[Enregistrement électronique]
Le jeudi 18 mai 1995
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte.
Le comité continue son examen du projet de loi C-68, Loi concernant les armes à feu et certaines autres armes. Nous reprenons cet après-midi notre entretien avec les fonctionnaires, que nous avions commencé la semaine dernière.
Nous recevons aujourd'hui, du ministère de la Justice, Richard Mosley, c.r., sous-ministre adjoint responsable de la politique pénale et sociale. Il est accompagné de nombreux autres fonctionnaires du ministère de la Justice qui connaissent bien le projet de loi.
Nous accueillons également Mark Connolly, directeur des opérations de l'exécution à Revenu Canada, et d'autres fonctionnaires de Revenu Canada qui nous parleront des questions de contrebande et de questions connexes.
De la Gendarmerie royale du Canada, nous recevons l'inspecteur Mike Buisson, responsable des registres spéciaux, et d'autres membres de la GRC qui connaissent bien ce projet de loi et l'application de la loi.
M. Ramsay invoque le Règlement.
M. Ramsay (Crowfoot): Merci, monsieur le président.
Je propose que le comité veille à ce que le président fasse respecter les règles et les pratiques de notre comité, particulièrement le privilège des députés de discuter des questions dont est saisi le comité, comme il est prévu au Règlement; son droit de poser des questions aux témoins; son droit de demander conseil auprès du conseiller juridique; son droit de demander l'aide du personnel de recherche du comité et son droit de présenter des motions dans sa langue, conformément à l'article 65 du Règlement.
Le président: J'accepte la motion et je vais consulter le greffier pour savoir si elle est ou non recevable. J'ai un doute, parce que toutes ces choses figurent déjà dans nos règles. Si le président ne fait pas respecter les règles et les pratiques d'un comité, on présume que les membres du comité le rappelleront à l'ordre afin que les règles soient appliquées.
C'est la même chose pour le reste. Si le président ne permet pas à un député de poser des questions aux témoins, de demander conseil auprès du conseiller juridique, de demander l'aide du personnel de recherche ou de présenter des motions dans sa langue, il serait rappelé à l'ordre. Mais je vais demander l'avis du greffier.
Tout cela me semble bizarre. Si j'ai dérogé à l'une de ces règles jusqu'ici, il aurait certainement fallu qu'on me rappelle à l'ordre, et, si on l'avait fait, j'aurais été obligé de rendre immédiatement une décision à ce sujet.
Autrement dit, si j'ai empêché quelqu'un de s'exprimer dans sa langue, l'anglais ou le français, il fallait me rappeler à l'ordre. Si j'ai empêché quelqu'un de demander l'avis du conseiller juridique, il fallait me rappeler à l'ordre. De même, pour le droit de poser des questions aux témoins.
Mme Meredith (Surrey - White Rock - South Langley): Cette motion n'est pas présentée à cause de ce qui est arrivé dans notre comité, et nous tenons à dire que le comité a été plus que généreux et que le président a été tout à fait juste.
Malheureusement, dans un autre comité, on s'est moqué des règles, et on les a changées à la dernière minute. On a refusé aux membres du comité la possibilité de présenter des amendements à l'examen article par article. On leur a également refusé la possibilité de discuter des amendements.
Nous voulions qu'il soit consigné au compte rendu que les membres du comité tiennent à ce qu'on continue de respecter les règles établies. Les membres du Parti réformiste veulent dire qu'ils font confiance au président actuel et qu'ils approuvent la façon dont il a jusqu'ici présidé à nos délibérations.
Nous voulions simplement qu'il soit consigné au compte rendu que notre comité continuera de respecter les règles sur lesquelles nous nous sommes entendus. Nous avons eu quelques problèmes dans un autre comité de la Chambre, et nous estimons nécessaire que l'on dise officiellement qu'ici, les règles seront respectées.
Le président: De toute façon, il faut donner un préavis de 48 heures. Je vais demander au greffier de m'éclairer quand il aura demandé conseil auprès de personnes plus au courant de ces choses.
Pour ma part, j'ai l'intention de faire respecter rigoureusement toutes ces règles. Si je m'en écartais le moindrement, j'espère qu'on me rappellera à l'ordre. De toute façon, je vais m'informer et vous en reparler d'ici à 48 heures.
[Français]
M. Bellemare (Carleton - Gloucester): A-t-on le droit de parler au sujet de cette résolution?
[Traduction]
Le président: Nous ne votons pas tout de suite. D'après les règles du comité, lorsqu'une motion est présentée, elle ne peut faire l'objet d'une discussion ni être mise aux voix avant 48 heures. Nous avons adopté cette règle.
J'ai déjà présenté les principaux témoins. Nous ferons comme la semaine dernière. Vous pouvez convoquer à la table les gens de votre ministère qui sont à votre avis le plus en mesure de répondre à la question.
M. Richard Mosley (sous-ministre adjoint, Secteur de la politique pénale et sociale, ministère de la Justice): Une vérification, monsieur le président. Vous avez parlé de M. Connolly, de Revenu Canada, Douanes et Accise. En fait, voici M. Allan Cocksedge, sous-ministre adjoint responsable de l'appareil douanier, et M. Bill LeDrew, directeur général du service de l'exécution. M. Connolly n'est pas ici aujourd'hui.
Le président: Très bien. Sur l'avis de convocation, nous avions le nom de M. Connolly, mais je vois que l'avis de convocation a été mis à jour et porte maintenant les noms de M. William LeDrew, Kathie Pomarankie et John Kiefl.
De toute façon, des employés des Douanes peuvent répondre à nos questions relatives à la contrebande et à l'exécution de la loi à nos frontières.
M. Mosley: En effet.
Le président: Très bien.
Je crois en outre qu'il y a eu des consultations parmi les membres du comité pour que cet après-midi on suspende la règle habituelle des interventions de dix minutes pour chaque parti. Il y aura plutôt une première ronde de questions de cinq minutes pour chaque parti, puis des rondes de cinq minutes, afin que nous puissions poser davantage de questions. Est-ce exact? Y a-t-il consensus à ce sujet? Autrement, nous suivrons la règle habituelle.
Des voix: D'accord.
Le président: Il s'agit donc d'une ronde de cinq minutes par parti, puis des rondes de cinq minutes en alternance entre l'opposition et le gouvernement, afin que l'on puisse poser davantage de questions.
Monsieur Mosley, je ne crois pas que vous ayez d'exposé à faire. Nous avons cet après-midi l'occasion de vous poser des questions.
M. Mosley: En effet, monsieur le président, nous n'avons pas d'exposé. Nous avons toutefois un document à distribuer, en réponse à une question posée par Mme Venne à notre dernière comparution, au sujet de l'organisation et des fonctions du groupe de travail sur le contrôle des armes à feu. Je crois que nous l'avons remis au greffier, qui en fera la distribution.
Le président: Je n'en vois pas moi-même un exemplaire, mais j'espère que le greffier distribuera le document, si ce n'est déjà fait.
[Français]
Monsieur Caron, vous avez cinq minutes. Vous avez la possibilité de poser des questions non seulement aux personnes autour de la table, mais aussi à tous les techniciens et experts qui sont présents ici aujourd'hui pour les questions techniques.
M. Caron (Jonquière): Merci, monsieur le président. Je vais passer mon tour cette fois-ci.
[Traduction]
Le président: Très bien. Nous vous reviendrons plus tard.
Monsieur Ramsay, vous avez cinq minutes.
M. Ramsay: J'aimerais que M. Mosley nous dise quand sera déposé le rapport du ministère du Revenu sur la contrebande des armes à feu. Pouvons-nous espérer le recevoir avant notre départ pour le congé, à la fin de la semaine?
M. Mosley: Je suis content de vous dire que nous prévoyons publier le rapport demain. Je signale également que le rapport est le fruit de divers ministères fédéraux, dont le ministère de la Justice, celui du Solliciteur général et Revenu Canada, Douanes et Accise, ainsi que de divers corps policiers qui ont participé au groupe de travail. Nous nous attendons à ce qu'il soit rendu public demain.
M. Ramsay: Merci.
À votre dernière comparution, Monsieur Mosley, j'ai demandé si vous pourriez nous fournir des documents démontrant que des consultations en bonne et due forme ont eu lieu avec les Cris de la baie James ainsi qu'avec une délégation des Indiens du Yukon.
M. Mosley: Je crois que M. Rock parlera de cette question demain matin et qu'il apportera des documents à ce sujet.
M. Ramsay: Déposera-t-il ces documents demain?
M. Mosley: Je crois que oui.
M. Ramsay: Pour ce qui me reste de mes cinq minutes, j'aimerais que M. Murray Smith s'assoie à la table pour que je lui pose des questions.
Monsieur Smith, bien entendu, je ne suis pas encore convaincu du bien-fondé du système d'enregistrement par la poste. Avez-vous comparu devant des tribunaux en tant que témoin expert, dans des affaires impliquant des armes à feu?
M. Murray Smith (expert scientifique en chef, Armes à feu, Gendarmerie royale du Canada): Oui. J'ai témoigné devant les tribunaux des centaines de fois pendant une quinzaine d'années, sinon plus. En fait, dans mon poste actuel, je suis la personne-ressource des experts en balistique de tout le pays. S'ils ont un problème ou s'attendent à en avoir au sujet d'un type d'examen, ils me consultent souvent.
M. Ramsay: À quand remonte votre dernière comparution devant un tribunal en tant qu'expert?
M. Smith: À environ un an et demi.
M. Ramsay: Est-ce que vous recommanderiez qu'à un moment donné vous-même ou un autre expert en balistique se présente devant les tribunaux avec des preuves qui n'ont pas été vérifiées pour ce qui est de l'identification d'une arme à feu?
M. Smith: L'expert en balistique qui est témoin expert est tenu de répondre aux questions relatives aux faits et en donnant son avis professionnel. Ces avis sont parfois fondés sur des renseignements hypothétiques. Par conséquent, l'expert parle parfois de faits, et parfois de choses qui n'ont pas été prouvées.
M. Ramsay: D'après votre expérience, en tant qu'expert en balistique, seriez-vous prêt à témoigner devant un tribunal au sujet des caractéristiques d'une arme à feu que ni vous ni un professionnel n'a vérifiées? Je parle bien sûr des renseignements inscrits sur la formule envoyée par le propriétaire de l'arme. Pensez-vous que cela pourrait servir de preuve devant un tribunal?
M. Smith: Pour ce qui est des renseignements relatifs à l'arme à feu, je n'aurais pas d'objection à parler de questions relatives à la compatibilité de la marque et du modèle, ni à dire si le numéro de série est plausible, ou ce genre de choses. Je ne pourrais toutefois parler de choses que je ne connais pas ni donner un avis professionnel à leur sujet.
M. Ramsay: Si je vous comprends bien, et je crois que c'est le cas, si vous n'avez pas vous-même examiné l'arme à feu, vous ne pourriez témoigner devant un tribunal au sujet des caractéristiques de l'arme à feu, à partir simplement d'une formule envoyée par la poste.
