemare essaiera de répondre très brièvement.
M. Bellemare: Ne provoquez pas trop mon enthousiasme.
M. Frazer: Monsieur Bellemare, si je comprends bien, votre motion vise à éliminer le serment d'allégeance à la Reine?
M. Bellemare: Non.
M. Frazer: En tant que Reine du Canada.
M. Bellemare: Non, non. Cela ajoute à notre histoire. Nous ne pouvons nier notre histoire.
M. Frazer: Merci. Cela me suffit.
La deuxième question que je voulais vous poser portait sur le point soulevé par M. Langlois: un membre du Bloc pourrait-il prêter ce serment et poursuivre la voie que poursuit ce parti? Vous avez répondu par l'affirmative.
M. Bellemare: Oui.
M. Frazer: Mais je remarque que ce que vous dites en fait, c'est qu'ils sont chargés de représenter leurs électeurs.
M. Bellemare: Oui, tous leurs électeurs.
M. Frazer: Mais il n'est pas question d'électeurs dans votre serment. Il s'adresse strictement au Canada, à la Chambre des communes. Il ne mentionne pas les gens qui vous ont élu pour vous envoyer à Ottawa.
Comme vous le savez probablement, notre parti défend beaucoup le fait qu'un député est responsable devant ses électeurs...
M. Bellemare: C'est exact.
M. Frazer: ...parce que ce sont eux qu'il représente.
Pensez-vous que ce pourrait être un amendement utile à votre...?
M. Bellemare: Le principe du respect de la Constitution englobe le respect de la population.
M. Frazer: Mais ne serait-il pas utile d'inclure vos électeurs dans ce serment?
M. Bellemare: Si, mais ensuite les légistes du Parlement déclareront que c'est trop long. On pourrait évidemment modifier ce libellé. Y verrais-je une objection? Absolument pas.
Il ne s'agit plus de prêter serment d'allégeance à la Reine car la population canadienne ne sait pas trop ce que cela veut dire. Allez demander au commun des mortels ce qu'il en pense, et la réaction sera probablement extrêmement négative.
Si vous allez donc un peu plus loin et ajoutez le pays, qu'est-ce que le pays? Ce ne sont pas les rochers, ce ne sont pas les montagnes Rocheuses, ce ne sont pas les montagnes du Québec. C'est plus que cela; c'est le peuple canadien. La Constitution est la façon dont nous gouvernons dans le respect des citoyens.
Vous pourriez en effet ajouter tout cela et préciser les choses, mais s'il y avait la prochaine fois 289, 292 ou 305 députés, cela pourrait faire une assermentation un peu longue.
C'est ce que voudraient les Réformistes. Pas moi. Je serais tout à fait choqué si les Réformistes refusaient que l'on vote sur cette motion, parce que c'est bien là le sens de ma motion. Qu'est-ce que la définition? C'est élargir ce que nous avons actuellement.
M. Frazer: Merci. J'aimerais simplement que ce soit un peu plus large encore.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci, et merci, monsieur Bellemare.
Monsieur Martin, bienvenue. Vous vous êtes remis de votre infiltration chez les Libéraux à l'occasion de notre congrès?
M. Keith Martin (député de Esquimalt - Juan de Fuca): Merci beaucoup, madame la présidente. J'étais un espion pas tellement invisible.
La présidente: Il y a des gens qui étaient tout excités parce qu'ils pensaient que vous alliez changer de parti.
M. Martin: Comme mes deux autres collègues.
[Français]
Merci beaucoup, madame la présidente et bonjour à tous mes collègues. Madame la présidente,
[Traduction]
de combien de temps puis-je disposer?
La présidente: Cinq minutes.
M. Martin: Je suis venu vous demander une permission. J'espère beaucoup que vous choisirez mon projet de loi C-252, Loi modifiant le Code criminel (mines)...
Ces mines sont un désastre pour l'humanité entière. Il y a plus de deux millions de mines antipersonnel éparpillées dans le monde entier, essentiellement propres à mutiler des civils innocents. Chaque année, plus de 25 000 hommes, femmes et enfants innocents sont déchiquetés et tués par ces engins et un nombre encore beaucoup plus grand sont mutilés. L'incidence économique sur ces pays est énorme et se chiffre à des centaines de millions de dollars chaque année.
Alors que nous passons à un rôle de défense à un rôle de maintien de la paix, la plus grande menace pour nos agents de maintien de la paix vient en fait de ces mines antipersonnel. Certains de nos soldats ont déjà été tués ou mutilés par ces engins terribles.
Voilà une catastrophe humanitaire, et la communauté internationale doit montrer l'exemple. Il y a actuellement 16 pays qui ont demandé une interdiction et qui ont banni ces engins, mais le Canada ne l'a pas encore fait. Nous avons demandé au reste du monde de le faire, mais nous n'avons pas donné l'exemple, en même temps que ces 16 autres pays, en bannissant la production, l'utilisation et le trafic des mines antipersonnel.
Vous avez tous reçu de mon bureau une documentation expliquant l'importance de ce projet de loi. Il est conforme aux 11 critères figurant à l'Annexe du Guide pratique des affaires émanant des députés. Ces 11 critères étant satisfaits, je ne les répéterai pas.
La première objection vient de certains milieux militaires. Pour la contrer, je vous ai donné un document élaboré par plus d'une dizaine de conseillers militaires supérieurs du monde entier - et notamment par nos représentants canadiens là-bas - qui dissipe une fois pour toutes les objections militaires que l'on peut opposer au bannissement des mines antipersonnel. C'est le fruit du travail des autorités militaires du monde entier, et cela a été préparé pour le Comité international de la Croix-Rouge.
En l'espace de 48 heures, ce document a été appuyé par 78 chefs militaires, dont le général Norman Schwarzkopf, plus de 25 autres officiers supérieurs des États-Unis, et notre propre général, Lewis MacKenzie. Voilà donc pour la première objection que l'on peut faire à ce projet de loi.
Nous demandons à la communauté internationale d'interdire ces engins, mais nous ne sommes pas prêts à en faire autant. À la Chambre des communes... J'ai là un petit échantillonnage des demandes de députés de tous les partis pour que le Canada montre l'exemple en bannissant les mines antipersonnel. C'est ce document, si cela intéresse certains d'entre vous.
Des députés de tous les partis y sont favorables. Le Sénat, des deux côtés, y est également favorable. C'est quelque chose que nous appuyons tous, et je pense que la Chambre des communes pourrait montrer l'exemple en débattant de ce projet de loi.
Enfin, je vous demanderais à chacun de réfléchir à cette question personnellement et d'essayer de comprendre ce dont il est question. Je parle ici très personnellement, car j'ai dû amputer les jambes de civils innocents tombés victimes de mines antipersonnel. Je puis seulement vous dire que je n'ai rien vu d'aussi infect, dégoûtant et honteux que ces engins que l'on ne peut voir, que l'on ne peut demander et qui ne visent pas en priorité les militaires, mais qui sont conçus essentiellement pour mutiler des hommes, des femmes et des enfants innocents. Il y en a même qui ressemblent à des jouets pour que les enfants s'en saisissent et se fassent arracher les bras.
Il ne fait aucun doute que ces engins doivent être interdits. J'espère que vous donnerez à la Chambre la possibilité de voter sur cette question et au Canada de montrer l'exemple en interdisant ces engins inhumains qui sont à la fois horribles et infects.
La présidente: Y a-t-il des questions?
[Français]
M. Langlois: J'aimerais demander au Dr Martin de préciser pour que je comprenne bien le sens du projet de loi. Est-ce dans le but de bannir l'exportation, même à des fins qui seraient licites à l'étranger, par exemple vendre ce genre de mines à un pays comme la Bosnie, ou est-ce pour en interdire l'usage uniquement au Canada? J'ai quelques difficultés à saisir la portée de votre projet de loi et j'aimerais que vous m'éclairiez là-dessus. Serait-il permis, si le projet de loi était adopté, à des fabricants d'armes canadiens de fabriquer ce genre d'armes et de les vendre à des pays belligérants?
M. Martin: Merci pour votre question. J'aimerais répondre en anglais, s'il vous plaît.
[Traduction]
Le projet de loi traite du Canada, de quiconque au Canada produit, vend, fabrique, ou met en vente des mines antipersonnel au pays ou à l'étranger. C'est aussi simple que cela. Nous ne pouvons donc vendre, troquer, exporter ou importer ou encore fabriquer cela au Canada ni à l'étranger.
Cela répond-il à votre question?
[Français]
M. Langlois: Très clairement. Le colonel Frazer pourrait peut-être nous éclairer sur le point de vue militaire. Je vous remercie beaucoup, docteur Martin.
[Traduction]
M. Martin: J'attirerais simplement votre attention... avez-vous reçu ceci?
M. Langlois: Oui, je l'ai lu.
M. Martin: Cela explique très bien les aspects militaires des mines antipersonnel, ce à quoi on les utilise et pourquoi ces militaires professionnels, ces militaires actifs, estiment que cela n'a pas de place dans les guerres modernes.
M. Langlois: Merci.
La présidente: Monsieur Frazer.
M. Frazer: Monsieur Martin, deux choses. Tout d'abord, je serais très content que l'on puisse arriver à quelque chose si le Canada acceptait votre projet de loi et adoptait à l'unanimité l'idée que le Canada doit interdire complètement ces mines.
Toutefois, comme vous le savez bien, cela ne coûte pas cher, c'est efficace, et il est extrêmement difficile de s'en protéger. Nos chances sont donc très réduites. Je n'aime pas soutenir des initiatives qui sont irréalisables - si nous choisissions cette voie - et c'est un des critères qu'il faut accepter.
J'ai également une bonne expérience des mines antipersonnel qui remonte à l'époque où j'étais au Zimbabwe. Essentiellement, 750 kilomètres des frontières entre ce pays et le Mozambique et la Zambie étaient minés et sont jusqu'à ce jour impraticables, sauf là où on a créé des passages.
Je suis donc très conscient... J'ai vu des gens qui se sont fait sauter les jambes et le reste. Évidemment, peut-être pas d'aussi près que vous, car je n'ai pas amputé ces jambes.
Pour ce qui est toutefois des renseignements militaires que vous avez, je suppose que vous savez qu'un terrain miné par des militaires fait l'objet d'un tracé très précis. Ils savent exactement où se trouve chaque mine qui leur appartient...
Lorsque les mines ne sont plus nécessaires... On les utilise pour établir un périmètre de défense et pour empêcher les gens de s'infiltrer et d'accéder à la zone ainsi protégée. Lorsque le besoin n'existe plus, les militaires sont tenus de retirer ces mines, et, comme ils savent exactement où elles se trouvent toutes et chacune, ils peuvent le faire.
Je me demandais s'il ne serait donc pas préférable que votre projet de loi aille dans ce sens: si vous les déposez, vous êtes chargé de les retirer et si vous ne le faites pas, vous êtes tenu responsable de tout dommage frappant le matériel ou la population.
M. Martin: Merci beaucoup, monsieur Frazer.
Vous avez en fait posé trois questions. La première sur la possibilité de parvenir à nos objectifs. Je réponds par l'affirmative. Seize pays... Je pourrais attirer votre attention sur la Convention sur certaines armes classiques et sur le succès que nous avons eu en matière d'armes biologiques. Ce n'est pas absolu. Nous avons eu le cas de l'Irak et de Saddam Hussein, et le fait que même dans certaines régions de l'Asie du Sud-Est on utilise encore certaines armes chimiques.
Cela dit, l'utilisation des armes chimiques a maintenant essentiellement été bannie de la grande majorité des pays participant à des conflits. C'est très bien, parce que cela a diminué leurs effets sur...
M. Frazer: Jusqu'à ce que l'on recommence à faire la guerre.
M. Martin: Ma foi, nous avons vu ce qui s'est passé au Moyen-Orient, au Koweït. Beaucoup de pays qui auraient pu les utiliser ne l'ont pas fait parce que c'était interdit. Lorsqu'il s'agit d'une interdiction internationale, cela est très efficace. Les armes chimiques sont un bon exemple.
Deuxièmement, 16 pays ont demandé une interdiction et ont cessé toute production. La Belgique est peut-être l'exemple le plus frappant, parce que ce pays fabriquait beaucoup de mines antipersonnel. Il ne le fait plus et ne les utilise plus.
Il faut commencer quelque part. Il faut arrêter la production et la livraison, parce qu'on installe plus de deux millions de mines par an et que l'on n'en retire que 85 000. Cela coûte à l'heure actuelle plus de 75 milliards de dollars à la communauté internationale.
Deuxième point... Vous avez en fait dans un sens confirmé ce que je disais en décrivant très éloquemment ce qui arrive lorsque des mines sont placées dans des pays dont les terres sont inutilisables. Vous avez relaté votre expérience en Afrique, mais je dois aussi attirer votre attention sur l'expérience plus récente de la Croatie, pays qui perd pour plus de 350 millions de dollars chaque année de son produit intérieur brut parce que beaucoup de ses terres sont minées.
Troisième point, vous demandez s'il ne serait pas préférable de tenir responsables ceux qui placent les mines afin qu'ils soient tenus de les retirer par la suite et de tracer des plans très précis permettant de savoir où sont placées ces mines. C'est techniquement ce que devrait imposer le droit international. Mais comme nous le savons l'un et l'autre, la raison pour laquelle nous présentons ce projet de loi est justement que ces lois et règlements ne sont pas respectés. Sur le champ de bataille, on installe souvent les mines très rapidement et on ne revient pas pour les retirer.
Deuxièmement, les conditions atmosphériques, le vent, etc., déplacent continuellement les mines.
Troisièmement, les guérilleros vont souvent dans les champs de mines et déplacent aussi les mines. Donc, même si vous les placez et revenez les chercher... nos soldats canadiens ont constaté que très souvent les mines ont bougé dans les champs de mines. Ils marchent dessus et se font sauter les jambes ou tuer.
Donc, même si c'est la loi, celle-ci n'est pas respectée. Ce qu'il faut, c'est empêcher que ces mines n'arrivent là-bas. C'est pourquoi ce projet de loi devrait aider. Cela devrait nous donner la force morale et la force de persuasion nécessaires pour y parvenir.
Le vice-amiral John Shanahan est directeur du Centre d'information en matière de défense à Washington. Il s'est montré très éloquent à ce sujet. Tout le monde en parle, mais on ne fait rien. Il déclare:
- Nous voudrions tous beaucoup interdire les mines, surtout les mines antipersonnel, mais,
malheureusement, personne ne se met d'accord pour le faire. Nous retournerons ainsi dans nos
capitales et blâmerons les autres. Nous nous engagerons solennellement à revenir dans environ
cinq ans pour refaire exactement la même chose.
La présidente: Monsieur Martin, je ne voudrais pas que vous pensiez que je penche dans un sens ou dans l'autre en vous posant une question, puisque je n'en ai pas encore posé ce matin, mais comme je rentre de Bosnie je me dois de contester vos chiffres. Alors que nous étions là-bas, on nous a dit qu'il y avait à l'origine quelque 4,5 millions d'habitants en Bosnie et plus de deux millions de mines terrestres. Vous avez dit qu'il y en avait deux millions dans l'ensemble du monde.
M. Martin: Non, je suis désolé, j'ai fait erreur. Deux millions ont été placées l'année dernière...
La présidente: L'année dernière?
M. Martin: ...et 85 000 ont été retirées. Mais vous avez tout à fait raison: il y a plus de 100 millions de mines enterrées dans le monde entier, et c'est probablement peu par rapport à...
La présidente: Avant de partir pour la Bosnie et une fois là-bas, une des recommandations les plus pressantes que nous ont faites les gens de l'ACDI portait sur la façon d'éviter de se faire sauter une jambe ou un bras.
J'ai atterri à Gorazde, et un petit garçon a fait exactement ce que vous disiez. Il y avait une boîte à lunch rouge sous un pont. Il l'a attrapée parce qu'il avait faim et qu'il a pensé qu'il y trouverait quelque chose à manger et il s'est fait arracher le bras jusqu'à l'épaule la veille de notre arrivée. Ils avaient beaucoup de mal à lui sauver la vie tellement il perdait de sang.
C'est un pays très beau, et quand on pense que chaque feuille et chaque brindille peut cacher quelque chose qui peut vous mutiler pour la vie... C'est assez inhumain.
Je répète que la difficulté pour notre comité - et je prends le temps de vous l'expliquer parce que je ne veux pas que vous pensiez que nous n'attachons pas d'importance à ce projet de loi - c'est que c'est un peu comme une exposition canine. Quelquefois il y a deux corniauds et un caniche, et il est facile de choisir le caniche. Quelquefois il y a trois magnifiques caniches, et le choix est plus difficile.
Je suis certaine que votre projet de loi nous intéresse tous. S'il n'est pas choisi aujourd'hui, sachez seulement que c'est parce qu'il y avait d'autres excellents projets de loi, et s'il est choisi, c'est parce que vous étiez le caniche de la journée. Il est très difficile de choisir.
M. Martin: J'aurais peut-être dû me faire tailler le poil!
Des voix: Oh, oh!
La présidente: Non, c'est difficile. Je tiens à expliquer à tous ceux qui viennent ici que c'est une décision très difficile, en particulier aujourd'hui, car on ne peut choisir qu'un projet de loi sur les huit qui sont présentés. Il y en a vraiment qui sont très bons.
Merci de votre exposé. Nous sommes certainement tous avec vous à ce sujet.
M. Martin: Merci de votre attention.
La présidente: Monsieur Assadourian, nous allons vous faire passer avant le suivant parce que vous êtes ici et pas l'autre. Vous auriez d'ailleurs hurlé si nous ne l'avions pas fait, n'est-ce pas?
M. Sarkis Assadourian (député de Don Valley-Nord): Je suis habitué. C'est la quatrième fois que je me présente ici, et j'ai donc peut-être un peu d'expérience.
La présidente: J'espère que c'est toujours agréable.
M. Assadourian: Toujours. Pas de raison de me plaindre.
La présidente: Cinq minutes.
M. Assadourian: Cinq minutes, c'est déjà trop.
Je suis sûr que vous avez reçu mon projet de loi d'initiative parlementaire, qui porte le numéro C-335. Il s'agit de création d'emplois et du problème des PME au Canada, qui, comme chacun le sait, comptent pour 85 p. 100 des emplois dans notre pays.
M. Frazer: Je croyais que c'était le gouvernement qui assurait cela.
M. Assadourian: Le gouvernement crée le climat qui doit permettre aux PME de créer les emplois.
Les PME doivent emprunter aux banques beaucoup plus que toute autre entreprise. Or, on leur demande 2 ou 3 p. 100 d'intérêt de plus qu'aux grandes entreprises, si encore on leur consent un prêt.
Ce projet de loi ne touche que les nouvelles banques, les nouvelles banques étrangères, qui viennent s'installer ici. C'est un petit pas. Je ne dis pas que ce projet de loi est parfait. Il n'en existe pas. C'est la raison pour laquelle nous avons un tel système. J'invite les députés à proposer des amendements à mon projet de loi.
Voilà essentiellement ce que j'avais à dire. C'est ma contribution à l'effort de création d'emplois. Si cela permet de créer cinq, 10, 15 emplois, je crois que ce comité et la Chambre pourront s'en féliciter.
C'est tout ce que j'avais à dire. Si vous avez des questions, je me ferai un plaisir d'essayer d'y répondre.
Vous avez maintenant quatre minutes pour me poser des questions.
La présidente: Non, aussi longtemps que nous le voulons.
M. Assadourian: Oh, d'accord.
La présidente: C'est nous qui décidons.
Monsieur Frazer, avez-vous une question?
M. Frazer: Oui, madame.
Je m'inquiète quelque peu, monsieur Assadourian, que ce ne soit pas tout à fait juste. Ne convenez-vous pas que les dispositions de votre projet de loi obligeraient les banques en question à prendre un peu plus de risques - en prêtant aux PME - que les autres banques? Dans ce cas, ne trouvez-vous pas que cela serait un peu injuste pour elles? Pourquoi, autrement dit, les autres banques ne devraient-elles pas en faire autant?
M. Assadourian: Tout d'abord, cela s'applique aux nouvelles banques.
M. Frazer: Je le comprends bien.
M. Assadourian: Cela signifie que lorsque l'on ouvre une nouvelle banque, on sait à quoi s'en tenir.
M. Frazer: D'accord.
M. Assadourian: D'autre part, cela poussera aussi les autres banques à en faire autant pour obtenir les comptes des PME.
J'ai ici des chiffres. Un de mes collègues, Tony Ianno, a préparé ceci pour sa gouverne personnelle. Du 3 septembre au 31 décembre 1995, la Banque de Montréal a consenti pour 110 millions de dollars de prêts à des PME. Les prêts aux PME de la Banque canadienne impériale de commerce ont diminué de 152 millions de dollars. Ceux de la Banque nationale de 0,6 million de dollars. Pour la Banque royale, la diminution est de 111 millions de dollars. La Banque de Nouvelle-Écosse a augmenté ses prêts aux PME de 171 millions de dollars. La TD les a diminués de 116 millions de dollars.
Le résultat est que nous avions 104 millions de dollars de moins dans les six derniers mois de l'année dernière pour les prêts aux PME. Cela a eu une incidence sur la création d'emplois dans les PME.
M. Frazer: Si j'ai bien entendu, deux banques ont augmenté leurs prêts et...
M. Assadourian: La Banque de Montréal et celle de Nouvelle-Écosse.
M. Frazer: Je me demande pourquoi.
M. Assadourian: Je suppose que c'est parce que ce sont des gens intelligents. Ils voient où il y a de l'argent et ils prêtent à ces entreprises.
M. Frazer: Est-ce que cela représente une incitation pour les autres banques, tout comme le feraient les dispositions de votre...
M. Assadourian: Je répète que cela ne s'applique qu'aux six derniers mois de l'année dernière. Il est possible que les chiffres précédents aient été inversés - je n'en sais rien - mais ces chiffres représentent les six derniers mois de 1995.
M. Frazer: Je me demande en fait si ce genre de tendance ne représenterait pas le même incitatif que votre proposition pour les autres banques.
C'est tout. Merci, madame la présidente.
La présidente: Monsieur Langlois.
[Français]
M. Langlois: Non, ça va.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup, Sarkis.
M. Assadourian: Merci.
La présidente: Bravo!
M. Hermanson est là pour M. Thompson.
Merci de remplacer M. Thompson.
M. Elwin Hermanson député de Kindersley - Lloydminster): Merci et bonjour. La dernière fois que j'ai comparu devant ce comité, c'était à titre personnel. Je me souviens de vous avoir félicités de tout ce que vous faisiez, du temps que vous passiez à examiner tous ces projets de loi et motions et des décisions difficiles qu'il vous fallait prendre. Toutefois, ma motion n'a pas été retenue, et je me passerai donc de ces commentaires.
Oublions les compliments.
M. Thompson a la motion M-207 au Feuilleton portant que, de l'avis de la Chambre, étant donné que les marchés internationaux se libéralisent de plus en plus, qu'ils sont de plus en plus variés et spécialisés et que tous les agriculteurs ne veulent pas forcément participer à un système de mise en commun des prix, l'on donne aux producteurs de blé et d'orge de l'ouest du Canada plus de souplesse et davantage de possibilités en modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé grâce à l'instauration d'une clause de retrait particulière de deux ans à l'intention de ceux parmi eux qui désirent développer des créneaux sur le marché d'exportation.
Corrigez-moi si je fais erreur, mais je crois que depuis trois ans que je suis député aucune motion sur l'agriculture n'a été mise aux voix. Je sais qu'il y en a eu plusieurs au Feuilleton. Certaines ont gagné à la loterie. Je pense par exemple à celle de M. Althouse sur la commercialisation des pommes de terre. Je me souviens d'une. J'ai eu une motion sur l'agriculture, mais il n'y a jamais eu de motion ni de projet de loi qui ait fait l'objet d'un vote.
Il est très intéressant de constater que, le mois dernier, M. Goodale a annoncé son intention de tenir cet hiver un plébiscite toute une journée sur la commercialisation de l'orge dans l'Ouest du pays. Cette motion arrive donc à point nommé, car nous devrions obtenir un débat à la Chambre, et l'agriculteur des Prairies devrait avoir une petite idée de la position des producteurs sur cette question.
Nous pourrions toujours débattre de cette motion à la Chambre pendant une heure, puis la laisser de côté. Toutefois, étant donné la controverse que suscite actuellement la commercialisation du blé et de l'orge dans les Prairies, la seule chose raisonnable que nous puissions faire, en tant que parlementaires, c'est de débattre adéquatement de cette question. Cette motion nous en donne parfaitement la possibilité. Au lieu de nous contenter de belles paroles, nous devrions tenir un vote sur la commercialisation du blé et de l'orge et nous prononcer quant à savoir si les producteurs doivent disposer d'un mécanisme de commercialisation en dehors de la Commission canadienne du blé, de même que dans le cadre de la commission.
Ce secteur représente non pas des millions, mais des milliards de dollars. C'est une question importante. Elle a causé des scissions au sein des communautés agricoles. Elle a divisé les organisations agricoles. C'est certainement une question très politisée, qui se répercute sur la politique fédérale, provinciale, municipale et, bien entendu, agricole. Je ne pense pas qu'en parlant plus longtemps je pourrais mieux faire valoir la nécessité de tenir un vote sur la motion 207. Je vous demanderais d'innover en faisant de cette motion la première motion sur l'agriculture qui fera l'objet d'un vote au cours de la 35e législature.
Merci beaucoup.
La présidente: Merci, monsieur Hermanson. C'était un exposé très intéressant.
Avez-vous des questions?
[Français]
M. Langlois: Monsieur Hermanson, comme je représente moi-même un comté rural où il y a beaucoup d'agriculteurs qui ne sont pas visés par la Commission canadienne du blé, votre motion m'intéresse.
Lorsque vous parlez de créneaux particuliers qui permettraient à certains agriculteurs ou à certains producteurs de se retirer de la Commission canadienne du blé, vous pensez à quelle quantité de personnes qui pourraient ne pas être visées par la Commission canadienne du blé? Quel avantage ces personnes auraient-elles à ne plus être sous son autorité si le gouvernement devait donner suite à l'adoption de la motion M-207?
[Traduction]
M. Hermanson: Voilà une excellente question, François. Pour le moment, tous les producteurs de blé et d'orge des Prairies doivent commercialiser ce blé et cet orge par l'intermédiaire de la Commission canadienne du blé. C'est la seule possibilité de commercialisation, sauf pour le blé et l'orge fourragers vendus sur le marché canadien. Le blé et l'orge fourragers peuvent être vendus à un autre agriculteur, à une usine ou à un engraisseur. Par contre, tout le blé et l'orge destinés à la consommation humaine, au marché national ou international, ou tout le grain fourrager vendu à l'extérieur du Canada, doivent être commercialisés par l'entremise de la Commission canadienne du blé.
Un certain nombre d'agriculteurs - par exemple ceux qui cultivent des céréales organiques - n'obtiennent pas de conditions avantageuses par l'entremise de la commission parce qu'ils vendent en petite quantité... juste quelques tonnes à un magasin de produits naturels. La Commission canadienne du blé est un organisme de commercialisation énorme qui n'est pas bien équipé pour vendre des petites quantités. Il existe parfois des débouchés pour certaines variétés d'orge ou de blé, mais la commission ne peut pas les vendre séparément pour le compte des agriculteurs.
Puis il y a, bien sûr, toute la question de savoir si les agriculteurs devraient être libres ou non de vendre eux-mêmes leurs produits. C'est une question d'idéologie, et non pas d'économie. Certains producteurs croient qu'ils pourraient obtenir un meilleur prix s'ils n'avaient pas à passer par la commission, tout comme ils le font pour d'autres produits. Ils peuvent vendre leur boeuf, leur canola, leurs pois ou leurs lentilles sans passer par la Commission canadienne du blé, et ils le font très bien. Ils croient avoir le droit de vendre ce produit, car nous ne parlons pas ici de marijuana, d'armes à feu, de bombes ou de produits dangereux. Nous parlons de grains que vous pouvez moudre pour en faire de la farine, ou du malt qui servira à fabriquer de la bière ou autre chose. Les agriculteurs trouvent très contrariant que le gouvernement puisse leur dicter qui pourra acheter ce produit.
M. Langlois: Merci.
La présidente: Monsieur Frazer.
M. Frazer: Monsieur Hermanson, vous avez dit qu'il y aura un plébiscite. Il vaudrait mieux que ce soit un référendum plutôt qu'un plébiscite, mais, à supposer que vous ayez une idée sur la question, savez-vous combien d'agriculteurs seraient prêts à appuyer cette motion et combien s'y opposeraient?
M. Hermanson: Comme je l'ai dit, c'est une question très controversée. Les partisans du pour et du contre seraient prêts à appuyer cette motion. D'ardents partisans de la Commission canadienne du blé disent que si certains producteurs s'engagent à vendre leurs céréales à l'extérieur de la commission au lieu de faire un va-et-vient entre les deux systèmes, ils sont d'accord pour les laisser faire. Ce dont ils ne veulent pas, c'est que certains agriculteurs veuillent un jour vendre leurs produits sur le marché libre et le lendemain par l'entremise de la commission... au gré de leur fantaisie.
M. Frazer: Ils profitent des deux systèmes.
M. Hermanson: Ils profitent des deux systèmes, choisissent la solution la plus avantageuse et font ainsi du tort aux deux systèmes. Un bon nombre des producteurs qui ne veulent pas passer par la commission sont des puristes. Ils estiment qu'ils devraient pouvoir vendre à qui ils veulent, mais si le prix à payer pour cette liberté est leur exclusion de la Commission canadienne du blé pendant une période spécifiée, ils sont prêts à faire ce sacrifice pour avoir le droit de vendre en dehors de la commission.
Cette motion a des appuis dans les deux camps. Les deux camps diraient sans doute que ce n'est pas leur premier choix. Les partisans de la Commission canadienne du blé préféreraient qu'il n'y ait pas de désistement, mais ils préfèrent cette possibilité aux contestations judiciaires, aux campagnes de relations publiques très coûteuses et à toutes ces choses qui coûtent très cher aux agriculteurs. Ceux de l'autre camp disent qu'ils veulent être libres de vendre à qui ils veulent, mais que si cette liberté n'est pas possible, ils se feront un plaisir de se faire exclure de la commission pendant une bonne période.
M. Frazer: Vous estimez donc que la majorité des gens seraient pour.
M. Hermanson: En effet, et je vois cela comme un geste de conciliation plutôt que comme un geste propre à accroître la dissension.
M. Frazer: Merci.
La présidente: Merci, monsieur Hermanson.
[Français]
M. Langlois: Permettez-moi une question supplémentaire. Monsieur Hermanson, dans la logique que vous venez de développer, vous dites que c'était une question sur laquelle les avis étaient partagés. Croyez-vous que, parmi les députés de l'Ouest canadien qui sont visés, libéraux et réformistes bien sûr, ou les électeurs qui sont sous l'autorité de la Commission canadienne du blé, il se dégagerait une très large majorité en faveur de cette motion si elle était débattue à la Chambre?
[Traduction]
M. Hermanson: Monsieur Langlois, nous avons mentionné cette proposition qui n'a pas obtenu l'appui des Libéraux. Ils n'ont pas voulu permettre un choix. M. Goodale a annoncé son intention de tenir un plébiscite sur l'orge. Si les producteurs d'orge votent en faveur d'un choix, il sera très difficile à M. Goodale et aux Libéraux de ne pas être d'accord avec les députés réformistes pour dire qu'il faudrait donner aux producteurs plus de latitude et de possibilités pour la commercialisation du grain des Prairies.
M. Langlois: Merci.
La présidente: Merci, monsieur Hermanson.
M. Hermanson: Merci.
La présidente: Monsieur Allmand.
L'honorable Warren Allmand (député de Notre-Dame-de-Grâce): Bonjour.
Il s'agit d'un projet de loi modifiant la Loi sur la citoyenneté de façon à renouveler le serment de citoyenneté. Cela fait plus de 20 ans que je fais inscrire ce projet de loi au Feuilleton. On en a débattu à plusieurs reprises, mais il n'a jamais fait l'objet d'un vote. J'ai fait campagne pour défendre ce principe, en espérant que mon projet de loi serait adopté ou que le gouvernement légiférerait pour accomplir la même chose.
Le serment actuel s'applique principalement aux immigrants qui prennent la citoyenneté canadienne. Pour devenir citoyens ils doivent prêter serment ou faire une affirmation solennelle. Ce serment est actuellement formulé en ces termes:
- Je jure
- ...et pour ceux qui n'aiment pas jurer:
- fidélité et sincère allégeance à Sa Majesté la Reine Elizabeth II, Reine du Canada, à ses héritiers
et successeurs et je jure d'observer fidèlement les lois du Canada et de remplir loyalement mes
obligations de citoyen canadien.
- Je jure fidélité et sincère allégeance envers le Canada et la Constitution du Canada et je jure
d'observer fidèlement les lois du Canada et de remplir loyalement mes obligations de citoyen
canadien.
Un de mes amis a étudié à l'Université McGill. Comme il aimait Montréal et le Canada, il a décidé de rester. Au bout de 20 ans, il a voulu devenir Canadien et renoncer à sa citoyenneté américaine. Mais quand il a vu le texte du serment, il a refusé de le prêter. J'ai essayé de le convaincre d'obtenir la citoyenneté, parce que je voulais qu'il vote pour moi, mais il a refusé. Le pauvre homme est maintenant décédé.