M. Smith: Eh bien, je ne pense pas que ce soit tout à fait exact. Je serais tout à fait disposé à traiter de cette information qui m'est fournie, à titre de question hypothétique. Je n'ai aucune hésitation à le faire. Mais, évidemment, si, en tant que témoin comparaissant devant un tribunal, on vous pose une question au sujet de laquelle vous ne savez absolument rien, il n'y a pas de moyen d'établir l'exactitude ou la fiabilité de ces données.
M. Ramsay: Voici ma question: le tribunal peut-il s'appuyer sur des renseignements qui n'ont pas été vérifiés par un expert légiste eu égard à l'identification des armes à feu? Si le système d'enregistrement mis en place permet l'enregistrement par voie postale, aucun expert légiste ni aucun expecteur des armes à feu ayant la formation voulue n'aura examiné l'arme à feu, alors que cela se fait maintenant dans le cas des armes de poing qu'on veut enregistrer.
Ne pensez-vous pas que ce genre de système d'enregistrement cause un problème eu égard au témoignage qu'on peut avoir à déposer devant un tribunal?
M. Smith: Normalement, la personne examinant les armes à feu ne serait pas appelée à vérifier les dossiers d'enregistrement. Cela incomberait à quelqu'un du service d'enregistrement des armes à feu, qui prêterait serment au moyen d'un affidavit ou qui comparaîtrait au tribunal.
Le spécialiste des armes à feu intervient en ce qui a trait à la classification de l'arme pour établir à quelle catégorie juridique elle correspond ou pour discuter des caractéristiques de l'arme quant à son bon fonctionnement ou pour établir si la description correspond à celle qu'on en a donnée. Même maintenant, les détails fournis bien souvent ne correspondent pas aux informations présentées à l'expert dans le cadre d'une question hypothétique.
M. Ramsay: Vous m'avez accordé huit minutes. Merci beaucoup, monsieur le président.
Le président: Je juge important que vous meniez à terme cette série de questions.
M. Wappel (Scarborough-Ouest): Je me demande si M. Smith aurait l'obligeance de dire dans quelle catégorie il placerait le Smith & Wesson, le Luger et les quatre armes à feu de calibre .25.
L'objectif qu'a dit avoir le ministre en interdisant certains types d'armes de poing consistait à interdire ce qu'on appelle communément des pistolets de poche, des armes de poing facilement dissimulables. Je me demande si vous pourriez nous décrire les fusils de calibre .25 que vous avez là, la longueur du canon et la longueur totale, d'abord. Ensuite, veuillez me décrire le Smith & Wesson et le Luger en donnant la longueur du canon et la longueur totale. Ensuite, si vous le voulez bien, veuillez mettre l'un ou l'autre des fusils de calibre .25 à côté du Smith & Wesson.
M. Smith: Je n'ai pas mesuré la longueur totale de ces armes à l'avance. Je pourrais trouver ma règle et les mesurer pour vous.
M. Wappel: Je vous en saurais gré.
M. Smith: L'une de ces armes de poing est un pistolet de calibre .25 de marque Bryco Arms. Sa longueur totale est d'environ 125 millimètres. J'ai un pistolet semi-automatique Raven de calibre .25, dont la longueur totale est d'environ 120 millimètres. J'ai un pistolet Beretta de calibre .25, dont la longueur totale est d'environ 128 millimètres. Et j'ai un pistolet automatique Sundance de calibre .25, dont la longueur totale est également d'environ 125 millimètres.
J'ai ici le revolver Smith & Wesson.
M. Wappel: Pourriez-vous fermer la chambre? Est-ce possible?
M. Smith: Celui-ci est un magnum de calibre .44, modèle 629.
M. Wappel: Pourriez-vous fermer la chambre, pour que je puisse voir à quoi ça ressemble? Bien.
Combien mesure-t-il?
M. Smith: Au total, environ 255 millimètres.
M. Wappel: Combien mesure le canon?
M. Smith: Environ 104 millimètres.
M. Wappel: Cette arme serait donc prohibée aux termes de la loi en raison de la longueur du canon.
M. Smith: Actuellement, oui, parce que le canon a moins de 105 millimètres.
M. Wappel: Voulez-vous mettre le Beretta à côté du Smith & Wesson, s'il vous plaît? Pouvez-vous nous parler du poids de ces deux armes?
M. Smith: Le Smith & Wesson est beaucoup plus lourd. Encore là, je n'ai pas d'informations sur le poids précis de ces armes.
M. Wappel: Il a l'air beaucoup plus lourd.
M. Smith: Il est beaucoup plus lourd.
M. Wappel: Qu'en est-il du Luger?
M. Smith: La longueur totale du Luger est d'environ 235 millimètres, et le canon mesure environ 100 millimètres.
M. Wappel: De quand date ce Luger?
M. Smith: Celui-ci date de 1918. Il a été fait par DWM.
M. Wappel: C'est donc une arme de la Première Guerre mondiale.
M. Smith: Oui.
M. Wappel: Cette arme serait aussi interdite en vertu de la loi en raison de la longueur du canon?
M. Smith: C'est exact.
M. Wappel: Voulez-vous le placer à côté du Beretta? Combien pèse-t-il?
M. Smith: Encore là, le Luger est beaucoup plus lourd.
M. Wappel: Bien.
M. Smith: Je pourrais vous fournir les poids exacts si vous le voulez. Je ne m'attendais pas à cette question.
M. Wappel: Non, ça va.
En langage clair, pourrait-on dire du Luger ou du Smith & Wesson qu'il s'agit de pistolets de poche?
M. Smith: Généralement pas, bien que cette expression soit très vaguement définie. Je dirais quant à moi qu'un pistolet de poche est une arme à feu relativement petite, facile à dissimuler et généralement, mais pas toujours, assez peu chère.
M. Wappel: Compte tenu de vos propres critères, diriez-vous que le Luger ou le Smith & Wesson sont des pistolets de poche?
M. Smith: Non.
M. Wappel: Il n'y a donc pas d'autre raison, selon votre définition, pour les interdire, sinon que ces armes ont un canon de moins de 105 millimètres.
M. Smith: C'est exact.
M. Wappel: Combien de temps me reste-t-il , monsieur le président?
Le président: Vous en êtes à votre dernière minute.
M. Wappel: J'aimerais alors passer la parole à quelqu'un d'autre, jusqu'au prochain tour, étant donné que ma question a trait à l'interdiction des fusils par décret.
Merci beaucoup, monsieur Smith.
[Français]
Le président: Monsieur Caron, avez-vous des questions?
M. Caron: Oui, s'il vous plaît. Est-ce qu'il y a quelqu'un parmi les experts présents qui pourrait me donner des renseignements sur le système d'enregistrement qui doit débuter en 1998? Oui? On sait que cela débutera en 1998 pour se terminer en 2003. Selon votre expérience, est-ce qu'il y aurait, sur le plan logistique, des difficultés à commencer l'opération d'enregistrement en 1996 pour qu'elle se termine deux ans plus tôt, en 2001, c'est-à-dire accélérer le processus d'enregistrement pour tous les types d'armes à feu?
[Traduction]
M. Mosley: Je pense qu'il serait extrêmement difficile de se préparer à entamer l'enregistrement de toutes les armes à feu en 1996. Le plan annoncé le 30 novembre et dont il est tenu compte dans le projet de loi déposé le 14 février prévoit une mise en application qui se ferait de façon progressive, à commencer par le plan de délivrance de permis en 1996, et le plan d'enregistrement en 1998, et l'on accorderait ensuite une période de mise en application de cinq ans pour chacun de ces volets.
Pour tenter d'accélérer l'enregistrement des armes d'épaule pour qu'il commence en 1996 il faudrait ajouter d'importantes ressources additionnelles aux capacités dont nous disposons pour l'instant. Et même là je doute que nous y parviendrions.
[Français]
M. Caron: Quelles seraient les principales difficultés? Vous instaurerez une structure pour l'émission des permis et, si je comprends bien, deux ans plus tard, vous aurez une organisation pour l'enregistrement. Qu'est-ce qu'il y a de si difficile dans l'organisation d'un système d'enregistrement? Est-ce une question de logistique, d'ordinateurs, d'automatisation, de personnel ou de fonds? Pourquoi serait-il si difficile de commencer un peu plus tôt?
[Traduction]
M. Mosley: Cela dépend de diverses variables, comme la conception du système. Nous sommes en train de nous en occuper maintenant. Nous devons ensuite concevoir le système pour enregistrer toutes les armes à feu et ensuite le mettre en place. C'est une vaste entreprise, et je ne pense pas qu'il soit faisable de tenter de le faire dans un si bref délai.
[Français]
M. Caron: Vous dites que vous avez déjà commencé à analyser tout cela, mais sans dire que vous avez fait des expériences. Vous savez qu'il est impossible de commencer avant 1998 parce qu'il est impossible de le faire au niveau des localités et des différents services. Quelle est la grande difficulté? Est-ce concevoir un système informatique pouvant uniformiser tout cela ou déterminer qui procédera à l'enregistrement dans différents endroits? Quelle serait la plus grande difficulté?
[Traduction]
M. Mosley: Il serait peut-être bon de convier à la table mon collègue, M. Paul Trottier, qui pourrait vous parler abondamment des exigences du système.
M. Paul Trottier (agent, Groupe de travail sur le contrôle des armes à feu, ministère de la Justice): La stratégie adoptée pour entamer la délivrance des permis en 1996 et l'enregistrement en 1998 visait à nous donner suffisamment de temps pour mettre en place l'infrastructure - pour établir tous les liens de communication avec les forces policières, qui en bout de ligne vont s'occuper de l'enregistrement des armes à feu. Le système d'enregistrement est conçu de manière à simplifier les processus qui existent déjà.
Aux étapes de planification, quand nous préparions nos plans stratégiques, on pensait qu'il ne serait pas possible de le mettre en place avant 1998. Le pays est trop grand. Il y a de trop nombreuses forces policières. Nous avons besoin de temps pour nous assurer de le mettre en place et de bien le faire du premier coup.
Le président: J'aimerais poser une question maintenant. J'en aurai d'autres plus tard.
Ce matin, j'ai été étonné d'apprendre - et j'aimerais en avoir la confirmation - qu'au cours de la Seconde Guerre mondiale il y avait un système d'enregistrement pour toutes les armes d'épaule, les fusils et les carabines. Pourriez-vous nous en parler un peu plus? Comment a-t-on fait pour enregistrer toutes ces armes à cette époque? En vertu de quel pouvoir l'a-t-on fait? Et est-ce que ce fut une réussite ou un échec? Pourrait-on en savoir davantage?
M. Mosley: Je ne peux pas répondre parfaitement à cette question et j'ai l'impression que la GRC ne le peut pas non plus. J'ai néanmoins quelques renseignements sur la façon dont on s'y était pris.
Si je me souviens bien, monsieur le président - et je m'excuse de ne pas être mieux préparé à répondre à cette question - cela s'est fait en vertu de la réglementation concernant l'état de guerre qui avait été adoptée au cours de cette période, et il s'agissait d'un système local entièrement manuel qui n'a pas connu un grand succès et auquel on a finalement renoncé même avant la fin de la guerre.
Le président: Merci. Je vais peut-être en profiter pour poser d'autres questions.
Certains témoins qui ont comparu ce matin ont mentionné la possibilité de la propriété conjointe. Ils nous ont donné des exemples non seulement de cas de maris et de femmes qui sont les propriétaires conjoints d'armes de valeur, parfois pour des compétitions de tir, mais aussi des exemples de personnes qui héritent de telles armes et qui en deviennent par conséquent les propriétaires conjoints.