D'autre part, j'ignore si vous êtes au courant du cas de Charles Roach. Charles Roach était un avocat de Toronto qui voulait devenir membre de la Société du Barreau du Haut-Canada. À l'époque, en 1985, vous ne pouviez pas devenir avocat en Ontario sans être citoyen canadien. Il est donc allé obtenir sa citoyenneté. Pour lui, c'était une question religieuse. Il appartenait à une religion fondamentaliste, et il a refusé de jurer allégeance à la Reine. Dans son esprit, elle était le chef de l'Église anglicane. Il est allé devant la Cour fédérale pour se plaindre qu'il était contraire à la Charte d'avoir à jurer allégeance à la Reine, le chef de l'Église anglicane, mais il a perdu sa cause. Il est allé devant la Cour suprême, et il a également perdu sa cause. D'après le dernier communiqué que j'ai obtenu, il devait s'adresser aux Nations Unies. Voici ce que disait un communiqué du Toronto Sun du 23 juillet 1994.
- L'avocat Charles Roach va s'adresser aux Nations Unies pour poursuivre la lutte qu'il mène
afin d'obtenir la citoyenneté canadienne sans avoir à jurer allégeance à la Reine. Roach a
annoncé son intention hier, après le rejet de son appel par la Cour suprême du Canada. La Cour
d'appel fédérale avait jugé qu'il n'y avait pas matière à procès.
Ce ne sont là que quelques exemples, mais le but d'un serment d'allégeance pour les néo-Canadiens est de s'assurer leur loyauté envers leur nouveau pays, de s'assurer de leur bonne citoyenneté et de supprimer les ambiguïtés. Quand il est question d'allégeance et de loyauté, il ne doit pas y avoir d'ambiguïté, surtout en ce moment. J'estime que le serment actuel est ambigu. Le fait que nous décrivions la Reine comme la Reine du Canada est une fiction juridique. Il y a bien des circonstances, aux Nations Unies, où la Reine, du chef du Canada, vote contre la Reine, du chef du Royaume-Uni ou de l'Australie. Nous en avons eu l'exemple le plus flagrant lors de la crise de Suez, quand le Canada et plusieurs autres pays du Commonwealth... la Reine votait contre la Reine.
Si vous demandez encore aux gens de jurer allégeance à la Reine, à ses héritiers et à ses successeurs, surtout pour ceux qui viennent d'autres pays du Commonwealth et qui veulent devenir Canadiens, cela devient un serment d'allégeance ambigu et qui ne veut pas dire grand-chose.
Ce que je propose correspond à de nombreuses autres mesures que les Canadiens ont prises depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Notre Loi sur la citoyenneté ne date que de 1947. Avant 1947, nous n'avions pas de loi sur la citoyenneté canadienne.
Nous avons nommé le premier gouverneur général canadien à la fin des années 40. Nous avons aboli les appels au Conseil privé et fait de la Cour suprême du Canada la cour d'appel de dernier ressort. Nous avons adopté le drapeau canadien en 1964. Il y a eu l'hymne national... Nous avons rapatrié la Constitution canadienne en 1982.
À deux reprises, quand les Conservateurs étaient au pouvoir avec Joe Clark comme premier ministre, l'ancien ministre Crombie était secrétaire d'État. Il a fait étudier la question, et cette étude recommandait un nouveau serment d'allégeance. M. Crombie a présenté à la Chambre un projet de loi qui n'a jamais été adopté. Comme vous vous en souviendrez, le gouvernement Clark a été défait. La Ligue monarchiste du Canada s'y est opposée.
J'ai dit à mes amis de la Ligue monarchiste que l'unité nationale nous posait un très sérieux problème au Canada. Dans mon projet de loi il est dit que nous demanderons aux gens de jurer allégeance à la Constitution canadienne. La Reine fait partie intégrante de la Constitution canadienne. Il s'agit seulement d'insister plutôt sur la Constitution.
Mon projet de loi n'abolit pas la monarchie. C'est peut-être une chose que je souhaiterais parfois, mais ce n'est pas le but de cette mesure. Elle ne coupe pas nos liens avec le Commonwealth. Il y a de nombreux pays du Commonwealth.
J'ignore si vous le savez, mais l'Australie a maintenant adopté un nouveau serment d'allégeance qui ne mentionne pas la monarchie. Il est différent du mien. J'en ai le texte ici. Je pourrais vous le lire. Il est assez poétique.
La présidente: Warren, par égard pour...
M. Allmand: Mon discours est trop long?
La présidente: Oui, mais ça va.
M. Allmand: Je vais terminer très rapidement.
Récemment, notre propre gouvernement a fait faire une étude. Selon cette étude et les sondages, cette mesure bénéficie de nombreux appuis.
J'ai sous la main un article du journal The Gazette du 9 septembre 1996. Dans le titre il est dit que les Canadiens sont d'accord pour que la Reine ne soit plus mentionnée dans le serment d'allégeance. Et on ajoute que c'est ce qu'indiquent de nombreux sondages.
Je dirais, pour conclure, qu'au moment où l'unité nationale soulève des problèmes dans notre pays nous devrions veiller à ce que les néo-Canadiens sachent à quoi ils jurent allégeance. Il faudrait que ce serment veuille dire quelque chose.
J'aimerais que ce projet de loi fasse l'objet d'un débat et d'un vote à la Chambre. J'espère que vous serez nombreux à vous rendre à mes exhortations.
La présidente: Warren, le sort est parfois contre vous. Nous avons huit projets de loi, et, comme nous ne pouvons en choisir qu'un seul, soyez persévérant. Si le vôtre n'est pas choisi aujourd'hui pour faire l'objet d'un vote, vous devrez persévérer encore pendant 20 ans.
A-t-on des questions à poser?
[Français]
M. Langlois: Monsieur Allmand, j'ai été professeur de droit constitutionnel pendant un peu plus d'une vingtaine d'années et je retrouve dans votre projet de loi quelque chose qui me préoccupe depuis fort longtemps. C'est la banalisation de la monarchie au Canada, comme si certaines personnes au Canada avaient honte du statut monarchique du Canada. D'ailleurs, l'année prochaine, ça fera 40 ans que Sa Majesté est venue faire l'ouverture d'une session au Canada. Il est un peu bizarre d'avoir comme chef d'État une personne qu'on invite tous les 40 ans pour faire l'ouverture de la session. Il y a donc un problème quelque part. En fait, on tasse tranquillement la monarchie derrière les rideaux jusqu'à ce qu'il n'en reste plus rien. C'est peut-être la façon canadienne de faire les choses. Un jour, on réglera le problème quand le terme aura disparu de tous les serments, de tous les signes officiels. On a déjà changé l'écusson du Canada. On fait de plus disparaître l'Union Jack sur un projet d'armoiries proposé pour la Chambre des communes.
En tant que citoyen canadien, je n'ai pas de difficultés à comprendre. Que je l'accepte ou non, c'est une autre question. Je n'ai pas de difficulté à comprendre que Sa Majesté du Chef du Canada puisse, même devant nos propres tribunaux domestiques, se faire un procès à elle-même, contre Sa Majesté du Chef de la Colombie-Britannique. Il s'agit de la même Majesté, du même souverain. Donc, si je suis capable de le comprendre en tant que Québécois et Canadien, par la force des choses, pourquoi est-ce qu'un immigrant ne pourrait pas le comprendre? Pourquoi un immigrant ne serait-il pas capable de comprendre le statut actuel du Canada, qui est une monarchie?
L'État, dans un système monarchique, s'incarne dans la personne du souverain, et il est sujet, bien sûr, au droit constitutionnel conféré aux institutions parlementaires, par le fait que nous avons une monarchie constitutionnelle où les pouvoirs du souverain sont limités par des textes.
Foncièrement, le Canada demeure une monarchie, et tant qu'il demeurera une monarchie, le serment, à mon avis, devra être adressé au chef de l'État qui incarne l'État. Il est la personnalisation de l'État, contrairement à l'État républicain aux États-Unis où la Constitution américaine commence par les termes «We, the people». Ici, on ne peut pas le faire. Je me demande si le débat devra se faire sur le statut canadien.
Actuellement, on aurait deux sortes de Canadiens: ceux qui sont capables de comprendre que le chef de l'État canadien est Sa Majesté, et ceux qui arrivent, qui sont des nouveaux arrivants et qui ont quand même rempli certaines normes, mais qui ne seraient pas capables de le comprendre. C'est là-dessus que j'accroche un peu.
M. Allmand: Il est bien évident que beaucoup de Canadiens et de nouveaux Canadiens peuvent intellectuellement comprendre que nous sommes une monarchie constitutionnelle. Loyauté et allégeance sont des choses émotionnelles et non pas intellectuelles. Je suis avocat et je peux le comprendre. Je décris donc cela comme une fiction juridique
[Traduction]
d'appeler la Reine, la Reine du Canada, la Reine de l'Australie, la Reine du Royaume-Uni. Tout le monde sait qu'elle est Anglaise. Elle n'est même pas citoyenne canadienne. Elle pense comme une Anglaise, ce qui est très bien. Ses racines sont là-bas.
Même si je n'ai pas à prêter le serment d'allégeance, parce que je suis né au Canada, tout comme vous, je l'ai prêté à l'occasion parce que je fréquente les cours de citoyenneté. Je trouve pénible d'avoir à prêter ce serment. Je n'en comprends pas la légalité, mais comme de nombreuses lois, ce n'est qu'une fiction. On dit que la loi est ridicule dans bien des cas. Pour qu'un serment d'allégeance ait la moindre signification, il faut qu'il suscite l'attachement, la loyauté et le reste.
Je peux comprendre votre point de vue à ce sujet, monsieur Langlois. Je sais que bien des gens qui sont des Bloquistes convaincus auraient du mal à jurer allégeance au Canada. Peut-être leur serait-il plus facile de jurer allégeance à Sa Majesté, car ils savent à quel point c'est ridicule à bien des égards.
Si nous avons un serment d'allégeance et si nous demandons aux gens de faire preuve de loyauté envers le Canada lorsqu'ils deviennent citoyens, nous ne devrions pas leur demander de considérer si la Reine est vraiment la Reine du Canada et s'il s'agit d'une monarchie constitutionnelle. Ce sont des gens ordinaires. Ils deviennent Canadiens. Ils veulent jurer allégeance au Canada, et c'est ce que notre serment devrait dire. C'est d'ailleurs ce qu'indiquent les sondages, de même que les deux études réalisées, et c'est ainsi que les choses devraient être selon moi.
Pourquoi avons-nous tardé à agir? Tout simplement parce qu'il y au Canada un petit groupe qui croit voir là une attaque contre la monarchie.
Cela n'abolit pas la monarchie ni la place que nous occupons au sein du Commonwealth. Le serment insiste davantage sur le Canada que sur la Reine. C'est ainsi que cela devrait être.
La présidente: Merci, monsieur Allmand et monsieur Langlois.
Monsieur Frazer.
M. Frazer: Monsieur Allmand, j'ai écouté très attentivement ce que vous disiez à M. Langlois. J'ai l'impression que vous proposez une république plutôt qu'une monarchie.
M. Allmand: Pas du tout. Absolument pas.
M. Frazer: Mais quand on jure allégeance, on jure allégeance au chef du pays où l'on se trouve.
Quand vous avez fait allusion à la crise de Suez où la Reine a voté contre la Reine, en fait, on voit bien comment cela fonctionne. La Reine du Canada pourrait voter contre la Reine du Royaume-Uni ou la Reine de l'Australie, car elle représente le pays dont elle est la Reine.
Par conséquent, même si cela peut sembler illogique à certains, il semble qu'elle représente les divers pays dont elle est la Reine.
N'atteindrait-on pas votre objectif en exigeant que les autorités de l'immigration expliquent mieux aux immigrants ce qui se passe lorsqu'ils prêtent le serment d'allégeance?
Cela m'inquiète certainement. J'ignore quelle réponse donner à la personne qui a, pour des raisons religieuses, trouvé difficile de jurer allégeance à la Reine en tant que chef de l'Église anglicane. Je ne vois pas quoi faire dans ce cas. Mais pour ce qui est de l'autre, si les autorités de l'immigration faisaient bien leur travail, tout nouvel immigrant, quel que soit le pays d'où il vient, devrait comprendre exactement ce qui se passe lorsqu'il prête le serment d'allégeance.
M. Allmand: Non, cela ne me satisferait pas. J'ai assisté à de nombreux débats sur cette question.
J'ignore si vous vous souvenez du débat sur le drapeau. Nous avons entendu les mêmes arguments. Les Canadiens ne comprenaient-ils pas qu'il s'agissait d'un drapeau canadien portant l'Union Jack? Ce n'était pas vraiment un drapeau britannique. C'est un argument que la plupart d'entre nous n'ont pas trouvé satisfaisant.
C'était la même chose pour l'hymne God Save The Queen par opposition à Ô Canada. Je pourrais citer bien d'autres exemples. Je me souviens même du débat quand on a changé le nom de Poste royale pour Postes canadiennes sur les camions postaux. La Ligue monarchiste disait que cette mesure allait faire du Canada une république. Il n'en était rien.
J'aime notre Constitution, qui prévoit un système parlementaire et la monarchie.
Que nous applaudissions la monarchie ou non, c'est une autre question. Il s'agit seulement ici d'insister davantage sur le serment d'allégeance au Canada et à la Constitution canadienne. J'ai dit, dans mes explications, qu'il était entendu que la Reine fait partie intégrante de la Constitution.
M. Frazer: Si vous le permettez, si ces personnes ne comprennent pas que la Reine est la Reine du Canada, comprendront-elles qu'elle fait partie intégrante de la Constitution?
M. Allmand: Ce n'est pas important à mes yeux. Comme je l'ai dit, l'allégeance, la loyauté et le patriotisme sont avant tout des sentiments. Quand vous vous battez pour votre pays, vous n'examinez pas les subtilités juridiques quant à savoir si la Reine est... Je ne pense pas que les gens qui se sont battus pour le Canada se battaient pour Sa Majesté. Ils se battaient pour le Canada et pour ce qui était cher aux Canadiens, pour les valeurs des Canadiens. La Grande-Bretagne était notre alliée, de même que les États-Unis et l'Australie.
Soit dit en passant, je sais que cela suscite une certaine controverse. C'est une raison de plus pour que ce projet de loi fasse l'objet d'un vote. Si vous choisissez seulement ce qui est sûr - et je ne pense pas que vous le fassiez tout le temps - à quoi sert-il d'avoir des projets de loi d'initiative parlementaire?
Le fait est que les études et les sondages qui ont été faits indiquent que les Canadiens appuient massivement cette mesure, exception faite de certains qui sont tellement attachés à la Reine et à la monarchie qu'ils y voient une attaque en règle contre la monarchie. Ce n'est pas le cas; c'est simplement une mesure pro-Canada.
Je voudrais que la mesure soit débattue de façon plus raisonnable et plus complète. Je voudrais qu'elle soit considérée comme pouvant faire l'objet d'un vote. J'hésite toutefois à la présenter, comme je l'ai expliqué à la présidente, car j'essaie depuis 20 ans de la faire accepter.
M. Crombie, qui était ministre conservateur, a mis un serment semblable au Feuilleton. J'espère que Mme Robillard le fera aussi, mais cela reste à voir. Si la mesure était déclarée comme pouvant faire l'objet d'un vote, ce serait peut-être le coup de pouce qu'il faudrait. La ministre pourrait peut-être agir d'autant plus rapidement.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Allmand.
M. Allmand: Je vous en prie.
À propos, qui siège au comité? Je ne vois que trois membres ici présents. Le comité ne comprend-il que trois membres?
La présidente: Non, M. Loney est ici normalement, mais il ne faut que trois membres pour avoir le quorum. Le sous-comité comprend quatre membres.
M. Allmand: Merci beaucoup.
La présidente: Monsieur McClelland, nous vous ferons passer avant M. Dubinski. Vous êtes ici pour M. Harris?
Je tiens à rappeler aux membres du comité que nous devons accueillir M. Marleau à midi, de sorte que nous poursuivrons sans doute le débat sur les projets de loi pouvant faire l'objet d'un vote après l'exposé de M. Marleau.
M. Langlois: Si j'ai bien compris, nous aurons un vote sur l'attribution de temps à la Chambre.
La présidente: Je ne veux pas vous presser, monsieur McClelland, mais nous verrions d'un bon oeil que vous soyez bref.
M. Ian McClelland (député d'Edmonton-Sud-Ouest): Merci beaucoup, madame la présidente. Sur une note personnelle, je tiens à remercier les membres de votre comité. En effet, une mesure d'initiative parlementaire que j'avais présentée à votre comité est devenue loi la semaine dernière, je crois. Elle a été adoptée par le Sénat.