Ils voulaient savoir pourquoi la loi ne pouvait pas prévoir la propriété conjointe. Y a-t-il une raison à cela?
M. Mosley: Comme vous le savez, monsieur le président, il faudrait que chaque propriétaire ait un permis pour se servir de l'arme.
Le président: D'accord, mais supposons que les deux propriétaires obtiennent un permis. Ne pourrait-ils pas obtenir que l'arme soit enregistrée au nom des deux propriétaires conjointement?
M. Mosley: Sur le plan administratif, c'est plus simple d'avoir un seul propriétaire enregistré par arme à feu. C'est la principale raison pour laquelle le projet de loi est rédigé de cette façon.
Le président: Nous devrions sans doute approfondir la question, parce que nos collègues nous ont donné plusieurs exemples de cas de ce genre qui se produisent non pas seulement lors de l'achat ou de l'acquisition d'une arme, mais aussi par suite d'un héritage. Il peut arriver que des frères et des soeurs ou d'autres personnes héritent de toute une collection d'armes à feu.
M. Mosley: Si je ne m'abuse, le système actuel de la GRC permet l'enregistrement conjoint d'armes à feu à autorisation restreinte.
Le président: Je vois.
Ce sera ma dernière question pour l'instant. Il y avait un comité consultatif chargé de suivre l'application du dernier projet de loi sur le contrôle des armes à feu, le C-17, je pense. Certains députés ont proposé d'établir un comité consultatif du même genre cette fois-ci.
Pouvez-vous me dire combien de temps le dernier comité consultatif a continué d'exister? Quand l'a-t-on dissous? Avez-vous pu déterminer s'il a été une réussite ou non? A-t-il été utile pour l'établissement de règlements d'application?
M. Mosley: Le conseil consultatif avait été créé pour une période de trois ans qui s'est terminée, si je me rappelle bien, soit en décembre 1993, soit en janvier 1994.
Quant à savoir s'il a été efficace, je peux dire qu'il a conseillé l'ancien gouvernement au sujet de questions d'ordre pratique. Il était formé de représentants d'associations de propriétaires d'armes à feu, de personnes qui s'intéressaient au contrôle des armes à feu et d'autres personnes.
Il a été utile, notamment pour élaborer le système de points utilisé pour les décrets du conseil interdisant certaines armes à feu. Ce système a été mis au point de concert avec le conseil consultatif.
De façon générale, monsieur le président, je dirais que l'ancien gouvernement s'est servi du conseil consultatif pour essayer ses idées et obtenir des conseils pendant cette période de trois ans.
Le président: Merci.
M. Ramsay: Vous pourrez peut-être me répondre, monsieur Mosley. J'ai essayé sans succès de trouver quelque chose dans le projet de loi. Cette chose y est peut-être, mais peut-être qu'elle n'y est pas.
Si le projet de loi est adopté et si le propriétaire d'une arme à feu - et il y en a environ 3 millions au Canada - présente une demande pour obtenir un permis aux termes de l'article 5 du projet de loi et ne satisfait pas aux exigences, cela veut dire qu'il n'obiendra pas de permis. Qu'arrivera-t-il à son arme à feu?
M. Mosley: Selon les dispositions actuelles du Code criminel, qui sont reprises dans la partie III du projet de loi, quelqu'un qui viole la loi en ayant en sa possession des armes à feu peut s'en défaire dans un délai raisonnable.
À ma connaissance, on n'a pas défini exactement ce que signifie «dans un délai raisonnable». De toute façon, cette disposition permet à ceux qui se trouvent dans une telle situation de se défaire de leurs armes à feu.
Si quelqu'un a en sa possession une arme et ne peut obtenir un permis, il peut soit rendre les armes inopérantes, soit les remettre à la police, soit les vendre à quelqu'un qui a les autorisations nécessaires, soit les donner à un musée, soit, si possible, les exporter et les vendre à l'étranger.
M. Ramsay: S'il ne pouvait faire rien de tout cela, qu'arriverait-il? Les armes seraient-elles confisquées?
M. Mosley: Elles finiraient par être confisquées, en effet, mais ce sont les autorités locales qui décideraient quand cela arriverait et de combien de temps la personne disposerait avant qu'on en arrive là.
M. Ramsay: Bien entendu, s'il ne peut pas obtenir un permis aux termes de la loi, j'imagine, à première vue, que c'est parce qu'il ne doit pas posséder d'armes à feu. Peut-être a-t-il commis un acte de violence, a-t-il souffert de maladie mentale ou a-t-il déjà commis des actes de violence autour de chez lui.
Combien de temps laisseriez-vous une arme en sa possession pour lui permettre de s'en défaire soit en la vendant, soit en la donnant à un musée, soit en l'exportant?
M. Mosley: Cela dépend sans doute des circonstances. Si la raison du refus laissait entendre que le fait de continuer à posséder des armes à feu pouvait constituer un danger ou un risque pour le public, je pense que le délai serait très court. Le contrôleur ferait probablement des démarches pour obtenir une ordonnance qui permettrait la saisie des armes à feu et qui interdirait à cette personne de posséder des armes à feu.
M. Ramsay: D'après votre définition, il me semble que ce serait la seule chose à faire de toute façon, parce que je ne connais aucune autre raison qui empêche quelqu'un de détenir un permis.
Ce que j'essaye de dire, c'est que si quelqu'un ne peut pas obtenir un permis parce qu'il pose un danger pour le public, comme le stipule l'article 5, la seule solution pour les autorités serait de lui retirer les armes à feu. Ce serait manifestement dangereux de laisser les armes en sa possession.
M. Mosley: C'est probablement exact dans la plupart des cas. Il peut cependant se présenter des cas où le contrôleur juge que ce n'est pas une bonne chose de donner un permis de possession à quelqu'un, mais où l'on peut prendre des mesures pour permettre à cette personne de se défaire des armes ou de les rendre inopérantes sans être obligé de les saisir. Par ailleurs, s'il y a manifestement un risque pour le public, les autorités locales préféreraient sans doute agir rapidement plutôt qu'attendre.
M. Ramsay: Dans un tel cas, il me semble qu'il pourrait y avoir confiscation sans indemnisation. Est-ce exact? Si quelqu'un ne peut pas obtenir un permis parce qu'il a un casier judiciaire ou a déjà souffert de maladie mentale ou commis des actes de violence, la seule chose que pourrait faire la police serait de saisir les armes à feu sans offrir d'indemnisation au propriétaire.
M. Mosley: C'est plus ou moins exact. Je souligne que, pour l'instant, on ne prévoit pas d'indemnisation lorsqu'une ordonnance d'interdiction est rendue contre quelqu'un qui doit ensuite se débarrasser de ses armes à feu. Le projet de loi ne prévoit aucun changement à ce sujet.
Il y a toujours un grand nombre d'ordonnances d'interdiction. J'oublie combien, mais je pense que c'est quelque chose comme 30 000 ou 40 000. Ceux qui sont visés par ces ordonnances sont tous dans le même cas, puisqu'ils doivent se débarrasser rapidement de leurs armes à feu, sinon elles seront saisies sans qu'ils reçoivent d'indemnisation.
M. Ramsay: Merci.
M. Easter (Malpèque): L'un des aspects les plus controversés du projet de loi, surtout dans les régions rurales du pays, a trait à l'obligation d'enregistrer les armes à feu, sans quoi on se retrouve avec un casier judiciaire.
Pourriez-vous nous dire quelles sont les conséquences d'avoir un casier judiciaire? Qu'est-ce que cela veut dire au juste? Je sais ce que cela signifie pour un camionneur qui essaie d'entrer aux États-Unis, mais quelles sont les conséquences de choisir une telle sanction comme méthode d'application de la loi?
M. Mosley: Je ne suis pas expert en la matière. Peut-être qu'un représentant de la GRC pourrait mieux vous répondre.
Un casier judiciaire entraîne certaines conséquences évidentes pour l'emploi. Dans la plupart des cas, vous ne pourrez pas obtenir de caution si vous avez un casier judiciaire. Cela peut aussi vous nuire si vous êtes à la recherche d'un emploi et si un employeur vous demande si vous avez déjà été trouvé coupagle d'un délit quelconque. En outre, comme vous l'avez dit, cela peut vous nuire si vous voulez déménager, ou même, dans certains cas, visiter les États-Unis ou d'autres pays.
M. Easter: Quels seraient les autres mécanismes qu'on pourrait utiliser pour encourager les gens à enregistrer leurs armes, à part la possibilité d'avoir un casier judiciaire?
M. Mosley: Cela touche à la politique, et je préférerais ne pas répondre à une telle question.
Le président: Monsieur Easter, nous avons cet après-midi l'occasion de poser des questions aux experts, aux techniciens et aux fonctionnaires au sujet de l'administration et de questions techniques. Nous allons pouvoir discuter demain matin avec le ministre des considérations de politique.
M. Easter: M. Ramsay a parlé tantôt de rendre les armes inopérantes, et c'est une question qu'on me pose souvent. Quand juge-t-on qu'une arme est rendue inopérante et comment doit-on procéder à cela?
M. Mosley: Je pense que M. Smith est mieux en mesure que moi de répondre à cette question.
M. Smith: Il n'y a pas actuellement de définition dans la loi d'une arme à feu rendue inopérante. Une arme à feu est rendue inopérante lorsqu'elle cesse d'être une arme à feu.
C'est en bonne mesure au contrôleur local qu'il incombe de décider quand une arme à feu a été suffisamment endommagée pour qu'elle ne constitue plus une arme à feu. Par ailleurs, la GRC a publié dans le Manuel national des armes à feu des normes qui donnent en détail la façon de procéder pour rendre inopérantes divers genres d'armes à feu pour qu'on soit certain qu'elles seront considérées comme étant inopérantes. La façon de procéder est très détaillée.
M. Easter: Où puis-je me procurer ces renseignements?
M. Smith: Il faut s'adresser à son contrôleur local.
M. Easter: Merci.
[Français]
Le président: Monsieur Caron, vous avez un autre tour de cinq minutes.
M. Caron: Le projet de loi C-68 impose comme condition d'obtention d'un permis de possession d'arme l'obligation de ne pas avoir de rapports avec une personne sous le coup d'une ordonnance d'interdiction. Est-ce que vous pourriez m'éclairer sur la signification du mot «rapports»? Est-ce que ce sont des relations de famille, des relations d'amitié, des relations professionnelles? D'après vous, qu'est-ce qu'on entend par le terme «rapports» utilisé au paragraphe 7(5)?
[Traduction]
Mme Irit Weiser (avocate-conseil, Politique pénale, ministère de la Justice): Je suis Irit Weiser, et je travaille au ministère de la Justice.
Habituellement, pour obtenir un permis, il faut avoir suivi le cours de sécurité nécessaire. Si quelqu'un fait l'objet d'une interdiction, il faut reprendre ce cours de sécurité avant de pouvoir obtenir un nouveau permis pour se servir d'une arme à feu.
Il y a cependant deux exceptions à cela. D'abord, là où l'interdiction est levée pour fins d'emploi ou d'alimentation, auquel cas le préposé aux armes à feu peut, à sa discrétion, exiger que cette personne suive un autre cours ou non. Ensuite, il n'est pas requis de suivre un cours de maniement d'armes à feu si l'interdiction vient de ce que l'on vit avec quelqu'un de dangereux. Il y a interdiction tout simplement pour que la personne dangereuse ne puisse mettre la main sur l'arme à feu.
[Français]
M. Caron: Vous dites que vivre avec quelqu'un de dangereux est le sens du mot «rapports» à l'alinéa 7(5)b). On dit:
- b) d'une ordonnance d'interdiction parce qu'il habite ou a des rapports avec...
- L'exemple que vous me donnez, c'est habiter avec une personne qui est dangereuse, mais
on ajoute «a des rapports». De quel genre de rapports s'agit-il?
Mme Weiser: Lorsqu'on dit «avoir des rapports avec», cela a été précisé à cause de ces situations où les gens, par exemple, tiennent magasin ensemble, mais que l'un des associés est sous le coup d'une interdiction. Nous voulions tout simplement nous assurer que l'autre associé n'avait pas d'armes à feu sur les lieux. Voilà ce qu'on veut dire par «avoir des rapports avec».
[Français]
M. Caron: Ne trouvez-vous pas que le mot «rapports», dans ce cas-là, peut être très large? Cela peut dépendre de l'interprétation. Dans vos réponses, vous avez évoqué le cas d'une personne qui habite avec une autre. Là c'est le cas d'un associé, mais ce pourrait aussi être quelqu'un qui a des amis qui sont dans cette situation. Ce pourrait être très large. Je m'interroge sur le sens exact qu'on peut donner au mot «rapports».
[Traduction]
Mme Weiser: Une interdiction, dans ces circonstances, ne pourrait être imposée qu'en vertu du paragraphe 111(1) de la partie III du Code criminel. Cependant, avant de ce faire, la personne sous le coup de l'interdiction, la personne dangereuse, doit soit avoir, soit pouvoir avoir accès aux armes à feu de son associé. Donc, il ne s'agit pas de n'importe quel ami ou associé; il doit y avoir des circonstances telles qu'il est possible que la personne sous le coup d'une interdiction pourrait avoir accès aux armes à feu de son associé.
[Français]
M. Caron: Donc, c'est dans ce sens que ce terme sera interprété. On peut comprendre que c'est quelqu'un qui demeure dans la même résidence. L'interprétation du mot «rapports» implique une proximité physique, où une personne sous le coup d'une interdiction peut avoir accès à une arme qui appartient à quelqu'un d'autre. Ce n'est pas simplement une relation professionnelle, amicale, familiale ou d'affaires. Il va falloir que ce soit plus précis.
[Traduction]
Mme Weiser: C'est exact. La personne sous le coup de l'interdiction doit avoir accès, ou pouvoir avoir accès, aux armes à feu de cet associé.
M. McKinnon (Brandon - Souris): Suite à la dernière question de M. Ramsay, j'aimerais avoir un éclaircissement sur cette histoire de confiscation. En réponse à cette question de M. Ramsay, si vous vous en rappelez le détail, nous avez-vous fait état de ce que pourrait être la situation en vertu des dispositions du projet de loi C-68, ou s'agissait-il des règles actuelles établies en vertu du projet de loi C-17?
M. Mosley: Je parlais de la façon dont les dispositions du projet de loi C-68 s'appliqueraient, mais si je vous ai donné cette réponse, c'est parce que je sais ce qui se passe en vertu des dispositions actuelles du Code criminel.
On fait preuve de souplesse à l'égard d'une personne qui est propriétaire d'une arme à feu d'une grande valeur et pour qui la perte serait considérable. On cherche le moyen d'éviter de détruire tout simplement l'arme à feu. Il y a eu des cas où la police avait demandé une ordonnance d'interdiction et où le tribunal, l'ayant accordée, n'en a pas moins permis au défendeur de prendre le temps de se débarrasser de son arme à feu, c'est-à-dire de la vendre. Il semble que cela ait été satisfaisant, bien que le propriétaire ait dû laisser son arme à feu à la police pendant qu'il cherchait un acheteur. Ce genre d'aménagement s'est révélé satisfaisant.
M. McKinnon: Je vous dirais que les dispositions du projet de loi C-68 ne changeront rien à cela. Autrement dit, si le projet de loi C-68 n'avait jamais existé, les choses se passeraient ainsi de toute façon.
M. Mosley: Oui, mais même si on ne s'attend pas à un grand nombre de refus, parce que tout propriétaire d'armes à feu devra désormais demander un permis, des gens que les autorités n'auraient jamais repérés auparavant pourront peut-être être identifiés; plus de gens vont être directement touchés.
M. McKinnon: Certains de mes commettants m'ont parlé du cas de ceux qui auraient acheté ou acquis des armes à feu quand ils étaient dans la vingtaine, armes dont ils se seraient servis pour chasser avec des amis ou des collègues jusqu'à la quarantaine, après quoi ils les auraient rangées et ne s'en seraient plus servis depuis 20 ans. Selon vous, sont-ils obligés de suivre le cours sur la sécurité des armes à feu et peuvent-ils jouir des droits acquis prévus actuellement dans les dispositions du projet de loi C-68?
M. Mosley: Selon moi, s'ils n'ont nullement l'intention d'acquérir d'autres armes à feu, ils ne sont pas obligés de suivre le cours sur la sécurité. Il faut qu'ils demandent un permis de possession d'arme à feu, et qu'ils enregistrent leurs armes. C'est tout.
M. McKinnon: Que leur arrivera-t-il s'ils ne peuvent pas produire une autorisation d'acquisition d'armes à feu telle qu'elle existe actuellement?
M. Mosley: Même en l'asence d'une AAAF actuellement, dans la mesure où ils n'ont pas l'intention d'acquérir d'autres armes, le nombre des étapes qu'ils doivent franchir est très réduit.
M. Ramsay: Je poursuis dans la même veine. Prenez le cas d'une personne qui possède des armes à feu depuis 25 ou 30 ans sans jamais les avoir utilisées illégalement. Lors des vérifications prévues à l'article 5, on pourrait découvrir qu'au cours des cinq années précédentes cette personne a eu des prises de bec avec ses voisins et qu'elle a proféré des menaces à leur endroit; cette personne pourrait alors se voir refuser un permis aux termes des dispositions de cette loi.
Je reviens sur le même scénario que tout à l'heure. Cette personne pourrait perdre ses armes à feu même si elle ne les a jamais utilisées illégalement. Qu'elle en possède une collection ou tout simplement quelques-unes, elle risque de les perdre toutes.
Ne pensez-vous pas qu'une personne qui serait dans ce cas-là, qui saurait qu'elle risque de se voir refuser un permis, serait portée à l'inobservation?
M. Mosley: Je voudrais rappeler que la détermination de l'admissibilité de quelqu'un prévue au paragraphe 5(1) se fondera sur les critères énoncés au paragraphe 5(2), mais ces derniers ne sont pas absolus. Il existera une certaine latitude.
Je pense que l'on peut se fier au bon sens des préposés aux armes à feu, qui connaissent bien le milieu où ils vivent, et dans bien des cas ils connaîtront sans doute les demandeurs de permis. Ainsi, il est peu probable que des incidents isolés soient interprétés hors contexte, et nous pouvons compter sur eux pour que les critères soient appliqués avec discernement.
Toutefois, s'ils décidaient qu'un permis ne peut pas être délivré, il est entendu que le demandeur pourra se prévaloir des dispositions d'appel prévues dans la loi et demander à un juge de la cour provinciale de revoir la décision du préposé aux armes à feu.
La décision sera laissée à la discrétion du préposé, et nous croyons qu'il fera preuve de bon sens. Toutefois, la possibilité d'en appeler de la décision existe toujours si le demandeur n'en est pas satisfait.
M. Ramsay: Il est souvent question du pouvoir discrétionnaire laissé à un agent de police. J'ai déjà été agent de police. J'affirme - et je tiens à le dire - que si l'on donne à un agent de police le pouvoir d'agir, il va l'exercer.
Permettez-moi de vous donner un exemple. Je viens de lire l'histoire d'une dame de plus de 50 ans qui vit seule. Ses armes à feu étaient suspendues au mur, et un voisin les a remarquées en regardant par la fenêtre. Il les a signalées à la police.
Cette dame gagne sa vie en livrant des journaux. Pendant qu'elle faisait sa ronde, elle a été interpellée par deux voitures de police, elle a été arrêtée et elle a passé la nuit en prison. Rentrée chez elle, elle a constaté que toutes ses armes à feu avaient été enlevées, que la porte de sa maison avait été défoncée, son réfrigérateur renversé. Bref, toute la maison était absolument sens dessus dessous. Il a fallu un an avant qu'elle puisse récupérer ses armes à feu.
S'agissant de discrétion et de la façon dont les agents de la paix réagiront dans certains cas, il faudrait se rappeler l'exemple de cette grand-mère de 67 ans qui du jour au lendemain se retrouve en contravention de la loi. En donnant des pouvoirs aux agents de la paix, il faut bien comprendre jusqu'où peut aller l'exercice de ces pouvoirs. Je tenais à dire cela.
Je voudrais vous poser une autre question maintenant. Quelqu'un qui sait qu'une vérification sur son compte peut mettre au jour qu'il a participé à une bagarre dans un bar ou à des scènes de violence, ou peut-être qu'il a proféré des menaces de violence, ne sera-t-il pas incité à l'inobservation?
Qu'en pensez-vous? En effet, en respectant les dispositions de la loi, il risque qu'on lui refuse un permis à cause de ses antécédents. Il risque de perdre toutes ses armes à feu, ou encore de devoir les modifier de sorte qu'elles cessent d'être des armes à feu. N'est-ce pas plausible?
M. Mosley: Je ne saurais vous dire, voire faire des conjectures sur la façon dont les gens vont se comporter. On peut supposer, la nature humaine étant ce qu'elle est, que certaines personnes s'inquiéteraient de la possibilité de se voir refuser une demande. En revanche, ces dispositions pourraient inciter bien des gens qui ne souhaitent plus garder leurs armes à feu à s'en défaire et à renoncer à faire la démarche pour l'obtention d'un permis.
J'aurais vraiment du mal à vous dire quelle attitude l'emporterait dans ce cas-ci, puisque nous n'avons pas l'expérience de l'exécution et de l'administration de ces propositions.
M. Wappel: Je voudrais demander à M. Smith de revenir un peu en arrière.
Monsieur Smith, vous êtes le principal expert légiste pour les armes à feu au laboratoire judiciaire central de la Gendarmerie royale du Canada, n'est-ce pas?
M. Smith: Oui.
M. Wappel: Combien d'années d'expérience avez-vous en matière d'armes à feu?
M. Smith: Comme expert légiste, 18 ans.
M. Wappel: Lors de votre témoignage précédent, vous nous avez énuméré trois critères qui définissent qu'une arme peut être considérée comme un pistolet de poche, dit «Saturday night special».
Pouvez-vous nous dire quelle est la longueur moyenne d'une arme que l'on pourrait définir couramment comme un pistolet de poche?