La présidente: S'agissait-il d'un principe inattaquable ou d'une mesure vraiment sérieuse?
M. McClelland: La mesure était plutôt du genre inattaquable, sinon elle n'aurait jamais été adoptée. Elle était toutefois sérieuse, en ce sens qu'elle nous a fait économiser 1,2 million de dollars et qu'elle a permis à Élections Canada d'avancer dans la voie que l'on avait décidé de suivre.
La présidente: Merci.
M. McClelland: Je remercie sincèrement les membres du comité.
M. Frazer: Il s'attribue tout le mérite, mais je l'avais quand même appuyée.
M. McClelland: J'arrive maintenant au projet de loi de M. Harris. Les membres du comité se souviendront que j'ai déjà témoigné en faveur de M. Harris pour demander que son projet de loi initial soit déclaré comme pouvant faire l'objet d'un vote. Il s'agissait d'imposer une peine minimale aux personnes trouvées coupables de conduite avec facultés affaiblies.
Le projet de loi a été présenté à la Chambre. Il avait été déclaré comme pouvant faire l'objet d'un vote. Il a toutefois été rejeté par la Chambre. Il avait l'appui de tous les partis, mais il a été rejeté parce qu'il y avait contradiction avec la Charte du fait qu'il n'est pas permis de prévoir une peine déterminée.
Le projet de loi revient donc maintenant sous forme de motion. S'il est présenté sous forme de motion, c'est qu'il permettrait d'attirer l'attention du gouvernement sur le fait qu'une bonne partie de la population dans toutes les régions du pays souhaite que la conduite avec facultés affaiblies causant la mort soit considérée comme une infraction criminelle grave.
Plus de 20 000 signatures avaient été recueillies sur des pétitions à l'appui du projet de loi initial. Ce projet de loi avait l'appui des divers groupes intéressés, comme Mothers Against Drunk Driving, ou MADD, et divers groupes d'étudiants, du fait qu'il transmet un message très sérieux et des plus nécessaires aux Canadiens.
Les statistiques le montrent bien, l'attitude de notre société à l'égard des personnes qui conduisent avec facultés affaiblies a changé du tout au tout ces dernières années. La plupart d'entre nous - du moins ceux qui ont mon âge - se souviendront qu'à une certaine époque la conduite avec facultés affaiblies n'était pas considérée avec autant de gravité qu'elle l'est aujourd'hui. Avec ce changement de mentalité et avec le renforcement des mesures visant à faire respecter la loi, l'idée qu'on se fait de la conduite avec facultés affaiblies a changé au Canada.
Cette motion permettrait donc aux parlementaires d'oublier leur affiliation politique pour se prononcer en faveur du resserrement des sanctions contre ceux qui conduisent avec des facultés affaiblies.
Sur ce, je suis prêt à répondre à vos questions.
La présidente: Avez-vous des questions?
[Français]
M. Langlois: Peut-être un court commentaire sur le projet de loi qui a été présenté à la Chambre et qui prévoyait une peine minimale d'emprisonnement de sept ans pour quiconque causait la mort d'autrui en conduisant avec des facultés affaiblies. J'ai personnellement appuyé le projet de loi et j'ai voté en sa faveur. Je crois d'ailleurs qu'il y a eu seulement une vingtaine de votes qui ont séparé les pour des contre.
Donc, normalement je ne suis pas réfractaire. Mais est-ce que cela n'équivaudrait pas à demander à la Chambre de se prononcer deux fois dans la même session sur un même sujet, si la motion devait être déclarée votable, étant donné qu'il y a eu un débat de trois heures là-dessus et que l'avis des parlementaires, à ce stade-ci, est connu?
[Traduction]
M. McClelland: Je crois qu'il serait utile, étant donné la gravité de la conduite avec facultés affaiblies, de donner au Parlement l'occasion non seulement de se prononcer sur cette question, mais d'adopter la motion. Celle-ci n'oblige évidemment pas le gouvernement à faire quoi que ce soit. Il s'agit simplement de lui indiquer la voie à suivre. Ce sera au gouvernement d'en faire ce qu'il jugera bon. Si les députés, quel que soit leur parti, indiquent au gouvernement la direction à suivre au moyen d'une motion, il est envisageable que cette motion puisse être adoptée.
D'autre part, comme il y a déjà eu trois heures de débat sur cette question, nous pourrions soumettre la motion à un vote à l'issue d'un débat d'une heure. J'ignore si la procédure le permet.
La présidente: Nous n'avons pas encore cette latitude. Nous étudions le règlement qui nous régit, et nous n'avons pas encore cette latitude.
M. McClelland: Merci. Vous avez raison, mais la gravité de la conduite avec facultés affaiblies est telle qu'il faudrait peut-être y songer.
La présidente: Merci beaucoup.
M. Langlois: La Chambre a-t-elle été saisie d'une motion d'attribution de temps?
M. McClelland: Non, le projet de loi C-35 porte sur le travail. S'il y en a une, je vous le ferai savoir.
M. Langlois: Très bien.
La présidente: David, il est assez inhabituel que nous recevions quelqu'un qui n'est pas député, mais tous les membres du comité ont accepté de vous entendre. Nous formons un groupe assez sympathique.
M. David Dubinski (adjoint de M. Bill Blaikie, député de Winnipeg Transcona): Je commencerai par vous remercier, au nom de M. Blaikie, pour m'avoir permis de présenter sa motion en son nom. Il a été retenu par des obligations urgentes dans sa circonscription. C'est le genre de situation dont vous avez tous l'habitude.
La motion M-290 de M. Blaikie demande au gouvernement de songer à modifier le système canadien de contrôle des exportations d'armes en exigeant que l'on évalue l'incidence d'une exportation d'armes sur la sécurité internationale avant d'accorder une licence d'exportation et que cette étude soit déposée à la Chambre des communes, là encore avant que la licence ne soit accordée.
Cette proposition apporterait deux innovations importantes. Selon le système actuel de contrôle des exportations, vous avez une liste des pays vers lesquels il est interdit d'exporter des armes. Il s'agit ici de conférer au gouvernement l'obligation de démontrer que la sécurité régionale ou internationale ne sera pas compromise par une exportation, même si un pays figure sur la liste des pays admissibles. Autrement dit, le gouvernement aura l'obligation de démontrer que la sécurité internationale se trouvera améliorée et stabilisée à la suite d'une exportation au lieu d'exiger simplement que le pays en question se conforme à certaines normes de comportement.
Deuxièmement, le dépôt de l'étude à la Chambre des communes ajouterait davantage de transparence au processus. Les parlementaires et le public auraient ainsi davantage accès à l'information concernant une situation dont on ne sait pas grand-chose.
Par ailleurs, je crois utile de préciser que la motion se conforme aux critères établis pour qu'une mesure d'initiative parlementaire puisse faire l'objet d'un vote.
Premièrement, c'est une question d'actualité, étant donné que 1996 est la première année depuis la fin de la guerre froide où l'on assiste à une augmentation des exportations d'armes, à l'échelle internationale, vers les pays du tiers monde. C'est une réalité qui requiert des initiatives politiques novatrices.
Deuxièmement, ce n'est pas une question sur laquelle la Chambre aurait autrement l'occasion de s'exprimer prochainement. Rien n'indique que le gouvernement a l'intention de légiférer bientôt dans ce domaine.
Ensuite, ce n'est pas une mauvaise mesure législative à première vue. Elle n'est pas critiquable pour des raisons techniques. La motion exprime simplement la volonté de la Chambre et laisse au gouvernement le soin d'élaborer les méthodes et les instruments juridiques appropriés.
Il ne s'agit pas d'une question d'intérêt régional ou paroissial; il s'agit manifestement d'une question d'intérêt national et international.
Enfin, c'est une mesure qui intéresserait tous les députés du fait qu'elle ferait en sorte qu'ils seraient plus en mesure de demander des comptes au gouvernement du jour sur une dimension importante de sa politique étrangère.
Pour ces raisons, j'espère que le comité acceptera de considérer la mesure comme pouvant faire l'objet d'un vote et de donner ainsi à la Chambre la possibilité de se prononcer sur un problème international des plus urgents. Je serai heureux de répondre à vos questions.
La présidente: Merci.
Monsieur Frazer, vous pouvez commencer.
M. Frazer: Merci, madame la présidente. J'ai effectivement des questions à poser.
La définition des permis d'exportation relatifs à des produits militaires est assez vaste. Je me demande si vous avez une idée de ce qu'il pourrait en coûter au ministère des Affaires étrangères, en dépenses de temps et d'argent, pour faire les examens nécessaires et rédiger les rapports. Qu'en serait-il des délais? Combien de temps faudrait-il au ministère pour cela?
M. Dubinski: Je le répète, je ne pourrais répondre à aucune de ces questions de façon précise, mais la motion n'a pas pour objet d'établir les procédures ou les structures comme telles, mais simplement d'ajouter au dynamisme du mouvement public en ce sens. Elle affirme que le gouvernement devrait avoir un régime de réglementation plus stricte à l'égard des exportations d'armes...
M. Frazer: Je n'essaie pas de vous critiquer sournoisement. Je ne me priverais cependant pas de le faire si c'était Bill Blaikie qui était là à votre place.
La motion me semble aller dans le sens d'une plus grande intervention et d'une plus grande présence du gouvernement dans notre vie. Je ne m'oppose certainement pas à l'essentiel de ce qu'il dit dans cette motion, à savoir qu'il faudrait s'assurer que les exportations d'armes à divers pays se font selon les règles établies.
Je me demande dans quelle mesure il serait réaliste de demander au ministère des Affaires étrangères de procéder à un examen et d'en faire ensuite rapport à la Chambre chaque fois qu'une demande de licence d'exportation est faite. La catégorie visée est tellement vaste que le ministère pourrait devoir doubler son effectif afin de s'acquitter de la tâche.
C'est là ma seule question. Merci, madame la présidente.
La présidente: Monsieur White, je crois que vous êtes déjà venu devant le comité. Vous avez cinq minutes pour nous faire votre exposé, après quoi nous vous poserons des questions.
M. Ted White (député de Vancouver-Nord): Je voudrais tout d'abord dire aux membres du comité que l'idée du projet de loi C-333 est venue d'un procureur de la Couronne de Vancouver-Nord. L'idée est donc venue de quelqu'un qui avait une connaissance intime des problèmes dont il est question dans le projet de loi.
Il s'agit de M. Jay Straith. M. Straith s'occupe de causes d'immigration devant les tribunaux de la côte nord de Vancouver, de sorte qu'il a une vaste connaissance pratique du domaine. Il a d'ailleurs travaillé directement avec le bureau du légiste de la Chambre des communes pour établir les grandes lignes du projet de loi.
Le projet de loi prévoit, par une modification qui serait apportée à la Loi sur l'immigration et au Code criminel, l'expulsion à titre de peine des revendicateurs du statut de réfugié ou des immigrants éventuels qui sont reconnus coupables d'un acte criminel, c'est-à-dire d'une infraction grave.
Le fait que l'idée du projet de loi soit venue d'un procureur de la Couronne montre au comité qu'il ne s'agit absolument pas d'une mesure partisane. La mesure toucherait toutes les régions du pays et serait très utile aux procureurs de la Couronne d'un océan à l'autre.
La présidente: Voulez-vous laisser entendre que les procureurs de la Couronne n'ont aucune allégeance politique?
M. White: Non. J'allais justement dire que ledit procureur de la Couronne est bien connu comme militant libéral. C'est en partie pour cette raison que la mesure est si peu empreinte de parti pris politique. Il a pu venir m'en parler. Nous avons tous deux jugé que l'idée était excellente, et nous sommes partis de là.
En proposant le projet de loi, il voulait améliorer l'application du système judiciaire aux revendicateurs du statut de réfugié ou d'immigrant qui sont des criminels.
Sur le plan des coûts, il est fort probable que le projet de loi s'il était adopté permettrait d'économiser plusieurs millions de dollars par an, si l'on tient compte de ce qu'il en coûte à l'heure actuelle pour essayer d'arrêter ceux qui tentent d'éviter l'expulsion. Je crois que nous connaissons toutes les diverses méthodes qui peuvent être utilisées.
La Chambre n'est saisie d'aucune motion ni mesure gouvernementale traitant de cette question et, à ma connaissance, aucune initiative gouvernementale n'est prévue à cet égard, alors que l'idée d'une mesure de ce genre recueille pas mal d'appuis parmi le public, appuis qu'il serait très facile de mesurer.
En outre, les fonctionnaires de la division des expulsions d'Immigration Canada à Vancouver ont examiné l'idée. Ils m'ont fait savoir qu'ils l'approuvaient entièrement. Ils trouvent que la mesure leur serait très utile.
Le projet de loi C-333 n'empiète sur aucun domaine de compétence provinciale. Je dirais même qu'il serait très avantageux pour les provinces en ce sens qu'il les aiderait à régler des problèmes qui finissent par être de leur ressort quand elles doivent s'occuper de ces personnes-là.
Le projet de loi dispose que le procureur doit faire parvenir à l'inculpé un préavis l'informant de son intention de demander l'expulsion à titre de peine. Nous avons donc tenu compte de la dimension des droits de la personne en faisant en sorte que les personnes visées sachent quels sont leurs droits avant même qu'elles ne soient traduites devant un tribunal.
Bref, le projet de loi est une mesure pratique. Il a été proposé et élaboré par quelqu'un qui travaille directement dans le domaine et qui a une expérience pratique de la chose.
Bien entendu, j'estime qu'il devrait pouvoir faire l'objet d'un vote. J'espère que le comité sera aussi de cet avis.
Voilà qui met fin à mon exposé.
La présidente: Questions?
M. Frazer: Monsieur White, je n'arrive pas à la retrouver là, mais il me semble avoir vu dans le projet de loi une disposition selon laquelle toute personne qui serait expulsée du Canada aux termes de votre projet de loi serait soumise à un délai de trois ans avant d'être autorisée à y revenir.
M. White: La personne serait tenue d'attendre trois ans avant de pouvoir présenter une nouvelle demande d'admission.
M. Frazer: Pouvez-vous me donner une idée des restrictions qui s'appliqueraient à cette personne quand elle demanderait à revenir au Canada?
M. White: Les restrictions habituelles en matière d'immigration s'appliqueraient et la personne serait donc tenue d'avouer avoir déjà été expulsée du Canada et d'indiquer pour quel motif elle avait été expulsée. Vraisemblablement, il appartiendrait alors aux agents d'immigration de déterminer si la personne a effectivement fait la preuve de sa réinsertion sociale et qu'elle présente maintenant les qualités voulues pour être autorisée à revenir au Canada.
Je sais que bien des gens estiment que ceux qui sont expulsés ne devraient jamais être autorisés à revenir. Cette disposition part toutefois du principe qu'il pourrait y avoir des raisons de donner une autre chance aux personnes expulsées. C'est pourquoi cette possibilité a été incluse dans le projet de loi.
M. Frazer: La condamnation figurerait tout de même au dossier de la personne, même si elle n'avait pas purgé de peine au Canada, n'est-ce pas?
M. White: Il y aurait une mention au dossier indiquant son expulsion à titre de peine. Dans la pratique, la peine serait donc l'expulsion.
M. Frazer: Je vous remercie.
La présidente: Monsieur White, que feriez-vous dans le cas de quelqu'un qui aurait commis un meurtre? Expulseriez-vous la personne au lieu de la traduire en justice?
M. White: Il appartiendrait au procureur de la Couronne d'en décider. Ce serait au procureur de décider ce qu'il conviendrait de faire dans les circonstances.
Finalement, le projet de loi vise les personnes qui se servent du système pour demeurer au Canada en commettant toujours de nouveaux actes criminels et en s'assurant d'en commettre pendant leur période de libération conditionnelle. Je crois que cela est très fréquent parmi certains éléments criminels qui sont au nombre des revendicateurs du statut de réfugié.
Le projet vise essentiellement donc ces gens-là, pas ceux dont on pense qu'il conviendrait de leur faire purger leur peine pour qu'ils puissent ensuite être libérés et réintégrer la collectivité. Je sais que certains considèrent que ces gens-là devraient purger leur peine ici parce qu'il s'agit d'une dette qu'ils ont envers la population canadienne, mais si vous posez la question au grand public - la plupart des procureurs de la Couronne de la région de Vancouver semblent être de cet avis - , on vous dira qu'il serait préférable de les expulser plutôt que d'avoir à assumer les coûts liés à l'activité criminelle de ces récidivistes qui commettent un acte criminel après l'autre.
Sauf votre respect, il me semble que cette question-là ferait partie du débat à la Chambre des communes et qu'elle n'a peut-être pas d'incidence sur la décision de considérer la mesure comme pouvant faire l'objet d'un vote. Ce serait d'ailleurs un point très important dont il faudrait débattre.