M. Smith: Avant de répondre, je voudrais dire deux choses. Tout d'abord, il n'y a pas de définition universelle de ce qui constitue un pistolet de poche en particulier. La définition que je vous ai donnée correspond à ce que l'on entend couramment par «Saturday night special», mais vous trouverez d'autres définitions.
Deuxièmement, la configuration d'une arme à feu est évolutive. Il est impossible de regrouper les armes à feu en catégories suivant leur taille. Une gamme peut commencer par une arme très courte à laquelle on ajoute quelques millimètres pour obtenir un modèle qui, au bout du compte, peut être très gros. Si je vous donnais un chiffre précis, ce serait arbitraire.
M. Wappel: Oui, je comprends. C'est toujours difficile de fixer la démarcation.
M. Smith: Prenez par exemple le pistolet de poche que j'ai apporté aujourd'hui, celui que l'on appelle le «Saturday night special». On peut dire qu'ils mesurent en général environ 150 millimètres, mais je vous ai aussi montré une autre arme dont la carcasse est beaucoup plus grosse.
M. Wappel: Merci beaucoup.
Je voudrais poser à M. Mosley une question que j'ai posée précédemment.
Pouvez-vous nous expliquer la démarche que l'on a suivie et qui a abouti à faire du Benelli M3 Super 90, un fusil de chasse automatique ou à pompe, une arme prohibée? Pouvez-vous nous dire comment la chose s'est déroulée depuis le début jusqu'à la décision? Comment cela s'est-il fait?
M. Mosley: Comme je l'ai dit, le Conseil consultatif canadien des armes à feu, en consultation avec les chefs provinciaux et territoriaux des préposés aux armes à feu et, si je ne m'abuse, M. Smith, a recommandé qu'on établisse certains critères et un barème donnant à chacun des critères une certaine valeur, afin d'identifier les armes à feu qui pourraient être déclarées prohibées par décret.
On a procédé ainsi pour la première fois dans le cas des ordonnances d'interdiction qui ont été rendues après le projet de loi C-17. Ainsi, un type d'arme à feu qui accumulait un total de 50 points devenait susceptible d'être analysée pour qu'on puisse déterminer s'il était opportun de la prohiber ou d'en faire une arme à utilisation restreinte par décret.
M. Wappel: Qui a pris la décision dans le cas du Benelli? Comment en est-on arrivé à s'occuper de cette arme? Était-elle mise en marché au Canada? S'agissait-il d'une arme dont on faisait la promotion? Comment en est-on arrivé à s'en occuper au point de lui accorder 50 points?
M. Mosley: Nous l'avons repéré dans un certain nombre de revues qui annonçaient sa mise en marché et sa possibilité d'importation au Canada. Par exemple, dans la septième édition, 1995-1996, de ce catalogue, le International Law Enforcement Catalogue, on en trouve la description illustrée, et il s'agit d'un Benelli M3 Super 90, un fusil de chasse convertible à usage particulier.
Ce modèle particulier - je ne sais pas si vous pouvez voir d'aussi loin; je vais vous le faire passer - est à crosse pliante, et c'est un des critères utilisés pour calculer le nombre total de points.
Sauf erreur, c'est la Gendarmerie royale qui a vanté les mérites de cette arme au ministère de la Justice autant pour les simples opérations de maintien de l'ordre que pour les interventions antiterroristes. Nous avions discuté de cette arme et d'un certain nombre d'autres lors d'une réunion pendant l'été 1994 avec les chefs provinciaux et les chefs territoriaux des préposés aux armes à feu.
Le Benelli M3 Super 90 s'est vu attribuer un certain nombre de points du fait qu'il était semi-automatique et avait un chargeur à sept coups et, selon les modèles, une poignée de pistolet et une crosse pliante. Toutes ces caractéristiques lui valaient un total de 90 points. Il occupait donc un rang élevé pour ce genre d'arme.
M. Wappel: Monsieur Mosley, je m'excuse. Je suis en train de comparer les deux images, et quand je dis «les deux images» je me réfère au document publié par le ministère de la Justice intitulé Armes prohibées par les ordonnances de 1994.
Il est évident que vous venez de nous montrer un fusil à crosse pliante, à poignée pistolet. À mon avis, l'image de l'arme prohibée par ordonnance ne ressemble aucunement à celle que vous venez de nous montrer. Cette arme ressemble à un simple fusil sans poignée pistolet et sans crosse pliante.
Ce n'est pas l'arme montrée sur cette image, mais plutôt l'arme montrée dans le document du ministère de la Justice, donc de votre ministère, qui m'intéresse. Il n'est pas question d'un chargeur tubulaire à six ou à sept coups; on dit simplement que c'est un fusil semi-automatique ou d'un fusil à pompe de calibre 12.
C'est de cette arme que je vous parle. Ne convenez-vous pas avec moi qu'elle ne ressemble aucunement à l'image que vous m'avez montrée?
M. Mosley: Si, mais c'est une arme différente.
Le président: Je tiens à ce qu'une réponse soit apportée à vos questions, monsieur Wappel, mais votre temps est terminé.
Cependant, j'aimerais en finir, et je vous autorise à répondre.
M. Mosley: M. Wappel m'a posé une question sur le M3, arme différente du M1.
M. Wappel: Voilà ce qui est écrit: «Benelli M3 Super 90, fusil automatique ou à pompe. Prohibé. Propriétaires indemnisés.»
Le président: Nous pourrions peut-être clarifier la question avant la fin de la réunion. J'aimerais qu'elle soit clarifiée. Mais nous pouvons passer entre temps à autre chose.
M. Wappel: Nous nous sommes arrêtés à mi-chemin. Cette arme s'est vu attribuer 90 points, mais je ne sais pas si c'est celle-là qui a eu les 90 points ou celle que vous nous avez montrée.
Le président: Pourriez-vous vérifier pour que nous sachions une bonne fois pour toutes?
M. Mosley: Je peux le faire immédiatement si vous le voulez, monsieur le président.
Le président: Très bien.
M. Mosley: C'est du M3 que je viens de parler. Le M1 est un modèle différent du fusil Benelli. Il peut lui aussi s'adapter en fonction des utilisations.
Pour ce qui est de l'ordonnance initiale de prohibition, une modification publiée le 20 décembre 1994 exemptait certains modèles de Benelli M1 Super 90. Il s'agissait des modèles destinés aux simples opérations policières par opposition aux opérations tactiques.
Le président: Vous dites être arrivés à 90 points. Comment êtes-vous arrivés à 100 points?
M. Wappel: En d'autres termes, monsieur le président, que faut-il, une fois arrivé à 90 points, pour qu'une arme finisse par être prohibée?
Le président: Exactement.
M. Mosley: Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, nous avions consulté les chefs provinciaux des préposés aux armes à feu pendant l'été 1994. À la suite de cette réunion, nous avons préparé un rapport pour le ministre de la Justice, qui s'en est servi pour faire ses recommandations au gouverneur en conseil.
[Français]
Le président: Monsieur Caron, vous avez une autre question?
M. Caron: Il y aurait effectivement une question concernant les pouvoirs de visite et d'inspection des policiers. Ça concerne les articles 98 et suivants. Pourquoi, selon vous, en ce qui concerne l'application de la loi, les pouvoirs de perquisition déjà édictés dans le Code criminel ne sont-ils pas suffisants? Pourquoi faut-il augmenter les pouvoirs des policiers qui, à certains égards, paraissent bien plus importants que ce qui est indiqué dans le Code criminel?
En somme, pourquoi ne pas se contenter de ce qui est déjà édicté dans le Code criminel en ce qui concerne les pouvoirs d'inspection?
[Traduction]
M. Mosley: Si j'ai bien compris votre question - et je vous prie de rectifier si je me trompe - vous parlez des articles 98, 99 et suivants, à partir de la page 41, relatifs aux visites, par opposition aux perquisitions et aux saisies.
Comme je l'ai indiqué lors de ma dernière comparution devant votre comité, les pouvoirs de perquisition et de saisie en tant que tels sont virtuellement identiques dans ce projet de loi aux pouvoirs de perquisition et de saisie existants. Ce qui est nouveau, ce sont ces pouvoirs de visite qui vont au-delà des pouvoirs de visite actuels relatifs aux entreprises et aux collectionneurs.
Étant donné que son objectif principal est la sécurité publique et que, de par sa nature même, ce projet de loi a des retombées réglementaires très importantes, nous avons estimé opportun d'accorder des pouvoirs de visite comparables à ceux qu'on retrouve dans un très grand nombre d'autres lois fédérales et provinciales. Nous avons une liste de quelque 50 lois comportant des dispositions qui sont virtuellement identiques à celles de ces pouvoirs de visite.
Ce ne sont pas des pouvoirs de perquisition et de saisie. Si la police a des raisons de croire qu'un délit est sur le point d'être commis et que cela concerne les armes à feu et que la preuve de ce délit peut être trouvée à un certain endroit, elle doit faire une demande de mandat de perquisition avant d'intervenir.
Les articles 98 et suivants décrivent plutôt la procédure suivie par la police. Chaque fois qu'elle aura des doutes quant au respect de la réglementation, elle procédera simplement à des visites de routine.
Le président: J'ai encore une ou deux autres questions à vous poser.
Les provinces du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta ainsi que le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest ont indiqué leur opposition à cette loi. Pourriez-vous nous dire si les autres provinces vous ont indiqué, soit par écrit, soit oralement, leur appui pour cette loi?
M. Mosley: Au cours de l'année dernière, nous avons tenu un certain nombre de réunions à la fois formelles et informelles avec des représentants des provinces. Le ministre a rencontré à deux reprises ses homologues provinciaux, et à ces occasions plusieurs positions ont été exprimées sur les propositions de ce projet de loi concernant les armes à feu.
Je ne pense pas que je puisse révéler lesquelles des provinces ont exprimé leur appui pour cette loi. Ces réunions étaient confidentielles.
Le président: Je vois. Vous me suggérez donc de poser cette question au ministre demain?
M. Mosley: Vous pouvez toujours, mais je crois qu'il se sentira dans la même position que moi.
Le président: M. Bartlett me rappelle que nous avons reçu une lettre du ministère ontarien de la Justice, du ministère du Procureur général, indiquant son soutien pour cette loi. Mais je vais attendre à demain pour poser la question au ministre. Je pensais que vous aviez peut-être quelque chose de plus précis et officiel par écrit au ministère.
Mon autre question fait suite à celles posées par M. Ramsay, entre autres, à propos de la confiscation d'armes qui au départ étaient à autorisation restreinte et sont devenues prohibées, ou qui n'étaient ni à autorisation restreinte ni prohibée, mais sont devenues prohibées.
Je crois savoir que dans certains cas les propriétaires ont été indemnisés. Je crois que des indemnisations ont été versées en 1993-1994. M. Mosley secoue la tête.
M. Mosley: Non.
Le président: J'aimerais être sûr. Quelqu'un nous a dit, lors d'une de nos audiences, qu'il y avait eu indemnisation lorsqu'il n'y avait pas eu d'autres moyens de se débarrasser de ces armes devenues prohibées. Est-ce vrai? Dans l'affirmative, pourriez-vous nous spécifier dans quelles circonstances de telles indemnités ont été versées?
Dans les exemples cités par M. Ramsay et par d'autres, lorsque l'arme devient prohibée, le ministère ou les autorités aident-ils le propriétaire à la vendre à l'étranger pour en tirer quelque chose?
En d'autres termes, les armes ont été achetées en toute légalité, et ce n'est que par la suite qu'elles ont été prohibées. Je comprends fort bien cette nécessité de les prohiber dans certaines circonstances, mais il me semble en contrepartie que nous devrions peut-être aider les intéressés à ne pas tout perdre, soit en les compensant, soit en les aidant à se débarrasser de ces armes pour en tirer un peu d'argent.
Voudriez-vous me dire ce que fait le ministère ou s'il y a quelqu'un, au niveau provincial ou autre, qui est censé aider ces gens?
M. Mosley: Je commencerai par votre question sur les indemnités, et je demanderai ensuite à M. Hayes de m'aider. Je suis pratiquement certain qu'aucune indemnité n'a été versée à la suite des ordonnances de prohibition rendues par l'ancien gouvernement.
Pour ce qui est des ordonnances qui devaient entrer en vigueur en janvier, la décision avait été prise d'indemniser les possesseurs d'armes à feu non visés par la clause des droits acquis.
Le président: C'est de cela que je veux parler.
M. Mosley: Je pense qu'il n'y a eu encore aucun versement de ce genre.
Le président: Combien d'armes à feu cela concerne-t-il et de quelle somme s'agissait-il?
M. James Hayes (coordinateur, Groupe de travail sur le contrôle des armes à feu, ministère de la Justice): À la fin de décembre le ministre, dans son annonce, a offert une indemnisation pour les armes à feu prohibées non visées par la clause des droits acquis, et c'est le ministère de la Justice qui versera cette indemnité.
Le président: Je vois. Est-ce qu'il y a un poste prévu dans le budget?
M. Hayes: Oui. Les sommes émargeront au poste budgétaire du programme des armes à feu.
Il y avait environ vingt armes à feu enregistrées dans le système d'administration et d'enregistrement des armes à feu de la Gendarmerie royale, et quand cette ordonnance a été publiée un avis a été envoyé par la Gendarmerie royale à tous les propriétaires, les informant de la procédure à suivre pour se faire indemniser et des reçus et des documents à fournir.
Les autres armes à feu incluses dans l'ordonnance n'étaient pas des armes à autorisation restreinte. Il nous faudra prolonger la période d'indemnisation jusqu'à ce que soit mis en place un programme d'information qui permette d'informer tous les propriétaires de ces armes des délais à respecter. Ils seront indemnisés.
Pour ce qui est des programmes antérieurs ou des réorientations en matière d'interdiction ou de restriction, à ma connaissance, et ces dernières années en tout cas, il n'y a eu aucune indemnisation parce qu'aucun des décrets n'obligeait quiconque à remettre son arme.
J'ajouterai aussi ceci, monsieur le président. Il y a eu plusieurs programmes d'amnistie. Aucun de ceux-là ne prévoyait d'indemnité, même si 20 000 armes à feu ont été remises aux autorités policières.
Le président: Vous aurez constaté que plusieurs membres du comité s'inquiètent - cela est apparu encore ce matin lorsque des députés ont comparu devant nous - de la perte que quelqu'un pourrait subir si une arme passait de la catégorie restreinte à la catégorie des armes prohibées. Même si l'arme est protégée par la clause des droits acquis, son propriétaire finira quand même par y perdre.
Évidemment, les gens oublient qu'ils peuvent vendre l'arme. Notamment aux États-Unis, si elle a du prix. Ce matin, on nous a donné l'exemple d'une arme très prisée.
J'imagine qu'il existe un marché à l'étranger. Est-ce que le gouvernement ne pourrait pas aider ces gens-là? Nous les obligeons à se départir de leurs armes. Ne pourrait-il pas les aider à au moins rentrer dans leurs frais, ce qui rendrait la loi plus acceptable pour la population?
Je ne fais que penser tout haut. J'essaie de me souvenir de ce que nous avons entendu au comité de la bouche des députés.
M. Mosley: L'amnistie qui avait été accordée par décret avait pour but de venir en aide à ceux qui avaient été lésés par les décrets du mois de janvier. Pour cette raison, je pense que le gouvernement pourrait déclarer une amnistie pour permettre aux personnes touchées de se départir de leurs armes.
Votre argument a du bon, monsieur le président. Souvent, le marché de ces armes est plus intéressant à l'extérieur du pays.
Le président: Si l'arme est interdite, il n'y aurait plus aucun marché au Canada.
M. Mosley: Si elle est protégée par les droits acquis, les règles applicables aux armes de cette catégorie permettraient peut-être la vente de l'arme à l'intérieur de cette catégorie. Autrement dit, elle pourrait être vendue à quelqu'un qui possède déjà une arme de même catégorie.
J'insisterais toutefois sur le fait qu'il est bien délicat pour le gouvernement de faciliter la vente d'armes. C'est déjà très controversé. Par exemple, lorsqu'un service de police change d'armes à feu, que fait-il de son ancien stock? On a chaudement débattu de l'idée de le confier à un distributeur qui, mettons, le revendrait à un autre pays.
Il ne m'appartient pas de dire ce que le gouvernement devrait ou non faire, mais je veux seulement signaler que cela comporte des inconvénients.
Le président: Ce sont de bons arguments, et je vous en remercie. J'essayais seulement de trouver une façon de venir en aide à ces gens-là.
Mme Meredith: Je voudrais faire suite aux questions de M. Wappel. L'histoire des 50 points m'a déroutée. J'aimerais mieux comprendre comment sont fixés les critères de ce système.
Vous avez parlé du Conseil consultatif canadien des armes à feu. Combien de personnes le compose et comment deviennent-ils membres de ce conseil?
M. Mosley: Ce conseil n'existe plus. Il avait été créé pour trois ans à l'époque du projet de loi C-17, ou de son précédesseur, le projet de loi C-80, pendant la législature précédente. Son mandat a expiré à la fin de 1993.
Pendant son existence, le conseil a notamment recommandé l'adoption d'un système à points. Le seuil, c'est 50 points. En-deçà, l'arme ne serait ni prohibée ni restreinte. Au-dessus, le cas est étudié.
Voici comment l'on procède: nous consultons la GRC, qui nous indiquera quelles armes font problème.
Nous demandons aussi aux chefs provinciaux des préposés aux armes à feu ce qu'ils pensent de certaines armes. Des avis sont ensuite préparés et présentés au ministre, qui choisit la recommandation qui sera faite au gouverneur en conseil en vue du décret.
Mme Meredith: Cela fait 10 chefs provinciaux des préposés aux armes à feu. Dans le saint des saints de la GRC, qui décide ce qui doit être prohibé ou restreint?
M. Mosley: Je précise qu'aucune de ces personnes ne peut prendre la décision. Les propositions adressées au gouverneur en conseil sont faites par le ministre de la Justice.
Mme Meredith: Puis une seule personne décide s'il y a lieu de réglementer l'arme. Autrement dit, une personne ajoute ou enlève un critère au système à points.
M. Mosley: Au bout du compte, c'est un comité du Cabinet qui prend la décision, mais en fonction de la recommandation du ministre.
Mme Meredith: Ce que je veux savoir - et je ne tiens pas de vous une réponse très claire - c'est combien de personnes participent au choix des critères. C'est ce qui aboutit au système à points qui fait qu'une arme est prohibée ou restreinte en vertu du règlement. Est-ce qu'il s'agit du ministre de la Justice, qui ne sait peut-être rien des armes à feu? Est-ce lui qui prend la décision?
Est-ce qu'il s'agit des 10 chefs provinciaux des préposés aux armes à feu, qui, eux, en connaissent un bout? Est-ce eux qui font les recommandations avec une poignée d'agents de la GRC?
J'aimerais savoir combien de personnes préparent ces recommandations et qui a le dernier mot. Est-ce que tous ces gens-là représentent des vues équilibrées, ou y a-t-il une quinzaine de personnes qui sont toutes du même avis et qui ne contestent donc pas les vues des autres?
M. Mosley: Ce n'est pas aussi subjectif que la question le laisse entendre. Le système à points porte sur les caractéristiques de l'arme à feu. Par exemple, si la capacité du chargeur pour des munitions à percussion annulaire est de dix coups, cela vaut cinq points; 20 coups, c'est dix points; plus de 20 coups, c'est 20 points.
Viennent ensuite d'autres caractéristiques, comme la longueur totale, la longueur du canon, la crosse: pliante ou coulissante, tenon de baïonnette ou baïonnette pliante, cache-flammes ou non, poignée de transport, poignée-pistolet antérieure ou postérieure.
Après examen de l'arme, le total des points est fait. S'il dépasse 50, on étudie la possibilité de faire une recommandation au ministre. À ce stade-là, même s'il peut y avoir une certaine subjectivité, personne en particulier n'est appelé à prendre de décisions. On dégage plutôt un consensus sur la proposition à faire.
Mme Meredith: Mais il y a bien quelqu'un qui fait des recommandations pour dire que c'est la longueur du canon plutôt que la longueur de l'arme qui sert à déterminer quelle arme de poing sera interdite ou non la prochaine fois. Quelqu'un doit bien recommander que tout ce qui fait entre 120 et 250mm de longueur tombera dans la catégorie des armes prohibées. Il y a bien quelqu'un qui doit faire ces recommandations.
J'essaie de savoir dans quelle mesure l'information est équilibrée. Est-ce qu'ils se disent qu'il faudrait retenir 4 pouces ou 105mm plutôt que de dire, comme M. Brown l'a recommandé, que 150mm, c'est la longueur d'arme moyenne que l'on pourrait retenir pour interdire toutes les armes de poche. Car on a des armes dans la liste des armes prohibées qui ne semblent pas être à leur place.
J'aimerais savoir comment sont formulées ces recommandations, si elles sont équilibrées, ou si tout le monde est du même avis et se dit: mettons-les toutes dans le même sac.
M. Molsey: Je dois préciser que je parle du système d'évaluation des armes à feu militaires et paramilitaires. Ce système ne s'applique pas à la décision prise concernant les armes de poing qui seraient prohibées selon les propositions qui ont été déposées. Il s'agit d'une question de politique, et il vaudrait peut-être mieux poser la question au ministre de la Justice.
[Français]
M. Bellemare: Je suis heureux de siéger au Comité aujourd'hui à titre de substitut. Ce qui m'intéresse, ce sont les frontières. J'aimerais poser des questions sur les frontières.
Le président: Nous avons ici des témoins pour répondre à ce genre de questions.
M. Bellemare: Est-ce que le secteur des Douanes et Accise est assez bien équipé pour vraiment contrôler les frontières aux douanes?
M. A.J. Cocksedge (sous-ministre adjoint intérimaire, Direction générale des services frontaliers des douanes, Revenu Canada): Parlez-vous du contrôle général ou du contrôle des armes à feu?
M. Bellemare: Des armes à feu. On parle des armes à feu aujourd'hui.
M. Cocksedge: Nous avons ciblé depuis longtemps beaucoup de biens prohibés, dont les armes à feu. Nous avons conçu, surtout au cours des trois ou quatre dernières années, de la technologie, par radar ou autre, pour faire la vérification des individus ou, dans le cas d'importations commerciales, des camions ou des conteneurs en vue de déceler l'existence de...