La présidente: Merci beaucoup pour votre exposé.
[Français]
M. Langlois: Est-ce que vous me permettez une question? Monsieur White, je n'ai pas tellement de difficulté avec la première partie du projet de loi C-333 pour la personne qui a été trouvée coupable. Mais si on déporte cette personne, on risque de déporter son conjoint et les personnes qui sont à charge. Vous ne voyez pas un problème pour les personnes qui n'ont commis aucun acte illégal et qui se voient déporter du Canada parce qu'un membre de la famille est déporté?
[Traduction]
M. White: Le projet de loi prévoit la possibilité d'expulser aussi les personnes à charge, mais ces personnes ne sont pas soumises aux mêmes restrictions que l'inculpé pour ce qui est d'être réadmises au Canada. Bien entendu, il appartient encore là au procureur de la Couronne d'en décider. La disposition est effectivement incluse dans le projet de loi, mais je suis sûr que nous pouvons avoir confiance que nos procureurs de la Couronne prendront la décision qu'il convient de prendre dans les circonstances.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur White.
Madame McLaughlin, je vois que vous êtes accompagnée de M. Solomon, qui témoigne assez souvent devant notre comité en faveur de projets de loi parrainés par d'autres, et ce, parfois à son détriment. C'est toujours un plaisir de l'accueillir ici.
Mme Audrey McLaughlin (députée de Yukon): Voulez-vous laisser entendre que sa présence serait à mon détriment?
La présidente: Je ne le sais pas. Vous devrez en décider vous-même.
M. John Solomon (député de Regina - Lumsden): J'espérais, madame la présidente, que je pourrais, par ma présence, apporter mon aide et mon soutien.
Mme McLaughlin: Je crois, madame la présidente, que les membres ont reçu copie de la motion, de sorte que je n'ai pas besoin de m'occuper de cela.
Permettez-moi de commencer par vous dire que la motion en question suscite beaucoup d'intérêt dans le Nord. Je sais que tout un chacun invoque les circonstances particulières de sa région, mais j'estime néanmoins pouvoir présenter quelques arguments pour vous montrer l'importance de déclarer cette motion comme pouvant faire l'objet d'un vote.
J'ai reçu une lettre d'appui de Jack Anawak, le député de Nunatsiaq, qui est lui aussi, profondément inquiet. Il estime que les compressions auront une incidence disproportionnée sur CBC North. Nous sommes tous deux - je vous en dirai un peu plus long à ce sujet - inquiets des pertes ou des réductions que pourrait subir la programmation en langue autochtone. Je puis vous laisser une copie de cette lettre, si vous le souhaitez, madame la présidente.
Je vous dirai que, depuis que le conseil d'administration de la SRC a annoncé les compressions - cette fois les compressions étaient bien sûr plus importantes, s'élevant à 127 millions de dollars - , nous avons reçu à mon bureau à Whitehorse plus de lettres et d'appels sur cette question que sur n'importe quelle autre question sans doute.
La réaction du public reflète, à mon avis, l'importance de CBC North, tant le volet télévision que le volet radio. S'il n'existe pas de service de câblodistribution - ce service n'existe que dans les grandes villes, comme Yellowknife ou Whitehorse - , le signal de la SRC est le seul qui puisse être capté à la télévision, de sorte qu'il s'agit d'une source d'information très importante pour la population du Nord.
Je tiens à vous présenter quelques données. Depuis 28 mois, CBC North a déjà subi 1,9 million de dollars de compressions budgétaires et a mis à pied 30 de ses employés. Avec cette nouvelle série de compressions, le budget de CBC North sera réduit de 28 p. 100 et celui de CBC North télévision de 40 p. 100.
Par un curieux retour des choses, il y a à peine un an qu'on a lancé à la télévision, à grand renfort de publicité, une émission appelée Northbeat. Il s'agissait de la première émission d'actualités télévisuelles qui présentait vraiment les vues des gens du Nord aux gens du Nord eux-mêmes et à d'autres. Bien entendu, la plupart de nos émissions d'actualités nous viennent de la Colombie-Britannique. Nous aimons parfois entendre ces actualités, mais pas toujours.
La programmation en langue autochtone, qui est un élément très important de CBC North, sera très probablement une des premières victimes des compressions. J'estime que, dans le contexte actuel, c'est là un problème très grave.
D'après ce qu'on me dit, les compressions signaleront sans doute la fin des bulletins de nouvelles quotidiens en Inuktitut. C'est donc la circonscription de M. Anawak qui en serait touchée, puisque l'Inuktitut sera l'une des deux langues officielles du nouveau territoire du Nunavut. On pourrait donc dire que les compressions risquent de violer la Loi sur le Nunavut, étant donné que le gouvernement fédéral a l'obligation de fournir des services de base dans les deux langues sur le territoire du Nunavut.
Il est aussi intéressant de noter que c'est non pas Radio-Canada, mais CBC North qui fournit des services en français dans le nord du Québec grâce à son émission appelée Boréale-Hebdo. Il y a de craindre que cette émission soit elle aussi en voie de disparaître.
Je ne m'attarderai pas sur la promesse du livre rouge, parce que je ne pense pas qu'il vaut la peine d'en discuter à ce moment-ci.
Je suis à même de constater les divergences d'opinion sur l'avenir de la SRC parmi les membres du comité et les différents partis politiques, mais j'estime qu'il est important de souligner que, bien que toutes les régions du pays soient représentées au conseil d'administration de la SRC, le Nord n'a pas de représentant au conseil. Ainsi, quand toutes ces décisions ont été prises, le Nord n'avait personne au conseil qui parlait en son nom.
Enfin, je veux simplement dire que, pour bien des gens du Nord, CBC est le seul lien avec le monde extérieur, à l'échelle nationale et internationale. Nous avons effectivement d'autres stations de télévision, dans la mesure où nous avons le câble, et nous avons effectivement des stations de radio, mais c'est CBC qui, pour bien des gens, offre la perspective nationale et internationale sur les questions d'actualité.
J'ai dit également que c'est le seul service d'actualités offert en langue autochtone. Sur l'ensemble du territoire nordique, CBC, comme je l'ai déjà dit, est vraiment l'instrument par excellence qui permet de relier les différentes régions du pays, dans le contexte actuel où il est de nouveau question d'unité nationale.
C'est pourquoi le dossier mérite d'être débattu en bonne et due forme à la Chambre des communes. Comme je l'ai indiqué, toutes les autres régions avaient un représentant qui était là pour exprimer leur point de vue au conseil d'administration de la SRC. Le Nord n'avait toutefois pas de représentant. C'est pourquoi je suis profondément convaincue que la motion doit être débattue pleinement et faire l'objet d'un vote.
Merci.
La présidente: Merci, madame McLaughlin.
Y a-t-il des questions?
[Français]
M. Langlois: J'ai peut-être un commentaire. Vous n'avez pas besoin de me convaincre que CBC et Radio-Canada, avec les compressions budgétaires qu'on leur impose - particulièrement CBC - ont toutes les peines du monde à remplir leur mission qui est de travailler à cette recherche d'identité nationale qui fait partie de leur mandat.
Alors, il faut être réaliste et savoir que, si on coupe les budgets de CBC et qu'on lui demande ensuite d'entrer en concurrence avec les réseaux américains comme CNN dans le domaine de l'information ou les réseaux majeurs comme CBS, ABC, NBC ou PBS en matière d'émissions culturelles ou de téléséries, jamais CBC ne réussira à imposer un créneau canadien ou un contenu canadien comparable à celui qui est produit aux États-Unis. En ce sens-là, je pense que c'est tout le réseau de CBC qui mériterait d'être revu et non pas seulement CBC North.
Nous allons avoir une campagne électorale bientôt, et je pense que les partis politiques pourront en discuter. Toutefois, je suis particulièrement sensible à l'aspect qui touche les populations aborigènes et que vous avez mentionné. C'est peut-être une circonstance qui me permet de me raccrocher davantage à votre motion. De plus, si on pouvait débattre de cette motion, on pourrait faire un bon débat avec tous les partis politiques sur les coupes budgétaires.
À Radio-Canada aussi, il semble qu'on va commanditer les nouvelles. Est-ce Molson qui commanditera les nouvelles du sport? On ne sait trop où on va. Il y a un sérieux problème au niveau de la télédiffusion et de la radiodiffusion publiques au Canada, je vous l'accorde.
Je vous remercie de votre présentation.
[Traduction]
Mme McLaughlin: Merci.
Je suis d'accord pour dire que la question fondamentale est celle de la radiodiffusion publique en général, à savoir si le Canada aura un réseau de radiodiffusion public en anglais et en français et, bien entendu, en langue autochtone.
J'ai discuté du dossier avec CBC North, en raison bien sûr de la région que je représente, mais je trouve aussi important d'exprimer ce que j'ai entendu de la part des électeurs de l'ensemble du territoire nordique, des Territoires du Nord-Ouest, du Labrador et du nord du Québec tout comme de ma circonscription.
[Français]
M. Langlois: Merci.
[Traduction]
La présidente: Avez-vous des questions, monsieur Frazer?
M. Frazer: Madame McLaughlin, vous avez dit que, dans deux centres, on avait le choix entre CBC et le câble et qu'en dehors de ces deux centres, on n'avait aucun choix. N'y a-t-il pas de réception satellite là-bas?
Mme McLaughlin: Je suppose que ceux qui le veulent peuvent s'acheter une de ces antennes paraboliques.
M. Frazer: Cela se fait-il dans les localités du Nord?
Mme McLaughlin: Tout dépend. Certains hôtels le font, ce n'est peut-être pas possible dans le cas de la majorité des particuliers.
M. Frazer: Ce que je ne sais pas - et vous êtes manifestement bien au courant de cela, mais pas moi - , c'est ce qu'il restera de la programmation de CBC dans le Nord?
Mme McLaughlin: Si les compressions sont effectuées, vous voulez dire?
M. Frazer: Oui. Qu'est-ce que CBC sera en mesure de présenter? Voilà ce qui m'intéresse.
Mme McLaughlin: CBC a dit publiquement que la programmation viendrait sans doute en grande partie du Sud. Nous avons par exemple un bulletin sportif au Yukon qui autrefois était présenté par un journaliste yukonnais. C'est maintenant un journaliste sportif de Toronto sans doute qui le présente. Je suppose donc que la programmation sera constituée le plus souvent de signaux du Sud qui seront retransmis chez nous.
La question la plus importante tient toutefois au fait que les gens du Nord n'avaient pas de porte-parole au conseil d'administration de la SRC. J'ai travaillé très fort pour que nous puissions obtenir Radio-Canada sur le câble, du moins à Whitehorse - et je parle ici de la radio - et nous avons finalement eu cette liaison terre-satellite. Cette liaison est particulièrement importante pour la programmation en français et, comme je l'ai dit tout à l'heure, pour la programmation en langue autochtone. Je ne pense pas qu'il y aura beaucoup d'émissions en langue autochtone qui nous viendront du Sud.
La question qui se pose tient au fait que, si nous pensons en tant que société qu'il est important que les gens soient bien informés sur les questions politiques, sur les questions d'importance nationale et internationale, ces émissions en langue autochtone et en langue française sont extrêmement importantes pour faire en sorte que tous les Canadiens aient accès à cette information.
M. Frazer: Je suppose que c'est là où je voulais en venir par ma question. Je suis d'accord avec vous pour dire que c'est souhaitable, que c'est ce qui devrait se produire. Cela revient-il simplement alors à ce que la SRC accorde la priorité à la programmation de ce type-là? En disant cela, je reconnais qu'une plus grande partie de la programmation pourrait venir du Sud, mais on répondrait quand même à vos besoins puisqu'on accorderait la priorité à ces besoins.
Mme McLaughlin: Naturellement, tout dépend de ce que décidera la SRC. Je pense toutefois, comme on l'a dit tout à l'heure, qu'il y a quand même des limites aux compressions qui peuvent être effectuées, limites au-delà desquelles il n'y a plus de programmation possible.
Qu'on pense au mandat de CBC North en particulier - voilà l'objet de mon propos - qui consiste à présenter à la fois la voix des gens du Nord et celle de la communauté nationale et internationale dans ce dialogue national, quand des compressions de 40 p. 100 viendront s'ajouter aux compressions déjà effectuées. Personne ne dit que nous ne devrons pas tous subir des réductions de base, mais nous avons déjà été touchés par des compressions très importantes.
La présidente: Merci, madame McLaughlin.
Mme McLaughlin: Merci à vous. Je remercie aussi le député de Regina - Lumsden pour son appui.
M. Solomon: J'ai une courte observation à faire, si vous le permettez, madame la présidente. Je tiens à rappeler aux membres du comité que le Nord canadien est un vaste territoire. Pour assurer la couverture de ce territoire avec le moindrement de crédibilité et d'exactitude, il en coûte beaucoup plus cher que ce qu'il en coûte pour offrir le même type de programmation dans le sud ou dans le centre du Canada.
Nous avons une station CBC à Regina qui s'est vu imposer des réductions de 40 p. 100. Si considérables soient-elles, ces réductions ne sont rien à comparer avec ce qui s'est produit dans le Nord en raison de l'immensité du territoire à couvrir. J'invite les membres du comité à ne pas l'oublier.
Je crois qu'il s'agit là d'un sujet extrêmement important pour l'unité nationale. Les chemins de fer ont uni notre pays d'un océan à l'autre; la SRC est aussi un facteur qui nous unit d'Est en Ouest et de Nord en Sud, comme disait mon ancien chef. J'inviterais les membres du comité à donner leur assentiment pour que cette motion puisse faire l'objet d'un vote à la Chambre de communes. Merci.
La présidente: Je ne m'en souviens pas, monsieur Solomon, mais quel résultat avez-vous obtenu la dernière fois?
M. Solomon: J'ai perdu dans les deux cas, mais je dois poursuivre mes efforts.
La présidente: Tout à fait. Merci beaucoup.
Nous siégeons maintenant à huis clos.
[Les délibérations se poursuivent à huis clos]
[Les délibérations publiques reprennent]
La présidente: Nous sommes heureux de vous accueillir ici aujourd'hui. On nous a de nouveau demandé - quel bonheur - de nous pencher sur les affaires émanant des députés. Il semble que, depuis six mois environ, il y ait une certaine controverse du fait que les gens s'imaginent qu'il suffit de répondre aux critères pour que leur motion ou leur mesure puisse automatiquement faire l'objet d'un vote. On nous a traités de comité de «cafards». Le qualitatif n'est guère flatteur, et je ne pense pas qu'aucun de nous ne ressemble à ces petits insectes.
Nous avons plusieurs questions que nous devons examiner. Il y a la question de savoir ce que cela aurait comme conséquences de considérer que tout peut faire l'objet d'un vote, et je puis vous assurer que nous n'inclinons à aller ni dans un sens ni dans l'autre. Deuxièmement, quel avantage y aurait-il à ce que nous revenions à la formule de l'examen par le comité permanent plutôt que par un petit sous-comité de trois ou quatre personnes?
Nous avons une foule de questions, mais nous aimerions, si vous vous sentez à l'aise de le faire, que vous nous disiez quelques mots avant que nous ne vous demandions ce que vous pensez de la formule actuelle, de ce qui nous a amenés à cette formule et des changements que vous aimeriez voir adopter. Nous vous poserons ensuite quelques questions.
Soyez le bienvenu. Je vous suis vraiment reconnaissante de votre présence ici aujourd'hui. Nous ne vous avons donné qu'un préavis très court, et nous sommes heureux de vous voir là.
M. Robert Marleau (greffier de la Chambre des communes): Je suis heureux d'être là, madame la présidente. Comme vous le savez, le Bureau est à votre disposition. Chaque fois que vous avez besoin de nous, nous serons heureux de venir vous rencontrer pour apporter notre modeste contribution.
Vous me demandez, dans votre introduction, si j'ai des suggestions à faire: à cette étape, nous nous limiterions à des questions de procédure, car sur la façon dont vous traitez les affaires émanant des députés, nous n'avons pas de préférence particulière. Nous vous aiderons sur ce point.
La frustration que peuvent ressentir les députés pour ce qui leur paraît un manque d'efficacité est plus souvent due aux décisions d'ordre politique que vous devez prendre, et nos conseils sur la procédure seraient donc sans effet là-dessus.
La présidente: Nous sommes d'accord sur ce point, et je vous remercie de rejeter la balle dans notre camp.
M. Marleau: Mes collègues m'accusent souvent de répondre à leurs questions en leur demandant, à mon tour, leur opinion, et je ne voudrais pas faire cela ce matin.
Une des questions que vous envisagez, dans le cadre de vos travaux et plus particulièrement des questions que vous voulez nous poser, où plus tôt l'une des recommandations y avait été faite, peut-être dans le cadre de votre enquête, est la possibilité de réserver une journée entière aux affaires émanant des députés. J'aimerais, sur ce point, vous faire un bref survol de la question.