M. Bellemare: Alors, vous avez la technologie pour déceler les armes à feu dans des camions ou ailleurs.
M. Cocksedge: C'est ça.
M. Bellemare: Avec l'Accord de libre-échange signé par le dernier gouvernement, on risque de ressembler aux pays d'Europe, de devenir un pays où les douanes n'existeraient plus, où le douanier n'existerait plus et où l'employé responsable de déterminer si la personne est Canadienne ou Américaine n'existerait plus. En Europe, présentement, on passe les frontières comme on le veut. Croyez-vous qu'avec l'Accord de libre-échange, il y a un risque que les frontières n'aient plus de barrières un jour?
M. Cocksedge: Même avant l'arrivée des ententes de libre-échange, le risque de contrebande existait, avec les camions et les avions. Dans nos efforts à la frontière, nous devons trouver un certain équilibre. Nous devons à la fois faciliter le commerce et nous concentrer sur la contrebande. L'Accord de libre-échange nous permet de libéraliser le traitement de documents ou l'inspection à des fins commerciales ou tarifaires, parce qu'il y a de moins en moins de tarifs. De plus en plus, cela nous permet de libérer nos effectifs pour qu'ils se puissent se concentrer de plus en plus sur la question de la contrebande proprement dite.
En Europe, de plus en plus, surtout à la frontière européenne comme telle, les pays européens font des efforts beaucoup plus poussés, avec une technologie comme celle qu'on a au Canada, pour viser la contrebande, parce que le contrôle à des fins commerciales est de moins en moins important.
M. Bellemare: Mais si les camions ont le droit de passer la frontière à toute vitesse, comment votre équipement peut-il déceler les...
M. Cocksedge: D'abord, il y a un ciblage qui doit se faire. Le ciblage est de plus en plus basé sur une meilleure qualité de renseignements sur les mouvements criminels et sur les sources des armes qui peuvent être passées en contrebande à la frontière.
M. Bellemare: Il y a un endroit très susceptible d'avoir des problèmes de frontières, et c'est la réserve des autochtones près de Cornwall. J'oublie le nom de la réserve, mais je me souviens d'avoir vu des reportages américains qui indiquaient que même le New York State Police refusait d'aller dans cette réserve. Ils disaient que les autochtones, tant canadiens qu'américains, possédaient des stocks d'armes qui leur permettraient de combattre une armée.
Donc, le New York State Police refuse d'entrer là. Comment allez-vous contrôler le transfert ou la contrebande d'armes à feu à travers cette réserve? D'ailleurs, avant de terminer, je dois ajouter que cette réserve est située à la fois dans le Québec, l'Ontario et l'État de New York.
M. Cocksedge: Premièrement, il faut préciser que la responsabilité du contrôle de la frontière entre ports d'entrée est celle de la GRC. Revenu Canada, secteur Douanes, est responsable du traitement des voyageurs et des importations commerciales uniquement aux ports d'entrée et aux aéroports. En ce qui a trait au contrôle entre les ports d'entrée, c'est uniquement la GRC qui en est responsable, et je pense qu'ils seraient mieux en mesure que moi de répondre à cette question.
M. Bellemare: Est-ce que cela veut dire qu'une autre personne pourrait répondre à ma question?
Le président: Monsieur Bellemare, nous avons déjà discuté de ces questions. Beaucoup de députés ont déjà posé ces questions. Vous pourriez peut-être les poser plus tard, mais ce serait une répétition.
Monsieur Caron, avez-vous des questions?
M. Caron: J'ai une question relative aux droits que les gens doivent acquitter pour l'enregistrement.
Actuellement, dans le Code criminel, on prévoit que les personnes qui vivent de la chasse ne sont pas tenues de payer des droits relatifs aux permis de possession d'armes à feu. Est-ce que cette disposition du Code criminel continuera de s'appliquer? Si oui, combien de personnes au Canada bénéficient d'une telle exemption parce qu'elles sont réputées vivre de la chasse?
[Traduction]
M. Mosley: La réponse à la première question est oui, cette disposition demeurera en vigueur.
Je ne pense pas pouvoir répondre à la deuxième question, car c'est une question qui relève du préposé aux armes à feu locales. Que je sache, il n'y a pas de statistiques sur le nombre de fois que la disposition a été utilisée.
On me dit que ces chiffres figurent peut-être dans le rapport annuel de la GRC. Nous allons nous informer, et si possible, nous vous donnerons une réponse plus complète.
[Français]
M. Caron: J'ai une question à propos de l'alinéa 110t), où on parle de prévoir des modalités d'application particulières de certaines dispositions de la loi ou des règlements en ce qui concerne les peuples autochtones du Canada.
Si je comprends bien, ce n'est pas une mesure qui permet d'exempter ces populations de la loi ou des règlements. C'est plutôt une question de modalités, de la façon dont la loi va s'appliquer à ces populations-là. C'est à l'alinéa 110t).
Deuxièmement, j'aimerais que vous me donniez votre définition de «peuples autochtones du Canada». Est-ce que c'est une réserve? Est-ce que que cela concerne les Indiens inscrits au sens de la Loi sur les Indiens?
[Traduction]
M. Mosley: Nous croyons savoir que le terme est suffisamment large pour englober et les Indiens inscrits et les Indiens non inscrits - y compris ceux qui habitent hors réserve - les Métis et les Inuits.
[Français]
M. Caron: Cela signifierait qu'on pourrait l'appliquer aux Indiens non inscrits.
C'est large. Ça fait beaucoup de monde. Au Canada, c'est peut-être l'ensemble de la population. Si on prend les Indiens inscrits plus les Métis, plus les Indiens non inscrits, ça fait pas mal de gens.
[Traduction]
Le président: L'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 précise que les peuples autochtones comprennent les Indiens, les Inuits et les Métis du Canada. C'est une définition très large.
[Français]
C'est dans la Constitution de 1982.
[Traduction]
M. Wappel: Combien de personnes y a-t-il actuellement au ministère de la Justice pour s'occuper de l'examen des armes à feu pour déterminer le nombre de points.
M. Mosley: Je dirais trois ou quatre, peut-être même six, au ministère de la Justice. Il y a aussi le personnel responsable du système d'enregistrement des armes à feu et les experts en armes à feu de la GRC. Au total, je ne pense pas que cela fasse plus d'une douzaine de personnes.
M. Wappel: Qui décide que le nombre de points doit être de 50, ou qu'il faudrait le ramener à 40 ou 30?
M. Mosley: Les points sont fonction des caractéristiques de l'arme à feu. C'est une simple addition, personne ne prend de décision.
M. Wappel: Mais vous nous avez déjà dit qu'il y avait 50 points et qu'ensuite on examinait la situation pour voir s'il fallait interdire l'arme, mais que si c'est moins de 50, on ne le fait pas.
Qui décide que c'est 50 points? Comment est-on arrivé à ce chiffre? Pourrait-on le ramener à 40 ou à 30 demain?
M. Mosley: C'est sur la base des renseignements fournis par les experts de la GRC qu'on a établi ce chiffre.
M. Wappel: Merci. Je vous demanderais maintenant de vous reporter aux pages 9 et 10 du projet de loi C-68. Nous commencerons par la page 9.
L'article 10 concerne les transporteurs, qui sont autorisés à obtenir un permis de port de diverses armes à feu. Il y a ensuite le paragraphe 11(3) à la page 10. À quoi sert-il puisqu'on a déjà l'article 10?
Mme Weiser: L'article 10 concerne simplement les transporteurs interprovinciaux et internationaux. Actuellement, les transporteurs qui veulent transporter des armes à travers le Canada doivent obtenir un permis de transport de chaque province.
Le projet de loi permettrait aux transporteurs interprovinciaux ou internationaux d'obtenir un permis de transport pour l'ensemble du territoire canadien. Ils ne seraient pas obliger de passer par chacune des autorités territoriales ou provinciales.
M. Wappel: Très bien, mais à quoi sert le paragraphe 11(3)?
Mme Weiser: Le paragraphe 11(3) s'applique à tous les transporteurs. Normallement, une entreprise ne peut pas détenir de marchandises interdites, à moins d'avoir un motif bien précis. Les transporteurs sont un cas particulier, puisqu'il doivent transporter certaines choses d'un endroit à un autre. En général, ils ne font rien des armes à feu, ils transportent simplement des boîtes. Nous avons donc voulu nous assurer que les transporteurs pourraient obtenir un permis de transport de biens interdits.
M. Wappel: Mais les articles 5 et 10 le prévoient déjà, non? L'article 10 est peut-être limité aux transporteurs interprovinciaux et internationaux. Si c'est le cas, pourquoi? Pourquoi ne pas combiner les deux articles, pourquoi en avoir deux?
Mme Weiser: Je pourrais vous répondre plus précisément quand je les aurai examinés. Nous avons établi une procédure pour les transporteurs et ensuite quand nous avons dû...
La plupart des transporteurs obtiennent leur permis auprès du contrôleur des armes à feu provinciales. Dans le cas des transporteurs internationaux ou interprovinciaux, nous avons simplement dit que les conditions qui s'appliquaient à un transporteur à l'intérieur d'une province s'appliqueraient aussi au cas des transporteurs internationaux ou interprovinciaux qui pourraient obtenir le permis auprès du directeur.
Je peux vous donner les articles qui disent simplement que le directeur peut émettre des permis pour le transport international ou interprovincial exactement de la même façon qu'un contrôleur des armes à feu provincial.
M. Wappel: Vous pourriez peut-être nous les montrer quand nous allons arriver à l'article 10 lors de l'examen article par article.
À l'article 22, page 14, on parle de cession. Si je comprends bien le système, il faut prévenir le contrôleur des armes à feu quand on a l'intention de procéder à une cession. L'article 26 stipule que le contrôleur des armes à feu vérifie si le cessionnaire est titulaire d'un permis et divers autres renseignements.
Dans ces conditions, pourquoi y a-t-il dans le projet de loi une disposition stipulant que c'est à la personne qui veut céder son arme de s'assurer que le cessionnaire est détenteur d'un permis, puisqu'il y a un article qui stipule expressément que le contrôleur des armes à feu doit faire exactement la même chose? Pourquoi faire reposer la responsabilité sur le cédant puisque la cession ne peut avoir lieu tant que le contrôleur des armes à feu ne s'est pas assuré que le cessionnaire était titulaire d'un permis? Pourquoi faire retomber cette responsabilité sur le cédant?
Mme Weiser: L'explication est en partie administrative. Il est tout à fait normal que les vendeurs de Canadian Tire, quand ils vendent une arme à feu, demandent à l'acheteur de leur montrer son permis. Il semblerait un peu superflu d'exiger que Canadian Tire entre toutes les données sur l'ordinateur pour les transmettre à un contrôleur des armes à feu au lieu de simplement demander à l'acheteur de montrer son permis.
M. Wappel: Mais il faut le faire en vertu de l'alinéa 22(a)(ii).
Mme Weiser: Il faut le faire une fois qu'on s'est assuré que l'acheteur a un permis. À ce moment-là, on communique avec le contrôleur des armes à feu pour s'assurer que ce permis est toujours valide et que la personne n'a pas été condamnée entre temps.
Il reste tout de même logique que le vendeur de Canadian Tire, par exemple, demande à l'acheteur de lui montrer son permis.