Cette méthode a été mise à l'essai en 1983, à la suite d'un rapport du comité Lefebvre, qui a marqué un tournant dans la façon de procéder sur cette question. Lorsque le nouveau calendrier a été institué et que les séances de soirée ont été supprimées, il y a une période, de l'hiver 1983 au début du printemps 1984, si je ne me trompe, pendant laquelle les trois heures - l'usage à l'époque, était d'y consacrer trois heures par semaine - ont été concentrées le mercredi. La Chambre se réunissait donc à 14 heures, il y avait la période des questions et les affaires courantes ordinaires, puis trois heures entières consacrées aux affaires émanant des députés.
À cette époque-là tous les projets de loi et motions pouvaient faire l'objet d'un vote. On en discutait effectivement, jusqu'à la fin de l'heure, mais il était rare que l'on procède à un vote, et ils étaient retirés.
Il s'est vite avéré que cette façon de les regrouper tous en une journée présentait des difficultés réelles, en particulier pour le gouvernement de l'époque, en ce sens que l'élan de la planification législative de la semaine en était brisé. Cette journée, entre le mardi et le jeudi, perturbait le cours des débats qui avaient lieu à la Chambre.
C'est la seule déclaration publique que vous trouverez dans les rapports du comité quand on a commenté cette question.
Le mercredi soir, comme vous le savez bien, est considéré comme sacro-saint, de même que le mercredi matin, réservé aux caucus. Il est rare de voir siéger, un mercredi soir, un comité ou la Chambre, sauf pour des circonstances extraordinaires. Le mercredi après-midi, après la période des questions, la Chambre se vide littéralement, et les seuls qui restent sont ceux qu'intéresse particulièrement l'heure suivante.
Les statistiques montrent également qu'il y a diminution des réunions de comité le mercredi après-midi, qui est actuellement un après-midi essentiel, comme vous le savez, dans notre système de réunions de comité. Ce n'est pas que les députés prennent congé cet après-midi-là. Comme vous vous en doutez bien, ils retournent à leur bureau, pour y vaquer à leurs affaires; ils n'ont pas tous à être présents à la Chambre. Les présidents des comités se sont de plus sentis obligés de tenir les séances à un autre moment que le mercredi après-midi.
C'est pourquoi en septembre 1983, la Chambre a réexaminé la question et est revenue aux quatre heures consacrées aux affaires émanant des députés: une heure par jour, à l'exception du mercredi. Puis, par la suite, ils ont ajouté une heure le mercredi, et c'est ainsi que se présente la situation à l'heure actuelle.
Je voulais donc vous donner ce bref aperçu, car je savais que c'était une question à laquelle vous voudriez réfléchir et qui ne figurait pas dans la documentation des questions à examiner. Ce n'est pas que tout autre jour soit impossible: le lundi est peut-être à envisager, mais le mercredi s'est avéré un échec.
La présidente: J'aimerais faire un commentaire. Il y a beaucoup de gens qui sont en voyage les lundis et vendredis, et ces jours-là présenteraient donc également des difficultés. Je ne devrais pas faire de commentaires d'ordre politique, mais ayant lu une grande quantité d'information sur la question, je constate que l'intérêt relatif pour les affaires émanant des députés augmente considérablement quand vous avez un projet de loi, et diminue tout aussi subitement quand vous n'en avez pas. On ne sait donc trop par quel bout prendre cette question. Suscite-t-elle un vif intérêt, que les règles ont contribué à étouffer, ou est-ce l'inverse? Je ne crois pas que nous puissions ici répondre à cette question.
Vous avez donc tâté du mercredi, je suis contente de vous l'entendre dire; c'était la seule journée qui nous semblait envisageable, à cause des difficultés que présentent le lundi et le vendredi, mais là aussi il semble y avoir obstacle.
M. Marleau: Le Parlement, certes, n'est plus le même qu'il y a dix ans, mais je crains que la même tendance ne se reproduise, en raison de la nature des obligations des députés.
La présidente: Que penseriez-vous de revenir à l'ancienne méthode, celle d'avoir au moins 20 cosignataires, qui alors manifesteraient au moins suffisamment d'intérêt pour rester à la Chambre?
M. Marleau: Le fait de parrainer un projet de loi n'implique pas nécessairement que l'on assiste aux débats, et ce pour toutes sortes de raisons, comme vous le savez. À la façon dont on procède actuellement, celui qui appuie un projet de loi n'est pas averti longtemps à l'avance du moment où ce dernier sera présenté à la Chambre, et il risque à ce moment-là d'avoir toutes sortes d'autres engagements.
Les cosignataires peuvent, certes, appuyer un projet de loi qui est présenté, mais je ne pense pas que cela se traduise nécessairement par des discussions plus prolongées ou plus approfondies.
La présidente: Avez-vous d'autres commentaires à faire avant que nous ne vous posions des questions?
M. Marleau: Vous avez discuté pour savoir si toutes les affaires devraient pouvoir faire l'objet d'un vote, proposition qui n'a pas fait l'objet de beaucoup d'approbations, mais à ce propos je voudrais faire remarquer que dans le contexte de notre système parlementaire... Je sais que mon collègue ici présent en a lourd sur le coeur à propos des motions qui expirent, parce qu'il considère que la procédure devrait imposer à la Chambre de prendre une décision sur les questions dont elle est saisie, faute de quoi on semble gaspiller le temps de la Chambre. Mais cette dernière n'est pas simplement un lieu de discussions, elle doit prendre une décision, je m'empresse de le dire avant que mon collègue ne fasse trop la grimace.
Dans un contexte dans lequel toutes les affaires peuvent faire l'objet d'un vote, il faut prendre en considération les questions de leadership, en particulier du côté majoritaire de la Chambre. Nous avons un système parlementaire et à la différence de nos voisins du sud, nous avons un système de gouvernement encadré par le Parlement, en opposition à un système de gouvernement par le Parlement. Si tous les projets d'initiative parlementaire peuvent faire l'objet d'un vote, cela remettra inévitablement en question l'intérêt du gouvernement du jour, qu'il soit minoritaire ou majoritaire.
Si nous en revenons donc à la philosophie de McGrath sur les affaires émanant des députés - Jim McGrath, qui présidait le comité, voulait donner aux simples députés la possibilité d'exercer une plus grande influence sur les affaires d'intérêt national - , vous vous heurtez aux questions de confiance, aux droits du gouvernement d'exercer son pouvoir et aux principes fondamentaux de notre système parlementaire.
Je ne veux pas vous faire un discours de science politique, mais simplement vous faire remarquer que vous touchez là un point sensible. Ce n'est pas simplement en disant que l'heure réservée aux affaires émanant des députés devrait leur appartenir que je pense que tout gouvernement pourrait s'abstraire totalement de ce qui se passe pendant cette heure. Ai-je besoin de vous rappeler les tensions qu'a suscités à l'occasion l'opposition entre la prise de position du gouvernement et celle d'un simple député? Je crains que si toutes les affaires émanant des députés pouvaient faire l'objet d'un vote, vous ayez un problème sur les bras.
Je voudrais à ce propos vous rappeler une procédure, relative à un projet de loi, qui figure dans notre Règlement et que vous voudrez peut-être essayer: elle n'est pas entièrement étrangère à notre processus.
Il existe une procédure par laquelle un projet de loi d'imposition et de taxation est précédé d'un avis de motion de voies et moyens, qui expose les termes selon lesquels le projet de loi, une fois la motion adoptée, sera rédigé. Vous pourriez envisager de reformuler le Règlement, de telle façon qu'une motion serait présentée pour un débat d'une heure. De cette façon, si vous le souhaitez, toutes les affaires émanant des députés pourraient faire l'objet d'un vote, et une fois adopté le projet de loi serait rédigé dans les mêmes termes. S'il était présenté à la Chambre, vous pourriez alors accélérer le processus législatif en le considérant comme étant lu pour la première fois, et en laissant de côté l'avis et autres formalités, ce que nous faisons avec les avis de motion de voies et moyens. Vous pourriez prévoir une discussion d'une heure en deuxième lecture, parce que vous avez déjà eu une discussion d'une heure sur le principe même, et ensuite suivre la procédure actuelle.
Cela résoudrait certaines des difficultés que vous avez à présent avec les projets de loi qui s'accumulent. Cela permettrait également au leadership de la majorité et parfois, également, de la minorité de s'exercer et leur donnerait une certaine marge de manoeuvre dans la discussion ainsi que dans le vote, si besoin est, mais une fois que la Chambre aurait donné son approbation, le processus législatif suivrait son propre cours.
La présidente: Puis-je vous interrompre un instant? C'est une question que je connais mal, et une leçon de sciences politiques ne pourrait que me faire du bien. Est-ce que vous proposez donc de traiter les affaires davantage comme une motion, et la rédaction du projet de loi n'aurait pas lieu, et tout le temps qui se déroulerait jusqu'après la première heure de débat...?
M. Marleau: Oui, c'est à cela que cela reviendrait plus ou moins: la motion énoncerait l'idée générale du projet de loi, le principe de base, en quelque sorte. Les critères auxquels vous faites appel à présent pour la sélection d'une mesure pouvant faire l'objet d'un vote ne seraient pas nécessairement perdus, parce que les législateurs devraient les prendre en considération quand ils rédigent des lois touchant à la Charte des droits, à la Constitution, etc.
Quant aux questions dont ce comité est saisi quand il choisit un projet de loi qui doit faire l'objet d'un vote, par exemple s'il est opportun de décider d'une semaine du grand-père, les influences politiques pourraient toujours encore s'exercer lorsque vous choisissez la motion qui fera l'objet d'un vote. L'autre option, c'est de décider que toutes les affaires peuvent faire l'objet d'un vote, et de permettre à la Chambre de faire son choix politique là-dessus.
J'y vois deux avantages: vous avez une chance d'accélérer le processus législatif, d'alléger quelque peu la frustration de vos collègues et certainement de réduire la charge de travail.
La présidente: Nous n'existerions plus.
M. Marleau: Vous allez toujours encore exister, mais vous aurez moins de décisions à prendre, moins de sélections à faire et moins de conflits à résoudre. À cet égard c'est une option à envisager, option qui n'est pas tout à fait étrangère à notre procédure, puisque nous l'adoptons pour un avis de voies et moyens. Si un projet de loi était rédigé par la suite, le Président de la Chambre devrait intervenir, tout comme il le fait maintenant lorsque le gouvernement présente un projet de loi qui va au-delà de l'intention de la Chambre sur l'adoption de la motion; on se trouve alors devant une question de procédure, et plus devant une question de fond.
La présidente: C'est là une idée lumineuse.
M. Marleau: Je ne peux pas m'en vanter, elle se trouve dans le Règlement.
La présidente: Faites-le quand même.
Y a-t-il d'autres commentaires, monsieur Montpetit?
M. Camille Montpetit (greffier adjoint, Services de procédure, Chambre des communes): Le dernier tirage au sort a créé un gros problème pour vous, parce que les six mesures qui font l'objet d'un vote sont toujours au Feuilleton, à l'ordre de priorité.
Une façon de débloquer l'ordre de priorité, au lieu d'avoir un autre tirage au sort lorsque 15 articles se sont accumulés, serait d'attendre jusqu'à ce que le nombre ait baissé et soit ramené à 10, peut-être, ou ce qu'il faut pour le comité pour procéder à une sélection des affaires pouvant faire l'objet d'un vote. En attendant un peu plus longtemps vous vous seriez évité le problème de la semaine dernière, qui sortait de l'ordinaire. C'est la première fois, si je ne me trompe, que nous avions une telle accumulation.
Pour éviter cela, vous devriez, je pense, attendre jusqu'à ce qu'il y ait 10 articles, avant de procéder à un autre tirage au sort.
La présidente: Mais pour faire cela nous devrions changer les règles.
M. Montpetit: C'est un changement très simple: vous remplacez le mot «quinze» par «dix».
La présidente: Au lieu de changer une règle pour redresser un problème qui ne s'est pas produit depuis 1984, pourriez-vous nous indiquer d'autres avantages à ce changement? Y aurait-il d'autres avantages, à part le fait de nous assurer qu'une telle chose ne se reproduira plus pendant 10 ans au moins?
M. Montpetit: Non, je n'en vois pas d'autres. Autrefois c'était 20 mesures, puis, avec le dernier Parlement, on a porté ce chiffre à 30, avec un tirage au sort lorsque la liste était ramenée à 15. Nous en sommes toujours encore à 15, ce qui représente au moins trois semaines, en théorie.
Lorsque la liste était plus longue cela retardait les choses, et tout article pouvant faire l'objet d'un vote qui était inscrit sur la liste pour le second tour subissait un retard de plusieurs jours, sinon semaines, avant d'être de nouveau présenté. En limitant la liste à dix articles avant de procéder à un autre tirage au sort, vous accélérez la rotation dans l'ordre de priorité.
La présidente: Vous n'y voyez pas d'inconvénients? Ce serait là un petit changement grâce auquel une telle chose ne se reproduirait plus?
M. Marleau: Le comité se verrait simplement tenu de réagir dans un délai plus court.
La présidente: C'est bien ce que je pensais, mais j'essayais de vous le faire dire.
M. Marleau: Cela diminuerait aussi partiellement la frustration, l'idée ou l'illusion, qu'il arrive à ce comité de laisser traîner les choses pour la simple raison qu'il n'a pas envie de procéder à une sélection. Vous pourriez faire plus de sélections, parce que vous auriez plus de choix, de sorte que les membres auraient l'impression que vous faites plus souvent un plus grand nombre de sélections.
La présidente: Voilà une excellente idée.
C'est seulement la chance qui nous a permis ce matin de faire passer le projet de loi d'Anna Terrana: les débats se sont enlisés, et nous avons donc pu en choisir un et dégager un solide consensus. Ça a très bien marché cette fois-ci, et nous y sommes parvenus.
M. Frazer: Si ce n'est qu'il y avait d'autres projets de loi que nous aurions voulu voir faire l'objet d'un vote, et nous n'avons pu le faire.
M. Marleau: À cet égard, monsieur Frazer, si vous envisagez un recours comme la motion de voies et moyens ou l'ancienne motion de subsides, vous pourriez toujours faire une sélection plus abondante si vous vouliez ajouter plus d'affaires pouvant faire l'objet d'un vote, en ce sens que la Chambre se prononcera de nouveau en deuxième lecture quand elle sera saisie d'un projet de loi. Quand vous choisissez donc la motion, vous adoptez en même temps le principe proposé par le député.
Il se peut que le projet de loi, une fois rédigé, amène la Chambre à prendre une décision toute différente. Je m'aventure ici un peu hors des chemins battus, mais je reçois régulièrement des appels téléphoniques des fonctionnaires me demandant ce que signifie ce projet de loi, à quoi il vise et quelle chance a-t-il d'être adopté. Quand le projet de loi est rédigé il arrive parfois que les fonctionnaires réagissent de façon à influencer le ministre dont relève la question. Plus c'est explicite à cet étape, plus un fonctionnaire habile doit donner une opinion là-dessus.
La présidente: Vous voulez dire qu'il ne nous suffit pas de consulter la boule de cristal?
M. Marleau: Non, la motion vous donnera un peu plus de latitude, en ce sens que la Chambre se prononcera de nouveau en deuxième lecture. Pour dédommager les membres impliqués dans ce processus il vous faudra réduire le temps qu'il faut pour faire passer un projet de loi par les simples députés. Présenter la motion, maintenir les trois heures et réduire trois fois la liste ne feraient qu'ajouter à la frustration. Si vous envisagez cela, il faut le faire en tandem.
La présidente: Précisons bien: si nous adoptions cette idée de motion, vous proposeriez un débat d'une heure à la Chambre.
M. Marleau: C'est exact.
La présidente: À quel moment est-ce que la motion serait présentée à un comité?
M. Marleau: La résolution une fois adoptée deviendrait un mandat d'introduction d'un projet de loi. Vous pourriez rédiger un règlement afin que ce soit un processus automatique comme celui que nous avons pour la première lecture. On pourrait prévoir un certain délai, pas plus de dix jours de séance, par exemple, puis le projet de loi est placé sur la liste pour une deuxième heure de débat pour la deuxième lecture. S'il est adopté en deuxième lecture, il est renvoyé en comité.
Cela revient à dire aux membres que le projet de loi est une fois sur la liste, et qu'il est présenté au comité tout comme cela se passe après la deuxième lecture, mais il suit le même processus, quand il en est fait rapport en troisième lecture. Vous économisez une heure, ce qui revient à donner plus d'accès à votre liste, mais en fait vous avez deux débats sur le principe.
La présidente: Est-ce que vous limiteriez ensuite le temps consacré aux interventions, afin qu'un plus grand nombre de gens puissent participer pendant cette heure-là?
M. Marleau: C'est là un couteau à double tranchant: il faut limiter les discours à dix minutes, excepté pour celui qui présente ou parraine la motion. Plus vous donnez d'occasions aux membres de participer, plus il vous faudra de membres à la Chambre sur ce sujet. Lorsque je parle donc de double tranchant, j'entends par là qu'il vous faut à présent six membres pour occuper une heure. Si vous n'avez que cinq membres, selon ce que vous pensez du projet de loi, il va vous falloir douze membres.
Ce pourrait donc être là un avantage, selon la dynamique de ce débat, mais ce pourrait également être un désavantage...
La présidente: Ce serait aussi une manifestation d'intérêt. Si le but de l'opération est de présenter des projets de loi qui intéressent tous les partis, qui ont une chance d'être adoptés et qui représentent authentiquement les besoins des électeurs dans tout le pays, on devrait être en mesure d'occuper facilement toute une heure.
M. Marleau: Oui, mais en cas d'échec, et si on vote très vite là-dessus par manque d'intérêt, vous n'aurez pas atteint votre but.
La présidente: Que se produirait-il, comment caserait-on un plus grand nombre de votes...? J'imagine qu'il y aurait vote à la fin de cette heure-là?
M. Marleau: Vous augmentez sans doute de un le vote sur la motion, à savoir la résolution originale.
La présidente: Ainsi ce matin nous avons choisi un projet de loi sur huit. Si tous les huit avaient été mis aux voix à la fin de la première heure, nous aurions eu un parcours de montagnes russes.
M. Marleau: On peut présumer que si vous aviez été d'accord en principe sur la résolution, il n'y aurait pas eu de vote aussi fréquent en deuxième lecture. Vous auriez peut-être un débat d'une heure, les gens diraient que c'est approuvé et renvoyé à un comité, qu'ils ont voté là-dessus et qu'ils approuvent le projet de loi.
La présidente: Il me reste une dernière question, monsieur Frazer, avant de vous donner la parole.
Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a participé, en fait, à la rédaction du projet de loi C-69 qui se proposait de modifier les limites des circonscriptions électorales. Envisagez-vous également une participation accrue du comité au peaufinage de ces projets de loi?
M. Marleau: Je sais que ce gouvernement, au début de la session de ce Parlement, avait adopté pour principe de renvoyer les projets de loi, avant la deuxième lecture, au comité afin de faire participer celui-ci davantage à l'élaboration du projet de loi, méthode qui s'inspire en quelque sorte de l'idée que la politique doit jouer plus de rôle dans la législation. Je ne sais pas si moi, en tant que simple député ayant une idée et une proposition à faire là-dessus, voudrait la soumettre à ce genre de débat d'inspiration politique.
Si j'essaie de me mettre à la place d'un député déterminé à faire adopter un projet de loi, je pourrais me retrouver avec un projet de loi tout à fait différent de celui auquel je voulais être associé. Je ne peux pas maîtriser les choses de la même façon que le fait une Chambre majoritaire qui peut, dans une certaine mesure, garantir qu'elle acceptera les conséquences de cette étude du comité.
C'est une dynamique légèrement différente, mais il n'y a pas de raison pour laquelle ce serait impraticable.
La présidente: Je vous remercie.
Monsieur Frazer.
M. Frazer: Je vous remercie, madame la présidente.
Je voudrais être certain de bien comprendre la nature de votre proposition, afin que nous n'ayons pas ici à nous tracasser sur les motions ou projets de loi. Il y aurait donc des motions qui seraient présentées à la Chambre pendant la première heure de débat. Est-ce que la Chambre devrait alors voter là-dessus ou accepter que le projet de loi soit renvoyé alors au comité ou devienne loi? Il faudrait que le vote soit positif, n'est-ce pas?
M. Marleau: Oui, il faudrait un vote positif sur la résolution principale, de même que pour les motions d'avis de voies et moyens. Dans le cas de ces dernières, il n'y a pas de débat, ce ne sont pas des motions sujettes à débat, alors qu'ici nous proposons qu'il y en ait un. Ce serait le principe sur lequel le projet de loi serait ensuite rédigé, puis il reviendrait pour une heure de débat en deuxième lecture. Il pourrait ou ne pourrait pas y avoir de vote. Le vote n'est pas indispensable. Il doit être demandé, pour la plupart des projets de loi, à la deuxième lecture.
M. Frazer: Qui peut demander le vote?
M. Marleau: Il suffit de cinq membres qui demandent le vote lorsque le débat a pris fin, ou bien vous pouvez introduire une procédure d'après laquelle à la fin de cette heure de débat, le projet de loi est censé être adopté. Ne le mettez aux voix que si vous avez un certain nombre de membres qui le demandent - 25, 15, cinq ou n'importe quel autre chiffre. C'est une idée qui figure également au Règlement, de sorte que si vous voulez vous passer du deuxième vote et si vous voulez voir adoptée la notion de 20 membres ou un autre chiffre, vous pouvez sonder la Chambre et dire que c'est censé être adopté à moins qu'une formule ne soit respectée.
M. Frazer: C'est ensuite renvoyé à un comité?
M. Marleau: C'est ensuite renvoyé à un comité et celui-ci fait rapport.
M. Frazer: Notre présidente a proposé que pour impliquer plus de gens, nous pourrions envisager de diminuer le temps disponible.
Nous avons maintenant la prérogative de dire au Président de la Chambre: je veux partager mon temps avec mon confrère que voici. Est-ce également possible avec dix minutes?
M. Marleau: Vous pourriez faire cela pour dix minutes, mais actuellement ce n'est pas autorisé.
M. Frazer: Je le sais bien, mais y a-t-il quoi que ce soit qui l'interdise?
M. Marleau: Il serait très facile de rédiger un article du Règlement aux fins d'autoriser le partage de discours de dix minutes.
S'il y avait tout à coup un plus grand nombre de membres désireux de prendre la parole, tout membre pourrait être autorisé à partager avec un collègue le temps qui lui est alloué. Ce serait très facile.
M. Frazer: Si nous déclarions que toutes les motions présentées doivent faire l'objet d'un vote, à condition qu'elles répondent aux critères énoncés, que nous arriverait-il?
Ce qui me frappe, dans l'ensemble, c'est que vous dépendez des résultats d'un tirage au sort. Si le tirage avait eu lieu et que tous les critères avaient été respectés, qu'arriverait-il si chaque motion pouvait être mise aux voix?
M. Marleau: Là encore il y a l'aspect politique des choses, sur lequel je voudrais me montrer circonspect. Je ne veux pas prédire comment une majorité ou une minorité pourrait réagir, parce que cela dépend souvent du projet de loi dont est saisie la Chambre plutôt que de la procédure.
En effet, une certaine crédibilité est accordée à la procédure actuelle quand un projet de loi est désigné comme devant être mis aux voix par un comité de pairs. Dans ce cas les simples députés soumettent l'un des leurs à certaines procédures, ils se prononcent sur le mérite de ses efforts, du contenu du projet de loi, etc., de sorte que lorsqu'une affaire est désignée comme pouvant faire l'objet d'un vote, elle a une certaine position dans l'ordre de priorité, non seulement en matière de contenu, mais également du fait qu'un groupe de pairs, dans une certaine mesure, l'a sanctionnée.
Si vous décidez que toutes les affaires peuvent faire l'objet d'un vote, cela revient à traiter de la même façon la décision de faire de l'Halloween une fête nationale ou celle de se pencher sur une question fondamentale du droit pénal.
M. Frazer: Mais l'Halloween comme fête nationale répondrait-elle aux critères? On pourrait envisager des critères tels qu'aucun projet de loi sans fondement réel ne pourrait être présenté, car il ne serait pas accepté.
Aujourd'hui, nous étions saisis de huit projets de loi, dont certains excellents, mais en raison des contraintes qui nous sont imposées, nous avons dû arbitrairement les rejeter. Je trouve cela très regrettable. Si celui ou celle qui les a présentés a répondu aux critères pour les soumettre au tirage au sort et que nous avons dû les rejeter sans raisons valables sinon que nous n'avions pas de marge de manoeuvre, cela me paraît là un usage fort peu démocratique.
M. Marleau: Il n'y a pas de solution magique. Le temps dont nous disposons est limité. Je suis d'accord avec vous quand vous dites que la position du gouvernement lorsqu'il se trouve autour de la table du Cabinet est très souvent la même. Le temps qu'il nous reste avant l'ajournement est limité, le nombre de jours est limité. Il y a quatre journées de l'opposition... si seulement nous pouvions les avoir.
Nous sommes donc limités par cette réalité, j'en ai peur. Au lieu de penser en termes de vote, vous feriez mieux de chercher à accélérer les choses, à les simplifier.
M. Frazer: Mais en supposant qu'on ne nous accorde pas du temps supplémentaire pour les affaires émanant des députés, quelle différence cela ferait-il si tous les projets de loi conformes aux critères étaient considérés comme pouvant faire l'objet d'un vote?
M. Marleau: Cela est important dans le contexte du leadership, en particulier du côté de la majorité. Toutefois, je préfère ne pas avancer d'hypothèse.
Une des techniques possibles consisterait à limiter chaque débat à une demi-heure. Pour l'instant, il est d'une heure. Vous pourriez envisager de limiter le débat à une demi-heure pour certaines motions pendant les journées où des motions sont prévues. S'il s'agit d'un projet de loi, ce serait une heure. Cela permettrait de gagner du temps avec les projets de loi, et il semble que ce soit également votre position.
M. Frazer: Vous nous donnez des suggestions sur la façon d'y parvenir, mais je vous demandais quel mal il y aurait à considérer automatiquement que cela peut faire l'objet d'un vote quand la question a été choisie et qu'elle est conforme aux critères?
M. Marleau: Il n'y aurait aucun mal. Mais il faudrait tout de même que quelqu'un décide si c'est conforme aux critères.
M. Frazer: Un comité comme celui-ci, par exemple. On pourrait étudier les propositions et, si elles sont conformes aux critères, on donne suite. Sinon...?
M. Marleau: Je n'y vois absolument aucun inconvénient.
M. Frazer: Cela exposerait au moins certains d'entre nous à la lumière du jour, et on ne pourrait pas dire que le comité des «cafards» se réunit en secret et ne révèle à personne ce qui se passe. Si nous pouvons dire aux gens: ce projet ne respecte pas les critères, pour telle raison, cela met les choses en plein jour et on peut espérer que cela supprimera les sujets de plaintes.
La présidente: Monsieur Montpetit, vous avez une observation?
M. Montpetit: Je crois qu'on vient d'en parler. J'avais une observation au sujet des critères. Les critères actuels sont une création politique. Ils ne sont pas axés sur la procédure. Pour que le projet de loi se conforme bel et bien aux critères, il faudra créer un organisme politique.
Je ne pense pas qu'on puisse décréter que toutes les questions sont considérées comme pouvant faire l'objet d'un vote à condition de se conformer aux critères, et cela en l'absence d'un exercice politique pour déterminer les critères, et ensuite s'assurer qu'ils sont conformes aux exigences du projet de loi.
La présidente: Permettez-moi de donner la parole à M. Langlois également. Nous avons 25 minutes et j'ai un million de questions à poser.
Vous avez quelque chose à demander, monsieur Langlois?
[Français]
M. Langlois: Un des irritants majeurs du Sous-comité des affaires émanant des députés, c'est la loterie. On est élus, on représente en moyenne à peu près 100 000 personnes - dans votre cas, c'est peut-être 200 000 ou 250 000 - et il nous faut passer par ce système de loterie, alors qu'il peut y avoir d'excellents projets de loi qui ne sortent pas du baril et qui disparaissent tout simplement. J'ai beaucoup de difficulté avec cela.
Si ce sous-comité ou un comité analogue devenait un comité permanent et se réunissait régulièrement pour examiner tous les projets de loi qui vont dans le baril, ce pourrait être une solution. Cela pourrait peut-être éviter la frustration et permettre d'avoir les meilleurs projets de loi. Je suis d'accord avec vous qu'il y a toujours une coloration politique. Même si on fait un travail non partisan, on fait aussi un travail politique et on n'est quand même pas déconnectés de la réalité. Est-ce qu'il y aurait possibilité d'éliminer le tirage au sort par un travail accru d'un comité sur les affaires émanant des députés?
Deuxièmement, il y a le problème qui s'est posé au Comité permanent de la justice et des questions juridiques à propos du comité qui a rejeté tous les articles d'un projet de loi et qui a refusé de faire rapport à la Chambre. Là, il y a un problème certain.
J'ai très bien compris la décision de M. Parent selon laquelle la Chambre est toujours maîtresse et peut aller chercher le projet de loi devant le comité mais, comme il y a une majorité qui a refusé en comité, c'est un peu surprenant qu'une autre majorité représentant au moins les mêmes intérêts ordonne au comité de faire rapport.
À mon avis, si le projet de loi a été déclaré votable, qu'il a fait l'objet d'un vote affirmatif en deuxième lecture, qu'il a été renvoyé à un comité et que la totalité ou la grande majorité des articles ont été rejetés en comité, le comité devrait au moins faire rapport à la Chambre, ne serait-ce que pour permettre au proposeur, à l'étape du rapport, de présenter une autre fois ces articles pour que toute la Chambre puisse se prononcer, et non pas un seul comité de 14 personnes qui les a peut-être défaits par un seul vote.
Une autre possibilité serait de permettre le renvoi d'un projet de loi émanant d'un député après la première lecture. La semaine dernière, ou il y a deux semaines, nous avions le projet de loi C-270 de M. Milliken sur les mandats du gouverneur général. Ce projet de loi modifiait, si je ne m'abuse, l'article 30 de la Loi sur la gestion des finances publiques.
On nous a présenté un amendement qui modifiait totalement... Il y avait un seul article. On modifiait l'article 35 et il y avait deux paragraphes. Je n'ai pas soulevé le débat pour des raisons politiques; j'étais en faveur du projet de loi et il y avait un consensus. J'aurais pu, avec plusieurs précédents à l'appui, argumenter longtemps avec M. Zed que l'amendement n'était pas recevable parce qu'on changeait la substance même du projet de loi. Si le projet de loi avait été renvoyé après la première lecture, on aurait eu une ouverture beaucoup plus grande en tant que comité.
On a vu, au cours de cette législature, plusieurs projets de loi qui étaient carrément des projets de loi alternatifs à des projets de loi gouvernementaux à être présentés. Si ces projets de loi avaient été renvoyés après la première lecture, ils auraient pu faire l'objet d'une étude de la part du gouvernement et de la part d'une majorité à un comité, de telle sorte qu'en bout de piste, on serait arrivé à une duplication législative, où un projet de loi émanant des députés aurait été confronté à un projet de loi gouvernemental.
Cela permettrait une interaction beaucoup plus rapide; s'il était possible de faire un débat d'une heure sur notification du député qui demanderait que le projet de loi soit envoyé en comité, le gouvernement pourrait réagir plus rapidement et éviter ces duplications où, d'une part, on fait travailler les conseillers législatifs auprès des députés et, d'autre part, on fait travailler les conseillers législatifs auprès du ministère de la Justice, peut-être deux fois pour rien.
Pour ce qui est de la question des motions, je vais y réfléchir un peu avant de donner mon opinion. Ce ne sera pas aujourd'hui.
Voici une dernière préoccupation, mais non la moindre. Les chiffres que vous avez eu l'amabilité de nous livrer, monsieur Marleau, ont démontré qu'à peu près 60 p. 100 des projets de loi rédigés ne sont jamais déposés. Il y a là un sérieux problème.
Je ne sais pas si vous avez une suggestion à nous faire, mais cela heurte mon sens commun. Si les conseillers législatifs travaillent pour des groupes d'intérêts spéciaux qui font rédiger les projets de loi, c'est une chose. Il faudra cependant avoir une façon de limiter le nombre de projets de loi par député, parce que certains députés ont une bonne production, alors que d'autres ne produisent jamais. Il y aurait peut-être lieu de limiter cela quelque part. Je vous lance cette idée, mais je comprends que la décision est très politique.
Ce sont les points sur lesquels je voulais attirer votre attention et surtout recevoir vos lumières.
M. Marleau: Je ne sais pas si lumière il y aura, mais il peut au moins y avoir une perspective dans ma réponse. À mon avis, votre premier et votre dernier points sont reliés. Vous parlez de la loterie. Les gens sourient lorsqu'on leur explique comment un projet de loi émanant d'un député est choisi en premier lieu et comment il est placé à l'ordre du jour de la Chambre. Par contre, cette loterie existe depuis des années parce qu'il semble que les comités qui se sont penchés sur cette question n'ont pas trouvé le juste milieu pour garantir l'équité d'accès.