M. Ramsay: Je vais demander à M. Smith de s'approcher de la table et peut-être d'amener sa règle.
Des voix: Oh, oh!
M. Ramsay: Voici une cible qui a servi lors d'un concours il y a une semaine environ. Quand le ministre de la Justice a déposé ses propositions à la Chambre juste avant Noël, il a dit qu'on allait interdire certaines armes. Le critère était que la longueur du canon ne devait pas dépasser 105mm.
Nous avons ici une cible sur laquelle on a tiré d'une distance de 60 pieds avec une arme dont le canon faisait moins de 105mm. Je voudrais vous demander de mesurer l'espacement des impacts.
Monsieur le président, je n'ai jamais vu un corps humain qui ressemblait à cette cible. Je tenais à le dire clairement pour que ce soit noté.
Le président: Tout à fait d'accord. Je n'ai jamais vu quelqu'un qui ressemblait à cela non plus.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Je ne suis cependant pas allé à Wild Rose.
Des voix: Oh! oh!
M. Ramsay: Je vais le lui dire.
Des voix: Oh! oh!
M. Smith: Une façon de mesurer le groupement est de prendre l'écartement extrême, c'est-à-dire la distance entre le côté extérieur des deux trous les plus éloignés. Ici, elle est d'environ 72 millimètres, soit un peu moins de 3 pouces.
M. Ramsay: Est-ce un tir précis, à 60 pieds?
M. Smith: Tout dépend de l'arme. C'est excellent, pour une arme de poing.
M. Ramsay: Est-ce suffisant pour démentir l'argument selon lequel une arme de poing avec un canon de moins de 104 millimètres ne peut pas être précise?
M. Smith: Dans l'absolu la précision d'une arme à feu ne dépend pas strictement de la longueur de son canon. On ne peut pas dire que le canon d'une arme à feu de telle longueur lui permet d'être plus précise qu'un canon plus court. Généralement, cependant, plus le canon est court, moins l'arme est précise, ou moins elle a de chance d'en arriver à un groupement serré, comme vous l'avez indiqué.
M. Ramsay: Merci. J'ai une dernière question. Nous avons eu une semaine assez chargée. De fait, nous avons eu quatre semaines assez occupées. J'aimerais détendre l'atmosphère quelque peu.
Ai-je votre permission, monsieur le président?
Des voix: Oh! oh!
Le président: Si c'est pour détendre l'atmosphère, je veux bien.
M. Ramsay: Ma question s'adresse à Jim Hayes, qui semble n'avoir rien à faire.
Des voix: Oh! oh!
M. Ramsay: Je vous fais une citation.
Pour les 10 millions d'armes de par le Canada, je pense qu'un système d'enregistrement serait inapplicable et mal pratique compte tenu des faibles avantages qu'il pourrait rapporter.
Je crois que nous pourrions atteindre autrement la plupart de nos objectifs, c'est-à-dire en soumettant les utilisateurs à un système de permis. De cette façon, nous viserions la personne plutôt que l'objet et nous nous assurerions que ladite personne est vraiment apte à posséder un instrument dangereux tel qu'une arme à feu.
Cette déclaration a été faite le 8 avril 1976 par l'honorable Warren Allmand.
Des voix: Oh! oh!
Une voix: Qui est-ce?
M. Ramsay: Selon vous...
Le président: Je n'étais pas... [Inaudible]... à ce moment là.
M. Ramsay: Cette recommandation est-elle dépassée, selon vous, ou est-elle encore valable?
M. Hayes: Je vais répondre de la même façon que M. Mosley un peu plus tôt. Je pense que c'est une question politique. Je suis sûr que le ministre brûle du désir de parler de l'opinion de M. Allmand sur l'enregistrement des armes à feu en 1976.
Le président: Avez-vous terminé?
Une voix: Il ferait un bon politicien.
M. Ramsay: C'est tout, monsieur le président.
Le président: Il reste du temps pour une dernière ronde de questions. Il n'est pas encore 17 h 30. M. Speller, même s'il n'est pas membre, aimerait poser une question, avec la permission du comité. Je vais essayer d'être bref, en ce qui me concerne.
Soit dit en passant, j'ai fait cette déclaration lors de la présentation du projet de loi en 1976. L'informatique n'était pas aussi avancée à cette époque. Nous envisagions divers systèmes d'enregistrement. Je n'étais personnellement pas convaincu de la rentabilité d'une telle approche à ce moment-là. Après avoir entendu les représentants de la GRC, je trouve le nouveau système merveilleux. J'ai...
Des voix: Oh! Oh!
Le président: C'était il y a plus de 10 ans.
Ne partez pas, monsieur Smith. J'aimerais que vous entendiez ma question et y répondiez.
J'ai examiné les armes qui se trouvent sur la table. J'aimerais savoir si, selon vous, il y en a qui sont utilisées en compétition, aux Jeux olympiques, aux Jeux panaméricains ou lors d'autres compétitions internationales.
Le ministre a bien dit que l'interdiction de certaines armes de poing ne devait pas nuire aux compétitions légitimes. Il voulait interdire seulement les armes de poing non utilisées lors de compétitions, servant uniquement aux criminels, et non pas aux policiers ou aux militaires. En d'autres termes, les armes de poing du type des ``spéciaux du samedi soir'' et utilisées surtout par les criminels, non pas les tireurs de compétition, les policiers ou les militaires.
Y aurait-il une meilleure façon d'atteindre ce but que de s'en tenir strictement à la longueur du canon et au calibre? Les principales associations des tireurs de compétition ne pourraient-elles indiquer quelles armes leurs membres utilisent, de façon à ce que celles-ci soient légales et à ce que les autres soient interdites? Ne serait-il pas préférable de procéder de cette façon?
D'après ce que vous avez dit en réponse aux questions de M. Wappel, les critères que nous utilisons captent des armes qui ne sont pas vraiment des pistolets de poche, des armes qui peuvent être utilisées lors de compétitions.
Y a-t-il de ces armes qui sont utilisées en compétition? Y a-t-il une meilleure façon pour établir les exemptions pour la compétition que de s'en tenir à la longueur du canon?
M. Smith: Il n'y a pas vraiment de réponse à votre question. En ce qui concerne les armes de poing de calibre .25 que j'ai apportées, presque aucune ne convient au tir sur cible ou n'est utilisée pour le tir sur cible.
Les armes de poing de calibre .32, du moins pour ce qui est des modèle les moins cher comme ceux que j'ai sur la table, ne sont normalement pas non plus utilisés pour le tir sur cible. Les modèles les plus chers, cependant - comme le Walther - peuvent parfois être utilisés par les débutants en compétition, les tireurs qui ne sont pas de calibre olympique. Ceux-ci ne peuvent pas se payer des pistolets de qualité olympique.
ll y a beaucoup d'autres armes à poing de calibre .32 dans la même gamme de prix actuellement sur le marché. Elles ne seraient pas visées par l'interdiction, telle que proposée actuellement, et pourraient être utilisées par ces gens.
Certaines des armes que j'ai sur la table sont des pièces de collection et ne sont pas utilisées pour le tir sur cible. Ce sont des collectionneurs qui les achètent.
Pour ce qui est de la meilleure façon de décrire les pistolets de poche, on pourrait, entre autres, prendre comme critère la longueur totale de l'arme. Ce serait plus facile puisqu'il n'y aurait qu'une seule mesure à effectuer.
Pour ce qui est de consulter les groupes de tireurs au sujet des armes qu'ils utilisent, je pense qu'ils vous diraient qu'ils utilisent presque n'importe quoi. Ils utilisent les armes les plus pratiques.
Dans bien des cas, les compétitions sont conçues pour certaines armes bien précises, tout simplement parce qu'elles sont disponibles. Dans ce cas, c'est comme pour la poule et l'oeuf, la question est de savoir ce qui est venu en premier, la compétition ou l'arme.
Le président: Merci. Il reste encore deux minutes. Le comité est-il d'accord pour permettre à M. Speller de poser une question?
Des voix: Oui.
M. Speller (Haldimand - Norfolk): Merci, monsieur le président. J'aimerais revenir sur un point qui a été mentionné. J'avais une autre question en tête, mais je dois dire que les 10 millions d'armes ont piqué mon intérêt.
Comment avez-vous établi le nombre d'armes à feu dans le pays? Il devait y en avoir 10 millions en 1976, selon le ministre. Comment avez-vous procédé? Le nombre détermine le coût que le gouvernement devra assumer. Quelle formule avez-vous utilisée? Où sont passés les armes manquantes?
M. Hayes: C'est une question intéressante. Vous parlez d'armes manquantes... Aux fins des décisions parlementaires et ministérielles, nous avons toujours utilisé les chiffres... Angus Reid a procédé à un sondage en 1991. Il a été assez étendu puisqu'il a porté sur 10 000 ménages. Ce sondage nous a permis d'en arriver au chiffre global, y compris les armes à usage restreint, de 7 millions d'armes à feu au Canada.
Nos experts du ministère de la Justice ont confirmé les résultats du sondage Angus Reid, au moyen des chiffres de Statistique Canada établis à partir de l'enquête sur la population active et d'une base de données beaucoup plus étendue. C'était en 1976.
Notre ministère estime que le profil de la propriété des armes à feu au Canada, fondé sur les résultats de 1991, est valable et tout à fait représentatif.
Un des problèmes en ce qui concerne le chiffre utilisé.... Le chiffre mentionné au Parlement au milieu des années soixante-dix incluait en partie l'estimation des armes à feu aux mains des militaires. Nous pensons que celui avec lequel nous travaillons actuellement est solide et passablement juste.
C'est celui que nous avons utilisé dans un certain nombre d'hypothèses relatives au programme et à la charge de travail pour établir que la mise en oeuvre du programme pourra se faire de façon rentable.
Nous étions très conscients de la charge de travail que nous imposions aux provinces et aux corps policiers au titre de la gestion du programme.
M. Speller: J'ai encore une très brève question, monsieur le président...
Le président: Nous n'avons plus de temps. Est-ce une question supplémentaire?
M. Speller: Oui, une question qui fait suite à un échange un peu plus tôt...
Le président: Très bien.
M. Speller: ...au sujet de la vente des armes de poings prohibées.
Le nombre des personnes autorisées à les acheter diminuera constamment. Comment pourront-elles vendre leurs armes? Devront-elles les vendre à l'extérieur du pays ou...?
M. Mosley: Certaines les vendront en dehors du pays. Elles pourront également les échanger entre elles. Il y en aura qui...
M. Speller: Ces personnes seront de plus en plus âgées. Elles finiront par nous quitter.
M. Mosley: ...préfèreront céder leurs armes à un musée. Ou encore elles les mettront hors d'usage et les pendront au mur.
Le président: Je remercie une fois de plus les représentants du ministère de la Justice, du ministère du Revenu national et de la Gendarmerie royale du Canada d'être venus au Comité.
Lorsque nous en serons à l'étude article par article - au ministre de décider quand cette étude aura lieu évidemment - nous devrons avoir un certain nombre de hauts fonctionnaires qui puissent répondre aux questions. Nous devrons en avoir également qui nous aident avec les amendements et les articles.
La séance est levée jusqu'à demain matin à 9 heures.