Je me souviens qu'en 1988, c'était le projet de loi qui était tiré au sort et non le nom du député. À la première session de 1988, il y a eu au-delà de 100 projets de loi déposés par sept ou huit députés d'une faction politique qui faisaient du front loading, si vous voulez, dans le Feuilleton pour augmenter leurs chances. Effectivement, cela les a nettement augmentées. C'est là qu'on a vu l'abus et la possibilité que tout soit choisi; c'est en fonction de la façon dont on peut remplir le baril qu'on augmente ses chances.
À ce moment-là, on est revenu à la formule où l'on tire le nom et le député choisit. C'est plus équitable, mais c'est encore la loterie. Vous êtes confrontés à des décisions en ce moment sur une question de fond. Vous auriez du mal à choisir entre vous qui aurait le droit de présenter un projet de loi en Chambre. C'est pour ça que vous êtes confrontés à la loterie.
Vous dites que 60 p. 100 des projets de loi rédigés s'évaporent. C'est une question que nous avons étudiée du point de vue administratif. Un sous-comité du Bureau de la régie interne doit se pencher sur toute cette question. Il devra interagir avec le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, parce que d'un côté, on parle de ressources de l'employeur et, de l'autre, du processus législatif qui vous appartient, qui n'appartient pas au Bureau de la régie interne. Il faudra qu'il y ait un dialogue entre vous et la Régie pour voir s'il y a des solutions possibles.
Y aurait-il lieu de fixer des limites assez draconiennes et dire qu'un député a droit à tant de projets de loi au cours d'une législature qu'il pourra utiliser quand il le voudra, selon l'occasion politique, ou de limiter le nombre de fois où il peut présenter une motion à des fins d'utilisation personnelle ou politique, pour afficher un certain courant législatif sans nécessairement utiliser le temps de la Chambre pour un projet de loi?
Deuxièmement, lorsque la résolution a été adoptée par la Chambre, ça devient un ordre de rédiger. À ce moment-là, elle a une certaine priorité sur toutes les autres. Elle ne fait pas la queue comme le font en ce moment ceux qui veulent faire un débat législatif à l'extérieur de la Chambre et ceux qui sont sortis dans le tirage et qui ont accès à l'ordre du jour de la Chambre.
C'est cet équilibre qu'il faut essayer de trouver. Je suis le premier à reconnaître que les députés ont besoin d'un outil plus officiel, quelque chose qui n'est pas nécessairement sous leur en-tête, qui a peut-être fait l'objet d'une première lecture à la Chambre, pour afficher leur rôle de législateur.
Cela fait partie de leur rôle d'élus que de montrer qu'ils peuvent avoir un effet sur l'ordre du jour de la Chambre.
Je reviens aux deux autres points. Le renvoi après la première lecture, c'est plutôt une question politique. Jusqu'à quel point, en tant que parrain du projet de loi, suis-je prêt à me soumettre à cet élargissement possible, selon ma perspective et mes orientations en tant que législateur, sans m'approprier vos fonctions? Je parle du royal we. Je pense que c'est un débat que vous devez faire entre vous.
Pour ce que de l'obligation d'un comité parlementaire de faire rapport sur un projet de loi qui lui a été renvoyé par la Chambre, la décision du Président Parent est là. Je peux vous dire qu'il y a quelque chose qui accroche, au point de vue de la procédure, lorsqu'une créature d'un plus grand corps peut défier ce corps. La Chambre a créé ses comités et leur donne des travaux, avec des instructions parfois très précises, parfois très nébuleuses.
Il y a aussi la notion voulant que, même si un député est le parrain d'un projet de loi, le projet de loi appartient à la Chambre lorsqu'il a fait l'objet d'une deuxième lecture. Il n'appartient plus alors au député. Je sais que c'est confus jusqu'à un certain point. La Chambre est maître de son ordre du jour, et il faut faire attention de ne pas substituer le simple député au microcosme qu'est le comité. Il serait plus logique qu'il y ait une fenêtre pour tester la volonté de la Chambre.
Cela ne demanderait pas un gros changement à la réglementation de la Chambre. Il s'agit d'avoir la volonté politique de le faire. Le Parlement indien, à New Delhi, a une règle qui ordonne à un comité de faire rapport de tout projet de loi dans un délai de 30 jours, à moins que ce comité ne fasse un rapport pour demander plus de temps. Il existe plusieurs techniques de ce genre dans le Commonwealth. Mais il faut avoir la volonté politique de le faire. C'est un débat qui doit se faire entre vous.
Je reviens à un autre aspect qui contribue peut-être au fait que 60 p. 100 des projets de loi sont non utilisés. La frustration des députés quant au processus du Sous-comité des affaires émanant des députés contribue sans doute à cela. Je veux mon projet de loi, mais je ne perdrai pas mon temps à essayer de le faire passer à la Chambre. Je n'aurai pas de chance à la loterie ou je n'ai pas le temps de m'amuser à cela. Même si vous pensez que je vais vous le soumettre pour que vous décidiez s'il est votable ou non, j'ai un autre échéancier et je vais me faire valoir ailleurs. Ça peut contribuer à cela.
Au-delà de la sélection que vous faites sur le fond, sur les mérites d'un projet de loi, vous n'avez pas encore abordé la question de l'attribution de temps. J'y ai fait allusion tantôt en parlant de périodes d'une demi-heure. Il n'est pas impossible, quand vous débattez des mérites d'un projet de loi auquel vous êtes très favorables, que vous décidiez, moyennant un appui dans le Règlement, de lui attribuer une heure au Feuilleton.
Par exemple, si vous pensez que ce projet de loi sera adopté par la Chambre et qu'il n'est pas en conflit avec toutes sortes de choses, vous lui attribuez le mérite d'être votable et vous lui attribuez une heure seulement.
Lorsqu'il est de plus grande envergure et touche à une question nationale, un grand courant social, une question morale, etc., vous lui attribuez trois heures. C'est une autre technique pour faire avancer l'ordre de préséance et permettre à plus de sujets d'être débattus.
M. Langlois: À quelques reprises, monsieur Marleau, nous avons discuté de la possibilité que soit mise à notre disposition une enveloppe de temps que nous pourrions gérer. Je pense qu'on était sur le point de soumettre la question au Comité permanent. Il est certain que déclarer le hockey et la crosse sports nationaux du Canada ou le 25 mai Jour national des belles-mères, ne demande pas, à mon avis, trois heures de discussions. Cela peut se décider en 45 minutes. Il devrait y avoir un fonds d'heures disponibles qui pourrait être réparti en périodes d'une heure, d'une heure et demie, de deux heures ou de trois heures. Peut-être pourrions-nous ainsi aborder plus de projets de loi.
Nous appliquerions aussi les normes que vous mentionniez, c'est-à-dire un ordre d'importance et d'autres critères. Ceux-ci deviennent arbitraires, mais de l'arbitraire, on en a partout, même dans nos cours de justice. Ce sont des principes que les juges extraient de leurs lunettes. C'est la définition de l'équité qu'on nous donnait en droit. Mais on juge souvent en équité. Que fait-on d'autre que d'être équitable envers tout le monde?
Est-ce que cela exigerait une modification majeure au Règlement que d'attribuer au comité une banque d'heures qu'il pourrait gérer en fonction des projets de loi qui lui sont soumis?
M. Marleau: Vous savez déjà que vous disposez de cinq heures par semaine. Présumons que la Chambre n'augmentera pas cette enveloppe. Vous est-il possible politiquement de vendre à vos pairs l'idée de répartir ces cinq heures d'une façon variable afin d'augmenter l'accès tout en maintenant le critère d'équité? Je pense qu'on peut rédiger cela en deux ou trois articles du Règlement, à moins que mon collègue ait des...
M. Montpetit: Ce serait un nouveau concept à intégrer dans le Règlement, mais c'est facilement rédigeable.
M. Marleau: Pour le parti de la majorité, il n'y aurait pas de perte de temps, en ce sens que le gouvernement ne céderait pas une partie de son temps aux affaires émanant des députés. De même, ceux qui seraient perçus comme abusant des affaires émanant des députés seraient vus d'un autre oeil s'ils perdaient un peu de temps pour ce qui... Si un député porte un jugement sur le projet de loi d'un autre, émet un jugement de valeur contre l'autre, cet autre se sentira peut-être moins lésé d'être obligé de consacrer trois heures à sa question qu'il sait importante, alors qu'une seule demi-heure serait consacrée à la fête des belles-mères.
[Traduction]
La présidente: Je vais vous interrompre car il ne nous reste que six minutes.
Vous nous dites que vous pourriez rédiger un projet en ce qui concerne la façon dont ce comité pourrait répartir le temps?
M. Marleau: Oui.
La présidente: J'ai des questions à poser au sujet de la procédure. L'une d'entre elles est de nature politique. Je vais poser toutes mes questions d'un seul coup. Je sais que vous n'aimez pas répondre aux questions à coloration politique, mais peut-être pouvez-vous le faire sur la base de votre expérience.
Certaines personnes ont dit que nous ne devrions pas discuter derrière des portes closes, que nos délibérations devraient avoir lieu en public. Apparemment, c'est toujours ainsi qu'on a procédé, et cela nous laisse beaucoup plus libres de ne pas défendre la position de nos partis respectifs, des projets de loi proposés par nos partis, etc. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Deuxièmement, on nous a accusés également de nous laisser influencer par les whips lorsque nous votons, par exemple dans le cas de la télévision par câble. Quels seraient les problèmes - d'organisation ou autres - d'un vote par appel nominal à la Chambre, non pas par parti, mais alphabétiquement par circonscription? Les députés répondraient par oui ou par non. De cette façon-là, on ne pourrait pas calculer comment le Bloc vote, comment les Réformistes votent et comment les Libéraux votent. De leur côté, les Libéraux ne pourraient déterminer comment les députés votent dans la première rangée. Est-ce que cela poserait un problème d'organisation, est-ce que cela constituerait une injure aux traditions?
Troisièmement, nous remettons fréquemment en question ces critères, mais pour ma part, j'en ai hérité et je continue à les appliquer. Y a-t-il dans ces critères des éléments qui vous semblent problématiques, des choses qui pourraient être améliorées?
M. Marleau: Au sujet de cette dernière question, il est toujours possible d'améliorer les critères sur la base de l'expérience acquise en les appliquant. Je le répète, cela dépasse un cadre strictement juridique, constitutionnel, etc. Votre tâche la plus difficile est de déterminer ce qui est superficiel et secondaire et ce qui ne l'est pas. Quant aux améliorations, elles dépendent du contexte, et je n'ai vraiment rien à dire à ce sujet.
En ce qui concerne un vote par appel nominal qui supprimerait le rôle des whips, dans ma déclaration d'ouverture, j'ai essayé d'expliquer qu'avec notre système le gouvernement exerce une prérogative et est libre de contrôler l'ordre du jour et de gouverner. Toutefois, ce n'est pas forcément ce que je pense. J'ai le plus grand respect pour les convictions du Parti réformiste dans ce contexte également, et je ne veux donc pas prendre position.
Dans l'ensemble, le Règlement de la Chambre joue en faveur du gouvernement, pour lui permettre de gouverner, et la majeure partie des articles du Règlement permettent également à l'opposition de se faire entendre. Par conséquent, vous risquez d'introduire un stress considérable dans le système en suggérant que les whips soient autorisés à supprimer entièrement l'heure réservée aux affaires émanant des députés. En effet, je crois que c'est ce que vous avez suggéré.
À mon avis, on ne changera pas cette dynamique en changeant la façon de voter. On pourrait camoufler cette dynamique, la camoufler au point qu'on ne saurait plus très bien pourquoi tel projet a été adopté ou n'a pas été adopté. La méthode que vous venez de suggérer me semble un peu complexe étant donné qu'il y a toujours des absences pendant les votes. Il ne faut pas oublier non plus que les députés jouent à la chaise musicale, qu'ils se déplacent constamment, ce qui compliquerait encore les choses, sans toutefois rendre cela impossible. Il faut espérer que le vote électronique viendra un jour résoudre un grand nombre de ces problèmes. Pour toutes ces raisons, je ne suis pas certain que ce soit une solution.
À mon avis, le concept des séances à huis clos est un concept que les observateurs des affaires parlementaires, et particulièrement les médias, comprennent très mal. Si ce concept existe, c'est pour une bonne raison, c'est pour permettre aux participants de se mettre d'accord, ce qui est beaucoup plus facile à l'écart des regards des non-participants, à l'écart des regards de tous ceux qui ne participent pas directement au processus.
En fin de compte, après avoir entendu tous les témoins, après avoir entendu toutes les interventions, c'est collectivement que vous devez parvenir à une conclusion. À mon avis, non seulement vous avez le droit de siéger derrière des portes closes lorsque vous préparez votre rapport, mais c'est également une nécessité. Si vous commenciez par délibérer en public, vos délibérations finales à huis clos qui aboutissent à un rapport susciteraient moins de suspicion.
Pour moi, le huis clos est donc un principe fondamental. Le Cabinet ne siège pas en public. Les conseils d'administration des grandes sociétés publiques ne siègent pas forcément en public. Je ne suis pas en faveur d'un gouvernement fermé, mais dans un système qui réunit autour de la même table trois opinions politiques différentes, c'est beaucoup demander à des être humains de leur demander de prendre des décisions pour le bien du pays, de parvenir à des conclusions importantes sans pouvoir se parler librement en privé.
La présidente: Merci beaucoup.
[Français]
M. Langlois: Monsieur Marleau et monsieur Montpetit, je voudrais rappeler qu'en trois ans, qu'il ait été sous la présidence de M. Lee ou de Mme Parrish, ce comité n'est pas parvenu une seule fois à un consensus dans ses rapports. Si nous avions siégé publiquement, il aurait fallu siéger pour la galerie. Il aurait fallu supporter des gens derrière nous qui nous auraient téléguidé les directives des whips. Tout aurait été beaucoup plus long et je suis convaincu que nous en serions arrivés... Je pense que nous aurions à peu près tous abandonné et que le roulement parmi nous aurait été beaucoup plus fréquent. La méthode actuelle n'est peut-être pas idéale, mais elle fonctionne.
Je voudrais seulement vous demander en terminant - je sais qu'il y a un caucus du Bloc québécois et que ces gens sont assez pointilleux en ce qui regarde l'horaire - si ce que j'avais mentionné en comité à propos du vote...
Évidemment, le vote commence du côté ministériel. Vous avez les deux premières rangées et tous les ministres qui votent pour ou contre les projets de loi émanant des députés, ce qui donne tout un lead aux autres députés.
Et si les gens allaient voter à la table! M. Desramaux nous avait déjà expliqué que si le vote se prenait par appel nominal, il ne serait pas possible à la caméra de suivre les députés. Cela ressemblerait à un film de Speedy Gonzales. Toutefois, il serait possible de tout simplement faire apparaître la liste des députés à l'écran, avec la Chambre en fond de scène. On pourrait voir sur la liste quels députés ont voté dans un sens, comme ça se fait au Sénat américain, où les votes sont enregistrés. Je pense qu'il y a une volonté politique et que, du point de vue de la procédure, ce serait adaptable.
M. Marleau: Oui, je pense que la procédure pourrait être facilement adaptée. Les Britanniques votent dans les lobbys, à la queue-leu-leu dans l'ordre où ils se présentent. Avant que les whips annoncent le résultat, à moins de se tenir à la porte, il est très difficile de savoir qui a voté comment.
M. Langlois: Je vous remercie beaucoup, messieurs, du temps que vous avez pris pour nous.
[Traduction]
La présidente: Messieurs, au nom du comité et de tous les députés, je tiens à vous remercier pour tout ce que vous faites. Vous faites un travail remarquable et vous nous avez donné de très bonnes idées sur lesquelles nous devons nous pencher. Si nous avons besoin de renseignements ou de précisions, nous communiquerons avec vous. Merci beaucoup. Votre exposé a été instructif.
M. Marleau: Merci beaucoup.
M. Frazer: Madame la présidente, avais-je bien compris que M. Marleau et M. Montpetit allaient nous donner quelques idées?
La présidente: Ils allaient nous dire comment faire varier les heures prévues pour le débat d'un projet de loi.
C'est ce que vous deviez faire, et ensuite élargir votre première proposition, une proposition que j'ai trouvée plutôt intéressante.
M. Marleau: Voulez-vous un projet pour ces résolutions ainsi qu'un projet sur l'attribution du temps?
M. Frazer: Si cela vous est possible, oui, ces projets seraient très utiles.
La présidente: Ce serait très bien. Merci beaucoup.
Lors de la prochaine réunion, nous allons convoquer les députés qui voulaient faire un exposé - au nombre de cinq - et le bureau de Herb Gray désirait envoyer quelqu'un pour répondre à certaines questions. Nous allons donc tenir une séance dès que la séance normalement prévue à cette heure pour le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre sera annulée. Est-ce que ça va pour tout le monde?
Merci. La séance est levée.